Chapitre XXXIV. Stabilisation et expansion (1949-premier semestre 1950) II. L’apogée du financement public national
p. 1229-1265
Texte intégral
1Dans son dialogue avec François Bloch-Lainé, amorcé (en 1981) pour le colloque sur « la modernisation de la France dans les années 1944-52 », et poursuivi (en 1986) dans leur commun ouvrage, Jean Bouvier met en évidence le « singulier point tournant de l’année 1950 »1. Au-delà de cette date, l’historien constate la régression simultanée du niveau de l’investissement, de la part des entreprises nationales, du poids du financement public, ainsi que de l’effort d’investissement dans les dépenses publiques. Les années 1949-50 constitueraient, pour tous ces indicateurs, un véritable apogée, avant une régression durable.
2Il convient de bien distinguer, à propos de l’investissement, son intensité (à travers des repères macro-économiques), son contenu (grâce à des données méso- et même micro-économiques) et ses formes de financement (en s’interrogeant notamment sur la part des fonds publics) : on trouve là matière à plusieurs débats, qui ne se recoupent pas toujours2.
3En outre, il faut distinguer l’objet des controverses au sein de l’appareil d’Etat et celles qui transparaissent dans le débat public, dans les assemblées ou la presse3.
I. UN QUADRUPLE APOGÉE
1. L’apogée du financement sur fonds publics
4Les séries établies par le CGP ou par la Commission des Investissements mettent en évidence une évolution analogue, quant à la part des fonds publics dans le financement total des investissements. Pour le Plan, l’apogée se situe en 1948-49, autour de cinquante-sept pour cent, et le niveau de 1950 est encore proche, alors que la chute est nette en 19514. Pour la Commission des Investissements, si l’on inclut la Reconstruction — qui, jusqu’en 1950, privilégie celle des entreprises, aux dépens de celle des immeubles — l’apogée de la part des fonds publics se place également en 1949, avec une légère régression relative en 1950, mais une chute plus nette ensuite. Si l’on ne s’attache qu’aux crédits réalisés par le FME, l’évolution est voisine : apogée en 1950 (autour de la moitié du total des investissements), à un niveau très proche de celui de 1949, nette décroissance ensuite (cf. tableau 17, page suivante).
2. L’effort maximal pour le Trésor
5Si l’on se réfère aux courbes du premier chapitre, on s’aperçoit que, lors des années 1949-50, les investissements au sens strict (sans la reconstruction de la SNCF, ni de la flotte), ou large (avec elle) représentent la fraction maximale des charges du Trésor de toute la période 1932-52. C’est toujours vrai, si l’on ajoute la reconstruction des dommages de guerre5.
3. Le Plan des Quatre ?
6Si l’on prend la part des quatre principales sociétés nationales (CDF, EDF, GDF et SNCF), elle représente une part majoritaire du total des investissements en 1947-48, mais décroissante ensuite (cf. tableau 19). En revanche, si l’on s’attache à leur poids dans le total des crédits du FME, elle est écrasante en 1948-49, et encore quasi-majoritaire en 1950, nettement moins importante ensuite. Parallèlement, la part du financement public, et tout particulièrement du FME, dans le financement des investissements des quatre entreprises nationales, est largement majoritaire en 1949-50, décroissante ensuite6.
4. « Le point culminant des investissements engendrés par la Reconstruction » (Cl. Gruson)
7Le volume des investissements, tels que calculés par la Commission des Investissements, connaît à partir de 1949-50, un certain pallier, après une croissance7. Plus significative — outre l’incertitude de l’indice du prix des biens d’équipement comme déflateur — apparaît la part de l’effort d’investissement, soit le rapport entre la formation brute de capital fixe à la PIB. Dans l’ordre chronologique, le Rapport sur les Comptes de la Nation (1949-55)8, puis les calculs des auteurs de La croissance française, à partir des Comptes nationaux, convergent sur ce point : le niveau de 1949 n’est retrouvé qu’en 1955 pour les investissements totaux, et même en 1961, si l’on compte les seuls investissements productifs9. Claude Gruson, s’appuyant sur la première série décennale des Comptes de la Nation procède au même constat, à propos du rapport FCBF des entreprises (en volume)/PIB : il atteint 15,4 % en 1949 — contre une estimation de 9,3 % en 1938 — et n’est dépassé qu’en 1962. L’année 1949 lui apparaît comme « le point culminant des investissements engendrés par la reconstruction »10.
8L’affirmation peut prêter à discussion pour la comparaison avec les années antérieures. En effet, dans son étude sur le Revenu national — éditée en 1953 — M. Gavanier calcule un taux d’investissement supérieur à celui de 1949 pour les trois années précédentes (en prix constants). Bien que le raccord ne soit pas mauvais avec les séries partant de 1949, la comparaison est toutefois délicate, d’autant que ce sont des années de très forte inflation11. Du fait de l’ampleur de la reconstruction et de la faiblesse relative de la production par rapport au niveau, même déprimé, de 1938, il n’est pas étonnant que le taux d’investissement soit élevé en 1946-48, malgré la très grande incertitude des moyens de financement. La Comptabilité nationale n’a effectué des travaux que sur les années postérieures à 1949, ce qui tend à valoriser cette année référence, en comparaison avec les années postérieures ; et elle s’attache à l’investissement brut ou net. La Commission des Investissements a élaboré des statistiques sur les « investissements neufs » — notion intermédiaire — remontant à 1947, et donnant une estimation pour 1938. Les années 1949-50 connaissent une progression du taux d’investissement par rapport à 1947-48, mais celle-ci se poursuit en 195112.
II. L’INTENSITÉ DE L’EFFORT : LA COMMISSION DES INVESTISSEMENTS, ARÉOPAGE DE LA MODERNISATION
9Les décisions en matière de crédits d’investissements sur fonds publics relèvent du gouvernement et du Parlement. Mais — on l’a vu à travers les programmes d’investissements pour 1950, et surtout pour 1949 — c’est au sein de la Commission des Investissements que les principales options ont été prises, dont ni l’exécutif, ni le législatif ne se sont guère écartés.
1. La « triple Alliance », moteur de la Commission
Le pôle « économique »
10La Commission des Investissements, créée par le décret du 10 juin 1948 modifié en novembre 1948, comprend, sous la présidence du ministre des Finances, six membres permanents et plusieurs membres occasionnels. Parmi eux, on peut distinguer un pôle économique, dans la mesure où ceux qui s’y situent s’attachent d’abord au contenu économico-technique des programmes d’investissement sous examen. On y trouve deux membres permanents : le Commissaire général au Plan et le directeur des Programmes économiques du secrétariat d’État à l’Économie nationale ou leurs représentants. Il s’y ajoute les représentants des ministères techniques, présents lorsque les programmes examinés intéressent leur département : parmi eux, le ministère de l’Industrie joue le rôle principal, du fait du poids des grands programmes industriels13. Ces trois séries de services forment une triple Alliance qui — on l’a vu — se montre la plus active à défendre les niveaux de dépenses pour les investissements, face aux tentations déflationnistes du ministre des Finances. Les représentants des ministères techniques interviennent le plus souvent pour préciser le contenu des programmes financés, et souligner ainsi les contraintes issues de leur cohérence économico-technique, face aux ajustements purement financiers. Le directeur des Programmes est chargé d’apprécier les programmes, en fonction des disponibilités matérielles et humaines (énergie, matières premières, main-d’œuvre). Dans les faits, Pierre Grimanelli, ou son représentant, se montrent de loyaux exécutants des orientations du Plan14.
