Roullet De La Bouillerie (François-Marie-Pierre)
p. 117-129
Plan détaillé
Texte intégral
1Né à La Flèche (Sarthe) le 27 avril 1764
Décédé à La Flèche le 7 avril 1833
Fils de Gabriel ROULLET, Sieur de LA GRANGE et de LA BOUILLERIE (1729-1799) et de Charlotte BELIN (1727-1809)
Sous-secrétaire d’État des Finances du 9 mai 1816 au 29 décembre 1818
2© Collection privée.
I. LA FAMILLE.
FAMILLE PATERNELLE.
3Famille bourgeoise venue de Sablé (Sarthe) à La Flèche (Sarthe), déjà dans les affaires de finance au xviie siècle.
41. [trisaïeul] Pierre ROULLET, sieur de La Grange, né et décédé à Sablé (30 octobre 1647-4 mai 1721), receveur de l’insinuation des actes, huissier audiencier au siège et marquisat de Sablé, marié à Marguerite LEFEBVRE, d’où :
52. [bisaïeul] Pierre ROULLET, sieur de La Grange, bourgeois de La Flèche, intéressé dans les Fermes du roi, décédé avant son père. Il épousa à Solesmes le 23 avril 1696 Perrine ROLLÉE, fille de Louis ROLLÉE, sieur de La Querrière, contrôleur au grenier à sel de Château-Gontier, d’où :
63. [aïeul] Gabriel ROULLET, sieur de La Grange, né à Sablé en 1685, décédé à La Flèche le 30 juillet 1745, directeur des Aides à La Flèche. Il épousa à La Flèche (paroisse Saint-Thomas) le 25 janvier 1724 Marie FOUCHER, décédée à La Flèche en 1759, d’où :
7A. [tante] Marie-Julienne-Françoise ROULLET de LA GRANGE, née et décédée à La Flèche (v. 1725-18 mars 1793), mariée à André-Louis LE ROY de LA MOTHE.
8B. [père], qui suit 4.
94. [père] Gabriel-Joseph ROULLET, sieur de LA BOUILLERIE, né et décédé à La Flèche (3 septembre 1729-15 Brumaire an VIII, 6 novembre 1799), trésorier de France au Bureau des finances de Tours. Il épousa à La Flèche (paroisse Saint-Thomas) le 5 mars 1753 Louise-Françoise-Josèphe-Charlotte BELIN, d’où :
10A. [sujet de cette notice] François-Marie-Pierre ROULLET de LA BOUILLERIE.
11B. [frère] Alexandre-Pierre ROULLET de LA BOUILLERIE, né et décédé à La Flèche (14 février 1767-… août 1852), officier de Chasseurs (1788), maire de La Flèche (1808), sous-préfet de La Flèche (1814), chevalier de Saint-Louis, anobli par L. P. du 17 août 1816. Il épousa à La Flèche le 6 mars 1794 Marie-Louise ESTARD de BASCARDON, d’où :
- [neveu] Alphonse-Sébastien-Louis ROULLET de LA BOUILLERIE, né et décédé à La Flèche (1795 ?-1847), maître des requêtes au Conseil d’État, intendant du Trésor de la Couronne de 1815 à 1830. En 1839 il prit la direction de la nouvelle compagnie d’assurances La Providence, créée par un réseau de riches légitimistes. Il fut chargé de gérer la fortune du duc de BORDEAUX mineur et se consacra activement à des œuvres caritatives. Il eut au moins un fils et une fille :
- [petit-neveu] Marie-Joseph-Mélite ROULLET de LA BOUILLERIE (1822-1894). Passé de la compagnie d’assurances La Providence à la banque DELAHANTE en 1845, il épousa en 1856 Sophie DELAHANTE, fille de Gustave. Il fit une brève carrière politique de 1871 à 1875 comme député légitimiste. Après l’échec de la restauration, il se consacra aux Cercles catholiques ouvriers, où il espérait trouver le germe d’une réorganisation sociale d’inspiration monarchiste.
- [petite-nièce] Marie-Françoise-Louise ROULLET de LA BOUILLERIE, mariée le 4 octobre 1846 à son cousin Louis-Marie-Philippe-Henri ROULLET de LA BOUILLERIE, dernier fils du sous-secrétaire d’État sujet de cette notice [voir infra].
