Les relations entre le Royaume-Uni et la Communauté européenne dans le domaine de l’aide au développement entre 1975 et 2000 : influence mutuelle ou dialogue de sourds ?
p. 61-84
Texte intégral
Introduction
1Rapidement après son entrée dans la Communauté économique européenne (CEE) en 1973, le Royaume-Uni en est venu à être perçu par certains États membres comme un « partenaire difficile1 ». Les Britanniques ne se sentaient pas entendus sur des questions telles que le rabais budgétaire accordé en leur faveur ou encore la politique agricole commune (PAC) et en étaient particulièrement outrés. Ils se plaignaient également, quoique de manière moins véhémente, de leur manque d’ascendant sur les programmes d’aide européens qu’ils jugeaient « confus » et « dispersés »2. Mais dans quelle mesure le Royaume-Uni est-il fondé à affirmer qu’il n’a pas pu exercer toute sa part d’influence sur l’aide européenne au développement, dans les premières décennies de son appartenance à la CEE ?
2Il s’agit d’une question importante qui n’est pourtant pas abordée dans la littérature. Seule une poignée d’observateurs évoquent le rôle des Britanniques dans la conception de la politique européenne d’aide et la plupart laissent entendre que ce rôle a été, au mieux, négligeable. Cosgrove Twichett considère qu’au moment des négociations de Lomé I (première convention d’aide et de coopération commerciale entre l’Europe et certains pays d’Afrique, des Caraïbes et du Pacifique), « le Royaume-Uni était moins disposé à œuvrer au rapprochement de ses anciennes colonies et de la CEE qu’il ne l’avait été au cours des années 1960 », lors de sa première demande d’adhésion à la CEE3. Hewitt minimise également l’influence britannique, en faisant observer qu’en dépit du doublement de l’aide du Royaume-Uni par l’intermédiaire de la CEE, « le poids politique du pays a stagné » entre 1979 et 19904. Un document de réflexion rédigé par Lynda Chalker, à l’époque ministre du Développement outre-mer, fait figure d’exception. Sans grande surprise peut-être, Mme Chalker y porte un jugement plus positif sur la capacité du Royaume-Uni à influer sur la politique européenne de développement. Toutefois, ce document n’envisage même pas que la Commission européenne ait pu peser sur la politique d’aide des Britanniques5.
3Or, la question de l’influence mutuelle est importante, car elle offre un éclairage original sur les raisons de la réputation persistante de partenaire difficile du Royaume-Uni concernant certaines problématiques européennes bien précises. Cette question sera donc au cœur du présent article, qui s’appuie sur des entretiens avec plusieurs personnalités ayant occupé un poste de premier plan au sein de la Commission européenne ou de l’administration britannique du développement outre-mer (ODA). Après avoir relevé des exemples illustrant l’influence exercée par la Commission européenne sur la politique britannique d’aide, nous nous attacherons à évaluer celle des Britanniques sur l’aide européenne au développement en distinguant trois périodes : 1973-1979 (Lomé I et les négociations qui ont précédé), 1980-1989 (Lomé II et III) et 1990-2000 (Lomé IV). Cela nous conduira à examiner les facteurs qui ont favorisé ou, au contraire, limité l’influence britannique. En dernier lieu, nous chercherons à déterminer si le caractère récalcitrant dont le Royaume-Uni a constamment fait preuve en Europe peut être imputable au bilan des premières années de participation à la politique européenne d’aide au développement.
4Avant toute chose, quelques précisions utiles. Premièrement, les termes « Communauté économique européenne » et « Union européenne » sont utilisés respectivement en référence aux périodes antérieures et postérieures à 1992. Deuxièmement, l’accent est mis sur les relations entre le Royaume-Uni et la Commission européenne plutôt que les États membres considérés individuellement. Troisièmement, le cœur du sujet est l’aide européenne au développement par opposition à l’aide humanitaire ou aux préférences commerciales. Enfin, il convient de signaler la difficulté de prouver l’exercice d’une quelconque influence dans le domaine de l’aide européenne dans la mesure où les décisions sont habituellement prises lors de réunions à huis clos.
I. Convaincre les Britanniques ?
5Malgré tout, la Commission européenne a réussi à peser sur la politique britannique d’aide pendant la période étudiée et ce de plusieurs manières. Tout d’abord, la Commission a facilité l’adhésion du Royaume-Uni et des pays du Commonwealth à la convention de Lomé, grâce au travail de hauts représentants et à la rédaction de notes sur le sujet. Deux des personnalités les plus influentes de la Commission étaient, à compter de 1973, Claude Cheysson, commissaire au développement, et Maurice Foley, directeur général adjoint de la DG VIII développement. Claude Cheysson était un négociateur progressiste et imaginatif, dont l’engagement a été déterminant pour sortir de l’impasse, les pays francophones cherchant à maintenir des préférences commerciales réciproques rejetées par le bloc anglophone6. En raison du rôle actif que cet homme politique français a joué dans l’adhésion des pays du Commonwealth à la convention de Lomé, Hewitt et Whitemann l’ont décrit comme « le cadeau » fait par le président Pompidou aux Britanniques7. Quant à Maurice Foley, qui avait exercé des responsabilités ministérielles au sein du Foreign Office et qui avait également été responsable syndical, il mit à profit ses relations personnelles avec des chefs d’État de l’Afrique anglophone pour rassurer ces derniers, en dissipant leurs soupçons d’une Commission européenne dirigée par les francophones et leurs inquiétudes face à la perte des préférences accordées au Commonwealth. Il joua également un rôle déterminant dans l’adhésion de pays des Caraïbes et du Pacifique à la convention de Lomé, veillant à ce que ces nations ne deviennent pas « les orphelins de la ruée britannique en Europe8 ».
6Par ailleurs, la Commission a rédigé des mémorandums pour cadrer les débats sur la teneur de Lomé I et les conditions de l’adhésion britannique à cette convention. Ainsi, dans son mémorandum de 1971 adressé au Conseil des ministres9, la Commission soulignait le fait que la convention de Yaoundé ne répondait plus aux ambitions de la CEE en matière de développement et qu’il était nécessaire d’étendre la politique d’association et la coopération commerciale à d’autres pays en voie de développement. De cette manière, la Commission préparait le terrain pour le sommet de Paris, en octobre 1972, qui réunit les États membres de la CEE et les États candidats à l’adhésion. Cette rencontre élargie permit de résoudre nombre de désaccords entre les partisans d’une approche régionale, menés par la France, et les tenants d’une politique de développement mondiale, tels que l’Allemagne et les Pays-Bas10. Dans son mémorandum de 1972, la Commission insistait sur la nécessité d’étendre l’aide européenne au-delà des anciennes colonies, tout en préservant les avantages associés à la qualité de partie prenante à la convention11. En 1973, un nouveau mémorandum recommandait d’ouvrir le bénéfice de la convention de Yaoundé à de nouveaux pays et d’entamer des négociations avec les 20 pays du Commonwealth (ultérieurement 22) énumérés dans le protocole joint au traité d’adhésion du Royaume-Uni12.
7En facilitant l’adhésion du Royaume-Uni à la convention de Lomé, la Commission contribuait à faire en sorte que les Britanniques acceptent les implications de leur adhésion à la CEE et plus particulièrement le fait que la Commission « impulse les initiatives13 » de facto, sinon de jure. Au fil du temps, la Commission persuada même le Royaume-Uni et d’autres États membres de la nécessité « d’un cadre politique commun qui serait politiquement contraignant pour la Commission mais aussi pour les pays membres14 ». Qui plus est, l’institution parvint à faire en sorte que le Royaume-Uni, jusqu’au milieu des années 1990, augmente ses contributions en faveur des Fonds européens de développement (FED) successifs et donc des pays ACP, dans le cadre des différentes conventions de Lomé (voir tableau n° 1). Elle fut également à l’origine, pendant de longues années, de hausses substantielles du budget européen consacré à l’aide au développement. La contribution des Britanniques à ce budget passa de 6 % en 1978 à 12 % en 1979, pour atteindre près de 20 % en 199015.
