Prospective de l’histoire de la protection sociale
p. 495-511
Plan détaillé
Texte intégral
1L’histoire de la protection sociale est chose compliquée, souvent difficile à saisir pour celui qui n’a pas l’expérience de l’administration sociale ni du travail social1 : comment peut-on développer cette discipline ? À quelles conditions ? C’est un problème délicat d’ingénierie historique. Depuis 1973, le Comité d’histoire de la Sécurité sociale s’est efforcé, avec des méthodes d’ingénierie très neuves, de susciter des recherches2, mais pour les années 1996-2016, il nous paraît nécessaire de donner quelques repères sur ce qui pourrait être fait, sur les orientations souhaitables d’une politique de recherche en ce domaine. Nous voudrions d’une part souligner quelques difficultés propres à cette réflexion prospective3, d’autre part proposer douze programmes d’action qui permettraient de consolider cette discipline.
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2Il faut bien voir les difficultés qu’on rencontre dans tout effort de programmation en ce domaine :
3– depuis 20 ans, l’histoire sociale est plus ou moins en crise4, l’absence de personnalité dominante, de patron, est fâcheuse et cette crise de l’histoire sociale a nécessairement des conséquences sur l’histoire de la protection sociale5 ;
4– le domaine de cette discipline est flou, c’est chose difficile à cerner, elle est au carrefour de plusieurs histoires ; Jean Tulard en a fixé, en 1994 quelques principes6, mais, comme pour toute histoire un peu neuve, il y a matière à contestation, les méthodes – surtout quand on cherche à éviter les pièges de l’histoire doctrinaire, idéologique et de l’histoire « engagée » – sont nécessairement incertaines (mais l’histoire administrative et l’histoire économique ont depuis 20 ans les mêmes problèmes, le paysage historique comprend beaucoup de ruines) ;
5– l’histoire de la protection sociale est une histoire à taux d’innovation élevé, car la plupart des champs de recherche sont en friche7, et il n’est pas facile de prévoir les secteurs qui doivent se développer d’ici 20 ans, sous la pression de la demande technique, de la demande sociale et de la demande « publique »8 ; il faudrait, segment par segment, dresser un arbre de la demande, comme nous l’avons fait pour l’histoire administrative, pour l’histoire des retraites ou l’histoire des tontines9 ; mais, ce serait là un autre exercice à entreprendre, à l’occasion d’un colloque sur « la demande en histoire de la protection sociale »10 ;
6– pour établir de tels programmes, il existe quelques difficultés particulières, car les méthodes de l’ingénierie historique sont encore floues11, et (on l’oublie trop souvent), les exigences de l’histoire savante, érudite sont très éloignées de l’histoire « grand public », de l’histoire qui sacrifie tout à la « vulgarisation », qui cherche à « ouvrir de larges perspectives » ; l’histoire des Comités d’histoire des ministères doit maintenir un niveau scientifique élevé, et chercher à obtenir des produits « à longue durée de vie »12. Il faut rappeler qu’un livre, qu’un article qui ne repose pas sur des archives, sur des sources nouvelles, ou qui « n’apporte rien de neuf », n’est en fait d’aucune utilité, et qu’il est obsolète sitôt publié13.
7Aussi convient-il d’être très prudent quand on cherche à définir des orientations de recherche ; un programme doit être ambitieux14, il doit montrer la voie, chercher à ouvrir des pistes nouvelles et mettre en garde contre une histoire trop simplifiée, trop simpliste, trop éloignée des réalités administratives ou sociales, trop abstraite, trop idéologique (ce qui est encore très fréquent) ; à l’évidence, ce qu’il faut combattre, c’est le scepticisme des « donneurs d’ordre » devant une telle histoire, leur indifférence à l’histoire « en train de se former »15, la difficulté de certains universitaires à concevoir des actions communes avec les administrateurs (l’individualisme universitaire répugne, parfois, à toute idée de programme, les exemples abondent dans les Comités d’histoire).
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8Nous croyons nécessaire de donner quelques programmes d’action pour les vingt prochaines années16, d’indiquer des repères, de montrer le souhaitable, le raisonnable, le possible (en histoire, ce n’est pas souvent la même chose)17, de définir, autant que possible, des « priorités » ; il s’agit de programmes qui permettent de saisir « ce qui est le plus important », qui méritent d’être financés en priorité, mais qui peuvent être révisés au bout de 5 ou 7 ans (c’est-à-dire vers 2001-2003)18.
I. Outils de travail
9La demande en outils de travail est forte, elle devrait s’accroître car l’historien, professionnel ou non professionnel, a de plus en plus besoin d’aides.
- Bibliographie : la grande Bibliographie de Nadine Dada mériterait sans doute d’être complétée19 , elle n’a pas d’index général ; peut-être faudrait-il la transférer sur une banque de données qui s’enrichirait sans cesse et qui serait interrogeable ; c’est sans doute la meilleure solution, même si elle est coûteuse.
- Des guides généraux des sources sont en cours d’élaboration (le guide de M. Gutton pour l’ancien régime est paru en 1994, le guide de M. Imbert est en voie d’achèvement) ; ce sont là des instruments d’une grande rentabilité, mais il faudra sans doute les compléter par des guides thématiques (par exemple pour l’enfance handicapée, où il y a un grand besoin des chercheurs).
- Il faudrait un guide de recherche (et un recueil de conseils) pour mener des études à l’échelle d’une ville ou d’un département20 : ce qui aiderait beaucoup l’étudiant de maîtrise dans ses explorations, ou l’historien non professionnel, médecin, ingénieur, administrateur qui voudrait traiter – avec son expérience de la vie et sa connaissance du terrain – une question précise (faire, par exemple, l’histoire d’une maison de retraite ou celle des actions sociales d’une entreprise).
- Peut-être serait-il utile de publier (comme les historiens italiens l’ont fait récemment pour l’histoire administrative) une chronologie de la protection sociale depuis 1789 (ce serait, au fond, l’annexe chronologique de La Sécurité sociale, son histoire à travers les textes).
- Enfin, il faudrait publier des recueils de documents21 sur des événements ou textes importants : la loi de 1928, les ordonnances de 1945, la réforme de 1967, mais aussi sur la loi de 1853 sur les retraites de fonctionnaires ou la loi de 1905 sur l’assistance obligatoire aux vieillards, aux infirmes et aux incurables.
II. Animation de la recherche
10À l’évidence, il faut aider le développement de la recherche, c’est un problème d’ingénierie22.
- Il est nécessaire de faire circuler l’information : le Bulletin d’histoire de la Sécurité sociale23 a, en principe, ce rôle, mais il manque une bibliographie annuelle spécialisée (comme il en existe pour l’Histoire de l’éducation)24 : la Bibliographie annuelle de l’Histoire de France permet bien de saisir ce qui a été publié l’année précédente (ce qui est fort méritoire)25, mais il est évident qu’une bibliographie spécialisée, avec des abstracts, comme le fait le Répertoire d’Art et d’Archéologie, rendrait les plus grands services (ce n’est qu’au bout de 10 ou 15 ans qu’on en voit la rentabilité pour les chercheurs).