- [nièce] Alexandrine-Marie-Françoise ROULLET de LA BOUILLERIE (1801-1881), mariée le 9 octobre 1821 à Hyacinthe-Gabriel LANCELOT de QUATREBARBES, inspecteur des finances.
FAMILLE MATERNELLE.
121. [bisaïeul] Marie-Joseph BELIN, sieur de LANGLOTIÈRE, assesseur en l’élection de La Flèche, marié à Marie DESBOIS, d’où :
132. [aïeul] Louis-Joseph BELIN, sieur de LANGLOTIÈRE, lieutenant criminel assesseur en l’élection de La Flèche, marié à La Flèche le 29 juillet 1710 à Marie-Geneviève DAVOUST, fille de Sébastien DAVOUST, sieur de LA MASSELIÈRE, maire perpétuel de La Flèche, et de Jeanne DAUZY, d’où :
14A. [tante] Marie-Françoise-Geneviève BELIN, née et décédée à La Fléche (1720-13 novembre 1809), mariée à François-Sébastien-Pierre BELIN.
15B. [mère] Louise-Françoise-Charlotte BELIN, née et décédée à La Flèche (vers 1727-31 octobre 1809).
MARIAGE
16[Sur un premier mariage qui aurait été contracté avec une demoiselle de LA CHAPELLE, voir infra IV. 1.]
17François-Marie-Pierre ROULLET de LA BOUILLERIE épousa à La Flèche le 13 octobre 1807 Anne-Mélite de FOUCAULD, née à La Flèche le 24 février 1780, décédée au château de La Barbée (Sarthe) le 10 décembre 1859, fille de François-Joseph de FOUCAULD, mestre de camp, chevalier de Saint-Louis, marquis de JARZÉ par L. P. d’octobre 1781, décédé le 2 septembre 1802, et de Marie-Augustine-Victoire PIHERY (1757-1820), lesquels s’étaient mariés à La Flèche le 15 décembre 1777.
18Anne-Mélite de FOUCAULD était, par son père, petite-fille de Charles de FOUCAULD et de Catherine LE MORT. Elle était, par sa mère, petite-fille de Louis-Gabriel PIHERY, chevalier, seigneur de Maigné-le-Vicomte, président en l’élection de La Flèche, et d’Anne-Françoise FONTAINE de MORDROY, lesquels s’étaient mariés à La Flèche (paroisse Saint-Thomas) le 14 juin 1756. Louis-Gabriel PIHERY avait un frère, Jean-Baptiste-Marie PIHERY, sieur de SIVRÉ, qui était trésorier de France grand voyer à Tours. Anne-Françoise FONTAINE de MORDROY avait deux cousins germains FONTAINE, qui furent tous deux receveurs des tailles à La Flèche, et qui acquirent, l’un en 1700, l’autre en 1713 une charge anoblissant de secrétaire notaire du roi à la Grande Chancellerie.
19Anne-Mélite de FOUCAULD avait un frère et une sœur :
- [beau-frère] François-Louis-Charles de FOUCAULD, appelé marquis de FOUCAULD, né le 18 octobre 1778 à La Flèche, décédé au château de La Grifferie, près de La Flèche, en juin 1879. Émigré rentré sous le Consulat, payeur des armées en 1806, inspecteur des finances en 1807, sous-préfet d’Ancenis en 1815, destitué par DECAZES, député villéliste.
- [belle-sœur] Marie-Henriette-Hélène-Arsène de FOUCAULD, dame chanoinesse de Sainte-Anne de Munich.
20De son mariage avec Anne-Mélite de FOUCAULD le sous-secrétaire d’État des Finances eut quatre enfants :
21A. [fils] Louis-François-Marie ROULLET de LA BOUILLERIE, né à La Flèche le 27 janvier 1808, décédé le 4 mars 1870. Marié en 1839 à Adrienne-Henriette de LESTAPIS.
22B. [fils] François-Alexandre ROULLET de LA BOUILLERIE, né à Paris le 1er mars 1810, décédé à Bordeaux le 8 juillet 1882. Prêtre (1841), vicaire général de l’archevêque de Paris, évêque de Carcassonne (1855), coadjuteur de l’archevêque de Bordeaux (1872) archevêque de Perga in partibus (1873).
23C. [fils] Napoléon-Charles-Marie ROULLET de LA BOUILLERIE, né le 16 février 1812, marié à Julie-Zéphirine-Marie MATHIEU de REICHSHOFFEN.
