Les relations entre les entreprises françaises et allemandes dans l’industrie chimique des colorants des années 1920 aux années 1950, entre Occupation, concurrence, collaboration et coopération
p. 225-239
Texte intégral
1Les relations économiques et financières entre la France et l’Allemagne reposent aussi sur des hommes, leurs relations voire leurs trajectoires croisées entre les deux pays. Cette thèse est illustrée ici dans la longue durée à travers l’exemple d’une branche importante de l’industrie chimique, les colorants. C’est elle qui, au cours de la deuxième moitié du XIXe siècle, a donné naissance à la chimie organique moderne, et en particulier en Allemagne aux grands groupes qui dominent la chimie mondiale jusqu’à aujourd’hui (comme le montrent leurs raisons sociales d’origine, AG Farbenfabriken vorm. Friedrich Bayer & Bayer & Co, Farbwerke Hoechst, Badische Anilin & Soda Fabrik, sans oublier bien sûr leur regroupement entre 1925 et 1945 au sein de l’IG Farben…). Si les colorants ont vu leur importance relative dans l’industrie chimique diminuer au cours du XXe siècle, ils sont longtemps restés une branche qui compte, à la fois parce qu’elle générait des profits élevés et parce que la production de colorants est, par les produits intermédiaires requis, à l’origine de nombreuses diversifications stratégiques, notamment dans la chimie des explosifs.
2La contribution s’organise en trois parties :
un rapide rappel d’abord de l’évolution de l’histoire de l’industrie chimique des colorants dans la longue durée en France et en Allemagne, et des relations complexes qui s’établissent entre les deux ;
l’illustration ensuite de l’intensité des échanges entre Français et Allemands, au milieu de laquelle la période de la collaboration pendant la guerre n’est qu’une phase parmi d’autres, avec une grande continuité parmi les acteurs ;
l’évocation enfin de parcours croisés entre la France et l’Allemagne, au moins chez les Français, avec l’importance notamment de la filière alsacienne dans l’industrie française des colorants.
I. Évolution de l’industrie chimique des colorants
3Si l’industrie française a joué notamment avec la fuchsine dans les années 1850 un rôle pionnier dans la chimie des colorants synthétiques, elle a rapidement été dépassée par l’industrie allemande qui, à partir des années 1860, s’est imposée comme leader mondial1. Jusqu’en 1914, l’industrie allemande domine par ses exportations de manière écrasante le marché international, seule l’industrie suisse (bâloise) parvenant à tirer son épingle du jeu. En France, environ 85 % des colorants consommés par l’industrie textile sont d’origine allemande dans les années précédant la Grande Guerre, le reste provenant de la Suisse et d’une faible industrie française où seule l’entreprise Poirrier de Saint-Denis près de Paris a une certaine importance économique. Il faut toutefois préciser que les producteurs allemands ont tous été amenés, pour contourner les barrières douanières mises en place par la France, à racheter ou à implanter des usines en France qui assurent au moins la fabrication finale2, les exportations de produits intermédiaires étant moins taxées.
4En 1914, ces usines allemandes sont mises sous séquestre avant d’être définitivement confisquées à la suite du traité de Versailles. Pendant la guerre, la mise en place d’une industrie nationale des colorants devient, en raison de son importance stratégique, une préoccupation gouvernementale. La Compagnie nationale des matières colorantes (CNMC) est créée avec des capitaux privés en 1916 et elle développe, notamment en reprenant après la guerre l’usine de Creil appartenant auparavant à Hoechst, une industrie française plus puissante. L’occupation de la rive gauche du Rhin, en particulier de la grande usine de Ludwigshafen de la BASF3, permet aux Français d’acquérir des technologies et un savoir-faire allemand. Fin 1920, pour mettre un terme à ce qu’ils considèrent comme de « l’espionnage » industriel, les Allemands obtiennent la conclusion d’un contrat dit Gallus qui leur accorde, en échange de leur aide technique à l’industrie française, une importante somme d’argent et surtout la moitié des profits de la CNMC pendant 45 ans. Mais, lorsque la CNMC est absorbée en 1924 par Kuhlmann, les dirigeants de ce groupe chimique présent jusqu’alors dans la seule chimie minérale ne s’estiment pas engagés et dénoncent le contrat. Kuhlmann s’impose, avec ses participations dans les autres fabricants français, en particulier la Société des matières colorantes de Saint-Denis (anc. Poirrier), comme producteur quasi monopoliste en France. L’important marché national des colorants est largement perdu pour les Allemands, à l’exception de quelques spécialités haut de gamme que les Français ne parviennent pas à produire. Pire pour eux, la concurrence française les gêne de plus en plus sur des marchés tiers. Ils se résolvent donc en 1927 à conclure avec le groupe français un accord de cartel qui a au moins le mérite pour eux de figer la situation : s’il entérine largement le renoncement allemand au marché français, il empêche les Français d’accentuer leur pénétration des marchés étrangers. L’accord de cartel est ensuite étendu aux producteurs suisses en 1929 puis britanniques en 1932.