11C’est le CGP — le plus souvent représenté par Étienne Hirsch — qui fait figure de stratège de l’Alliance, portant la vue la plus loin, vers les objectifs de 1952, et au-delà, et tenant à assurer la cohérence globale du Plan. Il propose les premiers arbitrages et définit l’étendue des compromis. En 1949 et en 1950, Jean Monnet lui-même a largement réussi à emporter l’adhésion des autres membres de la Commission pour l’apologie des investissements.
Le pôle « financier »
12À l’autre pôle, on trouve les « financiers » : le directeur du Budget, le Gouverneur de la Banque de France et le Président-directeur général du Crédit national. Si la triple Alliance représente le moteur de la Commission quant à la politique des investissements, cette triade, aux titres plus anciens, et aux fonctions plus prestigieuses, en est plutôt le frein, comme on l’a vu pour Roger Gœtze en 1950. Cela ne signifie pas toutefois affrontement entre deux lignes bien tranchées : d’ailleurs, pour les investissements de 1949 et de 1950, la Commission a rejeté unanimement « une conception sommaire » de l’équilibre, qui amputerait trop les dépenses d’investissements. Wilfrid Baumgartner n’est pas Jean Tannery, et Roger Gœtze pas davantage Yves Bouthillier : la déflation n’est plus un dogme. Et, en retour, les « économiques » ne sont pas indifférents aux dangers inflationnistes, comme l’a montré Jean Monnet. Le second rapport de la Commission contient d’ailleurs, dans sa conclusion, l’exigence de ressources structurelles nouvelles, destinées à couvrir les charges des dépenses d’investissements pour une longue période.
La position stratégique du Trésor
13Au cœur du dispositif, la direction du Trésor, à laquelle est confié le secrétariat de la Commission15. Elle est chargée de préparer les compromis pour les ajustements définitifs. François Bloch-Lainé a raconté, à plusieurs reprises, son souci d’alors de transformer « les liquidités en barrages »16. Son grand mérite est de n’avoir pas savouré seul sa victoire de janvier 1948, lui assurant l’autorité sur le FME, et d’avoir partagé, au sein de la Commission, la responsabilité du choix des programmes à financer, en particulier avec les services responsables de la dépense. Toujours prêt à alléger les charges pesant sur la Trésorerie par des étalements, des freinages de travaux ou la recherche d’autres sources de financement, le directeur du Trésor n’en a pas moins globalement épousé les raisonnements de la triple Alliance, dont on trouve l’écho explicite dans les rapports publiés.
2. Un « tribunal d’appréciation »
14La Commission joue le rôle d’une sorte de Conseil de gestion du FME17. Elle intervient — on l’a vu — pour proposer les chiffres globaux (Équipement des Services civils ; Reconstruction ; Prêts et garanties d’équipement) à inscrire dans la « loi des maxima » : dans les faits, les grands arbitrages proposés au Ministre s’effectuent en son sein. Ensuite, elle fait des propositions de répartition des crédits votés, afin de préparer le projet de loi de « développement des dépenses d’investissements », et, notamment, pour ventiler les versements du FME18. Enfin, elle formule des avis sur les conditions financières des prêts et exerce un certain contrôle de leur emploi.
15Si les membres de la Commission constituent l’instance d’arbitrage suprême, le travail d’examen et de propositions est réparti entre les huit groupes de travail spécialisés. L’organisation intérieure de la Commission est fixée, lors de la séance du 28 février 1949. Les réunions ont lieu en principe les premiers lundis de chaque mois. Mais, pour des raisons particulières, la périodicité est parfois plus resserrée. Maurice Petsche rappelle que la Commission est « une sorte de tribunal d’appréciation appelé à préparer les arbitrages », qu’elle est un « organe consultatif, qui opère sous l’autorité du gouvernement », et dont les débats doivent demeurer confidentiels19.
3. Le poids de Jean Monnet
16Jean Monnet, malgré son échec de l’année précédente, ne désespère pas de s’assurer une emprise sur la Commission. L’article six du décret d’organisation prévoit que l’étude des projets d’investissements intervient « après avis du Commissariat général au Plan »20. Et, lors de l’établissement des dernières propositions pour les investissements de 1950, en novembre 1949, Jean Monnet obtient le droit de « suivre l’emploi des prêts du FME concurremment avec les administrations de tutelle »21. L’article 4 de la loi de développement — 21 juillet 1950 — prévoit effectivement que les prêts du FME seront ordonnancés, sur avis du CGP, afin de compléter son rôle de proposition des programmes d’équipement, en lui donnant « les moyens de veiller à leur bonne exécution, et de concourir (...) au contrôle de l’utilisation des fonds publics qui leur sont affectés »22. Ainsi, Jean Monnet dispose d’un visa, obligatoire à partir du second semestre de 1950, mais appliqué dès le début de l’année. Il peut ainsi suivre officiellement l’utilisation des crédits d’équipement.
17Certes, la gestion du FME reste — selon le régime provisoire, fixé en 1948 et qui perdure — organiquement liée au Trésor, mais le rôle du CGP, bien que consultatif, consiste, dans les faits, à s’assurer de la bonne exécution des investissements du Plan.
18Il n’est pas sûr que Jean Monnet, averti des susceptibilités et prérogatives de l’Administration (et surtout celle des Finances), ait souhaité une institutionnalisation plus poussée du CGP. Il savait que son arme essentielle, selon l’expression d’Etienne Hirsch, était encore « la salive »23.
III. LE CONTENU : LE PRIVILÈGE DES ENTREPRISES NATIONALES ?
19L’intervention de la Commission des Investissements quant au contenu des investissements peut se mesurer à travers une approche quantitative (par la part des crédits accordés dans le total du FME) ou qualitative (par les conditions de crédit). La part des entreprises nationales, dans les deux cas, apparaît prépondérante : encore convient-il de savoir s’il s’agit là d’une préférence de principe des représentants de l’État ou du résultat d’un ensemble de faits plus complexes.
1. L’approche quantitative
20La Commission a eu à débattre de tous les projets d’investissements sur fonds publics, soit, d’après ses propres calculs, autour de soixante pour cent du total des ressources estimées à la réalisation d’investissements en métropole et dans l’Union française24. Mais, en outre, elle a examiné des programmes financés par d’autres sources, lorsqu’ils étaient primitivement conçus avec financement public, ne serait-ce que pour s’assurer de leur réalité, et se garantir que le désengagement des fonds publics ne signifiait pas l’abandon des travaux. La corrélation observée au niveau macro-économique se retrouve pour chaque branche ou entreprise. On s’aperçoit qu’il y a corrélation assez étroite, surtout en 1949, entre la part du total des crédits FME et celle du financement public sur l’ensemble des investissements. Autrement dit, les entreprises nationales, qui représentent soixante-douze pour cent du total (en 1949) et quarante-huit pour cent (en 1950), ont bénéficié de la plus grosse part des crédits du FME, qui ont constitué, pour elles, l’essentiel du financement de leurs investissements.
2. La politique du crédit
21Au printemps et à l’été de 1949, la Commission des Investissements adopte la plupart des conventions avec les organismes de crédit intermédiaire, afin de définir les conditions aux bénéficiaires.