24D. [fils] Louis-Marie-Philippe-Henri ROULLET de LA BOUILLERIE, né le 3 mai 1821, décédé à Montpellier le 13 avril 1883, marié le 4 octobre 1846 à Marie-Françoise-Louise ROULLET de LA BOUILLERIE, fille de son cousin germain.
II. LE PERSONNAGE
Les études.
25Il a très probablement fait ses études au collège de La Flèche.
La religion.
26Il était de confession catholique, dans une famille qui a embrassé avec ardeur la cause légitimiste au xixe siècle et milité en faveur du catholicisme social qui lui a été associé.
Le portrait.
27Collection privée.
Les domiciles et résidences.
28En 1811 il était domicilié à Paris 48, rue de la Victoire. Au début de la Restauration il résida aux Tuileries où se trouvaient les services de l’Intendance générale de la Maison du roi, puis ces services furent installés au 121 de la rue de Grenelle, qu’il habita jusqu’en 1830. Après 1830 il se retira dans son château de LA BARBÉE, à Bazouges-sur-le-Loir.
Les distinctions honorifiques.
29Napoléon le fit baron de l’Empire par L. P. du 11 juillet 1810. Armoiries : « De gueules au chevron d’argent, surmonté d’un croissant du même, et accompagné de trois pommes de pin d’or ; au franc-quartier senestre de gueules chargé d’un portique de deux colonnes surmontées d’un fronton d’argent, accosté au cœur des lettres DA du même. » Charles X le fit comte pat L. P. du 6 novembre 1829, avec les mêmes armes, moins le franc-quartier.
30Légion d’honneur : commandeur (30 juin 1811), grand-officier (1er mai 1821).
Le testament.
31Il est décédé intestat.
La sépulture.
32Cimetière Saint-Thomas à La Flèche, carré N° 1, tombe N° 575, sépulture familiale subsistante.
III. LA FORTUNE
33Dans le contrat de mariage SSP du 19 janvier 1724, Gabriel ROULLET de LA GRANGE, aïeul du sous-secrétaire d’État, déclara apporter en mariage 38 000 livres, mais les apports de la future épouse ne furent pas évalués. À la génération suivante, dans le contrat de mariage des parents du sous-secrétaire d’État du 13 mars 1755, furent déclarées à l’Enregistrement 101 240 livres pour apports des deux futurs conjoints, mais sans que fût précisée la part de chacun.
34Au décès de Gabriel-Joseph ROULLET de LA BOUILLERIE, père du sous-secrétaire d’État, sa veuve et ses enfants déclarèrent pour sa succession propre, en Floréal an VIII (mai 1800) :
35MOBILIER
36La moitié des meubles, estimée à 2 116
37Une rente de 690 F, due par CHEREAU-LA BOULLAY, de Saumur 13 800
38Une rente de 8 F, due par la veuve FAUTRAS, de Saint-Loup 170
3916 086
40IMMEUBLES PROPRES, évalués en revenu
41Une maison à La Flèche, occupée par la veuve 320
42La maison de maître de La Bouillerie et le domaine 503
43La métairie de La Bouillerie 600
44La Prévellière 400
45La Blussière 500
46La métairie de La Pochetière 600
47La closerie de Taffary 415
48La ½ de la métairie de La Baudinière (acquêt de communauté) 367
49Total du revenu propre au défunt 3 705
50Soit en capitalisant à 5 %, 74 110 F.
51À ces 90 196 F (16 086 + 74 110), s’ajoutèrent les biens meubles et immeubles situés dans le ressort de l’Enregistrement de Châteauneuf-sur-Sarthe (Maine-et-Loire), ce qui porta l’ensemble de la succession propre du défunt à 117 106 F.