Tableau 1. Fonds européen de développement : signataires et principaux contributeurs 1959-2000
Signataires CEE-ACP | France | RFA | Royaume-Uni | Total CEE/UE | ||
1er FED 1959-1964 | 6 | 18 | 34,4 % | 34,4 % | – | 100 % |
2e FED 1964-1970 (Yaoundé I) | 6 | 18 | 33,8 % | 33,8 % | – | 100 % |
3e FED 1970-1975 (Yaoundé II) | 6 | 19 | 33,2 % | 33,2 % | – | 100 % |
4e FED 1975-1980 (Lomé I) | 9 | 46 | 26,0 % | 26,0 % | 18,7 % | 100 % |
5e FED 1980-1985 (Lomé II) | 10 | 57 | 25,6 % | 28,3 % | 18,0 % | 100 % |
6e FED 1985-1990 (Lomé III) | 12 | 66 | 23,6 % | 26,1 % | 16,6 % | 100 % |
7e FED 1990-1995 (Lomé IV) | 12 | 69 | 24,3 % | 25,9 % | 16,4 % | 100 % |
8e FED 1995-2000 (Lomé IV) | 15 | 70 | 24,3 % | 23,4 % | 12,7 % | 100 % |
Sources : C. Cosgrove Twichett, Europe and Africa…, op. cit., p. 118, p. 143, p. 169 ; Comité d’aide au développement, Communauté européenne, Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), Paris, 1998, p. 86 ; Overseas Development Institute (ODI), Lomé II, Briefing paper n° 1, février 1980, p. 6 ; Charlotte Bretherton et John Vogler, The European Union as a Global Actor, Routledge, Londres, 2006, p. 116. Les contributions sont exprimées en millions ou en milliards d’unités monétaires européennes (écus), unités de compte utilisées pour le budget interne de la Communauté.
8De la même manière, la Commission pourrait, avec quelque raison, avancer qu’elle a influencé la politique de développement britannique. Encouragée par Maurice Foley et soutenue par l’association parlementaire CEE-ACP, elle milita pour la création de la Communauté de développement d’Afrique australe et une radicalisation de la politique européenne vis-à-vis de l’Afrique du Sud16. Au cours des années 1970 et 1980, elle maintint sa pression sur les différents gouvernements britanniques pour qu’ils adoptent une attitude de fermeté à l’endroit du régime de la minorité blanche en Afrique du Sud17. Elle joua également un rôle déterminant au début des années 1990, pour coordonner les positions du Royaume-Uni et d’autres États membres sur la question controversée, de la conditionnalité politique qui impliquait des pays en développement dans la mise en œuvre de réformes politiques en contrepartie des aides accordées. Le fait que le bras humanitaire de la Communauté européenne (ECHO) excluait toute suspension de l’aide d’urgence permettait plus facilement de mettre un terme à l’octroi d’une aide au développement, le Royaume-Uni et d’autres donateurs bilatéraux sachant qu’une assistance humanitaire continuerait à être apportée aux pays les plus démunis18.
9Enfin, l’influence de la Commission s’exerçait par le biais des échanges d’informations : elle avait un savoir, une expertise et des contacts à offrir, notamment dans des parties du monde, telle l’Afrique francophone, où le Royaume-Uni était sous-représenté et qu’il connaissait peu. D’après Peter Pooley, ancien directeur général par intérim de la DG VIII, les Britanniques « avaient accepté l’idée que la Commission pouvait avoir quelque chose à leur apprendre en dehors de leur sphère d’influence19 ». Michael Lake, ancien chef de délégation de la CEE en Afrique du Sud, abonde dans ce sens et fait remarquer à quel point, « dans les pays africains francophones, l’ambassadeur du Royaume-Uni était le meilleur ami de la Commission », cherchant à accéder au « large réseau de contacts, ministériels et autres, de celle-ci ».
10En résumé, la Commission avait de l’influence lorsqu’elle avait quelque chose à offrir (des informations, des réseaux…), lorsque le Royaume-Uni n’était pas en position de force (par exemple, au moment de son adhésion à la CEE) ou lorsque ce dernier ne voulait pas faire cavalier seul (notamment dans le cas de sanctions utilisant l’arme de l’aide). Conformément aux conceptions institutionnalistes et de la « dépendance de sentier » (“path dependance”), cette influence s’est accrue au fil du temps, au fur et à mesure que l’institution gagnait en assurance, montrait des qualités d’entrepreneur politique et refusait d’agir en tant que dépositaire des politiques d’aide d’un État membre dominant.
11À l’encontre de cette interprétation, certains observateurs s’interrogent sur le degré d’influence de la Commission. Drieghe et Orbie affirment que, dans le cas de Lomé I, la France et le Royaume-Uni « ont déterminé dans une large mesure la teneur et la nature de la convention dans le cadre de négociations intergouvernementales », tandis que la Commission a échoué à imposer « ses propres thèmes » et n’a joué « un rôle plus important que dans l’élaboration des conventions de Lomé suivantes et de l’accord de Cotonou conclu récemment20 ». Dans le même esprit, Crawford montre comment, en 1995, le Royaume-Uni a fixé des limites à sa contribution budgétaire, à l’occasion de la révision à mi-parcours de la convention de Lomé. Karin et Dickson laissent également entendre que le Royaume-Uni a contribué activement, avec d’autres États membres, à maintenir le FED en dehors du budget communautaire en rapide augmentation, et donc à ce que le financement des projets dans le cadre des conventions de Lomé fasse l’objet de négociations intergouvernementales tous les cinq ans21.
12Les représentants de la Commission européenne interrogés dans le cadre de la présente étude sont eux aussi circonspects quant à l’influence exercée par leur institution de tutelle. Selon Dieter Frisch, « il est certain que si les pays membres essayaient d’influer sur les actions de la Communauté européenne, l’inverse se vérifiait moins22 ». Peter Pooley est encore plus prudent, en faisant remarquer que là où les Britanniques disposaient de « réseaux sans égal », par exemple « en Afrique orientale et dans les Caraïbes, ils pensaient qu’ils étaient les seuls à savoir comment agir et que pas plus la Commission que qui que soit n’en avait la moindre idée23 ». De surcroît, au cours des débats parlementaires, il apparaissait évident que les responsables politiques britanniques n’étaient pas à l’écoute de la Commission. Ils critiquaient l’aide européenne, la jugeant lente, inefficace, insuffisamment contrôlée et évaluée. Ils en voyaient peu la substance et considéraient qu’elle se résumait à des questions contractuelles trop denses, trop bureaucratiques et stéréotypées. Pour les décideurs britanniques, la convention de Lomé n’instituait pas « un modèle de relations entre des pays en développement et des pays développés », contrairement aux promesses de son préambule. Le Royaume-Uni se tournait donc plutôt vers la Banque mondiale et l’OCDE comme source d’inspiration de sa politique de développement de l’outre-mer24.
II. L’influence du Royaume-Uni sur la Commission
13Comme nous l’avons déjà mentionné précédemment, l’influence britannique est étudiée en distinguant trois périodes.
