Les banques françaises et la Grande Guerre
Introduction générale
p. 1-15
Plan détaillé
Texte intégral
I. Contexte
1À l’occasion du centenaire de la première guerre mondiale, l’Institut de la gestion publique et du développement économique, en étroite collaboration avec son comité scientifique, le Comité pour l’histoire économique et financière de la France, a lancé un programme de sept manifestations scientifiques. La journée d’études du 20 janvier 2015 a été réalisée en partenariat avec l’Association française d’histoire économique et placée sous le patronage de M. Michel Sapin, ministre des Finances et des Comptes publics, et de M. Emmanuel Macron, ministre de l’Économie, de l’Industrie et du Numérique. Elle a été clôturée par M. Christian Eckert, secrétaire d’État au Budget. Elle a obtenu le label de la Mission du centenaire.
2Une exposition sur le thème des banques durant la Grande Guerre a été élaborée parallèlement par les services d’archives de BNP-Paribas, de Crédit agricole SA, des Caisses d’épargne, de HSBC France et de la Société générale, réunis au sein d’un groupe de travail de l’Association des archivistes français. Elle a en outre été réalisée avec le concours du service des Archives économiques et financières des ministères économiques et financiers et bénéficie également du label de la Mission du centenaire. Elle a été présentée pour la première fois en janvier-février 2015 dans le hall Pierre-Bérégovoy du ministère, avant d’être exposée dans divers lieux. Elle est organisée autour de quatre axes structurants : les outils du financement de la guerre en lien avec la politique gouvernementale de l’époque ; l’adaptation du métier de banquier en ces temps difficiles ; l’accompagnement social des personnels des banques, victimes directes ou collatérales du conflit ; enfin, les conséquences de la guerre sur le paysage bancaire national, sur la place des banques françaises dans le monde, sur le rôle des banques dans la reconstruction de l’économie et sur leurs relations avec l’État, qui construit ou conforte un monde bancaire parapublic.
3La rencontre scientifique, qui regroupa quelques-un(e)s des meilleur(e)s spécialistes de l’histoire bancaire, ainsi que cette exposition, qui allia les cinq principales banques françaises et le ministère des Finances, font figure d’union sacrée bancaire à l’occasion de ce centenaire. Néanmoins, toutes les institutions bancaires et financières ne sont pas évoquées dans ce volume. Pour soutenir l’effort de guerre, l’État s’appuya également sur les banques privées, mais aussi sur la Banque de France, la Caisse des dépôts et consignations et le Crédit foncier. La Banque de France, alors banque privée à réseau (avec succursales et bureaux auxiliaires) devint un acteur essentiel des emprunts publics. La Grande Guerre marque une étape importante dans l’histoire de la naissance d’une banque centrale française avec à sa charge la stabilité monétaire nationale et, en lien avec les autres banques centrales, celle du système financier international1. L’histoire de cette institution a été exposée en grande partie en novembre 2014 lors du colloque de la Mission historique de la Banque de France sur les banques centrales durant la guerre2. La Caisse des dépôts et consignations entre 1914 et 19183, pour sa part, a été étudiée par Philippe Verheyde et par Franziska Heimburger lors des deux premières journées, en 2014 et en 2015, du cycle d’études sur le ministère des Finances pendant la Grande Guerre4. Le Crédit foncier de France mériterait, lui, une étude spécifique récente5 dans le contexte des moratoires, dont celui sur les loyers, qui déprécie les biens immobiliers, et durant une période inflationniste. De plus, certains acteurs financiers, banques et compagnies d’assurances européennes, ont fait l’objet d’une demi-journée d’études organisée par l’Association européenne d’histoire bancaire le 12 juin 2014 à Zürich6. Enfin, sans prétendre répondre à toutes les questions posées dans cette introduction, cet ouvrage tend à combler certaines lacunes historiographiques7 persistantes depuis l’ouvrage d’André Théry8 de 1921, celui dirigé en 1940 par Henry Laufenburger9 et les travaux de Jean Bouvier des années 1960-197010. Il faudrait lire en parallèle tous ces travaux afin d’avoir une vision plus juste et plus complète d’un pan décisif de l’histoire financière du début du xxe siècle.
4Étudier, en parallèle et dans le temps long11, les destins des établissements financiers et de leur personnel permet de discerner les éléments de continuité et de rupture. Ces derniers semblent prédominants.
II. Ruptures
5Les répercussions de la première guerre mondiale bouleversent en effet à la fois les systèmes bancaires national et international, le financement de l’économie, les conditions de travail dans les banques, le métier bancaire, mais aussi le rapport des Français à leur argent. En premier lieu, ce moment de crise financière modifie durablement les relations entre les banques et l’État.
A. Les banques et l’État
6En 1914-1918, il appartient à l’État de sauvegarder l’épargne des Français, le système financier et donc les banques. Durant cette période, l’État collabore avec les banques, les surveille et crée des institutions financières.
7Dès les prémices du conflit, les banques sollicitent des moratoires (dépôts et effets de commerce notamment), redoutant la faillite. Ils sont vite assouplis et presque inutiles le calme revenu, celui sur les dépôts ayant cessé de fait le 31 décembre 1914 pour les grandes banques à réseau. Les moratoires sur les retraits, qui font suite aux runs bancaires avant et après la déclaration de guerre, empêchent peut-être les faillites bancaires, mais surtout apaisent les inquiétudes des banquiers plus que celles des épargnants. Par ailleurs, l’État – avec la Banque de France – tolère des monnaies de nécessité ou de substitution12, émises par des agences bancaires, des mairies ou encore des chambres de commerce afin de remplacer les billets de banque quand ils manquaient.
