L’industrie aéronautique française et l’europe depuis les années 1950 : entre ancrage territorial et coopérations internationales
p. 283-297
Texte intégral
I. De la relance à l’ancrage territorial « national »
1L’industrie aéronautique française a pu développer ses compétences dans les hautes technologies en passant d’un ancrage territorial à des coopérations internationales, en liaison avec les politiques gouvernementales, entre l’Europe et les États-Unis. De nouvelles problématiques et de nouvelles archives permettent d’en démêler l’écheveau.
2Dès la fin de la Seconde Guerre mondiale, certaines personnalités « obscures » œuvrant à la remise en marche de l’État français essayèrent une coopération, ou mieux un contact, avec l’allié britannique. Ce fut la mission d’Henri Ziegler, le futur patron de l’Aérospatiale, de Concorde, d’Airbus, à Londres (décembre 1944-juillet 1945), afin de tâter le terrain d’un échange de technologie aéronautique, mais elle se solda par un échec1. Conscients de leurs potentialités industrielles et du marché légué par la guerre, les Anglais ne tenaient nullement à se lier à une industrie « à refaire2 ». À Londres, on pensait à drainer le know how nazi comme d’ailleurs les États-Unis, mais aussi, bien sûr, la France de la Libération faisait de même. L’opération Paperclip à la française est à l’origine du développement des moteurs Atar de la SNECMA3, la Société nationale de construction et études de moteurs d’avions sortie tout droit de la guerre avec déjà l’idée d’en faire un champion national.
3Dans la foulée du plan quinquennal des années 1950, le secteur aéronautique public fit l’objet d’une coordination des différentes firmes, coordination gérée par le ministère de l’Air en train de lancer une série de programmes ambitieux4. À côté, l’état-major de l’Air apporta son soutien à la maison Dassault grâce au choix du futur Mirage III. Cet appareil avait été en fait anticipé par le chasseur Ouragan qui devait ouvrir la voie à la famille des Mystères, et ainsi à la pratique du partage du travail de Dassault avec les sociétés « nationales », qu’il fallait conforter ou plus simplement faire survivre : Société nationale des constructions aéronautiques Nord, SNCA Sud-Ouest et SNCA Sud-Est. Celles-ci et leurs développements futurs, Nord Aviation, créée en 1954, et Sud Aviation, fondée en 1957, représentent le dispositif géographique de l’« ancrage » territorial de l’aéronautique française en place au milieu des années 1950 lorsque, face au nouveau cadre d’une Europe occidentale in fieri, Paris tenta de s’appuyer sur lui pour dessiner un marché pour sa « toute nouvelle » industrie aéronautique, d’ailleurs relancée grâce au cadre du plan Marshall, et tout particulièrement par le PAM (plan d’aide militaire), dont le plan quinquennal devait être une prolongation5.
