Conclusions de la septième partie
p. 1325-1326
Texte intégral
1L’année 1948 est décisive pour la direction de l’économie et des finances. Elle marque l’articulation du Plan Marshall (et les contraintes de l’ajustement occidental qui l’accompagne) au Plan Monnet, dont les objectifs sont remaniés dans la perspective de la « viabilité » pour 1952. Parallèlement, le dirigisme par les quantités et par les prix se desserre, entraînant l’affaiblissement de l’Économie nationale et l’affermissement de l’hégémonie des Finances.
2Toutefois, malgré la « crise française » de la fin de 1948 et les tentations déflationnistes des gouvernants Henri Queuille et Maurice Petsche, Jean Monnet, appuyé sur la « Triple Alliance », parvient à convertir les Finances à la « nouvelle orthodoxie expansionniste » et à sauver ainsi le financement des investissements du Plan. Mais la « logique de l’amont » et l’ampleur de l’aide américaine ont grandement facilité la tâche.
3La période qui s’étend du début de l’année 1949 à l’été 1950 se caractérise à la fois par la stabilisation financière et monétaire, le rétablissement éphémère de l’équilibre commercial et la poursuite de l’effort d’équipement, à l’heure de l’apogée du financement public national et américain. La France bénéficie en effet d’une part très importante de l’aide Marshall, à cause de sa place stratégique dans la Guerre froide, notamment du fait de l’audience du refus communiste. Jean Monnet apparaît comme l’un des principaux artisans du consensus atlantique sur l’interprétation des « postulats de Harvard », selon lesquels la réalisation du Plan Monnet constitue la meilleure utilisation des dollars Marshall. Il contribue à convertir une dépendance humiliante en convergence dynamique à travers la réalisation du Plan — incarnation de l’effort national — une avancée prudente sur la voie de la libération des échanges et la coopération européenne et une innovation sur le problème allemand, le plan Schuman.
4À l’heure où éclate la Guerre de Corée, la direction de l’économie et des finances semble avoir atteint ses fins, par une stratégie originale rejetant à la fois le dirigisme et l’austérité britanniques, la rigueur déflationniste et la dérive inflationniste.
5Mais le dérapage coréen de 1950, la réduction de l’aide Marshall et les efforts de réarmement compromettent la stabilisation, ruinent les espoirs de « viabilité » à l’horizon de 1952 et freinent le financement public des investissements. La discordance monétaire française en 1951 interrompt la marche à la libération des échanges et, malgré la création de la CECA, ramène l’économie à l’heure du bilatéralisme. La stabilisation relative des prix de l’expérience Pinay, en dépit des réductions des crédits d’équipement, ne compromet pas la réalisation du plan Monnet en 1952, grâce à la résistance du groupe d’experts expansionnistes et saint-simoniens, regroupés autour de la Triple Alliance et d’une direction du Trésor convertie.
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