8En outre, si l’argent est le nerf de la guerre, les réseaux bancaires constituent le système nerveux de l’économie de guerre. La « défense de la patrie » passe par la sécurité, à l’arrière, des économies des épargnants et par le maintien d’un système bancaire rouage et huile de l’économie. Il apparaît ainsi une entente nécessaire, une complémentarité essentielle entre l’État et les banques afin d’obtenir la victoire. Il ne sera donc pas question que d’intérêts bancaires, mais plutôt, au sens large, d’intérêt général, d’intérêt national, d’intérêts communs. Octave (II) Homberg est l’incarnation de ces liens entre l’État et les banques. Secrétaire général de la Banque d’Indochine puis vice-président de la Banque de l’union parisienne, il devient attaché financier du gouvernement français à New York et est chargé de nombreuses négociations financières au nom du gouvernement français13. En ces temps de conflit – et de péril pour les dépôts et les affaires –, les banques ont besoin de l’État pour les protéger. L’État a de son côté besoin des banques pour attirer les capitaux nécessaires au financement des hostilités.
9Le placement des emprunts de guerre auprès du grand public – et le relais de propagande qu’il nécessite – symbolise le mieux cette coalition des intérêts privés et de l’intérêt public. Dans un contexte de disparition des opérations de crédit, toutes les banques, à des degrés variables, collaborent à la politique d’emprunts de l’État. Elles y souscrivent en leur nom. Pour le temps des souscriptions publiques, des mobilisés sont autorisés à retravailler dans leur banque pour aider aux opérations. Avec cette guerre, la mobilisation bancaire est totale. La sollicitation de l’épargne des Français est sans équivalent dans l’histoire14. Par exemple, au pavillon de Flore du Louvre, le ministère des Finances ouvre en 1915 un guichet de souscription aux émissions de la Défense nationale (et de la Loterie nationale). En outre, la grande diffusion dans la société française de la dette publique, qui atteint des montants inédits, rend solidaires les citoyens et l’État dans l’investissement en la victoire. Les banques deviennent alors les intermédiaires obligés de ce pacte à la vie à la mort entre les créanciers et le grand débiteur.
10Les banques participent de plusieurs autres manières à l’effort de guerre, par exemple en finançant un hôpital de guerre. Elles versent de l’or et prêtent à l’État des valeurs étrangères, lui permettant des achats en devises. Selon André Théry, les banques de France et d’Algérie consentirent des avances à l’État pour 25 milliards de francs15. Les banques créent des consortiums bancaires qui permettent le versement de crédits remboursables par des pays étrangers à la France. Elles continuent à soutenir les entreprises, notamment celles travaillant pour la Défense nationale16. Discrètement, les banques (la Banque de Paris et des Pays-Bas avec le Comptoir national d’escompte de Paris et le Crédit Lyonnais) aident au montage financier permettant l’approvisionnement alimentaire des populations françaises (mais aussi belges et hollandaises) dans les régions occupées17.
11Alors que les banques ne cessent d’innover, de son côté, l’État est en pleine redéfinition entre 1914 et 1918. Il devient producteur, armateur, transporteur, assureur, consommateur, commerçant, superviseur de toute l’économie et des banques. L’intervention financière de l’État revêt de multiples formes. Tout d’abord, le blocus financier des pays ennemis implique une surveillance des banques18. La Commission financière interministérielle19, qui devient la Commission interministérielle du blocus financier en novembre 1917, se réunit à partir de septembre 1916 et traite des relations financières avec l’étranger et des problèmes bancaires internationaux20. Pour faire respecter le blocus, elle est chargée de surveiller les opérations avec les pays neutres21 et d’établir les listes noires bancaires. L’État doit également éviter toute fuite des capitaux et instaure un certain contrôle des changes en collaboration avec les banques et la Banque de France22. Fin 1915 sont ajoutés les titres et les effets de commerce à la liste des contrebandes de guerre. Comment coopèrent concrètement la direction du Mouvement général des fonds, la Banque de France et les banques23 ? Quelles furent les conséquences du contrôle des changes sur les activités des banques commerciales et d’affaires ? Quelle est la réalité des contrôles sur les banques24 ? D’autres sujets importants ne seront ici qu’esquissés, par exemple les listes noires bancaires et les fraudes au blocus financier. Le contrôle étatique des banques ne dure que le temps de la guerre. En effet, cette dernière n’entraîne pas de réglementation nouvelle ou de création d’une commission de surveillance des banques25.
12L’intervention des pouvoirs publics dans le monde bancaire se traduit en outre, dès avant la fin de la guerre, par une exacerbation de la concurrence avec la création ou le renforcement de banques parapubliques. La loi du 13 mars 1917 réorganise ainsi les banques populaires en faveur du financement à court terme des PME commerciales et industrielles. Il s’agit de remédier à la crise des banques locales, dont certaines disparaissent face à la concurrence des grands réseaux bancaires nationaux, ces derniers ne reprenant pas toutes les activités des banques locales. Les banques populaires se développent avec le soutien de l’État (avances étatiques et exemptions fiscales nombreuses)26. L’État incite en outre au développement des banques mutualistes. Avec les banques de dépôt, ces dernières deviennent des banques universelles. En octobre 1918, les monts-de-piété sont réformés et les désormais Caisses de crédit municipal étendent leurs activités aux comptes de dépôt à vue. Le Crédit national pour faciliter la réparation des dommages causés par la guerre (Crédit national)27 est créé en 1919 (loi du 10 octobre) pour le financement à moyen et long terme des PME et de la reconstruction. La Banque nationale française du commerce extérieur apparaît peu après (loi du 23 octobre 1919). En 1920, l’Office national de crédit agricole devient un établissement public. Le mouvement se poursuit avec, par exemple, la création de la Caisse centrale du crédit hôtelier, commercial et industriel en 1923. Ces institutions nouvelles ou remaniées sont autant de concurrentes des banques à réseau et de certaines banques d’affaires.
