La contribution sur les bénéfices exceptionnels de guerre et la loi du 1er juillet 1916
p. 213-228
Texte intégral
1La mobilisation avait conduit au ralentissement de la plupart des activités industrielles, entraînant la fermeture de nombreuses entreprises, privées de main-d’œuvre et de commandes. Mais la surconsommation d’armes et de munitions, avérée dès le mois d’août 1914, et la perspective d’un conflit de longue durée qui s’impose à l’automne engendrent de nouveaux besoins en armes, munitions et équipements de toute nature pour les troupes. Les commandes de l’État, qui ne cessent de croître durant tout le conflit, entraînent le développement d’une industrie de guerre qui dégage des profits souvent considérables. Dès l’été 1915, des parlementaires s’alarment des coûts des contrats acceptés par le ministère de la Guerre, et l’idée d’une taxation des bénéfices réalisés sur les commandes de guerre fait son chemin. Le ministre des Finances, Alexandre Ribot, n’est guère favorable à un accroissement de la fiscalité : c’est la Chambre qui lui a imposé la mise en application de l’impôt sur le revenu pour l’année 1916, alors qu’il souhaitait le différer. Il n’en dépose pas moins, en janvier 1916, un projet de loi établissant « une contribution sur les bénéfices exceptionnels de guerre ». Largement amendé par la Chambre et le Sénat, il donne lieu à la loi du 1er juillet 1916.
I. Guerre industrielle et bénéfices exceptionnels
2Quelques semaines seulement après le début du conflit, les belligérants sont confrontés à la nécessité de relancer la production d’armes et de munitions dans la perspective d’une guerre plus longue et plus dévoreuse d’hommes et de matériels qu’ils ne l’avaient prévue. Jusqu’au début du conflit, seuls les établissements de l’État, arsenaux et poudreries, répondaient aux besoins de l’armée, les entreprises privées ne travaillant que pour l’exportation1. Pour la durée de la guerre, il avait été prévu que les ateliers de l’État fabriqueraient les cartouches pour les armes portatives, quelques milliers d’obus par jour et se chargeraient de réparer les canons des fusils dégradés. Très vite cependant, la pénurie de munitions et de fusils devient criante et il s’avère que les arsenaux ne sauraient répondre aux besoins. Dès la deuxième quinzaine d’août 1914, le ministre de la Guerre, Adolphe Messimy, passe des commandes aux entreprises du Creusot et de Saint-Chamond, spécialisées dans la production d’armes pour l’exportation et autorise le constructeur automobile Louis Renault à se rendre dans les ateliers de l’État et dans l’entreprise Schneider pour se documenter sur la fabrication des cartouches de 75 à obus explosifs2. Mais c’est à son successeur au ministère de la Guerre, Alexandre Millerand (remaniement du cabinet Briand le 26 août 1914), qu’il appartient de lancer la production de matériels de guerre sur une grande échelle. Le 20 septembre, peu après que la bataille de la Marne a décidé du nouveau cours de la guerre, il convoque à Bordeaux, où le gouvernement s’est replié, les principaux industriels du pays3. Son objectif est de les inciter à développer de toute urgence la fabrication de munitions, de matériels militaires et d’équipements de toute nature pour les armées. Il s’adresse alors non seulement aux industriels spécialisés dans la production d’armes, comme Le Creusot, Schneider, Marine-Homécourt, ou la métallurgie lourde, comme Wendel, mais aussi à tous ceux qui sont susceptibles de reconvertir leurs installations industrielles pour répondre aux demandes croissantes du haut commandement. Mus par le patriotisme autant que par l’intérêt à développer leurs entreprises, nombreux sont les entrepreneurs, grands ou petits, compétents ou non, qui s’offrent à répondre aux demandes. Des milliers de marchés sont dès lors passés par le ministère de la Guerre, qui n’a qu’une seule contrainte : l’urgence de répondre aux besoins exprimés par le haut commandement. Or, le ministère ne dispose pas des personnels à même de juger et de discuter les conditions imposées par les industriels. Ces derniers n’ont d’ailleurs souvent qu’une appréciation approximative des coûts et des difficultés des fabrications dans lesquelles ils s’engagent, sans parler des besoins en ouvriers, qualifiés ou non. Au cours de l’année 1915, et sous la pression des commissions de l’armée des deux Chambres, les commandes en nouveaux matériels d’artillerie se multiplient, tandis que la demande en munitions et équipements divers continue de croître. À ces marchés passés centralement par le ministère, il faut ajouter les milliers d’autres passés par les intendants militaires pour approvisionner les troupes, les vêtir, toujours dans l’urgence et sans être à même, le plus souvent, de vérifier la fiabilité du fournisseur ou de son intermédiaire.
