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Les Pays-Bas et la coopération monétaire européenne, 1968-1972

p. 85-108


Texte intégral

Introduction

1Cet article présente une analyse de l’évolution de la position du gouvernement néerlandais à l’égard de la coopération monétaire européenne dans l’une des phases cruciales de son développement. Au cours des années soixante, La Haye a été un fervent défenseur de la coopération mondiale dans le cadre du système de Bretton Woods. Ce système répondant au besoin ressenti aux Pays-Bas de pouvoir disposer de taux de change fixes et de règles communes, toute initiative européenne en la matière était rejetée, car considérée comme inutile. Néanmoins, au début des années soixante-dix, le gouvernement néerlandais adoptait une position de plus en plus positive par rapport à la coopération monétaire européenne. L’un des principaux arguments justifiant ce changement d’attitude était non seulement l’effondrement du système de Bretton Woods, mais également le fait que les Six, qui avaient entamé des négociations à propos du plan Werner de 1970 visant à la mise en place de l’Union économique et monétaire, avaient opéré un rapprochement. Cette analyse est précédée d’un exposé sur l’organisation et la coordination de la politique néerlandaise.

I. PROCESSUS DÉCISIONNEL ET COORDINATION

2Traditionnellement, le Premier ministre ne jouait pas un rôle significatif dans la politique étrangère néerlandaise. Il était davantage considéré comme primus inter pares que comme chef du gouvernement. Ce n’est qu’à partir de 1974 que la fonction du Premier ministre allait prendre de l’importance en raison des très nombreuses conférences au sommet européennes. Mais ce n’était pas encore à l’ordre du jour lors de la conférence de La Haye en 1969. Bien que le Premier ministre, P.J.S. de Jong, présidât la conférence, son rôle dans la détermination de la politique néerlandaise était pour ainsi dire inexistant. À titre d’exemple, si à l’issue de la conférence de La Haye, De Jong a effectivement ouvert la conférence de presse, c’est le ministre des Affaires étrangères de l’époque, J.M.A.H. Luns, qui a pris le relais pour aborder les problèmes politiques2.

3Au niveau ministériel, le processus décisionnel concernant la politique étrangère néerlandaise n’est pas coordonné selon une structure « du sommet à la base ». Il ne saurait être question de prêter en la matière un rôle exclusif au ministère des Affaires étrangères. La coordination a toujours été et demeure une chose très complexe. Pendant des décennies, les ministères des Affaires étrangères et des Affaires économiques se sont opposés sur le point de savoir à qui revenait la tâche de coordonner les relations économiques extérieures. La responsabilité finale de la politique étrangère revenait bien entendu au Conseil des ministres. Très souvent les décisions étaient prises par une sous-commission : le Conseil des Affaires européennes, présidé par le Premier ministre. Il n’en reste pas moins que la coordination de la politique européenne se situait, dans une large mesure, à un niveau administratif interministériel : à savoir au sein de l’importante Commission de coordination pour les questions d’intégration européenne et d’association. Dans ses grandes lignes, cette commission est comparable au secrétariat général du Comité interministériel de coopération économique européenne (SGCI) français. Mais contrairement à l’institution homologue française, la commission néerlandaise ne relève pas de la responsabilité du Premier ministre. Le secrétariat était assuré par les Affaires étrangères, alors que (du moins jusqu’en 1971) le ministre des Affaires économiques présidait les réunions. C’est d’ailleurs en partie sur les archives de cette commission qu’est basé le présent article.

4Le ministère des Finances néerlandais n’était pas et n’est toujours pas un super ministère comme c’est le cas en France et au Royaume-Uni. Ses compétences techniques étaient en fait limitées à deux domaines : le trésor et les impôts3. Le commerce extérieur, par exemple, relevait du ministère des Affaires économiques. Le rôle des Finances était en outre limité par l’indépendance tant glorifiée de la banque centrale, De Nederlandse Bank (DNB). Le directeur du Trésor entretient toutefois d’étroites relations avec le président de la DNB. Par ailleurs, la DNB a participé aux procédures de concertation de la commission de coordination. Jusqu’à la fin des années soixante-dix, le ministère ne disposait pas d’un service spécifique pour les Affaires européennes – jusqu’à cette époque, ces questions étaient traitées par les services déjà en place. En ce qui concerne notre article, le service le plus important était la direction des Transactions financières avec l’Étranger et notamment le service des Affaires monétaires qui relevait du secteur Trésor du ministère. Ce service était chargé de traiter les questions monétaires internationales et celles relatives à la balance des paiements, les affaires concernant le FMI ainsi que les problèmes monétaires dans le cadre du FMI, de la CEE, de l’OCDE et du Groupe des Dix. En fait, seule une poignée de fonctionnaires du ministère des Finances participait au processus décisionnel en matière de politique européenne.

5Par qui était assurée la coordination de la politique monétaire européenne aux Pays-Bas ? On ne dispose d’aucune étude relative au processus décisionnel au cours de cette période. Mais si l’on se fonde sur les sources que nous avons étudiées pour rédiger cet article, nous pouvons en conclure que les discussions menées au sein des différents organes ont permis de parvenir à un large consensus. C’est le caractère collégial qui prévalait dans la prise de décisions. Le ministère des Finances y avait une influence tout à fait perceptible. Il va de soi qu’il y avait des intérêts divergents. Par exemple, du côté du ministère des Affaires étrangères, on craignait quelque peu que les fonctionnaires des Finances soient trop intéressés par les aspects techniques et puissent, de ce fait, négliger le côté politique. C’est ainsi que, en 1966, a surgi un conflit sur le soutien apporté par le ministère des Finances à certaines propositions françaises qui étaient trop anti-américaines aux yeux du ministère des Affaires étrangères4. De l’autre côté, les fonctionnaires du ministère des Finances se battaient pour une discipline monétaire au moment où les Affaires étrangères semblaient disposées à faire des concessions pour pouvoir en tirer avantage sur d’autres terrains (politiques). Mais, en général, on peut dire qu’il y avait un consensus dans le processus décisionnel néerlandais – notamment sur la question de savoir quelle direction donner à la coopération (monétaire) européenne.

II. LES PAYS-BAS ET LE SYSTÈME DE BRETTON WOODS

A. Des taux de change fixes et une discipline politique internationale

6Eu égard à leur économie ouverte, il est essentiel pour les Pays-Bas de pouvoir compter sur des relations monétaires internationales bien réglées5. C’est la raison pour laquelle les Pays-Bas se sont toujours montrés attachés à des taux de change fixes ou stables. Avant la seconde guerre mondiale déjà, on attribuait à ces derniers une grande importance dans le cadre de la politique monétaire. Ce n’est pas un hasard si, en 1936, les Pays-Bas ont été l’un des derniers pays à renoncer au lien fixe entre la monnaie et l’or.

7Cette priorité a été maintenue après la guerre. Selon les responsables politiques néerlandais, des taux de change fluctuants auraient entraîné une course à la dévaluation et conduit au protectionnisme, bref, cela aurait été un premier pas menant tout droit à une anarchie financière et monétaire qui n’aurait profité à personne, mais aurait risqué surtout de nuire aux petits pays caractérisés par une économie ouverte. Le système de Bretton Woods – avec ses obligations communes et la discipline qu’elles impliquaient au niveau de la politique monétaire pour les pays participants – était de loin préférable à une situation où les taux de change résultaient des épreuves de force successives entre les grandes puissances6.

8Ce système était d’ailleurs plus un moyen qu’un objectif. Les efforts déployés en faveur de taux de change stables étaient considérés comme une façon d’instaurer une discipline politique internationale. D’une part, on ne peut avoir des taux de change stables que si la politique a été suffisamment coordonnée et, d’autre part, ceux-ci imposent jusqu’à un certain degré la poursuite d’une telle politique. Du point de vue néerlandais, ce système devait donc inciter à une certaine discipline. Les tentatives visant à mettre en place des taux stables en octroyant des crédits illimités se sont révélées aberrantes7. C’est la raison pour laquelle on a insisté particulièrement sur le fait qu’il ne fallait pas trop faciliter le financement des déséquilibres externes, de façon à contraindre les pays à procéder en temps voulu aux adaptations qui s’imposaient8.