13Durant le conflit, les rapports entre les banques et l’État ont fluctué entre une tutelle de fait et une collaboration bien comprise. Cette guerre a engendré un État banquier de l’économie et un ensemble d’institutions financières ad hoc sous tutelle directe ou sous dépendance de l’État. Les nouveaux types de liens qui se tissent entre l’État et les banques dureront jusqu’aux réformes bancaires des années 1980 (Patrice Baubeau). Enfin, dans le contexte actuel des secousses telluriques d’une crise bancaire et financière systémique, il est intéressant de tenter de dresser un parallèle entre la séquence ouverte en 1914 et la crise commencée en 2007. Dans les deux cas, il s’agit de la chronique d’une catastrophe évitée grâce à l’intervention publique dans les affaires des banques privées déjà « too big to fail ».
B. La « politique extérieure » bancaire
14Ce conflit provoque la fin d’une mondialisation financière avancée, qui n’atteindra à nouveau un tel niveau d’interdépendance que dans les années 1990. Les prises de position des banques françaises à l’international, avant-guerre outils diplomatiques efficaces, sont désormais considérées comme des investissements périlleux. Les stratégies bancaires sont réorientées en fonction de la perte de certains marchés en Europe de l’Est et en Russie. On le voit dans ce volume, certains changements de stratégie d’alliance et d’expansion datent d’avant-guerre et sont poursuivis après-guerre. Cependant, de nouvelles opportunités en termes d’investissement apparaissent durant la guerre et sont exploitées après elle. La saisie par la France de biens économiques allemands attire par exemple les capitaux français et les banques. On pourra par ailleurs s’interroger sur l’influence des activités des banques en Europe sur celles des banques françaises. Sont-elles connues ? Inspirent-elles des initiatives, de nouveaux produits et services ? Les méthodes américaines sont-elles reprises par des banques en France ? Comment évoluent les relations avec les banques américaines avant et après 191728 ?
15En 1918, la puissance d’intervention financière de la France dans le monde est très amoindrie. La place des banques françaises dans le monde est, pour des décennies, en retrait de sa position d’avant-guerre (Michel Lescure). Les banques pendant et après le conflit se sont « retranchées » sur le marché national.
C. Les stratégies de développement national
16Au niveau national, y a-t-il un « business as usual » entre 1914 et 191829 ? Quels furent les effets de la suspension des échanges boursiers pour les banques30 ? Existe-t-il toujours une concurrence interbancaire, notamment lors des souscriptions publiques ? La Grande Guerre fut-elle grande pour les banques ? Existe-t-il une sale guerre bancaire ? La guerre interroge les conditions de survie des établissements. Ainsi, pour reprendre la thématique du colloque international organisé à l’occasion des 150 ans de la Société générale, pourquoi certaines banques survivent-elles à la guerre et pas d’autres31 ?
17Ce livre présente des destins et des évolutions bancaires très contrastés. Alors que la Société générale se recentre sur les activités nationales (Hubert Bonin), Paribas se tourne résolument vers les États-Unis et se renforce en Europe centrale (Éric Bussière). Une autre banque parisienne (CIC) s’offre une expansion régionale dans la continuité de l’avant-guerre (Nicolas Stoskopf). Certaines banques du Nord se régénèrent à Paris, développent un réseau national (Jean-Luc Mastin) et sortent de la guerre renforcées, malgré les nombreuses vicissitudes de l’occupation allemande32. Les banques alsaciennes, elles, souffrent cruellement lors du conflit puis pendant le rattachement de l’Alsace-Moselle à la France (Michel Siegel).
18La guerre a en effet affecté tous les types de banques : banques à réseau national et banques locales, banques privées ou sous tutelle de l’État, banques d’affaires et banques de détail, dont les distinctions tendaient à s’effacer avant-guerre33. La première guerre mondiale a impliqué des adaptations et des reconfigurations stratégiques et économiques pour l’ensemble des banques présentes dans les affaires capitalistiques internationales. Le premier conflit mondial marque en France une pause dans le mouvement de concentration bancaire (sauf pour les banques secondaires). Cette guerre a remodelé les paysages bancaires français et international ; elle a également bouleversé le financement de l’économie34.
D. Le financement de l’économie
19Aux côtés de l’État, des citoyens et des banques, les entreprises représentent le quatrième acteur de l’économie de guerre. La Grande Guerre a nécessité de repenser leurs modalités de financement (mais aussi la comptabilité et les finances publiques35 ainsi que les théories économiques36). Il s’agit de comprendre comment les banques ont évolué, sous la contrainte et en temps de crise, vers un nouveau rôle économique et financier37. Même si l’État n’a pas à sauver la bourse38, comme le Treasury au Royaume-Uni au début d’août 1914, le marché boursier des capitaux demeure durablement atone39. À partir de ce conflit, les grandes entreprises comptent de moins en moins sur le marché boursier, qui continue à financer l’État40, et se tournent vers les banques pour leurs emprunts à moyen et à long terme. Alors que des secteurs sont sinistrés après l’entrée en guerre, d’autres – le secteur de l’armement en particulier – nécessitent beaucoup de capitaux, qui sont prêtés par les banques aux industriels41. Les petites entreprises souffrent, elles, d’un accès restreint au marché comme aux banques. Constate-t-on, durant ces années de guerre et d’après-guerre, une progression de l’autofinancement des entreprises42 ? Tout comme les budgets de l’État, les bilans des banques sont durablement déséquilibrés. Après 1918, les banques n’investissent pas massivement dans les entreprises, qui doivent chercher d’autres voies de crédit43. Le conflit affaiblit le poids des banques dans le financement de l’économie (É. Bussière, M. Lescure).
