Chapitre XXXII. La stabilisation de 1949
p. 1137-1172
Texte intégral
1Après la « crise française » de l’automne précédent, l’année 1949 est marquée à la fois par la « fin des grandes pénuries », une stabilisation relative des prix, des salaires et des finances publiques et un desserrement de l’appareil dirigiste hérité de Vichy, déjà bien ébranlé depuis 1948.
2Mais, avec le ralentissement de la croissance et la hantise du retour d’une nouvelle crise aux États-Unis, la poursuite de l’action de l’État en faveur des investissements se trouve au cœur d’un double débat. Au sein de l’appareil d’État, tout d’abord, experts et gouvernants sont conduits à définir une doctrine et à arrêter des chiffres correspondants à des crédits, à la lumière de l’ajustement d’ensemble entre charges et ressources et des perspectives du Plan Monnet.
3Dans l’opinion publique, d’autre part, une campagne hostile à la politique des investissements témoigne de l’importance du déphasage par rapport aux enjeux perçus dans l’Administration.
I. 1949 : STABILISATION ET LIBÉRATION INTÉRIEURE
1. « La fin des grandes pénuries ».
4Dans son rapport sur les réalisations de 1947-49, Jean Monnet peut célébrer « la fin des grandes pénuries ».
L’agriculture : le retour à l’abondance et à ses craintes.
5À la pénurie de denrées agricoles – l’une des sources de l’inflation des années 1945-48, du fait de la rigidité de la demande – succède désormais une relative abondance. L’économie française retrouve à peu près ses niveaux d’avant guerre1 :
6Cette situation entraîne une double conséquence : la France cesse d’être tributaire des États-Unis pour son ravitaillement en céréales et en corps gras ; la satisfaction des besoins nationaux et la reconstitution des stocks permet d’engager les premières exportations. Fait nouveau, les prix agricoles connaissent un niveau voisin de celui de la fin de 1948, un an plus tard. Bien plus, à partir de février, ils amorcent une baisse, lors du premier semestre, du fait de récoltes abondantes. Et c’est à cette date, « le mois des interpellations agricoles » (Louis Franck), que René Pleven malmène quelque peu le secrétaire d’État à l’Économie nationale, Antoine Pinay2. Les organisations agricoles ne sont plus si promptes à réclamer la liberté des prix (cf. tableau, infra, p. suivante). La sécheresse estivale entraîne toutefois un mouvement de hausse pour les prix libres, à partir de juillet.
La fin des derniers goulots industriels.
7Pour la première fois, au second trimestre de 1949, l’indice de la production industrielle dépasse le niveau-symbole de 1929. Et, en janvier 1950, l’indice rejoint celui du mois le plus favorable de 1949. Des restrictions dans la consommation du courant électrique marquent encore les premiers mois de l’automne 1949, du fait des insuffisances de l’hydraulicité, mais elles disparaissent ensuite. Le goulot des métaux non ferreux saute également. Le manque de coke, qui freine l’essor de la sidérurgie jusqu’au début de 1949, s’atténue ensuite. La production d’acier brut s’approche, à la fin de 1949, de celle de 1929. Et, surtout, c’est la fabrication des produits sidérurgiques les plus élaborés qui progresse le plus vite : une augmentation de cinquante et soixante-dix pour cent – par rapport à 1938 – pour les tôles et le fil-machine, contre vingt-huit pour cent pour les fontes de moulage. Cette tendance doit s’accroître avec la mise en pleine activité des laminoirs d’USINOR et de SOLLAC. La disparition des derniers goulots de produits semi-finis – comme les tôles minces – permet la croissance, désormais rapide, des industries de biens de consommation, jusque-là en déphasage défavorable. C’est au début de 1949 que la masse des produits finis, débouchant sur le marché, au terme du cycle de production, atteint les niveaux d’avant guerre. L’effort de relèvement entrepris depuis la Libération devient tangible au stade de l’utilisation finale.
8Maurice Petsche et Henri Queuille pouvaient ainsi récolter les fruits des décisions d’équipement prises par leurs prédécesseurs de 1946.
9Quant à l’indice d’activité des industries d’équipement, il passe de 120 en 1948 à 135,5 en 1949 : désormais, contrairement à la situation de 1945-48, l’économie française construit une grande partie de l’outillage nécessaire, du moins pour les technologies déjà éprouvées. Des importations restent indispensables toutefois pour plusieurs types de machines-outils, pour certains appareils électriques, pour les roulements à billes de grand diamètre et, d’une manière générale, pour les matériels de conception nouvelle. Les capacités de production nationales ne peuvent encore technologiquement assurer seules le dépassement des meilleurs niveaux d’avant-guerre.
10Le complément nécessaire provient, naturellement, d’importations de la zone dollar.
L’amélioration partielle des comptes extérieurs.
11La balance des comptes est sensiblement transformée en 1949, par rapport à l’année précédente ; en particulier, le taux de couverture de la balance commerciale passe de 64,6 % à 84,9 %3.
12Depuis 1947, la balance des invisibles tend vers l’équilibre : ce sont les mouvements du commerce extérieur qui donnent le ton (cf. tableau, infra, p. suivante). Du point de vue de la stabilité monétaire intérieure, l’amélioration de la situation globale de la balance commerciale ne peut que satisfaire les responsables des finances, qui ne manquent pas de souligner ce fait auprès des observateurs de l’OECE et de l’ECA. Mais, du point de vue de la stabilité économique, le fractionnement par zone monétaire est essentiel. Or, si le taux de couverture de la balance commerciale avec les zones monétaires autres que celles du dollar et du sterling dépasse 100 %, il reste très faible pour ces dernières : il a même régressé de quinze à quatorze pour cent, dans le cas de la zone dollar. Cela révèle la place peu compressible d’approvisionnements, pour lesquels il n’existe pas de fournisseurs de substitution (en quantités et qualité équivalentes) : même si les importations en blé, corps gras et charbon ont été quasiment éliminées, il reste le pétrole, le coton et les équipements cités plus haut. Seuls les dollars Marshall permettent de combler ce déficit, qui recouvre des approvisionnements stratégiques pour la poursuite de la croissance. En revanche, les conséquences de la dévaluation de trente pour cent de la livre par rapport au dollar, en septembre 1949, ne sont pas aussi redoutables que ne l’ont craint alors les contemporains, du fait du caractère brutal et non concerté de la décision britannique : « Les dévaluations de l’automne dernier ne semblent pas, au total, avoir eu pour la France des conséquences commerciales considérables », conclut le rapport de la délégation française pour l’OECE1.
2. Stabilisation des salaires et des prix et libération relative.
« La stabilité réalisée ».4
13Le rapport pour l’OECE se félicite : « L’année 1949 est la première année depuis 1945 qui n’enregistre aucune hausse générale des prix ». Prix de gros et de détail connaissent une quasi-stabilité sur l’année. Pour les produits industriels, l’accroissement de la production a largement permis d’absorber l’accroissement très lent des salaires (3,5 pour cent en 1949) – il n’y a plus, depuis octobre 1948, d’augmentation générale des salaires – et la majoration des prélèvements fiscaux. Une harmonisation entre les types de prix s’est progressivement établie, autour du coefficient 19/21, par rapport à 1938.
