La France et les télécommunications européennes face aux mutations des années 1980
p. 315-331
Texte intégral
1Les télécommunications européennes ont connu des changements considérables au cours des années 1980. Le mouvement de déréglementation venu des États-Unis et relayé principalement par la Grande-Bretagne a entraîné une remise en cause des grands équilibres existant en Europe depuis plusieurs décennies1. Ceux-ci étaient fondés sur l’existence de monopoles publics dans chaque pays européen2. Chacune de ces administrations disposait de fournisseurs d’équipements qui, sous des formes diverses lui étaient liés3. Il en résultait un marché européen très cloisonné facilitant la mise en œuvre de politiques industrielles permettant à des entreprises locales de conserver une part plus ou moins importante du marché dans le cadre d’oligopoles où les filiales d’ITT (International Telegraph and Telephon) disposaient de très fortes positions. Pour réduire cette dépendance vis-à-vis de la technologie américaine, la France s’était engagée dans une reconquête de son marché intérieur à partir des années 1970 en étant la première à déployer sur son réseau la nouvelle génération de centraux de commutation temporelle, mis au point par le Centre National d’Étude des Télécommunications (CENT) et Alcatel. Alors que le marché américain était dominé par le monopole privé d’AT & T, l’ensemble des télécommunications mondiales fonctionnait donc jusqu’aux années 1970 incluses sans la moindre concurrence entre opérateurs et une concurrence « aménagée » entre fabricants d’équipements. La déréglementation qui commence dans les années 1980 changera radicalement la donne.
I. L’ouverture du marché des services de télécommunication
2Ce terme peut être discuté. Il recouvre l’ensemble des dispositifs introduits dans des secteurs à faible concurrence, comme le transport aérien, pour ouvrir le marché à la concurrence. Ces dispositions relèvent donc plus d’une « nouvelle » réglementation destinée à assurer quelque chance de survie à de nouveaux entrants sur des marchés tenus par des entreprises en position dominante.
A. La déréglementation des télécommunications : origines et principes
3L’émergence de technologies de transmission radicalement nouvelles comme les satellites de télécommunications, puis les fibres optiques associées à la numérisation des télécommunications, l’amorce de la « convergence » entre informatique et télécommunications a été à l’origine d’une remise en cause du système « accepté » de monopole privé confié à AT & T aux États-Unis. Pour que ces nouveaux dispositifs puissent s’épanouir rapidement et entraîner une baisse sensible des tarifs ainsi qu’une véritable internationalisation des réseaux et une diversification des services proposés aux usagers, seule la concurrence semblait adaptée. Créer les conditions susceptibles de conduire un monopole naturel, comme celui des télécommunications, à l’efficacité s’avérait décisif pour maîtriser les fortes évolutions attendues. L’expérience montrait qu’une réglementation tatillonne et presque inquisitoriale, comme celle longtemps appliquée à AT & T, était inopérante lorsqu’il s’agissait d’atteindre ce but. D’où l’idée d’introduire des mécanismes organisateurs incitatifs, de type quasi concurrentiel, à chaque fois que ceux-ci s’avéraient susceptibles de discipliner le monopole. Différentes solutions étaient envisageables :
la concurrence potentielle, obtenue en autorisant l’entrée de concurrents sur un marché dit « contestable » où les coûts irréversibles doivent être relativement peu importants, afin qu’une entrée temporaire soit rendue crédible par l’absence de coûts de sortie significatifs ;
la concurrence à la marge qui résulte de l’instauration d’un duopole sur un segment du marché ;
la concurrence préalable, dans laquelle la concession de monopole est attribuée à l’issue d’une procédure d’enchère4.
4Ces différentes procédures exigent cependant la présence d’un « meneur de jeu » qui se heurte à des problèmes de coûts d’organisation et d’acquisition d’information. Ainsi, dans ce cas, si la réglementation ne disparaît pas, elle change de nature et s’allège sensiblement5.
5La tendance mondiale depuis le début des années 1980 est donc à la « déréglementation ». Par ce terme en fait mal adapté, les commentateurs veulent mettre en lumière l’évolution d’un marché devenu beaucoup plus compétitif. Ce mouvement, qui commença aux États-Unis, concerna progressivement un nombre croissant de pays industrialisés.
B. Une dynamique nord-américaine
6La remise en cause du monopole d’AT & T, monopole privé sur le marché des États-Unis, a constitué la base du processus, aux États-Unis, puis dans le monde. Un démantèlement effectif du Bell System devint une menace extrêmement sérieuse pour AT & T au cours des années 19706. L’entreprise tenta, comme elle l’avait fait par le passé, de gérer la crise en proposant, à travers un intensif lobbying, des réformes de son statut, compatibles avec ses projets à long terme. Trois textes furent ainsi déposés au cours de cette période pour tenter de renverser le cours d’une évolution jugée pourtant inéluctable par beaucoup :
le Consumer Communication Reform Act en 1976 ;
le bill du sénateur Hartke en 1978 ;
le projet Communication Act of 1978.
7Cherchant à maintenir, sous une forme ou sous une autre, une véritable réglementation, préservant le plus largement possible la position d’AT & T, ils connurent tous un sort contraire. Les réformes proposées paraissaient aller de manière trop évidente dans le sens des intérêts d’AT & T, le projet de 1976 étant même surnommé « Bell Bill ». En recevant, en 1978, la responsabilité du dossier « États-Unis d’Amérique contre AT & T », H. Greene, un juge « énergique et libéral », donna un brusque coup d’accélérateur à un processus qui tendait à s’enliser. Un calendrier très précis fut établi pour la procédure, il ne semblait plus y avoir d’échappatoire pour AT & T qui avait jusqu’alors espéré un pourrissement de la situation. C’est pourquoi fut décidé en 1980 un changement radical de stratégie. Plutôt que de tenter de préserver à tout prix une structure ancienne, le groupe chercha à tirer le meilleur parti d’une évolution à laquelle il ne pouvait désormais plus s’opposer.