20Les contributions de ce volume examinent également la question du vécu d’entreprises privées (les banques) ainsi que celui d’hommes et de femmes de l’arrière.
E. Le métier bancaire
21En premier lieu, les banques s’étaient-elles préparées à un conflit mondial, à des paniques des déposants, à une guerre longue ? En outre, quelles furent les évolutions significatives entre « les mises en guerre44 » des banques et le dénouement de ce conflit inimaginable ? Ainsi, l’introduction du chèque en fin en conflit mais surtout la gestion de la masse des papiers obligataires de la Défense nationale, sous toutes ses formes (souscriptions à enregistrer, titres à échanger, bons à trier, coupons à distribuer…), engendrent une mécanisation nouvelle. Dans le même temps, les conditions de travail se dégradent. Si les banques sont des artisanes de la victoire, elles sont aussi des victimes de la guerre. Les sièges sociaux sont délocalisés à l’approche des armées ennemies45. Les réseaux d’agences sont bouleversés, et pas seulement dans les départements occupés du Nord de la France (destruction ou réquisition d’agences, rupture des communications, pénurie de papier et de personnel…). Plusieurs milliers d’employés travaillent dans les banques des zones occupées46. Les pertes au front et les absents mobilisés, des employés jusqu’aux cadres, entraînent une pénurie de main-d’œuvre et des pertes de compétences favorisant un renouvellement des personnels, y compris dirigeants. Parallèlement, l’accroissement des opérations de manutention oblige les directeurs bancaires à embaucher massivement des auxiliaires, féminins le plus souvent. La féminisation des postes, qui débute avant la guerre, s’amplifie47. Les questions des salaires et du temps de travail provoquent la grève des employé(e)s bancaires de 1917. Enfin, la guerre a engendré une nouvelle politique sociale dans les établissements financiers (Cécile Omnès)48, qui consiste en des aides diverses, non limitées aux personnels bancaires, en direction des femmes de mobilisés, des veuves, des réfugiés des régions envahies… Les employé(e)s de banque ont les mêmes problèmes d’argent que leurs client(e)s.
F. Les banques, les Français et leur argent
22Dans l’histoire du rapport des Français à l’argent, qui reste largement à écrire, la guerre impose de nouvelles relations entre les banques et leur clientèle. Il faut prendre en compte les innombrables problèmes pécuniaires des particuliers dus au conflit (en particulier aux moratoires), notamment sur les loyers, qui pénalisent les propriétaires, mais également dus à la perte de ressources pour les familles que représente la mobilisation des hommes. Parallèlement, sous l’impulsion étatique, la bancarisation des Français – qui devra être étudiée dans le détail et sur le temps long – s’est développée avec, par exemple, la création des comptes postaux en 1917 ou celle des chèques postaux en 1918. Cette journée d’études a en outre pointé la nécessité d’analyser une culture financière de guerre spécifique49.
23En effet, alors que le financement de la guerre50 par les Français passe en grande partie par les banques, la guerre a permis à nombre d’entre eux d’avoir accès, pour la première fois, aux produits financiers que sont les obligations d’État. L’endettement de l’État devient l’affaire de tous et pose in fine la question des confiances : la confiance des clients dans leur banque, la confiance des banques en l’État, la confiance de l’État en ses citoyens prêteurs. La large base des emprunteurs en France est-elle la conséquence d’une mobilisation efficace des agences commerciales sur le territoire ? Quels furent les termes du discours des banquiers à leur clientèle ? Le ton patriotique, parfois en langue locale, joint aux connaissances interpersonnelles constitue sans doute des outils très efficaces en faveur de cette « geste civique », étudiée par Nicolas Delalande51, qu’accompagnent le versement de l’or ou l’achat de titres de la Défense nationale. Les banques ont mobilisé l’arrière, et pas qu’avec des affiches percutantes52. Pourquoi le Commissariat national à l’emprunt est-il créé si tard (1918) ? Doit-on y voir une conséquence du succès jusqu’à cette date des banques françaises pour mobiliser l’épargne ? Les banques ont-elles bien mérité de la patrie, en raison de leur rôle d’intermédiation patriotique ? La guerre a-t-elle changé l’image des banques ? Une étude des représentations des institutions financières dans la littérature et la presse avant et après la guerre serait utile.
24Ces quatre années de guerre ont modifié l’argent des Français. Physiquement, leur monnaie change (on pense par exemple aux monnaies de nécessité et au développement du chèque). Le franc germinal est tombé au front, la dépréciation du cours du franc est inexorable. De son côté, leur or, devenu rare, n’est plus la référence absolue jusqu’au franc Poincaré. Enfin, leur épargne (Vincent Tournié) est un temps mise en péril par les runs, puis placée sous séquestre, et enfin rognée par une inflation qui deviendra un mal – ou un bien – récurrent du xxe siècle.
25La première guerre mondiale constitue donc, à plus d’un titre, un moment charnière dans l’histoire bancaire et financière.
III. Articulations
26La première partie de cet ouvrage traite des client(e)s et des employé(e)s de banques. En préalable nécessaire, deux études de cas rappellent que ce sont des hommes et des femmes qui font les chiffres des bilans.
