Stratégies des groupes automobiles et structure du marché en Europe 1979‑1992
p. 333-347
Texte intégral
1L’accentuation de l’ouverture des marchés, les chocs pétroliers, la hausse des taux d’intérêt1, les nouvelles technologies d’information et de communication, mais aussi les exigences de la clientèle, les demandes de la société civile quant à la réduction des coûts sociaux de l’automobile ont profondément modifié les perspectives de l’industrie automobile européenne au cours des années 19702.
2Dans les années 1979-1992 les constructeurs implantés en Europe ont donc à répondre à cet « effet déstabilisant » : « Les transformations que nous devons faire aujourd’hui en quatre, cinq ou six ans, nous les faisions, autrefois, en vingt ans ou trente ans. C’est cela qui est difficile »3. Il leur faut en outre bientôt faire face au changement des parités entre le dollar et les autres monnaies. Ils se placent désormais dans le cadre d’une économie de la variété4. Elle implique une modification de l’organisation productive, le développement de la robotique5 et l’élargissement des applications de l’informatique à la conception et à la fabrication des produits, mais aussi à la gestion des entreprises, l’utilisation de la micro-informatique. Elle renforce l’importance des marchés internationaux pour les constructeurs.
3Comme par le passé, il n’y a pas un marché automobile, mais deux. Celui des véhicules particuliers se caractérise dans cette période par sa tendance à une relative saturation, à laquelle les constructeurs répondent par la diversification de la gamme, le renouvellement des modèles et, pour certains, l’intensification de l’innovation. Celui des poids lourds est, au contraire, marqué à la fois par une tendance longue à l’expansion et par l’ampleur des cycles courts.
4Dans ces conditions, comme l’ont montré les travaux pluridisciplinaires du Groupe d’Études et de Recherches Permanent sur l’Industrie et les Salariés de l’Automobile (GERPISA)6, les constructeurs ont à redéfinir leurs choix entre les six stratégies de profit historiques suivantes7 :
Qualité : BMW, Mercedes, Volvo.
Diversité et flexibilité productive : Morris.
Volume : Ford.
Volume et diversité : General Motors.
Réduction permanente des coûts : Toyota.
Innovation et flexibilité : Honda.
5L’Europe restant pour les constructeurs européens un marché prioritaire, ils se tournent beaucoup plus dans cette période vers Bruxelles, non seulement pour obtenir des aides à l’innovation et négocier la réglementation routière et environnementale, mais encore pour accélérer l’unification du marché européen8. Mais il nous faudra ensuite examiner les modalités des stratégies de redressement de la plupart des constructeurs européens au cours de cette période, puis la présence accrue de multinationales extra-européennes.
I. L’Europe comme ressource et comme problème
6Pour les constructeurs l’Europe apparaît double : comme une ressource à terme et comme l’origine de problèmes dans l’immédiat. Le niveau de l’État-nation reste pertinent, mais l’Europe prend de plus en plus d’importance. Les constructeurs interviennent auprès d’elle à la fois individuellement et par deux syndicats professionnels à l’échelle européenne : le Comité des constructeurs du Marché commun, créé en 1972 à l’initiative de l’Association Peugeot-Renault9 pour discuter officiellement de sécurité routière et de pollution avec les institutions européennes, et en réalité pour contrer l’influence soit américaine, soit japonaise10 ; le Comité de liaison des constructeurs automobiles, qui, lui, regroupe non seulement les organisations professionnelles de la CEE mais encore des membres suédois, américains et japonais. Ces deux organisations, à la suite des tensions entre Allemands et constructeurs latins qui ébranlent la première et de l’approche du marché unique, fusionnent en février 1991 au sein de l’Association des constructeurs européens de l’automobile11. Comme les gouvernements, elles poussent la Commission européenne à négocier avec les Japonais un quota européen de transition à l’ouverture du marché unique.
Une ressource à terme : le grand marché
7Certains constructeurs ressentent la panne de la construction européenne dans les années 1970. Ils souhaitent donc la mise en place d’un grand marché européen dans les meilleurs délais à la fois pour réaliser davantage d’économies d’échelle et pour permettre le lancement de nouvelles technologies soutenues par la CEE. L’idée émerge de constituer un groupe de pression inspiré de la Business Roundtable américaine (elle-même créée au début des années 1970) et tourné vers la Commission, le Conseil des ministres et les décideurs nationaux. On trouve à son origine d’abord les efforts d’un club de grandes entreprises multinationales, parmi lesquelles Fiat et Ford Europe : l’European Enterprise Group, qui vient de dynamiser l’association européenne des patrons (l’UNICE), puis l’action des patrons de deux groupes automobiles : l’Italien Gianni Agnelli12 (Fiat), le Suédois Pehr Gyllenhammar13 (Volvo), qui fait aussi campagne pendant « près d’une décennie » pour l’adhésion de la Suède à la CEE, qui sera demandée en 1991. L’un et l’autre sont des stratèges et représentent des groupes éprouvés par les années 1970. Ils obtiennent le concours de la firme d’électronique hollandaise Philips et de deux commissaires européens : le Belge Étienne Davignon et le Français François-Xavier Ortoli. Ainsi naît en 1982 l’European Roundtable of Industrialists (ERT). Daimler-Benz, Renault, Volkswagen et Bosch vont se joindre aux fondateurs. Les constructeurs et équipementiers automobiles représentent la branche la plus active en son sein, et l’expansion des transports routiers a été un de ses principaux objectifs14. L’ERT va avoir une influence considérable, et un rôle actif dans les processus qui conduiront à l’Acte unique européen puis au traité de Maastricht et à l’accueil des pays de l’Est.