52Par son contrat de mariage du 17 octobre 1807 le futur sous-secrétaire d’État adopta un régime matrimonial qui excluait toute communauté de biens. Sa future épouse apportait la terre de Vion, à Vion et Parcé-sur-Sarthe, et une métairie à Chamecy ( ?), le quart des biens de la succession de son père, ses droits dans une habitation à Saint-Domingue, plus divers meubles évalués en tout à 15 000 F. Par ce contrat, le futur époux fit donation à la future épouse d’une rente viagère de 12 000 F, d’une somme de 24 000 F en meubles meublants et d’un deuil de 3 000 F. Il affecta à la garantie de ces stipulations sa terre de La Barbée avec ses dépendances, sises à Bazouges, Gouis et Durtal, ce qui prouve qu’en 1807 il était déjà propriétaire de La Barbée et que ce domaine valait plus de 150 000 F (en fait il devait valoir plus de 250 000 F, ainsi qu’il résulte de la liquidation de la succession du mari en 1833). Comme la succession reçue de son père en 1799 était bien inférieure à ce chiffre, il est donc probable que ce furent les lucratives fonctions exercées depuis 1796 comme caissier, payeur ou receveur, qui lui permirent d’amasser en une dizaine d’années de quoi acheter cet important domaine. Entre 1810 et 1830, le cumul de fonctions au Conseil d’État, au Domaine de la Couronne et à la Liste civile, plus le titre de ministre d’État et la pairie conférés en 1827, assurèrent à LA BOUILLERIE un revenu annuel qui devait être supérieur à 100 000 francs.
53À la suite du décès de l’ancien sous-secrétaire d’État, la liquidation des droits de succession au Bureau de La Flèche se fit en 1833 d’après les estimations suivantes :
54SUCCESSION MOBILIÈRE
55Prisée du mobilier 97 787
56Deniers comptants, entre les mains de MM. HUBERT et BERNARD 41 127
57Créance sur de LA SUZE 11 855
58Action de diverses sociétés 18 200
59Créance sur la Société de Boulainvilliers (Société constituée en 1826 pour lotir le parc du château de Boulainvillers à Passy) 120 000
60Créance sur LENTEIGNE, en faillite 28 000
61Créance sur COR et LARIGAUDELLE, 257 819 F, en faillite, pour 30 % 77 345
62Revenus et fermages échus 8 075
63Deniers comptants 2 400
64Créance sur SEMIER (?) 40 000
65Créances résultant des biens vendus, de la succession de Mme de FOUCAULD 26 400
66Créance sur DUPRÉ 5 333
67Garde-robe du défunt non inventoriée 2 000
68478 582
69À déduire pour la veuve : don du mari (24 000 F), rente viagère de 12 000 F.
70Au denier dix (120 000 F) et reprises de la veuve (104 709 F), total 248 709
71Succession mobilière nette 229 875
72MAJORAT
73Majorat de baron pair par L. P. du 18 mars 1828, augmenté en majorat de comte pair par L. P. du 6 novembre 1829 :
74IMMEUBLES (situés à Bazouges-sur-le-Loir), évalués en revenu :
- Château de La Barbée avec 30 ha 600
- La Grande Prairie, 15 ha 97 a 2 000
- Diverses pièces de terres, 13 ha environ 480
- Bois, 128 ha 1 746
- Moulin de La Barbée, avec 10 ha 96 a 1 000
- La ferme de La Barbée, avec 37 ha 43 a 908
- Les fermes de La Gagnerie et de La Rougerie, avec 46 ha 10 a 1 206
- La ferme du Serrain, avec 58 ha 50 a 1 600
- La ferme de La Sigonniere, avec 35 ha 16 a 1 140
- Impôts payés sur ces revenus 2 281
75MEUBLES :
- 4 actions de 500 F de revenu chacune, sur le Canal du Midi, données en usufruit à son fils aîné 2 000
76Total du revenu du majorat 14 961
77BIENS IMMOBILIERS LIBRES (tous à Bazouges), évalués en revenu :
78Les fermes de La Viemière (600) et de La Petite Barilière (620), les métairies de La Baronnière (1 100), de l’Ormeraie (500), de La Bellangeraie (500), de La Taffardière (950), de La Roche (802) et de La Touche (653), diverses maisons et terres (161), 8 ha de bois (150), 3 ha 66 a de vignes (220), maison occupée par les Sœurs de la Charité à Bazouges (80), impôts payés sur ces biens (1 100).
79Total en revenu des biens immobiliers libres 7 436
80Pour le fisc, l’estimation des biens du majorat résulta d’une capitalisation au denier dix. En procédant à une capitalisation au denier vingt pour l’ensemble des revenus de la succession, sauf pour la rente viagère de la veuve, on obtient un montant total de plus de 800 000 francs :
- Don à la veuve 24 000
- Rente viagère de la veuve, au denier dix 120 000
- Succession mobilière nette 229 875
- Majorat, au denier vingt 299 220
- Succession immobilière libre 148 720
81Total 821 815
82Selon la catégorie de biens, les droits de succession payés par les enfants héritiers Varièrent entre 0,25 % et 1,5 %. Au total pour une succession de plus de 800 000 F, ils payèrent 5 568,30 F, soit 0,67 % de la valeur de la succession !