9En tout état de cause, sous l’empire des règles de Bretton Woods, la coordination de la politique internationale n’a pas constitué jusqu’en 1958 une question prioritaire en raison du fait que, dans le cadre de ce système, tous les pays étaient soumis à des règles communes très claires, en particulier pour ce qui était du taux de change. En principe, l’ajustement résultait de l’application des règles9. Ainsi que l’a fait remarquer le président de la Nederlandse Bank, H.W Holtrop, en 1964 : « Dans la lutte contre l’inflation [...] aucun phénomène n’est plus utile [...] que le déficit de la balance des paiements. On peut le comparer à la douleur qui signale le processus pathologique »10.

B. Problèmes

10Au cours des années soixante, le fonctionnement du système de Bretton Woods a posé de plus en plus de problèmes. Ceci était dû en grande partie au déficit croissant de la balance des paiements américaine et à la pression qui en résultait sur le dollar. Les responsables politiques néerlandais ont très tôt attiré l’attention sur le danger que représentait la politique américaine dite de « benign neglect » (aimable indifférence). Ils estimaient que seule une adaptation de la politique monétaire des Etats-Unis pourrait éviter une inflation mondiale, l’ébranlement du dollar et, en fin de compte, la chute du système de Bretton Woods. À partir de 1959, les autorités monétaires néerlandaises ont, à plusieurs reprises, invité les États-Unis à trouver une solution à leurs problèmes de balance des paiements en adaptant leur politique économique, monétaire et fiscale interne.

11Ce que les Néerlandais craignaient le plus, c’était que l’étalon or-dollar ne se transforme progressivement en un étalon dollar qui permettrait aux États-Unis de financer à long terme les déficits de leur balance des paiements sans avoir à convertir les dollars en or. Pour exercer une pression sur les États-Unis, la Nederlandse Bank ne conservait que des réserves limitées en dollars. Dans les années soixante, la majeure partie des réserves était constituée par de l’or. Jusqu’au mois d’août 1971, c’est-à-dire jusqu’au tout dernier moment, la DNB convertissait tous les dollars qu’elle recevait11.

C. Un privilège monumentalement abusif ?

12La lutte engagée par les Pays-Bas, dans la seconde moitié des années soixante, en vue de maintenir l’or comme référence pour les paiements internationaux s’apparentait à la politique française à l’égard de l’or, mais avec des différences importantes. En tout premier lieu, seule une petite partie des revenus néerlandais en dollars a été convertie en or ; la majeure partie a été convertie en actifs détenus auprès du FMI et en Droits de Tirage Spéciaux (DTS). Mais plus important encore était le fait que, pour les Pays-Bas, il n’était pas question du fameux « privilège monumentalement abusif » de la thèse gaulliste. Pour les Hollandais, le cœur du problème résidait dans le fait que l’organisation internationale des réserves et la politique monétaire qui la déterminait étaient entièrement laissées au soin des États-Unis et ne relevaient pas de la responsabilité internationale. « Les avantages certains » que les États-Unis tiraient du système, notamment la possibilité de couvrir une partie du déficit de leur balance des paiements par la délivrance de reconnaissances de dette, constituait, selon les dires de Holtrop en 1964, un phénomène « relativement peu important » comparé au problème précité12, étant donné que les pays européens bénéficiaient en fin de compte d’une large compensation par le fait que les États-Unis acceptaient les éléments protectionnistes de la CEE et qui plus est qu’ils jouaient un rôle central dans la défense de l’Europe occidentale contre l’Union soviétique. J. Zijlstra (ancien ministre des Finances et, à l’époque, président de la Nederlandse Bank) a écrit dans ses mémoires : « Les États-Unis ont, à ce jour, rendu au monde des services inestimables [...]. Nous leur devons notre liberté. Mais pour ce qui concerne le régime monétaire international, des critiques sérieuses peuvent être formulées. Peut-être nous faut-il accepter cela par surcroît »13.

D. Effondrement

13Au sein du Groupe des Dix, les Pays-Bas ont essayé, d’une part, d’exercer des pressions sur les États-Unis pour les forcer à adapter leur politique financière interne et, d’autre part, d’inciter les autres pays participants à coordonner leur politique en ce qui concerne la conversion des dollars. Lorsque, au mois de mai 1971, à la suite de la crise du dollar, il a fallu laisser flotter le mark et le florin et que la chute du système semblait proche, le ministre des Finances H.J. Witteveen a fait une dernière tentative pour trouver un compromis entre les positions américaine et européenne. Une conférence internationale devait mettre au point une solution d’ensemble au cœur de laquelle figurait la position des Européens exigeant des Américains qu’ils procèdent à un ajustement monétaire. Mais cette initiative n’a pas été suivie d’effet. Le système de Bretton Woods s’est effondré trois mois plus tard lorsque le président Nixon a dévalué le dollar et a suspendu unilatéralement la convertibilité en or.

E. Intégration monétaire européenne

14Pendant toute cette période, le gouvernement néerlandais n’a considéré la coopération monétaire européenne que comme un moyen de pouvoir exercer conjointement une pression sur les États-Unis, rejetant parallèlement toute intégration monétaire européenne.

15Dans le débat entre ceux qu’on est convenu d’appeler les « monétaristes » et les « économistes », les Pays-Bas s’étaient clairement ralliés à ces derniers. Du point de vue néerlandais, l’harmonisation de la politique économique était la condition sine qua non d’une union monétaire. Atteler le chariot monétaire devant le cheval économique ne pouvait que générer des tensions entre les États membres. En particulier au ministère des Finances, on avait tendance à considérer les propositions faites dans le sens d’une union monétaire essentiellement comme des plaidoyers en faveur d’une extension des facilités de crédit sans conditions. Et on estimait que celle-ci était non seulement inutile eu égard aux facilités existantes dans le cadre du FMI, mais aussi indésirable étant donné que des facilités de crédit supplémentaires ne pouvaient que saper la discipline monétaire des États membres (telle la France) déjà confrontés à d’importants déficits de leur balance des paiements.

III. LES PREMIERS PAS : LES PAYS-BAS ET LE PLAN BARRE

16Le plan de coopération économique et monétaire, lancé par R. Barre, alors commissaire européen, le 12 février 1969, comportait quatre volets qui globalement constituaient les premiers pas sur la voie d’une union économique et monétaire intégrale :

  • consultation préalable entre les États membres de la CEE sur les mesures de politique conjoncturelle – c’est-à-dire la politique économique à court terme ;

  • détermination, d’un commun accord, des objectifs quantitatifs de la politique économique à moyen terme ;

  • mise en place d’un mécanisme de crédit entre les banques nationales à court terme ;

  • instauration d’un système de soutien mutuel à moyen terme.

17Ce dernier point était l’élément le plus sensible : en effet, dans quelle mesure les États membres de la CEE étaient-ils disposés à s’impliquer dans un mécanisme de solidarité financière et monétaire mutuelle ?

18Initialement, il n’y avait à La Haye pratiquement aucune divergence de vue au sujet de l’importance du plan Barre. Il a été lancé sous une mauvaise étoile : les débats à Bruxelles relatifs au financement des Communautés et à la politique agricole commune étaient très laborieux. Les Pays-Bas, la Belgique et le Luxembourg avaient clairement fait savoir, dans un mémorandum commun des pays du Benelux, que la levée du veto concernant l’adhésion britannique était une condition sine qua non de leur concours à l’intensification de la coopération européenne sous quelque forme que ce soit14. En avril 1969, le ministre des Finances Witteveen faisait savoir, au sein du gouvernement néerlandais, qu’il émettait des réserves par rapport au plan : toute autre considération mise à part, parmi les États membres de la CEE seule la France – « connue autrefois pour être fermement opposée à de tels plans »– avait besoin de facilités de crédits – européens – supplémentaires15. En février déjà, il avait attiré l’attention, à la Chambre des députés, sur le danger que pouvaient représenter les arrangements monétaires régionaux pour le bon fonctionnement des institutions mondiales de Bretton Woods : « En créant de tels mécanismes au sein de la Communauté, nous devons veiller à ne pas isoler davantage cette Communauté du système mondial sous la conduite du FMI »16.