27Afin de situer le rôle des établissements financiers dans le mécanisme de l’emprunt public et du financement des entreprises cotées, Laure Quennouëlle-Corre, qui présidait une demi-journée, dresse ensuite un bilan de l’activité des banques sur le marché boursier avant, pendant et après la guerre53. Elle présente ainsi une introduction synthétique indispensable à la compréhension de la deuxième partie, qui s’intéresse aux activités bancaires en temps de guerre.
28La troisième partie aborde des situations bancaires régionales en crise (Nord occupé, Alsace et Moselle) et le cas d’une banque parisienne en développement en province. Avec un exposé problématisé du paysage bancaire français, André Gueslin offre une analyse transversale de l’évolution des banques régionales et de la place des banques françaises dans le monde. Celui qui fut président de l’autre demi-journée examine ainsi les conséquences de la guerre sur les relations banques-État, sur le financement de l’économie, sur la structure des banques ainsi que le nouveau système bancaire français issu de la guerre. Ce texte constitue une transition entre la troisième et la quatrième partie.
29Cette dernière rassemble des approches macrobancaires étudiant l’équilibre institutionnel français et le poids des banques dans le financement de l’économie sur le long terme.
30En conclusion, Nicolas Offenstadt évalue l’importance de l’histoire des banques dans l’historiographie de la Grande Guerre, propose différentes échelles d’analyse géographiques possibles et questionne, à l’aune de l’histoire bancaire, les scansions et les bornes chronologiques du conflit.
31Un cahier iconographique, composé de documents présentés lors de l’exposition sur les banques et la Grande Guerre, accompagne les propos des scientifiques54.
32Enfin, reflet fidèle des travaux de la journée d’études, ce volume fait apparaître certaines divergences d’appréciation et de chiffrage55 en fonction des sources utilisées, des sujets abordés ou des prismes assumés. Ceci met en évidence le fait que la matière est riche, diverse et encore largement à explorer56. En conséquence, pour inciter aux recherches sur la période en histoire bancaire et financière, sont présentés en annexe des états des sources relatives au conflit de 1914-1918 conservées par chacun des services d’archives bancaires précités et par celui des ministères économiques et financiers.
33Les articles réunis ici dépeignent un monde bancaire mal préparé à une guerre. À l’approche de l’ouragan, le vent de panique qui pousse les épargnants à retirer leur argent fait trembler des banques craintives. Été 1914, les banques entrent dans la tourmente.
Notes de bas de page
1 Voir la communication d’Olivier Feiertag lors du colloque « Les banques centrales dans la Grande Guerre » : « La Banque de France et la Reichsbank face aux règlements financiers internationaux pendant la première guerre mondiale : l’adieu à l’étalon-or », à paraître en 2016 dans Les banques centrales dans la Grande Guerre, Olivier Feiertag et Michel Margairaz (dir.), Paris, Presses de Sciences Po.
2 « Les banques centrales dans la Grande Guerre », Mission historique de la Banque de France, 13‑14 novembre 2014.
3 Voir sur le second conflit mondial : Alya Aglan, Michel Margairaz et Philippe Verheyde (dir.), La Caisse des dépôts et consignations, la seconde guerre mondiale et le xxe siècle, Paris, Albin Michel, 2003, 670 p.
4 Philippe Verheyde, « La Caisse des dépôts et consignations dans la Grande Guerre. L’indispensable relais et soutien financier à l’État : inversion ou inflexion ? », dans La mobilisation financière pendant la Grande Guerre. Le front financier, un troisième front, Florence Descamps et Laure Quennouëlle-Corre (dir.), Paris, IGPDE/Comité pour l’histoire économique et financière de la France, 2015, p. 153‑173, http://0-books-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/igpde/4117 ; Franziska Heimburger, « La Caisse des dépôts et consignations dans la guerre », communication à la journée d’études « Les Finances, un ministère en guerre, un ministère dans la guerre (1914‑1918). Finances publiques en temps de guerre. Déstabilisation et recomposition des pouvoirs », 27 mars 2015, Ministères économiques et financiers, actes à paraître aux éditions du Comité pour l’histoire économique et financière de la France en 2016.
5 Pierre Allinne, Le Crédit foncier de France. 1852‑1920, doctorat d’État, droit, sous la direction de Robert Besnier, université Paris 2 Panthéon-Assas, 1978 ; idem, Banques et bâtisseurs. Un siècle de Crédit foncier, 1852‑1940, Paris, CNRS Éditions, 1984, 243 p. ; Pierre Champion, Le Crédit foncier de France, Paris, Les Éditions de l’Épargne, 1966, 60 p. ; Michel Lescure, « La stratégie internationale du Crédit foncier de France (1852‑1914) », Sonderdruck aus Bankhistorisches Archiv, Zeitschrift zur Bankengeschichte, décembre 1983 ; Aline Raimbault et Henri Heugas-Darraspen (dir.), Crédit foncier de France. Itinéraire d’une institution, Paris, Crédit foncier de France-Éditions du Regard, 1994, 282 p.
6 « Banks at War I. Financial Institutions confronted by the Great War », Rüschlikon (Suisse), 12‑13 juin 2004, EABH (European Association for Banking and Financial History)/Swiss Re, www.eabh.info/fileadmin/pdf/news/banksatwar_programme.pdf et https://www.youtube.com/watch?v=5UQQYO17_9U.
7 Ainsi, lors des deux journées d’études (« Financer la guerre et les opérations. Perspectives historiques », 14 juin 2004, et « Le financement des guerres et des opérations : une perspective historique », 5 mai 2006) organisées par le Centre d’études d’histoire de la Défense, École militaire, la question de la première guerre mondiale n’a pas été abordée.