« La forme de notre avenir devient claire, déclara C.L. Brown, nouveau président du groupe. Pour respecter les orientations nouvelles mais aussi pour profiter des opportunités qui vont se présenter, il est évident que le Bell System devra fonctionner sur deux modes différents. Le principe de la réglementation restera en vigueur pour les services de base des télécommunications […] en même temps nous prévoyons qu’en ayant la possibilité de pénétrer sur le marché des services non réglementés, les aptitudes et les ressources du Bell System trouveront des occasions profitables de s’employer dans le marché mondial de l’information. »
8Cette évolution se fit en deux temps.
9En 1980, la FCC (Federal Communication Commission) décida, à la suite du rapport d’une commission d’enquête formée en 1976, de diviser les services de télécommunications en deux parties :
un secteur strictement réglementé par la FCC et concernant les services de base, où l’information était simplement transportée sans subir aucun traitement particulier, comme dans le cas du téléphone ;
un secteur totalement déréglementé incluant les services à valeur ajoutée. Les traitements de données, le vidéotexte sont plus particulièrement concernés.
10Le Consent Decree du 24 août 1982 marqua l’aboutissement de cette longue procédure. Le compromis obligeait AT & T à se séparer dans un délai de dixhuit mois des vingt-deux compagnies exploitant les communications locales. Ce démembrement fut accompli avec une légère avance puisque, le 1er janvier 1984, AT & T s’était séparé de l’ensemble des Bell Operating Companies. L’ensemble des procédures menées contre le Bell System avait donc finalement porté ses fruits et entraîné la fin du monopole d’AT & T sur le réseau téléphonique américain7. Le cœur du Bell System était cependant préservé. Le triangle recherche-fabrication-exploitation étant, sur un périmètre différent, préservé.
11L’évolution imposée par l’administration fédérale ne comportait pas que des aspects négatifs pour l’entreprise. Moins puissante financièrement, celle-ci pouvait cependant dorénavant développer ses activités dans des domaines qui lui étaient jusqu’alors interdits. Les marchés internationaux et l’informatique devenaient ainsi accessibles.
C. La réaction européenne
12La Grande-Bretagne est le premier pays européen à suivre ce mouvement, la fin du monopole de British Telecom constituant la première phase de cette réforme.
13Commencée en 1981 par l’ouverture à la concurrence des équipements secondaires, elle concerna en 1982 les liaisons spécialisées, avec la licence accordée à la société Mercury. Celle-ci fut en mesure de proposer aux entreprises des liaisons à très haut débit pour la connexion de leurs ordinateurs. En 1984, la licence était étendue à la voix et aux liaisons internationales. Il y avait donc, à partir de cette date, deux opérateurs concurrents au Royaume-Uni. Le réseau de Mercury s’étoffa rapidement avec l’ouverture de faisceaux hertziens et de liaisons à fibre optiques. Le retrait de certains actionnaires en 1984 donna à Cable and Wireless le contrôle total de Mercury et fit de cet ensemble un opérateur puissant à la fois sur le réseau britannique et sur les réseaux internationaux. La privatisation de British Telecom ouvrait en 1984 le second volet de cette libéralisation. Elle concernait la quatrième entreprise de télécommunications du monde, avec un chiffre d’affaires de 6,8 milliards de livres et un bénéfice avant impôt de 990 millions. 51 % des actions furent vendues pour un montant de 4 milliards de livres. Le 1er juillet 1984, l’Office of Telecommunications, organisme de régulation politiquement indépendant, était créé.
« OFTEL acts as a watch dog supervising BT’s compliance with the licence issued to it. However, OFTEL does not create policies for the telecommunications industry […] does not make decisions8. »
14La dérégulation à l’anglaise n’a-t-elle pas été en fait une habile remise en ordre des forces de British Telecom ?
« La dérégulation des télécommunications britanniques reste en réalité un processus en trompe-l’œil, affirme ainsi A. Giraud. Elle n’a pratiquement pas entamé le monopole de British Telecom qui, dynamisé sur le plan financier, modernisé, s’est considérablement diversifié9. »
II. Nouvelles perspectives et nouveaux risques pour les fabricants d’équipements
15Destinée à ouvrir le marché des services de télécommunications à la concurrence, la déréglementation touchera pourtant tout d’abord les entreprises fabricant des équipements10. Celles-ci ont cherché à anticiper la nouvelle donne tant du point de vue de leur organisation commerciale que de leurs capacités de recherche. Pour améliorer ces deux facteurs il était indispensable de grandir et donc de s’allier.