19La première analyse approfondie du plan Barre par le ministère des Finances a été faite pendant l’été 1969 alors que le climat diplomatique se portait mieux. La succession inattendue de Pompidou à de Gaulle ainsi que les indices selon lesquels le gouvernement français chercherait à mettre en place une conférence au sommet des chefs d’État et de gouvernement afin de sortir de l’isolement politique que la France s’était elle-même imposé en Europe (la France avait également tourné le dos à la coopération dans le cadre de l’UEO, après avoir pratiqué la politique de la chaise vide au sein de la CEE et après les crises qu’avait connues l’OTAN) laissaient espérer une sortie de l’impasse européenne et un consensus possible sur les grandes questions ouvertes : la levée du veto à l’adhésion britannique et le financement des Communautés, avec en particulier la politique agricole commune. À l’origine, les Pays-Bas avaient de sérieuses objections contre la tenue d’une conférence au sommet intergouvernementale des États membres en dehors des institutions de la CEE (ils craignaient qu’une telle réunion au sommet ne sape l’organisation communautaire au niveau du processus décisionnel), mais ils finirent par céder, en partie parce qu’ils ne voulaient pas être désignés comme ceux qui avaient mis des bâtons dans les roues17.

20Dans son analyse le ministère des Finances manifestait un point de vue positif en ce qui concerne les propositions de consultation, tout en se montrant plutôt sceptique vis-à-vis des mécanismes de financement proposés. La concertation fréquente sur la politique à moyen terme était accueillie très favorablement comme étant un moyen de mettre à plat la question relative aux rythmes d’inflation divergents entre les États membres. La proposition relative à une concertation sur la politique à court terme était également considérée de manière positive. Néanmoins, compte tenu des divergences existant entre les États membres au niveau de leur politique concrète, il ne fallait pas, selon le ministère, attendre grand-chose de ces deux propositions. La nécessité de mettre en place les mécanismes proposés n’était pas du tout démontrée, étant donné qu’ils ne permettaient pas d’éviter les crises monétaires, ni d’y remédier. À titre de compromis, il paraissait possible d’envisager, en lieu et place du mécanisme d’aide à court terme, une déclaration d’intention commune des banques centrales dans laquelle elles stipuleraient qu’elles continueraient à s’entraider en cas de difficulté par le biais d’un crédit à court terme. L’octroi de crédits automatique et sans condition proposé par la Commission pour le moyen terme comportait le risque de voir les décideurs tentés de différer les mesures douloureuses mais nécessaires, compte tenu a fortiori d’une éventuelle concurrence indésirable avec les facilités de crédit du FMI qui étaient, elles, réellement assorties de conditions. Les crédits de la CEE devant tout au plus servir de compléments aux crédits du FMI, le ministère conseillait d’adopter « une position très réservée » avec comme point central cette exigence en matière de complémentarité18.

21L’avis autorisé du Conseil Économique et Social (CES) présentait la même ambivalence. L’idéal de la CEE, à savoir « une union économique assortie d’une politique commune intégrale dans les domaines économique, monétaire et financier » était encore bien loin. Le renforcement de la coordination de la politique en la matière, même sous la forme modeste proposée dans le mémorandum de la Commission, pouvait à tous égards être utile. De même, un régime de taux de change fixes pouvait présenter l’avantage d’inciter à la mise en place d’une politique économique mieux coordonnée au sein de la CEE. Le CES avait toutefois des doutes quant à la coopération monétaire proposée. Étant donné qu’il est indispensable, dans une communauté économique, d’instaurer une politique bien coordonnée, le fait de reconnaître l’existence d’une certaine responsabilité mutuelle spécifique en matière financière n’était pas illogique, mais avait-on vraiment besoin des facilités proposées en plus de celles existant déjà dans un cadre international plus large ? Et les Six ne constituaient-ils pas un groupe trop restreint pour qu’un tel mécanisme de crédit complémentaire joue son rôle ? Il valait mieux, à l’instar du ministère des Finances, laisser aux banques centrales le soin de mettre en œuvre le mécanisme de crédit à court terme, tout mécanisme éventuel de crédit à moyen terme devant par ailleurs revêtir une importance limitée. Il n’y avait pas lieu d’intégrer dans la coopération des éléments susceptibles de donner naissance à une union monétaire, car « une union monétaire ne peut être que l’aboutissement d’un processus d’intégration réussie »19.

22Le ministère des Affaires économiques était lui plus favorable au plan Barre que le ministère des Finances et le CES, faisant valoir qu’il fallait bel et bien que le renforcement de la coordination de la politique s’accompagne de facilités de crédit mutuelles plus étendues, plutôt que d’estimer, à l’instar du ministère des Finances, que de telles facilités ne devaient être considérées que comme le résultat d’une telle coordination. En revanche, le ministère des Affaires étrangères partageait le point de vue négatif du ministère des Finances, mais pour une autre raison : une coopération monétaire approfondie pouvait, en effet, compliquer les négociations relatives à l’adhésion du Royaume-Uni et d’autres pays candidats20.

23La Commission de coordination officielle pour l’intégration européenne a suivi, en grande partie, les avis exprimés par le ministère des Finances et le CES. Selon elle, une harmonisation des objectifs en matière de politique à moyen terme s’avérait nécessaire et il était possible d’accepter des consultations préalables sur la politique à court terme, l’octroi de crédits à court terme devant, par ailleurs, rester une question du ressort des banques centrales. La commission de coordination souscrivait à un arrangement relatif à un soutien mutuel à moyen terme, à la condition que ledit soutien intervienne en complément des crédits FMI ou à parité avec ceux-ci. Etant donné qu’un tel mécanisme monétaire était de nature à compliquer les négociations sur l’adhésion, il fallait selon elle adopter une attitude réservée, consulter les candidats à l’adhésion, en particulier le Royaume Uni, et recueillir leur point de vue sur ces propositions. Les conclusions de la commission de coordination ont été reprises par le gouvernement néerlandais21.

24La position réservée adoptée par La Haye a enregistré un écho favorable auprès des autres États membres de la CEE. Le 17 juillet 1969, le Conseil des ministres a débattu du plan Barre et chargé le Comité monétaire d’établir un rapport sur les modalités de mise en œuvre d’un mécanisme de soutien à moyen terme. Au cours de ce même conseil, un accord a été trouvé sur la procédure des consultations préalables à court terme, le premier et le moins sensible, politiquement, des quatre volets du plan Barre22.

IV. LE TOURNANT : LA CONFÉRENCE DE LA HAYE DE DÉCEMBRE 1969

25À partir de l’été 1969, les décideurs néerlandais ont adopté progressivement une position plus favorable en ce qui concerne la possibilité et l’opportunité d’une coopération monétaire européenne ainsi que des consultations politiques qui s’y rattachent. Plusieurs facteurs ont contribué à cette évolution.

26En tout premier lieu, les problèmes de fonctionnement de l’union douanière européenne et de la Politique agricole commune (PAC) liés à l’instabilité des monnaies. En mai déjà, le ministre de l’Agriculture, P.J. Lardinois, attirait l’attention sur le fait qu’en raison de l’instabilité du franc français, tous les stocks de céréales français se délocalisaient progressivement vers la RFA et vers les Pays-Bas23. La dévaluation du franc français a toutefois été une surprise, d’autant plus que Paris, contrairement à ce qui avait été convenu en 1964, avait omis de consulter préalablement ses partenaires de la CEE. Cette dévaluation, ainsi que la réévaluation du mark allemand en octobre, ont généré d’autres problèmes pour la PAC et nécessité des arrangements compliqués avec prélèvements et subventions aux frontières afin de pouvoir maintenir en place le régime des prix unitaires communautaires. En août, le gouvernement néerlandais est, à l’instar de la Commission européenne, arrivé à la conclusion que les taux fluctuants constituaient un obstacle au bon fonctionnement du Marché commun24.