14Cette remise en ordre facilite l’apparition de marges bénéficiaires dans des secteurs essentiels, où les investissements sont élevés. L’évolution s’effectue cependant désormais aux dépens des prix agricoles.
15On constate même, à partir de l’été de 1949, l’amorce d’une tendance déflationniste et d’un ralentissement des achats, qui ne manque pas de faire renaître un certain scepticisme, lors de la préparation du budget et des crédits d’investissements pour 1950 (cf. infra).
La libération relative des prix.
16La disparition progressive de la pénurie incite Maurice Petsche et Antoine Pinay, « libéral perdu dans (notre) Babylone dirigiste », à essayer de rendre la liberté complète à plusieurs prix de produits de consommation5. Après le blocage non avoué d’octobre 1948 – afin d’éviter la répercussion de la hausse des salaires – Louis Franck, sans être « convaincu que le « free for all » eût conduit à la baisse », ne le déconseille pas à Antoine Pinay, qui s’y emploie, mais avec prudence6. A la fin de 1949, la plupart des contraintes issues de la guerre ont disparu. Le contrôle des quantités est progressivement abandonné : le pain (en janvier) et, au printemps, les produits industriels de consommation, comme le charbon domestique. La répartition centralisée des deux derniers grands produits de base (charbon et acier) est supprimée, en mai et en décembre. Quant au contrôle des prix, le secteur taxé comprend un petit nombre de produits, mais essentiels : surtout les produits agricoles de base, tous les produits énergétiques, les minerais et les produits de première transformation des métaux, les engrais, les transports et les loyers. Le secteur transitoire de liberté contrôlée intéresse surtout les constructions mécaniques et des produits métalliques façonnés, ainsi que le vin. Fait symbolique : en juin 1950, liberté est rendue au marché de la viande. Si la répartition et le rationnement ont disparu, la liberté des prix n’est donc pas générale. C’est l’occasion pour Edgar Faure de procéder à un dégraissage substantiel des fonctionnaires du Contrôle économique, depuis peu rattachés à la direction des Prix7.
Les salaires : liberté et freinage.
17Pour la dernière fois, le gouvernement Queuille procède à un réajustement général des salaires, en octobre 1948, de l’ordre de quinze pour cent. Sur l’année 1949, l’accroissement n’a été que de 3,5 %, contre environ quarante les trois années précédentes8. Du fait de la stabilisation des prix, de la mise en équilibre des finances publiques, et du maintien d’une politique restrictive de crédit, le gouvernement Queuille freine toute augmentation de salaires : « Dans la conjoncture actuelle, le facteur décisif de la stabilité monétaire est le facteur salaire »9. La temporisation est rendue possible par un double fait : l’arrêt de l’inflation, et l’accroissement léger du chômage, qui atténue la combativité syndicale. La direction des Programmes procède à une étude sur l’évolution des revenus salariaux depuis 1938, qui est transmise à Maurice Petsche, à la fin de septembre. Pierre Grimanelli, à la lumière des résultats, déconseille toute hausse générale : « Dans la course des salaires et des prix, le retard des revenus salariaux va croissant. Ce sont les autres catégories sociales qui profitent de la dégradation de la monnaie ». Il ajoute qu’un relèvement général condamnerait, à brève échéance, à une nouvelle dévaluation, mais, cette fois-ci, propre à la France, « effective par conséquent, et ruineuse »10 (cf. tableaux, supra, p. précédentes). L’étude elle-même porte sur « la masse globale des revenus salariaux de 1938 à 1949 » : elle s’appuie sur la comptabilité des organismes publics et entreprises nationalisées, ainsi que sur l’enquête sur la masse des salaires, menée pour établir l’assiette de l’impôt cédulaire de 1947 (par l’INSEE et le ministère des Finances)11. Les tableaux distinguent « le salaire direct net » (salaire de base, avec déduction de cotisation sociale et du montant de l’impôt sur le revenu), « le salaire social affecté » (les compléments, au titre des risques de maladies, charges de famille, vacances, jours fériés ou autres), et « le salaire social différé » (partie du salaire affectée à la vieillesse). Il apparaît que, en 1949, la masse des revenus salariaux a, par rapport à 1938, légèrement moins augmenté que la hausse des prix. Mais, surtout, les mesures sociales prises depuis 1938 ont profondément transformé la répartition structurelle interne de la masse salariale. Elles ont opéré des transferts, au profit du salaire indirect (aide à la famille, remboursement des frais de maladie, indemnités de congés...), ou de certaines catégories de salariés (femmes, jeunes, salariés de province où les zones de salaires étaient les plus basses, salariés au rendement). Dès février 1949, le directeur des Programmes signale : « Tout se passe comme si les diverses mesures prises en faveur de certaines catégories de salariés et les modifications apportées au régime des salaires (...) (heures supplémentaires, allocations familiales...) avaient opéré uniquement une redistribution à l’intérieur de la masse des salaires, tout ce qui est donné aux uns, étant repris aux autres »12. Au total, les mesures tendant à gonfler le salaire indirect (Sécurité sociale, retraites, ...) « ont eu pour conséquence de dégrader le salaire horaire, qui a supporté le poids de toutes les réformes »13. Pierre Grimanelli met en évidence la dégradation différentielle par rapport à l’évolution des prix.
18Par rapport à l’avant-guerre, on peut distinguer un groupe de salariés défavorisés – ceux qui sont le plus tributaires du salaire horaire de base (servant pour l’établissement de la hiérarchie), en particulier l’ouvrier célibataire non qualifié, en bonne santé, de la Région parisienne – et favorisés – les salariés chargé de famille, profitant des avantages de la Sécurité sociale. La progression du salaire indirect qui, en 1949, représente un tiers de la masse globale des revenus salariaux (contre 22,5 % en 1939), s’effectue à travers la dégradation du salaire horaire, ce qui conduit le directeur des Programmes à « conclure que l’employeur était mal fondé à s’élever contre les charges de salaires puisque ce fardeau était en fin de compte rejeté sur le salarié lui-même »14. En outre, la quasi-stabilité de la masse salariale est assurée par un allongement de la durée du travail, qui atteint 44,6 heures en moyenne.
19Les gouvernements Queuille et Bidault parviennent à temporiser jusqu’au moment où, par la loi du 11 février 1950, liberté est rendue aux salaires, dont la fixation est transférée aux organisations professionnelles, avec la résurrection des conventions collectives. Après la démission des socialistes, Paul Bacon, ancien secrétaire de la JOC, préside la Commission supérieure des Conventions collectives, qui, en trois mois, élabore le SMIG, fixé à un niveau quelque peu inférieur à celui d’un budget minimum global15. Dans le rapport pour l’OECE, il est précisé que le retour à la liberté des salaires ne devrait pas entraîner de hausse importante, ni constituer une menace pour la stabilisation, car l’accroissement de productivité – on y reviendra – devrait en amortir désormais les effets.
3. L’amélioration de l’équilibre des finances publiques.
Le budget : adaptation aux fonctions économiques et transparence.