5La victoire de juin 1940 représente pour les Allemands une occasion inespérée de prendre leur revanche. Alors que les producteurs français envisagent de reprendre rapidement leurs affaires dans le cadre des cartels existants, dont le fonctionnement a été suspendu depuis septembre 1939, les dirigeants de l’IG Farben expriment dès l’été 1940 leur volonté de prendre le contrôle d’une industrie française dont ils jugent la prospérité illégitime, puisque reposant sur la confiscation de leurs usines en 1919 (même si aucune des quatre usines de l’époque du groupe Kuhlmann n’est l’héritière directe des anciennes usines allemandes4), l’espionnage de leur industrie et la dénonciation abusive du contrat Gallus5. Après avoir laissé les industriels français s’inquiéter du blocage de leurs usines pendant quelques mois, ils frappent un grand coup lors d’une réunion en novembre 1940 à Wiesbaden dans le cadre de la commission d’armistice où, en présence de représentants des gouvernements des deux pays, ils exigent la majorité du capital (51 %) d’une nouvelle société distincte de Kuhlmann qui rassemblerait l’ensemble des producteurs français de colorants6. Les industriels français, surpris, se réfugient derrière la nécessité d’obtenir l’accord du gouvernement de Vichy pour une telle opération. Après avoir vainement tenté pendant quelques mois de négociations d’éviter une prise de participation majoritaire, ils cèdent en mars 1941, avec le consentement d’un Vichy seulement soucieux de sauver les apparences, moyennant quelques concessions mineures des Allemands (échange de la participation de 51 % dans la nouvelle société contre des actions de l’IG Farben, poste de PDG réservé à un Français avec parité au conseil d’administration). Après encore plus de six mois de discussions plus techniques, la convention finale est adoptée en novembre 1941 et la nouvelle société franco-allemande Francolor commence à fonctionner au 1er janvier 1942. Si sa direction reste française, les archives de l’IG Farben montrent que l’entreprise a en pratique largement fonctionné sous tutelle allemande, dans le cadre d’une collaboration étroite et, semble-t-il, harmonieuse entre des chimistes qui semblent s’apprécier. Si Francolor avait été conçue pour réserver la production française au marché intérieur, et assurer comme à l’époque du contrat Gallus la moitié des bénéfices aux Allemands, les nouveaux besoins de l’économie de guerre l’amènent à contribuer activement à la fabrication de produits intermédiaires stratégiques. Seule une pénurie récurrente de charbon empêche les usines d’avoir la productivité espérée par les deux parties7.
6À la Libération, la participation allemande majoritaire est mise sous séquestre et un administrateur provisoire est nommé par l’État. La confrontation avec l’industrie allemande n’est pas terminée pour autant. La France contrôle à nouveau l’usine IG Farben de Ludwigshafen située dans sa zone d’occupation, avec la volonté d’en faire durablement une grande entreprise chimique au service de l’industrie française8. En 1948, l’administration française de la BASF force les Allemands à conclure un contrat par lequel Francolor (toujours sous tutelle de l’État) devient l’agent commercial de la BASF pour toutes ses exportations de colorants et de produits intermédiaires. Mais, au cours des années suivantes, la situation se normalise. D’une part, en janvier 1951, la cour d’appel de Paris constate la nullité de la convention, « imposée par la violence », créant Francolor et ordonne la restitution des 51 % de l’IG Farben sous séquestre de l’État français au groupe Kuhlmann9. D’autre part, la France est obligée, à l’image de ce que font les autres alliés dans leur propre zone, de mettre un terme au statut d’exception de l’usine de Ludwigshafen et d’accepter en 1952 la reconstitution de la BASF comme société indépendante10, le projet d’y conserver durablement une participation nationale n’aboutissant pas faute d’engagement de l’industrie française11. Le contrat avec Francolor arrivant à échéance en mars 1953, la BASF recrée en novembre 1952 une filiale française chargée d’assurer ses ventes en métropole et dans l’Union française.