3Dans ces conditions, l’État, seul acheteur et preneur de tout ce qui se produit, n’est aucunement en position de négocier les prix. Albert Thomas, sous-secrétaire d’État à l’Armement et aux Munitions à partir de l’été 1915, s’en plaint amèrement dans une note : « l’Administration de la Guerre, seul consommateur et consommateur obligé de faire appel à toutes les forces, ne pouvant mettre tous les industriels en concurrence, était obligée de se plier à leurs exigences4 ». Quant au ministre des Finances, Alexandre Ribot, il avoue : « je ne puis que payer5 ». Or, il devient manifeste que nombre de contrats assurent à leurs bénéficiaires des profits faramineux6, parfois engrangés en dépit de malfaçons ou de retards considérables dans les livraisons. Les journaux s’en font l’écho, qui décrivent les profiteurs de guerre faisant la fête dans les beaux quartiers, et les parlementaires, également alertés par leurs électeurs, s’émeuvent de la situation. En septembre 1915, une commission des contrats est créée auprès du sous-secrétariat à l’Artillerie, faisant suite à la demande du président de la commission du budget, Étienne Clémentel, adressée le 13 août 1915 au président du Conseil, de réviser « tous les contrats en vue de la réduction des bénéfices exagérés7 ». Mais les députés ne se satisfont pas de cette première mesure. Les 14 et 17 décembre 1915, cinq interpellations portées par des députés radicaux-socialistes et socialistes mettent en cause aussi bien les marchés passés par les intendants militaires que par le ministère. Un exemple bien argumenté est rapporté par Paul Colliard, député républicain-socialiste du Rhône, que la commission de l’armée avait chargé d’une enquête sur les marchés de grenades : sur 11 marchés passés en mai 1915, 10 sont passés par des intermédiaires qui soit les abandonnent, soit les sous-traitent en réalisant au passage des bénéfices de l’ordre de 60 %. Quant au onzième, il a été confié à une société suisse qui travaille en même temps pour l’Allemagne8… Tous les exemples cités montrent que la défense nationale mais aussi les finances publiques sont mises en danger par des profiteurs sans scrupule. Après ces interpellations et les débats qu’elles suscitent, la Chambre décide de créer une commission d’enquête sur les marchés de guerre9 ; elle sera bientôt suivie par le Sénat. Avec cette création, qui fait suite à celle de la commission des marchés auprès du sous-secrétariat à l’Artillerie et témoigne de la volonté des parlementaires de se saisir eux-mêmes de la question, se précise la perspective d’une révision des marchés de guerre. Parallèlement, une autre possibilité est également ouverte : celle d’imposer une nouvelle taxation qui pèserait sur les profits extraordinaires réalisés depuis le début du conflit. C’est sous la pression des députés que le ministre des Finances dépose un projet de loi visant à établir un nouvel impôt sur les bénéfices de guerre.
II. Genèse de la loi du 1er juillet 1916
4Le 13 janvier 1916, Alexandre Ribot dépose à la Chambre un projet de loi de finances pour l’année 1916 qui comprend trois parties10. Le projet de création d’une contribution sur les bénéfices exceptionnels de guerre apparaît en point 2.
5Est-ce à dire qu’il est véritablement à l’initiative de ce projet ? Il ne semble pas. En effet, plusieurs propositions de loi allant dans ce sens avaient été déposées par des députés au cours de l’été et de l’automne 1915 auprès de la commission de législation fiscale. Des membres de la commission sont intervenus auprès du ministre pour appuyer cette proposition, mais ils se sont heurtés à une fin de non-recevoir : Alexandre Ribot a refusé de les suivre, arguant qu’une nouvelle taxation mettrait en danger le succès du nouvel emprunt qu’il s’apprêtait à lancer. Cette attitude est à rapprocher de sa position concernant l’impôt sur le revenu : en décembre de la même année, il proposait de reporter d’un an encore la mise en application de l’impôt sur le revenu (voté en juillet 1914 mais différé par décision du gouvernement à l’automne 1914). C’est la commission du budget de la Chambre qui a rétabli dans son rapport la mise en application pour l’année 1916 et emporté l’accord des deux assemblées. À maintes reprises, il réaffirme devant la commission du budget son opposition à tout impôt nouveau : ce n’est pas en temps de guerre, quand une partie du territoire est occupée et que l’administration des Finances est affaiblie par la mobilisation, que l’on peut augmenter la fiscalité.
6Notons encore qu’en mars 1916, alors que la taxation des bénéfices exceptionnels a été votée par la Chambre, Ribot, auditionné par la commission du budget, semble espérer que le Sénat ne suivra pas. Il déclare en effet : « le Sénat veut éviter que cette loi ne “s’infiltre” (sic) dans l’impôt sur le revenu. L’esprit du Sénat n’est pas du tout le même qu’ici11 ». C’est effectivement un bon connaisseur de « l’état d’esprit » du Sénat, où il a longuement siégé et participé à la majorité qui a repoussé jusqu’en 1914 le vote de l’impôt sur le revenu, voté par la Chambre en 1907.
7Enfin, s’il dépose effectivement, le 16 janvier 1916, un projet de loi sur le sujet, celui-ci est quasiment dissimulé en point 2 d’un projet de loi de finances dont le point 1 (rectification de crédits pour l’année 1916) et le point 3 (modification mineure du régime des patentes) sont loin d’avoir la même portée. Le procédé lui permet en fait de limiter la durée de la taxation envisagée à l’année 1916, ce qu’il dit explicitement dans le premier article du projet12.