27À cela venait s’ajouter le fait que les conséquences monétaires directes de l’instabilité des taux de change devenaient de plus en plus sensibles. En octobre 1969, la Nederlandse Bank a fait savoir qu’elle avait été obligée d’acheter, sur une courte période, plus de 500 millions de dollars afin de maintenir le cours du florin au-dessous de sa limite et qu’il y avait lieu de craindre que cette pression à la hausse sur le florin ne subsiste aussi longtemps que les marchés financiers penseraient que les Pays-Bas procéderaient à une réévaluation25. Fort de ces expériences, le gouvernement a acquis la conviction qu’une meilleure harmonisation mutuelle des mesures de politique économique, conjoncturelle et monétaire, préconisée par le plan Barre, était indispensable si l’on voulait que l’Europe progresse et que, à défaut d’une telle harmonisation, on risquait de mettre en danger tout l’acquis en matière de coopération européenne26. La réalisation d’une Union économique et monétaire, que La Haye considérait antérieurement comme l’aboutissement formel du processus d’intégration européenne, apparaissait de plus en plus comme un objectif politique réalisable à moyen terme. Il n’est donc guère surprenant que la position à l’égard des propositions du plan Barre ait évolué dans le même sens. Comme on le constate dans les Annales du ministère des Affaires Étrangères publiées en 1970, la position réservée initiale a fait place à la conclusion que le plan Barre « ne constituait que la première phase, incomplète, de l’unification sur le plan économique et monétaire »27.

28Des considérations économiques et monétaires ont donc joué un rôle important dans le soutien apporté par les Pays-Bas aux résultats de la conférence au sommet de La Haye des 1er et 2 décembre 1969, au cours de laquelle devaient être décidées la création d’une Union économique et monétaire et la mise en place d’un Fonds de réserve européen. C’est également au cours de cette conférence qu’a été confiée au groupe Werner la mission d’élaborer un plan prévoyant les différentes phases de réalisation de ces objectifs.

29En outre, des considérations d’ordre politique ont joué un rôle significatif dans l’évolution de la position néerlandaise. Les veto opposés par de Gaulle, tant décriés à La Haye, devaient être levés et le fait que, d’après le ministre des Affaires étrangères Luns, la France était « demandeur » sur le plan de la coopération monétaire pouvait également s’avérer positif. Mais par-dessus tout, disait-il au gouvernement dès juillet 1969, les Pays-Bas devaient éviter que la France « ne tire profit de la politique agricole commune ainsi qu’éventuellement d’une politique monétaire commune, tout en remettant en question l’adhésion britannique »28. C’est la raison pour laquelle, selon Luns et son ministère, lors de la conférence, la priorité pour les Pays-Bas devait consister à lever le veto français et à fixer la date du début des négociations sur l’élargissement avec le Royaume-Uni et les autres États candidats à l’adhésion. En outre, « l’approfondissement » décidée à la conférence au sommet de La Haye (« achèvement, élargissement et approfondissement »), ne devait pas se limiter à la seule extension du domaine d’intervention des Communautés. Il fallait au contraire que cette intensification s’accompagne d’un rétablissement et d’un renforcement au niveau institutionnel : le retour aux procédures de décision à la majorité au sein du Conseil et l’élargissement du statut du Parlement européen et de ses compétences, entre autres par une déclaration de principe commune sur des élections directes. En contrepartie, les Pays-Bas pourraient, selon Luns, donner leur accord à une résolution stipulant que les Six « devaient étudier la possibilité d’instaurer une coopération plus étroite au plan monétaire »29. Lors du conseil interministériel officiel et des réunions du Conseil des ministres à la veille de la conférence, le raisonnement de Luns a été repris en grande partie, ainsi d’ailleurs que par Witteveen à la tête du ministère des Finances. La pression exercée par Lardinois, qui dirigeait le ministère de l’Agriculture, lequel avait critiqué les positions adoptées par Witteveen en matière de coopération monétaire comme étant « trop négatives », peut avoir joué un rôle dans cette évolution. Witteveen a pu ainsi souscrire à l’intégration dans le communiqué de la conférence d’une déclaration générale sur l’UEM, à la condition que l’attention soit attirée sur le fait qu’une union monétaire supposait une étroite coopération politique dans les domaines économique et financier, ainsi qu’un réel contrôle parlementaire. De même fallait-il souligner les objections des Pays-Bas à l’égard de l’octroi de crédits à moyen terme dans le cadre du plan Barre30.

30Le gouvernement éprouvait un sentiment mitigé à propos des résultats du sommet de La Haye. Un point acquis important était l’accord effectivement donné par la France à des négociations fixées au 1er juillet 1970 (même si cette date n’était pas citée dans le communiqué afin de ménager le président français) en ce qui concerne l’admission d’États candidats à l’adhésion. En contrepartie, on n’avait pas du tout avancé sur les questions institutionnelles. En revanche, pour ce qui était de la coopération monétaire, la conférence avait décidé que les États membres élaboreraient, dans le courant de 1970, sur la base des propositions Barre, un programme « en vue de la création d’une union économique et monétaire », passage immédiatement suivi de la condition essentielle formulée en ces termes par Witteveen : « Le développement de la coopération monétaire devrait s’appuyer sur l’harmonisation des politiques économiques ». En ce qui concerne le mécanisme des crédits, il avait également été convenu « de faire examiner la possibilité d’instituer un fonds de réserve européen auquel devrait aboutir une politique économique et monétaire commune »31.

31Bien que ce résultat répondît en grande partie aux souhaits de Witteveen et de son ministère, il semblerait que de fortes pressions aient dû être exercées sur eux pour qu’ils souscrivent à ces dispositions. Dans les coulisses, il n’y avait chez les protagonistes néerlandais aucune unanimité sur l’opportunité de la perspective de l’UEM. En juin 1970, Witteveen rappelait à ses collègues ministres que « lors de la conférence au sommet de La Haye, il avait été décidé, sous la pression exercée par le ministère des Affaires étrangères, que l’intégration monétaire européenne devait être réalisée à brève échéance. Le soussigné s’est toujours fait beaucoup de soucis à cet égard »32.

V. LES NÉGOCIATIONS CONCERNANT LE RAPPORT WERNER

32L’attitude réservée, précédemment décrite, de Witteveen et son département est devenue évidente lors des négociations qui ont suivi, en janvier, sur les propositions de Barre. Comme auparavant, le ministère des Finances affirmait que l’on n’avait nullement besoin d’un mécanisme de crédit CE à moyen terme en plus des facilités existantes dans le cadre plus large du FMI. L’introduction d’un tel mécanisme interne dans la CEE était fondée, selon le ministère des Finances faisant référence au sommet de La Haye, sur « des considérations non économiques, c’est-à-dire politiques ». Dans la pratique, seuls des pays « débiteurs » comme la France et l’Italie en bénéficieraient. Le nombre de participants (six pays) était trop réduit pour pouvoir faire fonctionner le système au bénéfice de tous. Si l’on devait malgré tout décider de l’instaurer, il fallait que les deux premiers volets des propositions de Barre (harmonisation des objectifs économiques à court et à moyen terme) soient réalisés et que le volume des crédits octroyés reste limité. Un fonds à hauteur de 1 milliard de dollars, dans lequel les Pays-Bas participeraient pour 100 millions, était le maximum acceptable. En outre, le ministère des Finances réintroduisait la condition de la complémentarité : le règlement européen devait fonctionner en complément ou tout au plus parallèlement aux crédits du FMI, la liquidité des créances mutuelles CE devant par ailleurs être garantie33.