II. Trois phases d’une coopération franco-allemande étroite
A. 1927-1939
7Pendant cette période de fonctionnement des accords de cartel, que les Allemands ont présentés en 1940 comme contraints et forcés, les industriels des deux pays, avec ensuite leurs partenaires suisses et britanniques, se rencontrent régulièrement pour la régulation des échanges commerciaux internationaux. En tout, ce sont 53 réunions qui ont lieu entre 1928 et 1939, dont 18 à Paris, 13 à Paris, 9 à Bâle et 7 à Londres12. Elles durent généralement 3 ou 4 jours, une journée au moins étant consacrée à chaque cartel à 2, à 3 (avec les Suisses) et à 4 (avec les Britanniques). Ces réunions mobilisent les principaux dirigeants concernés de chaque groupe : du côté français notamment Joseph Frossard, directeur depuis 1919 de la Compagnie nationale des matières colorantes devenue la branche organique de Kuhlmann en 1924 et ses principaux collaborateurs, Georges Thesmar, directeur général (1919), administrateur délégué (1924) puis président délégué (1933) de Saint-Denis, Armand Roesler, patron de la société alsacienne de Mulhouse-Dornach également liée au groupe Kuhlmann ; du côté allemand, plusieurs membres du directoire de l’IG Farben en poste depuis la fusion, dont Georg von Schnitzler, responsable des ventes de colorants et de produits intermédiaires, son adjoint Hermann Waibel, et un temps même Fritz ter Meer, directeur technique très influent au sein du groupe13. Il existe une très forte continuité, les mêmes hommes restant souvent en place pendant toute la période. Les bouleversements politiques et diplomatiques intervenus à partir de 1933 ne transparaissent pas dans les comptes-rendus, qui se présentent sous la forme de relevés de décisions techniques d’où les conflits semblent absents. Les discussions portent seulement sur la répartition des débouchés commerciaux, toute dimension de coopération industrielle étant absente. On peut cependant s’interroger, comme le suggère la présence régulière entre 1932 et 1937 d’un chimiste comme F. ter Meer, si les discussions effectives ne portent effectivement, au cours de ces longues rencontres, que sur les sujets formellement rapportés.
B. 1940-1944
8Après un an et demi d’éloignement entre les 28-30 mars 1939 (dernières réunions des cartels) et les 21-22 novembre 1940 (rencontres de Wiesbaden), les mêmes hommes se retrouvent dans un autre contexte. Von Schnitzler, avec ter Meer et Waibel à ses côtés, mène la délégation allemande à Wiesbaden ; Frossard probablement déjà soupçonné de complaisance à l’égard des Allemands, est en revanche tenu à l’écart par le président de Kuhlmann René-Paul Duchemin, avec Thesmar à ses côtés, de la délégation française de Wiesbaden. Mais, face à l’intransigeance des Allemands, la position de Duchemin d’un maintien d’un statu quo des cartels s’avère irréaliste et Frossard revient vite dans le jeu. Il est présent à côté de Duchemin le 10 mars 1941 à Paris face à von Schnitzler et ter Meer pour donner son accord de principe à la création de Francolor. Et c’est à lui que bénéficie bien sûr la « concession » allemande de confier le poste de PDG à un Français ; Duchemin, Thesmar et Georges Desprets (ancien président de l’autre filiale Saint-Clair-du-Rhône et président de la Chambre syndicale des matières colorantes) siégent à ses côtés dans un conseil d’administration paritaire, face à von Schnitzler, Waibel, ter Meer et le nouveau venu Otto Ambros (membre du directoire de l’IG Farben depuis 1938, responsable technique de Ludwigshafen), sans grand pouvoir ; un comité technique et un comité commercial sous présidences allemandes assurent dans des séances préalables l’essentiel du suivi de la gestion. Si les Français se rendent peu en Allemagne (une seule visite de J. Frossard à Francfort à l’été 1942 relevée dans les archives14, à laquelle s’ajoute celle d’une délégation de techniciens français à Ludwigshafen en mars 194215), les dirigeants de l’IG Farben se déplacent très souvent à Paris, souvent pour des réunions qui se poursuivent pendant plusieurs jours : non seulement von Schnitzler, principal dirigeant concerné, vient au moins 12 fois entre janvier 1941 et avril 1944 pour rencontrer ses partenaires français, mais des hommes aussi occupés par ailleurs que ter Meer (entre janvier 1941 et avril 1943, avec 28 jours de présence attestée) ou Ambros (entre décembre 1941 et avril 1944) viennent à 10 reprises à Paris16 (cf. tableau 1), ce qui montre bien cette fois-ci l’intensité de la coopération technique entre Francolor et l’IG Farben. Là encore, il est probable que ces visites ont d’autres enjeux plus importants que la trace qu’en laissent les comptes-rendus notamment des réunions du comité technique, la contribution de Francolor aux résultats du géant IG Farben apparaissant bien modeste17. F. ter Meer et O. Ambros profitent d’ailleurs souvent de leur présence à Paris pour discuter d’autres projets industriels, comme la construction dans la région Rhône-Alpes d’une usine de caoutchouc synthétique (Buna) en partenariat avec Rhône-Poulenc et Ugine. Cette présence régulière au plus haut niveau est complétée par la présence permanente à Paris de Hans Kramer, directeur de la filiale de vente de l’IG Farben en France, la Société pour l’importation de matières colorantes et de produits chimiques (SOPI), qui occupait déjà ce poste avant 1937 et qui est un interlocuteur privilégié de J. Frossard et de son équipe. Du côté de la production, le président du comité technique, Berthold Wenk, patron de la fabrication des colorants à l’usine de Leverkusen, vient également souvent en France, pour des séjours plus longs, préparer les réunions. Après que la réunion du conseil d’administration prévue le 12 juillet 1944 ait été annulée, il est le dernier représentant de l’IG Farben à se rendre à Paris, du 17 au 24 juillet : il raconte à ses collègues que, s’il est accueilli « poliment et plutôt cordialement » par ses homologues français, ceux-ci se montrent « nettement plus réservés qu’auparavant18 ». Le temps n’est plus à la collaboration harmonieuse…