8On retrouve à partir de 1987 de grands constructeurs et équipementiers automobiles au sein de l’Association pour l’Union Monétaire de l’Europe (AUME), basée à Paris : les Allemands Volkswagen et Bosch, l’Italien Fiat, le Français Renault (mais pas son homologue PSA)15. L’Association a été fondée par cinq grandes multinationales membres de l’ERT, dont un constructeur automobile : Fiat. Un tiers des firmes membres de l’ERT participent à cette association. L’AUME a été une force d’impulsion pour l’avancement du projet de monnaie unique.
Des problèmes immédiats
9Les constructeurs et les équipementiers doivent composer avec l’approfondissement des exigences européennes qu’ils connaissent déjà en matière de protection de l’environnement et de réglementations techniques : non pas tant les normes poids lourds, qui ne sont pas unifiées, mais les normes de sécurité routière, les économies d’énergie notamment. Il s’y ajoute peu à peu la prévention des nuisances, le contrôle technique périodique des véhicules, le recyclage des véhicules et de leurs composants, mais aussi le prix des véhicules, la distribution automobile et les politiques de transport. La Commission européenne fait face aux réticences de constructeurs, d’équipementiers et de nations envers ses tendances à la fois à libéraliser partiellement dans certains domaines (sur les prix de vente, mais pas sur la distribution : de 1985 à 2002 le commerce de véhicules, de pièces et de services après-vente est réglementé par un régime sélectif et exclusif d’exemption au droit commun de la distribution et de la concurrence)16 et à accroître la régulation dans d’autres domaines (sur l’environnement ou les transports).
10Les propositions françaises sur les dossiers environnementaux liés à l’automobile (réduction de la vitesse et de l’évaporation des carburants, moteurs propres, construction de voitures électriques) ne trouvent pas beaucoup d’échos à Bruxelles. En revanche, la Commission adopte des options beaucoup plus proches de celles avancées par les gouvernements allemands. Ainsi le système antipollution choisi est-il le pot catalytique que défendaient les Allemands et qui posait le moins de problèmes à leurs constructeurs. Ceci n’empêche pas auparavant de vifs désaccords entre les gouvernements allemands, qui sont à l’initiative en matière environnementale, et leurs constructeurs et équipementiers, qui sont moins battants que leurs hommes politiques17.
L’aide à l’innovation
11Certains États comme l’Allemagne font bénéficier leur industrie nationale d’une aide à la recherche et à l’innovation, à l’instar des Américains et des Japonais18. Cependant durant cette période le Conseil des ministres européen apporte un élément nouveau : l’aide à des programmes de recherche européens destinés à accroître la compétitivité des industries. C’est l’initiative Eurêka (1985). Certains constructeurs s’en saisissent, avec les programmes de recherche Prometheus et Carminat19, qui, labellisés par Bruxelles en 1986, se sont déroulés de 1987 à 1994. Prometheus rassemble ainsi onze constructeurs de cinq pays. Il vise à améliorer la fluidité et la sécurité du trafic. PSA Peugeot Citroën en est le leader en France. Renault, qui avait entamé dès 1981 un programme de recherche visant à créer une véritable relation entre la voiture et son environnement, conjugue ses efforts avec Philips, Sagem et Télédiffusion De France (TDF) dans le programme de système d’aide à la conduite Carminat. Ces deux programmes ont contribué à rendre les véhicules européens « intelligents » par une exploration coopérative20 des ressources de l’électronique, de l’informatique et des télécommunications. Pour réussir, il leur a fallu trouver des interfaces standardisables, établir des normes européennes, réaliser le consensus pour le développement industriel des produits.
12Au total, les temps ont doublement changé. La Commission de Bruxelles a renforcé sa compétence dans différents domaines du champ automobile21, bien qu’elle n’ait pas encore réussi à unifier les quatre segmentations de types de véhicules routiers à moteur que l’Europe utilise concurremment22. Elle commence à s’informer sur l’incidence que les aides des États membres peuvent avoir sur la concurrence au sein de la Communauté23. En parallèle, l’ancrage européen des firmes automobiles s’est renforcé, à la fois de leur propre chef et sous la pression de Bruxelles. Toutefois les coûts des nouvelles normes, si à terme elles renforcent la compétitivité internationale des produits automobiles, sont aussi une des composantes des difficultés que doivent affronter les constructeurs européens.
II. Du rouge au noir
13Ce clin d’œil à Stendhal a été utilisé à propos de Fiat puis de Renault par un dirigeant successivement de ces deux entreprises et un professeur de gestion d’HEC dans le titre de leur livre en 198924. Mais on peut le généraliser à la majorité des constructeurs et des équipementiers européens.
Le passage au rouge
14Une série de constructeurs majeurs connaissent de lourdes pertes et doivent changer de stratégie. Il s’agit d’abord du constructeur anglais récemment nationalisé British Leyland, puis de la firme privée italienne Fiat, de la firme privée française PSA Peugeot Citroën en 1982 et du constructeur nationalisé français Renault en 198425.
