Chapitre 9. De la crise des réseaux techniques à la crise des savoirs. La délégitimation des modèles de gestion urbaine de l’eau au Mexique
p. 214-231
Texte intégral
Introduction
1Depuis l’alternance politique de janvier 2019, les consultations officielles se multiplient au Mexique pour trouver un consensus autour de la réforme des lois fédérales de l’eau, ce en quoi le gouvernement antérieur avait échoué. Parmi les nombreux points d’achoppement, la gestion urbaine de l’eau occupe une place centrale, dans un contexte marqué par de fortes déficiences : distribution intermittente par le réseau, mauvaise qualité de l’eau, assainissement défaillant, inondations, etc., en particulier dans les périphéries urbaines [Lindon et al., 2015]. Ces difficultés sont la déclinaison locale d’un phénomène global qualifié de crise hydrique urbaine mondiale [Bakker, 2010], touchant principalement les pays en voie de développement ou émergents. Outre les difficultés des opérateurs urbains à répondre à la demande croissante des villes à partir des années 1970, les politiques de décentralisation, de libéralisation et de démocratisation entreprises à partir des années 1980 ont souvent abouti à la déstabilisation des régulations étatiques antérieures sans parvenir pour autant à engendrer un modèle de gestion plus efficace [Graham & Marvin, 2001]. Au Mexique, ces transitions institutionnelles inachevées se sont traduites par la superposition de dispositifs institutionnels contradictoires, des problèmes de coordination et une diminution des financements nécessaires à l’entretien et à l’extension des réseaux techniques [Herrera, 2017]. Dans ce contexte, les solutions à mettre en place pour répondre à cette crise font débat. Faut-il étendre les réseaux techniques existants ou instaurer des modèles alternatifs de gestion de l’eau ? Faut-il recourir à l’expertise des entreprises privées pour améliorer les services ? Quelles sont les meilleures solutions pour trouver et attribuer les financements nécessaires ? Faut-il augmenter les tarifs ou recourir aux subventions publiques ? Qui, enfin, doit avoir la maîtrise de la gestion urbaine de l’eau : les autorités publiques, le secteur privé, « la société civile » ou encore des institutions hybrides telles que les commissions de bassin ou les entreprises mixtes ? Longtemps circonscrite à des arrangements entre professionnels et technocrates à l’écart du débat public, la gestion urbaine de l’eau est désormais un enjeu ouvertement controversé.
2À rebours des analyses qui voient dans la crise des modèles de gestion urbaine de l’eau la conséquence mécanique de leur supposée incapacité à fournir un service de qualité et équitable [Bakker, 2010 ; Shiva, 2002], ce chapitre postule que leur mise en débat est le signe de la politisation de ces questions, qu’il convient dès lors d’analyser dans le prolongement des travaux s’intéressant aux liens entre gouvernement des villes et réseaux techniques [Lorrain, 2017]. Il combine pour cela une démarche attentive à la matérialité des infrastructures urbaines [Offner, 1993] et une approche sociologique visant à mettre en relation les positions et les prises de position des agents impliqués dans les débats qu’elles suscitent [Lorrain & Poupeau, 2014]. Si de nombreuses recherches ont montré en quoi les défaillances des institutions locales pèsent sur le fonctionnement des réseaux techniques [Botton, 2007] ou, à l’inverse, comment la configuration des systèmes de fourniture en eau influence les modes de gouvernement des villes [Jaglin, 2005], peu en revanche ont analysé comment les défaillances techniques et institutionnelles favorisent une remise en cause globale des savoirs dominants dans le secteur de l’eau et des crises politiques qui ne restent pas circonscrites au niveau local.
3Poursuivant cet objectif, cette contribution montrera comment des « experts-militants » forgent des alliances avec les usagers et opèrent un travail de diffusion de conflits locaux, de contestation et de contre-expertise leur permettant de promouvoir des modèles alternatifs de gestion et de se constituer en nouveaux protagonistes de l’eau au niveau national, remettant en cause le monopole des élites politico-administratives. Elle développe pour ce faire une perspective multiniveaux [Massardier et al., 2014] s’appuyant sur trois études de cas : deux conflits pour l’eau en périphérie de grandes agglomérations (Mexico et Saltillo) et la controverse nationale suscitée par la réforme de la Loi générale des eaux.
4En s’appuyant sur le recueil de données issues de la documentation technique concernant la disponibilité de la ressource, l’état du réseau et les alternatives proposées ainsi que sur des entretiens semi-directifs fournissant des informations sur le déroulement des conflits et sur les trajectoires sociales des individus impliqués, le chapitre étudiera en premier lieu la façon dont l’intervention d’experts-militants dans les conflits locaux a donné lieu à la proposition de deux alternatives censées garantir le droit humain à l’eau et la protection de l’environnement de façon plus efficace que la marchandisation ou la grande hydraulique promue par les pouvoirs publics : la remunicipalisation du service à Ramos Arizpe, en périphérie de Saltillo (I), et un modèle de gestion circulaire, basé sur le stockage et la réutilisation de la ressource, à Valle de Chalco, en périphérie de Mexico (II). Il analysera ensuite la manière dont ces mêmes experts font de la contestation des modèles de gestion un enjeu national, en s’appuyant sur ces expériences locales pour s’engager dans les controverses sur les lois fédérales de l’eau (III).
