Le marché intérieur : une étape cruciale mais inachevée de l’intégration économique européenne
p. 53-85
Texte intégral
Introduction
1Plus de dix ans se sont écoulés depuis l’échéance de 1992 qui devait marquer l’aboutissement de la réalisation du marché intérieur européen. Pourtant, aujourd’hui encore, le marché intérieur est au centre de nombreux débats, notamment sur les questions de la libre circulation des services et de l’harmonisation fiscale. Même s’il subsiste des obstacles aux activités transfrontalières en Europe, il n’en reste pas moins que la réalisation du marché intérieur constitue une étape cruciale dans le processus d’intégration économique européenne et qu’il a permis de réaliser des gains substantiels en termes d’efficacité, d’emplois et de croissance.
2L’Union Économique et Monétaire (UEM), en dotant ce grand marché d’une monnaie unique, a renforcé ces gains d’efficacité. Le Marché unique et la monnaie unique constituent en effet des éléments complémentaires d’une stratégie qui permet à l’Europe de mieux faire face aux défis de la globalisation. Mais, malgré la réalisation du marché intérieur et de l’UEM, les performances de l’Union européenne en termes de croissance, de taux d’emploi et de productivité, restent insatisfaisantes et c’est une des raisons pour lesquelles les chefs d’État ont, en mars 2000, lancé la stratégie de Lisbonne. La poursuite de la réalisation du marché intérieur s’intègre donc aujourd’hui dans la perspective plus large de cette stratégie dont il constitue un des piliers.
3Cette contribution s’inscrit tout d’abord dans une perspective historique et rappelle quelles ont été les principales raisons politiques et économiques qui ont conduit les chefs d’État européens à vouloir réaliser un marché intérieur européen. Ensuite, il décrit les moyens mis en œuvre pour asseoir la crédibilité d’un tel objectif, à savoir l’Acte unique et le Livre blanc. Une troisième section expose les effets positifs attendus de la réalisation du marché intérieur et ces attentes sont confrontées à certains des effets observés. Une dernière section montre en quoi le potentiel du marché intérieur n’est pas pleinement exploité et comment le perfectionnement du marché intérieur s’inscrit aujourd’hui dans la stratégie de Lisbonne. Finalement, nous concluons en indiquant quelles sont les nouvelles pistes à explorer pour améliorer le fonctionnement du marché intérieur.
I. Raisons politiques et économiques ayant conduit à la réalisation du marché intérieur européen1
4Le traité de Rome signé le 15 mars 1957 a précisé le contenu du Marché commun et a mis en place des institutions dont le but était notamment de définir les règles du jeu de ce Marché commun et de veiller à leur application. L’élimination des droits de douane et des restrictions quantitatives entre les six pays signataires du traité de Rome s’est faite de manière progressive et sans difficulté entre janvier 1958 et juillet 1968. Mais la formation de l’union douanière (voir encadré 1, pour une définition des différentes formes d’intégration économique) a coïncidé avec une période de prospérité économique sans précédent. Ainsi, durant la période appelée les Trente Glorieuses (1950-1973), le taux de chômage avoisinait les 2,5 % en Europe. Cette prospérité économique a facilité la mise en place de l’union douanière, notamment en réduisant les coûts d’ajustement, sous forme de restructurations, liés à l’ouverture des marchés.
Encadré 1. Typologie des différentes formes d’intégration économique (adaptée de B. Balassa (1961)1
Zone de libre-échange.
À l’intérieur de la zone de libre-échange, les échanges de marchandises sont libéralisés entre les agents économiques : abolition des droits de douane et des limitations quantitatives aux échanges. Mais chaque pays conserve sa propre politique commerciale, notamment en matière de fixation des droits de douane, vis-à-vis des pays non membres de la zone de libre-échange.
Union douanière.
Outre le libre-échange entre les agents économiques, l’union douanière se caractérise par l’adoption d’une politique commerciale commune, c’est-à-dire la fixation d’un tarif extérieur commun par rapport au reste du monde.
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Marché commun ou intérieur.
Il existe deux différences principales entre une union douanière et un marché commun ou intérieur. D’une part, le marché commun consiste en une ouverture de l’ensemble des marchés (biens, services, personnes et capitaux) et non pas du seul marché des biens. D’autre part, dans le marché commun, sont supprimées non seulement les barrières tarifaires et les restrictions quantitatives aux échanges mais aussi les autres types de barrières non tarifaires telles que l’existence de différentes réglementations ou le cloisonnement des marchés publics nationaux.
Union économique.
L’union économique allie la suppression des obstacles à la libre circulation des biens, des services et des facteurs de production et l’atteinte d’un certain niveau d’harmonisation et/ou de coordination de politiques publiques nationales afin d’abolir toute discrimination attribuable aux disparités entre ces politiques. Il s’agit donc d’un marché commun dans lequel sont harmonisées ou coordonnées certaines politiques économiques.
Le rapport Delors2 définit l’union économique par les quatre éléments
fondamentaux suivants :
– Marché unique à l’intérieur duquel les personnes, les biens, les services et les capitaux peuvent circuler librement ;
– Politique de concurrence et d’autres mesures visant à renforcer les
mécanismes du marché ;
– Politiques communes visant à l’ajustement structurel et au développement
régional ;
– Coordination des politiques macroéconomiques.
Aujourd’hui, on ajouterait que l’union économique implique également la coordination de politiques structurelles telles que les politiques en matière de réglementation, de recherche, d’innovation…
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Union monétaire.
On peut définir une union monétaire par les quatre éléments suivants :
– Garantie d’une convertibilité totale et irréversible des monnaies entre elles ;
– Libération complète des mouvements de capitaux et intégration complète des marchés financiers ;
– Élimination des marges de fluctuation, fixation irrévocable des parités et politique de change commune ;
– Politique monétaire commune.
Union économique et monétaire.
L’union économique et monétaire représente la phase ultime de l’intégration économique. Elle combine les caractéristiques d’une union économique et d’une union monétaire et comporte outre la mise en œuvre de politiques communes, la création d’une zone de parités fixes entre les partenaires et, éventuellement, la création d’une monnaie commune.
On peut donc définir une union économique et monétaire comme :
– Un marché intérieur (libre circulation des biens, services, capitaux et personnes) ;
– Fixation irrévocable des parités et politique de change commune ;
– Une politique monétaire commune ;
– Autres politiques communes (politique commerciale, de concurrence…) ;
– Coordination des politiques macroéconomiques et structurelles.
5Mais un marché commun ne vise pas seulement à assurer une libre circulation des biens mais aussi des services, des travailleurs et des capitaux. Le processus de libre circulation des services et des facteurs de production a été beaucoup plus lent que celui des biens. Ainsi, la libre circulation des capitaux n’a connu un pas décisif que vers la fin des années 1980. Celle des services vient d’être adoptée. Finalement, le processus de libre circulation des travailleurs a également progressé lentement, notamment en raison des difficultés dans l’harmonisation des conditions d’accès à l’emploi.
6Cette transformation plus lente de l’union douanière en un véritable marché commun peut s’expliquer par les crises politique, monétaire et économique qu’a connues l’Europe entre 1970 et 1985. Dans cette optique, deux types de raisons contribuent à expliquer pourquoi le projet de créer un marché intérieur a émergé au milieu des années 1980. D’une part, le marché intérieur a été vu comme un moyen de sortir d’une période d’europessimisme. D’autre part, le marché intérieur devait contribuer à améliorer les performances économiques de l’Europe.
A. Le marché intérieur, un remède contre l’europessimisme des années 1970‑1985
7Dès la fin des années 1960, l’Europe est entrée dans une période d’europessimisme caractérisée par des crises politique, monétaire et économique qui ont ralenti la progression du processus d’intégration.
Crise politique
8Les performances économiques spectaculairement bonnes dans les années 1950 et 1960, combinées avec le succès de l’intégration économique européenne, permirent de restaurer la confiance des Européens dans leurs gouvernements. Il en résulta que certaines nations souhaitèrent revenir à plus de souveraineté nationale3. Ces idées se développèrent au fur et à mesure qu’approchait la fin de la période de transition prévue dans le traité de Rome qui devait conduire à l’adoption de la règle à la majorité qualifiée pour les décisions prises par le Conseil des ministres. Cette règle impliquait la perte du droit de veto de la part des États membres. La France décida de s’opposer à cet abandon de souveraineté et pratiqua la politique dite de la chaise vide.