A. Les grands manufacturiers européens en quête d’alliances
16Très rapidement le Vieux Continent apparaît comme un objectif essentiel pour les grandes entreprises américaines. Pour pénétrer ce marché, dont l’ouverture, bien qu’inéluctable se fera très vraisemblablement de façon très progressive, les industriels d’outre-Atlantique doivent trouver un partenaire sur chaque marché national. Pour ITT il s’agit d’accroître ses activités à partir de bases implantées de longue date, pour AT & T, il faut en revanche partir d’une feuille quasiment blanche. Dès 1982-1983 les initiatives se multiplient et très rapidement des « couples transatlantiques » se forment presque partout :
en Espagne, ITT consolide ainsi ses positions tandis qu’AT & T prend pied sur le marché des circuits intégrés ;
en Italie, la STET se rapproche d’IBM et Olivetti pactise avec AT & T. Seule la modeste Teletra, filiale de Fiat, reste disponible pour un éventuel partenariat européen ;
en Belgique, la « Bell d’Anvers » fait de ce pays une citadelle ITT à peine menacée par AT & T, qui s’appuie sur Philips pour y poser quelques jalons. LM Ericsson semble cependant la mieux placée pour prendre le rôle de second, l’appui de la Générale de Belgique, bien que précieux, semblant insuffisant pour donner à Alcatel une chance réelle sur ce marché ;
en Angleterre, les acteurs nombreux et sans ligne de conduite bien arrêtée rendent toute initiative étrangère très délicate.
17Alors que certains Américains, comme ITT, confirment leurs positions ou bien que d’autres comme IBM et AT & T, développent des stratégies offensives puissantes11, aucun manufacturier européen ne semble en revanche capable de mener une politique ambitieuse hors de ses frontières. Bien au contraire, un par un, ils se rallient en ordre dispersé aux propositions venues d’outre-Atlantique. Il est vrai que les industriels européens sont dans leur quasi-totalité, très en retard sur leurs homologues nord-américaines en matière de recherche et de développement. Sur le segment décisif de la commutation, aucun d’entre eux, si l’on excepte Alcatel et, dans une moindre mesure Ericsson, ne peut commercialiser un central électronique de qualité.
18Face à la dynamique américaine, l’idée d’une réplique européenne concertée est apparue à l’automne 198412. À l’instigation des différents gouvernements, des négociations se sont alors ouvertes entre Siemens, Plessey, Italtel et Alcatel pour constituer un « Airbus des télécommunications » et préparer conjointement la prochaine génération de grands commutateurs. Cette démarche se heurta d’emblée à de nombreuses difficultés. Dissensions entre Italiens, hésitations allemandes, scepticisme britannique et méfiance française s’allièrent pour priver ce projet de tout contenu réel. Aucun des « partenaires » ne souhaitant prendre la responsabilité d’un échec vis-à-vis de sa tutelle ou de son client, les pourparlers avancèrent jusqu’à la signature d’un accord plutôt flou et qui ne déboucha d’ailleurs sur aucune réalisation concrète. Du côté français, Georges Pébereau n’a jamais cru à ce projet. Par souci de ménager le gouvernement, très sensible à la dimension « européenne » de celui-ci, il a simplement pris garde de bien préserver toutes les apparences tout en recherchant, comme tous ses concurrents européens un allié nord-américain.
B. Une « alliance franco-française »
19Avant toute alliance internationale il paraissait cependant judicieux de régler le problème, déjà ancien13, des relations entre Thomson-CSF et Alcatel (Compagnie Générale d’Électricité, CGE) dans le domaine de la téléphonie publique. Alors que le nouveau contexte international, les nécessités d’une relance de l’activité et d’un renforcement des entreprises françaises sur des marchés de plus en plus globaux et compétitifs incitait le gouvernement à agir de manière résolue pour construire des ensembles industriels adaptés, leur rivalité apparaissait de plus en plus comme contre-productive. Engagés dans une concurrence qui semblait encore plus baroque depuis que les deux groupes avaient en l’État un seul et même actionnaire, toute clarification de ce domaine passait par le retrait de l’un ou de l’autre. Les changements de management permettant des remises en cause, qui quelque temps auparavant seraient passées pour hérétiques, la nomination d’Alain Gomez à la tête de Thomson facilitera les indispensables mutations. Celui qui avait été en 1965 l’un des cofondateurs du CERES avec Jean-Pierre Chevènement est une sorte d’oiseau rare en ce début des années 1980, un socialiste patenté, doté d’un excellent profil de patron. Il succède à Jean-Pierre Bouyssonie le 17 février 1982 à la tête de Thomson-Brandt, celui-ci conservant la présidence de Thomson-CSF jusqu’en septembre 1982. Il constate que l’aventure de la commutation publique engagée en 1974 à la suite de la non-reconduction du « Yalta » de 1969 a été une véritable catastrophe financière. Le volontarisme et le talent indéniables des équipes de recherche n’ont pas suffi. Malgré l’apport précieux de LMT (Le Matériel Téléphonique), la mise au point du central de commutation temporelle a été bien trop longue et bien trop coûteuse, les pertes s’accumulent et il apparaît vital de recentrer Thomson sur ses points forts, en premier lieu le militaire et d’abandonner ce puit sans fond que sont les télécommunications civiles. Actionnaire et client, l’État ne peut que jouer un rôle central dans le processus, car, au-delà des enjeux politiques et stratégiques, ce sont bien les finances publiques qui sont et seront sollicitées.
20« Un examen de conscience s’impose pour l’industrie et le gouvernement. Car la France n’a pas les moyens de se livrer aux subtils jeux byzantins qu’elle affectionne par trop », constate ainsi Jacques Jublin14.
21Alors qu’un nouveau « Yalta de l’électronique »15 semble s’esquisser, les opposants commencent pourtant à s’activer. C’est en tout premier lieu la Direction Générale des Télécommunications (DGT) qui souhaite bloquer un projet qui la verrait face à un fournisseur unique pour ses grands centraux de commutation. Cette doctrine n’a guère évolué encore malgré le nouveau contexte créé par le mouvement de déréglementation venu des États-Unis.
La France doit sauvegarder son indépendance et donc favoriser l’émergence d’acteurs disposant d’une taille critique internationale ;
La DGT doit préserver un rapport de forces lui étant favorable en organisant le maintien d’un duopole sur le marché national.