20Comme on l’a vu lors des débats pour les investissements de 1949, la procédure du vote de la « loi portant fixation maximale des dépenses publiques » soumet désormais au contrôle parlementaire, non seulement les dépenses civiles et militaires du budget, mais également les charges de reconstruction des dommages de guerre et de réalisation du Plan. La procédure budgétaire d’inscription dans la « loi de Finances » s’étend aussi aux multiples comptes spéciaux du Trésor (jusque-là hors de tout contrôle), dont de nombreuses opérations sont supprimées en 1950. Ainsi, la notion, traditionnellement financière, de budget se trouve désormais dépassée, du fait de ses incidences économiques et sociales. En outre, une plus grande transparence facilite le contrôle de l’ajustement effectif des ressources de trésorerie à l’ensemble des charges, puisqu’il est prévu d’affecter des recettes non inflationnistes aux dépenses prévisibles. La prévision n’a pas été trop mauvaise puisque, par rapport aux chiffres de « la loi des maxima » (et aux recettes qui y sont incluses), le déficit pour les opérations budgétaires, comme celui des dépenses d’investissements, ne représente que quatre pour cent des masses totales. L’amélioration est nette par rapport aux deux années précédentes, en particulier pour les investissements.
21La procédure des maxima impose désormais de financer ces charges par des ressources affectées.
La réduction de l’« impasse ».
22Si l’on compte l’ensemble des opérations « budgétaires », (y compris les comptes spéciaux, contenus dans la « loi de Finances » en 1950), dont la couverture est prévue par les textes législatifs, l’évolution est également sensible17 :
23Parallèlement, les « recours monétaires » du Trésor se réduisent (de dix-sept pour cent des dépenses totales en 1945, à cinq pour cent) : et, parmi eux, le montant des avances de la Banque de France n’a augmenté, en 1949, que de sept milliards. Pierre-Paul Schweitzer ne manque pas de le souligner pour l’ECA.
24L’« impasse » proprement dite n’a jamais été, en volume, aussi faible depuis les débuts de la Crise. Et, en pourcentage des charges de trésorerie, elle ne représente plus que quinze pour cent (contre près du double en 1947-48).
25Parmi les ressources affectées aux investissements comptées dans l’impasse, il faut inclure l’emprunt national 5 % émis par décret, le 21 janvier 1949, qui rapporte 109 milliards18. Pour la première fois depuis celui de la Libération, l’emprunt couvre près de quarante pour cent de l’impasse. L’opération est toutefois onéreuse, puisqu’il est prévu que les souscripteurs bénéficieront des conditions de rémunération, si elles sont plus avantageuses lors de futures émissions : il a donc fallu recourir à une sorte d’anti-conversion pour attirer l’épargne. Il y a également augmentation des dépôts dans les caisses d’épargne (quatre-vingt-dix milliards), des souscriptions nouvelles aux bons du Trésor placés dans le public (trente milliards). Globalement, le Trésor a pu faire face à l’accroissement de charges résultant, en particulier, du financement direct des investissements de base du Plan.19
26Au total, les recettes ordinaires couvrent au-delà des dépenses du budget général, et, même en 1950, près de quarante pour cent des dépenses extraordinaires.
27Cependant, il a fallu, pour obtenir ces résultats, la conjonction d’apports conjoncturels : 120 milliards de décimes fiscaux affectés aux investissements, ainsi que près de 300 milliards d’aide Marshall, qui, à elle seule, couvre quinze pour cent des charges de trésorerie (soit la moyenne des années 1945-1951). Cela explique que, au cours de l’année, le ministre des Finances n’a pas été épargné par les inquiétudes à l’égard de la trésorerie : François Bloch-Laîné évoque « l’air anxieux de Maurice Petsche », lorsqu’il lui présentait la situation quotidienne au Trésor20. En particulier, le caractère chaotique des déblocages de contre-valeur de l’aide rend délicat l’ajustement au jour le jour. Ainsi, peu après la chute du gouvernement Queuille, en octobre 1949, Maurice Petsche écrit au président démissionnaire : « La situation de la trésorerie reste très précaire. L’échéance de la fin du mois d’octobre ne peut être assurée à l’aide des ressources normales du Trésor »21.
Le « marasme du marché financier ».
28La relative expansion de l’épargne en direction des caisses publiques ne s’accompagne pas d’un mouvement analogue vers les valeurs industrielles et commerciales. Les émissions du secteur privé sur le marché financier restent faibles, et même inférieures en volume à celles de 1948, favorisées de manière purement conjoncturelle par le déblocage de la contre-valeur des billets de 5 000 francs22. Le taux d’intérêt à long terme reste élevé (sept pour cent) : fait remarquable, cependant, pour la première fois depuis 1935, il dépasse l’augmentation du coût de la vie. Et malgré des mesures d’encouragement à l’activité de la Bourse (réduction de l’impôt sur les opérations de Bourse, introduction de nouvelles valeurs...), le Conseil national du Crédit déplore, dans son quatrième rapport, le « marasme du marché financier ». Pour la métropole, les émissions d’actions et d’obligations du secteur privé atteignent à peine cinq pour cent de la valeur des investissements réalisés. La proportion est peu différente, l’année suivante. Il n’était guère possible d’escompter que les fonds publics soient relayés rapidement pour le financement des investissements de base.
II. LES INVESTISSEMENTS POUR 1950 : JEAN MONNET MIEUX TRAITÉ QUE L’ANNÉE PRÉCÉDENTE
29Le scénario décrit pour la détermination des crédits d’investissements de 1949 se répète pour ceux de 1950, mais de manière mieux maîtrisée et moins dramatique.
1. La procédure : rationalisation par rapport à 1948.
La constitution du Comité spécial.
30Chez les responsables de la rue de Rivoli, il apparaît, au début de l’été de 1949, un souci de rationaliser la procédure employée l’année précédente pour déterminer le volume des investissements. Et cela, d’une triple manière.
31Tout d’abord – comme on l’a vu – les chiffres examinés doivent inclure l’ensemble de la trésorerie, y compris, pour la première fois, les Comptes spéciaux du Trésor, désormais compris dans la « loi des maxima ». Ensuite, l’effort pour 1950 doit être mis en perspective avec ceux de 1951-52, afin de le situer, pour le Parlement, en rapport avec les objectifs du Plan Monnet révisé. Enfin, il s’agit d’arriver à fixer les principaux chiffres de manière plus précoce dans l’année qu’en 1948, où il a fallu attendre novembre23.
32Ainsi, le 6 juillet, le Conseil des ministres décide la création d’un Comité spécial de la Commission des Investissements. Présidé par Wilfrid Baumgartner, gouverneur de la Banque de France, il se compose de Jean Monnet, Roger Gœtze (nouveau directeur du Budget), ainsi que d’un représentant du MRU et du ministère de la Défense nationale. Le secrétariat doit en être assuré par Pierre Besse (secrétaire général du Conseil national du Crédit), Dominique Boyer (secrétaire de la Commission des Investissements) et Jean-Paul Delcourt (du CGP). Sa tâche est double : définir la consistance du programme de Reconstruction et d’Équipement de 1950 à 1952, et chiffrer les engagements du Trésor nécessaires à son exécution. Puis, déterminer le montant et la répartition des investissements à la charge de l’État pour 1950, compte tenu de l’ensemble des ressources et des dépenses du Trésor. Son rapport doit être prêt pour le 1er septembre.