8 L’ouvrage (Les grands établissements de crédit français, avant, pendant et après la guerre, Paris, Sagot, 1921, 324 p.) d’André Théry, fils d’Edmond, directeur de banque, n’utilise que les bilans et les assemblées générales des actionnaires des quatre ou cinq principales banques de dépôt de l’époque.
9 Henry Laufenburger (dir.), Enquête sur les changements de structure du crédit et de la banque. 1914‑1938. I. Les banques françaises, Paris, Librairie du Recueil Sirey, 1940, 411 p.
10 Notamment Les Rothschild, Paris, Le Club français du livre, 1960, 353 p. (rééd. Bruxelles, Complexe, 1992, 343 p.) ; Un siècle de banque française. Les contraintes de l’État et les incertitudes des marchés, Paris, Hachette, 1973, 283 p. ; Naissance du Crédit Lyonnais, Paris, Flammarion, 1968, 383 p.
11 Voir, dans cette perspective, « Monetary and Financial Structures: The Impact of Political Unrests and Wars », colloque organisé par les laboratoires EconomiX et IDHE, université Paris Ouest Nanterre La Défense, 19‑20 juin 2008 (resté inédit). Sur les raisons du maintien de l’activité de certaines banques étrangères durant plusieurs décennies, voir les communications du colloque pour les 150 ans de la Société générale, notamment celles de Richard Sylla, « The oldest US banks : strategies for reaching a third century », de Youssef Cassis, « La longévité des banques commerciales et des merchant banks anglaises : Barclays, Lloyds, Rothschild », et de Malik Mazbouri, « La longévité des banques suisses ». Lire aussi de ce dernier Crises and Opportunities, 1890‑2010 : The Shaping of Modern Finance, Oxford, Oxford University Press, 2011, 200 p., ainsi que « La place financière suisse et les crédits aux belligérants durant la première guerre mondiale », dans La Suisse et les grandes puissances, 1914‑1945. Relations économiques avec les États-Unis, la Grande-Bretagne, l’Allemagne et la France, Sébastien Guex (dir.), Genève, Droz, 1999, p. 59‑90. Sur l’impact des crises sur les saving banks européennes (Italie, Royaume-Uni, Allemagne, Suède, Espagne, France), voir la journée d’études organisée par l’European Savings Banks Group (ESBG) et la Fédération nationale des Caisses d’épargne, « Aftermath of crises. Savings and savings banks : Elements of stability in times of crisis ? », Paris, 31 mai 2013, actes publiés dans Perspectives, nº 66, décembre 2013, 139 p., http://www.savings-banks.com/press/perspectives/. Enfin, pour l’épargne en France sur la longue durée, voir Vincent Tournié, Épargne et crises politiques en France : les mouvements de panique dans les Caisses d’épargne au xxe siècle, Paris, Economica, 2011, 329 p.
12 Jean-François Eck et Béatrice Touchelay, « La Banque de France face aux monnaies de nécessité émises en 1914‑1918 : le cas du nord de la France occupé », communication au colloque « Les banques centrales dans la Grande Guerre », 13‑14 novembre 2014, Mission historique de la Banque de France, actes à paraître en 2016 aux Presses de Sciences Po ; Clotilde Druelle-Korn, « Le ministère du Commerce au secours de la circulation monétaire pendant la Grande Guerre : monnaies de nécessité consulaires et chèques postaux », dans La mobilisation financière…, F. Descamps et L. Quennouëlle-Corre (dir.), op. cit., p. 175‑196.
13 Octave Homberg, Les coulisses de l’histoire. Souvenirs 1898‑1928, Paris, Arthème Fayard, 1938, 287 p.
14 Sur les méthodes anglaises de mobilisation de l’épargne, voir Michael Moss, « The war savings campaign in Great Britain : the birth of a modern saving policy », dans La mobilisation financière…, F. Descamps et L. Quennouëlle-Corre (dir.), op. cit., p. 227‑261. Sur la situation en Allemagne, voir Gerd Hardach, « Financial Mobilisation in Germany 1914‑1918 », EABH Papers, nº 14‑08, septembre 2014, http://0-hdl-handle-net.catalogue.libraries.london.ac.uk/10419/102661.
15 A. Théry, Les grands établissements de crédit français…, op. cit., p. 189.
16 L’exemple de la Société générale est traité par Hubert Bonin, « Le soutien de l’effort de guerre des entreprises par les banques françaises en 1914‑1918 », numéro thématique de la Revue d’économie financière, Bertrand Blancheton (dir.), à paraître.
17 Voir Clotilde Druelle-Korn, « Le financement du ravitaillement des territoires français occupés pendant la Grande Guerre 1914‑1920 », communication à la journée d’études « Finances publiques en temps de guerre. Déstabilisation et recomposition des pouvoirs », 27 mars 2015, Ministères économiques et financiers, actes à paraître aux éditions du Comité pour l’histoire économique et financière de la France en 2016.
18 Sur cette question, voir les archives 7N 892‑893, 7N 960‑962, 7N 964 et 7N 966 de la section de Contrôle, devenue la Section économique de l’état-major de l’armée, au Service historique de la Défense (SHD).
19 Octave II Homberg en est également membre à partir de septembre 1916. Jean Tannery y représente le ministère de la Guerre jusqu’en octobre 1918. Il est chef de la section de Contrôle du cabinet du ministre de la Guerre depuis sa création en février 1915. Cellule de renseignement économique, rattachée au 5e bureau en décembre 1915, elle devient la Section économique de l’état-major de l’armée en février 1917.