22Les principes destinés à formaliser une certaine « jurisprudence » de la Commission, sont définis à la séance du 20 juin 1949, en présence de Maurice Petsche et d’Edgar Faure, à partir d’une note de Pierre Besse, représentant du Gouverneur de la Banque de France25. Mais, dès la séance du 4 avril, la Commission a approuvé les projets de convention des Quatre entreprises nationales. Il apparaît, dans le tableau récapitulatif, que seules les entreprises nationales (et l’équipement public des établissements non métropolitains) n’ont pas à passer par un organisme de crédit intermédiaire. Elles disposent, en outre, de taux réduits (4 ou 4,5 % pendant trente ou quarante ans), alors que la règle générale (avec plusieurs exceptions) pour les entreprises diverses est de reprendre les conditions habituelles de l’établissement prêteur (cf. tableau, p. suivante).
3. « Des éléments de fait, indépendants de toute position théorique... »26
23Si la plupart des membres de la Commission des Investissements font l’apologie des investissements de base, ce ne sont pas des adeptes, par principe, du financement sur fonds publics. Ainsi, au sujet du volume comme des conditions des crédits accordées aux entreprises nationales, leur traitement de faveur, de fait, ne résulte pas de leur statut juridique. La note de Pierre Besse, largement reprise par la Commission, et partiellement publiée dans son troisième rapport, développe les principaux arguments justifiant les choix d’une politique différentielle en matière de crédit.
Un triple critère
24Tout en rappelant les inconvénients d’un taux d’intérêt à long terme, alors trop élevé — le taux normal du Crédit national est alors de sept pour cent ( !) — la Commission reprend à son compte l’idée du danger de « taux de faveur », qui peuvent d’autant plus « fausser les lois de la concurrence » que les versements accordés aux entreprises privées sont limités27. Cependant, Pierre Besse fait admettre trois critères pour envisager d’accorder des avantages, par rapport aux conditions du marché :
« L’importance de l’investissement par rapport au produit annuel » ; il s’agit donc de faciliter les investissements les plus « lourds », des secteurs « à forte densité capitalistique » ;
« l’importance du prêt par rapport au passif antérieur » ;
« l’importance de la production envisagée pour l’économie générale », intéressant les entreprises « dont la production est très largement utilisée par l’économie tout entière »28. Mais, dans le même temps, la commission reconnaît que « des avantages comparables devraient être consentis à toutes les entreprises similaires »29.
25La combinaison de ces principes aboutit, dans les faits, à ce que la Commission concentre délibérément ses interventions sur certaines activités de base, en laissant le marché disponible pour les autres. En cas de ressources résiduelles, le FME reprendrait les conditions des organismes financiers intermédiaires agissant pour leur compte, tels le Crédit national, la Caisse nationale de Crédit agricole, ou le Crédit hôtelier. Ainsi, l’octroi de conditions de crédit « nettement plus favorables que celles du « marché » » aux grandes entreprises nationalisées ne résulte pas d’abord de leur statut juridique. Dans les faits, cette situation provient de la coïncidence entre une grande partie des secteurs de base et les principales nationalisations d’après guerre. La Commission retient les trois critères présentés par Pierre Besse pour justifier ces avantages.
La coïncidence avec les secteurs de base
26Les Quatre grandes entreprises nationales appartiennent à des secteurs « lourds ». Leurs immobilisations sont très pesantes : huit à neuf fois le chiffre d’affaires annuel pour EDF, dont les investissements neufs, pour 1949, avoisinent quatre-vingts pour cent du montant des recettes de l’année. En revanche, leur endettement « n’apparaît pas encore excessif », en particulier du fait de la dévaluation depuis leur passage dans le secteur nationalisé30. Mais l’équilibre de leur gestion est fortement entravé par la politique de bas tarifs — malgré les réajustements de Jules Moch et René Mayer, qui ont surtout porté sur le charbon — imposée par les gouvernements. À cet égard, ils ont mené une politique différente de celle conduite dans d’autres États européens, en particulier celle des travaillistes britanniques, qui ont relevé les prix de vente dans les secteurs de base, afin de faciliter l’autofinancement31. Pour ses premiers travaux sur les années 1951-1952, la Commission des Comptes de la Nation développe l’idée qu’en contraignant ainsi les entreprises nationales à vendre à des prix inférieurs ou voisins du coût moyen d’exploitation, l’État a dilué la charge de leurs investissements sur l’ensemble de la population ; cette politique a dispensé en partie les clients des entreprises nationales — notamment les gros utilisateurs d’énergie ou de moyens de transport — de leur part de cette charge, et a abouti à voiler les bénéfices qu’ils ont ainsi pu retirer32. En outre, une telle pratique, non sélective, a pu fausser le calcul économique des entrepreneurs et des consommateurs, en incitant à des faux emplois ou à des gaspillages, encore amplifiés par la politique de subventions, toujours présentes, malgré les résolutions de René Mayer en 1948.
Les « effets en chaîne »
27Les responsables du CGP soulignent les retombées sur l’économie tout entière de l’atténuation des prix de revient, en raison de l’importance des activités.
28Les rapports du CGP et de la Commission des Investissements insistent avec force — et Jean Monnet le repète inlassablement — sur les « effets en chaîne » des sommes mises à la disposition des entreprises nationalisées qui, en fait, ne font que transiter par elles, et sont redistribuées entre les industries privées d’équipement, à travers les commandes d’outillage et de travaux : c’est le cas des entreprises de bâtiment et de génie civil, des constructeurs de matériel mécanique, électrique, ferroviaire, ou des constructions navales, et, au second degré, de la sidérurgie et des matériaux de construction33. Les calculs du CGP pour l’année 1949 estiment que les investissements — il s’agit d’« investissements bruts », incluant l’entretien et l’accroissement des stocks — financés directement par les fonds publics ont atteint la moitié de la production totale des biens de capital, qui entre pour un tiers dans l’ensemble de la production industrielle34. Pierre Besse ajoute un quatrième argument : les avantages attribués ne faussent pas les lois de la concurrence, car « le caractère monopolistique des grandes entreprises nationalisées ne peut être contesté »35. Dans le cas des transports, toutefois, la question se pose. Pour la SNCF, la Commission convient que les conditions de la concurrence lui sont défavorables, car, contrairement aux transporteurs routiers, elle a la charge exclusive de l’entretien du réseau. Pour Air France, le cas était également différent : la Commission l’examine, à sa séance du 6 février 1950. Pierre Grimanelli, soutenu par Étienne Hirsch, défend l’idée que l’extension des conditions accordées aux autres entreprises nationales ne saurait être automatique, car la détermination de la Commission s’est faite « en fonction de la nature des investissements à réaliser et non d’après le statut juridique des emprunteurs » ; il ajoute qu’Air France « fait partie d’un secteur concurrentiel et il n’y a pas de raison de principe de la faire bénéficier de conditions aussi favorables »36. Bien que transportant quatre-vingt-dix pour cent des avions français, l’entreprise ne dispose pas d’un monopole. Cependant, comme un tarif homologué par le ministère des Travaux publics et des Transports s’impose à toutes les compagnies, la concurrence ne peut jouer par des modifications de tarifs. En définitive, la Commission décide, à la séance suivante — après étude confiée à Pierre Besse — de faire bénéficier Air France de conditions de crédit identiques à celles des entreprises nationales énergétiques — 4,5 % et durée uniforme de douze ans — pour une triple raison. Tout d’abord, la compagnie est « astreinte aux obligations spéciales d’un service public non connues des autres compagnies françaises » ; ensuite, François Bloch-Laine fait valoir que « la plupart des grandes compagnies étrangères bénéficient de subventions et d’avantages indirects » ; et, enfin, il ajoute : « certains avantages financiers doivent être réservés à Air France puisque le gouvernement et le Parlement veulent intéresser les capitaux privés à la gestion de l’affaire »37. À cette date, en effet, un projet de « reprivatisation » (Pierre Besse) partielle porte sur le placement de 1,5 milliard d’actions auprès d’actionnaires privés, pour dix milliards de capital, constitué par des actions appartenant à l’État38.