22Louis Mexandeau, ministre des PTT, défend essentiellement ce deuxième point. Il déclare ainsi en juin 1982 : « Une fusion entre CIT-Alcatel et Thomson-CSF n’est pas à l’ordre du jour… Pourquoi ne pas amener les deux entreprises à faire converger leur matière grise, à préparer conjointement les centraux de l’avenir16 ? » Cette solution ne semble guère enthousiasmer les industriels. « Le duel traditionnel CGE-Thomson est terminé, remarque ainsi Le Nouvel Économiste : Une certaine complicité semble même se dessiner entre les deux adversaires d’autrefois. Et MM. Pébereau et Gomez ont des attitudes assez comparables dans leurs relations avec les proconsuls de la filière électronique : MM. Jean-Claude Hirel à la Dieli (Direction des industries électroniques et informatique) et Jacques Dondoux à la DGT17. » Alors que la situation économique du pays n’est pas au mieux et que des réexamens drastiques de la politique économique du gouvernement sont inévitables, c’est la réalité des faits, pour l’actionnaire qu’est désormais l’État, qui rappelle tout d’abord sa propre logique. Les chiffres officiels concernant l’activité de Thomson sont connus et révèlent pour l’année 1982 deux milliards de francs de pertes. Avec, pour le même exercice, ses 247 millions de bénéfices la CGE passe pour le bon élève des nationalisés. En 1983 elle ne recevra ainsi que 150 millions de fonds d’État contre 750 millions pour Thomson. L’influence grandissante de Laurent Fabius va petit à petit permettre au dossier de prendre une véritable consistance : « Maintenant que Mexandeau est sous la tutelle du ministre de l’Industrie, Laurent Fabius, et que celui-ci est lui-même en symbiose parfaite avec l’Élysée, tout est devenu possible », constate Le Matin en septembre 198318. Le sujet divise cependant toujours le gouvernement. Un Conseil interministériel restreint voit ainsi le 16 septembre le point de vue de Laurent Fabius, ministre de l’Industrie s’opposer à celui de Jacques Delors, ministre de l’Économie, ce dernier soutenant Louis Mexandeau, pourtant placé sous la tutelle du ministère de l’Industrie. La réalité industrielle imposera pourtant finalement sa logique et, le 20 septembre, dans le salon Napoléon de l’hôtel Intercontinental une conférence de presse rend officiel le texte dont beaucoup déjà devinaient la nature. Jean-Pierre Brunet présente Georges Pébereau et Alain Gomez à la presse comme les deux grands artisans d’un accord enfin finalisé. L’image d’un groupe rendant les armes après dix années de combat est présente dans tous les esprits, lorsqu’Alain Gomez est amené à expliquer sa démarche. Son propos est précis et direct : son groupe ne pouvait plus poursuivre l’aventure du téléphone dans un contexte international, où la concurrence s’exacerbe. La France dispose désormais d’un champion national pouvant s’appuyer sur un marché domestique bien tenu19.
III. La stratégie française à l’international
23Dans le grand jeu d’alliances qui se dessine en Europe, Alcatel est dans une situation particulière. Elle est la seule entreprise susceptible de rivaliser sur le plan technologique avec les Américains et peut donc se permettre de « choisir » ses conditions. Elle agit par ailleurs dans le cadre d’un groupe nationalisé, la CGE et ne peut donc, sous un gouvernement socialiste, se jeter dans les bras du premier Américain venu… À force d’attendre pourtant l’entreprise française risque fort de se retrouver isolée et ne trouvera bientôt plus aucun partenaire disponible sur un marché européen globalement dominé par des alliances structurées autour des entreprises américaines.
A. Une situation plutôt confuse
24Dans cet environnement très incertain, il s’agira donc pour Alcatel de saisir les opportunités pouvant se présenter sur des marchés européens dont il est absent (Grande-Bretagne, Belgique, Allemagne, Pays-Bas, Norvège), tout en envisageant la conclusion d’une grande association permettant de se positionner sur le marché mondial. Deux partenariats sont envisagés à partir du dernier trimestre de 1984 AT & T et ITT. AT & T est l’hypothèse incontournable pour tout acteur du marché des télécommunications. Sa puissance technologique notamment, fondée sur les Bell Labs, suscite une fascination inquiète chez tous les acteurs de premier rang du marché européen. Pour Alcatel, qui a fondé sa stratégie sur une rupture technologique et qui est à un certain degré marquée par la culture du CNET qui considère depuis plusieurs décennies les Bell Labs comme un modèle, s’allier avec AT & T serait une forme d’accomplissement. La carte ITT est moins évidente à jouer. ITT est depuis le milieu des années 1920, le « porte-avions » de la puissance américaine en matière de télécommunications. Son nom a été associé à des évènements politiques troubles dans de nombreux pays, notamment en Amérique du Sud et, elle n’est guère en odeur de sainteté auprès de la gauche française qui la rend responsable de l’accession au pouvoir du général Pinochet au Chili. Ce que ne discernent pas les « politiques » c’est que les temps ont bien changé et que l’ITT n’est plus tout à fait l’entreprise ultra-dominante qu’elle était dans les années 1950-1970. Sa vocation vers les télécommunications est par ailleurs de moins en moins prioritaire. ITT est progressivement devenu un conglomérat financier et, pour être conservée au sein du groupe, une activité doit présenter des taux de rentabilité élevés. On commence même à murmurer que le groupe va mal et que ses activités télécoms, jugées trop risquées et insuffisamment rentables, pourraient être cédées20.