8Alexandre Ribot manifeste donc une méfiance permanente, voire une hostilité certaine, à l’égard de tout alourdissement de la fiscalité, considérant que le financement de la guerre repose quasi exclusivement sur l’emprunt. On peut certes comprendre sa position : il évalue à moins de 800 millions le rapport des impôts (de toutes natures) pour l’année 1916, alors que les Chambres votent plus de 32 milliards de crédits pour cette même année13. Le gouffre est donc immense entre ce que peut rapporter l’impôt, même augmenté, et la dépense à couvrir, et, pour lui, les inconvénients d’une telle politique l’emportent sans discussion sur son rapport éventuel. Ce faisant, il néglige cependant trois facteurs importants. En premier lieu, il ne prend pas en compte l’argument avancé à maintes reprises lors du vote des crédits par les députés socialistes, et ce dès la réunion exceptionnelle du Parlement le 23 décembre 1914 : augmenter les impôts permettrait au moins de payer les intérêts de la dette, allégeant ainsi la charge future. En deuxième lieu, il semble négliger l’intérêt de l’État que rappelait Clémentel en envisageant de renégocier certains contrats par trop léonins dont les commissions des marchés de guerre commencent par ailleurs à prendre connaissance. Enfin, et c’est le plus important, il sous-estime la portée symbolique d’une fiscalité sur les bénéfices exceptionnels de guerre. En effet, ce qui motive les initiatives des députés – socialistes, radicaux-socialistes et républicains socialistes, pour les plus engagés dans le projet –, c’est le souci d’égalité des citoyens devant les charges de la guerre. Le Parlement a voté la loi Dalbiez14, promulguée le 19 août 1915, qui vise « une juste répartition et une meilleure utilisation des hommes » et qui revoit les conditions de réforme au nom de l’égalité devant « l’impôt du sang ». Comment, dès lors, tolérer cette autre inégalité qui fait de certains des profiteurs de guerre ? L’Union sacrée ne se limite pas à la trêve des partis au Parlement. Il faut préserver l’unité de la population, s’assurer que des injustices criantes ne déchirent pas la société, qui mettraient en cause le soutien à la poursuite de la guerre.
9Il est peu probable que les parlementaires qui ont fait pression sur le ministre pour élaborer le projet de taxation des bénéfices de guerre se soient fait des illusions sur son rendement éventuel dans l’immédiat. Ils visent avant tout un objectif politique qui transparaît dans les modifications que la commission du budget apporte au projet ministériel. Contrairement aux attentes d’Alexandre Ribot, le Sénat ne repoussera pas le principe de la contribution sur les bénéfices exceptionnels, et le ministre s’emploiera alors à harmoniser les positions des deux Chambres.
III. Projet ministériel et proposition de la commission du budget
10Le projet ministériel est déposé sur le bureau de la Chambre le 13 janvier 191615. La commission du budget, particulièrement diligente, dépose son rapport moins de deux semaines plus tard, le 26 janvier 191616. L’objectif affiché par le ministre et par la commission est le même : taxer, en plus des impôts normaux, les bénéfices exceptionnels réalisés en temps de guerre. La commission reprend le terme de « contribution » utilisé par le ministre, qui suppose une participation « volontaire », mais c’est bien d’un nouvel impôt qu’il s’agit. Passée l’affirmation de cet objectif commun, les divergences sont nombreuses entre le projet d’Alexandre Ribot et le texte de la commission. Or, comme l’impose le règlement, c’est ce dernier qui sera soumis à la Chambre.
11L’exposé des motifs qui précède l’un et l’autre texte révèle déjà une différence de ton : 1 page pour Ribot, qui évoque le principe d’égalité devant les charges de la guerre, mais se défend aussitôt de toute « mesure vexatoire » envers les contribuables, un thème souvent évoqué par les opposants à l’impôt sur le revenu ; 15 pages pour Raoul Péret, rapporteur de la commission du budget, qui passe en revue les régimes fiscaux de tous les pays européens, et relève les taxations des bénéfices exceptionnels de guerre, déjà appliquées ou en projet : l’Angleterre, souvent citée comme modèle d’une fiscalité moderne où l’impôt sur le revenu permet de financer une part plus importante des dépenses de guerre, vient de mettre en application un impôt nouveau sur les bénéfices de guerre et, depuis l’été 1915, une mesure semblable est à l’étude en Allemagne. Appuyé sur une connaissance étonnamment précise des politiques fiscales européennes, il se livre ainsi à une défense en règle de la fiscalité. Il rappelle ensuite les cinq propositions de loi de ses collègues, antérieures au projet du ministre, restituant ainsi aux parlementaires l’initiative de la loi.
12La première divergence sérieuse apparaît dès le premier article (qui porte le numéro 3, étant comptabilisé après le titre 1 concernant les rectifications de crédits dans cette loi de finances). Le ministre limite l’application de la taxation à la fin de l’année 1916, la commission du budget la fait porter « du 1er août 1914 au 31 décembre de l’année qui suivra celle de la cessation des hostilités ».
13La deuxième divergence concerne l’assiette de la contribution. Le ministre l’applique aux personnes ou sociétés déjà soumises à la patente et à la redevance proportionnelle17, pour lesquelles l’administration dispose de données antérieures à la guerre qui doivent permettre de mesurer les bénéfices exceptionnels. Raoul Péret l’étend à tous ceux qui « ont accompli de façon habituelle ou occasionnelle des actes de commerce », ainsi qu’à ceux qui « ont prêté leur entremise moyennant rémunération » à de telles opérations. Alors que le raisonnement de Ribot se situe dans le cadre des règles fiscales existantes en s’adressant à ceux qui sont assujettis à la patente, la commission du budget introduit dans la loi les pratiques nouvelles et souvent peu orthodoxes dont a eu connaissance la commission des marchés. Bien que les contrats passés avec l’État et les administrations publiques soient à l’origine de la proposition, ni le ministre ni la commission ne limitent la contribution à ces contrats : elle doit s’appliquer à toutes les activités qui, durant la guerre, génèrent des bénéfices supérieurs à la moyenne réalisée avant le conflit et peut donc s’appliquer, par exemple, au cafetier qui bénéficie d’une situation privilégiée à proximité d’une zone de repos des troupes. En revanche, les revenus agricoles – qui d’ailleurs posaient problème dans l’établissement de l’impôt sur le revenu – ne sont mentionnés dans aucun des deux textes.