15Ces difficultés ont des racines communes : des tentatives infructueuses de croissance externe et d’internationalisation pour accroître les économies d’échelle, une masse salariale excessive rigidifiée par les compromis fordistes avec les syndicats, de graves conflits sociaux (sauf en Allemagne), une négligence des problèmes de qualité, la montée des importations japonaises. Elles peuvent aussi avoir des aspects spécifiques. Début 1985 le PDG de Renault, Bernard Hanon, qui se sait sur la sellette, cherche à détourner les critiques et incrimine des éléments extérieurs à sa gestion : la politique économique et financière de l’État, avec le franc fort, le blocage des prix et l’insistance de l’État à maintenir au sein de Renault la production de poids lourds, qui est déficitaire26.
Le retour au noir
16Ces constructeurs retrouvent le chemin du profit par des stratégies parallèles. Les plus immédiates portent sur une réduction de la voilure : réduction des effectifs de salariés, réduction de la taille du réseau commercial, réduction du nombre de sites à l’étranger27, cession d’actifs immobiliers et industriels, politique qui, inaugurée chez Fiat, permet ce qu’on appelle dès lors un abaissement du point mort pour atteindre le profit. Il s’y ajoute, pour les Français, l’obtention en 1986 de la libération des prix sur le marché intérieur. Les plus offensives prennent plus de temps : après augmentation du capital, renouvellement de la gamme de modèles, priorité donnée à la qualité, transformation de la gestion de production28, recherche de nouveaux marchés, introduction de la gestion par projets et, dans certains cas, « reconstruction d’une doctrine industrielle » allant au-delà de l’appropriation de méthodes japonaises29, ainsi qu’un remodelage profond des relations professionnelles avec les syndicats salariés…
17Une différence est éclatante. Alors que dans la plupart des pays européens les mêmes dirigeants parviennent à redresser le cap, en France PSA puis Renault évincent leur PDG et le remplacent par des hommes extérieurs à l’industrie automobile. Ils changent les stratégies de profit. En revanche, chez Fiat, quelques années plus tard, un affrontement se produit à l’intérieur de l’entreprise, entre Vittorio Ghidella, ingénieur, administrateur délégué de Fiat Auto depuis 1976, « l’artisan du redressement de la firme à la fin des années 1970, et le père des modèles Uno et Tipo », qui « affirmait le rôle central » de l’auto « au sein du groupe », et Cesare Romiti, diplômé de sciences économiques et commerciales, « financier-stratège », administrateur délégué de Fiat Spa, « la maison mère », et « partisan du développement et de l’internationalisation de tous les secteurs du groupe (télécoms, aéronautique) ». Le second l’emporte le 25 novembre 1988, au milieu d’interrogations pour savoir si dans ces conditions le constructeur sera « bien armé dans la compétition qui s’annonce pour 1993 »30.
18La conscience des nouveaux impératifs de la concurrence internationale débouche chez certains constructeurs sur le retour à la croissance externe en Europe : Fiat acquiert Alfa Romeo en 1986 (pour éviter l’emprise de Ford) et parvient au monopole national, l’Allemand VW reprend le Tchèque Skoda en 1991 (en l’emportant sur Renault), ou bien sur le développement des coopérations européennes, annoncé en février 1981 par le directeur général de Renault, sceptique quant à « des regroupements transnationaux […] car les fusions posent des problèmes absolument cauchemardesques » (« par contre, je crois beaucoup – et nous le pensons depuis longtemps – à un développement d’alliances »)31. Ainsi, à l’initiative de Volvo, qui début 1988 voulait racheter Renault véhicules industriels, proposition rejetée par Renault32, une alliance Renault-Volvo est conclue – avec l’accord de l’État français – en 1990, qui conduit à un projet de fusion, refusé in extremis par les actionnaires suédois le 2 décembre 1993.33
19On trouve des trajectoires de redressement similaires chez certains équipementiers. Il en va ainsi du Français Valeo, sous l’impulsion de Noël Goutard, qui entre dans ce « groupe en perdition » comme président en janvier 1987, réorganise et taille dans le vif puis réussit en combinant recentrage, internationalisation, croissance externe et innovation « constante »34.
L’innovation
20Elle prend plusieurs voies.
21Des partenariats sont développés par les constructeurs avec les principaux équipementiers. Fiat là encore est pionnier35. Tirant les leçons de pratiques éprouvées par les Japonais qui vont d’un nouveau mode de livraison et de production (juste à temps, flux tendu) à des exigences élevées d’assurance-qualité et à l’externalisation de fabrications et même à des rapports de collaboration, les constructeurs remettent en cause la durée limitée et l’atomisation de la sous-traitance et des équipementiers. Ils s’efforcent de leur substituer des relations partenariales avec les grands équipementiers et une hiérarchisation assez stricte de la sous-traitance sur des marchés désormais ouverts à la concurrence internationale.
22Face à la saturation des marchés européens et aux demandes sociales les constructeurs et équipementiers augmentent leurs dépenses de recherche et développement, comme le font au même moment les télécommunications, l’industrie pharmaceutique ou la chimie36. Il leur faut de surcroît accroître leurs budgets de promotion pour faire connaître leurs innovations. Cette montée des dépenses de R&D et de promotion pousse à son tour les industriels à davantage de coopération ou de fusions et acquisitions.
23Pour répondre à la différenciation accrue des modèles tout en maîtrisant les coûts les constructeurs commencent à organiser la production sur la base de plates-formes et modules.