- Il faut décloisonner la recherche, car la protection sociale a des liens étroits avec d’autres disciplines ou sous-disciplines ; on pourrait organiser des journées d’études permettant des échanges croisés26, des sensibilisations conjointes, par exemple sur les liens de la protection sociale et de l’histoire religieuse, de l’histoire agricole, de l’histoire de l’immigration, de l’histoire médicale, de l’histoire des syndicats, de l’histoire financière, de l’histoire de la justice ; c’est en fait le réseau d’histoires liées nécessairement à celle de la protection sociale qu’il faut mettre en valeur : ce qui permettrait d’éviter que l’histoire de la protection sociale soit considérée comme une histoire marginale ou une histoire trop technique pour qu’on puisse s’y intéresser27.
- Il est nécessaire d’organiser des colloques thématiques – un par an en principe – permettant d’orienter la recherche et d’accumuler les documents : ce sont des journées ou colloques qu’il faut programmer pour cinq ans, afin de susciter des travaux28.
- Pour déparisianiser la recherche et susciter des vocations en province, il faut établir des liens avec les sociétés savantes en province, qui sont des viviers de chercheurs et sont proches du terrain social ; de 1978 à 1992, le Congrès national des sociétés savantes « abritait » un colloque d’histoire de la sécurité sociale, on ne sait pour quelles raisons ce système – à nos yeux très efficace – a disparu (par la volonté des dirigeants du Comité des travaux historiques)29 ; il faut chercher à nouveau à nouer des liens avec les sociétés savantes, les chercheurs provinciaux (c’est le rôle en principe des Comités régionaux d’histoire de la Sécurité sociale), et il faudrait pouvoir financer des congrès régionaux d’histoire de la protection sociale (un ou même deux par an), qui permettraient à des historiens, à des médecins, à des « praticiens » de l’action sociale, à des responsables d’association et à des administrateurs « de terrain » de se rencontrer30.
III. Aides aux chercheurs
11C’est là un problème classique d’ingénierie historique, mais il est très difficile quand on a peu de chercheurs motivés, et peu de « patrons » capables de garantir la valeur des travaux.
- On doit aider à publier les thèses ; encore faut-il qu’elles soient de bon niveau (les thèses dites Savary ne sont pas toujours, dit-on, de bonne qualité).
- Il faut aider à rédiger des mémoires de maîtrise sur des sujets difficiles concernant la protection sociale par le biais de bourses de 30-40 000 F sous la garantie d’un professeur (c’est la méthode appliquée avec succès par l’Association pour l’histoire de l’électricité)31.
- Il est nécessaire de donner aux chercheurs la possibilité de publier des articles, des états de recherches, des documents ; ce devrait être le rôle d’un volume annuel d’Etudes et documents (sur le modèle du Comité pour l’histoire économique et financière)32, en plus du Bulletin d’histoire de la Sécurité sociale. L’expérience montre que, quand on donne des moyens de publier, on collecte de bons travaux (et souvent, en ce domaine, ils ne sont pas faits par les historiens « professionnels »).
- Il faut organiser des séminaires d’initiation à l’histoire pour des retraités (ou préretraités) des services sociaux, qui voudraient – avec leur expérience du terrain, leur sens du « social », leur connaissance des institutions – entreprendre des travaux d’histoire de la protection sociale33 ; cette formule est très productive (un jeune retraité est actif pendant 15 ou 20 ans, et ces « praticiens » lisent mieux les documents, et plus habilement, que des jeunes étudiants sans expérience du « social ») ; ces séminaires pourraient former le vivier des colloques et journées d’études.
- À l’inverse, il pourrait être organisé en faveur des jeunes étudiants de D.E.A. et de thèse qui s’intéresseraient à l’histoire de la protection sociale, des séminaires d’initiation aux problèmes sociaux, aux règles du jeu social qui seraient dirigés par des « praticiens », des administrateurs, des médecins qui leur montreraient, avec les universitaires, le va-et-vient du présent au passé, et la complexité du vécu social (des stages sur le terrain, dans des services sociaux, ne seraient pas inutiles dans certains cas)34.
IV. Méthodologie
12L’histoire de la protection sociale, étant une histoire-carrefour, pose beaucoup de problèmes de méthode ; il faut bien voir les passerelles, les liaisons, les connexions avec les autres disciplines, notamment l’histoire de la bureaucratie (nationale et locale), l’histoire sociale – les « annales de l’anonymat » selon le mot de Valéry –, l’histoire juridique (les droits sociaux, le formalisme, l’égalitarisme), l’histoire des « métiers » sociaux, et de l’esprit de corps (l’assistante sociale, l’infirmière, l’inspecteur des enfants assistés, la directrice d’orphelinat), l’histoire de la misère (et du vécu de la misère). Il y a des règles du jeu à observer, quelquefois elles sont négligées (on fait de l’histoire engagée, on oublie les règles d’impartialité)35 ; on ne doit pas faire d’histoire manichéenne, qui est dangereuse pour l’image de la discipline36.
13Ces règles du jeu devraient être définies au cours de colloques de méthode, de rencontres ou de journées d’études, entre historiens des diverses disciplines, praticiens de l’administration, « travailleurs sociaux », qui ont une expérience précieuse de la « pratique » sociale, afin de saisir les zones de tension (l’idéologie, et la sociologie peuvent exercer une influence fâcheuse sur une histoire « en miettes », sans lignes directrices)37 et on devrait publier sur ces problèmes délicats des notes de méthode, des essais, des « orientations de recherche ». Et si l’on faisait des séminaires d’initiation à l’histoire pour professionnels ou fonctionnaires retraités, ou préretraités (comme l’Association pour l’histoire de l’électricité en a fait dans les années 80), il y aurait sans doute des progrès sensibles, car ils ont une connaissance précise du vécu social, et des limites de l’action sociale : ce qui ramènerait les débats de méthode à leur juste niveau.
V. Archives orales et récits de vie
14Il faut bien voir la nécessité de développer ces sources qui sont indispensables aujourd’hui à l’historien social38 :
- le Comité d’histoire de la Sécurité sociale a été le premier en 1974 qui ait lancé une collecte systématique d’archives orales39 ; mais celle-ci a été arrêtée aux réformes de 1967 ; il serait nécessaire de la reprendre à partir de cette date, et les trente dernières années sont très importantes pour l’histoire du xxe siècle ;
- les archives orales n’ont pas été pratiquées systématiquement pour les autres secteurs de la protection sociale, notamment pour l’action sociale, pour les problèmes hospitaliers, pour la politique de la vieillesse ; il y a certainement des collectes importantes à entreprendre, notamment auprès des décideurs (cabinets ministériels, directeurs) ; peut-être faudrait-il songer à lancer des collectes d’archives orales pour certains métiers sociaux ou médico-sociaux (infirmiers, éducateurs de l’éducation surveillée, assistantes sociales en milieu agricole.) ;
- une formule neuve a été créée en 1993 : celle du concours de récits autobiographiques ; Blanche, mémoires d’une employée du Trésor, par Blanche Py40, a montré l’importance de ces récits de vie « à la base » pour saisir des réalités qui échappent aux archives écrites (et le plus souvent aux archives orales) ; on pourrait utiliser la méthode du concours pour l’histoire de la protection sociale41 ;
- il faudrait aussi encourager la rédaction de souvenirs de médecins ou d’anciens directeurs d’hôpitaux, de caisses, d’orphelinats, de maisons de retraite (il suffît de donner des conseils sur la méthode de rédaction et d’aider à l’édition).