La construction sociale d’une lutte contre la privatisation de l’eau. Le cas de Ramos Arizpe
5Située au nord du Mexique, dans l’agglomération de Saltillo, la petite ville industrielle de Ramos Arizpe (90 000 habitants en 2019) connaît de graves pénuries en eau depuis l’installation d’usines appartenant à de grands groupes étatsuniens et de nouveaux travailleurs à partir des années quatre-vingt1. Si les interruptions prolongées du service urbain sont fréquentes, le phénomène varie selon les années, mais les données quantitatives à ce sujet sont rares. Les chiffres concernant l’année 2012, publiés exceptionnellement par l’opérateur urbain en 2013, indiquent que les usagers sont officiellement desservis quinze heures par jour en moyenne [AGRA, 2013]. Néanmoins, ces données doivent être considérées avec prudence, car elles concernent vraisemblablement la gestion de l’eau dans des conditions normales de fonctionnement. Or les dysfonctionnements sont monnaie courante. La recension de la presse locale au cours de l’année 2012 montre que de nombreux quartiers, comptabilisés par l’opérateur comme ayant reçu de l’eau quotidiennement, ont en réalité subi des interruptions très longues du service en raison de failles techniques, ayant duré parfois plus d’un mois. Bien que Ramos Arizpe se trouve dans une région semi-aride, les pénuries en eau ne sont pas la conséquence de la rareté de la ressource. La nappe phréatique, unique source d’approvisionnement, se trouve certes surexploitée, mais son assèchement ne constitue pas un risque immédiat. Elle demeure à court et moyen termes la source d’approvisionnement la plus sûre.
6S’il n’y a pas d’eau dans les réseaux, c’est principalement en raison d’infrastructures insuffisantes, mal entretenues ou défectueuses. En effet, les réseaux et la consommation se sont accrus plus vite que la capacité de l’opérateur urbain à s’approvisionner correctement en eau. Les douze puits d’extraction que compte la ville ne suffisent pas à couvrir la demande en eau potable et la faible profondeur des forages ne permet pas de faire face à l’affaissement saisonnier du niveau phréatique. En outre, le manque d’entretien et de renouvellement des infrastructures se traduit par des pannes récurrentes des pompes d’extraction et par des fuites entraînant la perte de 78 % de l’eau injectée dans le réseau en 2012 [ibid]. Créé en 1994 à la suite des politiques de décentralisation, l’opérateur municipal en charge de la gestion urbaine de l’eau jusqu’en 2013 ne parvient pas, faute de moyens financiers, à résoudre les problèmes suscités par l’expansion urbaine. Les subventions municipales et fédérales ne sont pas à la hauteur des besoins, tandis que les tarifs trop bas pour couvrir le coût réel du service ne sont pas acquittés par une grande partie des usagers. L’ensemble du personnel administratif fait par ailleurs l’objet de remaniements drastiques lors de chaque changement de mandat, entravant les possibilités d’apprentissage institutionnel et de planification à long terme.
7Si les interruptions du service touchent avec plus ou moins d’intensité l’ensemble de la ville, le taux global de desserte recouvre, à Ramos Arizpe comme dans de nombreuses autres municipalités, de fortes disparités sociospatiales2. Les quartiers les plus exposés aux interruptions de service se trouvent tous en périphérie de la ville, au sud-est et dans une moindre mesure à l’ouest de celle-ci. Il s’agit de lotissements populaires constitués de petites maisons mitoyennes fabriquées en série, dont le plus ancien date du début des années quatre-vingt-dix et les plus récents sont encore en construction au moment de l’enquête. S’il existe un service municipal de distribution par camion-citerne, censé pallier les défaillances du réseau, celui-ci est insuffisant, et les habitants aux revenus modestes de ces lotissements, qui occupent des postes peu qualifiés dans l’industrie, ne peuvent y recourir régulièrement sans grever leur budget aux services des prestataires privés. Les pénuries en eau se répercutent soit dans l’économie familiale soit dans une dégradation des conditions de vie : afin d’éviter des dépenses supplémentaires, les ménages limitent leur consommation au minimum, au prix d’une détérioration de l’hygiène.
8Face à cette situation, les premières réclamations prennent pour cible la mairie. Bien qu’elles soient un phénomène constant depuis les années quatre-vingt-dix, les interruptions du service d’eau s’avèrent particulièrement longues et répétées en 2011 et 2012, suscitant un vif mécontentement des usagers. Le service municipal de distribution par camion-citerne est accusé de desservir en priorité les adhérents du Parti révolutionnaire institutionnel (PRI), auquel appartient le maire, ce qui ne fait qu’accroître le sentiment d’injustice. Au cours de l’année 2011, des altercations verbales, relayées par la presse locale, éclatent aux abords des camions-citernes dans les quartiers les plus touchés par la pénurie. Des adhérents du PRI et des fonctionnaires sont pris à parti. En 2012, alors que les interruptions du service se répètent, les usagers continuent de recevoir chez eux les factures de l’opérateur municipal sans diminution des sommes exigées. Les médias locaux relaient les protestations des usagers, de plus en plus nombreux à refuser de payer leurs factures si la situation ne s’améliore pas : « On paie, et on paie encore, mais nous n’avons toujours pas d’eau. » En mars, tandis qu’un groupe d’usagers exige une amélioration immédiate du service, une bousculade se produit dans les locaux de la mairie entre les partisans du maire et les protestataires, obligeant l’élu et son service de sécurité à s’enfuir.