9Le compromis de Luxembourg a permis de sortir de cette crise politique. Selon ce compromis, « lorsque des intérêts très importants d’un ou plusieurs partenaires sont en jeu, les membres du Conseil des ministres doivent parvenir à un accord unanime ». Cette décision, en faisant de l’unanimité la règle usuelle pour les prises de décision, a constitué un frein à la construction européenne. En effet, l’adhésion de nouveaux États membres4 rendait plus difficile de prendre des décisions à l’unanimité.
Crise monétaire
10À la fin des années 1960, l’Europe a connu une crise monétaire à la suite de l’effondrement du Système de Bretton Woods et donc du système de taux de change fixes au niveau mondial. La stabilité des taux de change était considérée comme un facteur clé de la croissance du commerce et des investissements internationaux et de la prospérité qui y était liée. Les chefs d’État européens essayèrent donc de restaurer la stabilité des taux de change en Europe et pour ce faire, ils adoptèrent le rapport Werner en 1971. Celui-ci prévoyait la réalisation d’une union monétaire avant la fin de la décennie.
11Cet objectif n’a pas été atteint parce que le rapport a sous-estimé la nécessité de rapprocher les politiques macroéconomiques des États membres et que le contexte économique était très mauvais (crise pétrolière et stagflation), conduisant à une série de crises de change. Néanmoins, le Système Monétaire Européen (SME) est entré en vigueur en 1979. L’objectif à long terme du SME était de permettre l’instauration d’une monnaie unique et à court terme la création d’une zone de parités stables. Le SME a constitué une étape supplémentaire d’intégration économique. Il ne faisait cependant pas partie intégrante du traité et les États membres n’étaient pas obligés d’y adhérer, concrétisant l’idée d’une Europe à la carte où à deux vitesses.
Crise économique
12Suite aux chocs pétroliers des années 1970, le climat économique était particulièrement déprimé dans l’Union européenne. En raison de cette crise économique, on vit réapparaître, malgré la disparition des obstacles tarifaires sur les marchandises, d’autres types d’entraves aux échanges (formes de protectionnisme) telles que des normes techniques ou le cloisonnement des marchés publics.
Le marché intérieur, un projet mobilisateur pour relancer l’intégration européenne
13Jacques Delors, nommé président de la Commission européenne en janvier 1985, décida de relancer le processus d’intégration européenne et la création du marché intérieur pouvait constituer un projet mobilisateur à cet égard5. En effet, la réalisation d’un marché intérieur était en ligne avec la philosophie de déréglementation et de libéralisation alors en vogue aux États-Unis et au Royaume-Uni avec les présidences de R. Reagan et de M. Thatcher. Le Royaume-Uni était donc très favorable à cet objectif. La France et l’Allemagne soutenaient également le projet. La France, en particulier, ayant souffert de son épisode de dévaluation isolée en 1982, était prête à davantage s’intégrer au sein de l’Europe. Il existait donc une constellation de forces en présence qui poussaient à davantage d’intégration économique européenne afin de sortir de la période d’europessimisme.
B. Le marché intérieur, un moyen d’améliorer les performances économiques européennes
14Le marché intérieur fut également considéré comme un moyen d’améliorer les performances économiques européennes, notamment en restaurant la confiance des chefs d’entreprise et en améliorant la compétitivité des entreprises européennes.
Restaurer la confiance des chefs d’entreprises
15Au milieu des années 1980, le climat économique européen était particulièrement déprimé. La croissance était faible (1,5 % pour l’UE 15 en moyenne sur la période 1980-1985 contre 2,8 % aux États-Unis et 2,3 % au Japon), le taux de chômage élevé (9,4 %, contre 7,2 % aux États-Unis et 2,6 % au Japon en 1985) ainsi que le taux d’inflation (près de 9 % pour l’UE 15 en moyenne sur la période 1980-1985). Dans ce climat morose, la confiance des chefs d’entreprise était mauvaise et ceux-ci étaient peu enclins à accroître leurs investissements. Le marché intérieur fut ainsi conçu comme un projet destiné à restaurer la confiance du milieu des entreprises6.
Améliorer la compétitivité des entreprises européennes
16Au milieu des années 1980, les entreprises européennes étaient moins compétitives que leurs concurrentes américaines et japonaises, en particulier dans des secteurs à contenu technologique élevé. En effet, l’industrie européenne était moins spécialisée dans des secteurs à forte croissance de la demande que les États-Unis et le Japon : ces secteurs représentaient 22 % de la valeur ajoutée de l’industrie manufacturière en 1985 contre 27 % aux États-Unis (voir graphique 1). Dans ces secteurs les plus dynamiques, l’écart de productivité était également plus marqué par rapport aux États-Unis et au Japon. En conséquence, l’Europe perdait des parts de marché au niveau mondial dans des secteurs tels que le matériel électrique, le matériel de transport, les équipements de télécommunications, la chimie7…
17Cette moindre compétitivité des entreprises européennes s’expliquait notamment par les barrières non tarifaires qui fragmentaient le marché intérieur européen. Cette fragmentation avait pour effet d’empêcher les entreprises européennes de réaliser pleinement des économies d’échelle ou de gamme, de limiter les pressions de la concurrence et les gains d’efficacité qui pouvaient en résulter et de réduire les incitations à l’innovation.
18Un des objectifs de la réalisation du marché intérieur était d’améliorer la compétitivité des entreprises européennes en leur permettant de s’appuyer sur un grand marché intérieur. Les gains attendus de ce grand marché étaient une baisse des coûts grâce à une meilleure exploitation des économies d’échelle, une amélioration de l’efficacité des entreprises et des baisses de prix, des changements dans la structure industrielle des États membres afin de refléter mieux leurs avantages comparatifs et des vagues d’innovations en produits et en processus (voir section III).
II. Moyens mis en œuvre pour réaliser le marché intérieur
19La réalisation du marché intérieur était un objectif très ambitieux et pour asseoir la crédibilité de cet objectif, il convenait de se donner les moyens de le réaliser. À cet égard, deux éléments ont joué un rôle clé : l’Acte unique et le Livre blanc.
A. L’Acte unique
20L’Acte unique de 1986-1987 s’inscrivait dans le cadre d’une réactualisation du traité de Rome de 1957. Un des objectifs essentiels de l’Acte unique était la réalisation, au 1er janvier 1993, du marché intérieur dans lequel les marchandises, les services, les hommes et les capitaux circuleraient librement, ce qui supposait l’élimination de nombreuses entraves aux échanges. La fixation d’une échéance dans ce traité a notamment contribué à maintenir le dynamisme du processus.
21L’Acte unique s’accompagnait de deux nouveautés institutionnelles importantes : l’extension du vote à la majorité qualifiée et le principe de reconnaissance mutuelle. Le passage de la règle de l’unanimité à la règle de la majorité qualifiée8 dans un certain nombre de domaines a permis d’accélérer sensiblement le processus de prise de décision. Ainsi, il a fallu dix-huit ans pour arriver à un accord en matière de liberté d’établissement des architectes mais moins de trois ans pour mettre en place un système de reconnaissance mutuelle des diplômes universitaires. Par contre, dans les domaines où la règle de l’unanimité reste d’application (telles que la fiscalité, les dispositions relatives aux droits et intérêts des travailleurs), les progrès sont beaucoup plus lents.
22Le principe de reconnaissance mutuelle a permis d’éviter d’harmoniser les réglementations nationales en un ensemble de règles uniques, ce qui est coûteux et prend du temps. Il repose sur l’idée que tout produit qui peut être commercialisé dans un État membre en fonction des règles en vigueur dans cet État membre peut avoir accès aux marchés des autres États membres sans devoir subir d’adaptation, sauf si l’État membre en question peut démontrer que la santé ou la sécurité de ses consommateurs peuvent en souffrir.