24Outre la tendance à la saturation du marché européen, les constructeurs ont en effet à faire face à une présence renforcée de multinationales extérieures.
III. L’internationalisation accrue du marché européen
25Les Américains, déjà présents en Europe de longue date, ne restent pas inertes, tandis que peu à peu les Japonais changent de braquet.
Les Américains
26Les Américains pensent d’abord en termes d’acquisitions de firmes européennes37.
27Plusieurs projets d’acquisitions sont étudiés voire tentés par les deux plus grands constructeurs américains : Fiat (sous la forme d’une fusion avec Ford Europe), British Leyland, Alfa Romeo. Ils n’aboutissent pas en raison de la volonté de contrôle ou du nationalisme économique des constructeurs, opinions publiques et gouvernements européens comme des ressources financières disponibles à Détroit.
28Les acquisitions réalisées, beaucoup plus modestes, sont cependant significatives. General Motors tire le premier en acquérant le constructeur anglais Lotus (1986), puis 50 % de la firme suédoise Saab (1990). Ford s’introduit dans le luxe en acquérant deux des spécialistes anglais : Aston Martin (1987), Jaguar (1989). Aucune de ces firmes n’est en bonne santé et si les coûts de leur redressement sont évidents, les bénéfices tardent à se faire sentir.
29Le bilan est nuancé. General Motors s’inspire de Ford en créant une direction européenne, installée à Zurich, et en renforçant l’intégration de la conception et de la fabrication des modèles entre ses filiales. Elle ouvre de nouvelles usines à travers l’Europe et obtient aussi une augmentation de la productivité du personnel dans les sites existants, où elle introduit la production au plus juste à partir de 1989. Ses ventes progressent38. Ford of Europe réalise de bonnes performances économiques jusqu’en 1990. La production s’accroît de 1,6 million de véhicules en 1977 à 1,8 million, pendant que le constructeur parvient à réduire les effectifs, à accroître la productivité de la main-d’œuvre et à renouveler la gamme. La mission d’intégration économique des filiales européennes est donc concluante dans cette période39. Cependant à partir de 1991 les performances deviennent médiocres. Une des raisons en est le renforcement de la concurrence japonaise, qui inquiète aussi de longue date les constructeurs européens car dès 1981 ils estiment que sa pénétration se fait à leurs dépens40.
Les Japonais
30Les accords de restriction volontaire des exportations que plusieurs pays européens ont imposés aux firmes japonaises dans la seconde moitié des années 1970 et dont certains Européens pensent qu’ils vont bientôt devenir caducs et permettent avant tout de gagner du temps pour refaire des forces41 ont eu une conséquence classique en économie internationale. Les constructeurs japonais ont été amenés à tourner cette barrière en s’implantant en Europe.
31Si le quatrième constructeur japonais par la taille, Mitsubishi Motors, s’est décidé tard et a choisi la Hollande en 1989, en s’associant au suédois Volvo pour produire un modèle dans l’usine DAF de Hollande et en obtenant à cette fin l’accord et les capitaux du gouvernement néerlandais (« au début réticent à avoir un Japonais pour partenaire puis prêt à éliminer Volvo de l’opération ») en 199142, pour les trois grands c’est la Grande-Bretagne qui est devenue la tête de pont. Rétrospectivement les raisons en sont évidentes. La langue anglaise permet d’envoyer des cadres formés pour les filiales américaines et dans certains cas rend transposable une partie de l’expérience industrielle, commerciale et politique acquise aux États-Unis. Le déclin des firmes britanniques et la présence des multinationales américaines rendent le jeu tentant pour les Japonais. Le rôle du marché financier anglais est très attractif. Enfin l’absence de protectionnisme chez les gouvernants anglais de la période place l’implantation sous les meilleurs auspices. Il faut y ajouter, selon le vice-président exécutif de Nissan en juin 1980, « la présence du pétrole de la mer du Nord, l’ampleur du marché et la force de l’industrie des équipements »43.
32Historiquement cependant cette localisation n’était pas jouée d’avance et l’Italie, l’Espagne, la Belgique et même l’Allemagne ont un temps été dans la course. Les trois grands japonais prennent en effet trois méthodes distinctes. Honda choisit d’emblée la Grande-Bretagne, et, avec l’accord du gouvernement britannique, commence par une coopération technique avec British Leyland à partir de 1979. Puis ce dernier (rebaptisé Rover) devient la base d’assemblage de Honda pour le Marché commun, le cheval de Troie. En 1989 Honda acquiert 20 % du capital de Rover44. Cependant cette association avec une firme retarde son implantation autonome en Europe et restreint ses options stratégiques. Nissan, déjà implanté en Espagne pour les poids lourds, veut être présent dans les voitures et passe un accord en Italie avec Alfa Romeo en 1980 en vue de construire une usine commune pour petites voitures. Cette initiative provoque, outre la préoccupation du gouvernement français, l’hostilité de Fiat. Mais elle se solde par « un fiasco sur le plan de la stratégie tant commerciale qu’industrielle ». Bien plus, Fiat finit par obtenir du gouvernement italien en 1986 le droit de racheter à l’État Alfa Romeo que guignait Ford45. Nissan cependant n’avait pas mis tous ses œufs dans le même panier46. La firme dès juin 1980 indique au gouvernement conservateur britannique que son investissement italien sera limité et qu’elle veut une installation principale dans un autre pays. La réponse immédiate est positive, en dépit des problèmes de British Leyland. La législation sociale britannique et l’indépendance du gouvernement britannique au sein de la CEE sont des éléments qui jouent au bénéfice des Britanniques par rapport à l’Allemagne. Nissan s’implante ainsi en Grande-Bretagne, mais d’une manière différente de Honda. Elle crée de toutes pièces une usine dernier cri à Sunderland en 1984, dont la production commence en 1986 et qui devient ensuite l’usine la plus productive d’Europe. Le plus important constructeur japonais, Toyota, est le dernier à s’implanter, tellement les bénéfices de l’exportation sont grands, et l’état-major a hésité47. Les opérations de sa filiale contrôlée à 100 % et productrice de moteurs comme de voitures débutent en septembre 1992, l’année du traité de Maastricht48.