« Supprimer l’écart ».
33Avant même la première réunion du Comité spécial, plusieurs notes de la direction du Trésor font le point sur le montant des ressources probables et des charges présumées.
34Comme pour 1949, l’objectif consiste d’abord à équilibrer le budget ordinaire, afin de ne laisser que la Reconstruction et l’Équipement à la charge du Trésor. Dès le 25 juin, le ministre de la Reconstruction a communiqué à Maurice Petsche un tableau échelonnant sur dix ans les dépenses de réparation des dommages de guerre, estimés à un total de 4 000 milliards. Les demandes de crédits pour 1950 s’élèvent à 474 milliards (dont cinquante-six pour cent d’opérations nouvelles)24.
35Une note du Trésor commente ainsi, pour le ministre, les demandes d’augmentation – de l’ordre de cinquante-cinq pour cent en francs courants par rapport aux crédits de 1949 : « Les représentants du MRU ont justifié cette augmentation de près de 60 % par la nécessité d’accélérer la reconstruction »25.
36Pour l’Équipement, les demandes de crédit, telles que rassemblées par le Commissaire au Plan, s’élèvent à environ 615 milliards26. Jean Monnet a laissé entendre qu’il allait opérer une compression substantielle, pouvant réduire la charge à supporter pour le Trésor aux environs de 430 milliards (sans la Reconstruction de la SNCF, ni de la marine). Compte tenu des seules ressources escomptables pour 1950 (la contre-valeur de l’aide Marshall, estimée à 250 milliards ; la reconduction des décimes spéciaux, pour 140 milliards ; l’ajout de quelques recettes affectées), l’« écart » se monte à quelque 550 milliards. La mission du Comité consiste justement à « supprimer l’écart existant entre les dépenses envisagées d’une part, les ressources probables de l’autre »27.
Le sacrifice des « opérations nouvelles » et de la Reconstruction.
37Lors de la première réunion du Comité spécial, le 30 juillet, Maurice Petsche donne le ton. Il demande de soumettre les programmes d’investissements « à une critique extrêmement sérieuse » ; considérant les deux hypothèses – la compression des dépenses « à la mesure des ressources probables », ou bien la « compression se heurte à des impossibilités matérielles » – il se refuse à « considérer la seconde », et « ne s’engagera pas dans une politique qui, pour atteindre certains résultats matériels jugés irréductibles, sacrifierait délibérément la stabilité monétaire »28. Il affirme compter sur Jean Monnet et Wilfrid Baumgartner pour animer les travaux du Comité et faire diligence, afin que le projet de loi sur les maxima soit à la Commission des Finances, dès le 1er octobre. Il souligne que les départements militaires se sont montrés compréhensifs à l’égard des impératifs financiers. L’ingénieur général Balland confirme que 1950 doit être une année de « transition technique », du fait de l’incertitude, quant au montant et aux modalités du programme d’aide militaire à l’Europe, quelques mois seulement après la création de l’OTAN. Le ministre des Finances, sans vouloir préjuger des résultats du travail, laisse entendre que les demandes du MRU sont à revoir : « Il sera sans doute impossible, étant donné la loi d’octobre 1946, de reconstruire avec la rapidité souhaitée »29. Quant à Jean Monnet, son intervention porte essentiellement sur « la notion de prix de revient, à laquelle il n’a pas été accordé jusqu’ici suffisamment d’importance ». Il précise : « Les investissements sont chers. La limitation des ressources doit entraîner une révision sérieuse des méthodes de façon à obtenir le maximum de rendement des moyens réduits qui seront disponibles »30. Le lendemain, lors d’une seconde réunion, Étienne Hirsch confirme que l’analyse des propositions d’investissements doit faire apparaître le prix de revient, « notion qui devient essentielle », ainsi que la discrimination entre opérations déjà engagées et opérations nouvelles31.
2. Un mois pour supprimer un « écart » de 550 milliards.
38Pendant trois semaines, le Comité spécial ne se réunit pas, du fait du départ de Baumgartner. Chaque service prépare ses propositions.
Trésor et Budget : réduction et recours à la fiscalité.
39Dans leurs hypothèses successives, les directions du Budget et du Trésor tentent d’abord d’équilibrer le budget ordinaire. Roger Gœtze envisage de maintenir le même chiffre, en francs courants, de dépenses ordinaires qu’en 1948. D’autre part, il part de l’hypothèse formelle d’une reconduction des crédits de reconstruction et d’équipement de 1949 – autour de 610 milliards. Au total, l’écart avoisine encore les 300 milliards. Il conclut, à la fin du mois d’août, pour Maurice Petsche : « Je crois devoir attirer l’attention du Ministre sur la gravité de la situation qui résulte de l’écart entre les recettes prévisibles et les dépenses inévitables »32. Considérant que l’emprunt ne peut intervenir que pour une part où les charges d’annuités n’obèrent pas une trop grande fraction du revenu national vers les charges de l’État, il en vient à envisager un alourdissement fiscal pour une part du financement de la Reconstruction, au titre du « devoir de solidarité nationale » : « Il n’est pas possible d’opérer la reconstruction du Pays autrement qu’en prévoyant l’affectation de certains produits fiscaux au financement de la tranche inconditionnelle des travaux de reconstruction »2.
Jean Monnet : compression et cohérence économique.
40Les groupes de travail du CGP examinent les propositions de crédits d’investissements des quatre entreprises nationalisées (CDF, EDF, GDF, SNCF) et de la CNR. Ils procèdent à une évaluation des besoins de l’industrie privée, de l’agriculture et des Territoires de l’Union française. À la différence des calculs du Budget ou du Trésor, ils distinguent d’emblée les crédits qui correspondent à la poursuite d’opérations déjà engagées en 1949 – avec le souci de plutôt réduire leur coût que d’en étaler la réalisation – et ceux qui répondent à l’engagement d’opérations nouvelles, avec la volonté de les diminuer au maximum. Il semble d’ailleurs que Jean Monnet n’ait pas hésité à procéder à des « abattements très sévères », par rapport aux propositions initiales33. Une note du Trésor signale même, au début de septembre : « Les services techniques du Commissariat au Plan sont un peu désorientés par l’attitude nouvelle du Commissaire général ; ils comprennent mal comment ce dernier peut admettre (...) qu’un abattement de 10 à 20 % sur les crédits de l’an dernier est compatible avec le maintien des objectifs antérieurs »34. À la mi-septembre, le Commissaire au Plan présente au Comité spécial les chiffres révisés. Il a comprimé les demandes initiales d’environ dix-huit pour cent : d’un total de 615 milliards, il parvient à environ 506 milliards (sans modifier le chiffre proposé par la Direction générale de la SNCF) (cf. tableau, infra, p. suivante). Mais les révisions ne répondent pas seulement à un ajustement comptable : elles sont justifiées en fonction de l’état d’avancement des travaux correspondants, de la poursuite des objectifs de 1952, et du coût des investissements envisagés.