C. 1945-…
9L’occupation française de l’usine de Ludwigshafen amène une nouvelle coopération étroite entre Français et Allemands. L’administration française de la BASF, composée pour une bonne part de fonctionnaires qui ne sont pas des chimistes de métier, s’appuie largement sur la direction en place de la BASF pour faire tourner l’usine. Des réunions techniques mixtes se tiennent à un rythme au moins hebdomadaire pendant plusieurs années à Ludwigshafen. L’accord commercial entre la BASF et Francolor de 1948 oblige à un nouveau travail en commun. Les hommes n’ont que partiellement changé. Du côté français, le PDG Joseph Frossard est certes écarté en 1945 pour ne plus revenir19 et l’entreprise est confiée par le ministère de la Production industrielle à un administrateur provisoire, Jacques Piette (-Esnault). Mais cet ancien résistant militant socialiste de 28 ans20, qui n’a pas de connaissance particulière de la branche, doit nécessairement s’appuyer sur les spécialistes en place pour gérer l’entreprise ; il exerce par ailleurs de septembre 1944 à 1946 les importantes fonctions de secrétaire général du Commerce et de l’Administration économique au ministère avant d’être intégré au corps des inspecteurs généraux de l’Économie nationale21. C’est toujours l’ancienne équipe de Frossard qui est aux commandes : si le directeur administratif Jacques de Kap Herr décède dès 1946, Louis Frossard, frère cadet de Joseph, et Marcel François restent respectivement en place comme directeur technique et directeur commercial. Du côté allemand, Waibel est décédé en février 1945 et von Schnitzler et ter Meer, immédiatement arrêtés par les Américains, ont été condamnés en 1948 lors du procès IG Farben à Nuremberg des chefs d’accusation de « pillage et vol », notamment dans l’affaire Francolor, à respectivement 4 et 7 ans de prison22. Mais les Français s’efforcent aussi longtemps que possible de garder Ambros et Carl Wurster, directeur de l’usine de Ludwigshafen, à leurs côtés. Ce n’est qu’après de fortes pressions américaines qu’ils acceptent de les livrer, le premier en février, le second en juillet 1947 juste avant le début du procès de Nuremberg23. Si Ambros, condamné à 8 ans de prison24 et libéré en 1952 seulement, ne revient plus à Ludwigshafen25, C. Wurster reprend son poste de directeur juste après son acquittement en juillet 1948. Par ailleurs, plusieurs des acteurs de second rang de la collaboration avec Francolor font de belles carrières dans l’après-guerre, en particulier chez Bayer, où les occupants anglais ont été particulièrement peu regardants. Ainsi, Hans Kramer, le représentant permanent d’IG Farben à Paris, devient le patron de la vente des fibres textiles en 1949 à Leverkusen avant d’entrer au directoire de Bayer en 1958, avec la responsabilité entre autres de la vente des colorants. Deux autres participants aux réunions du comité commercial de Francolor ont accédé au directoire de sociétés héritières (Nachfolgegesellschaften) : Helmut Borgwardt à Bayer également dès 1951, comme responsable des ventes des produits chimiques, et Julius Overhoff à BASF en 1955, comme responsable de l’ensemble des ventes. Le président de l’ancien comité technique Berthold Wenk reste après 1945 le patron de la production de colorants à Leverkusen et accède dès 1951 au directoire de Bayer. Il est remplacé à son poste en 1954 par Oskar Loehr, un autre participant à partir de 1942. Même si leur promotion résulte moins de leur engagement particulier en France sous l’Occupation que de la continuité globale dans les équipes dirigeantes de Leverkusen et de Ludwigshafen, force est de constater qu’ils n’ont pas été affectés par leur participation au « pillage » de l’industrie française des colorants pourtant établi par le tribunal de Nuremberg.
III. Des dirigeants français très liés à l’Allemagne
10Paradoxalement, les hommes qui ont construit dans l’entre-deux-guerres cette nouvelle industrie française des colorants qui irrite tant leurs concurrents d’outre-Rhin avant d’accepter, selon leur défense, pour sauver cette industrie, de collaborer activement pendant la guerre, sont très liés aux Allemands. La branche organique du groupe Kuhlmann est en effet largement tenue par des Alsaciens formés à l’école allemande. Outre les Roesler père et fils dirigeantspropriétaires de l’entreprise associée de Mulhouse, Joseph Frossard, né en 1879 à Thann (Haut-Rhin), est, comme eux, un ancien élève de l’École supérieure de Chimie de Mulhouse (promotion 1894). Son frère cadet Louis, né en 1886, directeur technique de Francolor, appartient à la promotion 1905. G. Thesmar, le patron de Saint-Denis, né en 1877 à Mulhouse, est de la promotion 1896 de la même école. Jacques de Kap Herr, adjoint administratif de Frossard, est aussi, semble-t-il, un Alsacien de la même génération.