20 Voir les procès-verbaux (1916‑1918) conservés au SHD sous les cotes 7N 886, 7N 887 et 7N 967.
21 Voir notamment au SHD 7N 968, Blocus financier des neutres.
22 Le 1er juillet 1915 a lieu à la Banque de France une réunion de banques (avec Charles Sergent, sous-gouverneur de la Banque de France, Rothschild, de Neuflize, Mallet, Hottinguer et Davillier) pour examiner la possibilité d’un bureau de change contrôlant les échanges avec l’étranger (proposition du ministre des Finances Alexandre Ribot). Les banquiers refusent mais s’engagent à contrôler les mouvements de capitaux à l’export, la Banque de France devant fournir des devises aux banques qui le souhaitent et stabiliser le franc. Ce compromis tiendra jusqu’à la fin de la guerre (Martin Horn, Britain, France, and the Financing of the First World War, Montréal-Ithaca, McGill-Queen’s University Press, 2002, p. 98‑99).
23 La communication de Michel Margairaz lors du colloque « Les banques centrales dans la Grande Guerre » y répond en partie : « La crise bancaire et de l’épargne en 1914 et sa postérité : l’impact de la Grande Guerre sur la Banque de France, les banques et le système financier », dans Les banques centrales dans la Grande Guerre, O. Feiertag et M. Margairaz (dir.), op. cit., à paraître.
24 D’une manière générale, sur la question de la surveillance des banques, l’historiographie demeure lacunaire.
25 La première structure de surveillance des banques date du régime de Vichy en 1941 avec la Commission de contrôle des banques, à l’exception de la Commission de surveillance des banques coloniales, créée en 1851 et qui perdure jusqu’en 1952.
26 Alain Plessis, « Les banques populaires et les banques locales en France entre les deux guerres », dans Banques locales et banques régionales en Europe au xxe siècle, Michel Lescure et Alain Plessis (dir.), Paris, Albin Michel, 2004, p. 252‑277. Sur les banques populaires, voir aussi Élisabeth Albert, Les banques populaires en France. 1917‑1973, Paris, Economica, 1997, 481 p., et idem, Les banques populaires en France. 1878‑2008, Paris, Eyrolles-Éditions d’Organisation, 2008, 301 p.
27 Patrice Baubeau, Arnaud Lavit d’Hautefort et Michel Lescure, Le Crédit national. Histoire publique d’une société privée, Paris, J.-C. Lattès, 1994, 320 p.
28 Sur JP Morgan, voir « Disrupting the balance : The Great War », dans Susie J. Pak, Gentlemen Bankers. The World of JP Morgan, Harvard, Harvard University Press, 2013, p. 107‑136, et Martin Horn, « A private bank at war : JP Morgan & Co. and France, 1914‑1918 », The Business History Review, vol. 74, nº 1, printemps 2000, p. 85‑112.
29 Voir dans A. Théry, Les grands établissements de crédit français…, op. cit., p. 196‑198, les tableaux des bilans des principales banques de dépôt.
30 Voir la contribution de Laure Quennouëlle-Corre dans ce volume.
31 « Stratégies, structures et performances des grandes banques. Pourquoi certaines banques durent-elles ? », Mission Histoire Société générale, 9‑10 octobre 2014, La Défense, Paris.
32 Sur une situation similaire, voir le cas de la Société générale de Belgique dans Pierre Tilly et Pascal Deloge, « Milieux économiques belges et occupation allemande de 1914 à 1918 : une stratégie du moindre mal », Entreprises et histoire, 2012, nº 68, p. 11‑27.
33 Sur les distinctions – un peu arbitraires – entre banques de dépôt et banques d’affaires, voir la mise au point dans l’introduction de A. Théry, Les grands établissements de crédit français…,
op. cit., ainsi que Jean Bouvier, Un siècle de banque française, Paris, Hachette, 1973.
34 Rares sont les ouvrages qui traitent directement du financement des entreprises durant la période 1914‑1918. Cf. Laure Quennouëlle-Corre et André Straus (dir.), Financer les entreprises face aux mutations économiques du xxe siècle, Paris, IGPDE/Comité pour l’histoire économique et financière de la France, 2009, 420 p. ; Yves Froidevaux, Philippe Marguerat et Laurent Tissot (dir.), Banques et entreprises industrielles en Europe de l’Ouest, xixe‑xxe siècles : aspects nationaux et régionaux, Genève, Droz, 2000, actes du colloque « Le financement bancaire de l’entreprise » organisé par l’institut d’histoire de l’université de Neuchâtel, 27‑28 octobre 1997 ; M. Lescure et A. Plessis (dir.), Banques locales et banques régionales en Europe au xxe siècle, op. cit.
35 Warwick Funnel et Stephen P. Walker (dir.), Accounting and the First World War, Accounting History Review, numéro spécial 2‑3, novembre 2014.
36 Chris Godden (dir.), Economics in the Shadow of the First World War, Oeconomica, numéro spécial, à paraître en 2016.
37 Pour la période précédente, voir Forrest H. Capie et Michael Collins, « Banks, industry and finance, 1880‑1914 », Business History, vol. 41, nº 1, 1999, p. 37‑62.
38 La bourse de Londres ferme le vendredi 31 juillet, notamment en raison de l’instauration, la veille, d’un moratoire des paiements en France. Richard Roberts, Saving the City. The Great Financial Crisis of 1914, Oxford, Oxford University Press, 2013, p. 17‑21.
39 Pierre-Cyrille Hautcœur, Le marché boursier et le financement des entreprises françaises (1890‑1939), doctorat, sciences économiques, sous la direction de Christian de Boissieu, université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, 1994, 517 p.