IV. LA CARRIÈRE
AVANT LE SOUS-SECRETARIAT D’ETAT DES FINANCES
83Grâce à ses relations familiales dans les milieux des finances publiques, François-Marie-Pierre ROULLET de LA BOUILLERIE entra vers 1781, à dix-sept ans, dans les bureaux des vivres de la Marine. Dès 1783 il était trésorier particulier des troupes à Landau, ville française à l’époque, puis à Tours (1784), et enfin en Corse de 1786 à 1794. Protégé par [Nicolas BOURELLE de] SIVRY, qui fut promu payeur général de l’Armée d’Italie en 1798, LA BOUILLERIE, qui y avait été sous-caissier en 1796-1797, devint en 1798 caissier général de l’armée dans la République Cisalpine. En 1800 il suivit SIVRY à l’Armée du Rhin, et lui succéda comme payeur général. Il devint ensuite payeur du Trésor aux camps de Saint-Omer et de Bruges (1804), puis payeur de la première Grande Armée et receveur général des contributions de guerre dans les pays vaincus en Allemagne (1805).
84Ce cursus n’intègre pas la mention énigmatique que l’on trouve dans le Dictionnaire des parlementaires (I, 419) : « Il épousa alors [quand ?] Mlle de LA CHAPELLE, fille de l’ancien commissaire général de la Maison du roi, et Obtint, à la faveur de ce mariage, la place de caissier particulier du Premier Consul. » L’Almanach royal de 1788 mentionne bien « M. de LA CHAPELLE, commissaire général et premier commis de la Maison du roi », mais l’acte de mariage de LA BOUILLERIE en 1807 ne le qualifie ni de veuf, ni de divorcé.
85Nommé payeur général de la Marine (1807), il demeura cependant en Allemagne jusqu’en janvier 1809, avant de devenir administrateur général des fonds des pays conquis (juin 1809) et trésorier général du Domaine extraordinaire (janvier 1810), fonction qu’il cumula avec celle de trésorier général de la Couronne (décembre 1811). Il avait été nommé maître des requêtes en 1809 et fait baron en 1810. En avril 1814 il exprima des sympathies royalistes : il remit au comte d’ARTOIS dix millions sur les fonds dont il était détenteur, tout en en remettant six à PEYRUSSE, qui les porta à Napoléon à Fontainebleau. D’après le Mémorial de Sainte-Hélène, l’empereur reprocha à LA BOUILLERIE d’avoir ainsi disposé de fonds que Napoléon considérait comme sa propriété personnelle : LA BOUILLERIE se justifia en objectant que les fonds du Domaine extraordinaire, quoiqu’en eût dit Napoléon, n’était pas sa propriété personnelle, mais celle de l’État. Sous la première Restauration LA BOUILLERIE fut maintenu comme trésorier général de la Couronne, puis nommé intendant du Trésor de la Liste civile (septembre 1814) et liquidateur des dettes contractées en émigration par Louis XVIII. Il se tint à l’écart pendant les Cent Jours. Le 22 août 1815 il fut élu député de la Sarthe par 90 voix sur 166 votants et 228 inscrits. Il siégea dans la majorité ultraroyaliste de la Chambre introuvable.
AU SOUS-SECRETARIAT D’ETAT DES FINANCES.
86Après que le roi eut prononcé la clôture de la session parlementaire le 29 avril 1816, le duc de RICHELIEU procéda à un remaniement ministériel [voir la notice de CORVETTO] qui amena au ministère des Finances LA BOUILLERIE comme sous-secrétaire d’État. Dans l’Almanach royal de 1817, il fut mentionné après le ministre et les attributions de ce dernier, lesquelles embrassaient tous les départements du ministère. Quant au sous-secrétaire d’État, il était « chargé, suivant l’ordonnance du 9 mai 1816, des nominations de toutes les parties de l’administration et de la correspondance générale, qui lui étaient déléguées par le ministre. » À l’origine le sous-secrétaire d’État fut donc présenté comme une sorte de directeur général du personnel et de secrétaire général du ministère.