15C’est là un domaine où l’on peut avoir beaucoup de surprises, car les métiers sociaux ont beaucoup changé depuis 1960-1970 ; les souvenirs d’un médecin, d’une religieuse, d’une infirmière ou d’une assistante sociale nous montreraient un monde bien disparu (à l’échelle d’une ville, on peut monter des programmes d’archives orales pour saisir ces mutations des métiers sociaux)42.
VI. Histoire de l’administration
16Une des priorités de l’histoire de la protection sociale est le développement de l’histoire administrative avec des méthodes précises ; l’enjeu est important :
- pour le xixe siècle, les directions et services qui s’occupaient de cette protection, depuis le bureau des secours des hospices du ministère de l’Intérieur en l’an VIII, méritent une étude systématique ; la matière est très riche, même si les archives sont très lacunaires après 1830-1850 (les chefs de division et les chefs de bureau avaient souvent des politiques très personnelles, on le voit bien pour les sociétés de secours mutuels) ;
- pour les directions et services s’occupant de prévoyance, d’assurances et de santé à partir de 1918, nous avons donné quelques règles du jeu pour élaborer une histoire des directions43 ; on peut les transposer aisément pour les ministères sociaux ;
- il est évident que pour les années 1950-1990, on ne peut se limiter à l’histoire des directions des ministères de la Santé, du Travail et de la Sécurité sociale : il faut s’intéresser aux relations interministérielles, étudier les bureaux compétents de la Direction du Budget, les discussions et arbitrages au niveau du Premier ministre après 1958, élargir la recherche aux querelles avec l’Éducation nationale (par exemple pour l’enfance handicapée), aux services du ministère de l’Agriculture et de la Défense s’occupant des problèmes sociaux, au rôle de la section sociale du Conseil d’État, aux contrôles exercés par l’Inspection générale des Finances et la Cour des comptes, et aux mécanismes de décision au niveau des cabinets du Premier ministre et du Président de la République ;
- on ne peut avoir une conception restreinte à la seule administration ; l’historien doit examiner le rôle joué, notamment lors de l’élaboration des grandes réformes, par les fédérations professionnelles, par les syndicats patronaux et ouvriers ; il est vrai que la protection de ces archives « privées » paraît mal assurée, trop souvent elles ont été négligées ou détruites, on ne croyait pas qu’elles fussent importantes pour l’historien ; là encore, les archives orales pourraient suppléer ces carences – s’il n’est pas déjà trop tard.
VII. Histoire des personnalités
- On voit bien la nécessité d’un Dictionnaire biographique des personnalités qui ont joué un rôle dans l’histoire de la protection sociale, au sens large : c’est là une entreprise difficile (l’informatique peut beaucoup aider, dans la mesure où un « Dictionnaire biographique » peut être enrichi successivement puisqu’il est le sous-produit d’une banque de données)44. Il faut fédérer les bonnes volontés, faire des choix intelligents de personnalités (quels noms de médecins, de politiques doit-on retenir ? Un Gérando, un Martin d’Oisy doivent y figurer, mais un Séguin ou un Georges Sorel ?). C’est un programme qui demande beaucoup de travail, de ténacité, de courage et de temps45.
- On peut aussi encourager les monographies sur des personnalités « pionnières » ; on s’aperçoit qu’en dehors de la mutualité, l’effort en ce domaine n’a pas été suffisant (et les travaux anciens devraient être révisés)46 ; il faudrait sans doute recourir à la technique des mémoires de maîtrise subventionnés (comme l’ont fait l’Association d’histoire de l’électricité et l’Association d’histoire des chemins de fer) et peut-être envisager une collection de « classiques sociaux » donnant à la fois une biographie et une anthologie des textes (comme jadis Louis Baudin l’avait fait pour Le Play) ; on verrait très bien un Gérando, un Tourville, un Pinot ou un Landry dans une telle collection.
VIII. Histoire financière et comptable
17C’est là un domaine très délaissé de l’histoire sociale, car l’historien social n’aime guère dépouiller les comptabilités, les budgets, les comptes rendus financiers ; c’est pourtant là un domaine qui devrait être aisément développé.
- Il faut examiner à la fois le budget des dépenses sociales financées par l’État ou les collectivités territoriales, que l’on mesure très bien depuis le début du xixe siècle47, et le budget de la charité privée, qui n’est pas mesurable, ni même évaluable (l’aumône individuelle ne peut être chiffrée pour une ville ou un département, et c’est là une ressource très importante jusqu’en 1914, et même 1945).
- On doit étudier les systèmes financiers et comptables des hôpitaux48, hospices, maisons de bienfaisance (orphelinats, maisons de retraite, institutions pour enfants malheureux ou difficiles), les systèmes des associations de mutualité, également (quand on possède les archives), les mécanismes financiers des dépenses sociales des usines (y compris les caisses de retraites d’entreprises) ; le désordre en matière comptable a souvent été grand, et les conséquences n’en ont pas été négligeables (notamment pour les caisses de retraites et les sociétés de secours mutuels)49.
- Il convient d’analyser en détail les discussions sur les calculs et projections établis quand on a conçu les mécanismes des lois de 1910 et 1928 : c’est là où l’on voit bien la fragilité des projections financières.
18Cette histoire financière et comptable est proche de l’histoire des assurances, de l’histoire de l’actuariat (encore trop peu développée en France), de l’histoire de la comptabilité (qui reste à écrire) et de l’histoire de la comptabilité publique (au début du xixe siècle, il fallut plus de 40 ans pour régulariser la comptabilité des hôpitaux et hospices).
IX. Histoire locale et régionale
19Il est nécessaire de déparisianiser l’histoire de la protection sociale, et on doit élaborer – au niveau de la ville, du département ou de la petite région – des monographies permettant de bien saisir le décalage entre les textes, la volonté du législateur, les discours officiels à Paris et la pratique réelle, les conduites coutumières, le vécu local : on trouve des écarts étonnants, des permanences singulières. Tantôt la province est en avance, lance des initiatives charitables, des mécanismes inédits, elle précède le législateur (on le voit bien, par exemple, quand on fait l’histoire de l’enfance arriérée ou celle des retraites pour ouvriers), tantôt elle est en arrière, freine, défend des conceptions anciennes (l’histoire des orphelinats est très significative)50, elle préfère la charité privée à la charité légale. Il faudrait étudier systématiquement les « institutions » ou « œuvres » sociales51, les initiatives charitables, qui sont très nombreuses (œuvres patronales, religieuses)52 ; l’important est d’aller le plus loin possible dans l’analyse du vécu social53, de saisir les motivations, de comprendre les difficultés rencontrées par les innovations sociales, les échecs, de voir le rôle des personnalités (le fondateur, la supérieure de congrégation), d’examiner les causes des disparitions (combien d’œuvres anciennes ont dû fermer leurs portes entre 1920 et 1960 !)54. Au cours de ces explorations, on fera sans doute de singulières découvertes, car la mémoire en ce domaine se perd très rapidement, il y a des ruptures fâcheuses55, et il faudra utiliser parfois, sur cet ancien régime social qui a duré jusque vers 1940-1950, les récits de vie et les archives orales.