B. Les alliances américaines
25Malgré les tailles respectives de son entreprise et des sociétés américaines et sans trop d’égards pour les « interrogations » exprimées ici ou là sur la pertinence politique de telle ou telle alliance, Georges Pébereau envisage une double alliance avec AT & T et avec ITT. Il est le seul à penser que ces deux mouvements sont compatibles21. Alors que, pour des raisons différentes, les membres de son équipe et les principaux décideurs représentant la puissance publique sont convaincus que les deux actions sont incompatibles le président de la CGE estime tout au contraire qu’il y a des synergies essentielles entre les deux volets de ce qu’il considère comme un seul et même plan. Avec ITT il obtiendra la clé de marchés européens où l’entreprise américaine possède à travers ses filiales des positions extrêmement solides. Un rapprochement avec AT & T, au prix peut-être d’une ouverture du marché français au géant nord-américain, lui offrira des ouvertures inespérées dans des domaines neufs comme les télécommunications spatiales ou les faisceaux hertziens numériques.
26L’année 1985 sera marquée jusqu’à l’automne, par une multitude de contacts entre les différentes parties impliquées dans ce gigantesque mécano industriel européen. On bluffe, on s’informe… À mesure que les mois passent les réflexions françaises se trouvent perturbées par la perspective des législatives de 1986. Tous les sondages semblent prévoir une défaite de la gauche aux législatives. Celle-ci signifierait privatisations et, en préalable, des changements à la tête des plus grandes entreprises françaises : « La dénationalisation promise excite les convoitises et tous les coups sont bons ou presque pour pousser dehors le patron et son équipe », constate ainsi Valeurs Actuelles…
27La CGE semble peu touchée par ces turbulences. Georges Pébereau a réussi à conserver une gouvernance dynamique pour le groupe malgré la nationalisation. L’entreprise est profitable, présente sur des marchés stratégiques et, s’il a de manière réaliste accepté la nationalisation, il ne sera en aucun cas un obstacle à une privatisation qu’il appelle tout au contraire de ses vœux. La perspective de la privatisation étend en effet de manière considérable la marge de manœuvre de la CGE. Les initiatives internationales qu’elle pourra prendre ne seront plus en effet limitées par son statut d’entreprise publique qui rendait toute prise de contrôle d’une entreprise étrangère quelque peu compliquée et suscitait de fortes réticences de la part des interlocuteurs américains ou européens. De surcroît, pensent par ailleurs de nombreux observateurs, lorsque la droite sera de retour aux affaires, le président de la CGE sera très certainement bien en cour auprès d’Édouard Balladur, son ancien collaborateur au sein de la CGE, dont on sait déjà qu’il occupera d’éminentes fonctions dans le futur gouvernement de cohabitation.
28Alors que des rumeurs d’OPA sur ITT agitent les places européennes, Georges Pébereau décide donc de pousser les feux, conscient qu’après les élections, pendant au moins quelques mois, il sera bien difficile de faire évoluer les choses. À la possibilité d’une « alliance » entre Alcatel et la branche allemande d’ITT il préfère désormais envisager ce qui relevait il y a peu encore de l’inconcevable, et le reste d’ailleurs encore aux yeux de la plupart des journalistes, une prise de contrôle globale, de toutes les activités télécommunications d’ITT par la CGE… Le monde à l’envers en quelque sorte… Les contacts noués avec Rand Araskog, président d’ITT l’encouragent à poursuivre dans cette voie. Les discussions seront complexes d’autant que le patron de la CGE les mènera en parallèle avec la négociation de l’accord entre Alcatel et AT & T. Très confidentiels, portant le nom de code de Roxane les pourparlers connaîtront de multiples rebondissements, ruptures, drames et brouilles. Ils aboutiront en juillet 1986 peu de temps après que l’alliance avec AT & T n’ait été conclue, à un accord de session progressive des filiales européennes d’ITT à Alcatel. Les accords négociés avec AT & T et le rachat des filiales européennes d’ITT, en ouvrant un véritable avenir international à Alcatel, tout en offrant une solution élégante au problème de monopole résultant du retrait de Thomson de la téléphonie publique, relevaient donc d’une action particulièrement surprenante pour le monde industriel des années 1980. Ce double mouvement déjouait tous les pronostics et permettait, au-delà de la montée en puissance d’Alcatel, de donner naissance à un groupe internationalisé. De ces deux accords un seul sera confirmé par le nouveau gouvernement. Il donnera naissance, après le remplacement de Georges Pébereau par Pierre Suard, à Alcatel NV et fera d’Alcatel au début des années 1980, le numéro mondial des équipementiers télécoms.
IV. Une reconfiguration plus lente des opérateurs de réseau
A. De nouvelles règles pour l’Europe
29La Communauté européenne s’organisa progressivement face aux mouvements lancés outre-Atlantique. En son sein, certains pays, et tout particulièrement la Grande-Bretagne, entendaient faire évoluer la règle du jeu, et à terme faire disparaître les monopoles. Schématiquement, au courant favorable à une dérégulation rapide, calquée sur le modèle américain, mené par la Grande-Bretagne, s’opposait un axe franco-allemand, plus attaché au monopole public et militant en faveur d’une transition plus douce. Un cadre négocié fut élaboré sous la forme d’un texte de référence fixant, dans la perspective du « grand marché », les lignes de force des mutations.
30Publié en juin 1987, le livre vert sur le développement du marché commun des services et des équipements de télécommunications fut approuvé un an plus tard par le Conseil des ministres de la Communauté. De nouvelles règles du jeu, pouvant être regroupées en quatre sous-ensembles, étaient proposées22.