14Les deux articles suivants concernent le calcul des bénéfices extraordinaires : le projet de Ribot prend pour base la comparaison avec la moyenne des bénéfices déclarés durant les trois années précédant la guerre. La commission reprend cette disposition, mais, visant les nouveaux acteurs qui n’interviennent que depuis la déclaration de guerre, elle admet un bénéfice « normal » égal à 5 000 francs ou 6 % du capital réellement engagé.
15Viennent ensuite les modalités de la déclaration et du contrôle, sur lesquelles le ministre et la commission sont d’accord. Le contribuable rédige sa déclaration et l’adresse à la commission départementale, composée de 5 fonctionnaires de l’administration fiscale auxquels sont adjoints un représentant d’une chambre de commerce et un représentant d’un tribunal de commerce. Une commission supérieure des bénéfices de guerre « d’appel » est chargée de régler les litiges que les commissions départementales n’auraient pu résoudre.
16Le montant des bénéfices exceptionnels ayant été établi, on passe au taux de la contribution. Le projet ministériel distingue six fractions : la première, ne dégageant pas plus de 10 000 francs d’excédent, est taxée à 5 % ; la plus élevée, supérieure à 500 000 francs d’excédent, est taxée à 30 %. Le calcul est plus compliqué dans le rapport de la commission, qui établit un double tarif : sur la partie de l’excédent, elle retient 5 fractions calculées non en valeur absolue, comme le fait Ribot, mais en proportion du bénéfice réalisé18. Un deuxième tarif s’applique ensuite au bénéfice imposable, 5 fractions également, mais calculées en valeur absolue, de moins de 20 000 à plus de 500 000 francs, et taxées également de 5 % à 25 %.
17Commence alors le parcours législatif du projet de loi. La Chambre se saisit dès le 11 février du texte de sa commission. Elle consacre cinq séances aux discussions, entre le 11 et le 21 février 1916. Le texte qu’elle adopte est ensuite communiqué au Sénat : sa commission des finances élabore son propre texte, qui est débattu à la fin du mois de mai. L’enjeu est alors de trouver un compromis acceptable par les deux assemblées, puisque sous la Troisième République, le Sénat a les mêmes prérogatives que la Chambre en matière législative et qu’un texte ne prend force de loi que s’il a été adopté dans les mêmes termes par les deux instances.
IV. Les débats à la Chambre
18Il est à remarquer que dans les deux assemblées, les débats sont ouverts par un parlementaire qui représente ouvertement les intérêts des industriels : Lazare Weiller à la Chambre, Eugène Touron au Sénat. Directeur des Tréfileries du Havre et détenteur de nombreux sièges d’administrateur de sociétés, Lazare Weiller, qui d’emblée annonce : « je suis chef d’industrie19 », est un novice en politique. Il a été élu pour la première fois en 1914 député de Charente (Angoulême première circonscription) ; il siège au groupe de la Gauche démocratique (centre-droit)20 et prend rarement la parole en séance : sa longue intervention, le 10 février 1916, n’en acquiert que plus de relief. Il prend soin d’affirmer tout d’abord – et il le répète à plusieurs reprises – qu’il votera la contribution demandée, assurant que « la taxe sur les bénéfices de guerre sera un acte de propreté morale auquel nul citoyen ne pourra décemment se soustraire ». Il distingue ensuite quatre catégories d’entreprises :
celles qui n’ont rien fait, n’ont passé aucun contrat avec l’État. Elles ont été en partie réquisitionnées et il ajoute : « on a bien fait ; je ne pense pas qu’il y ait lieu de leur appliquer une autre taxe » ;
celles qui n’ont passé aucun contrat avec l’État, mais ont conclu des affaires considérables et des bénéfices en livrant aux titulaires des marchés les matériels dont ils avaient besoin. Certes les prix de ces matériels ont augmenté, mais les coûts de production (des obus, par exemple) restent inférieurs aux coûts anglais et américains ;
ceux qui, avant-guerre, n’étaient pas des industriels : « quel que soit leur mobile, ils ont rendu service à la nation » et ils payeront la taxe ;
enfin, « les plus importants, les plus nombreux, les plus taxables » sont ceux qui sont passés du jour au lendemain du travail de paix au travail de guerre, au nombre desquels se range Lazare Weiller.