X. Histoire des faibles
20On n’a pas encore assez fait en France l’histoire des pauvres, des faibles, des exclus (notamment à l’échelle locale) ; ce sont des histoires à la marge trop souvent dédaignées (alors que les archives administratives ou judiciaires sont abondantes pour chaque segment, si on consent à les rechercher)56.
21Il convient d’étudier – à l’échelle nationale, mais surtout à l’échelle locale où l’on saisit mieux le vécu – le pauvre, l’indigent, le mendiant, le handicapé, l’idiot (et l’enfant arriéré)57, le malade hospitalisé, le pauvre à l’hospice, la fille mère, le fou58, le suicidant, l’enfant abandonné, l’enfant emprisonné, la prostituée59. C’est là une histoire au carrefour de l’histoire du quotidien, de l’histoire hospitalière, de l’histoire médicale (et médico-sociale), de l’histoire psychiatrique, de l’histoire de la famille, de l’histoire de la charité – et de l’histoire religieuse –, de l’histoire de l’administration sociale et judiciaire : dans les vingt prochaines années, ce secteur devrait se développer notablement60.
XI. Histoire des femmes
22Il faudrait entreprendre systématiquement – à l’échelle locale notamment – une histoire des femmes liée à l’histoire de la protection sociale61.
- D’une part, on a mené très tôt des actions en faveur de l’accouchée, de la veuve, de la femme seule, de la fille mère, de la mère surchargée d’enfants, de l’indigente, de l’ouvrière ; les systèmes d’aide, de protection, de charité ont été multipliés, ce qui nous apporte beaucoup de documents précieux sur la vie quotidienne des femmes, leurs difficultés, mais il faudrait aussi voir comment ces aides, ces protections – souvent fort contraignantes – ont été reçues : la femme à l’hôpital (ou à l’hospice), la femme dans la maison de retraite, la femme seule, voilà des sujets importants de monographies62.
- D’autre part, l’histoire des femmes oblige aussi à étudier d’autres catégories : la religieuse63, l’infirmière (et la « doctoresse »), la servante d’hôpital, la dame d’œuvres (et la dame patronnesse), la directrice de maison de retraite, la jeune fille charitable des mouvements de jeunesse catholique (la « noëliste »)64, l’assistante sociale ; on aurait tort de négliger le vécu de ces « professionnelles » de la protection65 ; l’histoire des femmes peut apporter beaucoup à l’histoire de la protection sociale.
XII. Histoire de la diffusion des doctrines sociales
23C’est là un secteur où, en principe, on croit savoir l’essentiel : ce qui n’est point assuré, car on trouve beaucoup de « projeteurs », d’idées fausses qui servent à faire avancer des idées généreuses66 , d’initiatives intelligentes qui ont tourné court ; l’histoire des doctrines sociales est des plus significatives, mais il faut la développer habilement.
24Première règle : on doit saisir les décalages entre les « idées » parisiennes et les « idées » de la province ; les débats des conseils généraux, fidèles aux traditions de la charité privée67, montrent bien ces décalages, dus souvent à des effets de génération.
25Deuxième règle : il faut examiner les supports de diffusion de ces doctrines ; journaux parisiens et provinciaux68, revues, brochures, bulletins d’associations, de sociétés de secours mutuels, professions de foi électorales, publications orientées, et les relais d’information69 (par exemple, les instituteurs pour les idées de caisse d’épargne et de caisses de retraites, avec les caisses de retraites scolaires, les curés avec les sociétés Saint-François-Xavier et les sociétés Saint-Vincent-de-Paul, avec les sociétés de secours mutuels catholiques)70.
26Troisième règle : il faut rechercher les auteurs ou projeteurs « non conformistes », ou « progressifs », qui sont « en avance sur leur temps » (on le voit bien avec un Séguin ou Boumeville pour l’histoire de l’enfance arriérée), ou qui lancent des « innovations » (ainsi un Pierre Cazeaux, ancien saint-simonien qui lance, l’un des premiers, l’idée de caisse des retraites ouvrières en 1842)71 ; il nous paraît nécessaire de publier les écrits ou les projets « techniques » qui annoncent des réformes futures et qui nous permettent de mieux saisir l’imaginaire social (un jour, il faudra bien écrire une histoire de l’imaginaire social)72. C’est là un secteur d’histoire à taux d’innovation élevé, dès qu’on veut explorer la genèse des institutions.
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27On voit la diversité et la complexité de ces douze programmes d’action73 ; mais il faut dans cette histoire difficile, parfois risquée, observer un certain nombre de règles de prudence :
- on doit éviter la tentation de l’histoire « par période » qui est souvent claustrante, inexacte, réductrice74 ; l’histoire de la protection se prête mal aux coupures, il y a nécessairement des traditions, des coutumes longues ;
- il ne faut pas tomber dans le piège de l’histoire lisse, mécanique, en utilisant sans précautions les mots « causes » et « conséquences », en recourant à des modèles réducteurs75 ; l’histoire de la protection sociale est aussi – par-delà les textes, les doctrines et les comptes – une histoire psychologique, une histoire concrète, qui touche au quotidien, au vécu de l’individu, à l’imaginaire, à la coutume, et qui est d’une infinie variété (le mot « pauvre » n’a pas le même sens à Bourges et à Saint-Amand, le sens varie presque selon chaque canton.) ;
- on doit, répétons-le, déparisianiser cette histoire ; ce devrait être un souci constant en ingénierie historique, l’historien doit être proche du terrain, toute histoire « à l’échelle nationale » d’un « fait social » doit être « doublée » de monographies ou d’études à l’échelle d’une ville, ou d’un département : c’est le côté expérimental de cette histoire ;
- il est nécessaire de donner la priorité à quelques thèmes importants (l’histoire de l’exclusion, ou l’histoire de la femme devrait fortement se développer dans l’historiographie des années 2000-2030, tout comme l’histoire des systèmes de retraite)76. Assurément, il faudrait tenter une prospective longue de cette histoire, mais on doit être circonspect : car en histoire sociale, le rôle des patrons, des chefs de file, des « pionniers » n’est pas négligeable – ils ont des « disciples », distribuent les travaux, rénovent les disciplines ; mais pour le moment, en 1996, on ne voit guère apparaître de nouveaux « patrons » (et l’historien qui saura renouveler telle ou telle « discipline » n’est peut-être pas encore né : rappelons que l’historien « innovateur » qui aura 45 ans en 2050 naîtra en 2005.). On peut bien dessiner, à termes constants, des schémas d’ici 2015, mais, à l’évidence, ils sont révisables, nous ignorons les innovations, les nouveaux centres d’intérêt qui apparaîtront vers 2005-201077.