9Pour répondre au mécontentement, la municipalité décide de mettre en place un partenariat public-privé. À partir de janvier 2013, l’opérateur cesse d’être un service municipal pour devenir une entreprise mixte de droit privé, détenue à 51 % par la municipalité, à 49 % par une filiale du groupe espagnol AGBAR et à 1 % par le gouvernement de l’État du Coahuila. Ce nouvel arrangement institutionnel est censé améliorer la qualité du service dans la mesure où il s’accompagne d’un programme d’investissements dans les infrastructures d’approvisionnement. Cependant, les mesures mises en place pour les financer sont très mal perçues par les usagers. Le nouvel opérateur refuse en effet d’annuler les dettes accumulées par les usagers n’ayant pas payé leurs factures et menace de leur couper le service, rompant abruptement avec les pratiques habituelles de l’opérateur municipal précédent. Dès son entrée en fonctionnement, il augmente de surcroît l’ensemble des tarifs. Cette augmentation est d’autant plus mal perçue qu’elle intervient après deux ans de pénurie et sans que les effets des investissements prévus soient immédiatement perceptibles par les usagers. Ces derniers refusent dès lors de payer ou de payer plus cher un service qui demeure de mauvaise qualité.
10Si les augmentations tarifaires et le recouvrement des dettes peuvent s’interpréter comme un « choc normatif » rejeté par les usagers [Mayaux, 2015], l’intervention de deux experts, Victoria et Rodrigo González, contribuera à transformer ce rejet en une lutte contre la participation privée dans la gestion urbaine de l’eau [Bakker, 2010]. Analyser les trajectoires sociales entrelacées des deux partenaires de ce couple permet de comprendre les ressources qu’ils sont en mesure de mobiliser dans le conflit.
11Nés au milieu des années 1940, elle en Colombie et lui au Mexique, Victoria et Rodrigo González se rencontrent lors de leurs formations de master à l’université de Cornell, aux États-Unis. Ils décident ensuite de réaliser leurs doctorats à l’Institut Weizman, en Israël, en hydrologie pour elle et en biologie pour lui. Après l’obtention de leurs diplômes, ils s’installent à Saltillo, dont Rodrigo, appartenant à une famille de puissants notables locaux, est originaire. Victoria y exerce son métier d’hydrologue pendant plus de trente ans, travaillant pour le compte de nombreux établissements industriels et au sein de projets d’aménagement urbain et de traitement des déchets en partenariat avec les pouvoirs publics et des universités. Rodrigo alterne, quant à lui, des postes dans l’enseignement public supérieur ou dans la haute fonction publique et des expériences dans l’entrepreneuriat privé. En parallèle à leurs activités professionnelles, Victoria et Rodrigo González militent tous deux au sein de la Asociación de usuarios del agua de Saltillo (AUAS), dont ils font partie des membres fondateurs. Cette association s’oppose à la participation privée de la filiale du groupe espagnol AGBAR dans la gestion de l’eau à Saltillo depuis 2001, date à laquelle est créé l’opérateur public-privé, dénonçant une gestion opaque au détriment des usagers populaires. Victoria et Rodrigo s’engagent auprès des usagers de la ville voisine de Ramos Arizpe, en 2012, au moment où ils apprennent que le groupe AGBAR y entreprend des démarches auprès de la municipalité afin de mettre en place un partenariat public-privé similaire à celui de Saltillo. Victoria prend alors contact avec des militants associatifs de Ramos Arizpe proches du Parti des travailleurs afin de les alerter sur la situation. À l’issue des discussions, ces derniers décident de créer le Comite ciudadano del agua de Ramos Arizpe, qui lance des appels à manifester. Ces appels ne rencontrent cependant, dans un premier temps, quasiment aucun succès auprès des usagers. La plupart d’entre eux se montrent indifférents au changement de statut de l’opérateur municipal, et certains espèrent même que ce changement se traduira par une amélioration du service. Ce n’est que lorsque les augmentations de tarifs et le recouvrement des impayés sont décidés par le nouvel opérateur, quelques semaines après son entrée en fonction en janvier 2013, que de nombreux usagers font appel au comité citoyen, auquel Victoria apporte son soutien actif.