41La ventilation des propositions fait apparaître sur le total à peine un sixième des crédits pour l’engagement d’opérations nouvelles : sur les soixante-quinze milliards, l’agriculture occupe une part importante (presque trente-quatre), du fait des retards dans le lancement des programmes et des infléchissements du Plan en 1948. Pour le reste, les opérations nouvelles portent surtout sur la mise en route d’un programme de centrales thermiques (à la fois par CDF pour 8,2 milliards et EDF pour six milliards), permettant de pallier la baisse d’indice d’hydraulicité et d’assurer la couverture des besoins en 1952-53 à moindre coût que par des centrales hydrauliques35. La somme des crédits demandés apparaît en augmentation de seize pour cent – soit la part des opérations nouvelles – par rapport à l’année en cours. (cf. tableau, p. suivante). Financièrement, l’effort d’investissement de la poursuite des opérations déjà engagées équivaut à celui de 194936. Économiquement et techniquement, Jean Monnet souligne qu’il s’agit de travaux urgents et largement entamés, dont la réalisation s’impose pour atteindre les objectifs annoncés pour 1952 à l’OECE, et rattraper les insuffisances dans les investissements avant et pendant la guerre, dans les houillères, l’électricité, la sidérurgie et l’agriculture. Le Commissaire au Plan n’a pas hésité à réviser certains objectifs, déjà réduits en 1949 : ainsi, pour la production charbonnière, les propositions correspondent à un objectif de cinquante-huit millions de tonnes en 1952 (contre soixante-cinq millions fixés en 1946, et soixante en 1948), « devant l’importance considérable des capitaux à investir »37.
42Une note confidentielle de la part du groupe de travail sur les « Entreprises nationales » précise, au sujet des chiffres révisés, que l’« élasticité supplémentaire est très réduite (...) et ne saurait en aucun cas dépasser 10 %, à moins de risquer « une atteinte grave, non seulement aux objectifs de 1952, mais encore à l’activité des industries et entreprises pourvoyeuses auxquelles devraient être payés en pure perte des dédits très élevés »39.
43À la différence de 1948, où les abattements ont dû être concédés lors des débats avec Maurice Petsche, Jean Monnet a préféré procéder lui-même au maximum de compressions possibles, tout en préservant les objectifs du Plan et en opérant des réductions judicieusement choisies, en fonction de leur impact économique, technique et financier. En revanche, le palier proposé ne peut guère être réduit, à moins d’entamer la cohérence économico-technique des travaux, au nom d’économies illusoires. Le 12 septembre, lors d’une conférence chez Edgar Faure, secrétaire d’État au Budget, Jean Monnet accepte de descendre jusqu’à 465 milliards, comprenant cinquante milliards d’opérations nouvelles40.
A la recherche d’autres sources de financement.
44Le 21 septembre, le Comité spécial examine l’ensemble des chiffres, et tente de les comprimer, en faisant appel à d’autres sources de financement que le FME. Il est notamment fait mention des ressources propres des entreprises nationales, notamment pour les travaux neufs courants des Charbonnages, ou pour les opérations de la CNR. A propos des travaux de cette dernière, les membres du Comité spécial affirment qu’il « paraît (...) inadmissible qu’un organisme de cette importance ne puisse réunir par lui-même une partie des fonds dont il a besoin »41. De même, le Comité est « unanime à souhaiter que les dépenses de distribution (...) puissent être financées par les bénéficiaires »42. Il semble se dégager une position commune parmi les membres du Comité : assurer en gros le volume de travaux prévus par le CGP, mais trouver le maximum de sources de financement de substitution, afin d’alléger la charge pour le Trésor.
45De son côté, Roger Gœtze prépare pour Edgar Faure « les conditions d’équilibre » pour le budget de 1950. Après avoir comprimé les chiffres du budget de fonctionnement et de l’équipement des services civils, il propose de limiter les crédits d’investissements entre 280 et 335 milliards. Il conseille, en particulier, de faire porter les réductions « sur les secteurs agricoles et industriels pour lesquels on conçoit mal que l’État intervienne comme prêteur au moment où il ne peut lui-même trouver à emprunter pour les besoins généraux »43. Par souci d’équilibre financier, le directeur du Budget se montre ainsi fréquemment l’adepte d’une rétraction du financement public au secteur privé.
46Le 4 octobre, une réunion se tient dans le bureau du Ministre, en sa présence, ainsi que celle d’Edgar Faure, de Roger Gcetze, de Jean Monnet, d’Eugène Claudius-Petit et d’autres représentants du CGP et du MRU. En confrontant les demandes aux ressources probables – limitées aux recettes budgétaires (accrues d’une soixantaine de milliards), aux décimes reconduits, à la contre-valeur de l’aide Marshall, estimée à 250 milliards, et à une soixantaine de milliards de recettes affectées aux investissements – il demeure un « écart », compris entre 435 et 705 milliards. Maurice Petsche, reprenant les estimations du directeur du Budget, propose de limiter la Reconstruction à 250 milliards de paiements comptants (et cent milliards de paiements différés). Eugène Claudius-Petit s’insurge et « ne peut donner son accord à ces propositions »44. Wilfrid Baumgartner et Jean Monnet sont chargés de réviser les chiffres, en collaboration avec la direction du Trésor.
Le rapport du Comité spécial : l’apologie de l’investissement.
47Peu après, le Comité spécial soumet son premier rapport, dont les termes se trouvent en grande partie repris dans le second rapport de la Commission des Investissements.
48Une « conception sommaire » du problème de l’équilibre des fonds publics aurait conduit à limiter le total des crédits de Reconstruction et d’Équipement à 450 milliards, ce qui aurait signifié une réduction globale de vingt-cinq pour cent par rapport aux chiffres de 1949 : « Le Comité ne pouvait faire sienne cette conception (...) Le Comité a été particulièrement sensible (...) aux arguments développés devant lui par le Commissaire au Plan et qui se basent sur l’étude, entreprise par les services de ce dernier, du Bilan national pour 1949-1950 »45. Les travaux de la Commission du Bilan démontrent l’existence, depuis le début de 1949, d’une situation de « stabilité monétaire dans un climat d’expansion économique. (...) Mais les résultats obtenus eussent été, sans doute, physiquement inconcevables si des investissements considérables, réalisés dans les secteurs lourds de l’économie et financés pour la plus large part sur fonds publics, n’avaient mis ces secteurs en mesure de fournir le supplément d’énergie, d’acier et des produits de base nécessaires. Ces investissements eux-mêmes ont, en outre, entretenu et déterminé les progrès de l’économie »46. Il en ressort qu’une réduction excessive des investissements financés sur fonds publics « risquerait de ralentir dangereusement, voire de briser le mouvement continu d’expansion connu par notre pays depuis quatre ans : les conséquences dommageables de ce renversement risqueraient de se faire sentir, jusque dans les Finances publiques, par une réduction sensible des rentrées fiscales. Ainsi, des efforts qui prétendraient par cette voie rétablir l’équilibre des comptes du Trésor pourraient aboutir, en fait, à le remettre en cause »47.