19Pour ces derniers, il prend donc pour exemple la métallurgie, indiquant que « l’écart entre l’argent qui entre et l’argent qui sort est en grande partie employé à créer ou à développer des usines ». En conséquence, il lui paraît impossible de déterminer le montant des bénéfices réellement engrangés et il propose d’en reporter le calcul à l’après-guerre, ajoutant : « je me déclare prêt à me rallier à n’importe quelle formule qui aurait pour objectif de réserver dès à présent une partie des bénéfices acquis à condition pourtant que ces bénéfices puissent dès à présent être établis », précisant même que cette réserve pourrait atteindre 50 % des bénéfices. Il y a certes une contradiction à avancer tout à la fois qu’on ne peut calculer les bénéfices et à proposer d’en mettre la moitié en réserve, mais le but de son intervention est de tenter de reporter à plus tard le prélèvement de ce nouvel impôt – une tentative sur laquelle il ne se fait sans doute guère d’illusion, étant donné la répartition des forces à la Chambre, que traduisent les nombreuses interruptions contradictoires qui interrompent son discours. D’ailleurs, l’orateur qui lui succède à la tribune, Isidore Tournan, député républicain-socialiste du Gers, déclare simplement : « je considère le projet comme voté ». La discussion générale se poursuit cependant le 11 février21, à laquelle participent une douzaine de députés, dont les rapporteurs des commissions de législation fiscale et du commerce et de l’industrie, qui apportent leur soutien au texte de la commission du budget. Paul Mistral, député socialiste de l’Isère, apporte de nouveaux chiffres, issus des travaux des commissions des marchés des deux Chambres, sur l’ampleur des bénéfices réalisés sur certains marchés. Il présente aussi un bilan des comptes des Tréfileries du Havre qui tend à prouver que l’entreprise échappera de fait à la contribution exceptionnelle. Lazare Weiller lui répond en arguant de la hausse des matières premières, mais le ton des échanges reste cordial entre partisans de la loi, largement majoritaires, et ceux qui défendent les intérêts des industriels. Le marquis de Dion, propriétaire de la firme automobile de Dion-Bouton (groupe des non-inscrits22), prend soin à son tour de distinguer « bons » et « mauvais » fournisseurs de guerre et, sans remettre en question le principe de la taxation, s’élève contre sa rétroactivité (elle doit s’appliquer à compter du 1er août 1914) et son caractère « inquisitorial et vexatoire ». Après avoir demandé le retour à la commission du budget des articles 3 à 17, il y renonce à la demande du ministre des Finances. L’intervention la plus offensive est venue du député des Alpes-Maritimes, Ernest Lairolle, un avocat, inscrit comme Lazare Weiller au groupe de la Gauche démocratique, qui ne consent à la taxation que des intermédiaires et affirme que l’exagération des impôts est génératrice de fraude.
20Le premier article est adopté le 15 février, le deuxième le 17. Deux séances sont encore nécessaires pour l’adoption des articles 3 à 17 : de nombreux amendements sont proposés, le rapporteur de la commission du budget n’acceptant que ceux qui apportent des précisions, sans remettre en cause l’esprit du texte. Il conclut d’ailleurs : « s’il y a des dissentiments sur des points de détail, il y a unanimité sur le principe23 ». De son côté, le ministre Alexandre Ribot s’est manifestement résolu à accepter le verdict de la Chambre. Le texte mis aux voix est adopté par 470 voix contre une24, celle de Jules Roche, le député de l’Ardèche, inscrit au groupe de la Fédération républicaine (droite), qui a toujours voté contre l’impôt sur le revenu et participé à la création de la Ligue des contribuables. Notons cependant qu’une trentaine de députés ne prennent pas part au vote, sans être « excusés25 ». Ils appartiennent en majorité aux groupes de la droite la plus radicale et comptent parmi eux le marquis de Dion. Lazare Weiller, en revanche, a voté le texte.
V. La position du Sénat et l’adoption de la loi
21Le rapporteur général de la commission des finances, Émile Aimond (sénateur de Seine-et-Oise, inscrit au groupe de la Gauche démocratique), peut bien affirmer que le Sénat n’a pas retardé l’examen du projet de loi sur les bénéfices exceptionnels de guerre, il n’en demeure pas moins que trois mois se sont écoulés depuis que la Chambre l’a adopté, alors que celle-ci s’était saisie du projet de Ribot moins d’un mois après son dépôt. Les motifs qu’il avance ne sont que peu convaincants : indisponibilité du ministre qui doit impérativement assister aux débats, retards de la Chambre elle-même à communiquer le texte adopté… Il semble bien que le Sénat ait manifesté peu d’enthousiasme à légiférer sur le sujet. Saisie à la fois du projet ministériel et du texte adopté par les députés, la commission des finances a rédigé un nouveau texte26. L’enjeu des débats qui se déroulent les 25 et 26 mai, 6 et 8 juin 1916 est donc d’aboutir à un compromis acceptable par la Chambre sous peine d’entamer une navette entre les deux assemblées qui entraînerait des retards dont le Sénat porterait la responsabilité. Une telle perspective aurait dans l’opinion publique un coût politique que la majorité des sénateurs ne souhaite pas assumer, pas plus d’ailleurs que le ministre des Finances, qui joue un rôle de médiateur dans les discussions.
22Le rapporteur de la commission des finances insiste sur la légitimité de la taxation envisagée. Son premier argument réside, comme pour le rapporteur de la commission du budget de la Chambre, dans la comparaison avec les autres nations européennes : une taxation spécifique est déjà appliquée en Angleterre et, en séance27, Ribot précise le rapport attendu par le chancelier de l’Échiquier : 86 millions de livres sterling, soit 2,2 milliards de francs pour l’année 1916. Sa mise en œuvre est aussi prévue en Italie, au Danemark, en Suède, en Norvège et en Allemagne. La France est en retard parce que son système fiscal, où seule la patente frappait les revenus du commerce et de l’industrie, rendait difficile cette nouvelle taxation et, en Europe, il n’y a que la Russie qui accuse un plus grand retard. Le deuxième argument qui prouve sa légitimité réside dans son acceptation par ceux-là même qui sont concernés : il annonce avoir reçu plus de 200 procès-verbaux des chambres de commerce qui vont dans ce sens, dont celui de la Fédération des chambres de commerce, qui s’est réunie à Paris28. Mais il prend soin de préciser que ce sont surtout les courtiers et les intermédiaires qui ont réalisé des bénéfices exorbitants, et non les industriels et les commerçants patentés.