B. Le Livre blanc
23Le Livre blanc a été publié par la Commission en juin 1985. Il décrivait l’ensemble du programme à mettre en œuvre pour réaliser le marché intérieur, soit un calendrier comprenant environ trois cents mesures à prendre d’ici la fin de 1992. Ces mesures visaient à l’élimination des différentes barrières faisant obstacle à la libre circulation des biens, services, personnes et capitaux. Ces barrières étaient classées en trois catégories : les barrières physiques, techniques et fiscales (voir encadré 2).
Encadré 2. Les barrières physiques, techniques et fiscales
Une description complète des différents types de barrières fragmentant le marché intérieur et de leurs effets peut être trouvée dans l’étude réalisée par la Commission européenne en 1988.
Les barrières physiques concernent l’ensemble des formalités aux frontières qui entraînaient des coûts administratifs mais aussi des coûts de transport et de stockage pour les entreprises, en raison des délais d’attente aux frontières. À cet égard, une étude avait montré qu’un camion qui devait effectuer un trajet de 1 200 km à travers l’Europe mettait 36 heures s’il ne devait traverser aucune frontière mais 58 heures s’il devait passer deux frontières (Commission européenne (1993).
Les barrières techniques regroupent le cloisonnement des marchés publics, les différences de normes et réglementations et les obstacles aux prestations transfrontalières de services. Le cloisonnement des marchés publics consiste à accorder une préférence à des fournisseurs nationaux pour l’octroi des marchés publics, même si des fournisseurs étrangers sont plus compétitifs. Les différences de normes et de réglementation et les obstacles à la libre prestation des services (services financiers, télécommunications, transport, énergie…) sont bien souvent un moyen de protéger le marché national de la concurrence étrangère en forçant les entreprises à adapter leur production aux normes et réglementations en vigueur sur les différents marchés nationaux.
Finalement, les barrières fiscales comprennent l’ensemble des obstacles associés au manque d’harmonisation fiscale. En matière de TVA, l’application du principe de destination qui veut qu’un bien soit taxé dans le pays de consommation et non dans le pays où il est acheté a pour effet de compliquer les formalités pour les entreprises qui exportent (détaxation du bien à l’exportation et taxation dans le pays de destination). En matière de taxation des entreprises, les différences dans les systèmes et les taux de taxation nationaux constituent des charges pour les entreprises qui veulent opérer dans plusieurs États membres et peuvent conduire à des distorsions dans les décisions de localisation de leurs activités.
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Globalement, on peut considérer que les barrières physiques ont été largement supprimées (il subsiste des contrôles pour des raisons sanitaires, par exemple). Par contre, les barrières techniques et fiscales continuent à peser sur les échanges dans le marché intérieur. Près de 80 % des participants à une récente enquête (RIIA and Accenture (2004), « Unfinished Business : Making Europe’s Single Market a Reality ») pensent que les difficultés réglementaires constituent le principal problème pour faire des affaires dans le marché intérieur.
24L’avantage du Livre blanc était qu’il présentait une liste complète de mesures à prendre. Ainsi, il n’y avait plus d’ambiguïté sur le contenu du programme du marché intérieur. En outre, il s’agissait d’un paquet global et les États membres devaient accepter l’ensemble du paquet. Finalement, le Livre blanc a permis de constituer une référence à partir de laquelle on pouvait régulièrement mesurer les progrès réalisés. Aujourd’hui encore, la pratique est restée de publier deux fois par an un tableau d’affichage permettant de comparer le degré de transposition des directives du marché intérieur entre les États membres ainsi que les procédures d’infractions adressées à ceux qui n’appliquent pas les règles correctement9.
C. L’après Livre blanc
25Après l’échéance de fin 1992, la Commission européenne a produit plusieurs documents définissant de nouveaux programmes pour parachever le marché intérieur. Parmi ceux-ci, on peut citer le plan d’action de juin 1997, la nouvelle stratégie pour le marché intérieur de 1999 et le plan d’action en dix points définissant les priorités du marché intérieur pour la période 2003-2006 (voir encadré 3). Le dernier plan d’action est extrêmement vaste et couvre des questions dont certaines débordent du cadre du marché intérieur stricto sensu pour toucher des thématiques telles que le défi démographique et l’environnement réglementaire. Cette nouvelle stratégie a pour but de mieux tenir compte de l’objectif de Lisbonne et de permettre de faire face à l’élargissement et au vieillissement de la population. La question peut néanmoins se poser s’il ne faudrait pas recentrer la stratégie sur un nombre plus limité de priorités permettant de rencontrer les problèmes de fonctionnement du marché intérieur. Ce point sera abordé dans la section IV.
Encadré 3. Stratégies pour le marché intérieur après la publication du Livre blanc
Plan d’action de juin 1997.
Ce plan d’action visait à supprimer les obstacles subsistant afin d’améliorer le fonctionnement du marché intérieur. Il se fixait les quatre principaux objectifs suivants :
– Rendre la législation plus efficace (par exemple dans le domaine des marchés publics) ;
– Supprimer les principales distorsions qui affectent le marché (par exemple grâce à un contrôle plus rigoureux des aides d’État ou en éliminant les distorsions liées à la fiscalité) ;
– Supprimer les obstacles sectoriels liés à l’intégration des marchés (par exemple dans les secteurs des services) ;
– Créer un marché unique au service de tous les citoyens.
En vue d’enregistrer les résultats obtenus, la Commission a créé une série d’instruments, dont notamment le « tableau d’affichage du marché unique ».
Nouvelle stratégie pour le marché intérieur de 1999.
En 1999, la Commission a présenté un cadre d’action exposant les objectifs stratégiques du marché intérieur de l’Union européenne pour les cinq prochaines années. Après la mise en place de la plupart des dispositions réglementaires, ces quatre objectifs stratégiques mettaient l’accent sur des questions plus économiques, à savoir :
– Améliorer la qualité de vie des citoyens ;
– Accroître l’efficacité des marchés communautaires des produits et des capitaux ;
– Améliorer l’environnement des entreprises ;
– Exploiter les acquis du marché intérieur dans un monde en pleine mutation.
Les moyens à mettre en œuvre pour atteindre ces objectifs stratégiques étaient précisés et adaptés chaque année pour tenir compte en particulier des réactions des marchés, des citoyens et des entreprises.
Stratégie pour le marché intérieur : priorités 2003-2006.
En 2003, la Commission européenne a publié un nouveau plan d’action en dix points définissant les priorités pour améliorer le fonctionnement du marché intérieur au cours de la période 2003-2006. Cette nouvelle stratégie a été mise en place pour tenir compte de l’objectif de Lisbonne, des défis de l’élargissement et du vieillissement de la population. Les dix priorités sont :
– Éliminer les obstacles subsistant aux échanges de biens (par exemple en améliorant la mise en œuvre du principe de reconnaissance mutuelle) ;
– Intégrer les marchés des services ;
– Assurer des services de qualité dans les industries de réseau (télécommunications, énergie, transport) ;
– Réduire les obstacles fiscaux ;
– Assurer des marchés publics plus ouverts ;
– Améliorer le cadre opérationnel pour les entreprises (par exemple en adoptant un brevet communautaire) ;
– Relever le défi démographique (par exemple en améliorant la portabilité des droits à la pension) ;
– Simplifier l’environnement réglementaire ;
– Mieux appliquer la réglementation ;
– Mieux informer les citoyens et les entreprises.
Dans une Union comptant vingt-sept pays, les États membres seront davantage appelés à assurer le fonctionnement au quotidien du marché intérieur. La stratégie propose de renforcer la mise en œuvre par une coopération plus étroite entre la Commission et les États membres en vue de rechercher des solutions rapides et efficaces et éviter le recours systématique aux procédures d’infraction
(http://europa.eu.int/comm/internal_market/en/update/strategy/index.htm, consulté en 2007).