4Cependant, l’échec de la Communauté européenne de défense et de son comité des armements suivi par celui du pool des armements tenté dans le sillage de l’Union de l’Europe occidentale6 montra à Paris l’opposition décisive de ses « alliés » continentaux face à des projets qui semblaient reproduire, à une échelle bien plus réduite, la pratique anglo-américaine des licences. L’objectif larvé de se garantir un marché apparaissait clairement, par exemple dans le rejet belgo-hollandais du projet français d’un comité FINBAIR sur le modèle de celui créé pour l’armée de terre, FINABEL7. L’hypothèse d’une coordination entre production et achat de matériel aéronautique civil et militaire devait surgir lors de l’élaboration du rapport Spaak, aux origines des traités de Rome, hypothèse encore une fois écartée8. Il se serait agi d’un comité d’étude des constructions de matériel aéronautique couplé à une direction européenne de constructions de matériel aéronautique à insérer dans la future Communauté. Fallait-il penser par cette structure – qui rappelait le comité du matériel civil français – s’engager à l’achat d’avions français ? La Caravelle venait d’accomplir son premier vol le 27 mai 1955. Cet avion fut un succès et il parvint à pénétrer le marché américain aussi9. Ce projet, fortement appuyé par la France, fut critiqué par les Pays-Bas, la Belgique et l’Italie, craignant qu’il ne s’agisse que d’acheter du matériel français… La RFA soutint le projet avec l’idée de relancer son industrie en se liant à la France, perçue comme passage obligé, sans pourtant exclure les États-Unis10. Ce projet allait toutefois à l’encontre du traité de la Communauté économique européenne, mais surtout, en juin 1956, les firmes allemandes venaient de signer la licence pour l’avion de transport militaire Noratlas de Nord Aviation. Trois ans plus tard fut lancé le Transall, un avion produit par un consortium franco-allemand, la Transport Allianz, et assemblé à Bourges. Ne pouvant pas entrer dans une Europe des Six, l’aéronautique française coopéra alors bilatéralement avec la RFA à côté de l’expérience otanienne du Breguet-Atlantic, un projet Breguet – et pourtant assemblé par Dassault qu’allait acquérir la firme concurrente – pour le patrouilleur maritime de l’OTAN, lancé en 1958, sorte de compensation face à la victoire italienne de FIAT pour le chasseur OTAN G.91.
5Au-delà de quelques rectifications de tir, ce sera Caravelle et son succès qui marqueront l’accession de la région toulousaine au rang de second pôle – après Paris, certes – lors de la deuxième décentralisation des années 1960, après celle de 1937-194011. Dassault, pour l’aéronautique militaire, développait Mérignac. La prééminence de Paris était encore là – la SNECMA y restait face à Turbomeca à Bordes – mais l’État jeta quand même les bases de l’actuel dispositif toulousain de l’aéronautique européenne12. Cette mise au jour, au cours des années 1960, d’un ancrage territorial destiné à se répercuter sur le complexe national français13 venait en réalité au terme d’une quarantaine d’années d’histoire de l’aéronautique, de ses machines et de ses hommes14.
II. L’entrée de l’Europe… mais laquelle ? communautaire ou intergouvernementale… européenne ou euro-américaine ?
6Or cette mise au jour du dispositif territorial de l’industrie aéronautique française se produit en même temps que la marche, la véritable course des grands États européens vers la réalisation de leurs concentrations nationales respectives pour donner naissance à des « champions15 ». En Grande-Bretagne la British Aircraft Corporation et Hawker Siddeley Aviation en 1965, avec Rolls-Royce qui acquiert le Bristol Siddeley Aviation en 1966 ; en France, la SNIAS (Société nationale industrielle aérospatiale) en 1970, le renforcement de Marcel Dassault Aviation avec l’acquisition de Breguet (1971), et de fortes participations dans la Fabrique nationale belge, enfin la SNECMA (Société nationale d’études et de construction de moteurs d’avions) devenait, après avoir acquis Hispano-Suiza, le quatrième producteur mondial de moteurs d’avions après Pratt & Whitney, General Electric et Rolls-Royce ; en RFA, la MBB (Messerschmitt-Bölkow-Blohm), avec aussi la Hollandaise Fokker, et la MTU (Motoren Turbinen Union) pour les moteurs, furent créées en 1969. En Italie, par une décision du Comitato Interministeriale per la Programmazione Economica suivant le rapport de la commission chargée d’étudier la réorganisation de l’aéronautique, et présidée par Giuseppe Caron, naissait à Naples en 1969 Aeritalia (FIAT Aviazione, Aerfer et Filotecnica Salmoiraghi à capital FIAT-Finmeccanica). Les réflexions en cours aussi en France, et tout particulièrement celles coordonnées par la direction générale de l’Aviation civile, responsable des programmes civils, mais en coordination avec la délégation générale de l’Armement, sa contrepartie pour les programmes militaires, oscillaient aussi entre la création de grands leaders de filières nationales, de grands chefs de file et de grands combinats spécialisés susceptibles par leur taille de s’imposer au niveau européen. En tout cas, elles s’inscrivaient dans la perspective, déjà bien nette dès la moitié des années 1960, que la coopération transnationale s’avérait la seule voie permettant la survie d’une industrie aéronautique nationale. En Grande-Bretagne, le rapport Plowden, publié en décembre 1965, prôna la coopération européenne mais tout en préservant les relations avec les firmes américaines porteuses d’un marché mondial16 ; en France, le gouvernement créa un comité d’expansion de l’industrie aéronautique (1963-1966), où les études conduites au sein de la direction générale de l’Aviation civile furent reprises lors d’un conseil interministériel restreint en octobre 1969 ; en Italie, on vient de la citer, la commission Caron (1967-1969) suggéra que, après la concentration et l’aide inévitable de l’État, les nouveaux appareils « puissent être réalisés à travers des coopérations internationales avec des partenaires dotés d’un important niveau technologique, et sur des bases pouvant garantir une participation italienne scientifiquement et technologiquement de bon niveau, commercialement valide et pouvant amener à des perspectives autonomes17 ».