A. Première période : 1973-1979
14La première période (1973-1979) correspond à la première convention de Lomé, négociations comprises, signée par neuf États membres européens et 46 pays ACP. À cette époque, Claude Cheysson était commissaire européen au développement (1973-1981) et le Royaume-Uni était doté d’un gouvernement travailliste (Harold Wilson 1974-1976, James Callaghan 1976-1979). Les Britanniques étaient influents dans le sens où ils offraient la possibilité d’étendre la convention de Yaoundé, pour l’inscrire dans un cadre beaucoup plus large. Avant Lomé I, l’Europe était divisée sur l’avenir de la convention de Yaoundé. La France, soutenue par l’Afrique francophone, prônait la poursuite d’une politique d’association régionale, tandis que « d’autres États membres de premier plan, en particulier l’Allemagne et les Pays-Bas, estimaient que la convention de Yaoundé ne pouvait plus exister telle quelle et qu’il convenait de la remplacer » en adoptant une approche mondiale25. Bien que méfiante vis-à-vis d’une approche éclatée qui conduirait à disperser les ressources budgétaires, déjà limitées, affectées à l’aide au développement, la Commission voulait une convention à la hauteur des nouvelles ambitions d’une Europe toujours plus vaste. Elle était à la recherche d’une nouvelle approche, lorsque l’entrée du Royaume-Uni dans la CEE a ouvert la voie à un partenariat plus dynamique. Selon Dieter Frisch, le triplement de l’enveloppe financière entre Yaoundé II et Lomé I (voir tableau n° 1) « n’aurait pas été possible sans l’arrivée du Royaume-Uni. Tous les efforts déployés avec le soutien des Allemands et des Néerlandais […] n’y auraient pas suffi. Il est certain que l’entrée du Royaume-Uni dans la CEE […] nous a considérablement aidés à susciter l’adhésion autour de Lomé. Je doute que la convention aurait été la même en l’absence des Britanniques26 ».
15C’est également grâce à l’arrivée des Britanniques au sein de l’Europe que de nombreux pays du Commonwealth ont pu signer la convention de Lomé. Ce faisant, ils ont modifié pour toujours la dynamique des négociations ACP-CEE. L’Afrique anglophone apportait « une conception de la politique […] plus directe ». Ainsi, le Nigeria apporta dans la corbeille à la fois « des compétences politiques et techniques et une impulsion pour une action concertée27 ». Les six pays du Commonwealth qui représentaient les Caraïbes avaient une « équipe dynamique de négociateurs expérimentés » qui étaient « prêts à monter à l’attaque aux moments clés tout en apportant leur savoir-faire et expertise techniques dans les négociations de moindre importance28 ». Cette approche fut « une révélation, surtout pour les pays africains francophones, habitués à davantage de déférence29 ». Les nouveaux membres anglophones tirèrent parti toutefois du fait que les pays associés à la convention de Yaoundé connaissaient parfaitement les rouages bureaucratiques communautaires. Ils travaillèrent à forger des positions communes, en particulier au lendemain de l’accord de Georgetown, conclu en juin 1975, qui institutionnalise le groupe des pays ACP.
16Autre fait notable, la demande d’adhésion du Royaume-Uni ouvrait la voie à des modifications substantielles de la convention de Yaoundé initiale. Il s’agissait de passer d’un système de préférences réciproques à un système de préférences non réciproques, les pays du Commonwealth, soutenus par le Royaume-Uni, l’Irlande, les Pays-Bas et plus tard l’Allemagne rejetant la demande du bloc francophone de maintenir la réciprocité. Le soutien britannique pour la non-réciprocité était lié en partie au contexte historique (la Grande-Bretagne commerçait depuis longtemps avec le Commonwealth sur une base de non-réciprocité) et en partie à une stratégie politique, à savoir la volonté de renforcer le pouvoir de négociation des pays du Commonwealth, qui conserveraient leur régime commercial, tandis que les pays africains francophones seraient obligés d’abandonner la réciprocité et perdraient, de par la même, leur « longueur d’avance » ou position privilégiée dans les négociations avec la CEE30.
17Une autre innovation a été l’introduction par la Commission d’un système de stabilisation des recettes d’exportation agricoles (Stabex) qui fut créé en réponse aux inquiétudes des producteurs de sucre du Commonwealth ainsi qu’aux demandes des pays ACP producteurs de thé, café, coton, cacao, bananes, minerai de fer, etc. Ce mécanisme avait pour ambition « de remédier aux effets néfastes de l’instabilité des recettes d’exportation et [… de] permettre [aux États ACP] d’assurer ainsi le progrès économique et social de leurs populations31 ». Le Stabex « était en outre conçu pour s’inscrire dans le cadre de la politique internationale globale en matière de produits de base, basée pour l’essentiel sur le bon fonctionnement des accords internationaux32 ».
18Le Royaume-Uni exerçait une influence sur l’aide européenne au développement au niveau opérationnel également. Cela s’est vérifié plus particulièrement dans les anciennes colonies, où les responsables britanniques étaient « présents en plus grand nombre » et où le Royaume-Uni était souvent le « pays chef de file », comme au Kenya33.
19Dans l’ensemble, il faut cependant se garder de surestimer le rôle des Britanniques dans l’élaboration de Lomé I. Ainsi que Hewitt le rappelle, l’amélioration des termes de la convention de Lomé par rapport à ceux de la convention de Yaoundé « a été au moins autant le résultat d’âpres négociations de la part des pays ACP – notamment la Jamaïque, le Guyana et le Nigeria, en position de force du fait des pénuries passagères de matières premières au niveau mondial (principalement pétrole et sucre) – que le résultat de la protection ou de la clairvoyance des Britanniques34 ».
20En outre, Cosgrove Twitchett note que les négociations de Lomé se sont déroulées pendant que le Royaume-Uni était pris dans la tourmente des renégociations puis des débats liés au référendum sur le maintien du pays dans la CEE. C’est dans ce contexte, auquel viennent s’ajouter des difficultés économiques intérieures, que le Royaume-Uni plaida sans grand enthousiasme pour l’intégration des pays asiatiques du Commonwealth à Lomé, adopta une position incohérente sur les prix à l’importation du sucre et échoua à égaler les contributions française et allemande à la convention35. Il ne peut même pas prétendre avoir influencé les réflexions sous-jacentes au nouveau texte, dont le véritable architecte n’est autre que Claude Cheysson, homme d’État avisé et ancien diplomate fin connaisseur des questions africaines, qui mit fin au « paternalisme bienveillant » de l’Europe et encouragea les pays ACP à davantage s’approprier les politiques, en leur disant : « C’est votre argent ! […] Nous sommes là pour vous apporter des conseils techniques en cas de besoin36 ». De ce fait, lorsqu’il signa la convention de Lomé, « le Royaume-Uni se trouva face à un train de mesures, des positions bien établies et des partenaires, aussi bien donneurs que récipiendaires de l’aide, en position de force, avec lesquels il n’était pas particulièrement en phase37 ».
B. Deuxième période : 1980-1989
21Cette deuxième période recouvre Lomé II (1980-1985) et Lomé III (1985-1990). Elle correspond aussi approximativement aux mandats des commissaires au développement Edgard Pisani (1981-1985) et Lorenzo Natali (1985-1991) et à la présence de Margaret Thatcher, en tant que premier ministre, à la tête du Gouvernement conservateur du Royaume-Uni de 1979 à 1990.
22En dépit de leur discours anti-Bruxelles, les gouvernements Thatcher successifs ont joué un rôle globalement positif vis-à-vis de la convention de Lomé. Dieter Frisch fait observer que « le choix des Britanniques était le suivant […] : s’ils devaient accepter que Bruxelles gère des montants toujours plus importants, le mieux à faire était d’influencer autant que possible ce processus, dans un sens positif. Il n’était pas question de le ralentir, de le bloquer ou de créer des problèmes38 ».
23Dans cette logique, le Royaume-Uni donna son accord à une nouvelle augmentation substantielle du budget du FED, qui passa de 3,1 milliards d’écus pour Lomé I à 7,4 milliards d’écus pour Lomé III (voir tableau n° 1). Les Britanniques restèrent impliqués et commencèrent à semer des idées qui se concrétisèrent ultérieurement. À titre d’exemple, David Owen, ministre des Affaires étrangères, proposa à l’occasion des négociations de Lomé II que l’octroi des aides soit conditionné au respect des droits de l’homme dans les pays bénéficiaires39. Autre sujet de préoccupation du Royaume-Uni : la nécessité d’améliorer l’efficacité de l’aide européenne en veillant à ce qu’elle soit moins axée sur des projets et davantage liée aux réformes d’ajustement structurel préconisées par la Banque mondiale. Les Britanniques réclamèrent également un renforcement des contrôles, afin de s’assurer que le Stabex soit utilisé aux fins pour lesquelles il était prévu, à savoir indemniser les paysans en cas de baisses brutales des cours des matières premières agricoles. Dans un livre blanc, le Royaume-Uni alla jusqu’à conclure que la CEE devrait mettre un terme aux activités du Stabex et contribuer plutôt au système compensatoire mondial géré par le Fonds monétaire international40.