11Ces hommes ont fait le choix de la France en 1914, refusant de s’engager dans l’armée du Reich. Les deux frères Frossard, Thesmar et quelques autres chimistes de l’École de Mulhouse n’avaient d’ailleurs jamais travaillé pour l’industrie allemande : jusqu’en 1914, avant de s’engager volontairement dans l’armée française où leurs compétences de chimiste sont rapidement exploitées, ils ont en commun d’avoir fait, dans le sillage d’une importante filière mulhousienne, carrière dans l’industrie de la teinturerie en Russie. J. Frossard a ainsi débuté en 1902 au laboratoire des Manufactures textiles Emil Zundel à Moscou, engagé par son aîné mulhousien Félix Binder, alors directeur technique de cet important établissement. Il est ensuite successivement sous-directeur en 1905 et directeur général technique de deux autres entreprises de la région moscovite avant de se voir confier en 1913 la direction technique d’un nouvel ensemble qui atteint 15 000 salariés. Louis Frossard a également rejoint son frère après sa sortie de l’école mulhousienne en 1908 alors aux usines textiles Konchine, où il se charge des activités d’impression26. Rentrés ensemble en août 1914 par Marseille, ils sont incorporés au 15e escadron du train des équipages, avant d’être détachés à la poudrerie de Saint-Chamas (Bouches-du-Rhône). En septembre 1915, ils sont mis à la disposition du gouvernement russe dans le cadre de la mission française chargée de réorganiser les usines chimiques de guerre ; ils s’occupent de fabrication d’explosifs et de gaz asphyxiants à la plus grande satisfaction de leurs supérieurs27. Revenus en France avec la mission en janvier 1918, ils sont affectés au Matériel chimique de guerre, dont Joseph est nommé chef adjoint. « Après l’armistice, [il] est chargé par Foch et Loucheur de contrôler toutes les usines allemandes de produits chimiques et de matières colorantes dans la zone française d’occupation28 », Louis participant aux mêmes missions. G. Thesmar, qui a travaillé pour la même entreprise Zundel de 1901 à 1914, a également été affecté après son retour en France à la poudrerie de Saint-Chamas avant de prendre en juin 1916 la direction de la fabrication de celle de Bassens (Gironde)29. Un autre mulhousien, René Hartmann (promotion 1899), s’est également engagé en 1908 pour l’entreprise Konchine, dont il est rapidement nommé sous-directeur. Resté en Russie au déclenchement de la guerre, il est promu directeur et « met ses connaissances techniques au service des fabrications de guerre comme adjoint à la mission militaire française des munitions30 ». Joseph Saas (promotion 1907) a travaillé également 5 ans à Moscou avant la guerre comme conseiller technique dans une grande usine textile31. Ernest A. Sack (promotion 1908), issu d’une famille alsacienne installée en Normandie, avait fait son service militaire en France en 1911 avant d’intégrer « en Russie une firme d’impressions sur étoffes » où il retrouve ses camarades mulhousiens32. Jean Niederhauser, né en 1876 à Mulhouse (promotion 1895), a, lui, travaillé un temps dans l’industrie allemande, notamment de 1905 à 1912 au département colorants de l’entreprise Cassella près de Francfort (intégrée ensuite à l’IG Farben) avant de rejoindre également Moscou comme vendeur.
12C’est après sa démobilisation comme militaire que J. Frossard est placé par l’État à la tête de la CNMC en 1919. Il fait largement appel à ses anciens camarades de Mulhouse avec qui il a travaillé en Russie pour constituer son équipe de chimistes. Son frère Louis prend la direction technique, après avoir, dans le cadre de ses missions dans les usines allemandes occupées, « assimilé les techniques de fabrication des matières colorantes dont il connaissait bien l’application sur textiles33 ». Saas participe à son retour de Russie à la création de l’usine d’Oissel, où il fait toute sa carrière jusqu’en 1954 comme responsable de la fabrication des colorants, et où Hartmann le rejoint dès 1921 comme directeur. Sack fait carrière dans le service technique central des ventes dont il devient bientôt le directeur. Niederhauser intègre quelques années plus tard le laboratoire d’applications de la nouvelle usine de Villers-Saint-Paul. Thesmar prend de son côté les commandes de l’entreprise de Saint-Denis.
13Ce réseau « mulhousien-russe » est complété par d’autres « Alsaciens ». De Kap Herr, qui a été lieutenant dans le même régiment que J. Frossard, le rejoint comme directeur administratif. Auguste Rhein, né à Strasbourg d’un père allemand en 1889, qui travaillait à la BASF jusqu’en 1919, est recruté par Francolor comme directeur commercial. Il est à ce titre un participant régulier aux réunions des cartels depuis 1928. À partir de 1936 siège à ses côtés Marcel François, né en 1900 et diplômé de l’école de chimie de Strasbourg.