29Pour l’équipement agricole, la Commission décide de s’en tenir aux conditions habituelles consenties par les organismes de crédit qui doivent servir d’intermédiaires (Crédit Foncier, Caisse nationale de Crédit Agricole). De même, pour les entreprises industrielles et commerciales (Crédit national, Crédit hôtelier), y compris pour les industries agricoles et alimentaires. Elle ne réserve que « certains cas exceptionnels » : l’industrie de l’azote (cinq pour cent par l’intermédiaire du Crédit national), du fait que « le gouvernement poursuit une politique visant à procurer aux agriculteurs des engrais à bon marché »39.
30Il est aussi une autre branche privée qui, à la fois pour le volume et les conditions de crédit, bénéficie de la même priorité que les entreprises nationales : la sidérurgie.
4. Une brillante exception : la sidérurgie
31En 1949-50, la sidérurgie bénéficie respectivement de 12,4 et de 26,5 milliards de fonds publics pour ses investissements, dont 8,4 et 23,8 issus du FME. Les seules entreprises sidérurgiques récoltent un cinquième (en 1949) et un tiers (en 1950) du financement public total (Reconstruction et Équipement) des investissements de l’industrie et du commerce privés. Elles obtiennent du FME autant (en 1949), ou presque deux fois plus (en 1950) de crédits que toutes les autres entreprises industrielles et commerciales réunies : le seul financement des trains à bande d’Usinor et de la Sollac représente la quasi-totalité des versements à la sidérurgie en 1949, et plus de soixante-dix pour cent en 195040. Les crédits à Usinor ont été décidés avant l’institution de la Commission des Investissements. La Sollac sollicite un prêt pour l’équipement d’un train à bande, à la fin de 1948, pour un total de seize milliards de francs, avec des conditions très avantageuses par rapport à celles du marché (un taux d’intérêt de 2,5 % en trente-cinq ans ou de trois pour cent en cinquante ans). Les membres de la Commission sont unanimes pour souligner le caractère « primordial » (Étienne Hirsch) de l’installation de ce second train à bandes41. La discussion porte sur les conditions de prêt. François Bloch-Lainé recommande la prudence en matière financière : « L’État a un intérêt évident à l’installation du train à bandes, mais les conditions de taux et de durée de l’emprunt demandé doivent être fixées de façon raisonnable (...) il faut éviter les conditions de prêts génératrices de profits anormaux »42. La triple Alliance (CGP, Ministère de l’Industrie, direction des Programmes de l’Économie nationale), très favorable à l’opération pour son intérêt économique, n’est pas hostile à des conditions de prêts très avantageuses. Toutefois, Étienne Hirsch ajoute : « On peut se montrer très libéral pour le taux et la durée du prêt, mais d’un autre côté, il convient d’assurer un avantage à l’État »43. Vallée, représentant de l’Industrie, propose de réduire la durée de l’amortissement en fonction inverse du chiffre d’affaires44.
32Lors de la réunion suivante de la Commission, le directeur de la Sidérurgie, Albert Bureau, qui, depuis 1946, mène une âpre lutte pour obtenir un droit de regard sur le financement des travaux, par la présence d’un commissaire du gouvernement au sein du Groupement de l’industrie sidérurgique (GIS), n’est pas tant intéressé par les conditions financières du prêt, que par la réalité de la modernisation. Il est « d’avis de lier l’attribution du prêt à la Sollac à l’engagement que devraient prendre les participants de la société de moderniser leurs installations sidérurgiques suivant les directives de la Commission de modernisation de la Sidérurgie »45. Lorsque sont introduits les représentants de la Sollac (MM. Daum, Célier et Dhers), Étienne Hirsch annonce le souhait de la Commission de leur accorder des conditions avantageuses, à condition qu’en échange « les sociétés sidérurgiques fassent des efforts pour réaliser les objectifs fixés par la Commission de modernisation de la sidérurgie »46. Léon Daum proteste de sa fidélité aux objectifs du Plan : le marchandage modernisation contre financement public, avec tous les aléas de part et d’autre, est apparu comme la meilleure formule, aux yeux de la triple Alliance comme de l’ensemble de la Commission. Mais le Plan ne pousse pas à un contrôle étroit, comme le souhaitait la direction de la Sidérurgie : Étienne Hirsch n’est pas d’avis d’installer un commissaire du gouvernement auprès de la Sollac, mais seulement d’assurer un droit de regard de l’État sur la répartition de la production47. En fin de compte, la Sollac obtient des conditions de crédit proche de celles des entreprises nationalisées48.
33Au total, la sidérurgie (si on y ajoute les centrales thermiques et les cokeries), du fait de sa place stratégique dans la croissance française, a été la branche industrielle de très loin la mieux pourvue : la présence de sociétés privées n’a pas été un obstacle, même si le démarrage plus lent des opérations, du fait des incertitudes en 1946-47, les a rendues plus vulnérables, lors des décisions de réductions financières49.
5. Un contre-exemple : la RATP
34À l’autre pôle, certaines activités du secteur public ou d’entreprises nationales, qui n’ont pas été jugées prioritaires, ont dû subir des freinages importants, ou même différer leurs programmes d’équipement.
35Il en est ainsi de l’équipement social, scolaire, culturel et administratif, touché par les économies sur le Budget de Reconstruction et d’Équipement (des Services civils) en 1949-50.
36Il en est de même pour la nouvelle RATP (dont le régime provisoire cesse à la fin de 1948). Le programme pour 1950 est très fortement réduit, lorsqu’il traverse le double filtre de l’Office régional des Transports parisiens, puis de la Commission des Investissements50. La Régie ne peut même bénéficier des crédits du FME : c’est la Caisse des Dépôts qui lui accorde deux milliards pour la poursuite des opérations en cours. Malgré la vétusté et l’usure d’une grande partie des équipements et du matériel — pour le réseau ferré comme pour le réseau routier — et l’insistance des dirigeants de l’entreprise pour engager des dépenses de modernisation, nécessaires à terme pour équilibrer le compte d’exploitation — aux termes de la loi du 21 mars 1948, la Régie ne doit équilibrer ses dépenses que sur seules recettes. L’État prive l’entreprise à la fois de crédits d’équipement pour sa modernisation, et de ressources d’exploitation en lui imposant une politique de bas tarifs (voir graphique page suivante).
37Cette situation économique ne se limite pas aux années du premier Plan, mais se poursuit lors des second et troisième plans, au point que nous avons qualifié d’« âge sombre » la première décennie de la RATP51. Bien qu’entreprise nationale, elle ne bénéficie pas du financement public. Il lui faut attendre le début des années soixante pour connaître la modernisation et l’expansion. Elle doit principalement cette disgrâce au fait de ne pas être considérée comme activité de base. À cela, s’ajoute la mauvaise image de marque des dirigeants des anciennes compagnies, les difficultés des nouveaux responsables à assurer leur autorité sur une (double) entreprise — dont la fusion est délicate — où l’épuration a laissé des rancœurs tenaces, et qui ne dispose pas des cadres techniques suffisants pour bien maîtriser son développement.