24Pourtant, la situation au début des années 1980 montre que les idées précitées ne parvinrent pas à s’imposer. Alors que le principe de conditionner les aides au respect des droits de l’homme bénéficiait du soutien des Pays-Bas et, à compter de 1983, du Parlement européen, la convention de Lomé II ne l’intégra pas, en raison des protestations vigoureuses de certains pays ACP (soucieux de préserver leur souveraineté) et de l’opposition de certains États membres de la CEE (soucieux de ne pas être accusés de néocolonialisme) qui souhaitaient que la convention reste « politiquement neutre41 ». Les demandes d’une plus grande efficacité de l’aide formulées par les Britanniques n’eurent pas beaucoup plus de succès. Dans les faits, la convention de Lomé II resta presque exclusivement axée sur des projets, n’intégra aucun programme économique analogue à ceux préconisés par la Banque mondiale, conduisit à étendre le Stabex à plus de dix produits et à créer un dispositif parallèle de soutien des prix des produits miniers (Sysmin)42.
25Il fallut attendre Lomé III pour que certaines des idées soutenues par le Royaume-Uni soient prises en considération dans l’approche européenne de l’aide. Ainsi, c’est en réponse aux exigences britanniques que la question des droits de l’homme fut intégrée à Lomé III, dans des textes formant partie intégrante du « contrat de Lomé » et susceptibles « d’être invoqués dans les cas les plus flagrants de violation des droits de l’homme élémentaires43 ». En outre, Lomé III reflétait les préoccupations britanniques grandissantes concernant l’efficacité de l’aide. La concertation politique (policy dialogue) fut utilisée pour passer d’une approche axée sur les projets à une approche axée sur les programmes, impliquant des engagements mutuels de la CEE et des pays ACP dans les secteurs où ces derniers avaient déjà contracté un prêt d’ajustement structurel ou sectoriel avec la Banque mondiale.
26Bien entendu, les efforts du Royaume-Uni en vue d’améliorer l’efficience de l’aide communautaire ne se limitèrent pas au cadre du FED. Au milieu des années 1980, le pays fit pression pour que la CEE réforme l’aide alimentaire d’urgence. Chris Patten, ministre britannique du développement outre-mer (1986-1989), s’attribua rapidement le mérite d’avoir « convaincu la Commission de faire de l’aide d’urgence un outil de développement et de rompre ainsi avec une conception plus classique de cette aide, axée sur le court terme44 ».
27Néanmoins, il ne faudrait pas surestimer l’influence exercée par le Royaume-Uni sur la convention de Lomé III, car l’idée de mettre l’accent sur la concertation politique revient surtout à Edgard Pisani, commissaire au développement de nationalité française, dont le mémorandum de 1982 insistait sur la nécessité d’abandonner la logique de Cheysson et d’adopter une approche plus mûre dans le cadre des discussions avec les pays ACP45. Les Britanniques ne sont pas pour grand-chose dans ce changement de cap. En réalité, « les Britanniques eurent même du mal à comprendre, au Conseil des ministres, pourquoi la Commission attachait autant d’importance à cette question. Cela ne faisait pas partie de la convention de Lomé, laissant peu de place au dialogue46 ». Qui plus est, les Britanniques n’ont que très partiellement réussi à rapprocher l’aide de la CEE des programmes néolibéraux de la Banque mondiale. Par exemple, si la Commission finit par s’associer au processus d’ajustement et à créer une facilité d’ajustement structurel (FAS) en 1987, elle n’en chercha pas moins à rester le compagnon de route des pays en développement et rejeta la ligne dure du Royaume-Uni concernant les réformes économiques. Enfin, il convient de nuancer les affirmations du Gouvernement britannique selon lesquelles la politique européenne d’aide alimentaire d’urgence a évolué grâce à lui, compte tenu du fait que la Commission avait « déjà acquis beaucoup d’expérience » dans ce domaine et réfléchissait déjà à des réformes avant que Chris Patten, tout nouveau ministre britannique du développement outre-mer, ne s’exprime à ce sujet47.
C. Troisième période : 1990-2000
28Cette troisième période recouvre Lomé IV, première convention à avoir duré dix ans. Pendant la première phase de la convention et au moment de son examen à mi-parcours, Manuel Marin occupait la fonction de commissaire au développement (1989-1995) et John Major était le premier ministre britannique (1990-1997). Au début des années 1990, le Royaume-Uni continua de faire preuve d’une attitude constructive en donnant son aval à une augmentation globale de douze millions d’écus du budget du FED (soit deux millions de plus que l’augmentation souhaitée par le Gouvernement britannique48) et en acceptant de porter le financement du Stabex à 1,5 milliard d’écus, en dépit de « l’aversion éprouvée par le Royaume-Uni envers un dispositif qui stabilisait les recettes d’exportation sans encourager la diversification49 ». Les Britanniques adoptèrent également une attitude « coopérative » sur le terrain, « s’efforçant de mettre en œuvre des principes de bonne gestion » en octroyant des financements immédiats aux études de faisabilité, « donnant ainsi à la Commission le temps d’accomplir les formalités administratives requises50 ». À Bruxelles également, le Royaume-Uni agit « de manière positive » en détachant à la Commission, des spécialistes de l’éducation et de la sylviculture domaines dans lesquels celle-ci manquait d’expertise51. Les Britanniques firent également bénéficier la Commission de leurs conseils relatifs aux méthodes d’organisation et d’évaluation de l’aide, favorisant ainsi l’adoption d’une démarche cohérente concernant la gestion du cycle de projet (fondée sur l’approche du cadre logique), d’un système d’information et de contrôle des projets, le développement de l’unité d’évaluation de la Commission et le lancement d’évaluations conjointes des programmes d’aide européens destinés aux pays ACP et non-ACP52. Dans le même temps, le Royaume-Uni continua de prôner le renforcement de la coordination de l’aide sur le terrain et ouvrit la voie en soutenant en 1992 le dispositif pilote « Horizon 2000 », au cours de sa présidence de la CEE53.
29Grâce à cette attitude positive, le Royaume-Uni fut mieux à même de promouvoir l’un de ses thèmes de prédilection, à savoir la conditionnalité des aides au respect des droits de l’homme, dont le Conseil européen adopta le principe dans une résolution de mai 1991. Le Gouvernement britannique parvint également à convaincre la Communauté européenne de se rapprocher des programmes d’aide de la Banque mondiale. À en croire les déclarations de Hewitt :
« Il a fallu attendre […] la quatrième convention de Lomé […] pour que la CEE reconnaisse que les mesures d’ajustement structurel impliquaient nécessairement des réformes politiques. La Commission a tardivement admis qu’elle ne pouvait pas continuer à gérer un système d’aide axé sur les projets qui permettait aux gouvernements de s’affranchir du respect des conditions en matière de réforme imposées par les gouvernements des États membres54 ».
30Le Royaume-Uni accompagna la Commission au cours de cette évolution en détachant un économiste auprès de la DG VIII pour la conseiller en matière d’ajustement structurel. La Grande-Bretagne vit également d’un bon œil la décision prise par la Commission de porter à douze le nombre d’économistes chargés de la gestion de la facilité d’ajustement structurel et d’accroître la valeur de la facilité d’aide à décaissement rapide en la portant en 1994 à plus de 25 % de l’aide programmable, contre 2,8 % en 199155.