49Les membres du Comité épousent donc la conception, inlassablement défendue par Jean Monnet, selon laquelle la réalisation des investissements du Plan est la garantie, à terme, de la stabilité financière. Afin de ménager les réflexes déflationnistes de Maurice Petsche, le rapport conclut : « Compte tenu des arguments opposés, il a paru raisonnable de limiter la charge globale du Trésor au montant atteint en 1949 »48. Ainsi, le Comité spécial confirme le sacrifice de la Reconstruction (240 milliards pour la CAREC, et vingt milliards pour les HBM), mais ne s’éloigne guère des chiffres de Jean Monnet pour l’Équipement, avec un total de 465 milliards49, soit un total de près de 740 milliards. En outre, il est proposé de recourir à un effort fiscal supplémentaire de 135 milliards pour la Reconstruction, et à l’emprunt, pour 120 milliards, afin d’éviter « une anticipation excessive de l’épargne (...) à un moment où pour des raisons monétaires, l’épargne française ne s’investit pas volontiers dans des emprunts susceptibles d’être affectés à la couverture des dépenses à la charge du Trésor »50. Dans leur conclusion, les membres du Comité insistent sur la nécessité structurelle de dégager des ressources à long terme : « Les difficultés rencontrées en 1950 pour équilibrer les comptes publics ont un caractère permanent et s’aggraveront même vraisemblablement dans les années qui viennent, du fait de l’amenuisement progressif et rapide, en recettes, de la contrepartie de l’aide américaine »51. Reprenant l’alternative célèbre, « modernisation ou décadence », les auteurs ajoutent : « Le désordre des Finances publiques, s’il devait conduire à renoncer aux investissements ci-dessous énumérés, risqueraient de provoquer la régression de l’économie française et la dégradation du niveau de vie national »52. Au rang des mesures destinées à améliorer la situation des Finances publiques, le rapport énumère la poursuite de la réforme fiscale, la réduction du coût de la gestion administrative, l’action sur les prix des travaux de reconstruction et d’équipement, ainsi que la révision éventuelle des principes d’application de la loi du 28 octobre 1946, jugée trop coûteuse. Dans la lignée des travaux du Bilan national, les membres du Comité spécial et de la Commission des Investissements incitent à prélever davantage, à économiser sur les dépenses courantes, afin d’assurer sans défaillance les charges de financement des investissements productifs.
Les décisions gouvernementales : satisfaction pour Jean Monnet.
50Les débats sur le budget se trouvent retardés par la crise ministérielle et le remplacement par Georges Bidault de Henri Queuille, démissionnaire. Le 17 novembre, le Conseil des ministres, sur proposition de Maurice Petsche, arrête les chiffres globaux pour 1950. Le ministre ne s’est guère écarté des propositions du Comité spécial.
51Le total de 740 milliards est respecté53. Le lendemain, à la Commission des Investissements, le ministre signale que, malgré les réductions apportées aux demandes initiales, ces chiffres ne peuvent être admis qu’en prévoyant « une aggravation considérable des charges fiscales imposées au pays », et en s’assurant de la réalité de l’autofinancement des entreprises nationalisées, qui doit compléter les prêts du FME54. Trois groupes de travail sont constitués afin de proposer, dans les dix jours qui suivent, les projets de répartition pour le Parlement55.
52Jean Monnet préside, le 20 novembre, le sous-comité des investissements. Il s’assure de la réalité de l’autofinancement des CDF, de EDF et de la CNR – sous réserve d’institution de nouvelles taxes. Les membres du Comité tentent de chiffrer des emprunts complémentaires possibles, notamment pour l’agriculture et la marine marchande. Loin de mettre en cause les chiffres maxima, Jean Monnet les défend avec fermeté contre tout dépassement, notamment dans le cas des Territoires d’Outre-Mer56. Au total, les relations entre le Commissaire au Plan et le ministre des Finances ont été moins orageuses que l’année précédente. Mais il est vrai que les principales réductions ont été préalablement opérées par Jean Monnet. Les chiffres retenus en Commission des Investissements, le 29 novembre, et entérinés au Conseil des ministres du lendemain, – après de nouveaux calculs sur l’autofinancement des entreprises nationalisées – sont, somme toute, assez peu éloignés de ses propositions initiales : le montant des prêts du FME résulte de l’estimation du coût de réalisation des travaux, de laquelle a été déduite une somme correspondant à l’autofinancement, et à laquelle ont été ajoutés les crédits nécessaires aux charges financières57.
53Ainsi, le total des crédits d’investissements et de reconstruction économique (flotte et SNCF) atteint plus de 450 milliards, soient – sous réserve toutefois que l’autofinancement des CDF, de EDF-GDF atteigne bien les 37,6 milliards prévus – des chiffres proches de ceux retenus spontanément par Jean Monnet.
54Pour les quatre années du Plan Monnet (1949 à 1952), où la procédure de détermination des crédits d’investissements a fait appel à l’arbitrage de la Commission des Investissements, les chiffres arrêtés pour 1950 sont ceux qui s’éloignent le moins des propositions initiales du Plan58.
55Encore fallait-il franchir l’obstacle parlementaire.
3. L’ultime assaut (décembre 1949-janvier 1950).
L’offensive contre les investissements : le déphasage État-opinion.
56Au même moment, la crise économique américaine et le ralentissement de la croissance en France suscitent le scepticisme à la fois chez certains économistes, dans les milieux parlementaires et professionnels, ainsi que dans la presse.
57Jean Monnet constitue, en février 1950, un épais dossier, intitulé « Les investissements dans la presse et au Parlement », qui rassemble les attaques dont font l’objet les crédits d’investissements, en cette fin d’automne de 1949. Multipliant les images militaires, il parle de « violente offensive », tirant parti de l’« occasion » (Abel Gardey) du vote du budget pour l’année 1950, et d’« attaque soigneusement concertée », pour laquelle Charles Rist aurait été « chargé d’ouvrir le feu », à travers son article de la Vie française (20 novembre 1949), intitulé « Plan Monnet contre équilibre budgétaire »59. Il se constitue alors un « Front économique », soutenu par plusieurs organisations patronales, et destiné à fournir des munitions à des parlementaires, prêts à dénoncer les futures dépenses d’équipement60. Dans la presse comme au Parlement, la campagne hostile aux chiffres pressentis pour les charges d’investissements se développe de manière quelque peu confuse. Les termes du débat sont, une fois de plus, déphasés par rapport aux discussions menées au sein de l’appareil d’État. Il s’y mêle des attaques contre le financement public, contre la part prédominante occupée par les entreprises nationales, mais aussi contre le fisc, le « dirigisme », et l’« étatisme » en général. Au même moment, paraît l’Épître aux dirigistes de Jacques Rueff. Il ne manque à la cohorte de ces revenants d’avant guerre qu’une figure politique : Édouard Daladier trouve l’occasion, lors du Congrès radical de Toulouse, le 16 novembre, d’« effacer son ardoise »61. Il aurait, d’après le secrétaire d’État au Budget d’alors, « détecté que le thème anti-étatique, anti-dirigiste, anti-fiscaliste trouvait de la résonance auprès d’une certaine clientèle bruyante et causante, embourgeoisée et râleuse... »62.
Hostilités parlementaires.