12Avec l’appui des militants de Ramos Arizpe, Victoria mène une intense campagne d’information et de mobilisation auprès des usagers dénonçant les augmentations de tarifs et la politique de recouvrement des impayés comme une conséquence directe de ce qui est décrit comme « une privatisation de l’eau ». Des distributions de tracts, des réunions d’information, du porte-à-porte et des diffusions par mégaphone sont organisés dans les quartiers les plus touchés par les coupures d’eau. La municipalité est accusée d’avoir « vendu l’eau » à des intérêts étrangers et la « multinationale AGBAR » d’avoir « volé l’eau » appartenant aux habitants de Ramos Arizpe. Forte de ses compétences techniques, de sa légitimé d’experte, de son réseau professionnel, mais aussi de sa proximité avec les élites politico-administratives par l’intermédiaire de son mari, Victoria parvient à obtenir des informations confidentielles sur le fonctionnement du nouvel opérateur et des interviews dans la presse locale, à qui elle fournit des documents détaillés prouvant que les augmentations tarifaires sont illégales et que les montants exigés pour s’acquitter des dettes sont arbitraires. Rodrigo écrit quant à lui des tribunes journalistiques dénonçant la privatisation de l’eau. Les manifestations organisées par le Comite ciudadano del Agua de Ramos Arizpe rencontrent cette fois beaucoup plus de succès. Les manifestants scandent en chœur « les Espagnols, dehors ! » et « l’eau est à nous ! » face aux bureaux de l’entreprise mixte et de la mairie. Victoria se charge d’autre part d’établir des liens avec l’ensemble des candidats aux élections municipales de 2014, à qui elle fournit des rapports techniques et juridiques détaillés. Sous la pression des manifestants, tous les candidats s’engagent à remunicipaliser le service lorsqu’ils seront élus. La remunicipalisation est finalement décidée un an après la mise en place du partenariat public-privé, dès la prise de fonction du nouveau maire.
13Profitant de ce nouveau contexte, Victoria cherche à faire de Ramos Arizpe « la première ville à garantir le droit humain à l’eau », reconnu officiellement par la Constitution fédérale mexicaine depuis 2012. Elle parvient à intégrer un comité technique participatif censé conseiller la nouvelle entreprise municipale pour mettre en place une politique tarifaire juste et améliorer la qualité du service. Loin de se restreindre à une fonction purement consultative, ce comité fait pression sur l’opérateur afin de modifier la gestion du service et de mettre en œuvre des changements opérationnels conséquents. La définition constitutionnelle du droit humain à l’eau reste vague sur sa définition et sur les moyens à déployer pour le garantir, Victoria en propose une interprétation particulière et réalisable à Ramos Arizpe selon ses calculs budgétaires : l’opérateur doit garantir tous les mois un volume d’eau gratuit aux usagers domestiques ; en dessous d’un certain seuil, la consommation en eau des ménages ne serait pas facturée. Cette mesure présenterait le double avantage d’inciter à la diminution de la consommation et d’éviter que l’incapacité à payer de certains usagers populaires ne soit discriminante pour l’accès à un service urbain essentiel. Cette mesure pourrait être financée à l’aide d’une péréquation tarifaire entre les usagers domestiques exonérés de paiement et le maintien de tarifs élevés pour les grands usagers industriels et commerciaux. En effet, ces derniers sont de loin les consommateurs d’eau les plus importants et fournissent à l’opérateur la majorité de ses revenus. Soucieux de calmer la contestation suscitée par les augmentations tarifaires mises en place par l’opérateur précédent, le maire entrant accepte d’instaurer ce dispositif qu’il présente dans la presse comme une innovation dans le pays. Néanmoins, cette mesure, coûteuse pour les finances de l’opérateur, ne se traduit pas par une amélioration de la continuité du service qui, au contraire, se détériore de nouveau, après une relative amélioration survenue pendant la gestion de l’opérateur public-privé, désormais démantelé. D’autre part, le conseil consultatif animé par les militants-experts se retrouve progressivement écarté de la prise de décision.
La légitimation d’un modèle circulaire de gestion de l’eau. Le cas de Valle de Chalco
14Si l’insuffisance des infrastructures hydriques est problématique, leur omniprésence dans le paysage urbain peut aussi constituer un important facteur de risque, d’autant plus si elles sont mal entretenues. C’est le cas à Valle de Chalco. À son échelle, cette municipalité située au sud-est de l’agglomération de Mexico offre un condensé de la relation complexe entre la ville et l’eau produite par l’urbanisation de la vallée de Mexico [Legorreta, 2006]. Son territoire de 46 km2, traversé par des canaux de drainage et partiellement recouvert par un lac, n’échappe pas aux inondations saisonnières, qui provoquent le débordement des canalisations, fissurent les digues, envahissent les habitations et entravent la circulation routière. Entourée de hauts reliefs et sujette à des précipitations abondantes, la vallée de Mexico ne dispose pas de sortie naturelle par laquelle l’eau peut s’évacuer. Avant son assèchement artificiel, elle abritait un ensemble de lacs et de marécages en lieu et place desquels s’est étendue la ville. Ainsi, la vallée dépend entièrement du bon fonctionnement des infrastructures techniques pour ne pas être inondée.