Conclusion
33Le bilan de cette période est important et doit être examiné sous plusieurs angles.
34La croissance de la production est allée pour la première fois de pair avec une diminution de l’emploi. En effet les transformations que l’industrie automobile en Europe a alors connues ont entraîné une réduction du personnel. De 1980 à 1994 (donc des dates légèrement différentes des nôtres), les effectifs salariés ont globalement diminué de 30 %, avec des différences marquées selon les pays : 55 % au Royaume-Uni, 36 % en France et seulement 6 % en Allemagne49. La croissance de la production elle-même a été fort inégale selon les pays.
35Outre la poussée de l’Espagne, entièrement due à des multinationales étrangères, on relève bien sûr la performance de l’Allemagne. Elle a deux composantes opposées. Le ralliement de Volkswagen en 1974 à la stratégie de volume et diversité, qui dans notre période entre en crise chez tous ses autres adeptes, porte pourtant ici ses fruits grâce à une politique résolue et cohérente d’internationalisation, de croissance externe et de « mise en commun des plates-formes de ses marques ». Le compromis social est lui aussi différent.
Tableau 1. Évolution à long terme de la production de véhicules automobiles dans les cinq plus importants pays européens (en millions de véhicules)
1980 | 1980 | |
Allemagne | 3,9 | 3,9 |
France | 3,4 | 3,6 |
Espagne | 1,15 | 2,0 |
Grande-Bretagne | 1,3 | 1,6 |
Italie | 1,6 | 2,1 |
Source : Michel Battiau, « Les effets spatiaux de l’intégration européenne : l’exemple de la construction automobile », Annales de géographie, novembre-décembre 2006, p. 735
36VW « privilégia l’emploi et la réduction du temps de travail par rapport aux augmentations de salaire »50. En revanche, Daimler-Benz et BMW maintiennent avec succès leur stratégie de qualité en renouvelant leur politique de produits et « en faisant de leurs véhicules la référence internationale du nouveau haut de gamme »51.
37Au terme de ces années 1979-1992 les multinationales implantées dans la Communauté économique européenne se trouvent dans une position différente du point de départ. Les Américains sont passés du noir au rouge. Les Japonais, jusque-là purement exportateurs dans le cadre d’une limitation, sont devenus des producteurs – même si leurs conditions d’implantation en Europe ont été, moins favorables qu’aux États-Unis – et n’ont cessé d’améliorer leurs parts de marché (9,2 % en 1980, 11,7 % en 1990) et leur rentabilité. L’avenir ne peut plus être pensé hors de leur présence.
38Si les Européens sont passés du rouge au noir, le nombre de firmes européennes parmi les constructeurs et les équipementiers a considérablement diminué, comme Gianni Agnelli d’une part, différents chercheurs ou consultants d’autre part l’avaient pronostiqué dès le début des années 198052. L’Allemagne et la France sont les seuls pays qui gardent un véritable pluralisme. En outre, deux constructeurs publics ont été privatisés totalement : Alfa Romeo en Italie, Rover en Grande-Bretagne, et un partiellement : 20 % du capital de Renault est cédé à Volvo en 1990 sous un gouvernement socialiste (tandis que Renault est entré au capital de Volvo)53.
39Mais, sous la pression des consommateurs, des banques, des États et de Bruxelles, les Européens survivants ont été amenés à changer leur fusil d’épaule pour pouvoir continuer leur activité54. Il n’est plus question d’avoir des stratégies axées sur le seul volume de production quitte à avoir des modèles de mauvaise qualité et de prolonger au maximum des gammes vieillissantes. Une partie des constructeurs produisent moins, mais tous conçoivent, fabriquent et distribuent des produits d’une meilleure qualité et d’une plus grande rentabilité. Quant aux relations professionnelles, les constructeurs les ont aussi durablement transformées. En ce sens les constructeurs européens (autres que les Anglais) ont utilisé le temps qu’ils ont gagné en retardant la pénétration japonaise et aussi sont désormais pratiquement prêts pour le Marché unique qu’ils ont appelé de leurs vœux.
40On peut désormais commencer à parler d’un « système automobile européen », qui, « dans une acception limitée aux acteurs industriels concernés, recouvre l’ensemble fournisseurs/sous-traitants/constructeurs, y compris les fournisseurs de matières, les prestataires de services, etc. »55, même si la segmentation réelle du marché reste nationale, tout en étant en pleine transformation56.
Notes de bas de page
1 Archives de TF1, Émission Questionnaire, Jean-Louis Servan-Schreiber reçoit Bernard Hanon, directeur général de Renault, diffusion le 9 février 1981, transcription p. 2.