58L’attaque contre les investissements trouve un écho à l’Assemblée nationale, mais surtout au Conseil de la République – dont le renouvellement partiel vient d’accentuer le glissement à droite – où le rapporteur du budget d’investissement, Marcel Pellenc, polytechnicien, inspecteur général des PTT, s’est fait, depuis l’année précédente et la rédaction d’un rapport célèbre, le prophète des adversaires du financement public des investissements63. Dès les débats à la Commission des Finances de l’Assemblée nationale, les demandes d’effort fiscal sont réduites, partant les dépenses d’équipement. Edgar Faure narre, non sans verve, certains épisodes rocambolesques de cette bataille parlementaire de huit semaines (du 5 décembre au 31 janvier), au cours de laquelle il a donné de sa personne pour défendre les chiffres gouvernementaux. Sa harangue sur le « budget de la liberté » – dont les dépenses élevées d’investissement et une fiscalité accrue auraient constitué le « prix » – lui vaut, selon son expression (aussi narcissique qu’à l’ordinaire), « d’assister à (sa) propre naissance en tant que figure politique de la France d’après guerre »64.
59Au total, les parlementaires réduisent les chiffres de onze milliards – 5,5 milliards retirés aux prêts pour CDF, EDF et l’agriculture et 5,5 milliards d’abattement proportionnel. Les sommes définitives se présentent ainsi65 :
60Le Parlement ayant manifesté la volonté de réduire de onze milliards le total des versements au FME, Jean Monnet a fait préciser, à la fin de janvier 1950, que cela ne devait pas se traduire par une réduction du volume des travaux, cinq milliards pouvant être récupérés par l’accroissement de l’autofinancement de CdF et EdF – grâce à l’abandon de la majoration de certaines taxes – et cinq milliards par des économies à réaliser sans réduction du volume des travaux. Le Commissaire au Plan rejette donc la répartition de l’abattement66. Mais le Conseil des ministres du 1er février ne suit pas la seconde suggestion de Jean Monnet et demande à la Commission des Investissements, réunie le 6 février, de répartir l’abattement. Étienne Hirsch propose, et obtient, une répartition proportionnelle de l’abattement, épargnant toutefois la SNCF, déjà victime de « réductions considérables »67.
61Encore faut-il mesurer les incidences techniques et économiques des abattements financiers.
4. La logique de l’amont.
62Au total, du point de vue technique et économique, les dépenses définies pour 1950 correspondent, pour une grande part, à la « poursuite normale des travaux déjà engagés »68.
63Les travaux arrivent en 1950 dans leur phase d’exécution la plus intense pour les programmes les moins précoces (industries privées, agriculture, industrie minière et, surtout, programmes des territoires de l’Union française). Cependant, un freinage important a été imposé aux programmes des moyens de communications, en particulier la SNCF, dont on escompte qu’elle réponde aux besoins d’un trafic accru, même avec des moyens matériels à peine augmentés par rapport à l’avant-guerre. Pour le matériel roulant, comme pour les installations fixes, seule est prévue la poursuite d’opérations engagées, visant à la reconstitution du matériel détruit ou prélevé. L’électrification est poursuivie pour les sections Paris-Laroche et Laroche-Dijon – dont la mise en service est prévue pour le début et la fin de 1950 – mais la portion Dijon-Lyon est encore retardée ; les autres opérations d’électrification sont limitées à quelques sections intra-alpines (Aix-La Roche sur Foron)... Quelques travaux « annuels » – dont l’exécution s’effectue sur un rythme annuel – ont été également financés, avec des réductions sensibles par rapport aux propositions initiales : travaux neufs à moyen terme des houillères, logements ouvriers, équipement agricole. La cadence voisine celle de 1949. Un seul programme nouveau a été maintenu : la tranche complémentaire de centrales thermiques – partagée entre CDF et EDF – justifiée par le retard par rapport à l’augmentation de la consommation. La direction générale d’EDF, le ministère de l’Industrie et le CGP se sont insurgés contre un étalement des travaux de grand équipement hydraulique, dont les résultats doivent être acquis en 1950 ou 1951 : le programme en cours d’exécution doit satisfaire tout juste les besoins probables estimés pour 1952-53. Dans ce cas, la rigidité technique et économique exclut toute marge de manœuvre financière. Et même, dans le cas du transport et de la distribution d’électricité, les opérations qui, du fait de leur moindre urgence, ont été différées en 1948 et 1949, doivent être entreprises en 1950, afin de ne pas creuser l’écart avec la capacité de production. La marge de manœuvre est également limitée pour les trois années à venir jusqu’à la réalisation du Plan Monnet, au moins pour les grands programmes des quatre entreprises nationales (CDF, EDF, GDF, SNCF). Le CGP présente, à la fin de 1949, l’échelonnement des dépenses prévues jusqu’en 1952, et au-delà : sauf pour le cas de la SNCF – où seul le programme d’électrification est largement défini à l’avance, les commandes de matériel roulant ou les travaux d’installations fixes étant fixés annuellement – la charge financière correspondant à la poursuite des opérations apparaît plus lourde pour 1950-52 que pour les années antérieures69.
64Ainsi, c’est largement l’amont qui commande.
65Pour le financement des opérations des entreprises industrielles privées ou de l’agriculture, dont le démarrage a été plus lent, le financement public ne forme qu’un appoint partiel. Dans l’industrie, près de deux tiers des crédits du FME (vingt milliards sur 31,7) correspondent à la poursuite des travaux des centrales et cokeries sidérurgiques et – pour quatorze milliards – de la construction des deux trains à bande. Pour l’agriculture, le chiffre (trente milliards) correspond à peu près au rythme de la fin de 1949. Enfin, les crédits pour les territoires de l’Union française sont fortement accrus par rapport à 1949. Certes, les niveaux de production pour 1949, définis dans la version du Plan de novembre 1946, ne sont pas atteints pour les secteurs de base.
66Mais par rapport aux abattements sévères et aux âpres débats de l’année précédente, Jean Monnet peut se montrer satisfait et confiant pour la réalisation du Plan. Devant les journalistes américains, à la fin de janvier 1950, le Commissaire au Plan estime que la moitié des dépenses d’investissements prévues pour la période du Plan (1947-1952) ont été effectuées à la fin de 1949 et que, un an plus tard, les deux tiers seront atteints70.
***
CONCLUSION DU CHAPITRE XXXII
67La stabilisation financière, monétaire et économique coïncide avec la poursuite du desserrement de l’appareil dirigiste hérité de la pénurie, amorcé en fait, on l’a vu, dès 1947.
68À l’heure des comparaisons avec l’avant-guerre, si la production retrouve les maxima d’avant-crise, la consommation se situe au niveau de 1939 et les salaires se trouvent en deçà de ceux de 1938. Et ce sont les salaires directs qui ont supporté la charge du salaire indirect, considérablement augmenté par rapport aux années trente.
69Malgré une violente campagne d’opinion contre la politique de l’État à l’égard de l’investissement, Jean Monnet et la « Triple Alliance » obtiennent, plus aisément qu’en 1948, le maintien de crédits suffisants pour ne pas compromettre, malgré des freinages et des abattements, les objectifs du Plan. La « logique de l’amont », qui consiste à poursuivre des travaux déjà engagés, permet de préserver les grands programmes initiaux. Mais les sacrifices portent sur la Reconstruction et les nouvelles priorités définies depuis 1948. Et un tel effort n’aurait pas été possible sans l’importante manne des dollars Marshall.