14Cette équipe est toujours en place sous l’Occupation. Seul A. Rhein est récusé par les Allemands, moins pour « des raisons politiques que pour son manque de fiabilité personnelle », pour intégrer Francolor en 194234. Il n’est cependant pas écarté du groupe : il garde chez Kuhlmann la direction des ventes des produits de Francolor laissées d’après la convention constitutive aux maisons mères. C’est son adjoint M. François qui devient le directeur 31. Ibid., éd. 1958 commercial de Francolor. Les Allemands travaillent donc avec des hommes qu’ils connaissent bien et qui sont familiers de leur langue et de leur culture. La continuité se prolonge après la Libération. M. François est ainsi chargé, après son passage comme directeur des ventes à l’administration française de Ludwigshafen en 1948, de mettre en œuvre les contrats qui sont imposés à la BASF pour les ventes à l’exportation de ses colorants et produits intermédiaires par l’intermédiaire exclusif de Francolor35. Son action n’a visiblement pas déplu aux Allemands : en juillet 1952, à l’approche de l’échéance du contrat en mars 1953, il est recruté par la… BASF, entre-temps libérée de son administration française, pour prendre la direction de sa nouvelle représentation commerciale pour la France et l’Union française à Paris, Imaco SA, où il reste jusqu’à sa retraite en 196436. À ses côtés, ont notamment été recrutés par l’entreprise allemande un ancien fondé de pouvoir de Francolor en charge des produits auxiliaires de teinture (Louis Sauzay) et un ancien des Potasses de Mulhouse, de la 2e DB en Afrique du Nord et de l’administration française de la BASF (Maxime Quiquerez)37. Mais de tels parcours croisés entre les industries des deux pays ne sont plus dans l’Europe pacifiée et démocratique de l’après-guerre marqués de l’infamie de la trahison nationale ou de la collaboration…
15Après quatre décennies de perturbations politico-diplomatico-militaires, les relations entre les deux industries françaises et allemandes peuvent reprendre un cours largement privé, même si l’État, au moins du côté français, n’en est jamais complètement absent. Elles le font d’autant mieux que les relations entre ces chimistes qui partageaient le même attachement à leur métier n’avaient jamais, au-delà des tensions apparentes, cessé d’être cordiales, au prix il est vrai d’un certain aveuglement partagé de ces professionnels pour les implications politiques de leurs actions : la manière dont un Otto Ambros, directement impliqué dans l’exploitation de la main-d’œuvre concentrationnaire à Auschwitz, a été défendu par ses collègues français après 1945 en est une affligeante illustration.
Notes de bas de page
1 Sur l’échec de la production de fuchsine en France, voir Pierre Cayez, L’industrialisation lyonnaise au XIXe siècle, Du grand commerce à la grande industrie, thèse de l’université Lyon II, Service de reproduction des thèses, Université Lille III, 1979, tome II, p. 856-860.
2 Les usines allemandes en France assurent le simple finissage des matières ébauchées dans leurs maisons mères, ou le coupage des colorants concentrés ; Henri Le Wita, Vers la renaissance des matières colorantes. L’émancipation de l’industrie chimique en France, Paris, H. Dunod & Pinat, 1917, p. 17.
3 Jeffrey Allan Johnson, « Die Macht der Synthese (1900-1925) », dans Werner Abelshauser (dir.), Die BASF. Eine Unternehmensgeschichte, Munich, C. H. Beck, 2002, p. 195-196.
4 Les deux usines appartenant en propre à Kuhlmann, celles de Villers-Saint-Paul (Oise) et d’Oissel (Seine-Maritime), ont été construites après 1918, la seconde sur les installations d’une ancienne poudrerie nationale. L’usine de la Société des matières colorantes de Saint-Denis est l’héritière des Ets Poirrier et celle de l’autre filiale Compagnie française de produits chimiques et matières colorantes de Saint-Clair-du-Rhône (Isère) a été créée pendant la guerre.
5 Sur les revendications de l’IG Farben, voir la note transmise par l’IG Farben (von Schnitzler, Krüger) au ministère de l’Économie du Reich le 3 août 1940, NI-11252 (document des procès de Nuremberg, reproduction multiple, consultable dans diverses bibliothèques ou centres d’archives, en France collections partielles aux Archives nationales, série BB35, et au Centre de documentation juive contemporaine).
6 Sur l’histoire de ces négociations, notamment à partir des archives allemandes, voir Hervé Joly, « La conclusion d’un accord franco-allemand dans l’industrie des colorants en 1940-1941 : rapports de force et formes juridiques », dans Johannes Bär, Ralf Banken (dir.), Das Europa des « Dritten Reichs ». Recht, Wirtschaft, Besatzung, Francfort/Main, Vittorio Klostermann, 2005, p. 141-175. Voir également sur l’affaire Francolor : Alan S. Milward, The New order and the French economy, Oxford, Clarendon Press, 1970, p. 101 et suiv. ; Michel Margairaz, L’État, les finances et l’économie. Histoire d’une conversion. 1932-1952, Paris, Comité pour l’histoire économique et financière de la France, 1991, tome I, p. 637-651 ; Peter Hayes, « La stratégie industrielle de l’IG Farben en France occupée », Histoire, économie et société, nº 3, 1992, p. 493-514 ; Annie Lacroix-Riz, Industriels et banquiers sous l’Occupation. La collaboration économique avec le Reich et Vichy, Paris, A. Colin, 1999, notamment p. 276-281.