7La philosophie était identique pour la RFA où la réflexion était coordonnée par Franz-Josef Strauss, mais ses conclusions furent tirées seulement lors de la nomination d’un coordinateur de la politique aérospatiale, le libéral Martin Grüner en décembre 1974, comme sous-secrétaire d’État à l’Économie auprès du ministre Hans Friedrichs, celui qui avait suivi le projet Airbus18.
8Quel rôle la France a-t-elle pu jouer en Europe ? Les travaux coordonnés sur Airbus et Ariane par Emmanuel Chadeau le montrent avec un raisonnement très clair. Les archives, que Chadeau lui-même souhaitait voir s’ouvrir19, sont aujourd’hui disponibles. Elles rendent, ce qu’il pressentait, ses thèses encore plus fortes et plus précises. Des archives toutefois qui ne peuvent pas être exclusivement françaises, et même, pour vérifier le point de vue français – on espère le montrer par la suite – toute analyse sur la coopération aéronautique nécessite le croisement d’archives des différents pays engagés et, si possible, des archives au niveau national d’origine différente, non seulement des administrations concernées, mais encore celles des entreprises, ou d’hommes, savants ou politiques, ayant eu à traiter de l’affaire. Cela dit, une telle coopération, du point de vue du « système » France, devait-elle être européenne, comme Airbus et Ariane le symboliseraient – il faut quand même le conditionnel – ou devait-elle être une coopération internationale, et donc « euro-américaine » ? Et si elle était enfin une coopération européenne, devait-elle être réalisée au sein d’une Europe communautaire ou d’une Europe intergouvernementale, et donc d’une Europe plus libre, et variable, que celle de la Communauté européenne, mais sans doute plus fragile ? À ce sujet, face aux projets de ses partenaires européens, quelle idée avait donc la France ? C’est la première question à laquelle notre article voudrait suggérer des pistes de réflexion.