Les organismes nationaux de télécommunications conservent l’exclusivité, ou du moins disposent de droits spéciaux pour ce qui est de l’exploitation de l’infrastructure de réseaux et la prestation d’un nombre limité de services de base. Dans le cas où cette exclusivité est essentielle à la sauvegarde de la mission de service public, le service téléphonique peut, à ce titre, être abrité de la concurrence.
À l’exception des services de base, tous les services, en particulier les services intelligents, dits « à valeur ajoutée », doivent être offerts librement sur un marché concurrentiel. Ce qui implique des principes stricts de normalisation des infrastructures et des services fournis par les opérateurs nationaux. Corrélativement, des contraintes techniques d’accès aux réseaux publics sont imposées aux prestataires de services.
Les activités de réglementation sont séparées de celles d’exploitation. La réglementation porte sur l’activité des organismes nationaux, pour prévenir la pratique des subventions croisées. Mais elle s’applique également aux marchés ouverts à la concurrence, afin d’éviter les abus de position dominante, tant de la part des organismes nationaux que des prestataires de services.
Les pays membres doivent adopter une position commune dans les relations avec des pays tiers, notamment dans le cadre des négociations de l’Union Internationale des Télécommunications (IUT) et du GATT.
31Les propositions du livre vert, reprises par le Conseil des ministres sous la forme de grands objectifs, sont à l’origine de plusieurs directives ou projets de directives. Parmi celles-ci, le texte de mai 1988 sur la libéralisation du marché des terminaux et le projet d’octobre 1988 prévoyant une ouverture européenne des appels d’offres émanant des organismes nationaux de télécommunications apparaissent essentiels. Adoptée en décembre 1989, la directive sur l’ONP (Open Network Provision) vise quant à elle à harmoniser les conditions d’accès aux réseaux publics de télécommunications par la définition d’interfaces techniques, de conditions d’utilisation des infrastructures et de principes tarifaires. Ce texte a été complété par une seconde directive de 1989, posant le principe de la liberté de fourniture des services de télécommunications, sauf pour certains services, bénéficiant, au moins à titre transitoire, de droits exclusifs ou spéciaux.
32L’harmonisation dont les principes sont affirmés par la directive sur l’ONP soulève cependant un certain nombre de questions. L’acception même du terme ONP varie selon les pays. Les plus « libéraux » l’interprètent comme une véritable ouverture des réseaux publics aux fournisseurs de services, à la manière de l’ONA nord-américain (Open Network Architecture), tandis que d’autres la considèrent comme une simple normalisation des interfaces existantes. Néanmoins, la CEPT, à la fin de 1987, a décidé, selon les exigences exprimées par la Commission des Communautés européennes dans le livre vert, de créer une nouvelle structure capable de donner un essor rapide à la production des normes européennes dans le domaine des télécommunications, indispensable pour l’ouverture souhaitée des réseaux23. C’est ainsi qu’a été créé le European Telecommunications Standards Institute (ETSI), l’Institut européen des normes de télécommunications. ETSI est une organisation européenne de normalisation, dans le domaine mentionné dans ses statuts24. Les normes approuvées par ETSI seront appelées ETS (European Telecommunications Standards : Normes européennes de télécommunications), avec le statut de normes volontaires25. La procédure se fait dans la plus grande transparence, une enquête publique suivie d’un vote national pondéré étant prévus. L’enquête publique est menée par les organismes de normalisation reconnus nationalement qui sont exclusivement responsables de la position nationale pour le vote puis du maintien ou de la transposition des ETS dans les pays concernés26.
B. De la DGT à France Télécom
33La promulgation du livre vert donnait aux différents opérateurs européens un calendrier précis pour préparer la libéralisation du marché des télécommunications. Simultanément, le succès même du CNET au cours des années 1960-1970 avait changé radicalement les données du problème pour la France. L’industrie française du matériel de télécommunications faisant partie des leaders internationaux, l’ouverture des marchés devait être considérée comme une opportunité et non comme un danger. Dans le cadre du grand marché européen, les politiques de recherche strictement hexagonales n’étaient plus possibles. De même, le soutien à une entreprise comme Alcatel, devenue une multinationale aux multiples filiales, ne pouvait plus s’inscrire dans les cadres du passé. En conséquence, l’investissement du CNET dans les grands programmes européens s’intensifia27. Simultanément, la mission du Centre se focalisa plus précisément sur les réseaux et services de télécommunications28. L’industrie nationale, très largement internationalisée, pouvait dorénavant compter sur ses propres structures pour les recherches concernant le matériel.
34Devenue France Télécom, l’ancienne DGT s’était adaptée à ces changements et se préparait à d’autres évolutions qui devaient découler des principes de la déréglementation. La loi du 2 juillet 1990 lui donnait statut d’exploitant public autonome à compter du 1er janvier 199129. Son activité était désormais inscrite dans le cadre d’un contrat de plan pluriannuel passé entre l’État et l’exploitant public30. Dans ce cadre institutionnel nouveau, le CNET demeurait partie intégrante de France Télécom en tant que centre de recherche de l’exploitant public, son activité couvrant l’ensemble des techniques de communication et intégrant des retombées d’intérêt général vis-à-vis des autres départements ministériels, de la communauté scientifique et du monde industriel31.
35La loi décidant la transformation de France Télécom en société anonyme sera votée le 20 juin 1996. La loi du 26 juillet fixera les modalités de l’ouverture du capital de France Télécom : L’État restera majoritaire, et 10 % du capital sera proposé spécifiquement au personnel. Après quelques péripéties politiques cette ouverture sera effective et fera de France Télécom un opérateur en mesure d’intervenir sur l’ensemble des marchés mondiaux.