III. Principaux effets attendus et observés de la réalisation du marché intérieur
26Le processus d’intégration économique européenne a amené les économistes à s’interroger sur les effets à en attendre. Les premiers travaux ont porté sur les effets de la création d’une union douanière, ensuite, sur les effets du marché intérieur10 et de l’UEM11 respectivement dans les années 1980 et 1990. Les travaux les plus récents12 analysent les effets de l’intégration des marchés des produits (biens et services) et ont tendance à traiter distinctement la question de l’intégration des marchés des capitaux et des marchés du travail. Ces études analysent conjointement les effets du marché intérieur et de l’introduction de l’euro dans la mesure où les fluctuations des taux de change constituaient également un obstacle à l’intégration des marchés des produits.
27La réalisation du marché intérieur et l’introduction de l’euro ont pour effet le plus immédiat de réduire les coûts des activités transfrontalières en supprimant des barrières non tarifaires et en éliminant les coûts de transaction et l’instabilité associés aux fluctuations des taux de change.
A. Effets directs sur le commerce et les investissements étrangers
28L’intégration économique européenne a pour effet le plus immédiat de réduire le coût des échanges entre les pays qui s’intègrent. La théorie des unions douanières qui fournit le cadre conceptuel de l’analyse de ces effets prédit que cette réduction du coût des échanges a des effets de création d’échanges entre les pays qui s’intègrent mais peut aussi donner lieu à des effets de détournement d’échanges vis-à-vis du reste du monde. Les effets de détournement d’échange sont d’autant plus importants que le degré de protection de la nouvelle entité économique vis-à-vis du reste du monde est élevé. Dans le cas du marché intérieur, ces effets de détournement d’échanges ont été généralement peu importants, notamment parce que la suppression des barrières aux échanges a également profité aux exportateurs non européens. Ainsi, par exemple, les exportateurs non européens ont bénéficié de la suppression des frontières internes ou de l’application du principe de reconnaissance mutuelle.
29Une mesure de la création et du détournement d’échanges peut être fournie par l’évolution de la part de la demande domestique (ou consommation apparente c’est-à-dire production moins exportations plus importations) qui est satisfaite par la production domestique (production non exportée), des importations intracommunautaires et des importations extracommunautaires. Le tableau 1 montre qu’entre 1985 et 1995, il y a création d’échanges intracommunautaires dans l’industrie manufacturière au détriment des importations extracommunautaires : les importations intracommunautaires représentent 19 % de la demande domestique en 1985 et 21 % en 1995, et les importations extracommunautaires 13 % et 11 %. Mais ce mouvement de création d’échanges disparaît entre 1995 et 2002. Dans le secteur des services, on observe que la production domestique satisfait environ 95 % de la demande domestique et reste assez stable.
30La théorie économique est moins tranchée quant aux effets de l’intégration sur les investissements étrangers. D’une part, la création d’un grand marché et d’une zone de stabilité monétaire pourrait stimuler les investissements étrangers afin de permettre aux entreprises étrangères de bénéficier des potentialités offertes sur ce marché. De même, la crainte de la création d’une forteresse dans laquelle il sera plus difficile de pénétrer peut stimuler les investissements étrangers. Par exemple, c’est une des raisons pour laquelle les investisseurs japonais ont accru leurs investissements en Europe à la fin des années 1980. Mais, d’autre part, s’il existe une relation de substitution entre commerce et investissements étrangers et s’il devient moins coûteux de réaliser du commerce entre pays de l’Union européenne, on peut assister à une diminution des investissements étrangers, les investisseurs étrangers choisissant de réduire le nombre de leurs filiales implantées en Europe. Il semble que les entreprises européennes aient à la fois augmenté leur commerce et leurs investissements pour accéder plus rapidement à de nouveaux marchés. Ainsi, la part des flux d’investissements étrangers d’origine intracommunautaire dans les flux d’investissements étrangers totaux a plus que doublé entre 1985 et 2004 (voir aussi section III. B, la part des fusions internationales).
B. Effets microéconomiques
31La réduction des barrières non tarifaires à la suite de la mise en œuvre du programme du marché intérieur (PMI) et l’élimination des fluctuations des taux de change lors de l’entrée en vigueur de l’UEM ont pour effet direct de diminuer le coût des activités transfrontalières. Mais d’autres mécanismes sont mis en œuvre par la réduction de ces barrières et par la plus grande transparence des prix. Le tableau 3 ci-après donne une vue synthétique de ces effets en distinguant les effets à court terme résultant d’une augmentation des pressions de la concurrence et de l’accès à un marché élargi, les effets à moyen terme décrivant les réactions stratégiques des entreprises face à leur nouvel environnement et les conséquences à long terme sur la concentration industrielle, la localisation géographique des activités et la spécialisation industrielle.
32Ce tableau donne une vision simplifiée des mécanismes à l’œuvre. Ainsi, il n’est pas facile d’isoler les effets de la réduction de barrières non tarifaires aux échanges de ceux d’une plus grande transparence des prix. De même, les effets sur les conditions de concurrence, la conduite des entreprises et la structure de l’économie n’apparaissent pas nécessairement les uns à la suite des autres mais peuvent interagir de manière dynamique. Par exemple, les réactions stratégiques des entreprises peuvent avoir des effets de retour sur les conditions de concurrence si les entreprises multinationales réintroduisent des stratégies de segmentation du marché européen. Finalement, cette analyse ignore les effets dynamiques de l’intégration sur la recherche et l’innovation des entreprises.
Effets de l’augmentation de la concurrence et de l’accès à un marché élargi
33En réduisant les barrières non tarifaires aux échanges intracommunautaires et en éliminant les fluctuations des taux de change, le PMI et l’UEM facilitent l’entrée de nouvelles firmes et donc l’introduction de nouvelles marques sur chaque marché national. La concurrence accrue qui en résulte entraîne une diminution des marges pour les entreprises13. La transparence accrue des prix résultant de l’introduction de l’euro facilite les comparaisons de prix et donc les arbitrages entre pays que peuvent réaliser les consommateurs et les distributeurs. Elle va accroître la concurrence entre marques et rendre plus difficile la segmentation du marché européen par les multinationales. Cette transparence accrue des prix est encore renforcée par le développement du commerce électronique. À court terme, l’intégration des marchés des produits accroît les pressions de la concurrence et conduit donc à une amélioration dans l’allocation des ressources, les prix se rapprochant des coûts marginaux.
34Différents travaux ont fait apparaître que les marges prix-coûts se sont, en effet, réduites dans les secteurs les plus concernés par le marché intérieur. Ainsi, Allen et al.14 montrent qu’en moyenne, les marges prix-coûts ont diminué de 3,9 % dans les secteurs les plus affectés par le PMI et que les effets proconcurrentiels du marché intérieur se sont davantage fait sentir dans les secteurs plus concentrés et qui étaient protégés de la concurrence étrangère par des barrières non tarifaires. Cette conclusion est confirmée par des études réalisées sur des entreprises italiennes et britanniques. Une étude plus récente15 qui analyse les développements des marges sur la période 1987-1999 montre que deux phases peuvent être distinguées dans leur évolution. Au cours de la période 1989-1992, les prix baissent dans une proportion plus forte que les coûts mais, au cours de la période 1992-1999, on observe une restauration des marges grâce à des baisses de coûts. Ce résultat est conforme aux résultats théoriques.
Effets à moyen terme sur les stratégies des entreprises
35Face à ce nouvel environnement concurrentiel, les entreprises européennes vont mettre en place deux types de stratégies : d’une part, des stratégies leur permettant de diminuer leurs coûts afin de maintenir ou de gagner des parts de marché face aux nouveaux concurrents et, d’autre part, des stratégies leur permettant de regagner un certain pouvoir de marché, par exemple en essayant de re-segmenter le marché intérieur.
36D’une part, pour diminuer leurs coûts de production, les entreprises vont exploiter les économies d’échelle que permet l’accès à un marché élargi et vont étendre leurs activités dans plusieurs pays, augmentant par là le caractère multinational de leur production. Une autre manière de diminuer leurs coûts est de recentrer leurs activités sur leur métier de base où elles ont leur avantage compétitif et elles vont donc réduire la diversification sectorielle de leurs activités. Dans ce cas, on devrait observer une amélioration de l’efficacité productive des entreprises, celles-ci essayant d’allouer au mieux l’ensemble de leurs ressources en capital humain, financier et technique. Cette diminution des coûts devrait permettre de restaurer les marges bénéficiaires sans s’accompagner d’une augmentation des prix pour les consommateurs.