31Néanmoins, il serait là encore erroné d’exagérer l’ascendant britannique. En effet, bien que la présence de cette expertise ait permis au Royaume-Uni de disposer de représentants au sein de la Commission pour relayer ses opinions, les plaintes récurrentes d’autres États membres au sujet du caractère irrégulier de ces détachements limitaient l’influence concrète des Britanniques sur la Commission. Qui plus est, le Royaume-Uni ne parvint jamais à convaincre pleinement la Commission du bien-fondé de l’ajustement structurel. Ainsi, alors que les Britanniques avaient appelé de leurs vœux un infléchissement majeur vers un financement par le biais de la FAS, ils acceptèrent in fine un compromis prévoyant la constitution d’un fonds spécial destiné aux pays bénéficiaires engagés dans des programmes d’ajustement structurel, alors que les autres États ACP continueraient de percevoir des aides programmables pré-affectées dans le cadre des plans indicatifs nationaux (PIN). En d’autres termes, la Commission refusa de « piloter les efforts de mise en œuvre du principe de conditionnalité, comme l’auraient souhaité les Britanniques56 ».
32Le Royaume-Uni commença à durcir sa position en 1992, lors du sommet d’Edimbourg, lorsque la CEE prit l’engagement d’accroître de 60 % au cours des sept années suivantes le montant de ses dépenses consacrées aux actions extérieures, en particulier en Europe de l’Est et en Méditerranée57. Compte tenu du recul de son propre budget d’aide au développement, le Royaume-Uni s’alarma du fait que l’aide bilatérale britannique allait être amputée en raison de l’importance des contributions britanniques au budget de la CEE. Les Britanniques déplorèrent le fait que « le Parlement européen affectait des ressources à la CEE » qui « excédaient la capacité de bonne gestion de la Commission58 » et exigèrent de savoir « si la Commission dépensait les fonds de manière rationnelle ou non59 ». Ce sujet devint particulièrement sensible à l’orée des années 1990, car « le taux de change de la livre sterling se dépréciait, entraînant de ce fait pour l’ODA une augmentation du coût en livres sterling des contributions britanniques60 ». Qui plus est, l’ODA, qui n’était pas un ministère, « n’occupait pas une position de premier plan sur la scène nationale. Lynda Chalker n’était pas ministre du Cabinet Office, mais du Foreign Office, l’administration chargée de l’aide au développement ne disposait pas d’une dotation budgétaire conséquente et ses membres ne jouissaient pas d’une grande considération auprès des diplomates61 ».
33Dans ce contexte, le Royaume-Uni plaida pour une réduction de 30 % de sa contribution au FED. Dans les faits, « au moment où les partenaires européens étaient dans l’impasse, le Gouvernement britannique se montra le plus intransigeant et parvint à obtenir une diminution de sa contribution tant en volume qu’en valeur62 ». Le Royaume-Uni rappela sa préférence pour l’aide bilatérale et la coopération commerciale, plutôt que pour l’aide au développement63. Les Britanniques bénéficièrent du soutien des Pays-Bas, de l’Italie et de l’Allemagne, elle-même en difficulté en raison du coût de la réunification64. Au sein de la Commission, la position ainsi adoptée par le Royaume-Uni (et qui entraîna une réduction de 8 % de sa contribution) renforça le sentiment qu’il n’y aurait pas de nouvelle convention de Lomé65. L’adoption, à l’issue de l’examen à mi-parcours, d’un système de paiement en deux tranches, témoigna du passage d’un partenariat à égalité à l’exercice d’un contrôle accru par les États membres. En outre, le livre vert sur l’avenir des relations entre l’Union européenne et les pays ACP, dont la rédaction débuta en 1996 à l’initiative du commissaire au développement João de Deus Pinheiro (1995-1999), ouvrit la voie aux négociations (1998-2000) qui débouchèrent sur la conclusion d’une nouvelle convention, l’accord de Cotonou, conçu pour remédier aux insuffisances de Lomé.
34Néanmoins, on aurait tort de croire que le Royaume-Uni renforça son ascendant sur la politique européenne d’aide au développement du fait de son intransigeance croissante au cours de cette période. Il va sans dire que des États membres tels que la France, qui exerçait la présidence lors de la phase décisive de l’examen à mi-parcours, ou l’Allemagne, colosse économique de la CEE, jouèrent un rôle crucial. La Commission fit également valoir son point de vue, en particulier grâce à la « personnalité et aux thèses » du commissaire Marin, qui donna un cadre aux débats en diffusant largement en 1993 un projet de mandat de négociation prévoyant des propositions sur la « clause démocratique » et sur des dispositifs de suspension des aides, l’octroi des aides par tranches successives en fonction de la performance et la mise en réserve d’allocations spécifiques destinées à financer les programmes prioritaires de la CEE66.
III. Éléments favorables à l’influence du Royaume-Uni
35Quels furent donc les éléments qui permirent aux Britanniques de peser sur la politique communautaire d’aide au développement ? Les circonstances jouèrent incontestablement un rôle important, en particulier, le moment opportun choisi pour l’entrée du Royaume-Uni dans la CEE, alors même que la convention de Yaoundé s’essoufflait. La fin de la guerre froide fut également l’occasion pour les donateurs de s’intéresser à des thèmes nouveaux, comme celui de l’environnement, domaine dans lequel les réflexions britanniques étaient relativement avancées. La fin de l’apartheid et la démission de Margaret Thatcher en 1990 signifièrent également le début d’une nouvelle ère pour les responsables politiques britanniques, jusque-là contraints de prôner des sanctions limitées contre Pretoria, et leur permirent de réclamer avec véhémence que l’aide au développement soit davantage conditionnée au respect des droits de l’homme dans le cadre de la convention de Lomé IV.
36Le professionnalisme des membres de l’administration britannique des Affaires étrangères favorisa également l’influence britannique sur la politique communautaire d’aide au développement. En dépit du discours eurosceptique de nombreux ministres britanniques, les fonctionnaires du Foreign and Commonwealth Office (FCO) à Londres et à Bruxelles firent constamment preuve d’un grand professionnalisme dans le cadre des négociations de Lomé, et l’ODA était fréquemment partie prenante de la coopération au niveau opérationnel67. L’administration britannique des Affaires étrangères comptait en son sein des personnalités de grand talent, comme Charles Powell, conseiller à la Représentation permanente du Royaume-Uni auprès de la CEE (1980-1983) et Tim Lankester, permanent secretary de l’ODA à Londres de 1989 à 1994. La structure de l’administration britannique était plus cohérente que celle de l’administration française, constituée de nombreuses entités et dont l’influence déclina en partie pour cette raison au fil des conventions de Lomé successives68. Au sein de la Commission également, certaines personnalités servirent la cause britannique, en particulier Maurice Foley et Kaye Whiteman, qui, selon ce dernier, avaient été « officieusement chargés de vendre l’influence britannique dans le contexte d’une relation avec les pays africains auparavant dominée par la France69 ». Les ministres du développement outre-mer britanniques comme, par exemple, Timothy Raison et Chris Patten, développèrent également une « coopération réellement fructueuse » avec Dieter Frisch, directeur général de la DG VIII, tandis que, pour sa part, Lynda Chalker entretint de bonnes relations avec Dieter Frisch comme avec Peter Pooley70, directeur général par intérim de la DG VIII. C’est grâce à cette entente cordiale que Dieter Frisch fut convié à deux reprises à s’exprimer devant le Foreign Affairs Committee (commission parlementaire des Affaires étrangères), invitation qui fut l’occasion d’un échange de vues et ne connut pas d’équivalent dans les autres États membres.
37L’existence de liens historiques fut également de nature à favoriser l’influence britannique, en particulier la relation ancienne et suivie qu’entretenait le Royaume-Uni avec un grand nombre des pays ACP. Le Royaume-Uni, grâce à son « système de gestion décentralisée », était mieux représenté sur le terrain que la plupart des autres États membres71. Les Britanniques étaient donc mieux à même d’orienter et de coordonner les activités des donateurs. D’autres éléments plus fortuits contribuèrent également à renforcer le poids du Royaume-Uni. Ainsi, les Britanniques surent rapidement tirer profit de l’occasion que représentaient les présidences britanniques de mettre en avant des questions telles que la réglementation sur l’aide alimentaire ou la coordination des donateurs. Les représentants du Royaume-Uni furent également prompts à nouer des alliances temporaires, faisant campagne avec les Néerlandais sur la nécessité de conditionner l’aide communautaire au respect des droits de l’homme et avec les Allemands sur l’ampleur du budget de Lomé IV pour la période 1995-2000. Les Britanniques profitèrent en outre du fait que ni le tandem franco-allemand ni un autre groupe d’États membres n’exerçaient d’ascendant sur la politique communautaire d’aide au développement.