33Mais entre-temps, la Commission avait établi un second mémorandum Barre, également appelé « mémorandum d’automne » et l’avait soumis au Conseil à la fin du mois de décembre 1969. Dans ce document, étaient proposés des objectifs macroéconomiques concrets à moyen terme, dans le sens du deuxième volet du plan Barre. Ce document a été favorablement accueilli par le ministère des Affaires économiques comme constituant « les prémices d’un dialogue permanent : la réussite dudit dialogue n’est pas assurée mais sa nécessité est incontestable »34.

34Au ministère des Affaires étrangères, les décideurs étaient un peu moins enthousiastes en ce qui concerne la mise en œuvre des propositions Barre. Ils arrivèrent à la conclusion que des experts pouvaient maintenant parvenir à un accord global sur chacun des trois volets. Cela était utile, mais ne changeait rien au fait qu’aucune avancée significative n’avait été réalisée « dans le sens d’une solide coordination de la politique » et se posait alors la question de savoir si les discussions « Barre », et en particulier celles concernant l’octroi de crédits à moyen terme, devaient être poursuivies lors des prochaines négociations sur la décision de La Haye relative à l’UEM ou si elles pouvaient déjà donner lieu à des décisions définitives. Le ministère des Finances allait mettre tout en œuvre pour prolonger les discussions, en essayant, conformément aux attentes du ministère des Affaires étrangères, de faire traîner ce qui avait été convenu et s’enliser les intentions non encore concrétisées35. Lors des consultations au sein de la commission de coordination interministérielle, il s’est avéré que d’autres ministères souhaitaient également, pour d’autres raisons, adopter une attitude attentiste afin que le débat sur le plan Barre ne puisse porter ses fruits trop rapidement. L’attention avait, entre autres, été attirée sur le fait qu’il fallait être très prudent dans le cadre de la future adhésion britannique. Suite à la conférence au sommet, la coopération monétaire avait acquis une signification politique qui pourrait être exploitée ultérieurement. Alors les Pays-Bas devaient, au plan monétaire, garder leurs munitions en réserve36.

35Mais au cours des réunions du Conseil des ministres en février et mars, il devenait évident que le choix retenu par les Pays-Bas était partagé par les autres pays membres. Les ministres des Finances étaient convenus de mettre en place un groupe d’étude composé des présidents des cinq comités économiques et monétaires de la CEE, auxquels venaient s’ajouter un représentant de la Commission et un représentant du Luxembourg qui sinon ne serait pas représenté. À l’instigation de la Belgique, le Premier ministre et ministre des Affaires étrangères luxembourgeois, Pierre Werner, a été désigné comme président du groupe d’étude37.

36Dans l’attente du rapport intermédiaire du comité Wemer sur les « options fondamentales » dans la perspective de la coopération et de l’intégration monétaires, le ministre des Finances, Witteveen, a donné, le 26 mai 1970, une conférence, souvent citée, sur la politique néerlandaise en matière d’intégration monétaire européenne devant la Chambre de commerce internationale à Amsterdam. Dans sa conférence, Witteveen a manifesté à la fois un authentique idéalisme communautaire européen à long terme et une réserve par rapport à ce qui était réalisable à court terme. En développant les idées de J.W. Beyen, le pionnier visionnaire de la Communauté européenne, Witteveen s’est prononcé en faveur d’une union monétaire avec une seule monnaie commune, gérée par une Banque centrale européenne et un ministère européen des Finances, et s’est démarqué de l’option selon laquelle les devises nationales pourraient continuer à exister en plus de la monnaie centrale, l’introduction d’une seule et unique monnaie européenne s’avérant indispensable pour rendre l’unification monétaire européenne irréversible. Une telle Union, selon Witteveen, demanderait des sacrifices, mais elle les valait : grâce à l’absence de risques inhérents aux monnaies et à l’instauration d’une libre circulation des capitaux, la division du travail et, de ce fait, le commerce intra-européen, la production et la prospérité se trouveraient considérablement stimulés. En outre, la mise en commun des réserves de devises permettrait aux pays participants de mieux défendre la parité monétaire externe. Le ministre a néanmoins souligné qu’il fallait remplir un grand nombre de conditions avant de pouvoir réaliser l’intégration monétaire et qu’il serait extrêmement difficile de mettre en place une union monétaire au cours des années soixante-dix. La condition sine qua non pour y arriver était, selon lui, une solide intégration économique, budgétaire et politique, en d’autres termes une véritable union économique. Witteveen a esquissé pour son auditoire un futur dans lequel un ministère européen des Finances dirigerait non seulement le budget fédéral européen, mais surveillerait aussi les budgets nationaux. Les ministres des Finances nationaux n’auraient plus qu’une autonomie limitée du fait qu’ils seraient assujettis à cet organe supranational, ils auraient donc essentiellement une mission exécutive38. La conférence du ministre démontrait une fois de plus que, dans le débat entre les économistes et les monétaristes, il se situait clairement du côté des premiers.

37Cette contradiction entre les approches économique et monétariste a également constitué le trait dominant lors de la réception du rapport intermédiaire du comité Werner, présenté le 20 mai au Conseil et à la Commission. Dans le cadre de l’évolution qui y était proposée, en direction d’une union économique et monétaire, il n’avait concrètement été donné corps qu’à la première phase (jusqu’en 1974). Au cours de cette première phase, un fonds de stabilisation devait être instauré, les États membres de la CEE devaient agir conjointement au sein du FMI et les Six limiter les fluctuations de leurs taux respectifs. On donnait ainsi, dès la première phase, une « personnalité » à l’Europe sur le plan monétaire. En revanche, le rapport était très sommaire en ce qui concerne la coordination de la politique économique, le contenu des deuxième et troisième phases et le renforcement institutionnel des Communautés sur une base communautaire, que les Pays-Bas avaient préconisé. La commission de coordination officielle avait attiré l’attention sur le fait qu’en s’engageant dès la première phase dans des mesures monétaires, comme le souhaitait notamment la France, sans que l’on connaisse clairement le contenu des deuxième et troisième phases, on courait le risque de ne pas voir se concrétiser ses propres attentes. Le gouvernement ne devait pas prendre d’engagements par rapport aux conclusions du rapport39.

38À un certain moment, le consensus sur l’opportunité d’une attitude réservée a semblé menacé à La Haye du fait, il convient de le souligner, du ministère des Finances. Le 10 avril, le Comité monétaire avait remis son rapport final sur le mécanisme de soutien à moyen terme au Conseil et à la Commission. Le ministère des Finances estimait que les négociations sur ledit mécanisme, qui avaient été mises en veilleuse jusqu’à cette date, pouvaient maintenant être poursuivies de façon acceptable : s’il était possible de parvenir à un accord sur les objectifs quantifiés pour le moyen terme, le système – sans être lié aux négociations parallèles sous la présidence de Werner – pourrait voir le jour vers la fin de l’année. La Nederlandse Bank s’est néanmoins opposée à un mécanisme de soutien dépourvu de toute procédure permettant de contrôler si les objectifs formulés étaient réellement poursuivis. Ce faisant, elle reliait une fois de plus explicitement la réalisation des propositions de Barre à la mise en place de l’Union économique et monétaire. Le ministère des Affaires étrangères préférait également ne pas céder à l’urgence prônée par la Commission et intégrer le mécanisme proposé dans les négociations sur l’UEM, toujours dans la perspective des prochaines négociations sur l’adhésion40.

39Le 10 juin 1970, au cours de la réunion du Conseil des ministres à Luxembourg, les Pays-Bas et l’Allemagne se sont opposés, avec succès, au projet franco-belge de réduction des marges de fluctuation monétaires entre les Six, qui devait constituer la première étape sur la voie de l’union monétaire. Ils sont également parvenus à empêcher la création d’un fonds européen de stabilisation monétaire. Les Pays-Bas ont souligné que des accords visant à exclure toute modification des parités ne pouvaient être acceptés que si l’on avait atteint au préalable un certain degré d’unification économique.