7 Sur le fonctionnement de Francolor sous domination allemande, voir Hervé Joly, « La contribution de l’industrie chimique française à l’effort de guerre allemand : le cas de Francolor », dans Stefan Martens, Maurice Vaïsse (dir.), Frankreich und Deutschland im Krieg. Okkupation, Kollaboration, Résistance (Nov. 1942-Herbst 1994), Bonn, Bouvier, 2000, p. 297-316.
8 Voir Marie-France Ludmann-Obier, Le Contrôle de l’industrie chimique en zone française d’occupation en Allemagne (1945-1949), thèse pour le doctorat en histoire contemporaine, université de Strasbourg 3, 1986, 358 p.
9 Voir le texte de l’arrêt du 8 janvier 1951, 3e chambre, Affaire Compagnie des Matières et autres c/Société Francolor, Archives BASF, B 4/1385.
10 Sur l’histoire de la dissolution de l’IG Farben et notamment de la reconstitution de la BASF, voir Raymond G. Stokes, Divide and Prosper : The Heirs of I. G. Farben under Allied Authority, 1945-1951, Berkeley, University of California Press, 1988, 290 p. ; du même, « Von der IG Farbenindustrie AG bis zur Neugründung der BASF (1925-1952) », dans Werner Abelshauser (dir.), Die BASF…, op. cit., p. 334-358.
11 Sur l’échec de ce projet, voir les documents contenus dans les archives privées de Simon Lazard, ancien vice-président de l’administration française de l’IG Farben en dissolution, maintenant déposées au Centre d’archives du monde du travail à Roubaix, fonds 2002044.
12 Inventaires établis à partir des comptes-rendus de réunions conservées aux archives de Hoechst à Francfort/Main, TEA-Büro IG Farben (dorénavant cité HA-TEA), 301 (Tea Nr 184) : D-F Kartell Niederschriften, 1928-39 ; 197 (Tea Nr 182) 3er Kartell, Niederschriften, 1929-1939 (avec les Suisses) et 299 (Tea Nr 181), 4er Kartell, Niederschriften, 1932-1939 (avec les Britanniques).
13 Sur les trajectoires des dirigeants de l’IG Farben, voir les biographies dans Jens-Ulrich Heine, Verstand und Schicksal. Die Männer der IG Farbenindustrie AG (1925-1945) in 161 Kurzbiographien, Weinheim, WCH, 1990.
14 Évoquée dans une lettre de ter Meer et von Schnitzler à Francolor datée du 1er septembre 1942, HA-TEA, Francolor 2850 : 1a Niederschriften.
15 Du 23 au 25 mars, en présence notamment de Louis Frossard, directeur technique de Francolor et frère de Joseph, et Henri Argant, ingénieur en chef responsable de la construction, voir programme et comptes-rendus dans idem.
16 D’après les différents comptes-rendus de réunions dans idem.
17 En 1942, pour le premier exercice, le chiffre d’affaires de Francolor serait de 582 millions de francs et le bénéfice distribuable de 48 millions, soit, au cours imposé sous l’Occupation, respectivement 29,1 et 2,4 millions (51 % étant susceptibles de revenir à l’actionnaire IG Farben) de Reichsmarks, à comparer aux 3 000 millions de chiffres d’affaires et aux 325 millions de RM de bénéfices réalisés la même année par l’ensemble du groupe allemand ; HA-TEA, Francolor 2849 : 1 et Gottfried Plumpe, Die IG Farbenindustrie AG. Wirtschaft, Technik, Politik 1904-1945, Berlin, Duncker & Humblot, p. 547 et 684.
18 Note de Wenk sur son séjour à Paris du 17 au 24 juillet, 25 juillet 1944 ; HA-TEA, Francolor 2851 : 7.
19 J. Frossard est sanctionné en juillet 1947 par la Commission nationale interprofessionnelle d’épuration (CNIE) d’une interdiction de conserver un poste de commandement dans les entreprises de produits chimiques ; Archives nationales (Arch. nat.), F12 9574, CNIE, dossier Kuhlmann Francolor. Il prend alors la fuite en Suisse avant même la clôture de l’instruction judiciaire qui le vise. Renvoyé devant la cour de justice de la Seine « pour intelligences avec une puissance étrangère en vue de favoriser les entreprises de cette puissance contre la France » par le ministère public, il est jugé par contumace et condamné à 10 ans de réclusion ; archives de la BASF, IG-Archiv A 866/20. Son dossier est alors transmis au tribunal militaire de Paris, qui prononce finalement son acquittement en 1951. Il reste toutefois en Suisse, malgré un refus de statut de réfugié politique ; dossier E 4320 (B) 1991/243/159 du ministère public suisse, Archives fédérales, Berne (informations transmises par Luc van Dongen, assistant à l’Université de Genève). Il y décède quatre ans plus tard en 1955 ; Nécrologie Annuaire de l’École supérieure de chimie de Mulhouse, éd. 1955.