6. Les effets contraires du freinage des investissements et de l’infléchissement des objectifs
38Dans l’ajustement successif des versions du Plan, les infléchissements ont porté en particulier sur la liste des activités de base.
La troisième version du Plan (décembre 1949) : freinage et diversification
39L’impératif, désormais prioritaire, de la « viabilité », conduit Jean Monnet à présenter une nouvelle version du premier Plan, largement inspirée de la réponse à l’OECE de l’année précédente. Son rapport, publié en décembre 1949 et intitulé « Réalisations 1947-49 et objectifs 1950-52 », confirme le souci d’assurer l’équilibre des comptes extérieurs. L’effort de relèvement du Revenu national est quelque peu réduit par rapport à la version de 1948 : en 1952, il doit être supérieur de vingt-cinq pour cent à celui de 1948 et de quinze pour cent à celui de 192952. Le ralentissement de l’effort de production des activités de base est confirmé : le rythme d’accroissement est ralenti (électricité, sidérurgie) ou les objectifs sont, en valeur absolue, inférieurs à ceux prévus en 1946 pour 1950 (charbon, ciment, machinisme agricole). Le niveau de production énergétique et de ciment est jugé suffisant — compte tenu du freinage de la Reconstruction — pour faire face aux besoins intérieurs et d’exportation. La concurrence étrangère justifie la révision en baisse pour le machinisme agricole ou les machines-outils. En outre, la diversification des activités de base s’accroît encore par rapport à 1948, par l’adjonction de trois groupes : les activités qui jouent un rôle important dans le développement économique général (chimie de base, industrie du coke et du gaz), celles qui sont propres à alléger le déficit commercial (métaux non ferreux, textiles artificiels et pâtes à papier), celles enfin qui peuvent accroître l’actif de la balance commerciale (marine marchande, aviation civile et commerciale, tourisme).
La contrainte de la ressource : la contradiction freinage-diversification
40Mais la volonté de diversifier les objectifs intervient chronologiquement au moment où les contraintes financières poussent aux abattements.
41Or, on se souvient que le raisonnement présenté par le Plan, repris par la Commission des Investissements et admis par le Ministre, consiste à opérer les réductions, non pas de manière proportionnelle et indifférenciée, mais sélectivement : ce sont les opérations nouvelles ou annuelles qui sont les plus touchées, afin de préserver les opérations déjà engagées à cinquante pour cent ou plus sur plusieurs exercices, dont l’interruption serait plus coûteuse que bénéfique. Dans ces conditions, les activités de base du Plan de 1946 se trouvent privilégiées, par le fait que leurs grands programmes d’équipement ont été engagés avant 1948. Et parmi elles, les entreprises nationales ont été les plus précoces. Les programmes sidérurgiques sont retardés en 1946-47 par les controverses entre les firmes et la Dirsid. Toutefois, la plupart des activités nouvellement promues relèvent de sociétés privées. Malgré la volonté évidente du Plan, notamment pour l’industrie de transformation, de les faire également bénéficier du financement public, elles se trouvent triplement pénalisées.
Les réductions avant adoption
42D’abord, celles-ci sont les principales victimes des réductions successives, lors des débats avant l’adoption des chiffres pour la loi des maxima. Pour les investissements de 1949, les crédits pour l’industrie privée ont été, avec ceux de la SNCF, les plus réduits ; et l’estimation originelle n’était pas la demande des entreprises elles-mêmes, mais déjà une évaluation fortement comprimée de la Commission Boutteville53. Pour 1950, la réduction a été d’emblée opérée par Jean Monnet. Pour l’agriculture et le machinisme agricole, entre les premières demandes émanant du ministère de l’Agriculture et les chiffres de la loi, l’abattement a été de cinquante-cinq pour cent54.
Les réductions lors de la répartition
43Lors de la répartition des chiffres, l’écart est grand entre les demandes qui parviennent à la Commission des Investissements et les ressources disponibles.
44Le groupe de travail n° 7, chargé de répartir le crédit des « industries diverses » ne dispose pas, dans les faits, d’une grande marge de manoeuvre. Présidé par Jacques Brunet, Président-directeur général du Crédit national, il comprend des représentants des deux ministères techniques (Industrie ; Travaux publics), chargés d’effectuer un premier tri parmi les demandes de crédit55. En 1949, lors de la séance du groupe de travail, le 15 juin, les demandes recensées par les deux ministères techniques s’élèvent à presque soixante-dix milliards. Une dizaine de milliards correspondent aux crédits destinés aux entreprises bénéficiaires de la loi du 23 mars 1941 — accordant la garantie de l’État. Il s’agit d’investissements à la fois importants et engagés depuis plusieurs années, afin de résorber les goulots bien connus dans les secteurs amont de l’industrie : centrales thermiques (utilisant les gaz des hauts fourneaux), cokeries sidérurgiques, fonderie de l’aluminium, alliages légers. Si on y ajoute les 8,2 milliards réservés aux trains à bande prioritaires d’Usinor et de Sollac, il ne reste plus qu’environ cinq milliards sur les vingt-trois réservés par la loi de développement, pour des demandes s’élevant de cinquante milliards56. Le groupe de travail propose de répartir un total porté à vingt-neuf milliards, du fait des retards prévisibles dans la réalisation, et décide une ventilation, où les ports et le tourisme obtiennent trois milliards et les industries près de sept (dont plus de soixante-dix pour cent pour la sidérurgie, la chimie, les constructions mécaniques et électriques). Au total, une vingtaine d’entreprises se partagent plus de quatre-vingts pour cent des crédits (Usinor, Sollac, la Sofal, la Scal, six centrales de la sidérurgie, sept cokeries sidérurgiques, quatre diverses)57. En 1950, la situation est voisine. Lors de la répartition, effectuée cette fois-ci plus tôt dans l’année (début mars), le groupe de travail n° 7 reprend la même démarche : « Il a considéré que devaient être financés par priorité les programmes qui sont en cours de réalisation »58. Parmi ces programmes, les laminoirs d’Usinor et de Sollac et les entreprises relevant de la loi du 23 mars 1941 représentent près de vingt-deux milliards sur les trente et un à répartir59. Ainsi, la Commission des Investissements précise, dans son troisième rapport, qu’elle « s’est préoccupée de trouver (...) des moyens de financement extérieurs au FME et de diminuer d’autant les concours demandés au Fonds (...) les prêts du FME constituent un mode de financement de caractère tout à fait exceptionnel, qui doit compléter provisoirement les moyens qui sont normalement à la disposition des entreprises pour la couverture de leurs dépenses d’investissements »60. Les membres de la Commission s’assurent de l’existence éventuelle de ressources autres (crédits bancaires à moyen terme, prêts des organismes spécialisés, autorisations d’accéder au marché financier), afin de réserver les ressources (insuffisantes) du FME aux opérations d’un intérêt économique « indiscutable », et généralement d’une ampleur telle que, sans le recours au Fonds, elles auraient été retardées ou abandonnées61. Le pouvoir de sélection décisif appartient en grande partie au ministère de l’Industrie, qui soumet ses propositions au groupe de travail n° 7. Mais la part qui revient aux « industries diverses » — dont la détermination, on l’a vu, relève de la Commission des Investissements et, en grande part, du Plan — est tellement faible par rapport aux demandes, que les choix sont quasiment commandés à l’avance, par la poursuite, en priorité, des opérations « lourdes » déjà engagées.