Conclusion
36La réaction désordonnée des pays européens face à la nouvelle donne imposée au début des années 1980 par la déréglementation nord-américaine n’a pas permis d’orienter l’industrie européenne des télécommunications vers des regroupements dynamiques. Ce constat doit cependant être nuancé pour les opérateurs de réseaux et les manufacturiers d’équipements.
37Pour ces derniers l’évolution a été indéniablement lente. Il est a posteriori facile de critiquer la politique de « résistance » adoptée par les monopoles publics. Celle-ci a en fait permis de conserver en Europe des opérateurs dits « historiques » suffisamment puissants pour stabiliser les différents marchés et assurer une transition plus douce vers la concurrence telle qu’elle s’est établie au début du XXIe siècle. Toute ouverture brutale, laissant le champ libre à AT & T, seule entreprise ayant au début des années 1980 la maîtrise des trois domaines clés (recherche, réseau, fabrication d’équipements), aurait inéluctablement provoqué un recul difficilement maîtrisable des opérateurs européens.
38Pour les manufacturiers les instances européennes ont été incapables de favoriser l’émergence d’acteurs puissants. Une fois de plus en matière d’industrie, la construction européenne n’est devenue une réalité qu’en raison d’une initiative nationale. C’est uniquement l’action menée par Alcatel qui a en effet permis de construire un acteur majeur sur le marché des équipements de télécommunications.
39La portée de cette initiative a été par la suite atténuée par deux phénomènes.
40L’un s’est déployé à l’échelle nationale. Les décisions destinées à réintroduire la concurrence sur le marché français des équipements de télécommunications ont privilégié des options françaises qui ne firent pas preuve, d’une grande efficacité. En renonçant au volet « AT & T » des accords conclu par Alcatel, le gouvernement, s’est sans doute privé d’une option qui aurait sans aucun doute, dynamisé le marché français et stimulé Alcatel.
41L’autre est plus fondamental et se situe à l’échelle mondiale : la montée des technologies IP a donné à de nouveaux acteurs (comme Cisco, Microsoft, Intel, etc.) des positions extrêmement fortes et réduit la place des entreprises dominantes des années 1980 comme AT & T, IBM ou Alcatel.
42Cette dernière évolution démontre que tout autant qu’un manque de politique industrielle européenne il a manqué une véritable politique de recherche européenne pour répondre aux défis multiples de la numérisation et de la convergence informatique-télécoms. Sur ces deux points l’incapacité à faire émerger de vrais projets franco-allemands a été particulièrement pénalisante pour l’Europe de l’industrie.
Notes de bas de page
1 Bancel-Charensol L., La déréglementation des télécommunications dans les grands pays industriels, Paris, Economica-ENSPTT, 1996.
2 L’instauration de ces monopoles d’État a été progressive, de nombreux pays dont la France ayant commencé par un système de concession des réseaux à des entreprises privées. Néanmoins, hormis le cas de la Suède qui viendra à une application stricte du monopole d’État plus tardivement que les autres pays, la totalité des pays européens ont adopté ce système dès l’entre-deux-guerres. Voir notamment Libois Louis-Joseph, Genèse et croissance des télécommunications, Paris, CNET-ENST, 1983.
3 Avec des rapports de force différents selon les pays et le dynamisme de l’industrie. L’administration allemande devait par exemple tenir compte de la puissance d’une entreprise comme Siemens, le rapport de force penchant plutôt pour le manufacturier alors qu’en France l’Administration menait globalement le jeu.
4 D’autres formules peuvent être utilisées, comme la concurrence statistique : les performances d’une firme en position de monopole local sont alors comparées à celles de firmes semblables, opérant dans des zones limitrophes. Citons enfin la concurrence simulée qui consiste à reproduire au sein d’une organisation hiérarchique des phénomènes concurrentiels. Ainsi, par exemple, plusieurs équipes ou plusieurs filiales, développant un même projet peuvent être mises en compétition, la sanction étant apportée par le marché externe. D’après Curien N. et Gensollen M., L’économie des télécommunications, ouverture et réglementation, Paris, Economica, 1992.
5 Jussawalla, M., Global Telecommunications Policies: the Challenge of Change, Westport, CT, 1993.
6 Irwin M., The Telecommunications Industry; Integration vs Competition, Preager, New York, 1975, pp. 47-61.
7 Temin P., The Fall of the Bell System, Cambridge, CUP, 1987.
8 Le premier directeur général, B. Carsberg, fut nommé pour trois ans par le gouvernement. Newman K., The Selling of British Telecom, New York, 1986, 182 p., p. 18.
9 Giraud A., « La dérégulation contre les nations », in du Castel F., Chambat P. et Musso P. (dir.), L’ordre communicationnel. Les nouvelles technologies de la communication : enjeux et stratégies, Paris, 1989, pp. 265-280, p. 274.
10 Voir Brousseau E., Petit P. et Phan D., Mutations des télécommunications, des industries et des marchés, Paris, Economica-ENSPTT, 1996.
11 Blatherwick D., The international Politics of Telecommunications, British Crown, 1987.
12 Un point de vue nord-américain sur ces questions : Dowler R. et Brown A., « The Impact of european Collaborative and national Research and Development Programs », in Gibson D. (éd.), Technology Companies and Global Markets: Programs, Policies and Strategies to accelerate Innovation and Entrepreneurship, Rowman and Littlefield, Savage Maryland, 1991, pp. 313-343.
13 Commissariat général au Plan, Rapport du comité électronique, informatique et industrie des télécommunications. VIe Plan, Paris, La Documentation française, 1971.