37D’autre part, pour regagner un pouvoir de marché sans contrevenir aux règles de la concurrence (par exemple tel serait le cas si les entreprises mettaient en place des stratégies de collusion), les entreprises peuvent viser à différencier leurs produits de ceux de leurs concurrents. Une telle stratégie nécessite bien souvent d’entreprendre des investissements en R & D et en publicité et donc de se recentrer sur son métier de base afin de limiter l’accroissement des dépenses dans ces domaines. Finalement, l’augmentation de la concurrence entre marques peut renforcer les relations verticales entre entreprises. Les producteurs peuvent, en effet, être incités à établir des relations contractuelles avec leurs distributeurs afin de maintenir les profits obtenus grâce à des discriminations de prix suivant les marchés nationaux.
38Des travaux empiriques réalisés sur une base de données décrivant la distribution de la production par secteur et par pays des firmes européennes leaders16 permettent de conclure que l’intégration des marchés des produits a conduit en effet les entreprises à adapter leurs structures. Ainsi, au cours de la période 1987-2000, on constate que les entreprises présentes sur le marché intérieur européen ont augmenté leur taille et ont accru leur présence sur les marchés d’autres États membres. Elles ont également réduit leur diversification sectorielle, surtout dans les secteurs ne faisant pas partie de leur métier de base. Ces changements de structure ont été réalisés principalement à travers des fusions ou acquisitions et à cet égard, on peut souligner que la part des fusions entre entreprises de pays différents (membres ou non de l’Union européenne) s’est accrue, passant de 34 à 38 % des fusions totales entre 1985 et 2004.
Effets à long terme sur la structure des activités économiques
39Ces changements dans l’environnement concurrentiel et dans les stratégies des entreprises ont des implications sur la structure des activités économiques, c’est-à-dire sur la concentration industrielle, la spécialisation industrielle et la concentration géographique dans l’Union européenne.
40Les conséquences sur la concentration industrielle (mesurée par les parts de marché des X plus grandes entreprises sur un marché donné ou par l’indice d’Herfindahl-Hirschman17) ne sont pas évidentes car des effets jouent en sens opposés.
41Au niveau de chaque État membre, on observe simultanément des entrées de firmes étrangères et des fermetures d’entreprises ou des fusions en raison des restructurations. Dans la mesure où les entrées de firmes étrangères sont plus élevées que les fermetures et fusions de firmes existantes nationales, ce qui est probable, on devrait observer une diminution de la concentration industrielle au niveau national. Au niveau de l’ensemble de l’Union européenne, les entrées de firmes étrangères sur les différents marchés nationaux s’annulent. Par contre, les fusions entre entreprises et les sorties des marchés suite aux restructurations devraient accroître la concentration industrielle au niveau européen. On s’attend toutefois à ce que la concurrence transfrontalière s’accroisse entre ce plus petit nombre d’entreprises au niveau européen. Apriori, il est difficile de prédire quel sera l’effet net de la concentration industrielle et de la concurrence accrues au niveau européen.
42Toutefois, les travaux empiriques réalisés montrent que si on observe effectivement une légère augmentation de la concentration industrielle à partir de 1997 dans l’Union européenne, cette augmentation de la concentration va de pair avec une plus grande turbulence au niveau des entreprises leaders dans l’industrie manufacturière européenne. En moyenne, les cinq entreprises leaders en 1987 ont perdu 50 % de leur part dans la production en 2000 et, dans la plupart des secteurs, l’entreprise dominante en 1987 est remplacée par une nouvelle entreprise en 200018. Cette instabilité des parts de marché donne à penser qu’il existe de fortes rivalités entre les entreprises européennes et que les pressions de la concurrence ont eu un impact sur la position des principaux acteurs en présence.
43Lorsque les entreprises étendent leurs activités par-delà leurs frontières nationales, il est naturel de se poser la question de savoir quel est l’impact sur la localisation géographique des activités dans l’Union européenne. Dans un premier temps, certains économistes ont argumenté que la réduction des coûts de transport et des échanges dans l’Union européenne combinée à des effets de demande allaient conduire à une concentration des activités dans les régions du centre industriel, proches de larges marchés permettant aux entreprises de bénéficier d’économies d’échelles et des autres bénéfices associés à l’agglomération des activités (accès à des fournisseurs spécialisés, à une main-d’œuvre qualifiée…). Mais les théories de la « Nouvelle Géographie économique » ont montré qu’il existe une relation en forme de U inversé entre l’intégration et la concentration géographique des activités. Dans un premier temps, l’intégration a effectivement pour effet de renforcer la concentration géographique pour les raisons évoquées ci-dessus mais lorsque l’intégration se poursuit, il arrive un moment où des forces poussent en faveur d’une re-dispersion des activités. Ces forces sont liées à l’augmentation du prix des facteurs de production immobiles et à l’apparition de coûts de congestion (augmentation du prix des terrains, loyers ou du travail…).
44Les travaux empiriques ont montré que l’intégration des marchés ne semble pas avoir conduit à une augmentation de la concentration géographique. Les secteurs à rendements d’échelle et à contenu technologique élevés (telles que l’automobile, la chimie, le matériel informatique) ont tendance à être plus concentrés et des facteurs tels que l’existence d’infrastructures, des capacités de recherche et une main-d’œuvre qualifiée jouent un rôle prépondérant pour influencer la localisation des entreprises.
45Les changements dans la localisation des activités peuvent aussi affecter la spécialisation industrielle des pays. Dans ce domaine, des forces agissent en sens opposés. D’une part, l’intégration, en réduisant les coûts des transports et des échanges, devrait permettre une plus grande exploitation d’économies d’échelle externes (c’est-à-dire au niveau de l’industrie) et conduire à une plus grande spécialisation interindustrielle des États membres en fonction de leurs dotations factorielles. Mais d’autre part, l’intégration peut également encourager le transfert de connaissances et de capital humain et technique, favorisant par là une convergence des dotations factorielles et une spécialisation intra-industrielle des États membres. Cette tendance peut être renforcée par la suppression des fluctuations des taux de change19.
46La question de l’impact de l’intégration sur la spécialisation ne peut donc être tranchée qu’empiriquement mais les résultats de l’analyse empirique peuvent varier en fonction du niveau de désagrégation auquel on travaille. Toutefois, on peut conclure des principaux travaux empiriques existants que les changements de spécialisation en Europe ont été peu importants avec une légère augmentation de la spécialisation de la production depuis le début des années 1980, peu de changement dans la spécialisation des exportations et une augmentation de l’importance relative du commerce intra-industriel.
C. Effets macroéconomiques
47Les effets macroéconomiques de l’intégration des marchés des produits passent par deux canaux principaux : la concurrence et l’innovation. L’accroissement de la concurrence a pour effet de réduire les rentes de monopole et d’accroître l’efficacité des entreprises. Il conduit à des baisses de coûts et de prix, ce qui accroît le pouvoir d’achat des agents économiques et la compétitivité-prix des entreprises. Il en résulte une augmentation de la demande interne et externe et donc des investissements, de la croissance et de l’emploi.
48L’intégration des marchés a également pour effet d’accroître le progrès technologique et donc la croissance potentielle, en stimulant l’innovation et sa diffusion à travers les États membres. D’une part, l’innovation est encouragée par les pressions de la concurrence parce que le risque est plus grand d’être éliminé du marché si on se laisse dépasser par les concurrents. D’autre part, le coût de l’innovation est réduit parce que l’entreprise peut amortir ses dépenses de R & D sur un volume plus large de ventes. Finalement, la diffusion de l’innovation est facilitée par les transferts de technologie accompagnant les investissements étrangers.
49Des simulations ont été réalisées par la Commission européenne20 afin de mesurer les effets en termes de croissance et d’emploi du programme de marché intérieur. Les simulations sont réalisées en injectant dans un modèle des chocs sous forme de baisse de rentes de monopole et de gains de productivité. Elles estiment que la réalisation du marché intérieur a conduit à une croissance additionnelle de 1,8 % sur dix ans (1992-2002) et a permis de créer 2,5 millions d’emplois.