2 James M. Laux, The European Automobile Industry, New York, Twayne, 1992. Ce livre constitue encore la meilleure entrée en matière pour notre sujet.
3 Archives de TF1, Émission Questionnaire…, 9 février 1981, pp. 2-3.
4 Armand Hatchuel et Benoît Weil, L’expert et le système, Paris, PUF, 1992.
5 Florence Charue, Apprentissages organisationnels et mutation industrielle. L’exemple de la robotisation des tôleries automobiles, thèse de doctorat de sciences de gestion, École nationale supérieure des mines de Paris, 1991.
6 Cf. GERPISA, Université d’Evry-Val d’Essonne, site web : gerpisa.org (voir notamment http://gerpisa.org/node/568). Consulté le 3 décembre 2017.
7 Cf. Robert Boyer et Michel Freyssenet, Les modèles productifs, Paris, La Découverte, 2000.
8 Patrick Fridenson, « Étendue et limites de l’Europe automobile », Entreprises et Histoire, octobre 2003, pp. 91-100. Michel Freyssenet, Koichi Shimizu et Giuseppe Volpato (éd.), Globalization or regionalization of the European car industry, Basingstoke, Macmillan, 2003.
9 Roland Stephen, Vehicle of Influence. Building a European Car Market, Ann Arbor, University of Michigan Press, 2000, pp. 80-81. Jean-Louis Loubet, Histoire de l’automobile française, Paris, Le Seuil, 2001, pp. 459-460.
10 Voir les interprétations opposées sur ce point de Marine Moguen-Toursel, « European Standards. Tool or Barrier for European Enterprise ? », communication au congrès international d’histoire économique, Helsinki, août 2006, p. 2, à partir d’archives allemandes et de Sigfrido Ramirez, « The European Search for a new Industrial Policy (1968-2006) », communication à l’European University Institute Alumni Meeting, 6 octobre 2006, p. 12, à partir d’archives françaises.
11 Andrew M. McLaughlin et Grant Jordan, « The Rationality of Lobbying in Europe : why are Euro-Groups so numerous and so weak ? Some Evidence from the Car Industry », in Sonia Mazey et Jeremy Richardson (éd.), Lobbying in the European Community, Oxford, Oxford University Press, 1993, pp. 122-161. Je remercie Marine Moguen-Toursel, postdoctorante à l’EHESS, pour avoir attiré mon attention sur cet article. Pour une vue d’ensemble, cf. Andrew M. McLaughlin et William A. Maloney, The European Automobile Industry: multi-level Governance, Policy and Politics, Londres, Routledge, 1999. Et aussi Roland Stephen, Vehicule…, op. cit., pp. 103 et 127.
12 Cf. Valerio Castronovo, Fiat 1899-1999. Un secolo di storia italiana, Milan, Rizzoli, 1999.
13 Pehr Gyllenhammar, Fortsättning följer, Stockholm, A. Bonnier, 2000.
14 Maria Green Cowles, The Politics of big Business in the European Community : setting the Agenda for a new Europe, thèse de doctorat de science politique, American University, Washington, 1994, et « Setting the Agenda for a new Europe : the ERT and EC 1992 », Journal of Common Market Studies, décembre 1995, pp. 501-525. John Gillingham, European Integration, 1950-2003. Superstate or new Market Economy?, Cambridge, Cambridge University Press, 2003, pp. 192, 238-240, 267. Belén Balanyà, Ann Doherty, Olivier Hoedeman, Adam Ma’anit, Erik Wesselius, Europe Inc. Comment les multinationales construisent l’Europe et l’économie mondiale, 2e éd. revue et actualisée, Marseille, Agone, 2005, pp. 57-90, 150-152, 417-431, 467-471. Voir également la communication de Maria Green Cowles dans le présent livre.
15 Belén Balanyà et alii, Europe Inc., op. cit., pp. 113-127 et 473-474. Voir également la communication de Luc Moulin dans le présent livre.
16 Nicolas Gaultier, « Modèles de distribution », in Audrey Puig (dir.), L’automobile. Marchés, acteurs, stratégies, Paris, Elenbi Éditeur, 2003, pp. 63-65.
17 Marine Moguen-Toursel, « Strategies of European Automobile Manufacturers facing Community Environmental Standards », Business and Economic History On-Line, vol. 1, 2003, et « European standards… », art. cit.
18 Archives TF1, Émission Questionnaire…, 9 février 1981, p. 7.
19 Alain Sarignac, « Carminat : la voiture intelligente », Culture technique, octobre 1992, pp. 193-197.
20 Cf. Blanche Segrestin, Innovation et coopération interentreprises. Comment gérer les partenariats d’exploration ?, Paris, CNRS Éditions, 2006.
21 Pendant « la plus grande partie des années 1980 et les années 1990 » elle a comme « seul conseiller » un professeur de gestion anglo-indien : Krish Bashkar. Voir le site http://www.1automotive.org/krish_bashkar.htm. Pour une vue d’ensemble de l’accroissement du rôle de la Comission en matière automobile et de ses relations avec les constructeurs, leurs associations, les États, le Parlement européen…, cf. Roland Stephen, Vehicle…, op. cit., pp. 10, 31, 45-52, 98-101, 106, 124, 142, 147, 159, 174-175.
22 Archives du Comité des constructeurs français d’automobiles, note du département Économie-Statistiques à MM. les membres du Comité de direction, 2 juin 1994.