23Comme à la Chambre, c’est un représentant des intérêts industriels qui est le premier à prendre la parole29 : Eugène Touron, sénateur de l’Aisne, filateur de coton, fondateur en 1901 de l’Union des syndicats patronaux des industries textiles de France. S’il reconnaît en principe la légitimité d’une taxation, il considère qu’elle ne s’applique qu’aux « intermédiaires douteux » et dénonce les exagérations inadmissibles qui désignent les industriels et les commerçants à la vindicte de l’opinion publique. « Je souffre pour mes confrères de l’industrie et du commerce », conclut-il avant de suggérer qu’il serait plus judicieux de réviser les contrats abusifs passés avec l’État et les administrations publiques, « certains industriels étant eux-mêmes surpris par les bénéfices réalisés ». Plus radical dans son refus de ce qu’il considère comme une coercition, il ne votera pas la loi.
24Passées les déclarations de principe, les débats portent sur les modifications apportées par la commission des finances au texte voté par la Chambre. Le ministre des Finances, qui était peu intervenu devant les députés, est très présent au Sénat, où il favorise incontestablement la rédaction d’un texte acceptable par la Chambre. Alors qu’il avait montré des réticences devant la perspective de cette taxation durant les mois précédents, il semble s’être persuadé de sa nécessité et apporte désormais son concours à l’adoption de la loi. Le texte de la commission sénatoriale contient essentiellement trois points litigieux. En premier lieu, la commission a souhaité restreindre la taxation aux bénéfices réalisés sur les contrats passés avec l’État et les administrations publiques. Alexandre Ribot refuse cette modification, qui introduirait une inégalité de traitement entre les différents acteurs économiques, et rappelle que la Chambre a écarté cette possibilité. Le deuxième point concerne la composition des commissions départementales chargées de recevoir les déclarations des contribuables et la commission d’appel nationale. Le Sénat a souhaité qu’elle soit constituée par des représentants des chambres et tribunaux de commerce. Le ministre s’y refuse, défendant l’administration des Finances, qui seule dispose des compétences nécessaires pour ce travail. Enfin, c’est le mode de calcul du bénéfice qui est débattu. Le rapporteur relève que le projet de loi du ministre prenait en compte le bénéfice global et non son importance relative, comparée au bénéfice ordinaire. La Chambre a retenu une double taxation : la première considère bien l’importance relative du bénéfice, la seconde s’y ajoute en frappant les bénéfices globaux. Le Sénat ne conserve que le premier système, qui prend en considération l’importance relative du bénéfice réalisé par rapport à ceux qui ont été réalisés antérieurement à la guerre. Considérant que les différents modes de calcul n’introduisent pas de différences significatives dans le rapport attendu de l’impôt, Alexandre Ribot accepte la proposition sénatoriale. Ainsi, les bénéfices réalisés par de nouveaux acteurs non patentés seront taxés à 50 % ; pour les patentés, la taxation est également de 50 %, mais seulement au-delà de 5 000 francs de bénéfice exceptionnel.
25Le texte sénatorial précise aussi que les contrats passés par les agriculteurs avec l’État et les administrations publiques ne seront pas soumis à la taxation, alors que ceux du ministre et de la Chambre ignoraient le domaine agricole. Cette précision est acceptée par Alexandre Ribot.
26Enfin, la forme du texte est modifiée. Pour donner une certaine satisfaction aux sénateurs, qui voulaient que la loi vise surtout les intermédiaires, le ministre accepte que figurent en tête de la loi : « ceux qui ne sont pas des patentés professionnels », et cela pour des raisons « morales et matérielles », une concession qui se traduit par une rédaction assez bancale puisque figurent en tête ceux pour qui la fixation du bénéfice exceptionnel est la plus difficile… Le texte ainsi amendé est voté le 8 juin 1916 par 213 voix contre 1330 ; il faut cependant noter qu’une quarantaine de sénateurs de droite n’ont pas pris part au vote.
27Le texte du Sénat, renvoyé à la commission du budget, revient devant la Chambre le 30 juin31. Un délai très court – surtout si l’on note que, du 16 au 22 juin, la Chambre s’est constituée en comité secret pour débattre de la situation militaire, de la bataille de Verdun et du contrôle parlementaire aux armées – qui traduit l’importance que le gouvernement et les députés accordent à ce projet. Le rapporteur de la commission du budget, Raoul Péret, annonce que la commission accepte le texte sénatorial. Un seul intervenant, le député de l’Yonne (Gauche radicale) Pierre Perreau-Pradier, propose de le modifier en portant la taxation des bénéfices exceptionnels de 50 % à 70 % au-delà de 20 000 francs de bénéfices exceptionnels. Le rapporteur s’y oppose au motif qu’une nouvelle navette avec le Sénat retarderait la promulgation de la loi. Le texte est adopté, sans opposition, par 474 voix, soit la même majorité que lors du vote du 22 février, et la loi est promulguée dès le lendemain 1er juillet32.