Notes de bas de page
1 AEF, B. 33510, d. « OECE – 1950 », Rapport sur la stabilité financière intérieure, SGCIQCEE, 30 mars 1950, 98 p. C’est le rapport de la délégation française à l’OECE. On le trouve également dans AN, F60 ter 378.
2 Louis Franck, 697..., op. cit., p. 74.
3 AEF, B. 33510, rapport cité.
4 Titre III du rapport cité (cf. note 1 page précédente).
5 Louis Franck, 697..., op. cit., p. 72.
6 Ibid, p. 75.
7 Cf. supra, chapitre XXX.
8 Le détail par trimestre se présente ainsi : 1,4 % pour le premier, puis 0,7, 0,3 et 1,1 %.
9 AEF, B 16021, archives de la direction des Programmes, note pour le ministre de Pierre Grimanelli, n° 118, 3 p., 11 février 1949.
10 Idem, note pour le Ministre de Pierre Grimanelli, n° 695, 25 septembre 1949, 4 p.
11 AEF, 1 A 405, note sur le niveau des salaires, des prix et de la production, 25 p., 23 septembre 1949.
12 AEF, B. 16021, note citée (cf. note 2, page précédente).
13 AEF, 1 A 405, note citée.
14 Idem, note citée.
15 Louis Franck, 697..., op. cit., p. 90.
16 Source : SEF, 1950, p. 159.
17 Ibid, p. 161.
18 L’article 15 du décret prévoyait des ressources fiscales, si pas plus de 100 milliards n’avaient été récoltés au 1er avril 1949.
19 Source : SEF, 1950, p. 159
20 François Bloch-Lainé, Profession fonctionnaire, op. cit., p. 115.
21 AEF, 1 A 405, lettre de Maurice Petsche à Henri Queuille, 18 octobre 1949, 2 p.
22 SEF, 1951, IIIe Rapport de la Commission des Investissements, p. 15.
23 AEF, B. 33508, d. « investissements 1950, documents sur les travaux du Comité spécial », s. d. « Commission des investissements », note remise au ministre pour la réunion du 30 juillet 1949, manusc., 7 p.
24 Idem, État des travaux du Comité spécial des Investissements, 14 septembre 1949, 7 p.
25 Idem, note du Trésor, s. a., s. d., 10 p. (à comparer aux 270 milliards de francs de 1949).
26 Idem, cf. tableau ci-dessous.
27 Idem.
28 Idem, Commission des Investissements, comité spécial, p.-v., n° I, « confidentiel », 30 juillet 1949, 7 p.
29 Idem, p.-v. cité.
30 Idem, p.-v. cité.
31 Idem, p.-v. n° 2, 1er août 1949.
32 Idem, d. « préparation 1950 », note pour le Ministre, de Roger Goetze, 30 août 1949, 5 p.
33 SEF, s.s. n° 3, 1949 ; IIe Rapport de la Commission des Investissements, p. 462.
34 AEF, B. 33508, d. cité, état des travaux du comité spécial, note du Trésor, s. a., 8 septembre 1949, 3 p.
35 Avec la poursuite du programme hydraulique d’EDF, ainsi que la poursuite de Donzère-Mondragon et l’achèvement de Génissiat, mais seulement la réalisation des études pour Montélimar.
36 L’effort est même moindre pour les investissements neufs (248,9 milliards contre 252,5 milliards).
37 AEF, B. 33508, d. « investissements 1950 », note du CGP pour le Comité spécial, 14 septembre 1949, 34 p. et annexes.
38 Idem, note citée.
39 Idem, note confidentielle sur les propositions au Comité spécial de la part du groupe de Travail « Entreprises nationales », 19 septembre 1949, 13 p.
40 Parmi ces cinquante milliards, on note : centrales thermiques (15) ; logements des mineurs (1,5) ; Afrique du Nord (5) et agriculture (15).
41 Idem, principales observations présentées au cours de la séance du Comité spécial en date du 21 septembre 1949, 5 p.
42 Idem, doc. cité.
43 Idem, note pour le Ministre de Roger Goetze, 27 septembre 1949, 11 p.
44 Idem, p.-v. de la réunion tenue le 4 octobre 1949 dans le bureau du ministre, 7 p.
45 Idem, premier rapport du Comité spécial, octobre 1949, 12 p.
46 Idem, souligné par nous ; cf. également JM, AMF 10/3/1 à 10/3/4, et surtout 10/3/3, constatations tirées du Bilan national de 1949 (novembre 1949).
47 Idem.
48 Idem.
49 Dont 375 milliards hors maximum, 20 milliards hors maximum, 35 milliards d’investissements hors du Plan et 35 milliards de charges financières.
50 IF Rapport..., p. 469.
51 AEF, B. 33508, d. « investissements 1950 », premier rapport du Comité spécial. Cf. également JM, AMF 17/8/4, lettre de Jean Monnet à Maurice Petsche, 23 octobre 1949, où le Commissaire au Plan défend les chiffres cités.
52 Idem.
53 Idem, schéma pour la séance du 17 novembre 1949, s. d. 5 p.
54 AEF, B. 42268, p.-v. de la séance du 18 novembre 1949 de la Commission des Investissements, 7 p. Assistent à cette séance Maurice Petsche et Robert Buron, secrétaire d’État aux Affaires économiques.
55 Roger Goetze dirige le groupe sur l’Équipement des services civils ; Tinguy celui sur la Reconstruction et Jean Monnet celui sur l’Équipement.
56 Idem, c. r. du sous-comité des Investissements, 20 novembre 1949, 8 p., Jean Monnet y affirme « Les maxima s’imposent. Les réserves ne sont pas admises ».
57 Idem.
58 Cf. tableau, page suivante.
59 JM, AMF 17/10, d. « Les investissements dans la presse et au Parlement décembre 1949-janvier 1950 », dossier de février 1950. Cf. également R.F. Kuisel, L’État..., op. cit., p. 399.
60 JM, AMF 17/9/10 à 17/9/14, d. « Front économique », ainsi que AMF 17/9/15 à 17/9/20 sur les positions du CNPF.
61 Edgar Faure, Mémoires, op. cit., t. 1. p. 267.
62 Ibid, p. 268.
63 Il a sollicité en 1948 l’autorisation de consulter les p.-v. de la Commission des Investissements. Dans une note manuscrite, François Bloch-Lainé conseille de l’« envoyer promener ».
64 Edgar Faure, Mémoires, op. cit., t 1, p. 272 et p. 266 et suiv.
65 Source : AEF, B. 34144, Assemblée nationale n° 9208. Annexe au p.-v. du 8 février 1950. Lettre rectificative du projet de loi relatif au développement des dépenses d’investissement (prêts et garanties pour l’exercice 1950).
66 Idem, Lettre de Jean Monnet à M. Petsche, 31 janvier 1950, 2 p. et 2 annexes.
67 AEF, B. 42268, p.-v. de la séance du 6 février 1950 de la Commission des Investissements, 29 p.
68 Deuxième Rapport de la Commission des Investissements, S.E.F., s.s. n° 3, 1949, p. 477.
69 Ibid, p. 482.
70 Source : JM AMF 14/6/37, exposé de Jean Monnet devant des journalistes américains, 26 janvier 1950.
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