87Dans l’Almanach royal de 1818 la présentation fut très différente. LA BOUILLERIE, sous-secrétaire d’État, n’était plus mentionné de la même manière. Après la mention du ministre et des attributions de celui-ci, était inscrite la précision suivante : « Nota. La direction du Trésor royal est déléguée par le ministre au sous-secrétaire d’État. » Puis, après l’énumération détaillée des huit départements du ministère et de leur personnel, le Trésor faisait maintenant l’objet d’une rubrique séparée, en tête de laquelle était mentionné LA BOUILLERIE,
88sous-secrétaire d’État, et qui énumérait les attributions suivantes : « La direction du Trésor royal – La surveillance des divisions du ministère chargées du travail relatif à la direction des agents de la recette et de la dépense – La surveillance des comptables directs et indirects du Trésor à Paris et dans les départements – La direction des inspecteurs des finances – La nomination des payeurs des départements et des ports, celle des receveurs particuliers des finances – La proposition au ministre des sujets à présenter pour les emplois dont le roi s’est réservé la nomination [receveurs généraux des finances] – Les règlements, instructions et la correspondance relatifs au service du Trésor. »
89Cela revenait en fait à ressusciter l’ancien ministère du Trésor, sous la forme d’un sous-secrétariat d’État, et par conséquent à annuler la réunification opérée par le baron LOUIS et concrètement poursuivie par le marquis d’AUDIFFRET dans le domaine de la comptabilité [voir la notice du baron LOUIS]. Les Souvenirs de d’AUDIFFRET témoignent du conflit inéluctable qui devait opposer le marquis comptable au sous-secrétaire d’État, et de la défaite temporaire du jeune protégé du baron LOUIS.
90Lorsque CORVETTO succéda au baron LOUIS, le marquis d’AUDIFFRET « s’efforça, dit-il, de l’initier aux travaux qui lui étaient confiés, et surtout de lui faire comprendre le point où la comptabilité générale des finances était parvenue après la réunion des deux ministères. » En effet, sous le régime constitutionnel de la Charte, le regroupement de tous les services des Finances et du Trésor sous une autorité unique, responsable devant les Chambres, rendait nécessaire la centralisation de la comptabilité et de l’inspection.
91CORVETTO commença par soutenir d’AUDIFFRET, dont les réformes inquisitrices et centralisatrices « attaquaient un grand nombre d’intérêts privés, froissaient beaucoup d’amours propres et menaçaient bien des existences. » L’arrivée du sous-secrétaire d’État, jaloux de l’indépendance du Trésor enhardit les adversaires de ces réformes : « Je m’en aperçus très clairement vers la fin de l’année 1816 » écrit d’AUDIFFRET devant un premier assaut des receveurs généraux des finances, suivi d’un second assaut mené par le directeur général du mouvement des fonds. Pour se débarrasser de ce gêneur, et suivant l’adage Promoveatur ut amoveatur, ses adversaires convainquirent CORVETTO de lui offrir une recette générale des finances, puis DECAZES de lui offrir la préfecture de Grenoble. D’AUDIFFRET opposa un double refus à ces propositions avantageuses.
92LA BOUILLERIE s’affirma au début de 1817 comme la doublure du ministre : CORVETTO présenta lui-même son projet de budget pour 1817, et il intervint à la fin du débat pour répondre aux critiques qui avaient été formulées, mais au cours des débats LA BOUILLERIE fit, le 11 février 1817, un grand discours de portée générale, qui n’était pas celui d’un technicien subordonné, mais celui d’un quasi-ministre. Il présenta le plan de son exposé de la manière suivante : « Je vais développer ici, le plus clairement et le plus succinctement [qu’il est] possible, l’ensemble du système proposé par M. le ministre des Finances, surtout en ce qui concerne les moyens de crédit qui lui ont paru les plus sûrs, ainsi que les plus propres à combler nos immenses besoins. Je reviendrai ensuite sur quelques objections qui attaquent principalement ce système, et je tâcherai de démontrer l’impossibilité où l’on a été de rien concevoir de mieux, au milieu des circonstances impérieuses qui nous dominent. » En terminant le sous-secrétaire d’État laissa percer l’inquiétude du responsable de la Trésorerie. En prolongeant les débats et en retardant donc le vote du budget, les députés mettraient en péril le Trésor, qui était « privé des ressources extraordinaires du budget de 1817. »