15Valle de Chalco doit en outre faire face à un problème lié à la présence d’importantes infrastructures hydrauliques sur son territoire : l’affaissement du sol provoqué par la surexploitation de la nappe phréatique. Du fait que la ville soit construite sur une épaisse couche de sédiment lacustre de composition argileuse, le sous-sol instable tend à s’affaisser en conséquence de la perte d’humidité qu’entraîne l’extraction d’eau souterraine, endommageant les habitations et les infrastructures hydrauliques. Tout comme Ramos Arizpe, Valle de Chalco dépend entièrement de la nappe phréatique pour son approvisionnement urbain. Les affaissements sont aggravés par le fait que ses eaux souterraines sont transférées vers la ville de Mexico. L’eau est extraite par une batterie de puits industriels qui, lorsqu’elle fut construite en 1984, se trouvait en périphérie de la ville. Au milieu des années quatre-vingt, l’affaissement du sol à proximité des puits donne naissance à un nouveau lac, formé par l’accumulation d’eaux usées et pluviales dans cette dépression topographique [Ortega Guerrero & Ortiz, 2007]. Or, à partir des années 1990, les puits se retrouvent cernés par d’importantes aires urbaines, dont la plus proche, Valle de Chalco, située à moins d’un kilomètre, devient plus vulnérable aux risques d’inondation3. Ceux-ci sont aggravés par la déformation du sol qui fragilise et modifie le fonctionnement des infrastructures hydrauliques de la région. C’est le cas du Canal général et du canal La Compañia, dont les digues se fracturent régulièrement4. L’affaissement du sol lacustre se traduit de plus par une diminution de la pente des drains, nécessaire à l’écoulement des eaux. Les canaux sont dès lors plus susceptibles de déborder5. Par ailleurs, les fissures ne concernent pas uniquement les infrastructures hydrauliques, mais touchent également les logements, suscitant un vif sentiment de vulnérabilité parmi les habitants, aggravé par les risques sismiques6.
16Le territoire urbain de Valle de Chalco est plus vaste et plus peuplé (350 000 habitants) que celui de Ramos Arizpe, et les problèmes suscités par la gestion de l’eau y sont plus étroitement corrélés à l’emplacement géographique des logements, si bien que les attentes des usagers sont plus diverses. Elles peuvent se résumer autour de quatre axes : la limitation de l’expansion urbaine, facteur de stress hydrique ; la prévention des inondations et des affaissements ; l’obtention de réparations pour les dommages subis ; et, pour les usagers les plus exposés, un relogement loin des zones à risques. Contrairement à Ramos Arizpe, le mécontentement ne s’est pas exprimé à Valle de Chalco par un mouvement de contestation unifié, mais par une multitude de petits conflits dispersés et sporadiques de plus ou moins forte intensité ne se déroulant pas nécessairement de façon simultanée.
17À l’image du conflit de Ramos Arizpe, certains de ces conflits sont façonnés par l’intervention de militants-experts qui cherchent à construire des cadres d’interprétation pour les problèmes suscités par la gestion de l’eau, à fournir des argumentaires techniques et politiques aux usagers et à proposer des alternatives aux modèles de gestion dominants. Juan Cuauhtémoc et Caterina Stalker occupent à cet égard une position analogue à celle de Victoria et Rodrigo González à Ramos Arizpe. Comme eux, ce couple composé d’un Mexicain et d’une étrangère cumule une certaine proximité avec les élites politico-administratives du fait de l’appartenance familiale du mari et des compétences spécialisées acquises dans des universités à l’étranger. Titulaire d’un doctorat en planification et développement de l’université de Liverpool, en Angleterre, appartenant à une famille aristocratique, Juan Cuauhtémoc est enseignant-chercheur dans la prestigieuse université autonome métropolitaine. Caterina Stalker, de nationalité étatsunienne, est titulaire d’une licence obtenue aux États-Unis et dirige un centre de recherche spécialisé en développement durable financé en partie par l’université où enseigne son mari et grâce à la réalisation de divers travaux pour le compte d’institutions publiques, des municipalités principalement. Avec d’autres chercheurs, Juan et Caterina décident de créer en 2008 la Commission de bassin des rivières Amecameca et La Compañia, dans le but de mettre à profit les mécanismes participatifs prévus par la loi pour trouver des solutions aux problèmes de gestion de l’eau du bassin versant de Valle de Chalco. Pour ce faire, une importante fondation philanthropique privée, que préside le frère de Juan, finance une étude qui sera coordonnée par Caterina. Après quatre ans de recherches, la Commission de bassin élabore un plan de ressource en eau — qui va bien au-delà des préoccupations initiales des usagers — comportant des préconisations techniques et institutionnelles pour transformer radicalement le modèle de gestion de l’eau.