20 Voir sa biographie de ce responsable de l’Organisation civile et militaire (OCM) sur le site de l’Ordre de la Libération, http://www.ordredelaliberation.fr/fr_compagnon/776.html. Cette biographie ne signale toutefois pas que, à côté de son engagement dans la Résistance dès septembre 1940, il a continué d’exercer des responsabilités dans l’organisation de l’économie sous Vichy : en 1941, il avait été nommé chef de service auprès du délégué général du Centre d’information interprofessionnel, organisme de documentation commun à l’ensemble des comités d’organisation ; voir notice dans le Répertoire nominatif des dossiers de personnel entré au ministère du Commerce avant 1945, établi par Christiane Douyère-Demeulenaère, Paris, Centre historique des archives nationales, 2001-2003, p. 295. Il occupe encore cette fonction en 1943 ; Annuaire SEF, Paris, Société d’éditions économiques et financières, 2e éd., 1943, p. 1173.
21 Après 1951, il est détaché du ministère au poste de PDG de la Société nationale de constructions aéronautiques du Nord avant d’être, de 1956 à 1958, député SFIO de l’Yonne. Proche de Guy Mollet, il poursuit sa carrière politique sous la Ve République comme maire de Hénin-Beaumont (Pas-de-Calais) avant d’exercer à nouveau des responsabilités dans l’administration économique après 1981 ; notice Who’s who in France, Paris, Jacques Laffite, 19e éd., 1987-1988.
22 Le premier est libéré dès 1949 ; âgé de 69 ans, il n’exerce plus de fonction officielle dans l’industrie chimique allemande. Le second, condamné également pour « esclavage », est libéré en 1952. Âgé alors de 68 ans, il effectue, une fois levée par le gouvernement fédéral l’interdiction pour les condamnés de Nuremberg de prendre un poste dans les sociétés issues de l’IG Farben, en 1955 un spectaculaire retour comme membre puis (1956) comme président du conseil de surveillance de Bayer.
23 Sur la résistance acharnée de l’administration française aux demandes de livraison des autorités américaines d’occupation, voir les dossiers Ambros et Wurster aux Archives de l’occupation française en Allemagne et Autriche, Colmar (Haut-Rhin), fonds CCFA, cabinet civil, Eco II 13, c. 129 d).
24 Jugé coupable également du chef d’« esclavage », il est en particulier condamné pour son implication dans l’usage criminel de détenus du camp de concentration d’Auschwitz comme maind’œuvre pour le chantier de l’usine voisine de Monovitz dont il supervise la construction.
25 Âgé de 51 ans seulement, Ambros devient, pour le compte notamment de l’industriel Friedrich Flick qu’il a connu en détention, une éminence grise du monde des affaires allemand, administrateur de plusieurs sociétés importantes.
26 Nécrologie Annuaire de l’École supérieure de chimie de Mulhouse, éd. 1973.
27 Dossiers militaires du Centre des archives de l’armement, Châtellerault, gisement 210.00.03.10.3, carton nº 358 (Joseph) et 210.00.03.10.6, carton nº 380 (Louis).
28 Selon la propre présentation de l’intéressé dans son dossier dans son mémoire en défense devant la CNIE, 25 janvier 1947, Arch. nat., F12 9574.
29 Nécrologie Annuaire de l’École supérieure de chimie de Mulhouse, éd. 1965.
30 Ibid., éd. 1953.
31 Ibid., éd. 1958
32 Ibid., éd. 1960.
33 Ibid., éd. 1973.
34 Déclaration de von Schnitzler relative aux Français ayant été en relation avec l’IG Farben, 14 septembre 1945, NI 2738.
35 Voir le texte des contrats et leur application dans Archives BASF, T 8 : Lieferverträge Farbstoffe/Zwischenprodukte Francolor/Imaco 1948-1965. Après l’arrêt de la cour d’appel de Paris ordonnant en janvier 1951 la mainlevée du séquestre sur les actions allemandes, Francolor repasse sous le contrôle du groupe Kuhlmann et est transformée en Compagnie française des matières colorantes.
36 Werner Abelshauser, « Die BASF seit der Neugründung von 1952 », dans du même (éd.), Die BASF…, op. cit., p. 462.
37 Sur l’activité de l’Imaco, voir Archives BASF, t 8 : Lieferverträge Farbstoffe/Zwischenprodukte Francolor/Imaco 1948-1965.
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L’économie, l’argent et les hommes
Ce livre est cité par
- Bilbao Zubiri, Irene. Carré, Anne-Laure. (2023) Giving a New Status to a Dyes Collection: A Contribution to the Chromotope Project. Heritage, 6. DOI: 10.3390/heritage6020117
L’économie, l’argent et les hommes
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