93Manifestant le désir de simplifier et de perfectionner le fonctionnement des services du Trésor, LA BOUILLERIE demanda à d’AUDIFFRET de préparer un projet de réformes. Le marquis proposa de supprimer les quatre payeurs généraux et le caissier général du Trésor (« anciens comptables d’ordre qui embarrassaient encore le nouveau système du mouvement général des fonds et de la comptabilité générale des Finances »), et de réunir « dans une seule caisse centrale, gérée par un comptable unique, tous les mouvements de fonds du Trésor à Paris. » Telles furent les bases des trois ordonnances royales du 25 novembre 1817, mais, ajoute d’AUDIFFRET, « fragments séparés cette puissante et indispensable unité de ma centralisation d’écritures dans une comptabilité générale, […] en instituant à sa place, avec ses éléments disjoints et le sous-secrétaire d’État avait profondément faussé mes idées, et dénaturé mon plan de réforme, en se concertant d’ailleurs, à mon insu, avec deux chefs des bureaux de ma division pour reconstituer, en raison des préjugés de sa carrière précédente de payeur du Trésor impérial, la vieille institution des payeurs généraux que je voulais détruire, et qu’il faisait revivre par la création d’un directeur des dépenses investi de leurs anciennes attributions. Il ne se borna même pas à cette mesure rétrograde et contradictoire avec les améliorations que je lui avais fait adopter, il voulut encore [le 1er mai 1818], six mois après une si grave erreur, briser en trois fragments séparés cette puissante et indispensable unité de ma centralisation d’écritures dans une comptabilité générale, […] en instituant à sa place, avec ses éléments disjoints et isolés, trois divisions distinctes et séparées, sous les titres inexacts et trompeurs de Direction des recettes, qui désignait évidemment l’administration des revenus, de Direction des dépenses, qui indiquait naturellement celle des ordonnateurs, et de Bureau central, dont la cohésion intime se trouvait ainsi désormais rompue avec les comptabilités élémentaires. »
94En imposant sa nouvelle organisation du Trésor le 1er mai 1818, LA BOUILLERIE « renversa et suspendit, pendant plusieurs mois, l’existence de cette comptabilité générale des finances [œuvre de d’AUDIFFRET] […], qu’il déclarait, sans détour, avoir acquis une prépondérance intolérable et, désormais, incompatible avec son autorité supérieure. » En juin, juillet et août 1818 le marquis d’AUDIFFRET remit à CORVETTO « une série de rapports, de notes et d’observations qui composait ensemble un volume entier », pour « la défense de l’intérêt général, contre des combinaisons particulières d’amour-propre et d’intérêt privé. » L’auteur de tous ces mémoires en envoyait la copie au baron LOUIS, qui « le soutenait de ses encouragements, en [les] annotant de ses approbations motivées. » Rien n’y fit, l’intelligence de CORVETTO étant « plus entraînée par la considération décisive de la faveur de la cour [dont jouissait LA BOUILLERIE] que par la raison très problématique, à ses yeux, du véritable intérêt du service public. » Cependant CORVETTO garda sa bienveillance à l’égard de d’AUDIFFRET et lui proposa la nouvelle direction des recettes, que l’intéressé refusa.
95Lors de la discussion du budget de 1818, DUPONT de l’EURE, porte-parole de l’opposition, critique vivement, les 22 et 23 avril, l’institution des sous-secrétaires d’État, estimant qu’ils étaient inutiles et dispendieux. Il se montra particulièrement incisif à l’égard de LA BOUILLERIE : « Il m’est impossible d’apercevoir le bien qu’a pu faire à nos finances l’apparition dans ce ministère d’un sous-secrétaire d’État. Et, en supposant que le ministre ne puisse suffire, ce que je suis loin de croire, aux travaux de son administration, il est assez remarquable qu’on lui ait donné pour auxiliaire l’un des hommes les plus occupés de France, puisqu’à ses fonctions de sous-secrétaire d’État, il réunit celles de conseiller d’État, d’intendant de la Liste civile et de membre de la Chambre des députés. Je ne sais si, au milieu de tant d’occupations diverses, il était possible que M. le sous-secrétaire d’État des