40 Voir la contribution de Patrice Baubeau dans ce volume.
41 Voir le cas particulier du secteur des travaux publics, où, autour de 1914, des banques s’associent aux entreprises ou prennent des participations dans les grandes entreprises. Dominique Barjot, « La grande entreprise française de travaux publics et son financement bancaire du début des années 1880 au début des années 1970 », dans Banques et entreprises industrielles en Europe de l’Ouest, xixe‑xxe siècles…, Y. Froidevaux, Ph. Marguerat et L. Tissot (dir.), op. cit., p. 111‑135.
42 Sur cette question, voir notamment Dominique Barjot et Isabelle Lescent-Gilles (dir.), L’autofinancement, Entreprise et histoire, nº 22, octobre 1999, 216 p.
43 Voir la contribution de Michel Lescure dans ce volume.
44 Référence au titre du colloque du CRID 14‑18 « Les mises en guerre de l’État », 30 octobre‑1er novembre 2014.
45 En 1915 et encore en mars 1918, comme le relate le ministre des Finances Louis-Lucien Klotz : « Tandis que le Crédit Lyonnais, le Comptoir national d’escompte et le Crédit industriel s’installent à Avignon, au Palais des papes, la Banque de l’union parisienne envoie ses titres à Bordeaux aux Chantiers de la Gironde, la Chambre syndicale des agents de change à Angers, la Société générale à Riom – devinez où ? – dans la Sainte-Chapelle même. » (idem, De la guerre à la paix, Paris, Payot, 1924, p. 83)
46 Une enquête allemande de 1916 dénombre 4 192 personnes actives dans les banques dans les zones occupées. L’industrie en France occupée. Ouvrage établi par le grand quartier général allemand en 1916. Traduction intégrale, Paris, Imprimerie nationale, 1923, p. 314.
47 Pour le Royaume-Uni, voir Andrew Seltzer, « The Impact of female employment on male salaries and careers : Evidence from the English banking industry, 1890‑1941 », The Economic History Review, vol. 66, nº 4, 2013, p. 1039‑1062.
48 Sur le personnel de la Deutsche Bank durant la première guerre mondiale, lire Martin L. Müller et Reinhard Frost, « Deutsche Bank and its employees during IWW », communication présentée lors de la journée d’études « Financial Institutions confronted by the Great War », Zurich, 12 juin 2014, EABH/Swiss Re.
49 Voir les actes à paraître de la journée d’études organisée par Philippe Verheyde et Jean-Luc Mastin, « L’argent dans la Grande Guerre. En avoir un peu, beaucoup, pas du tout (France 1914‑1918/1920) », 18 juin 2015, université Paris 8 Vincennes Saint-Denis.
50 Voir les publications de synthèse : Martin Horn, op. cit., 249 p. ; Hew Strachan, Financing the First World War, Oxford-New York, Oxford University Press, 2004, 210 p.
51 Nicolas Delalande, « Dettes publiques, épargne et citoyenneté pendant la première guerre mondiale », communication du 9 décembre 2014, EHESS, lors du séminaire « Constructions politiques des enjeux économiques (États-Unis, France) ; idem, « L’État face à ses souscripteurs : mobilisation de l’épargne et citoyenneté financière pendant la première guerre mondiale », communication du 30 octobre 2014, Institut historique allemand, Paris, lors du colloque du CRID 14‑18 « Les mises en guerre de l’État ».
52 Cf. Philippe Vatin, « Publicité et politique : la propagande pour l’emprunt en France de 1915 à 1920 », Revue d’histoire moderne et contemporaine, avril‑juin 1980, p. 208‑236.
53 Pour les conséquences de la guerre sur les marchés de capitaux et de valeurs, voir Laure Quennouëlle-Corre, La place financière de Paris au xxe siècle. Des ambitions contrariées, Paris, IGPDE/Comité pour l’histoire économique et financière de la France, 2015, chap. II, http://0-books-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/igpde/3820.
54 Nous tenons à remercier les archivistes des banques précitées pour leur gracieuse collaboration à sa constitution.
55 Pour les données macroéconomiques, voir Pierre-Cyrille Hautcœur, « Was the Great War a watershed? The Economics of World War I in France », dans The Economics of World War I, Stephen N. Broadberry et Mark Harrison (dir.), Cambridge-New York, Cambridge University Press, 2005, p. 169‑205.
56 Pour un bilan des 15 dernières années de l’historiographie bancaire anglo-saxonne, voir Christopher L. Colvin, « The Past, present and future of banking history », QUCEH Working Paper Series, nº 15‑05, 2015, http://0-hdl-handle-net.catalogue.libraries.london.ac.uk/10419/112786.
Auteur
Fabien Cardoni est chargé d’études historiques au bureau de la Recherche de l’Institut de la gestion publique et du développement économique (ministères économiques et financiers) et chercheur rattaché à l’IDHES-Paris 1 Panthéon-Sorbonne (UMR 8533). Il a récemment publié « La perte de contrôle des finances militaires. L’action des contrôleurs de l’administration de l’Armée et des contrôleurs des dépenses engagées entre 1914‑1918 », dans Finances publiques en temps de guerre. Déstabilisation et recomposition des pouvoirs, Florence Descamps et Laure Quennouëlle-Corre (dir.), Paris, IGPDE/Comité pour l’histoire économique et financière de la France, 2016 (à paraître) ; « The “science” of French public finances in World War I », Accounting History Review, special issue 2‑3 : « Accounting and the First World War », novembre 2014, p. 119‑138 ; avec Nathalie Carré de Malberg et Michel Margairaz (dir.), Dictionnaire historique des inspecteurs des Finances, 1801‑2009, Paris, IGPDE/Comité pour l’histoire économique et financière de la France, 2012 (http://0-books-openedition-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/igpde/3568).
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