18En écho aux revendications des usagers, les préconisations de ce plan prônent la limitation de l’expansion urbaine tant que les conditions de l’approvisionnement en eau et du renouvellement des nappes phréatiques ne sont pas assurées. Mais, au-delà, elles opposent au modèle de gestion linéaire — importation, consommation et évacuation — qui implique la consolidation et l’extension d’équipements de grandes tailles gérés de manière centralisée, un modèle circulaire centré sur le stockage et la réutilisation à l’aide d’équipements de petite taille susceptibles d’être gérés de façon décentralisée [Souami, 2012]. En ce sens, la Commission de bassin considère comme une aberration écologique et financière la construction de nouveaux « mégatunnels » pour résoudre les inondations à Valle de Chalco. Pour un coût estimé à un quart de celui destiné aux tunnels, elle propose un ensemble de solutions intégrées censées être plus efficaces et durables. Le plan de ressource en eau de la Commission de bassin contient des recommandations pratiques fondées sur des enquêtes empiriques et techniques censées être réalisables avec un budget raisonnable dans le but d’améliorer la gestion des inondations et de l’approvisionnement en eau, tout en rompant avec le modèle consistant à drainer la vallée, hérité de la colonisation espagnole et toujours en vigueur. En ce sens, il s’inscrit en premier lieu dans le mouvement global critiquant les grands réseaux techniques [Coutard & Rutherford, 2015]. En second lieu, sa démarche vise à subvertir les modes de prise de décision verticaux en vigueur dans le secteur de l’eau. Alors que les grands projets fédéraux sont habituellement décidés par le pouvoir exécutif au plus haut niveau et élaborés par les ingénieurs hydrauliques de la Comisión nacional del agua (Conagua), une puissante bureaucratie centralisée, le plan de ressource en eau est, lui, le résultat de quatre ans de recherches pluridisciplinaires (hydrologie, ingénierie environnementale, sociologie et géographie) conduites dans le cadre d’une démarche participative, et de réunions avec les différentes autorités locales.
19Les critiques acerbes de Juan et Caterina aboutiront à des tensions entre la Commission de bassin et la direction de la Conagua. Finalement, les deux militants-experts n’obtiennent pas les financements publics nécessaires pour approfondir les études et mettre en œuvre leurs propositions. De plus, la Commission de bassin connaît des difficultés liées à ses attributions limitées par la loi. Son but officiel est d’assister la Conagua dans l’exécution de ses pouvoirs en garantissant une concertation avec les parties prenantes des politiques publiques, et de promouvoir la gestion intégrée de l’eau du bassin versant en proposant des programmes pour améliorer la gestion de l’eau, développer des infrastructures hydrauliques et préserver la ressource. Toutefois, malgré ces objectifs ambitieux, en général, les commissions de bassin n’ont pas de pouvoir de décision, leur statut étant uniquement consultatif. La Conagua reste la seule responsable de l’attribution des licences d’exploitation de l’eau, de la récupération des taxes dédiées à l’eau et des programmes d’investissement fédéraux.
Quand la contestation devient nationale. Le cas des controverses autour des lois fédérales de l’eau
20Si la remunicipalisation à Ramos Arizpe ne se traduit ni par l’amélioration de la continuité du service ni par l’intégration durable de militants-experts à la prise de décision, et si l’ambitieuse prospective de la Commission de bassin reste lettre morte à Valle de Chalco, il ne faudrait pas en conclure pour autant que l’émergence de ces alternatives s’avère sans effets. Elle permet aux acteurs qui la portent d’acquérir des compétences et de la légitimité pour participer à la gouvernance de l’eau au niveau national, amorçant une reconfiguration du jeu des acteurs de la production des politiques publiques de l’eau et préfigurant de potentiels changements dans les choix effectués en la matière. Confrontés aux réticences des décideurs locaux, à leur manque de moyens et surtout à la centralisation du système politique mexicain, les experts-militants cherchent à peser dans les débats législatifs nationaux dans le but d’infléchir les politiques publiques urbaines au niveau fédéral.
21Ils bénéficient pour cela d’une opportunité exceptionnelle : l’intégration du droit humain à l’eau dans la Constitution mexicaine en février 2012, qui doit se traduire par la mise en place d’une nouvelle Loi générale des eaux (Ley general de aguas, LGA) remplaçant intégralement le cadre légal de la gestion de l’eau en vigueur depuis 19927. Les dirigeants de la Commission de bassin n’entendent pas laisser à la bureaucratie fédérale de l’eau la possibilité de rédiger puis de faire approuver par le pouvoir législatif cette nouvelle loi. Ils organisent donc un congrès, en décembre 2012, nommé « Les citoyens et la soutenabilité de l’eau au Mexique », auquel participeront également les experts impliqués dans la remunicipalisation à Ramos Arizpe. Mettant à contribution un important capital social dans le monde universitaire et militant, les dirigeants de la Commission de bassin réussissent à faire de ce congrès un événement d’ampleur nationale8 dont l’objectif est de formuler des propositions collectives pour la Loi générale des eaux. Il est décidé de rédiger intégralement, de manière collaborative, une proposition citoyenne de loi. Les experts-militants impliqués dans les conflits de Valle de Chalco et de Ramos Arizpe jouent un rôle central dans ce réseau. Juan et Caterina se retrouvent à la tête de la « coordination nationale » chargée de rédiger et de promouvoir la proposition de loi citoyenne, tandis que Victoria participe à l’élaboration de cette loi en mettant à contribution ses compétences techniques en matière d’assainissement et de gestion des services urbains. Elle et son mari sont par ailleurs invités dans différentes villes du pays pour parler de leur expérience concernant la lutte contre la privatisation de l’eau et la remunicipalisation des services urbains, et sont auditionnés par les commissions parlementaires consacrées à la gestion de l’eau. Loin de constituer des cas isolés, ils sont en mesure de consolider des alliances durables avec des experts-militants aux profils similaires. La légitimité de ces derniers repose souvent sur des compétences spécialisées acquises à l’étranger et sur une implication dans des conflits locaux, ce qui leur permet de contester la légitimité même des réformes de la Loi générale des eaux promue par la bureaucratie hydrique nationale.