45D’autre part, certaines entreprises, qui proposent des opérations nouvelles, manifestent « de légitimes appréhensions pour la possibilité d’assurer le financement dans les années à venir ». Ainsi, Jacques Brunet signale dans le groupe n° 7 les inquiétudes de la société Massey-Harris qui « sollicite des assurances avant d’entreprendre tout investissement »62. En effet, à la différence des industries de base, où le risque de mévente n’est pas envisagé, pour les industries de transformation, la situation est différente. Ainsi, en janvier 1949, la Commission des Investissements examine la demande de Renault, qui sollicite, outre un crédit pour un programme de construction de tracteurs, une garantie de l’État en cas de risque de mévente, pour une production au-delà de cinquante tracteurs par jour. Le clivage est net entre la triple Alliance (Plan/Agriculture/Programmes), favorable à la prise en charge du risque par l’État, afin d’assurer la modernisation, et le pôle « financier » (Budget, Trésor, Banque de France), inquiet d’alourdir les charges du Trésor63.
Les pertes lors de la réalisation
46Enfin, au stade de la réalisation des prêts, les entreprises diverses connaissent des difficultés supérieures, par rapport aux grandes entreprises nationales. À la différence de ces dernières, elles doivent en passer par un organisme financier intermédiaire, qui, une fois que la répartition des crédits a été approuvée, procède à une étude financière et à la réalisation des prêts. Maurice Petsche rappelle ainsi, à propos des entreprises industrielles, que la répartition, opérée par la Commission des Investissements, n’octroie pas un « droit absolu » aux prêts du FME, mais que le Crédit national est invité, avec sa « rigueur habituelle », à entreprendre une étude financière de chaque affaire retenue et, pour accorder le prêt, devra établir que « les investissements à financer sont rentables et que les ressources ne peuvent être obtenues ailleurs »64.
47Ainsi, du fait des retards issus de ces multiples démarches, les décalages entre les crédits disponibles en début d’année et les crédits effectivement consommés en fin d’année — très faibles pour les entreprises nationalisées — apparaissent les plus importants pour les prêts à l’industrie privée et surtout à l’agriculture. Dans ce dernier cas, le retard des paiements sur les autorisations représente près de douze milliards sur vingt-six. Les grandes lignes des opérations — elles-mêmes très éparpillées — sont fixées par le ministère de l’Agriculture, mais leur réalisation ne peut respecter un échéancier précis, et dépend, en dernier ressort, des intéressés eux-mêmes et de la conjugaison de plusieurs sources de financement. À la dernière séance de 1949, la Commission des Investissements examine la question. Le représentant du ministère de l’Agriculture, Moutet, ainsi que le directeur adjoint de la CNCA, Pompon, déplorent les retards qui résultent « de la procédure imposée par la Commission (...) contrairement à la demande du ministre de l’Agriculture qui avait souhaité que toute liberté lui soit laissée pour procéder en cours d’année aux virements qui lui paraîtraient nécessaires... »65.
48Contrairement aux principes comptables, il est décidé de reporter sur l’exercice 1950 les crédits non consommés de 1949. Le rythme de réalisation en a toutefois été affecté.
***
49Ainsi, la double logique de la réduction des crédits disponibles pour le FME — nettement perçue dès le début de 1950, du fait de la diminution assurée de la contre-valeur — et du désengagement souhaité du Trésor, entrave la diversification des entreprises bénéficiaires du financement public. Au total, un petit nombre de grosses opérations de caractère incontestable se partagent l’essentiel. Et, paradoxalement, les priorités de 1946 ont été renforcées par les efforts de compression opérés depuis 1948, malgré les velléités de diversification.
50La démarche des experts de l’appareil d’État chemine ainsi de manière pragmatique au milieu des diverses contraintes. Dans l’opinion, en revanche, selon un déphasage déjà noté, le débat sur l’investissement répond à des préoccupations idéologiques.
IV. LES FORMES DE FINANCEMENT : LE DÉPHASAGE ÉTAT-OPINION
51Nous avons déjà souligné (cf. supra, chapitre XXXII) combien le débat public sur l’investissement, relancé à la fin de 1949, se trouvait en déphasage par rapport aux discussions engagées dans l’appareil d’État.
52Edgard Faure souligne, dans ses Mémoires, combien, malgré la consécration ultérieure de Jean Monnet, « à l’époque, le commissaire général et son plan sentaient un peu le fagot. Le fait que le premier « plan » quinquennal ait été élaboré en Russie soviétique (...) éveillait la suspicion de nos conservateurs à l’égard du plan français »66. Ces attaques mêlées contre le financement public, les entreprises nationales ou le Plan Monnet ont une fonction idéologique de restauration des valeurs libérales. Elles se trouvent largement en porte à faux avec les débats réellement menés au sein de l’appareil d’État, où les défenseurs du financement public des investissements, tel Jean Monnet, ne l’envisagent pas comme un dogme durable et n’apparaissent pas comme des dirigistes par principe.
1. Le désengagement souhaité
Le FME, organe supplétif
53Le financement public massif des investissements et la place prépondérante des entreprises nationales ont résulté davantage de la combinaison de circonstances, dont les responsables de 1948 ont hérité, que de l’attachement par principe à ces formes de croissance. A fortiori, ils n’envisagent pas qu’elles soient durables. Dès le début de création de la Commission des Investissements (10 juin 1948), il est bien précisé que les crédits du FME — dont le statut, rappelons-le, est provisoire aux termes du décret du 10 janvier 1948 — constituent « un appoint, destiné à pallier l’insuffisance des moyens normaux de financement au moment où un effort d’équipement intense est demandé à l’économie française »67. Il est admis par tous les membres de la Commission et les ministres que la démarche préalable consiste à rechercher fous les moyens de financement, et le recours au FME n’intervient qu’en cas de constat d’insuffisance. Le FME est explicitement conçu, dès son origine, comme un moyen supplétif dont l’intervention est envisagée comme éphémère, du fait de la défaillance des « moyens normaux de financement ». François Bloch-Lainé a toujours dit — en 1948, comme dans son plus récent ouvrage (1986) — que l’engagement direct du Trésor en matière d’investissements présentait davantage d’inconvénients que de bienfaits, et qu’il n’a eu de cesse, dès qu’il l’a pu, de transférer ce soin à d’autres68. Dès la troisième réunion de la Commission des Investissements, le 6 juillet 1948, le directeur du Trésor, saisi par EDF et la SNCF de leurs difficultés de trésorerie, signale qu’une éventuelle augmentation de capital d’une entreprise dont l’État est le seul, ou le principal actionnaire, impose une charge financière trop importante. Il demande à la Commission s’il ne serait pas possible de laisser s’accroître la participation du capital privé69. Et, dans la pratique de la Commission, la recherche de financements autres que sur fonds publics est d’autant plus systématique que la nécessité de réduire les dépenses est pressante. Dès le printemps de 1950, cette recherche est perçue comme indispensable, « les ressources du FME devant être sans aucun doute inférieures l’an prochain à ce qu’elles sont cette année », du fait de l’amenuisement prévisible des crédits Marshall, partant de leur contre-valeur en francs70.