40Les députés et journalistes hollandais ainsi que d’autres observateurs craignaient que l’avenir de la coopération monétaire européenne ne se retrouve dans une impasse : les Pays-Bas et l’Allemagne n’avaient nullement l’intention d’être « l’oncle d’Amérique » pour la France. Ils n’étaient disposés à s’engager dans une unification et une solidarité monétaires que si cela allait de pair avec une certaine autorité européenne sur la politique économique française. À l’inverse, la France, sous la présidence de Pompidou, souhaitait bien une coopération monétaire européenne dans la mesure où celle-ci pouvait, d’une part, soutenir la position monétaire précaire de la France (et, partant, contribuer à éviter les ajustements politiques internes déflationnistes si douloureux) et, d’autre part, ébranler l’hégémonie monétaire des États-Unis. Néanmoins, selon la tradition gaulliste, les Français ne souhaitaient aucun transfert de compétences nationales ni de communautarisation réelle. Toute autorité européenne sur le volume et le financement des déficits budgétaires nationaux, par exemple, était absolument exclue pour Paris. The Economist a rappelé que c’était précisément Pompidou qui avait rompu une lance à La Haye pour défendre la cause de l’union monétaire, ce qui avait été une véritable bévue politique. Si le Président avait mesuré ce qu’il avait déclenché, il y aurait sans doute réfléchi à deux fois41.

41L’offensive germano-néerlandaise contre le flou économique et le caractère non obligatoire des propositions provisoires de Werner fut couronnée de succès. Le 8 octobre 1970, la commission Werner publia son rapport définitif. Contrairement aux propositions du rapport provisoire, la commission recommandait une voie médiane très nuancée entre les souhaits des économistes et des monétaristes. Et en particulier, l’instauration des mécanismes de crédit et de solidarité, proposés par Barre, devait aller de pair avec la mise en place d’un « centre de décision communautaire pour la politique économique » et un système communautaire des banques centrales. Cela devait permettre de centraliser la politique monétaire interne et externe au sein de la Communauté et de fixer les limites de la politique budgétaire et de la politique conjoncturelle au niveau communautaire42.

42Le gouvernement des Pays-Bas estimait que ces propositions du groupe Werner étaient acceptables et obtint le soutien d’une majorité du Conseil Economique et Social (CES). Le plan Werner constituait, selon les décideurs de La Haye, un compromis acceptable entre, d’une part, les facilités et mesures monétaires souhaitées par la France et, d’autre part, la coordination en matière de politique économique et le renforcement du processus décisionnel et des compétences communautaires prônés par les Pays-Bas et l’Allemagne43. En revanche, le gouvernement français rejeta le plan Werner ; sans doute pour les motifs mêmes qui le rendaient acceptable pour La Haye. Au cours des séances du Conseil des ministres européens du 23 novembre et du 14 décembre, aucun consensus n’a pu être dégagé sur ce projet.

43Entre-temps, la Commission européenne avait publié, le 29 octobre, son propre rapport sur l’intégration monétaire, document qui était en grande partie basé sur le rapport intermédiaire de Werner et qui ne donnait pratiquement aucun élément sur le contenu de la phase finale et les compétences institutionnelles. Le centre de décision et la communautarisation de la politique étaient expressément occultés. Pour le gouvernement néerlandais, qui invoquait les intentions exprimées lors de la conférence au sommet de La Haye, ce rapport était absolument insuffisant. La Haye continuait à se ranger du côté de Werner et rejetait la proposition de la Commission, jugée au contraire très attrayante par la France44.

44Les préférences politiques des différents acteurs étant mutuellement inacceptables, la toute jeune coopération monétaire européenne risquait de s’enliser prématurément. Le 9 février 1971, les Six réussissaient néanmoins à trouver un compromis. Le cœur de la résolution formalisant ce compromis était constitué par le parallélisme à moyen terme proposé par Werner. Cette résolution ouvrait la voie aux mécanismes de crédit souhaités par la France, à une réduction des marges de fluctuation et à d’autres mesures monétaires. Une clause dite de « guillotine » stipulait néanmoins que ces mesures monétaires deviendraient automatiquement caduques dans le cas où, lors du passage à la deuxième phase, il n’y aurait pas unanimité sur le contenu de ladite phase et plus particulièrement au sujet de la coordination de la politique économique et l’organisation institutionnelle de l’Union économique et monétaire45.

45Au cours de cette même séance du Conseil, les États membres souscrivent à un octroi de crédits mutuel à hauteur de 2 milliards d’unités de compte (c’est-à-dire 2 milliards de dollars), dont 10 % seraient à la charge des Pays-Bas (200 millions de dollars), le double donc du montant considéré comme acceptable, un an plus tôt, par le ministère des Finances à La Haye. Et c’est ainsi qu’a été mis en place, après trois années de négociations, le mécanisme d’aide mutuelle à moyen terme proposé par Barre. Le Conseil a adopté également, à cette occasion, le programme de politique économique à moyen terme et, partant, les directives quantitatives pour la période allant de 1971 à 1975, comme prévu dans la deuxième proposition de Barre.

46Les décideurs néerlandais estimaient que le « compromis guillotine » était bien mince, mais que c’était ce que l’on pouvait faire de mieux dans les circonstances qui prévalaient. Étant donné que la France ne souhaitait absolument pas s’engager dans une communautarisation concrète et une harmonisation de la politique économique et financière et que l’Allemagne s’inclinait devant cet état de choses, il ne restait plus aux Pays-Bas que d’accepter la formule de compromis élaborée de concert par les Français et les Allemands46.

47Au cours des années soixante-dix, il n’y a guère eu d’unanimité entre les États membres de la CEE en ce qui concerne les deuxième et troisième phases de l’UEM. Malgré cela, la clause de guillotine ne devait jamais être appliquée, car le bouleversement monétaire mondial du début des années soixante-dix, plaça la tentative européenne d’instaurer une coopération monétaire régionale dans une perspective toute nouvelle.

VI. LA COOPÉRATION MONÉTAIRE EUROPÉENNE APRÈS BRETTON WOODS

48Au fur et à mesure que montaient les tensions au sein du système monétaire international, le gouvernement néerlandais considérait l’intégration monétaire européenne de plus en plus comme un moyen lui permettant de réaliser ses objectifs politiques en matière de stabilité des taux de change et de convergence de la politique économique – du moins au niveau régional. Depuis la séance du Conseil de la CEE sur l’UEM en février 1971, Witteveen avait adopté une attitude nettement plus positive qu’auparavant à l’égard de l’UEM47. Le compromis était acceptable pour le ministre. Et le fait que l’atmosphère entre les Six s’était considérablement améliorée s’est révélé également très important. D’un seul coup, des compromis semblaient possibles. C’est ainsi que, fin avril, Witteveen s’est montré enthousiaste au sujet de la concertation informelle des ministres des Finances de la CEE qui avait eu lieu à Hambourg. A sa grande satisfaction, il s’avérait que la concertation relative à la politique budgétaire avançait48.

49Mais au début du mois de mai 1971, les pays de la CEE ne parvenaient pas à trouver un accord sur une attitude commune à l’égard des taux de change. Le 9 mai, la RFA et les Pays-Bas laissaient flotter leur monnaie respective sous l’influence d’une offre trop importante de dollars. C’est dans ce contexte que Witteveen a fait la proposition précitée à ses collègues de la CEE, à savoir l’adoption d’une approche coordonnée des problèmes monétaires au sein du Groupe des Dix (voir le paragraphe 2d). Il proposait, entre autres, la mise en place d’une régulation du marché des devises européennes, le renforcement de la consultation en matière de politique budgétaire et monétaire et la limitation à 2 % au maximum de la marge dans laquelle les monnaies européennes pouvaient fluctuer. L’impression de Witteveen était la suivante : « On commence peu à peu à se rendre compte que, si la CEE reste divisée, nous en serons réduits à rester dans le sillage des États-Unis, alors que le gouvernement américain privilégie de plus en plus sa politique interne et ne montre que peu d’intérêt pour sa propre balance des paiements. Si les pays de la CEE pouvaient adopter une position unie, ils seraient bien plus forts »49.