IV. Le marché intérieur, un potentiel en partie inexploité
50L’intégration des marchés des biens et services, grâce au programme du marché intérieur, a permis de réaliser des gains substantiels à la fois pour les entreprises et les consommateurs21. Les entreprises ont eu accès plus facilement à de nouveaux marchés et ont pu réduire leurs coûts, les consommateurs ont pu bénéficier de baisses de prix et ont eu accès à une gamme plus large de produits et ces gains d’efficacité se sont traduits par des effets positifs en termes de croissance et d’emplois. Néanmoins, le potentiel du marché intérieur n’est pas encore pleinement exploité et ce pour deux raisons principales. D’une part, la transposition et l’application des règles existantes peuvent encore s’améliorer et d’autre part, il subsiste des barrières aux activités transfrontalières. Ainsi, le maintien de barrières techniques dans certains secteurs industriels, l’ouverture encore relativement limitée des marchés publics, les obstacles aux mouvements de services et le manque de transparence fiscale sont autant de facteurs qui continuent à segmenter le marché intérieur européen. Ce potentiel en partie inexploité du marché intérieur semble avoir conduit à un certain essoufflement dans l’intégration des marchés des biens et services. Mais aujourd’hui, le perfectionnement du marché intérieur constitue un des piliers de la stratégie de Lisbonne et s’il continue à fournir un environnement concurrentiel pour les entreprises, il doit également être modernisé par une véritable politique d’innovation.
A. Problèmes dans la mise en œuvre des règles existantes
51Des problèmes subsistent dans la transposition des directives « marché intérieur » et dans l’application des règles existantes Ainsi, en 2006, 4 États membres22 ont encore un déficit de transposition (à savoir le pourcentage moyen, par État membre, de directives « marché intérieur » en vigueur qui n’ont pas encore été transposées en droit national) au dessus de la barre de 1,5 %, objectif fixé lors du Conseil européen de Barcelone au printemps 2002. En outre, le nombre des infractions portant sur une mise en œuvre incorrecte de la législation du marché intérieur reste élevée.
52Toutefois, il convient de remarquer que le degré de transposition des directives « marché intérieur » s’est amélioré au cours de la période récente. Les nouveaux États membres ont fait un effort remarquable pour absorber l’acquis dans ce domaine et les anciens États membres ont réussi à inverser la tendance à l’augmentation de leur déficit observée depuis mai 2002.
B. Barrières subsistantes
53Malgré les mesures prises depuis la publication du Livre blanc, il subsiste des barrières aux activités transfrontalières dans l’Union européenne. À cet égard, on peut considérer que les normes et réglementations continuent à faire obstacle aux mouvements de biens, que l’ouverture des marchés publics peut encore s’améliorer, que de nombreux obstacles réglementaires, administratifs et juridiques gênent les mouvements des services et que peu de progrès ont été réalisés en vue de l’élimination des barrières fiscales.
54Ainsi, en ce qui concerne le mouvement des biens, les entreprises considèrent qu’il n’est pas facile de bénéficier de l’application du principe de reconnaissance mutuelle et qu’il est souvent moins risqué et plus rapide d’adapter leurs produits en fonction des différents marchés. D’une manière générale, les normes et réglementations continuent à gêner les échanges de biens et services.
55De même, l’ouverture des marchés publics à la concurrence est encore insuffisante. Le nombre d’appels d’offres publics publiés au Journal officiel en proportion de la valeur totale des marchés publics a constamment augmenté depuis 1993 mais continue de ne représenter que 22 % de cette valeur totale (voir graphique 2). Dans la mesure où les marchés publics représentent plus de 16 % du PIB dans l’Union et où les autorités qui procèdent à des achats en recourant à la réglementation des marchés publics ont payé des prix environ 34 % moins chers que les autorités qui n’ont pas utilisé cette réglementation (Commission européenne (2005a)23), des gains substantiels peuvent encore être réalisés par les pouvoirs publics dans ce domaine.
56Il subsiste également de nombreux obstacles réglementaires, administratifs et juridiques aux échanges de services. Ainsi, les services représentent plus de deux tiers de l’output et de l’emploi en Europe mais seulement 20 % des échanges intracommunautaires. La directive services proposée par la Commission européenne qui vise à faciliter la liberté d’établissement des prestataires de services dans un autre État membre, à réduire les obstacles à la libre circulation des services et à éliminer les restrictions qui rendent plus difficile pour les consommateurs et les entreprises de faire appel à des prestataires de services d’un autre État membre vient d’être adoptée par le Parlement européen.
57Finalement, peu de progrès ont été réalisés dans l’élimination des barrières fiscales, domaine où la règle de l’unanimité reste en vigueur. D’une part, l’existence de différents systèmes d’imposition des sociétés entraîne des coûts pour les entreprises qui doivent se conformer à ces différentes règles, réduit la transparence des taux d’imposition et peut conduire à des distorsions dans les décisions d’investissements. Les activités transfrontalières des entreprises continuent à souffrir de problème de discrimination fiscale, de double imposition et de coûts administratifs excessifs. Dans ce domaine, des initiatives ont été prises pour trouver des solutions à court terme à des problèmes posés par des obstacles fiscaux spécifiques24 mais des propositions plus ambitieuses visant à harmoniser l’assiette fiscale de l’impôt des sociétés sont à l’étude. D’autre part, en matière de fiscalité indirecte, l’existence de taux différents et le maintien de la règle du pays de destination selon laquelle les biens sont taxés dans le pays où ils sont consommés constituent des entraves à la libre circulation des biens et des services.
C. Un certain essoufflement dans l’intégration des marchés des produits ?
58Comme l’a montré la section III, la création du marché intérieur et la plus grande transparence des prix résultant de l’introduction de l’euro ont permis de renforcer le processus d’intégration des marchés des biens et services. Toutefois, certains indicateurs semblent faire apparaître une certaine stagnation dans ce processus d’intégration25. Ainsi que l’indique le graphique 3, la part du commerce intracommunautaire dans le commerce total a tendance à se réduire alors qu’il avait fortement augmenté durant la période de lancement du projet marché intérieur26. De même, le processus de convergence des prix dans l’UE a tendance à se ralentir (graphique 4) alors que des écarts de prix importants subsistent pour des produits identiques entre les pays européens. Par exemple, on peut observer des écarts allant de plus de 300 % pour une bouteille d’eau minérale et de plus de 100 % pour une boîte de pâtes.
59Malgré cet essoufflement dans le processus d’intégration des marchés des produits européens, la comparaison avec le marché américain donne à penser qu’il reste encore un potentiel du marché intérieur inexploité. Ainsi, il semble que la part des échanges intracommunautaires dans le commerce total de l’UE soit moins élevée que la part de ceux prenant place entre les États américains dans le commerce total des États-Unis : la part des exportations intracommunautaires de produits manufacturés s’élevaient à 17 % du PIB européen alors que la part des exportations entre États américains représentaient 34 % du PIB américain en 2001, indiquant par là que le marché intérieur américain est davantage intégré que le marché européen27. De même, la dispersion des prix entre les capitales européennes est encore plus élevée que celle existant entre les principales villes américaines28. Les écarts dans la dispersion des prix entre l’Europe et les États-Unis sont plus importants pour certaines catégories de produits où, en raison de différences de réglementation ou de fiscalité, les marchés européens restent segmentés.
D. Le marché intérieur et la stratégie de Lisbonne
60En 2000, les chefs d’État mettent en place la stratégie de Lisbonne, une stratégie de réformes visant à améliorer les performances économiques de l’Union européenne en termes de croissance, d’emplois et de productivité tout en assurant la survie du modèle social européen. Le diagnostic à l’origine du lancement de cette stratégie n’était pas très différent de celui fait au milieu des années 1980 lorsque Jacques Delors a lancé l’initiative du marché intérieur et aujourd’hui encore, on constate que l’Europe accuse un retard de productivité par rapport aux États-Unis. En outre, la croissance de la productivité européenne s’est ralentie depuis la seconde moitié des années 1990 alors qu’elle s’est accélérée aux États-Unis29. Ce retard de productivité s’explique par le manque de dynamisme des entreprises, par l’incapacité de développer de nouvelles spécialisations dans des secteurs à forte croissance de valeur ajoutée et dans le retard accusé dans la production et l’utilisation des nouvelles technologies de l’information et des communications dans les services. Le moindre dynamisme des entreprises européennes et leur incapacité à développer de nouvelles spécialisations semblent devoir être associés à la fragmentation du marché intérieur européen, aux difficultés de créer de nouvelles entreprises et à une moindre capacité d’innovation.