54Significative et convergente, l’attitude de Jean Monnet, à la fois ardent défenseur d’une politique d’investissements, concepteur en grande partie du FME, et, cependant, soucieux de ne pas faire perdurer le financement public à ces niveaux élevés. Devant la Commission du Relèvement européen de l’Assemblée nationale, le 18 janvier 1949, le Commissaire au Plan précise : « S’il faut faire appel à la contrepartie de l’aide Marshall ou à des fonds publics, il est également très important que les investissements et les avances soient faites après avoir utilisé au maximum les capacités d’autofinancement, ce qui réduirait d’autant les avances qui pourraient être consenties, car nous ne pensons pas qu’il soit bon qu’une industrie nationalisée ou autre considère que ce soit une obligation que des fonds publics soient mis à leur disposition »71. Du point de vue de l’équilibre de la trésorerie — privilégié naturellement par François Bloch-Lainé — comme de l’intérêt des entreprises elles-mêmes — souligné par Jean Monnet — le financement public est conçu comme transitoire.
Progression de l’autofinancement et marasme du marché financier
55Dans les faits, les membres de la Commission des Investissements tentent de dégager des ressources d’autofinancement, y compris pour les entreprises nationales, afin que le plafonnement des dépenses publiques d’investissements ne signifie pas le ralentissement des travaux effectifs. La progression est réelle, même si les niveaux restent encore limités : l’autofinancement des seules entreprises industrielles et commerciales — nous avons éliminé le logement et l’agriculture, où les moyens d’investigation statistique sont les plus faibles — augmente de quarante-trois pour cent en francs constants de 1949 à 1950, et passe de quatorze à vingt et un pour cent du total des ressources de financement. En revanche, « le marasme du marché financier » se confirme en 1950. A partir de chiffres légèrement différents, Jean Vergeot transmet à Jean Monnet, à la fin de 1949, une étude assez détaillée, intitulée « Le financement des investissements ». Elle va nourrir les réflexions du Commissaire au Plan pour les années suivantes. Distinguant « financement public » et « financement propre des sociétés », le statisticien du CGP se félicite de la progression relative du second aux dépens du premier : « On peut escompter que l’évolution (...) qui a eu pour effet de transférer des sociétés à l’État, par l’intermédiaire du Fonds d’équipement, la charge du financement d’une grande partie des investissements se renverse progressivement au cours des années à venir sous l’influence du développement de la prospérité et de l’épargne que doit permettre la réalisation du Plan »72. Ainsi, la réalisation du Plan doit permettre de relayer le financement public par le financement propre des entreprises, en particulier par les ressources financières supplémentaires dégagées par l’amélioration des rendements entraînée par l’exécution des investissements. Il est ajouté : « L’autofinancement mérite d’être développé », y compris dans les sociétés nationales. De ce point de vue, les débats pour les investissements de 1950 ont permis de réduire les crédits sur fonds publics sans diminuer trop brutalement les travaux. Et les dépenses effectives de 1950 confirment la place accrue de l’autofinancement à EDF et CDF.
2. Un modèle néo-libéral
Le FME régulateur contracyclique
56Cependant, si l’évolution du volume du financement propre des sociétés paraît encourageante pour les experts du Plan, son niveau demeure encore trop modeste pour assurer la réalisation des objectifs du Plan. Et, dans certains secteurs, comme l’électricité, où la valeur des investissements équivaut à celle du chiffre d’affaires, l’autofinancement et les émissions sur le marché ne peuvent suffire : « À cet égard, il semble bien que le rôle du Fonds d’Équipement doive rester fondamental »73. Les ressources du FME (les intérêts et remboursements des crédits antérieurs, le produit d’emprunts ou les avances du Trésor pourront l’alimenter, même lorsque la contre-valeur de l’aide américaine aura disparu, c’est-à-dire en 1952) devraient jouer un double rôle.
57D’abord, comme en 1949-50, assurer le financement des investissements d’activités, qui ne peuvent trouver les moyens financiers nécessaires « dans l’emploi des procédés usuels », soit trois types de secteurs : ceux où les investissements sont particulièrement « lourds », comme les Houillères ou l’Électricité ; ceux « auxquels une transformation radicale et rapide est demandée », comme le machinisme agricole ; ou encore « les secteurs peu organisés où les initiatives individuelles doivent être provoquées par l’initiative publique », comme l’agriculture. D’autre part, les ressources du FME sont destinées à « atténuer l’effet des crises économiques (...) si l’épargne ne s’investit pas et reste sous forme liquide, la dépense publique est nécessaire pour éviter la déflation (...). S’accumulant en effet en période d’essor et contribuant ainsi à prévenir l’inflation, ces ressources seraient reprêtées dès que des risques de dépression et de chômage apparaîtraient »74. Dans une perspective explicitement keynésienne, le FME apparaît ici comme l’instrument durable, mais à action modulable, d’une politique monétaire qui « devra prévenir en temps opportun ces deux maux également redoutables que sont pour une monnaie et une économie, l’inflation et la déflation »75. D’autre part, le CGP et Jean Monnet ne cessent de démontrer jusqu’en 1952 que les contraintes de financement public des investissements ne sont pas à l’origine des surcharges d’impôts, mais qu’elles résultent de la nécessité où se trouve l’État de couvrir, sans déficit, ses dépenses ordinaires. Les services du Plan multiplient les notes — en prévisions des débats parlementaires, comme à la fin de 1949 — pour souligner que les investissements sont financés par la contre-valeur de l’aide américaine, des recettes et des produits de l’emprunt76.
58Au-delà des arguments pour la bataille politique et parlementaire sur les investissements, l’argument de la rue de Martignac souligne l’impossibilité — même dans l’hypothèse d’un renoncement aux objectifs du Plan — de l’économie d’une augmentation du prélèvement fiscal.
***
CONCLUSION DU CHAPITRE XXXIV
59Selon les propos de François Bloch-Lainé de 1981 (pour le Colloque sur « La modernisation de la France »), confirmés en 1986 (dans La France restaurée), la politique des investissements aurait obéi « à la force des choses plus qu’à n’importe quelle doctrine »77.
60On a analysé, pour les investissements de 1949 et de 1950, combien les chiffres définitivement retenus résultent effectivement d’ajustements empiriques, largement commandés par la « logique de l’amont ». Cependant, les rôles joués par les différents acteurs n’apparaissent pas tout à fait interchangeables. En 1949-1950, à la différence de 1936-1937, ce sont les experts qui prêchent l’expansion et parviennent à convertir des gouvernants — issus de la poussée conservatrice, qui s’affirme depuis 1947 — tentés par la déflation. Et, parmi les experts, si finalement un consensus expansionniste et saint-simonien parvient à l’emporter, y compris aux Finances, Jean Monnet et la « Triple Alliance » en sont, non sans volontarisme, le moteur.
61Ainsi, ces années 1949-1950 sont marquées par un double paradoxe. C’est le moment où se situe l’apogée de l’investissement sur fonds publics, alors que la rue de Rivoli abrite l’un des ministres les plus conservateurs d’alors. D’autre part, tandis que, dans le débat public, le financement public ou le Plan sont dénoncés comme des méfaits du « dirigisme » ou de l’« éta-tisme », ce sont des experts néo-libéraux, qui ne sont ni les planistes d’avant guerre, ni les dirigistes de Vichy — même si, à des postes de responsabilité moindre, certaines sont toujours en place — qui font fonctionner l’appareil économique et financier de l’État, dont ils attendent à terme la relève, au moins partielle, par des mécanismes libéraux.
Notes de bas de page
1 Jean Bouvier, François Bloch-Lainé, « Sur l’investissement de Reconstruction-Modernisation au temps du Plan Monnet », contribution au Colloque « La modernisation... » (FNSP, 4-5 décembre 1981), p. 9 (à paraître).