22L’intervention de ces acteurs génère dès lors un débat sans précédent concernant la politique de l’eau nationale. En effet, les lois fédérales de l’eau sont directement élaborées par le pouvoir exécutif depuis 1929. La Loi des eaux nationales de 1992 est la première à être l’objet d’une discussion publique, mais celui-ci est resté cantonné à l’arène parlementaire et n’a pas empêché son adoption. À l’inverse, les débats concernant la Loi générale des eaux commencent trois ans avant les discussions législatives, dans le cadre du congrès de 2012, et se prolongent par de multiples rencontres organisées pour l’essentiel dans des universités. La polémique acquiert davantage de visibilité entre 2014 et 2015, lorsqu’elle devient un sujet médiatique mentionné par de nombreux articles de presse et par des interventions dans les principales stations de radio et dans des journaux télévisés nationaux. En alliance avec les experts, des députés de l’opposition soumettent la proposition citoyenne aux discussions législatives, en mars 2015. Pour la première fois, la proposition de loi officielle élaborée par l’exécutif fédéral n’est pas la seule à être présentée. Rapidement, le débat se polarise autour de ces deux propositions antagoniques. La proposition de loi officielle rédigée par les services juridiques de la Comisión nacional del agua cherche, d’après ses défenseurs, à améliorer la régulation des pratiques pour rendre la gestion plus efficace. Cela implique, entre autres, de consolider un cadre normatif favorisant l’investissement privé dans la gestion de l’eau, par la création d’un régime de concessions, et d’actualiser les normes de la construction de grandes infrastructures hydrauliques. En revanche, la proposition citoyenne de loi cherche à modifier radicalement le fonctionnement de la gestion de l’eau dans le pays, au niveau tant technique que politique. Parmi ses points les plus marquants figurent un contrôle étroit des entreprises privées intervenant dans la gestion de l’eau et de sévères restrictions concernant de nouveaux transferts d’eau entre bassins versants. La proposition demande également à ce que l’ensemble des politiques hydriques du pays soit conçu par des instances participatives dotées d’un véritable pouvoir de décision et d’un budget adapté, réduisant la Comisión nacional del agua à un rôle d’exécutant technique.
23Le 9 mars 2015, les discussions législatives à propos de la Loi générale des eaux sont suspendues pour un temps indéterminé : les députés de la majorité craignent le ralliement de l’opposition de gauche à la proposition citoyenne. Il s’agit d’une décision officielle inattendue, qui marque le point culminant d’une longue polémique. Présentée comme une victoire par les promoteurs de la proposition de loi citoyenne, la suspension des discussions législatives s’est cependant avérée finalement insatisfaisante pour les deux parties. L’approbation de la proposition officielle de loi fut freinée, mais les militants n’ont obtenu la mise en œuvre d’aucune des politiques publiques considérées comme nécessaires. Cette déstabilisation se traduit cependant par un renforcement de la perte de légitimité de la bureaucratie fédérale de l’eau ainsi que de certains des instruments de gestion qu’elle promeut, en particulier la participation privée, la tarification au coût complet et la construction de grandes infrastructures hydrauliques. Si la controverse nationale perd en intensité après 2015, elle se retrouve en des termes similaires au sein des États fédérés, où les projets de réforme législative s’inspirant de la proposition de Lois générale des eaux issue de la bureaucratie fédérale se heurtent à des résistances et à des contre-propositions émanant d’experts proches des universités.
Conclusion
24Ce chapitre met en évidence un aspect peu étudié de la crise hydrique urbaine, celui de sa production sociale. La croissance urbaine rapide et non planifiée des villes mexicaines depuis les années 1980 se traduit par l’urbanisation de territoires à risques et par une extension défectueuse des réseaux techniques, dont les dysfonctionnements sont accentués par le manque chronique d’entretien. Cette crise des infrastructures suscite l’émergence d’une multitude de conflits locaux pour l’eau, dispersés et sporadiques. Toutefois, elle n’explique pas à elle seule la remise en question de la légitimité des modèles de gestion de l’eau. Cette remise en question est le résultat, dans un contexte favorable suscité par le mécontentement des usagers, du succès d’un travail de mobilisation et de contre-expertise opéré par des militants-experts, qui construisent des cadres d’interprétation politiques et techniques de la crise. Forts de la légitimité acquise par leur implication dans ces conflits locaux, ces nouveaux protagonistes de l’eau intègrent les arènes nationales de débat où, s’ils ne parviennent pas à imposer leurs points de vue, ils se retrouvent néanmoins en mesure de mettre en échec les projets de réforme de lois voulus par la bureaucratie fédérale de l’eau, ce qui se traduit, en retour, par un gain de légitimité des contestations auxquelles ils participent au niveau local. On assiste ici à un phénomène de « double jeu » entre local et national similaire à celui décrit par Yves Dezalay, entre national et international [Dezalay, 2004]. Cependant, ce dernier échelon, international, n’est pas absent dans la dynamique étudiée, mais en constitue au contraire l’un des soubassements : l’attention portée aux trajectoires des militants-experts et aux ressources qu’ils mobilisent permet de mettre en lumière l’importance de l’international, non pas en tant qu’arène, comme cela a été plus généralement étudié, mais en tant que ressource mobilisée pour s’imposer dans les arènes locales, puis nationales.