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28De ces quelques observations – que l’on pourrait développer longuement – peut-on dégager quelques leçons, à titre provisoire ?
29Première leçon : c’est une histoire des plus complexes, et qu’il convient encore de compliquer ; on a tort de vouloir se contenter d’images simplistes, bonnes pour l’histoire résumée des manuels ; les règles du jeu social ont toujours été floues, incertaines, flexibles et il importe que l’historien soit capable de marquer sa différence78 , et ne cherche pas à mettre ses pas dans les pas d’autrui (être indiscipliné, faire son propre chemin, se démarquer de ses pairs et de ses patrons, est une vertu en histoire sociale, où le conformisme idéologique a fait longtemps des ravages)79.
30Deuxième leçon : l’histoire de la protection sociale est une histoire subversive, car elle permet de relativiser ce qui se passe sous nos yeux (et même ce qui va advenir bientôt) ; elle montre les tâtonnements, les hésitations nécessaires, la lenteur des mutations, l’immobilisme par-derrière les apparences, l’importance de la coutume, le rôle des personnalités créatrices : c’est une histoire qui peut, croyons-nous, être utile aux réformateurs, aux décideurs, en modérant leur enthousiasme, en freinant leurs passions, en leur montrant ce qui est important, en marquant les risques des décisions improvisées ou utopiques. Comme dit le professeur Jean Hilaire à propos de l’histoire du droit des affaires80, « l’historien est peut-être le mieux placé pour rappeler que l’ancienneté d’une institution n’est pas un titre inaltérable à la durée, c’est-à-dire au maintien indéfini en l’état ; mais il soulignerait aussi qu’il ne serait pas sain de réformer sans avoir préalablement dégagé les fondations pour repérer les éventuels vices de construction ou identifier clairement les causes d’inadaptation accumulées avec le temps » ; l’historien peut apprendre au décideur à déceler à temps les pièges, à être sceptique, on a vu des exemples récents – la mendicité, les régimes spéciaux de retraites – où le scepticisme paraissait chose nécessaire.
31Troisième leçon : l’histoire de la protection sociale ne peut être faite par les seuls universitaires, qui trop souvent n’ont pas l’expérience de la vie, ne connaissent pas les nécessités du travail social81 ; il faut utiliser le capital d’expérience des acteurs du système social, des décideurs comme des « travailleurs sociaux », de ceux qui sont « sur le terrain », et chercher (c’est un problème d’ingénierie et de communication) à les inciter à faire des travaux d’histoire ou à collaborer avec les universitaires, en « partageant leur savoir ».
Notes de bas de page
1 Un ancien de l’administration sociale, un « travailleur social » ne pose pas les mêmes questions, il ne lit pas de la même façon qu’un jeune étudiant les comptes rendus d’un bureau de bienfaisance ou un rapport de société de secours mutuels ; ceux qui ont une « pratique sociale » possèdent une connaissance intime de la réalité sociale, ils voient mieux « ce qui est important », ils saisissent mieux ce qui est dissimulé. Sur l’importance de ce savoir pratique, cf. F. Monnier, préface à J. Clinquart. Les services extérieurs de la Ferme générale, 1996, p. VIII (Comité pour l’histoire économique et financière).
2 Cf. J. Caritey, « Le Comité d’histoire de la Sécurité sociale », Revue administrative, 1984, p. 353-357 et « Une idée neuve : l’histoire de la Sécurité sociale ». Mouvement social, 1986, p. 3-5. Un bilan de l’action du Comité (créé par le Président Pierre Laroque et présidé par Mme Suzanne Grévisse) de 1973 à 1996 mériterait d’être dressé.
3 Sur les difficultés d’une telle prospective, cf. F. Monnier et G. Thuillier, supra, p. 103.
4 Cette crise est reconnue généralement, et on le voit bien dans les tentatives de reconstruction d’une doctrine (cf. par exemple Bernard Lepetit, « Histoire des pratiques, pratique de l’histoire », dans Les formes de l’expérience, Une autre histoire sociale, 1995 (Albin Michel), p. 9-22 ; on est bien éloigné aujourd’hui du « modèle » labroussien, dont on a reconnu les limites).
5 Le mot est employé par Pierre Laroque et Jean Imbert en tête de La protection sociale sous la Révolution française (1990, Comité d’histoire de la Sécurité sociale) ; la protection sociale permet de mieux appréhender la part de l’action sociale à l’intérieur de l’histoire sociale (au sens large) ; mais il nous manque un colloque de méthode sur le concept de « protection sociale » couramment employé aujourd’hui par l’administration sociale.
6 « Pour une histoire médico-sociale de la France », préface à G. Thuillier, Les institutions médico-sociales en Nivernais, 1550-1930, 1995, p. V-VIII.
7 Donnons deux exemples : il a fallu attendre 1977 pour qu’on commençât à faire l’histoire de l’idiotie au xixe siècle, c’est-à-dire l’histoire médico-sociale de l’enfance anormale, et 1990 pour qu’on entreprît des recherches sur l’histoire des retraites des fonctionnaires au xixe siècle.
8 Sur la théorie de la demande, cf. J. Tulard et G. Thuillier, Le marché de l’histoire, 1994, p. 29-32.
9 Supra, p. 37.
10 Rappelons qu’il y a une demande de ceux qui ont une pratique sociale, qui sont sur le terrain, pour savoir d’où ils viennent, d’où viennent les institutions, les modes de pensée, les codes de conduite, les coutumes qu’ils « pratiquent » chaque jour ; c’est une demande d’histoire génétique difficile à cerner, qui devrait se développer (les assistantes sociales, les infirmières ont depuis longtemps cherché à faire leur histoire).
11 Supra, p. 71.
12 On voit encore certains – pour l’histoire du xixe et du xxe siècle – ne pas comprendre la nécessité de publier des documents, ils veulent de l’histoire « résumée », de l’histoire « de manuels » et de vagues synthèses bâties arbitrairement.
13 Cf. « Pour une théorie de l’obsolescence », Revue administrative, 1995, p. 104-109. On voit se déclasser rapidement en histoire sociale des livres qui ne respectent pas les règles d’érudition et d’impartialité (sur le devoir d’érudition de l’historien, cf. J. Tulard et G. Thuillier, La morale de l’historien, 1995, p. 37-42).
14 Sur le devoir d’ambition de l’historien, ibidem, p. 27-30.
15 Les administrateurs dans les ministères sociaux, aux prises avec l’urgence, ont de moins en moins d’intérêt pour l’histoire, ils ne comprennent pas toujours les nécessités de l’érudition, ils confondent parfois l’histoire sérieuse avec des opérations de « communication », ils ne voient pas toujours la demande informelle d’histoire au-dessous d’eux, mais ils ont beaucoup d’excuses.
16 Le Comité d’histoire de la Sécurité sociale avait, dès son installation en 1973, défini clairement des priorités, supra, p. 73, et appliqué des méthodes d’ingénierie historique, il a étendu, dès cette date, le champ d’action du Comité à l’ensemble de la protection sociale (on le voit bien avec le « programme » de bibliographie réalisé par Nadine Dada).