2 Une partie de ces réflexions ont été avancées lors du Ve Congrès de l’Association française des Historiens économistes. Cf. notre contribution « L’État et l’investissement (1947-1952) : des contraintes du passé aux convergences transitoires » in États, fiscalités, économies, Paris, 1985, p. 257-270.
3 Distinction proposée dans la contribution citée (cf. note 1), et reprise par Jean Bouvier in François Bloch-Lainé, Jean Bouvier, La France restaurée, op. cit., p. 165.
4 Cf. Commissariat général au Plan, Cinq ans d’exécution du plan de modernisation et d’équipement de l’Union française (Réalisations 1947-1951 et Programme 1952), Paris, 1952, p. 323.
5 Cf. supra, chapitre I.
6 Cf. Michel Margairaz, « L’État et... », contribution citée.
7 Cf. VIe Rapport de la Commission des Investissements, p. 527.
8 Ministère des Finances, des Affaires économiques et du Plan, Rapport sur les Comptes de la Nation ; vol. I, Rapport et comptes 1949-1955, Paris, 1955, p. 35-37.
9 Carré, Dubois, Malinvaud, La croissance..., op. cit., p. 145.
10 Claude Gruson, Origine et espoir de la planification française, Paris, 1968, p. 91.
11 SEF, Supplément Finances françaises, n° 20, 1953 : M. Gavanier, « Le revenu national de la France : production et disparités nationales en 1938 et de 1946 à 1949 ».
12 Ibid, n° 18, 1953, Rapport sur les Comptes 1951, p. 223, note 1.
13 L’Industrie est souvent représentée par Pierre Dreyfus ou Pierre Vallée, tous deux proches de Robert Lacoste. Pierre Dreyfus parle de « modus vivendi entièrement satisfaisant » à la séance du 28 janvier 1949.
14 En l’absence de Grimanelli, c’est souvent Émile Bizot qui représente les Programmes.
15 Les secrétaires successifs sont J. Guyot et D. Boyer.
16 François Bloch-Lainé, Profession..., op. cit., p. 103.
17 C’est d’ailleurs l’ancêtre du Comité directeur du FDES.
18 La loi de développement en 1949 est votée seulement en avril et, en 1950, le 21 juillet (mais avec des déblocages anticipés).
19 AEF, B. 42268, p.-v. de la séance du 28 février 1949 de la commission des Investissements (noté infra « CI. »), 5 p.
20 Idem.
21 Idem, p.-v. de la séance du 28 novembre 1949 de la CI., 9 p.
22 IIIe Rapport de la Commission des Investissements, p. 52.
23 Cité in François Fourquet, Les comptes..., op. cit., p. 63 ; et R. F. Kuisel, Le Capitalisme..., op. cit., p. 399.
24 Respectivement 61 % et 64 % (total et Métropole seule) en 1949 et 58 % et 60 % en 1950.
25 AEF, 23 D. 1, « Le taux des prêts du FME », note de Pierre Besse, cf. tableau joint. Cf. AEF, B 42268, p.-v. de la séance du 4 avril 1949 de la C.I., 10 p. La note est reprise dans le IIIe Rapport, p. 48-50.
26 Expression dans IIe Rapport de la Commission des Investissements, 1949, p. 413.
27 AEF, B. 42268, p.-v. de la séance du 20 juin 1949 de la CI, 20 p.
28 Pierre Besse, note citée, p. 3.
29 AEF, B 42268, p.-v. cité.
30 Pierre Besse, note citée, p. 4.
31 Rapport sur les Comptes de la Nation pour 1951, p. 189-190.
32 Ibid, p. 190.
33 IIIe Rapport..., p. 24-25.
34 Ibid.
35 Pierre Besse, note citée, p. 5.
36 AEF, B. 42268, p.-v. de la séance du 6 février 1950 de la CI, 29 p. Jusque-là, Air France ne sollicite pas le FME, mais le Budget.
37 AEF, B. 42268, p.-v. de la séance du 6 mars 1950, 20 p.
38 Idem.
39 Idem, p.-v. du 20 juin 1949, 20 p.
40 Cf. tableau, p. suivante.
41 AEF, B 42268, p.-v. de la séance du 21 décembre 1948 de la CI.
42 Idem.
43 Idem. Il propose notamment d’indexer sur le prix de l’acier.
44 Idem.
45 Idem, p.-v. de la séance du 7 janvier 1949 de la CI, 5 p. ; cf. Philippe Mioche, « Le financement public de la sidérurgie : réalité ou illusion d’un contrôle par l’État (1945-1965) ? » in Le Capitalisme français..., op. cit., p. 89.
46 Idem.
47 Idem.
48 Les conventions des 27 avril 1949 et du 7 juillet 1949 prévoient 5 % sur quarante ans.
49 Cf. Michel Margairaz, « Les Plans et la sidérurgie : le Plan, mal nécessaire pour financer les investissements ? » in De Monnet à Massé, Paris, 1986, p. 139-150.
50 AEF, B. 42268, p.-v. de la séance du 6 mars 1950 de la CI, 10 p.
51 Cf. Michel Margairaz, « La RATP, L’État et les collectivités locales 1949-1985 : trois âges et quatre contraintes », rapport publié par le Ministère de la Recherche et de la Technologie et Réseau 2000, février 1987, 46 p.
52 Contre 30 % par rapport en 1948 pour 1952.
53 Cf. supra, chapitre XXX.
54 Cf. supra, chapitre XXXII.
55 On en trouve la composition dans AEF, B. 18253, p.-v. n° 5 de la séance du 15 juin 1949 du groupe de travail n° 7 de la Commission des Investissements.
56 Idem.
57 AEF, B. 42268, p.-v. de la séance du 20 juin 1949 de la CI, 20 p.
58 Idem, p.-v. de la séance du 6 mars 1950, intervention de Jacques Brunet.
59 Idem.
60 IIIe Rapport..., 1951, p. 36, s.p.n.
61 Ibid.
62 AEF, B. 42268, p.-v. de la séance du 26 janvier 1949 de la CI, 8 p. Libert Bou (Plan), Moutet (Agriculture) et Grimanelli (Programmes) s’opposent à Besse, Bloch-Lainé et Guiraud (Budget).
63 AEF, B. 42268, p.-v. de la séance du 26 janvier 1949 de la CI, 8 p. Libert Bou (Plan), Moutet (Agriculture) et Grimanelli (Programmes) s’opposent à Besse, Bloch-Lainé et Guiraud (Budget).
64 AEF, B. 42268, p.-v. de la séance du 20 juin 1949 de la CI, 20 p.
65 AEF, B. 42268, p.-v. de la séance du 29 décembre 1949 de la CI, 13 p.
66 Edgar Faure, Mémoires, op. cit., p. 266.
67 Décret n° 48-464 du 10 juin 1948.
68 François Bloch-Lainé, Jean de Vogue, Le Trésor et le Mouvement général des Fonds, Paris, 1960, p. 33.
69 AEF, 42268, p.-v. de la séance du 6 juillet 1948 de la CI, 5 p.
70 Idem, p.-v. de la séance du 3 avril 1950, intervention de Maurice Petsche.
71 JM, AMF 14/6/25, exposé de Jean Monnet cité.
72 JM, AMF 17/7/17, « Le financement des investissements », note de Jean Vergeot, 13 décembre 1949, 27 p.
73 JM, AMF 17/7/17, note citée.
74 Idem.
75 Idem.
76 Cf. JM, AMF 11/7/18.
77 François Bloch-Lainé, Jean Bouvier, La France restaurée, op. cit, p. 173.
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