61Faut-il tirer comme conclusion de cette analyse que le marché intérieur n’a pas fonctionné convenablement ? Les travaux empiriques décrits dans la section III ont montré que de nombreux effets positifs ont été engendrés par le PMI et l’arrivée de l’euro. Mais cette analyse indique que le parachèvement du marché intérieur doit continuer à être une priorité et, effectivement, il constitue un des piliers de la stratégie de Lisbonne renouvelée au printemps 2005 et recentrée autour de la croissance et de l’emploi. Trois actions prioritaires ont été définies dans ce cadre : faire en sorte que l’Europe soit plus attrayante pour les travailleurs et les investisseurs ; faire de la connaissance et de l’innovation les moteurs de la croissance européenne ; créer davantage d’emplois et des emplois de qualité.
62Améliorer le marché intérieur est essentiel si l’on veut faire de l’Europe un espace plus attrayant pour les investisseurs et les travailleurs et, à cet égard, il faudrait se focaliser sur les obstacles subsistant en matière de libre circulation et des services et en matière de fiscalité. Mais, aujourd’hui, la logique du marché intérieur doit aller au-delà de l’élimination des barrières à l’entrée. Pour aller de l’avant, elle doit également viser à développer la capacité d’innovation et l’efficacité dynamique des entreprises européennes dans ce grand marché. Il faut faire du marché intérieur un vecteur de diffusion des innovations et davantage intégrer la politique du marché intérieur avec les politiques de concurrence, de R & D, d’innovation et d’éducation.
Conclusion
63Le marché intérieur a constitué une étape cruciale dans le processus d’intégration européenne. Tout d’abord, il a permis de relancer la construction européenne après une période de stagnation qui avait débuté à la fin des années 1960. Il a contribué à restaurer la confiance des entrepreneurs européens et a été source de gains à la fois pour les entreprises et les consommateurs. Il a permis aux premières d’avoir accès à de nouveaux marchés, de réaliser des baisses de coûts et des gains d’efficacité. Aux seconds, il a offert des baisses de prix, des améliorations dans la qualité des produits et un accès à une gamme plus large de variétés. Les entreprises européennes ont mis en œuvre de nouvelles stratégies visant à accroître leur présence sur des marchés non nationaux et à se recentrer sur leur métier de base où elles possèdent un avantage compétitif. Ces effets se sont traduits, au niveau macroéconomique, par des gains de pouvoir d’achat pour les consommateurs européens et une amélioration de la compétitivité pour les entreprises et ont ainsi donné lieu à une croissance additionnelle et à des créations d’emplois.
64Toutefois, malgré ces effets positifs, il faut constater que le potentiel du marché intérieur n’est pas totalement exploité. D’une part, il subsiste des problèmes dans la mise en œuvre et l’application des règles existantes, ainsi qu’en témoignent le déficit de transposition et le nombre d’infractions subsistant. D’autre part, le maintien de barrières techniques dans certains secteurs industriels, l’ouverture encore relativement limitée des marchés publics, les obstacles aux mouvements de services et le manque de transparence fiscale sont autant de facteurs qui continuent à segmenter le marché intérieur européen. Ce potentiel en partie inexploité du marché intérieur semble avoir conduit à un certain essoufflement dans l’intégration des marchés des biens et services et l’on observe, à cet égard, une certaine diminution de la part des échanges intracommunautaires dans le commerce total de l’Union européenne et une stagnation dans la convergence des prix. Malgré cet essoufflement dans le processus d’intégration des marchés des produits européens, la comparaison avec le marché américain indique qu’il reste encore un potentiel du marché intérieur inexploité.
65En fait, le perfectionnement du marché intérieur est un processus en développement continu parce qu’il convient de tenir compte constamment de modifications dans l’environnement économique, tels que l’élargissement, la globalisation, l’apparition des nouvelles technologies de l’information et des communications… et il faudra continuellement adapter le marché intérieur en fonction de ces nouveaux défis. Ainsi, aujourd’hui, il s’agit d’intégrer le programme du marché intérieur dans la stratégie de Lisbonne.
66Il est important de continuer à éliminer les entraves aux échanges et en particulier de réduire les barrières à l’entrée sur de nouveaux marchés. Il semble que c’est dans ce domaine que l’Europe est en retard par rapport aux États-Unis. Différents indicateurs montrent, par exemple, qu’il est beaucoup plus difficile de créer une entreprise en Europe qu’aux États-Unis. Or, la création de nouvelles entreprises est source de gains d’efficacité, en particulier dans des secteurs de haute technologie. Mais il conviendrait aussi de moderniser le marché intérieur par une véritable politique d’innovation visant à améliorer la capacité des entreprises à développer de nouveaux processus et de nouveaux produits. Pour ce faire, il faudrait davantage créer de synergies entre la politique du marché intérieur et les politiques de concurrence, d’innovation et de R & D. Peut-être s’agit-il là de pistes à explorer pour un nouveau plan d’action du marché intérieur.
Notes de bas de page
1 Balassa B.(1961), The Theory of Economic Integration, R.D. Irwin, Homewood, Illinois.
2 Rapport Delors (1989), Rapport sur l’UEM dans la Communauté européenne. http://europa.eu.int/comm/economy_finance/euro/origins/delors_en.pdf (consulté en 2007).
3 Baldwin R.et Wyplosz C.(2005), The Economics of European Integration, Mc Graw Hill.
4 En 1973, la CEE a connu un élargissement avec l’arrivée de trois nouveaux États membres : le Royaume-Uni, le Danemark et l’Irlande. Ce dernier pays était plus pauvre économiquement que les autres États membres. L’arrivée du Royaume-Uni a soulevé des nouveaux problèmes étant donné les relations privilégiées qu’entretenait ce pays avec ceux du Commonwealth. En effet, les importations importantes en provenance de ces pays se traduisaient par une contribution importante du Royaume-Uni au budget de la CEE, davantage qu’il n’en bénéficiait. L’élargissement de la CEE s’est poursuivi en 1981, avec l’adhésion de la Grèce et en 1986 par celle de l’Espagne et du Portugal. L’arrivée de ces trois pays a déplacé le centre de gravité géographique et économique vers le sud. En termes de PNB par tête, ces trois pays se situaient en dessous de la moyenne communautaire.
5 Maes I. (1991), « The European Community in the 1990s: deepening or widening », Occasional Papers, nº 92-2, Center for International Studies, Duke University.
6 Commission européenne (1993), The Internal Market takes Shape, document interne.
7 Commission européenne (1988), 1992 : La nouvelle économie européenne, Économie européenne, nº 35, mars.
8 Depuis le 1er janvier 2007, la majorité qualifiée est obtenue avec : 255 voix sur 345 (73,9 %) mais un membre du Conseil peut demander que les États membres constituant la majorité qualifiée représentant au moins 62 % de la population. Une majorité de quatorze États membres (si le Conseil ne se base pas sur une proposition de la Commission, une majorité des deux tiers (dix-huit États membres) est requise).
9 Commission européenne (2005b), Tableaux d’affichage du marché intérieur. http://www.europa.eu.int/comm/internal_market/fr/update/score/index.htm (consulté en 2007).
10 Commission européenne (1996), « Évaluation économique du marché intérieur », Économie européenne, nº 4, mars.
11 Dierx A., Hobza A.et Ilzkovitz F.(2004), Product Market Integration and Structural Reform in EMU, part IV in EMU after five Years, European Economy Special Report nº 1, pp. 102-105.
12 Dierx A., Ilzkovitz F.et Sekkat K.(éd.) (2004), European Integration and the Functioning of Product Markets, Edward Elgar Publishing Ltd.