17 On ne doit pas oublier que de tels « programmes » doivent servir à l’historien de 2050 qui fera l’histoire de la discipline et cherchera a comprendre comment elle s’est développée, il aura ainsi des repères, il verra mieux les ambitions, et pourra saisir – le cas échéant – les raisons des echecs. Nous aimerions bien retrouver de tels programmes pour 1936 ou 1946.
18 Nous n’abordons pas tous les problèmes – on ne peut tout dire dans un article et nous ne pouvons citer tous les travaux. Nous laissons de côté, en amont de la recherche, les problèmes de la collecte (et de la sauvegarde) des archives des administrations et des institutions, qui nous paraissent encore fort mal réglés, malgré les efforts du Comité d’histoire de la Sécurité sociale (quelles mesures de protection adopte-t-on dans tel ou tel département pour les archives des associations de parents d’enfants handicapés ou d’aide à l’enfance anormale ? Qui s’intéresse aux archives des maisons de retraite ?). Les destructions dues à l’indifférence sont massives, c’est une histoire qu’il faudra bien retracer un jour.
19 Un supplément devrait être établi pour les années 1980-1996.
20 Cf. G. Thuillier « Les sources régionales de l’histoire des institutions médico-sociales », dans Les institutions médico-sociales, ouv. cité, p. 261-332.
21 Sur la théorie des recueils de documents, cf. supra, p. 327.
22 Et aussi de communication ; mais la théorie de la communication en histoire sociale n’est pas encore faite, elle pose des problèmes difficiles et il faut être d’une grande prudence.
23 Il en est à son numéro 32 (juillet 1995). Un index général de ces Bulletins est prévu.
24 C’est un travail considérable réalisé par le Service d’histoire de l’éducation : la dernière parue pour l’année 1992 (Histoire de l’éducation, septembre 1995, n° 67-68, 344 p.) recense (pour la France) 2185 numéros classés méthodiquement, avec un index thématique développé.
25 L’année 1994 est parue à l’automne 1995. Ce qui concerne la protection sociale figure dans la partie histoire sociale, avec notamment des rubriques : Mutualité et coopérative, Assurances sociales et sécurité sociale, Assistance (en 1993, ces rubriques occupaient les pages 425-430, du n° 7728 au n° 7819), mais il est évident que l’on trouve beaucoup dans d’autres rubriques : Doctrines sociales, Vie quotidienne, Médecine, Pharmacie.
26 Sur le double principe : ce qu’apporte l’histoire de l’immigration à l’histoire de la protection sociale et ce qu’apporte cette dernière à l’histoire de l’immigration.
27 Ou encore comme une histoire présentant trop de « risques » pour la carrière, on préfère « emprunter les sentiers battus, les terrains qui ont fait leurs preuves, les domaines où les sources sont sûres, les archives nombreuses et bien conservées », comme dit François Monnier (préface citée à la note 1) ; l’histoire de la protection sociale est mal vue parce qu’elle n’offre de sécurité ni pour les sources, ni pour la méthode.
28 L’exemple de ces colloques thématiques est donné par l’Association pour l’histoire de l’électricité, qui en est, en 1996, à son 11e colloque « lourd ».
29 Ces « colloques » avaient été organisés en 1977-1978 grâce à Jean Vidalenc, Paul Leuilliot et Marcel Baudot, qui s’intéressaient tous les trois fortement à l’histoire sociale ; mais cette génération n’a pas été remplacée au Comité des travaux historiques, dont certains dirigeants trouvaient en 1991-1992 gênants ces « colloques » à communications trop nombreuses.
30 Il y a un problème complexe de la demande en ce domaine des « métiers du social » ; assurément, l’expérience des gens de terrain serait précieuse aux historiens (sur les difficultés de ce « partage d’expérience », signalons les remarques de Michel Legros, « Faut-il encore écrire ? », dans Informations sociales, nos 49-50, 1996, p. 178-185 : il y a tout un côté passionné de la recherche sociale sur le terrain qui serait bénéfique pour la recherche historique locale ou régionale, c’est une voie à explorer dans les années à venir). Une journée d’étude devrait bien analyser les liens entre l’élaboration de l’histoire de la protection sociale et le savoir pratique de ceux qui sont sur le terrain (médecins, administrateurs ou travailleurs sociaux).
31 Notamment pour susciter des travaux à l’échelle d’une ville ou d’un département.
32 Ce sont des volumes de 600-700 pages qui permettent d’accumuler des travaux, des réflexions et des documents, et même des « récits de vie » (des tables très détaillées ont été publiées pour les cinq premiers tomes).
33 Cette formule a été appliquée avec succès par l’Association pour l’histoire de l’électricité pour des ingénieurs de haut niveau.
34 La formule du stage de l’historien dans un service d’administration centrale qui faisait l’objet de la thèse a été déjà appliquée avec succès au ministère des Finances ; l’historien n’a plus, après ce stage de deux mois (où il a travaillé pour le service), le même regard sur les documents, il comprend mieux les dossiers. Cette formule devrait être pratiquée plus largement.
35 Cf. G. Thuillier et J. Tulard, La morale de l’historien, ouv. cité, p. 13-16.
36 C’est un problème classique : quand on fait l’histoire des domestiques, on a beaucoup de documents (par les journaux, les archives judiciaires, les sources littéraires) sur le mauvais maître, mais on ne doit pas oublier qu’il y a le bon maître, dont personne ne parle. On doit éviter d’être piégé par ses sources, ou par son manque d’expérience de la vie (c’est là où les historiens « non professionnels » sont souvent plus « fiables »).
37 Les efforts de B. Lepetit (article cité à la note 4) montrent bien le poids excessif des sociologues, de leurs modèles et de leur langage, sur l’histoire sociale. L’histoire de la protection sociale relève plutôt, sur le plan de la méthode, de l’histoire administrative, qui échappe largement à la méthode sociologique.
38 Les premiers travaux utilisant systématiquement, pour l’histoire de directions de ministère, et les archives orales et les archives écrites, sont en cours d’achèvement (notamment pour l’histoire de la Direction du Trésor, et celle de la Direction de la prévision).
39 Elles sont conservées aux Archives nationales (37 AS 1 à 20).
40 Supra, p. 347.
41 Yvonne Kniebiehier avait montré jadis dans Nous, les assistantes sociales, la richesse de ces récits de vie, et le Comité d’histoire de la Sécurité sociale a publié les souvenirs pittoresques d’un directeur de caisse (Pierre Graverand, La Sécurité sociale sur le terrain, 1992, 275 p.). Mais le concours autobiographique a l’avantage d’inciter à écrire des agents de niveau hiérarchique modeste (Blanche Py était un agent du cadre C, et a eu le premier prix du concours.), qui ont souvent des choses non négligeables à dire, et qui voient peut-être mieux le système administratif coutumier que les cadres A. La méthode du concours pourrait être aussi envisagée dans un cadre régional (par exemple en Alsace ou en Bretagne).
42 Cf. G. Thuillier et J. Tulard, Histoire locale et régionale, PUF, 1992, p. 54-58.
43 Supra, p. 109.
44 On sait que le Dictionnaire du mouvement ouvrier de Maîtron est en cours de refonte, et qu’il est mis sur CD-Rom (certaines notices devraient intéresser l’histoire de la protection sociale).