Finances, chargé du personnel [en 1816], trouvât tout le temps nécessaire pour examiner les motifs des nombreux déplacements qu’il a ordonnés. Ce qu’il y a de certain, c’est que dans mon malheureux département il a destitué, en 1816, au moins cent percepteurs, et que ces destitutions en masse, si contraires à la justice et au véritable intérêt du gouvernement, ont été hautement réprouvées par la conscience publique. » À quoi COURVOISIER répondit par un coup de patte au régime impérial, « lorsque le député venait en silence déposer sa boule dans l’urne », alors que désormais « un ministre devait être en séance pour y répondre à tous les éclaircissements qu’on lui demandait, non seulement sur l’ensemble mais sur les détails de l’administration, il devait être au conseil du roi, au conseil des ministres, à son ministère […] Pouvait-on nier qu’un coopérateur ne lui fût indispensable ? » CORVETTO ajouta que les sous-secrétaires d’État n’avaient été créés que pour les ministères où ils étaient nécessaires, quatre sur sept, et que c’était surtout au ministère des Finances où le sous-secrétaire d’État était indispensable, si l’on voulait bien se rappeler que ce ministère provenait de la fusion de deux précédents ministères. Tout en approuvant cette réunion, CORVETTO en rajouta un peu trop : « Mais le fardeau est immense […] Un sous-secrétaire d’État qui surveille tout, qui dirige tout, et qui rend compte de tout au ministre, lui est indispensable. Tel est, Messieurs, l’objet d’un travail de trois heures par jour entre le sous-secrétaire d’État et le ministre. » En effet un esprit critique aurait pu rétorquer que si le sous-secrétaire d’État « surveillait tout » et « dirigeait tout », c’était alors le ministre qui devenait inutile !
96Lors de la démission de CORVETTO (7 décembre 1818), remplacé par ROY, LA BOUILLERIE conserva ses fonctions de sous-secrétaire d’État, mais il ne tarda pas à se retirer à la suite du duc de RICHELIEU, lors de la constitution du ministère présidé par le général DESSOLLE (29 décembre 1818).
APRES LE SOUS-SECRETARIAT D’ETAT DES FINANCES.
97LA BOUILLERIE conserva la charge de trésorier de la Liste civile, et fut nomm conseiller d’État en service extraordinaire. Il avait été réélu député de la Sarthe le 4 octobre 1816, par 105 voix sur 111 votants et 219 inscrits. Il ne se présenta pas lors de l’élection de 1818, où le département de la Sarthe faisait partie du cinquième renouvelable. De nouveau candidat dans la Sarthe, il fut réélu député le 13 novembre 1820, par 261 voix sur 294 votants et 367 inscrits. Il obtint successivement le renouvellement de son mandat le 13 novembre 1822 dans l’arrondissement de La Flèche, avec 222 voix sur 274 votants et 322 inscrits, et le 25 février 1834 avec 213 voix sur 224 votants et 312 inscrits.
98Cet ancien haut fonctionnaire impérial devenu ardent royaliste sous la Restauration fut particulièrement choyé par Charles X, qui le nomma président de la section des finances au Conseil d’État (1824), ministre d’État et membre du Conseil privé, intendant général de la Maison du roi (23 mai 1827). Il l’éleva à la pairie avec le titre de comte dans la fameuse fournée des 78 pairs nommés le 5 novembre 1827. Après la Révolution de 1830, il refusa de reconnaître Louis-Philippe, il perdit tous ses emplois publics et son siège de pair. Il se retira sur ses terres à La Flèche.
V. SOURCES
ÉCRITS
99N’a rien publié.
BIBLIOGRAPHIE
100ROMAN d’AMAT, XVIII, 1388-1389
101COUGNY, I, 419
ARCHIVES
Archives départementales de la Sarthe.
1022C 1 479, f° 111 r°, 19 janvier 1724, Contrat de mariage ROULLET/FOUCHER.
1032C 1 544, f° 88 v°, 13 mars 1756, Contrat de mariage ROULLET/BELIN.
1043Q 6 018, f° 98 v°, 16 Brumaire an VIII, Déclaration de la succession de Gabriel-Joseph ROULLET de LA BOUILLERIE.
1053Q 6 155, f° 1 r°, 17 octobre 1807, Contrat de mariage ROULLET/FOUCAULD.
1063Q 6 534, f° 85 v°-86 v°, 11 Floréal an VIII, Déclaration de la mutation par décès de Gabriel-Joseph ROULLET de LA BOUILLERIE.
1073Q 6 547, f° 138 v°-140 v°, 1er octobre 1833, Déclaration de la mutation par décès de François-Pierre-Marie ROULLET de LA BOUILLERIE.
Archives municipales de La Flèche.
108Registres paroissiaux et registres d’état civil.
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