Introduction à la première partie
p. 21-24
Texte intégral
1La guerre d'Indochine ne se résume pas à cet aspect des choses mais, compte tenu au moins de la réputation qu'elle s'est faite, il importe de tirer au clair l'importance du facteur financier dans son déroulement. À première vue, le problème est permanent. Toujours trop chère pour les Français d'une part, au regard des autres besoins du pays, la « sale guerre » a généré aussi son lot de scandales financiers. Forcément très onéreuse pour le Viet Minh d'autre part, qui conduit une guerre dont les moyens excédaient largement ses propres capacités économiques, la Résistance n'en a pas moins été menée de main de maître.
2À considérer plus attentivement l'évolution de la guerre, trois moments se succèdent, les facteurs financiers apparaissant au fur et à mesure toujours plus contraignants, décisifs même, ce qui suggéra cette formule à Pierre Mendès France : « Tout problème n'est pas financier mais le devient un jour. Ainsi de l'affaire d'Indochine : mal engagée politiquement, militairement et moralement, précisait-il, elle tournait plus mal encore sur le plan budgétaire »1. Dans sa première configuration de conflit colonial, entre 1945 et 1948, la guerre d'Indochine est chère sans l'être vraiment : le facteur financier pèse en tout cas moins lourd pour la France que pour le Viet Minh. Brusquement rattrapé en 1949 par les crises de la guerre froide, le conflit change de physionomie : les dépenses militaires s'emballent, les problèmes financiers surgissent sur le devant de la scène, et l'urgence commande de trouver des solutions nouvelles, alors que le Viet Minh dispose des moyens supplémentaires mis notamment à sa disposition par la Chine populaire. À partir de 1952, dans une troisième époque qui s'achève en 1954, l'élargissement de la guerre à de nouveaux alliés nourrit la montée en puissance des combats, le coût de la guerre atteint des cimes vertigineuses et, cette fois, les « financiers » paraissent être devenus les vrais décideurs.
3Quelle part les problèmes financiers ont-ils pris dans la guerre d'Indochine, dans son déclenchement, dans sa conduite, dans sa conclusion ? La réponse à cette question, examinée période par période, est à rechercher sur plusieurs plans : à la contrainte financière propre à tout conflit en effet -l'argent, bien sûr, est « le nerf de la guerre » - s'ajoute notamment la dimension financière prise par l'affrontement, sous la forme d'une véritable guerre des monnaies. En tout état de cause, du côté français du moins, l'écart s'est progressivement creusé entre ceux qui mènent le combat sur le terrain -sans jamais aboutir à un avantage décisif - et ceux qui sont amenés à faire les principaux choix.
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