23 Krish N. Bhaskar et la Motor Industry Research Unit, The Effect of different State Aid Measures on Intra-Community Competition : exemplified by the Case of the Automobile Industry, Luxembourg, Office for Official Publications of the European Communities, 1990.
24 Stéphane Doblin et Jean-Loup Ardoin, Du rouge au noir ou les profits retrouvés, Paris, Publi-Union, 1989.
25 Pour un témoignage sur le redressement partiel de British Leyland : Michael Edwardes, Back from the Brink : an Apocalyptic Experience, Londres, Collins, 1983. Pour une réflexion par l’ancien président de PSA : Jacques Calvet, La grande faillite. Comment l’éviter, Paris, Plon, 1998. Cf. Jean-Louis Loubet, Histoire de l’automobile française, op. cit., pp. 401-418 ; Rodolphe Greggio, Fiat, une crise automobile. Stratégie de croissance externe et management de marque, Paris, Éditions de l’Officine, 2003 ; Alain Frerejean, Les Peugeot. Deux siècles d’aventure, Paris, Flammarion, 2006.
26 Archives Renault, lettre de Bernard Hanon à Édith Cresson, ministre du Redéploiement industriel et du Commerce extérieur, 17 janvier 1985. Je remercie Sigfrido Ramirez d’avoir attiré mon attention sur ce document. Pour les vues générales de B. Hanon, cf. Bernard Hanon, « Où va l’industrie française ? », Le Débat, janvier 1984, pp. 78-108 (entretien avec Pierre Rosanvallon) ; le mot Europe n’apparaît pas une seule fois dans ces 30 pages.
27 Ceci avait commencé à partir de 1960 : Patrick Fridenson, « The Growth of Multinational Activities in the French Motor Industry, 1890-1979 », in Peter Hertner et Geoffrey Jones (éd.), Multinationals : theory and history, Aldershot, Gower, 1986, p. 163.
28 Patrick Fridenson, « Georges Besse et le redressement de Renault », in Georges-Henri Soutou (dir.), Georges Besse. Des grands projets aux restructurations industrielles, Paris, Éditions Rive droite, 1998, pp. 113-118.
29 Daniel Fixari et Armand Hatchuel, « Faut-il compléter le modèle japonais ? La reconstruction d’une doctrine industrielle chez Renault », Cahiers de recherche du Centre de gestion scientifique de l’École des mines de Paris, nº 2, 1992, pp. 1-32.
30 C. B., « La lutte pour le pouvoir dans le groupe Fiat. M. Ghidella démissionne et sera remplacé par M. Romiti », Le Monde, 29 novembre 1988, p. 42. Valerio Castronovo, Fiat…, op. cit., pp. 1594-1601. Rodolphe Greggio, Fiat…, op. cit., pp. 281-299.
31 Archives de TF1, Émission Questionnaire…, 9 février 1981, p. 8.
32 Stéphane Lauer, Renault. Une révolution française, Paris, J.-C. Lattès, 2005, pp. 75-76.
33 Jean-François de Andria, « Renault-Volvo. Des fiançailles rompues », Renault Histoire, juin 2004, pp. 31-49 ; Stéphane Lauer, Renault…, op. cit., pp. 75-92.
34 Noël Goutard, L’outsider. Chroniques d’un patron hors normes, Paris, Village Mondial, 2005, pp. 109-160.
35 Gregorio Rampa, Cesare Sacchi, « Interdipendenza tra grande imprese sistema della fornitura nella concreta esperienza dell’industria automobilistica : il caso Fiat », in Fondazione ASSI (dir.), Piccola e grande impresa : un problema storico, Milan, Franco Angeli, 1987, pp. 157-170.
36 Florence Charue-Duboc, « Repositioning of European Chemical Groups and Changes in Innovation Management : the Case of the French Chemical Industry », in Louis Galambos, Takashi Hikino et Vera Zamagni (éd.), The Global Chemical Industry in the Age of the Petrochemical Revolution, Cambridge, Cambridge University Press, 2007, pp. 251-284.
37 John A. C. Conybeare, Merging Traffic: the Consolidation of the International Automobile Industry, Oxford, Rowman and Littlefield, 2004, pp. 12 et 54-55.
38 James M. Laux, The European Automobile Industry…, op. cit., pp. 222-223. International General Motors Historical Site : clubs. hemmings. com./clubsites/chevytalk/Gmhistory/ (consulté en août 2006). Paul Stewart et alii, « Les ouvriers de Vauxhall face à la lean production », Le Mouvement Social, octobre-décembre 2006, pp. 33-52.
39 Gérard Bordenave, « Ford of Europe 1967-2003 », in Hubert Bonin, Yannick Lung et Steve Tolliday (éd.), Ford 1903-2003. The European History, Paris, Éditions PLAGE, 2003, pp. 243-317.
40 Archives de TF1, Émission Questionnaire…, pp. 2 et 4-5.
41 Entretien avec Pierre Dreyfus, ancien PDG de Renault, conseiller auprès du président de la République, 19 juin 1990. Pour un propos moins précis, cf. la réponse de Bernard Hanon, Archives TF1, Émission Questionnaire…, 9 février 1981, pp. 6-7.
42 James M. Laux, The European Automobile Industry, op. cit., p. 241. Jean-François de Andria, « Renault-Volvo… », art. cit., pp. 40-41.