13 On peut définir les marges prix-coûts pour la firme i par l’indice de Lerner (LIi) avec : (LI)i =(Pi-MCi)/Pi = si/η. Une augmentation de la concurrence entraîne une diminution de la concentration (si) et une augmentation de l’élasticité de la demande au prix (η). Il en résulte une diminution des marges prix-coûts.
14 Allen C., Gasiorek M. et Smith A.(1998), « The Competition Effect of the Single Market in Europe », Economic Policy, 13(27), octobre.
15 Sauner-Leroy J.-B. (2003), « The Impact of the Implementation of the Single Market Programme on Productive Efficiency and on Mark-ups in the European Manufacturing Industry », Economic Papers, Direction générale des Affaires économiques et financières de la Commission européenne, nº 192, septembre.
16 Veugelers R.(2004), « Industrial Concentration, Market Integration and Efficiency in the European Union », chapitre 4 in Dierx, Ilzkovitz et Sekkat (éd.), European Integration on the Functioning of Product Markets, Edward Elgar Publishing Ltd.
17 L’indice d’Herfindahl-Hirschman (IHH) est utilisé comme un indicateur possible du pouvoir de marché ou de la concurrence qui s’exerce entre entreprises. Il mesure la concentration du marché en additionnant les carrés des parts de marché de toutes les entreprises du secteur. Lorsque, par exemple, sur un marché comptant cinq entreprises, chacune d’elles détient une part de marché de 20 %, l’IHH est alors égal à : 400 + 400 + 400 + 400 + 400 = 2 000. Plus l’IHH d’un marché donné est élevé, plus la production est concentrée entre un petit nombre d’entreprises. D’une manière générale, lorsque l’IHH est inférieur à 1 000, la concentration du marché est considérée comme faible, lorsqu’il est compris entre 1 000 et 1 800, elle est considérée comme moyenne et lorsqu’il est supérieur à 1 800, elle est considérée comme élevée.
18 Veugelers R.(2004), « Industrial Concentration, Market Integration and Efficiency in the European Union », chapitre 4 dans Dierx, Ilzkovitz et Sekkat (éd.), European Integration on the Functioning of Product Markets, Edward Elgar Publishing Ltd.
19 Fontagné et Freudenberg (Fontagné L.et Freudenberg M.(1999), « Endogenous Symmetry of Shocks in a Monetary Union », Open Economies Review, nº 10, pp. 263-287) ont démontré que la variabilité des taux de change en Europe sur la période 1980-1994 a réduit le commerce intra-industriel. L’argument est que les entreprises qui veulent réduire la variabilité de leurs ventes sont incitées à se localiser dans un pays où les chocs qu’elles subiront sont corrélés avec les chocs auxquels fera face le pays. Par exemple, si un choc asymétrique se produit, augmentant la demande de biens A et diminuant la demande de biens B, l’entreprise de biens B a intérêt à être localisée dans un pays X spécialisé dans la production de biens B, auquel cas la dépréciation du taux de change dans le pays X pourra amoindrir l’ampleur du choc subi par l’entreprise. Par contre, si l’entreprise de biens B est localisée dans un pays Z spécialisé dans la production de biens A, elle subira un double choc, celui provenant de la diminution de la demande de biens B et celui résultant de l’appréciation du taux de change dans le pays Z.
20 Commission européenne (2003a), Le marché intérieur, dix ans sans frontières. http://ec.europa.eu/internal_market/top_layer/historical_overview/docs/workingdoc_fr.pdf (lien mis à jour le 2 décembre 2017) ; Commission européenne (2003b), The Macroeconomic Effects of the Single Market Programme after 10 Years, Direction générale des Affaires économiques et financières.
21 Commission européenne (2003a), Le marché intérieur, dix ans sans frontières. http://ec.europa.eu/internal_market/top_layer/historical_overview/docs/workingdoc_fr.pdf (lien mis à jour le 2 décembre 2017).
22 Il s’agit des pays suivants : Grèce, Luxembourg, Italie et Portugal.
23 Commission européenne (2005a), Deuxième rapport de mise en œuvre de la stratégie pour le marché intérieur 2003-2006, COM (2005). http://europa.eu.int/comm/internal_market/en/update/strategy/2nd-impl-report_fr.pdf (consulté en 2007).
24 Par exemple, la Commission compte s’attaquer aux restrictions actuelles à la compensation des pertes transfrontalières dans l’UE. Dans la plupart des pays, les sociétés mères ne peuvent en effet prendre en compte à des fins fiscales les pertes subies par les filiales établies dans d’autres pays.
25 Ilzkovitz F.et Nicodème G. (2001), Des nouveaux défis pour l’Union européenne, Cahiers économiques de Bruxelles, nº 170. Commission européenne (2005a), Deuxième rapport de mise en œuvre de la stratégie pour le marché intérieur 2003-2006, COM (2005).
26 Il convient toutefois de souligner que la part du commerce à l’intérieur de la zone euro en pourcentage du commerce intracommunautaire s’est accrue depuis l’entrée en vigueur de l’UEM.
27 Commission européenne (2004), « The Link between Product Market Reforms and Productivity: Direct and Indirect Links », chapitre 5 dans EU Economy 2004 Review.
28 Commission européenne (2001), Niveaux et dispersion des prix dans l’Union européenne, Économie européenne, Supplément A, nº 7, juillet.
29 Dierx et Ilzkovitz (2006), « Economic Growth in Europe : Pursuing the Lisbon Strategy », in Competitiveness and Growth in Europe. Lessons and policy Implications for the Lisbon Strategy, Mundschenk S., Stierle M., Stierle-von Schütz U.et Traistaru J.(éd.), Edward Elgar Publishing Ltd. Dierx et Ilzkovitz (2005b), The Potential Benefits of the Structural Reforms Undertaken within the Context of the Lisbon Strategy, papier présenté à la XVIIe conférence Villa Mondragone sur Capitalism and Entrepreneurship Dynamics : Benchmarking Europe’s Growth, Rome, 6-7 juillet.
Auteur
Chef de l’unité « Marché des produits, compétitivité, politiques de la concurrence et de l’innovation » à la direction générale des affaires économiques et financières de la Commission européenne, Fabienne Ilzkovitz est aussi professeur associé à la Faculté d’économie de l’Université libre de Bruxelles, à la Solvay Business School et à l’ICHEC Management School. Après avoir été chercheur au DULBEA, elle a travaillé au département de recherches de la Banque nationale de Belgique. Ses thèmes actuels de recherches portent sur l’intégration européenne, le fonctionnement des marchés des biens et services, les questions liées à la politique industrielle, de concurrence et d’innovation, la stratégie de Lisbonne. Parmi les nombreux ouvrages et articles qu’elle a publiés figurent : L’impact sectoriel du marché intérieur sur l’industrie. Les enjeux pour les États membres, avec P. Buigues et J-F Lebrun, Économica, Paris 1991 ; European integration and the functioning of product markets, avec A. Dierx et K. Sekkat, Edward Elgar Publishing Company, 2004 ; European merger Control. Do we need an Efficiency Defence, avec R. Meiklejohn, Edward Elgar Publishing Company, 2005; « Du marché unique à la monnaie unique : l’impact sectoriel de l’euro », avec A. Dierx, Economie Internationale, 1999 ; « European Merger Control: Do we need an efficiency defence? » avec R. Meiklejohn, Journal of Industry, Competition and Trade, 2003; « Economic growth in Europe: Pursuing the Lisbon Strategy », avec A. Dierx, publié dans Competitiveness and Growth in Europe. Lessons and Implications for the Lisbon Strategy, Edward Elgar Publishing Company, 2006.
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La France et l'Égypte de 1882 à 1914
Intérêts économiques et implications politiques
Samir Saul
1997
Les ministres des Finances de la Révolution française au Second Empire (I)
Dictionnaire biographique 1790-1814
Guy Antonetti
2007
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2007
Les ingénieurs des Mines : cultures, pouvoirs, pratiques
Colloque des 7 et 8 octobre 2010
Anne-Françoise Garçon et Bruno Belhoste (dir.)
2012
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2006