Conclusion
28Il s’est donc écoulé un peu moins de six mois entre le dépôt du projet par Alexandre Ribot et la promulgation de la loi. Les différentes étapes de son adoption montrent que la Chambre a été plus diligente que le Sénat, qui a laissé s’écouler trois mois avant de s’en saisir, et que la volonté de la majorité des députés de voir le projet de loi aboutir rapidement les a amenés à accepter les modifications proposées par la haute assemblée. Par ailleurs, si le ministre des Finances semble avoir surmonté ses réticences initiales, il n’a pas demandé au gouvernement de prononcer l’urgence, qui aurait contraint les assemblées à se prononcer sous trois jours. Il y a donc eu un affrontement feutré entre partisans et adversaires d’une nouvelle fiscalité, un affrontement qui rejoue en partie les débats antérieurs sur l’impôt sur le revenu et révèle les lacunes du système fiscal français. Les partisans d’un effort fiscal invoquent de façon récurrente le modèle anglais, dont l’income tax permet à la fois de financer une partie des dépenses de guerre – Ribot avance le chiffre de 28 % –, alors que l’effort de guerre de la France repose quasi exclusivement sur l’emprunt, et de fournir les fondements nécessaires à une évaluation des bénéfices exceptionnels de guerre. Leurs adversaires n’avancent quant à eux que des arguments de type moral ou psychologique, invoquant le caractère vexatoire ou inquisitorial de la fiscalité et l’opprobre injustifié qu’elle jetterait sur des industriels et des commerçants tout entiers animés d’esprit patriotique. Si les partisans d’une nouvelle taxation l’emportent au Sénat – dont il faut rappeler qu’il n’a voté l’impôt sur le revenu que le 14 juillet 1914, sept ans après la Chambre –, c’est manifestement dû à la prise de conscience du sentiment d’injustice qui se répand dans la population et dont les journaux se font l’écho. Des parlementaires peuvent-ils apparaître comme complices des profiteurs de guerre ? La loi a donc avant tout une fonction politique, mais comment a-t-elle été appliquée ?
29Dans la remarquable étude qu’elle a consacrée à l’industrie clermontoise entre 1912 et 1922, Annie Moulin-Bourret a étudié l’accueil fait à la nouvelle loi par les industriels33. Sous le titre évocateur « l’impôt scélérat », elle résume ainsi l’état d’esprit des industriels :
« la mise en œuvre de l’impôt sur les bénéfices de guerre développa un profond sentiment d’amertume chez les industriels clermontois. Ils la considéraient comme une injustice puisque, en participant à l’essor de la production industrielle, ils avaient fait ce que l’administration leur demandait […] ils avaient fait des bénéfices. Mais pour cela, ils avaient dû travailler davantage. Ils avaient emprunté, payé des agios pour investir dans de nouvelles machines. Ils avaient donc accepté de courir des risques qui devaient être pris en considération et rémunérés34 ».
30Cette mauvaise humeur se traduisit dans le refus de communiquer les documents comptables demandés par la commission départementale du Puy-de-Dôme, mais les inspecteurs des Contributions directes relevèrent aussi l’absence ou les errements de la comptabilité des petites entreprises, qui rendaient toute estimation impossible. Par contre, les sociétés par actions, comme Bergougnan, dont les livres étaient bien tenus, fournirent les documents demandés et entamèrent des discussions sur certains points qui pouvaient ou non être soustraits des bénéfices exceptionnels, sans manifester une hostilité de principe. Dans l’ensemble, cependant, la loi fut beaucoup moins bien accueillie que ne le laissaient penser certains des industriels représentés au Parlement : les réactions qu’enregistre Annie Moulin-Bourret s’apparentent plus aux remarques du sénateur Touron qu’à l’intervention du député Lazare Weiller. Quant à la chambre de commerce de Clermont-Ferrand, à en juger par les archives consultées par Annie Moulin-Bourret, elle ne comptait certainement pas parmi les 200 dont le rapporteur de la commission sénatoriale des Finances se targuait d’avoir l’accord.
31Enfin, reste la question du rendement de cet impôt. Henry Truchy estime qu’au 31 août 1925, le montant des rôles émis était de 17,7 milliards de francs35. Quelle part de cette somme est effectivement entrée dans les caisses de l’État ? Une chose est certaine : ce n’est pas pendant la guerre que des versements importants ont été effectués et nombre de dossiers sont restés ouverts jusqu’au second conflit mondial, voire ultérieurement, de même que se poursuivirent les révisions des marchés de guerre étudiés par les commissions des deux Chambres.
Annexe
Article 1 de la loi du 1er juillet 1916
Il est institué une contribution extraordinaire sur les bénéfices exceptionnels ou supplémentaires provenant des opérations ci-après définies, réalisées depuis le 1er août 1914 jusqu’à l’expiration du douzième mois qui suivra la cessation des hostilités :
Par les personnes non patentées, sauf les agriculteurs vendant leur récolte à l’État, ayant passé des marchés soit directs soit comme sous-traitants pour des fournitures destinées à l’État ou à une administration publique et par toutes les personnes ayant accompli un acte de commerce à titre accidentel ou en dehors de leur profession en vue du même objet ;
Par les personnes patentées ou non ayant prêté leur concours pécuniaire ou leur entremise moyennant rémunération, redevance ou commission, pour la conclusion d’un marché avec l’État ou une administration publique ;
Par les sociétés et personnes passibles de la contribution des patentes dont les bénéfices ont été en excédent sur le bénéfice normal ;
Par les exploitants d’entreprises assujetties à la redevance proportionnelle prévue par la loi du 21 avril 1810.