43 Source : voir note 46. Pour une vue d’ensemble : Mark Mason, « The political economy of Japanese automobile investment in Europe », in Mark Mason and Dennis Encarnation (éd.), Does ownership matter? Japanese multinationals in Europe, Oxford, Clarendon Press, 1994, pp. 411-439.
44 Andrew Mair, Honda’s Global Local Corporation, Londres, Macmillan, 1994. Tsutomu Demizu, Honda: its technology and management, Osaka, Union Press, 2003, p. 220.
45 Valerio Castronovo, Fiat…, op. cit., pp. 1458, 1487, 1489, 1499-1500, 1502-1503, 1562-1569, 1992.
46 National Archives, Kew, FV 22, lettre de Jenkin Thomas (ambassade britannique à Tokyo) au ministre de l’Industrie, 25 juin 1980, et lettre d’A.C. Galsworthy (ambassade britannique à Rome) à Emyr Jones-Parry, ECD (I), 22 septembre 1980. Je remercie vivement Tommaso Pardi, doctorant de sociologie à l’EHESS, qui m’a communiqué ces documents ainsi que de précieux commentaires. Voir aussi Peter Dicken, « Japanese penetration of the European automobile industry: the arrival of Nissan in the United Kingdom », Tijdschrift/voor Economische en sociale Geografie, February 1987, pp. 94-107.
47 Entretien à Tokyo avec le directeur de l’Institute of International Economic Studies de Toyota, 15 juillet 1995.
48 Toyota Motor Corporation, Annual Report 2006, p. 134. Tommaso Pardi, « Where did it go wrong? Hybridization and Crisis of Toyota Motor Manufacturing UK, 1989-2001 », International Sociology, janvier 2005, pp. 93-113.
49 Armelle Gorgeu et René Mathieu, « L’emploi dans la filière automobile », La Lettre du Centre d’études de l’emploi, décembre 1998, p. 2.
50 Robert Boyer et Michel Freyssenet, Les modèles productifs…, op. cit., pp. 75-76. Cf. Ulrich Jürgens, « Le développement du modèle industriel de Volkswagen », in Michel Freyssenet, Andrew Mair, Koichi Shimizu, Giuseppe Volpato (dir.), Quel modèle productif ? Trajectoires et modèles industriels des constructeurs automobiles mondiaux, Paris, La Découverte, 2000, pp. 293-336.
51 Robert Boyer et Michel Freyssenet, Les modèles productifs…, op. cit., p. 32. Sur Daimler-Benz, un témoignage au sommet : Edzard Reuter, Schein und Wirklichkeit. Erinnerungen, Berlin, Siedler Verlag, 1998. Sur BMW cf. Horst Mönnich, The BMW Story: a Company in its Time, Londres, Sedgwick and Jackson, 1991 ; Alain Souské, BMW. Le culte de la technique. La religion de l’indépendance, Paris, Hatier, 1995.
52 Krish N. Bashkar, The Future of the World Motor Industry, Londres, Nichols, 1980. Archives TF1, Émission Questionnaire…, 9 février 1981, pp. 7-8.
53 Renault SA, Rapport annuel 1990, 1991. Louis Schweitzer, Mes années Renault. Entre Billancourt et le marché mondial, Paris, Gallimard, 2007, pp. 30-34.
54 Ils réagissent aussi aux transformations de la concurrence à l’échelle du monde : Christopher M. Law (éd.), Restructuring the Global Automobile Industry: National and Regional Impacts, Londres, Routledge, 1991 ; Graeme P. Maxton et John Wormald, Driving Over a cliff: Business Lessons from the World’s Car Industry, Wokingham, Addison-Wesley, 1995 ; Commissariat Général du Plan, L’automobile, les défis et les hommes : rapport du groupe de stratégie industrielle « Automobile » présidé par M. Gilbert Rutman, Paris, La Documentation française, 1992 ; Thomas Fetzer, Driven towards Inter-Nationalization. British trade Union Politics at Ford and Vauxhall, 1960-2001, Thèse de doctorat d’histoire, Institut Universitaite Européen, 2005.
55 Jean-Jacques Chanaron, Étienne de Banville, Vers un système automobile européen, Paris, Economica, 1991.
56 Marc Prieto, « Segmentation du marché automobile européen : une analyse empirique », communication aux XVes journées SESAME, Rouen, 2005.
Auteur
Ancien élève de l’École normale supérieure, Patrick Fridenson est historien économiste, directeur d’études à l’École des hautes études en sciences sociales. Il est cofondateur et codirecteur du Groupe d’Études et de Recherches Permanent sur l’Industrie et les Salariés de l’Automobile (GERPISA). Rédacteur en chef de la revue Entreprises et Histoire, il est ancien président de l’Association Française des Historiens Économistes (AFHE) et de la Business History Conférence. Il a publié récemment : « Transforming public enterprise in France », Transforming public enterprise in Europe and North America. Networks, integration and transnationalisation, Judith Clifton, Francisco Comin et Daniel Diaz-Fuentes (eds.), Houndmills, Palgrave Macmillan, 2007, p. 65-76 ; « Les cadres et l’organisation de l’entreprise : Renault, 1945-1985 », in J. Costa-Lascoux, G. Dreyfus-Armand, E. Témime (dir.), Renault sur Seine. Hommes et lieux de mémoires de l’industrie automobile, Paris, La Découverte, 2007, p. 113-133.
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