25Ce processus est cependant partiel, inachevé et incertain. La fermeture et la centralisation du régime politique de l’eau au Mexique font que ces nouveaux experts ne peuvent être intégrés dans les débats autour de la gestion urbaine de cette ressource autrement que par le conflit, limitant par conséquent leur capacité à intervenir dans la production des politiques publiques et à mettre en œuvre les alternatives auxquelles ils aspirent. La victoire massive du nouveau parti de gauche, MORENA, aux élections locales et nationales de juillet 2018 a pu susciter dans un premier temps des espoirs autour d’une véritable transformation de la politique de l’eau, en rupture avec celle des gouvernements antérieurs. Pourtant, le renouement avec une conception verticale et centralisée de la prise de décision publique renforce désormais le mécontentement d’une grande partie des experts de l’eau, qui accordent peu de crédit aux consultations officielles mises en place. En effet, si le nouveau gouvernement, contrairement à ces prédécesseurs, se déclare proche des mouvements sociaux et ne promeut pas ouvertement la marchandisation des services et la grande hydraulique, il remet en cause la participation d’experts en dehors de l’État, écartant ceux-ci de la formulation des politiques publiques, ce qui préfigure l’éclatement de nouveaux conflits.
Bibliographie
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10.3917/flux.088.0007 :Notes de bas de page
1 Les interruptions fréquentes et prolongées de la distribution en eau par le réseau urbain de cette municipalité ne sont pas exceptionnelles au Mexique. Selon l’Enquête nationale des ménages de 2014, dans les localités de plus de 2 500 habitants, un quart des habitations connectées au réseau ne sont pas desservies quotidiennement [INEGI, 2014].
2 Selon les données d’un rapport publié par l’opérateur de Ramos Arizpe en 2013, sur les quatre-vingt-dix quartiers que compte la ville en 2012, seuls cinquante-quatre bénéficient d’un service quotidien tandis que vingt-cinq reçoivent de l’eau moins de quatre jours par semaine [AGRA, 2013].
3 Le sol s’affaisse à une vitesse de quarante centimètres par an en moyenne. Son niveau à proximité des puits en 2016 est ainsi inférieur de douze mètres à celui de 1984. Le nouveau lac s’étend quant à lui à une vitesse de soixante hectares par an entre 1991 et 2006, menaçant d’inonder Valle de Chalco [Ortega Guerrero & Ortiz, 2007].
4 À l’issue de pluies intenses, le premier juillet 2000, une fracture des digues du canal La Compañia provoque l’inondation de plus de 3 500 habitations par des eaux usées atteignant jusqu’à 2,5 m de hauteur et stagnant pendant une quinzaine de jours. Le 5 février 2010, une nouvelle rupture du canal La Compañia touche cette fois 1 600 logements, pendant dix jours [CCRAC, 2011].
5 Obstrué par des déchets, le canal déborde à plusieurs reprises pendant l’été 2015, inondant les quartiers avoisinants [Ortega Guerrero & Ortiz, 2006].
6 Les fissures concernent 85 % des sols de la municipalité de Valle de Chalco en 2011 [CCRAC, 2011].
7 En plus d’introduire le « droit à l’accès, la disposition et l’assainissement de l’eau pour la consommation personnelle et domestique », la réforme constitutionnelle de février 2012 précise que celui-ci doit être garanti par les différents niveaux de gouvernement avec la participation des citoyens.
8 Le congrès réunit sept réseaux de recherche, soixante-deux organisations citoyennes (commissions de bassin, ONG, comités de victimes environnementales) et deux cent un universitaires appartenant à quatre-vingt-dix institutions des vingt-six États du Mexique.
Auteur
Doctorant en sociologie au Centre de recherche et de documentation sur les Amériques (UMR 7227), Amaël Marchand travaille sur la gestion multiniveaux de l'eau au Mexique. Il a participé entre 2014 et 2018 au projet de recherche international ANR Bluegrass «The struggles for the blue gold» sur les conflits pour l'eau dans les Amériques, et il coordonne actuellement, au sein de l’université Sorbonne Nouvelle, le projet de recherche Cuencomun « Gouvernance sectorielle de l'eau au Mexique : les conseils de bassin au prisme des communs », financé par l’Agence française pour le développement. Il a notamment publié «Activist and the Hydrocracy. Water conflicts in the unfinished democratic transition context of Mexico », dans le livre Water Conflicts and Hydrocracy in the Americas: Coalitions, Networks, Policies codirigé par Franck Poupeau, Lala Razafimahefa, Jérémy Robert, Delphine Mercier, Gilles Massardier & Pedro Roberto Jacobi (IEE-ISP, 2018) et « Coproduire une gestion écologique de l’eau : échanges entre universitaires et habitants en périphérie de Mexico», à paraître dans la revue Espaces et Sociétés.
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