45 Un Dictionnaire biographique peut être réalisé sur 10 ans ; il faut donc des garanties de bonne fin, qui doivent être accordées par une autorité administrative.
46 La révision est nécessaire, soit pour des raisons de sources, soit pour des raisons de méthode : rappelons que jusqu’en 1975, la photocopie, qui aujourd’hui facilite tant les travaux, n’était pas utilisée, et souvent les hypothèses de travail d’études antérieures à 1940 sont manifestement dépassées (beaucoup d’historiens n’utilisaient que les sources imprimées et certains fonds des Archives nationales étaient à peine inventoriés). On a souvent tort, en histoire de la protection sociale, de se fier aux travaux anciens ; on risque fort de commettre des bévues (c’est ainsi qu’un historien expérimenté comme Alan Forrest, La Révolution française et les pauvres, 1986, refitse de s’intéresser aux secours des parents des défenseurs de la patrie, qui fut pourtant une initiative très considérable, qui concernait des centaines de milliers de personnes : cette politique, en effet, avait été « oubliée » par les anciens travaux, cf. G. Thuillier, « Les secours aux parents des défenseurs de la patrie, 1792-1796, orientations de recherche », Colloque sur l’histoire de la Sécurité sociale, Strasbourg, 1988, 1989, p. 459-489). Réviser systématiquement est une nécessité des vingt prochaines années.
47 Cf. G. Thuillier, « La régression du budget social de l’État en 1800-1802 », Bulletin d’histoire de la Sécurité sociale, n° 16, septembre 1987, p. 95-107. Pour les départements et les communes, on ne retrouve guère de budgets réguliers qu’à partir de l’an VIII et ce matériel important doit être utilisé systématiquement par l’historien de la protection sociale, qui peut évaluer et analyser le « budget social » d’une ville, ou d’un département, sur une longue période (encore faut-il prendre beaucoup de précautions élémentaires, et ne tenir compte que du budget exécuté).
48 Il nous manque une histoire du système comptable des hôpitaux (et du contrôle de leurs comptes). Encore aujourd’hui, on trouve de singulières anomalies (les frais de médicaments du personnel seraient encore pris en charge, assure-t-on, dans certains hôpitaux).
49 On sait tous les efforts entrepris entre 1880 et 1914 pour tenter de régulariser les systèmes comptables des caisses de retraites et des sociétés de secours mutuels : les actuaires dénonçaient traditionnellement les mauvaises règles de gestion appliquées (notamment Marie et Fontaine), les dirigeants des sociétés sous-estimant la durée de vie et constituant des réserves techniques insuffisantes (dès 1839, Gérando avait mis en garde contre l’utilisation de mauvaises tables de mortalité). Toutes ces querelles mériteraient d’être retracées en détail.
50 Le mode de vie des orphelinats remontait presque à des traditions du xviie siècle, et cela a duré parfois jusqu’en 1960 (pour un orphelinat de filles dans les années 1925-1935, on lira, par exemple, de Rémy Laville – pseudonyme de Robert Catherine, le directeur de la Revue administrative – Fille de l’espérance, Histoire vraie, Morgan, 1959, 259 p.). Et l’on retrouverait, dans les archives du ministère des Affaires sociales, de singuliers rapports de l’Inspection générale sur les orphelinats et foyers de l’enfance dans les années 1960-1970 ; un rapport d’inspection de M. Nathan est à l’origine de la création de la Commission Dupont-Fauville en 1970).
51 Bureaux de bienfaisance, maisons de retraite départementales, orphelinats, œuvres pour enfants trouvés ou abandonnés, pour enfants « difficiles », maisons de refuge, institutions de sourds et muets, œuvres charitables pour enfants incurables, etc. : la diversité est étonnante, et on a le plus grand mal à repérer certaines œuvres qui ont duré seulement 10 ou 15 ans.
52 Seul le dépouillement des annuaires locaux, et de la Semaine religieuse du diocèse permet de repérer ces initiatives (par exemple, pour les œuvres concernant les domestiques, cf. P. Guiral et G. Thuillier, La vie quotidienne des domestiques au xixe siècle, 1978, p. 230-235).
53 Les archives diocésaines et les archives des maisons religieuses sont une source importante ; pour un exemple des multiples œuvres dont s’occupait un évêché vers 1910, cf. G. Thuillier, Les institutions médico-sociales, ouv. cité, p. 231-233.
54 La « décadence » d’une maison est intéressante pour un historien.
55 En 1996, on ne sait plus comment vivait exactement un orphelinat vers 1930 (cf. Rémy Laville, ouv. cité à la note 50).
56 Il faudrait avoir des modèles d’archives pour chacun de ces segments : ainsi pour l’idiot (cf. G. Thuillier, L’imaginaire quotidien au xixe siècle, 1985, p. 167-175), pour le suicide et le suicidant (cf. ibidem, p. 176-182). Les archives judiciaires peuvent fournir beaucoup à cette histoire des faibles, mais aussi les archives des hospices, des bureaux de bienfaisance, des maisons de mendicité, et surtout les archives diocésaines et les archives des congrégations charitables.
57 Pour un exemple local d’histoire des enfants idiots, cf. G. Thuillier, L’imaginaire quotidien, ouv. cité, p. 117-120. La vision de l’idiotie a beaucoup changé depuis 30 ans, on n’imagine plus guère la mutation des esprits (c’est la création de l’Intergroupe Enfance handicapée au Commissariat général au Plan, avec le rapport Therre en 1965, qui a amorcé une politique globale).
58 C’est là un chantier considérable, avec des archives administratives peu exploitées, des archives hospitalières mal protégées, une littérature médicale très riche ; c’est une histoire qu’il faudrait entreprendre systématiquement avec les méthodes d’érudition nécessaires à l’échelle locale.
59 Alain Corbin a lancé des recherches en ce domaine, mais on voit bien l’importance qu’aurait un tel travail pour les années 1914-1970.
60 On dispose maintenant d’un remarquable inventaire général des fonds judiciaires (J.-C. Farcy, Guide des archives judiciaires et pénitentiaires, 1800-1958, 1992), et dans les directions d’archives des départements, on a désormais des états très détaillés des fonds, résumés par Farcy. Mais nous manquons de lumières sur les archives hospitalières (il faudrait un guide analogue pour les hôpitaux et hospices) et sur les archives des associations charitables, qui paraissent généralement menacées en province (par exemple pour la Sauvegarde de l’adolescence).
61 Un « programme de travail » devrait établi et diffusé, car c’est là un secteur à taux d’innovation fort élevé (le métier social est d’abord féminin).