14 Les Échos du 26 mai 1982.
15 Les Échos du 22 juin 1982.
16 Les Échos du 22 juin 1982.
17 Le Nouvel Économiste, 20 décembre 1982.
18 Le Matin, 9 septembre 1983.
19 Ces stratégies sont très discutées. Voir la thèse d’Yves Bouvier sur les relations entre la Compagnie générale d’électricité et l’État, soutenue en Sorbonne en 2005.
20 Georges Pébereau en est directement informé : « Au cours d’une rencontre avec Étienne Davignon, le 21 novembre j’ai été informé de rumeurs concernant un éventuel éclatement d’ITT. »
21 Une large partie des informations repose sur les interviews et les archives personnelles de Georges Pébereau et de ses collaborateurs. Pour l’ensemble des références et une analyse plus précise des processus voir Pébereau G., Griset P., L’industrie, une passion française, Paris, PUF, 2005, 269 p.
22 D’après Ungerer H. et Costello N., Télécommunications en Europe, CEE, Bruxelles, 1988.
23 Réunion des directeurs généraux des Postes et Télécommunications des pays de la CEPT, le 7 septembre 1987. À l’issue des travaux préparatoires d’un groupe de travail ad hoc, ces directeurs généraux approuvèrent, le 15 janvier 1988, un mémorandum d’accord (MOU : Mémorandum of Understanding) pour la création d’ETSI. Le même jour, il a été décidé que le siège de l’Institut serait établi à Sophia-Antipolis (près de Nice). Sur la base du mémorandum d’accord, les statuts et le projet de règlement d’ETSI ont été préparés.
24 Sa position parmi les organismes européens de normalisation et, par conséquent, le statut des documents produits par ETSI sont complètement établis.
25 Dans certains cas, les normes approuvées sont appelées I-ETS (Interim European Telecommunications Standards : normes européennes intérimaires de télécommunications) : cette désignation est adoptée chaque fois qu’une norme représente une solution provisoire avant la production d’une norme plus avancée ou lorsqu’une norme n’est pas tout à fait au point et requiert une période d’essai.
26 Les coûts du programme de travail chiffré adopté sont couverts par tous les membres à un niveau de contribution sélectionné librement par chaque membre sur la base définie et approuvée d’une liste de paramètres. Le niveau maximum prévoit quinze unités de contribution et le niveau minimum un tiers d’unité de contribution.
27 Tout particulièrement en matière de composants où ce mouvement, en raison des investissements nécessaires, s’était amorcé dès le début des années 1990 (montée en puissance du programme JESSI). À l’automne 1990, un an après son démarrage, le programme de recherche JESSI comptait plus de cinquante projets répartis dans plusieurs dizaines d’entreprises européennes. En 1991, l’investissement travail représentait 3 000 hommes/an). « Super puces : l’Europe joue gagnant », Eureka News, janvier 1991, pp. 3-9.
28 Conruyt P., « Réseaux à valeur ajoutée : une demande évolutive », Revue française des télécommunications, nº 65, avril 1988, pp. 70-77.
29 « ABC du nouveau statut de France Télécom », Revue française des télécommunications, nº 78, juillet 1991.
30 « Le contrat de plan de France Télécom », Revue française des télécommunications, nº 79, décembre 1991, pp. 21-23.
31 Feynerol M., « Les grands axes de la recherche », Revue française des télécommunications, nº 79, décembre 1991, pp. 30-45.
Auteur
Professeur à l’Université de Paris IV-Sorbonne. Historien des entreprises, il est particulièrement spécialiste de l’histoire économique et technique de l’information. Il dirige le Centre de recherche en histoire de l’innovation et collabore régulièrement aux travaux de la Society for the History of Technology (SHOT). Il est également vice-président de l’Association pour l’histoire de l’informatique et des télécommunications et administrateur du Comité d’histoire de la poste. Il a publié notamment : Les révolutions de la communication XIXe-XXe siècles ; avec G. Pebereau L’industrie une passion française, Presses Universitaires de France, 2005 ; « Aspects financiers du développement des télécommunications en France dans les années cinquante », La direction du Budget face aux grandes mutations des années cinquante, acteur… ou témoin ? Actes de la journée d’études tenue à Bercy le 10 janvier 1997, Comité pour l’histoire économique et financière de la France, 1998.
Le texte seul est utilisable sous licence Licence OpenEdition Books. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.
Le grand état-major financier : les inspecteurs des Finances, 1918-1946
Les hommes, le métier, les carrières
Nathalie Carré de Malberg
2011
Le choix de la CEE par la France
L’Europe économique en débat de Mendès France à de Gaulle (1955-1969)
Laurent Warlouzet
2011
L’historien, l’archiviste et le magnétophone
De la constitution de la source orale à son exploitation
Florence Descamps
2005
Les routes de l’argent
Réseaux et flux financiers de Paris à Hambourg (1789-1815)
Matthieu de Oliveira
2011
La France et l'Égypte de 1882 à 1914
Intérêts économiques et implications politiques
Samir Saul
1997
Les ministres des Finances de la Révolution française au Second Empire (I)
Dictionnaire biographique 1790-1814
Guy Antonetti
2007
Les ministres des Finances de la Révolution française au Second Empire (II)
Dictionnaire biographique 1814-1848
Guy Antonetti
2007
Les ingénieurs des Mines : cultures, pouvoirs, pratiques
Colloque des 7 et 8 octobre 2010
Anne-Françoise Garçon et Bruno Belhoste (dir.)
2012
Wilfrid Baumgartner
Un grand commis des finances à la croisée des pouvoirs (1902-1978)
Olivier Feiertag
2006