50Néanmoins, en raison de l’instabilité monétaire mondiale, il n’a pas été possible de donner suite au projet consistant à réduire les marges des taux de change entre les monnaies. Le 15 août 1971, le président Nixon fermait le guichet de l’or américain, ce qui signifiait la fin du système de Bretton Woods. Mais à l’époque, ce n’était pas encore évident. En décembre 1971, il a fallu décider, à Washington, de revenir à un régime de taux de change fixes. Ce « Smithsonian agreement » constituait, à son tour, la base d’une nouvelle tentative européenne visant à renforcer la coopération économique et monétaire50. Après que le président Pompidou et le chancelier Brandt se soient mis d’accord, lors de la conférence au sommet franco-allemande en février, pour limiter les marges entre les devises européennes, le Conseil décida, le 21 mars 1972, à titre expérimental, de ramener les marges des taux de change des États membres de 4,5 % (comme convenu à Washington) à 2,25 %. Les quatre futurs États membres rejoignirent ce système, appelé le « serpent ».

51C’est le 1er avril 1973 que fut créé le Fonds européen pour la coopération monétaire, premier pas vers une Banque centrale européenne. Mais il a fallu suspendre la plupart des autres avancées vers la deuxième phase de l’UEM du fait des crises économique, monétaire et politique qui commençaient à se profiler. Le Royaume-Uni a libéré, dès juin 1972, le taux de la livre sterling, après quoi l’Irlande et le Danemark se sont également retirés du système CEE.

52La stabilité monétaire internationale n’est donc pas revenue après le « Smithsonian Agreement » de 1971. Ce fait a contribué au changement de cap de la politique néerlandaise : on ne considérait plus désormais les arrangements monétaires européens comme des éléments perturbateurs des systèmes internationaux. Et bien que les ministres des Finances qui se sont succédé aient insisté lourdement sur le fait que l’objectif final était le retour à un système universel, la réalisation de la coopération européenne a été, à partir de 1971, un point central de la diplomatie néerlandaise en matière monétaire51.

Conclusion

53La politique du gouvernement néerlandais vis-à-vis du problème de la coopération et de l’intégration européennes régionales dans le domaine monétaire a subi une évolution considérable au cours des années 1969-1971. Si, à l’origine, on considérait l’intégration comme l’aboutissement réalisable, dans un avenir très éloigné, du développement de la Communauté économique européenne, le gouvernement était disposé, à l’époque de la conférence au sommet de La Haye en décembre 1969, à hâter le processus d’évolution vers une Union économique et monétaire complète et à l’accepter comme un point concret à l’ordre du jour et un objectif politique à moyen terme. Cette prise de position a permis aux Six de trouver un accord, lors de la conférence au sommet de La Haye, sur le lancement des négociations avec le Royaume-Uni et les autres États candidats à l’adhésion. Mais la condition posée par le gouvernement, selon laquelle la coopération monétaire régionale devait aller de pair avec une profonde harmonisation de la politique économique des États membres, a eu infiniment moins de succès. Il a été impossible d’avoir prise sur le développement de la politique française, notamment parce que ce pays s’opposait à toute communautarisation de la politique économique nationale. Le bouleversement monétaire mondial du début des années soixante-dix a donné une nouvelle perspective à la tentative européenne visant à instaurer une coopération monétaire régionale. Le gouvernement hollandais a de plus en plus considéré l’intégration monétaire européenne comme un moyen de réaliser ses objectifs politiques en matière de stabilité des taux de change et de convergence de la politique économique – tout au moins au niveau régional. Toutefois, ce changement de cap avait déjà été amorcé avant l’effondrement définitif du système Bretton Woods. Dans ce cadre, le facteur le plus important a été l’amélioration du climat politique en Europe occidentale dans les années 1969-1970. Après le départ de De Gaulle, il a été possible de régler rapidement un certain nombre de points délicats, tels que l’adhésion britannique à la CEE. Des compromis acceptables se sont révélés possibles dans différents domaines, comme l’a fait apparaître la concertation sur le rapport Werner. Les ministères des Affaires étrangères et des Affaires économiques ont été les premiers à formuler la nouvelle politique en matière de coopération monétaire. En revanche, Witteveen et le ministère des Finances qu’il dirigeait ont fait preuve de quelques réserves et d’une longue hésitation à l’égard des propositions de Barre et de Werner. Ce n’est que dans le courant de l’année 1971 qu’ils en sont arrivés à la conclusion que, à défaut d’un système mondial opérationnel, une coopération monétaire régionale était souhaitable et même indispensable.

Notes de bas de page

1 Ont été utilisés, pour cette étude, les comptes rendus et les documents des réunions du Conseil des ministres et de ses sous-commissions, consultés aux Archives nationales (ARA) à La Haye, ainsi que des documents du fonds d’archives du ministère des Affaires étrangères (MAE), sis également à La Haye. Les auteurs remercient Mme Monique Gibelin collaboratrice extérieure du Centre de traduction du MINEFI (DPMA) et M. Michel Coussens adjoint au chef du Centre pour la traduction de cet article.

2 « Persconferentie minister-president De Jong en minister Luns na afloop van de E.E.G.– topconferentie op 2 december 1969 », Beleid Beschouwd, n° 1653, 8 décembre 1969.

3 Cf. Robert de Bruin, Les Pays-Bas et l’intégration européenne, 1957-1967, Thèse de doctorat, Paris, 1977, p. 269-271.

4 E.H. van der Beugel, « Vaststellen en uitvoeren van buitenlandse politiek » dans L.G.M. Jaquet e.a., Nederlandse buitenlandsepolitiek. Aspecten en achtergronden, s.l., s.d., p. 69-70.

5 A. Szasz, « Het wisselkoersstelsel in de vijftig jaar na Bretton Woods » dans W. Mak et H. Visser (réd.), Vijftig jaar na Bretton Woods. Preadviezen van de Koninklijke Vereniging voor de Staathuishoudkunde, Utrecht, 1994, p. 84.

6 J.A.H. de Beaufort Wijnholds, « Vijftig jaar na Bretton Woods : internationale aanpassing en financiering » dans Mak et Visser, Vijftig jaar na Bretton Woods, p. 62-63.

7 P. L.C. Hilberts et L.H. Hoogduin « Monetair beleid in vogelvlucht. Ontwikkelingen in de Nederlandse monétaire politiek na de Tweede Wereldoorlog », Financiële en Monetaire Studies, 14, 1995-1996, n° 4, p. 13-14.

8 A. Szasz, Monétaire diplomatie. Nederlands internationale monetaire politiek, 1958-1987, Leyde/Anvers, 1988, p. 3.

9 De Beaufort Wijnholds, « Vijftig jaar na Bretton Woods », p. 62-63.

10 Cité dans Szasz, Monetaire diplomatie, p. 146.

11 De Beaufort Wijnholds, « Vijftig jaar na Bretton Woods », p. 57. A titre d’exemple, à la fin de 1968, les réserves d’or néerlandaises s’élevaient à 6 milliards de florins néerlandais alors qu’il n’y avait qu’un milliard de florins en devises.