62 On peut rêver de monographies, à l’échelle d’un département, sur les actions charitables en faveur des femmes.
63 Ainsi la religieuse dans les asiles d’aliénés, la religieuse qui éduque les sourds et muets ou s’occupe d’enfants « incurables ». Mais malheureusement, l’histoire des religieuses soignantes ou charitables est souvent très imparfaite, la règle étant généralement l’anonymat, on ne garde pas toujours trace de leur action. C’est en lisant le journal de Liane de Pougy, princesse Ghika (Mes cahiers bleus, Plon, 1977) qu’on découvre l’Œuvre de Sainte-Agnès, près de Grenoble, destinée aux fillettes handicapées mentales, dirigé en 1928 par mère Marie-Xavier, et dont s’occupa la princesse devenue l’amie de la supérieure (cf. p. 247-248, 302-303) ; qui nous donnera l’histoire de cet Asile de Sainte-Agnès et de ses religieuses ?
64 Sur le mouvement noëliste, cf. G. Thuillier, Les institutions médico-sociales, ouv. cité, p. 254.
65 L’histoire des infirmières, des assistantes sociales a été bien développée depuis vingt ans, mais il reste beaucoup à faire en ce domaine, on le voit bien en examinant les actions de l’Église des années 1910-1940 ; parfois les biographies de mystiques laïques sont très révélatrices.
66 Ainsi les « tontines » ont-elles favorisé la diffusion d’idées de prévoyance ; elles ont freiné dans un premier temps la diffusion des assurances (en raison de sinistres importants), mais elles ont habitué à l’idée de retraites viagères ; il nous manque une bonne histoire des tontines au xixe siècle (cf. « Note sur les sources de l’histoire des tontines », Bulletin d’histoire de la Sécurité sociale, n° 31, 1995, p. 33-44).
67 Ces procès-verbaux, avec les rapports du préfet (et ceux du directeur d’asile d’abord et de l’inspecteur de l’enfance assistée) sont souvent très riches (ils sont imprimés à partir de 1830-1840, ce qui facilite le dépouillement).
68 Par exemple, les journaux de province dans les années 1846-1848 donnent beaucoup de renseignements sur l’état des esprits progressifs, on y voit bien le rôle joué par les fouriéristes, les catholiques charitables, on y trouve des projets de caisses de secours mutuels, de participation aux bénéfices, de retraites ouvrières, etc.
69 Les techniques de diffusion et d’influence des fouriéristes entre 1840 et 1850 sont assez étonnantes (on le voit bien avec le fonds de correspondance de la Démocratie pacifique, conservé aux Archives nationales, 10 AS) ; les fouriéristes travaillent en réseaux, c’est presque une secte.
70 Les Semaines religieuses des diocèses sont, à partir des années 1860, des sources précieuses d’informations.
71 Cf. « Un plan saint-simonien de Caisse des retraites des invalides de l’industrie », dans le Bulletin d’histoire de la Sécurité sociale, n° 23, 1991, p. 143 et suiv. (Cazeaux était un aïeul du président Bernard Chenot).
72 Il y aurait toute une étude à faire sur la psychologie du « projeteur » et celui du « fondateur », sur la formation de leurs idées, sur leurs moyens d’influence : fonder une œuvre suppose beaucoup de talents, de relations, de diplomatie et de ténacité, mais il y a souvent quelques « zones obscures ».
73 On voit bien que nous aurions pu en dresser d’autres, mais nous ne donnons que les programmes prioritaires.
74 À l’évidence, il faut éviter les sujets trop limités du type « la protection sociale de 1920 à 1930 » ; un fonctionnaire, un dirigeant d’œuvre exerce ses fonctions 40 ans, parfois plus, il y a beaucoup de pesanteurs, de frottements, de blocages.
75 Chercher à expliquer à tout prix est de mauvaise méthode : en histoire sociale, sur bien des points, on ignore beaucoup de choses (et on n’a parfois aucune chance de les connaître un jour), on reste nécessairement en deçà. L’utilisation des hypothèses des sociologues, « qui savent tout » et peuvent tout expliquer, est nécessairement dangereuse ; en principe, l’histoire de la protection sociale est une histoire qu’il faut éviter de simplifier, qu’il faut même compliquer (cf. G. Thuillier, « Sur la nécessité de compliquer en histoire sociale », Bulletin d’histoire de la Sécurité sociale, n° 31, 1995, p. 23-29) ; mais on ne met pas assez en garde les jeunes historiens contre la tendance à « simplifier », à expliquer. Ceux qui ont administré dans le secteur social, ou qui ont la pratique du terrain, savent bien qu’on ne peut savoir qu’une partie des choses.
76 Les problèmes présents – ou d’un futur proche – exercent nécessairement une influence sur les centres d’intérêt des historiens ; c’est là une chose excellente – à condition, toutefois, que les problèmes actuels ne viennent pas fausser le jugement et altérer l’impartialité (ce qui n’est pas rare).
77 Donnons un exemple : la drogue est apparue en France massivement à partir de 1969-1971, mais l’historien ne s’est pas encore emparé du sujet, qui appartient à la fois à l’histoire psychiatrique, à l’histoire sociale, à l’histoire de la protection sociale, le toxicomane étant considéré comme un malade à protéger aux termes de la loi de 1970. Mais on voit bien que dans les dix ou quinze prochaines années, les historiens seront forcés de jeter un regard d’historien sur ce qui s’est passé entre 1970 et 2000, sur les échecs, les hésitations, les aspects médico-sociaux, les réactions du corps social, de l’institution judiciaire et pénitentiaire, les liens avec le SIDA à partir de 1986, etc. ; on voit très bien là le thème d’une, de deux ou trois thèses, qui seront forcées, faute d’archives consultables, d’utiliser les archives orales, d’interroger les acteurs du système (un Docteur Olievenstein, par exemple, aura beaucoup à dire). Mais on voit aussi que l’historien sera bien obligé d’avoir comme « consultant » un médecin, pour éviter des « erreurs d’interprétation ».
78 Cf. « Comment marquer sa différence », Revue administrative, 1994, p. 518-521.
79 On sait combien le modèle labroussien a coûté à l’histoire sociale. « Contre une histoire quantifiée des structures sociales, il s’agissait d’opposer (et c’était le plus facile, car c’était sur ce point que l’usure du modèle labroussien était la plus forte), que les hommes ne sont pas dans les catégories sociales comme des billes. », (B. Lepetit, ouv. cité à la note 4, p. 13). L’histoire « marxisante » a souvent freiné le développement de l’histoire de la protection sociale, et des institutions sociales, car elle ne comprenait guère le rôle de l’État, de l’administration et méprisait l’histoire institutionnelle. Une histoire des avatars de l’histoire sociale en France depuis 1945 serait bien intéressante, et les tentatives de « rénovation » n’ont pas encore porté leurs fruits.
80 Le droit des affaires et l’histoire, Economica, 1995, p. 10.
81 Celui qui a administré à la Santé, à la Sécurité sociale ou au Travail, ne peut regarder les dossiers d’archives des années 1820 ou 1860 de la même façon que l’historien débutant ; il lit autrement les textes, il voit s’esquisser des conflits, des querelles qu’il décode aisément, il trie ce qui est important et ce qui l’est moins. L’expérience de la « chose sociale » est nécessaire à l’historien (et comment comprendre des correspondances saint-simoniennes ou fouriéristes si l’on n’a jamais participé à un club politique ?). Mais il n’est pas commode d’être historien et de posséder aussi une certaine pratique sociale.
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