IV. Freins à l’influence britannique
38Compte tenu de ce qui précède, il peut paraître surprenant que le Royaume-Uni n’ait pas exercé davantage d’ascendant sur les orientations de la politique européenne d’aide au développement durant toute la période des conventions de Lomé (1975-2000). Bien que la Grande-Bretagne se soit constamment battue pour une aide européenne plus efficace, davantage de conditionnalité politique et économique et une rationalisation des structures et outils de développement, ses progrès sur chacune de ces questions furent lents et difficiles. Force est de constater que l’influence britannique se heurtait à de sérieux obstacles, en premier lieu d’ordre structurel. Le Royaume-Uni avait rejoint tardivement « un club déjà rôdé », dont il n’avait pas choisi l’approche (qui incluait par exemple une planification dirigiste et des mécanismes de soutien des prix72). Or, comme Peter Pooley le fait observer : « La structure était ainsi et il était difficile de la modifier73 ».
39Il faut ajouter à cela que, pendant les différentes conventions de Lomé, les Britanniques ne s’illustraient pas particulièrement dans le domaine du développement de l’outre-mer. Au cours de cette période, le programme d’aide britannique était le plus souvent géré par une « administration » plutôt que par un ministère, avec un budget en diminution. En outre, le Royaume-Uni « n’était qu’un État membre de la CEE parmi les autres, chacun pouvant mettre en avant ses propres priorités dans le cadre du Conseil des ministres du développement, si quelque chose lui tenait particulièrement à cœur74 ». Et les Britanniques n’étaient jamais certains de gagner la Commission à leur cause, les officiels dans cette institution européenne étant « beaucoup moins sensibles à l’aura du Foreign Office que les ministres anglais75 ». De son côté, la Commission avait pris confiance en elle depuis son rôle moteur dans les négociations de la CNUCED en 1973, pour devenir « une présence institutionnelle de premier plan dans le domaine du développement76 ». Selon Dieter Frisch, au milieu des années 1970, « la Commission était aux commandes […] et les États membres ne pouvaient la traiter sans égards. Les commissaires faisaient désormais preuve du même professionnalisme que les autres, savaient quoi proposer et réussissaient à obtenir des États membres des montants d’aide toujours plus élevés ». Dans ce contexte, ils pouvaient se passer des conseils des Britanniques, surtout Cheysson, négociateur avisé et fin connaisseur des questions africaines, et Pisani, le grand penseur du parti socialiste français.
40Un autre frein à l’influence britannique était le manque de popularité. Le Royaume-Uni était considéré comme un membre de la CEE « électron libre », réputé pour « jouer un rôle actif dans le domaine de l’aide européenne uniquement lorsque des intérêts commerciaux nationaux étaient en jeu ». Cette réputation limitait la capacité du Royaume-Uni à « convaincre ses partenaires européens de la réelle nécessité d’une réforme du FED77 ». En outre, l’absence d’alliances à long terme avec d’autres États membres rendait également difficile, pour le pays, l’utilisation de la méthode communautaire pour servir ses propres intérêts. Les mauvaises relations entretenues avec le Commonwealth n’arrangeaient rien, en particulier dans les années 1980, lorsque le Gouvernement Thatcher rechigna à imposer de véritables sanctions au régime de l’apartheid sud-africain et contribua à faire en sorte que les « questions politiques relatives à l’Afrique du Sud » restent en dehors du « dialogue ministériel officiel de Lomé78 ».
41Les différences idéologiques étaient-elles aussi importantes ? Hewitt affirme que le Royaume-Uni était souvent « en décalage » avec la CEE, en proposant des idées telles que l’évaluation de l’aide et une répartition des aides à égalité entre pays ACP et pays non-ACP, qui n’ont été adoptées que plusieurs années après79. Mais ce manque de synchronisation ne devrait pas masquer des différences idéologiques profondément ancrées entre le Royaume-Uni et la plupart des États membres de la CEE, plus particulièrement dans les années 1980, lorsque les Britanniques ont souscrit aux programmes d’ajustement structurel de la Banque mondiale. Selon un ancien haut fonctionnaire de la Commission « la Commission était en conflit ouvert avec la Banque mondiale à cette époque, parce qu’elle était francophone80 ». Hewitt va dans le même sens en faisant observer que :
« Dans le domaine de l’aide au développement et plus particulièrement des questions relatives à l’Afrique, le fait de se ranger du côté de la Banque mondiale et du Fonds monétaire international, basés à Washington… était le meilleur moyen de se mettre à dos les intérêts français dominants en matière de politique européenne d’aide au développement81… »
42En définitive, le pouvoir d’influence relativement faible du Royaume-Uni s’explique par les propres choix et priorités des Britanniques en Europe. À titre d’exemple, ces derniers ne sollicitaient aucun poste clé au sein de la DG VIII et « prétendaient que ce n’était pas important tant que les programmes d’aide étaient gérés efficacement », une attitude qui leur valut de perdre le contrôle des « hautes sphères82 ». Ce « manque d’influence au sommet » s’est ensuite aggravé lorsque le Royaume-Uni a cessé, bien que temporairement, de recruter par le biais de la filière European Fast Stream83. Cette décision réduisit inexorablement le flux des Britanniques parvenant à grimper les échelons vers les plus hautes fonctions de la Commission européenne et pas seulement à accéder aux postes de direction de celle-ci.
43Les priorités du Royaume-Uni, quant à elles, étaient moins la DG VIII, le FED ou le développement de l’outre-mer que la DG Commerce, la PAC et le marché unique européen84. Au début des années 1990, les débouchés commerciaux naissants en Europe de l’Est focalisaient l’attention, le Royaume-Uni attachant « davantage d’importance à l’efficacité de la future Banque européenne pour la reconstruction et le développement (qui aurait son siège à Londres) qu’à la réorganisation du FED85 ». Les Britanniques faisaient preuve de pragmatisme. Ayant compris qu’ils ne parviendraient pas à réformer le FED, ils « décidèrent de se tenir sur la réserve en tant que nouveau membre86 ». Comme ils avaient également prévu la tendance à la hausse de l’aide européenne, ils choisirent « non pas de ralentir ce mouvement, mais de l’accompagner et de l’influencer87 ». Compte tenu de leurs responsabilités résiduelles dans le Commonwealth, de la stagnation de leur budget d’aide au développement et de l’enveloppe financière substantielle de l’aide européenne en faveur d’un bon nombre de leurs anciennes colonies, les Britanniques comprirent qu’il n’était pas dans leur intérêt de jouer les perturbateurs. En outre, ils prirent conscience du fait que leur pays pourrait bénéficier des marchés lucratifs liés à l’aide européenne88. La suite leur donna raison : la part du Royaume-Uni dans ces marchés est passée de 10,5 % en 1975 à 15,3 % en 1988 (la part la plus élevée de tous les États membres), le pays se distinguant dans le domaine des fournitures et de l’assistance technique (voir tableau n° 2).