12 Holtrop dans le Rapport annuel de la DNB pour 1964 cité dans Szasz, Monétaire diplomatie, p. 66.

13 J. Zijlstra, Per slot van rekening. Memoires, Amsterdam, 1992, p. 227.

14 ARA, 2.02.05.02, Compte rendu du Conseil des ministres, 24 juillet 1969.

15 ARA, 2.02.05.02, Compte rendu du Conseil des ministres, 18 avril 1969.

16 Handelingen Tweede Kamer der Staten-Generaal, 1968-1969, 20 février 1969.

17 ARA, 2.02.05.02, Compte rendu du Conseil des ministres, 12 septembre 1969.

18 MAE, IIIe section, 913.100, n° 5461, Nota inzake het memorandum van de Europese Commissie aan de Raad betreffende de coördinatie van de economische politiek en de monétaire samenwerking in de Gemeenschap (COM (69) 150), 25 juin 1969.

19 MAE, IIIe section, 913.100 n° 5461, SER-Advies naar aanleiding van het memorandum betreffende de coördinatie van de economische politiek en de monetaire samenwerking in de Gemeenschap, 27 juin 1969.

20 MAE, IIIe section, 913.100, n° 5461, DES à DGES n° 673, 1er juillet 1969.

21 MAE, IIIe section, 913.100, n° 5482, Conclusions de la Commission de coordination 2 juillet 1969 et ARA, 2.02.05.02, n° 879, Compte rendu du Conseil des Affaires européennes, 11 juillet 1969.

22 MAE, IIIe section, 913.100, n° 5461, DES à DGES n° 673, 1er juillet 1969.

23 MAE, IIIe section, 913.100, n° 5482, Conclusions de la Commission de coordination 2 juillet 1969 et ARA, 2.02.05.02, n° 879, Compte rendu du Conseil des Affaires européennes, 11 juillet 1969.

24 ARA, 2.02.05.02, Compte rendu du Conseil des ministres, 14 août 1969 et 3 octobre 1969.

25 ARA, 2.02.05.02, Compte rendu du Conseil des ministres, 24 octobre 1969.

26 Jaarboek van het ministerie van Buitenlandse Zaken 1969-1970, La Haye, s.a., p. 69-70, 34-35 et 50-51.

27 Jaarboek van het ministerie van Buitenlandse Zaken 1969-1970, La Haye, s.a., p. 50.

28 ARA, 2.02.05.02, Compte rendu du Conseil des ministres, 4 juillet 1969.

29 MAE, IIIe section, 913.100, n° 5463, Nederlandse doelstellingen voor de Topconferentie, 11 novembre 1969 et ARA, 2.02.05.02, Compte rendu du Conseil des ministres, 7 novembre 1969.

30 MAE, IIIe section, 913.100, n° 5483, Conclusions Commission de coordination, 17 novembre 1969 ; ARA, 2.02.05.02, n° 879, Compte rendu du Conseil des Affaires européennes, 22 novembre 1969 et ARA, 2.02.05.02, Compte rendu du Conseil des ministres, 28 novembre 1969.

31 S. Patijn, Jalons dans l’Europe unie, Leyde, 1970, p. 216.

32 ARA, 2.02.05.02, Compte rendu du Conseil des ministres, 5 juin 1970.

33 MAE, IIIe section, 913.100, n° 5464, Het middellange EEG-steunmechanisme volgens het Plan-Barre (avec lettre de proposition des Affaires étrangères), 16 janvier 1970.

34 MAE, IIIe section, 913.100, n° 5463, Monetaire en economische samenwerking (Plan Barre) (ministère des Affaires économiques), 10 janvier 1970.

35 MAE, IIIe section, 913.100, n° 5463, Mémorandum Affaires étrangères, 21 janvier 1970 n° 86 (Pour la Commission de coordination de ce jour) et MAE, IIIe section, 913.100, n° 5465, Middellange termijn-mechanisme, 2 juin 1970.

36 MAE, IIIe section, 913.100, n° 5483, Conclusions Commission de coordination, 21 janvier 1970.

37 MAE, IIIe section, 913.100, n° 5463, De procedure voor het uitwerken van een plan voor een economische en monétaire unie (avec lettre de proposition des Affaires étrangères du 26 février 1970) ; MAE, IIIe section, 913.100, n° 5483, Conclusions Commission de coordination, 2 mars 1970 et ARA, 2.02.05.02, n° 879, Compte rendu du Conseil des Affaires européennes, 5 mars 1970.

38 Paul Catz, « Politieke integratie nodig voor Europese monetaire unie. Witteveen vroeg zelf om spreekbeurt », Elseviers Weekblad, 27 juin 1970.

39 Tussentijds verslag aan de Raad en de Commissie betreffende de fasegewijze verwezenlijking van de Economische en Monétaire Unie van de Gemeenschap, 20 mai 1970 ; MAE, IIIe section, 913.100, n° 5465, Rapport van het-comité Werner inzake economische en monétaire unie, 2 juin 1970 et MAE, IIIe section, 913.100, n° 5483, Conclusions de la Commission de coordination, 2 juin 1970.

40 MAE, IIIe section, 913.100, n° 5483, Conclusions de la Commission de coordination, 2 juin 1970 ; MAE, IIIe section, 913.100, n° 5465, Copie mémorandum J.G. van der Tas à DGES EEG-steunmechanisme, 10 juillet 1970.

41 G. Brouwers, « Naar een economische en monétaire unie. Over het rapport van de groep-Werner », Economische en Statistische Berichten, 28 octobre 1970 ; J. Hanekroot, « Meningsverschillen in EEG over plan-Werner », Het Financieele Dagblad, 26 octobre 1970 ; A.P. Oele, « Een muntautomaat in plaats van een landbouwtrekker »", Socialisme en Democratie, septembre 1970 et « Europe’s monetary union », The Economist, 21 novembre 1970.

42 « Rapport au Conseil et à la Commission concernant la réalisation par étapes de l’Union économique et monétaire dans la Communauté. Rapport Werner », supplément au Bulletin 11- 1970.

43 MAE, IIIe section, 913.100, n° 5466, Eindrapport Groep-Werner inzake Economische en Monétaire Unie, 21 octobre 1970 ; MAE, IIIe section, 913.100, n° 5466, De ontwikkeling naar een economische en monétaire unie in de EEG (Finances), Il novembre 1970 et MAE, IIIe section, 913.100, n° 5466, Advies inzake de verwezenlijking van een economische en monétaire unie (CES), 13 novembre 1970.

44 MAE, IIIe section, 913.100, n° 5483, Conclusions de la Commission de coordination, 8 décembre 1970.

45 MAE, IIIe section, 913.100, n° 5466, Het Nederlandse standpunt inzake de economische en monétaire unie tijdens de EEG-raad van 8 februari a.s., 1er février 1971 et MAE, IIIe section, 913.100, n° 5483, Conclusions de la Commission de coordination, 3 février 1971.

46 Jaarboek van het ministerie van Buitenlandse Zaken 1970-1971, La Haye, s.a., p. 44-45.

47 ARA, 2.02.05.02, Compte rendu du Conseil des ministres, 12 février 1971.

48 ARA, 2.02.05.02, Compte rendu du Conseil des ministres, 28 avril 1971.

49 ARA, 2.02.05.02, Compte rendu du Conseil des ministres, 18 juin 1971.

50 Le besoin de pouvoir disposer de règles en matière monétaire était tellement important que les pays du Benelux ont convenus, le 21 août 1971, de limiter à 1,5 %, par des interventions dans leur monnaie respective, la différence de taux maximale entre leurs devises. Au cours de la nouvelle crise du dollar en mars 1973 les trois pays ont décidé de maintenir cette marge mutuelle – c’était « le ver dans le serpent ».

51 Szasz, Monetaire diplomatie, p. 193-195. Le gouvernement néerlandais maintenait son point de vue, à savoir qu’une coordination plus étroite de la politique économique et le renforcement de la structure institutionnelle de la Communauté européenne qui en découlait, étaient absolument indispensables si l’on voulait qu’un développement équilibré, au cours de la deuxième phase de l’UEM, visant à créer une véritable union économique et monétaire, ait une chance de réussir. (Jaarboek van het ministerie van Buitenlandse Zaken, 1971-1972, La Haye, s.a., p. 53-54.)

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