Notes de bas de page
1 Une exception cependant : en avril 1913 et juin 1914, le ministère de la Guerre a passé commande au Creusot de canons de moyen et gros calibres.
2 Général Messimy, Mes souvenirs, Paris, Plon, 1938.
3 AN, Archives Alexandre Millerand, 470 AP 22.
4 AN, Archives Albert Thomas, 94 AP 60. La note n’est pas datée mais classée avec une note du 11 septembre 1916.
5 AN, Commission du budget, auditions des ministres, 8 septembre 1916 CC 7559.
6 Par exemple, la firme Hotchkiss distribue des dividendes de 100 % à ses actionnaires en 1916 (Annuaire Desfossés 1920).
7 Cité lors du débat à la Chambre sur la contribution extraordinaire sur les bénéfices de guerre, J.O Chambre, Débats, 11 février 1916.
8 J.O. Chambre, Débats parlementaires, 15 décembre 1915.
9 Une commission d’enquête dispose de pouvoirs plus étendus qu’une simple commission, entre autres elle peut convoquer des témoins qui ne peuvent se dérober. La liste des membres de la commission est publiée le 28 décembre 1915.
10 J.O. Débats parlementaires, Chambre, 14 janvier 1916. Le texte est reproduit dans les Documents parlementaires, onzième législature, nº 1724.
11 AN, Commission du budget, auditions des ministres, CC 7558.
12 J.O., Documents parlementaires, onzième législature, nº 1724.
13 Chiffre cité par Ribot le 8 septembre 1916 devant la commission du budget, AN, Commission du budget, audition des ministres, CC 755.
14 La loi a gardé le nom de l’auteur de la proposition de loi, le député radical-socialiste des Pyrénées-Orientales Victor Dalbiez, membre très actif de la commission de l’armée.
15 J.O. Débats parlementaires, Chambre, 14 janvier 1916. Le texte est reproduit dans J.O., Documents parlementaires, onzième législature, nº 1655.
16 J.O., Documents parlementaires, onzième législature, nº 1724.
17 Il s’agit des entreprises minières et autres carrières assujetties à la redevance proportionnelle prévue par la loi du 21 avril 1810.
18 Pour un excédent de 1/5e, la taxation est de 5 % ; pour un excédent de 4/5e, la taxation est de 25 %.
19 J.O., Débats parlementaires, Chambre, 11 février 1916. Les citations de l’intervention de Lazare Weiller qui suivent ont la même source.
20 Le groupe est constitué de 33 députés, dont Joseph Thierry, qui sera ministre des Finances dans le gouvernement Ribot (21 mars-12 septembre 1917).
21 J.O., Débats parlementaires, Chambre, 13 février 1916.
22 Le groupe des non-inscrits abrite 45 députés qui n’ont pas trouvé d’affiliation partisane à leur goût, mais qui, souhaitant participer au travail des commissions, doivent appartenir à un groupe : depuis la modification du règlement de la Chambre, le 8 novembre 1911, les commissions sont constituées à la proportionnelle des groupes. Le Sénat, pour sa part, est resté fidèle à la désignation par les bureaux.
23 J.O., Débats parlementaires, Chambre, 22 février 1916.
24 Ibid.
25 Certains députés sont officiellement excusés ou en congé de la Chambre, parce qu’ils sont restés aux armées ou retenus par une commission ou une mission. Ceux qui ne prennent pas part au vote sont présents en séance et manifestent ainsi une forme larvée d’opposition.
26 Les procès-verbaux de la Commission des finances, https://www.senat.fr/histoire/1914_1918/pdf/14S%20finances/FR_SENAT_014S_045/26_22-05-1916.pdf, sont très lacunaires ; ils ne font mention ni de discussions ni de l’adoption d’un rapport sur la question.
27 J.O., Débats parlementaires, Sénat, 28 mai 1916.
28 Ibid.
29 Ibid.
30 Ibid., 9 juin 1916.
31 J.O., Débats parlementaires, Chambre, 1er juillet 1916.
32 J.O., Lois et décrets, 2 juillet 1916.
33 Annie Moulin-Bourret, Guerre et industrie. Clermont-Ferrand 1912-1922 : la Victoire du pneu, Clermont-Ferrand, Publications de l’Institut d’études du Massif central, t. 11, p. 356-376.
34 Ibid., p. 367.
35 Henry Truchy, Les finances de guerre de la France, Publications de la Dotation Carnegie pour la paix internationale, Paris, PUF et Yale University Press, 1926.
Auteur
Professeur émérite d’histoire contemporaine à l’université de Paris-Est-Marne-la-Vallée, Fabienne Bock a publié Un parlementarisme de guerre, Paris, Belin, 2002 et plusieurs articles concernant la Grande Guerre : « Clemenceau, président de la commission des Affaires étrangères et de la commission de l’Armée du Sénat », in Clemenceau et la Grande Guerre, 1906-1929, Geste éditions, 2010 ; « L’impossible gestion des finances publiques pendant la Grande Guerre », in Philippe Bezes, Florence Descamps, Sébastien Kott, Lucie Tallineau (dir.), L’invention de la gestion des finances publiques, du contrôle de la dépense à la gestion des services publics (1914-1967), volume II, Paris, IGPDE/Comité pour l’histoire économique et financière de la France, 2013, p. 17-25, disponible en ligne : https://0-books-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/igpde/2886.
Le texte seul est utilisable sous licence Licence OpenEdition Books. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.
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