Tableau 2. Marchés du FED, classés par nationalité des entreprises au 31 décembre 1988 (en millions d’écus)
FED 4 | ||||||||
Nationalité | Travaux | Fournitures | Assistance technique | Total | ||||
Allemagne | 91,7 | 7,2 % | 101,7 | 18,6 % | 87,4 | 21,4 % | 280,7 | 12,6 % |
France | 287,3 | 22,6 % | 129,7 | 23,7 % | 75,8 | 18,5 % | 492,8 | 22,1 % |
Royaume-Uni | 56,0 | 4,4 % | 112,6 | 20,6 % | 63,6 | 15,6 % | 232,3 | 10,5 % |
Total CE | 1 270,2 | 100 % | 547,6 | 100 % | 409,0 | 100 % | 226,8 | 100 % |
FED 5 | ||||||||
Allemagne | 86,6 | 7,9 | 121,3 | 18,8 % | 103,3 | 22,2 % | 311,1 | 14,1 % |
France | 248,3 | 22,6 % | 128,0 | 19,8 % | 93,2 | 20,0 % | 469,5 | 21,2 % |
Italie | 102,1 | 9,3 % | 66,2 | 10,2 % | 45,2 | 9,7 % | 213,5 | 9,7 % |
Royaume-Uni | 84,7 | 7,7 % | 155,9 | 24,1 % | 74,7 | 16,1 % | 315,3 | 14,3 % |
Total CE | 1 099,5 | 100 % | 646,3 | 100 % | 465,6 | 100 % | 2 211,3 | 100 % |
FED 6 | ||||||||
Allemagne | 14,8 | 10,1 % | 2,6 | 3,9 % | 22,5 | 12,8 % | 39,9 | 10,2 % |
France | 2,0 | 1,4 % | 14,1 | 20,9 % | 24,8 | 14,1 % | 40,8 | 10,5 % |
Italie | 38,2 | 26,1 % | 2,3 | 3,5 % | 17,9 | 10,2 % | 58,4 | 15,0 % |
Royaume-Uni | 12,5 | 8,5 % | 13,8 | 20,6 % | 33,4 | 19,0 % | 59,7 | 15,3 % |
Total CE | 146,6 | 100 % | 67,2 | 100 % | 175,2 | 100 % | 389,1 | 100 % |
Source : DG VIII, Lomé III : bilan à mi-parcours 1986-1988, SEC (89) 1539, Bruxelles, 1989, p. 33.
Conclusion
44Le présent chapitre s’est penché sur l’influence mutuelle du Royaume-Uni et de la Communauté européenne entre 1975 et 2000. Il a montré comment la Commission européenne a exercé une influence sur la politique britannique d’aide au développement, mais seulement lorsque les réseaux opérationnels de la Commission ou son rôle de coordonnateur des politiques lui assuraient un avantage comparatif. L’influence de la Commission s’est indubitablement accrue à mesure qu’elle gagnait en confiance et œuvrait en faveur d’une plus grande cohérence des politiques, en particulier par le biais du traité de Maastricht. Pour sa part, le Royaume-Uni a contribué à la définition du cadre de la première convention de Lomé, la mise en place de nouvelles procédures d’évaluation de l’aide et fait campagne en faveur de la conditionnalité en matière de droits de l’homme. De manière générale, les Britanniques exercèrent une influence plus marquée lorsque d’autres États membres adhérèrent à leurs conceptions et lorsque « leurs vues rejoignirent celles de la Commission89 ». Leur capacité de persuasion fut moindre lorsque leurs arguments échouèrent à convaincre (le slogan « le commerce plutôt que l’aide » fut considéré comme un prétexte pour réduire l’aide) et lorsqu’ils se trouvèrent isolés du point de vue idéologique (comme dans le cas de l’ajustement structurel90).
45Il est donc clairement établi que le Royaume-Uni et la Commission européenne ont entretenu une relation d’influence mutuelle et non un dialogue de sourds. Même si les Britanniques durent parfois parler haut et fort pour parvenir à se faire entendre, ils ne furent pas relégués à l’arrière-plan de la scène européenne sur le sujet de l’aide au développement, contrairement à ce que suggéraient leurs déclarations dénonçant des contrats « arrangés » et le manque de réactivité de la Commission. Comme Dieter Frisch l’exprima, « il conviendrait d’établir une distinction entre la politique étrangère et un domaine comme celui de la coopération pour le développement, où […] les Britanniques jouaient le jeu parce qu’ils y avaient un intérêt91 ». Par conséquent, le fait que le Royaume-Uni ait été perçu comme un partenaire difficile ne peut s’expliquer par le bilan des premières années de participation britannique à la politique européenne d’aide au développement. La cause profonde de l’attitude relativement distante dont le Royaume-Uni fit preuve à l’égard de l’Europe réside sans doute ailleurs, probablement dans les questions de politique commerciale, agricole et socio-judiciaire qui portaient atteinte à la souveraineté britannique.
46L’arrivée au pouvoir d’un gouvernement travailliste en 1997 n’entraîna pas de changement spectaculaire dans l’attitude globalement constructive des Britanniques envers la politique européenne d’aide au développement. Ainsi, bien que Clare Short, secrétaire d’État au développement international, ait dénoncé en termes cinglants le gaspillage des moyens alloués dans le cadre de l’aide européenne et le fait que de nombreux programmes d’aide n’accordaient pas la priorité à la réduction de la pauvreté, elle continua néanmoins à participer activement aux travaux communautaires et s’efforça rapidement de renforcer l’influence britannique sur la politique d’aide au développement de l’UE en forgeant une alliance avec trois de ses homologues européens en charge du développement (les ministres allemand, néerlandais et norvégien92). Par ailleurs, le nouveau Gouvernement créa le Department for International Development (DFID) sous la forme d’un ministère autonome, le chargeant de rédiger un rapport sur la stratégie institutionnelle à déployer pour développer au maximum l’influence britannique au sein de l’UE et d’autres instances internationales. Le DFID reconnut explicitement l’intérêt de la coopération au sein de ces organes, soulignant dans son premier livre blanc sur le développement international que « nous ne devons ni surestimer nos propres capacités ni sous-estimer ce que nous sommes capables de faire avec les autres93 ».
Notes de bas de page
1 Stephen George, An Awkward Partner : Britain in the European Community, Oxford University Press, Oxford, 1998, p. 1 et p. 244.
2 Commentaires de Douglas Hurd, ministre des Affaires étrangères, cité dans The Independent, 16 février 1995.
3 Carol Cosgrove Twitchett, Europe and Africa, Saxon House, Farnborough, p. 169.
4 Adrian Hewitt, “Britain and the European Development Fund”, dans Anuradha Bose et Peter Burnell (dir.), Britain’s Overseas Aid since 1979, Manchester University Press, Manchester, 1991, p. 86.
5 Lynda Chalker, “The UK’s View of the Future of European Development Cooperation”, dans Marjorie Lister (dir.), European Union Development Policy, Palgrave, Houndsmills, 1998, p. 1-4.
6 Lotte Drieghe et Jan Orbie, “Revolution in Times of Eurosclerosis”, L’Europe en formation, n° 353-354, 2009, p. 179.
7 Adrian Hewitt et Kaye Whiteman, “The Commission and Development Policy” dans Karin Arts and Anna Dickson (dir.), EU Development Cooperation, Manchester University Press, Manchester, 2004, p. 140.
8 The Guardian, 23 février 2002.
9 Commission européenne, mémorandum de la Commission sur une politique communautaire de coopération au développement, Bull. CE, suppl. 4/71, Bruxelles, 1971.
10 Dieter Frisch, La politique de développement de l’Union européenne, ECPDM, Maastricht, 1998, p. 8.
11 Commission européenne, mémorandum sur une politique communautaire de développement, DG Relations extérieures, Bruxelles, 1972.
12 Commission européenne, mémorandum de la Commission au Conseil sur les relations futures entre la Communauté, les actuels EAMA et les pays d’Afrique, des Caraïbes, des océans indien et pacifique, visés au protocole n° 22 des actes d’adhésion, Bull. CE, 1/73. Bruxelles, 1973.
13 Entretien avec Dieter Frisch, directeur général de la DG VIII de la Commission européenne (1982-1993), Bruxelles, 2011.
14 Idem. Ce cadre a vu le jour avec le traité de Maastricht de 1992, qui oblige les États membres à harmoniser leurs politiques d’aide, et a été repris dans le traité de Lisbonne de 2007, qui plaide pour une plus grande complémentarité au niveau européen.
15 A. Hewitt, “Britain…”, op. cit., p. 86. Néanmoins, cette hausse générale n’était pas le résultat d’un choix, les contributions britanniques au budget européen pour les pays non ACP étant déterminées par le PNB du Royaume-Uni et votées par le Parlement européen.
16 A. Hewitt et K. Whiteman, “The Commission…”, op. cit., p. 142.
17 K. Arts et A. Dickson, EU Development…, op. cit., p. 142-143.
18 Entretien avec M. Lake, Bruxelles, 2011.
19 Entretien avec P. Pooley, Aylesbury, 2011.
20 L. Drieghe et J. Orbie, “Revolution…”, op. cit., p. 173 and p. 179.
21 K. Arts et A. Dickson, EU Development…, op. cit., p. 125.
22 Entretien avec D. Frisch, 2011.
23 Entretien avec P. Pooley, 2011.
24 Entretien avec Tom Glaser, ex-chef de la Représentation de l’UE à Budapest, Cardiff, 2011.
25 Entretien avec D. Frisch, 2011.
26 Idem.
27 Isebill Gruhn, “The Lomé Convention : Inching Towards Interdependence”, International Organization, vol. 30, n° 2, 1976, p. 254.
28 I. Gruhn, “The Lome Convention…”; op. cit.
29 Ibid.
30 L. Drieghe et J. Orbie, « Revolution… », op. cit., p. 175-176.
31 Article 186 (1) de Lomé IV, cité dans Gabriela Koehler, L’avenir du Stabex, ECDPM, Maastricht, 1988 (www.ecdpm.org/Web_ECDPM/Web/Content/FileStruc.nsf/index.htm?ReadForm& 0494954FBCCEBA36C1256C8B00374A69).
32 G. Koehler, L’avenir…, op. cit.
33 Entretien avec P. Pooley.
34 A. Hewitt, “Britain…”, op. cit., p. 89.
35 Le Royaume-Uni se prononça pour une baisse des prix du sucre dans l’intérêt des consommateurs britanniques, tout en réaffirmant son engagement à œuvrer au développement du Commonwealth.
36 Cité dans D. Frisch, La politique de développement…, op. cit., p. 12.
37 A. Hewitt, “Britain…”, op. cit., p. 88.
38 Entretien avec D. Frisch.
39 David Wall, “Britain, the EEC and the Third World”, in Roy Jenkins (dir.), Britain and the EEC, Macmillan, Houndsmills, 1983, p. 190.
40 Christopher Erswell, UK Aid Policy and Practice 1974-1990, Universal-Publishers, Florida, 2001, p. 66.
41 D. Frisch, La politique de développement, op. cit., p. 20.
42 Hassan Selim, Development Assistance Policies and the Performance of Aid Agencies, Macmillan, Houndsmills, 1983, p. 178 ; A. Hewitt, “Britain…”, op. cit., p. 88.
43 Baronne Young, House of Lords Debate, 1er juillet 1985, vol. 465, col. 1008.
44 Entretien avec un ancien haut fonctionnaire, Département des politiques d’aide, ODA, 2011.
45 Commission européenne, mémorandum sur la politique communautaire de développement, 15 Bull. EC suppl. 5, 1982.
46 Entretien avec M. Lake.
47 Entretien avec un représentant de la Commission, Bruxelles, 2011.
48 Anne Clywd, House of Commons Hansard Debates, 20 décembre 1989, colonne 937.
49 European Report, 13 juin 1990.
50 Entretien avec M. Ian Boag, ancien chef de quatre délégations de la Commission européenne, Bruxelles, 2011.
51 Entretien avec D. Frisch.
52 Baronne Chalker, House of Lords Debate, 13 décembre 1993, vol. 550, col. 1169.
53 Lynda Chalker, “The UK’s view…”, op. cit., p. 1.
54 A. Hewitt, “Britain…”, op. cit., p. 92.
55 Antonique Koning, “The European Commission”, dans Aidan Cox, John Healey and Antonique Koning (dir.), How European Aid Works, Overseas Development Institute (ODI), Londres, p. 131-136.
56 Interview de M. Lake.
57 ODI, EU Aid Post-Maastricht, ODI, Londres, p. 2.
58 Lynda Chalker, “Britain’s Role in the Multilateral Aid Agencies”, discours prononcé à l’ODI, 16 mai 1990.
59 Entretien avec P. Pooley.
60 Idem.
61 Idem.
62 Gordon Crawford, “Whither Lomé ? The Mid-Term Review”, The Journal of Modern African Studies, 34, p. 503-514.
63 La lettre Afrique Expansion, n° 392, 27 février 1995.
64 Agri Service International Newsletter, 13 avril 1995.
65 Karin Arts et Jessica Byron, “The mid-term review of the Lomé IV Convention”, Third World Quarterly, vol. 18, n° 1, 1997, p. 83.
66 K. Arts et J. Byron, “The mid-term review…”, op. cit., p. 76.
67 Entretien avec M. Lake.
68 Entretien avec D. Frisch.
69 The Guardian, 22 février 2002.
70 En qualité de commissaire européen chargé des relations extérieures (1999-2004), M. Patten contribua à renforcer la coopération entre la DG VIII et la DG commerce, entretien avec M. Lake.
71 Idem.
72 Entretien avec M. Lake.
73 Entretien avec D. Frisch.
74 Entretien avec T. Glaser.
75 Entretien avec des représentants de la Commission, Bruxelles, 2011.
76 Entretien avec M. Lake.
77 A. Hewitt, “Britain…”, op. cit., p. 87.
78 C. Cosgrove Twitchett, Europe and Africa, op. cit., p. 136.
79 Au milieu des années 1970, Judith Hart, ministre britannique du Gouvernement travailliste, a été la première à proposer cette répartition de l’aide entre pays ACP et pays non ACP ; entretien de D. Frisch.
80 Entretien avec M. Lake.
81 A. Hewitt, “Britain…”, op. cit., p. 90.
82 Entretien avec T. Glaser.
83 Idem.
84 A Hewitt et K. Whiteman, EU Development Cooperation…, op. cit., p. 143.
85 A. Hewitt, “Britain…”, op. cit., p. 95.
86 Geoffrey Howe, “The Future of the European Community”, International Affairs, vol. 60, n° 2, 1984, p. 187.
87 Entretien avec D. Frisch.
88 Lorsque le Royaume-Uni commença à remporter des marchés en Europe orientale, la Commission imposa un quota « afin d’empêcher que la valeur des marchés qu’ils remportaient n’excède la valeur, en proportion, de leurs contributions au FED » ; voir A. Hewitt, “Britain…”, op. cit., p. 88.
89 Entretien avec M. Lake.
90 A. Hewitt, “Britain…”, op. cit., p. 92.
91 Entretien avec D. Frisch.
92 Le groupe dit d’Utstein devint par la suite le groupe Nordique Plus, constitué de donateurs attachés aux mêmes principes.
93 DFID, Eliminating World Poverty, DFID, Londres, 1997, p. 20.
Auteur
Gordon D. Cumming est professeur titulaire des sciences politiques à l’université de Cardiff. Il est membre honoraire de la Royal Historical Society et enseigne en tant que professeur invité à Sciences Po, Bordeaux. Il débute sa carrière au sein du ministère des Affaires étrangères britannique. Ses intérêts de recherche portent sur les politiques africaines et de développement de la France, du Royaume-Uni et de l’Union européenne. Il se focalise également sur les organisations non gouvernementales françaises et anglo-américaines ainsi que sur les politiques de renforcement de la capacité de la société civile. Il a produit des rapports pour l’Institut français des relations internationales ainsi que pour Chatham House. En outre, il a publié de nombreux articles, chapitres et livres (Aid to Africa, 2001 ; French NGOs in the Global Era, 2009 ; et, avec le professeur Tony Chafer, From Rivalry to Partnership : New Approaches to the Challenges of Africa, 2011).
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