9Dans les années 1960, on a vu le lancement d’une série de ballons d’essai sur une communauté technologique européenne : la communauté technologique européenne de Harold Wilson qui, avec Airbus, devait être un des pivots disons « exocentriques » de la candidature britannique à la CEE ; le « plan Marshall de la technologie » proposé en 1966 par le ministre italien des Affaires étrangères Amintore Fanfani, plus exactement « le retard technologique de l’Europe et l’opportunité d’une collaboration internationale », dont Wilson et Fanfani avaient parlé lors de la visite à Londres en juin 1967 de ce dernier avec le président du Conseil Aldo Moro, et que les Français voulaient neutraliser car séparant le civil – la CEE – du militaire – l’OTAN20 ; le vice-président de la Commission européenne, Robert Marjolin, et son invitation à l’inévitable « communauté technologique » des années 1960. Il s’agissait de propositions autour du gap technologique, dont le livre de Jean-Jacques Servan-Schreiber Le défi américain n’était qu’un exemple21. C’est toutefois au cours des années 1970 qu’ont lieu des débats publics sur la nécessaire restructuration de l’industrie européenne et des programmes de coopération en tant qu’outils aptes à faciliter la coagulation de cette industrie au sein de la Communauté européenne22. Les États discutent en 1971-1975 d’un « plan Schuman de l’Aéronautique », l’Aeronautical Common Market, l’espace aérien européen du plan d’action de la Commission européenne d’octobre 1975 présenté par Altiero Spinelli, chargé des affaires industrielles, scientifiques et technologiques, mais aussi, en mai 1975, de la déclaration du ministre français de la Défense Yvon Bourges sur la « communautarisation de l’industrie aéronautique23 ». En novembre 1973, avec ses collègues allemand de l’Économie Hans Friederichs et britannique de l’Aéronautique Michael Heseltine, le ministre français des Transports Yves Guéna avait proposé un projet de coordination de l’industrie au niveau européen à soutenir par les commandes des compagnies aériennes des États membres… De leur côté, toujours en octobre 1973, les représentants de l’industrie24 dirigés par Henri Ziegler, patron de l’Aérospatiale et d’Airbus mais aussi président de l’Union syndicale de l’industrie aéronautique et spatiale française, ces producteurs demandèrent à la Commission un tarif douanier commun contre le matériel aéronautique américain. Ziegler lui-même avait déjà pris position dès mars 1973 par une lettre au président de la commission François-Xavier Ortoli en faveur d’une politique commerciale commune à établir par une préférence communautaire dans le secteur aéronautique25 :
« En outre, par un paradoxe que la Commission a souligné à plusieurs reprises, le marché américain, dont l’industrie contrôle 90 % du marché occidental, est protégé de la concurrence européenne par des droits de douane. En revanche, les avions américains sont importés en Europe en franchise. Ce traitement inéquitable est un contresens économique qui pénalise les produits européens de 5 % supplémentaires. Il convient de restaurer l’égalité des régimes douaniers, c’est-à-dire, faute de pouvoir supprimer les droits de douane imposés à l’entrée aux États-Unis, d’en établir à l’entrée dans la CEE ».
10En février 1973, à Washington, la France venait de protester contre l’Eximbank américaine qui, en novembre 1972, avait congelé les crédits à l’exportation des moteurs pour Mercure et Airbus26. On avait là toute une série d’actions visant la défense de l’espace aérien européen entendu comme lieu de coproduction27, mais aussi comme espace de transport dont la future gestion fut abordée au sein de la Communauté dès 197328, et donc lors du débat aux États-Unis sur la dérégulation des transports aériens approuvée par le Congrès en 1978. La France devait s’y opposer face à la Grande-Bretagne thatchérienne jusqu’à l’Acte unique européen de 1985, mais quel était son choix quant à l’industrie ? Une restructuration de l’aéronautique au niveau européen suite à la réalisation des concentrations nationales, et par l’entremise de projets bi- ou trilatéraux comme Airbus, mais à réaliser au sein de la Communauté, ou au contraire par la voie intergouvernementale ?
11C’est au cours des années 1970 que le choix a été fait. C’est là qu’une analyse croisée d’archives des différents pays engagés, et des institutions communautaires, s’avérerait indispensable pour tenter de cerner le sens de la politique française. Les décideurs de l’aéronautique française agirent alors face aux inéluctables coopérations transnationales au sein d’une construction européenne à géométrie variable qui penchait de plus en plus vers la coopération structurée au lieu de la communautarisation des coopérations aéronautiques. Paris n’était pas seul. Londres et Bonn partagent ce choix. Cet accord apparut lors des travaux du Tripartite working group créé par les trois pays avec pour mission de débattre « the framework of Government policies needed to support an integrated European aircraft industry and to have an initial exchange on overall structure29 ». Un choix commun sortit alors de ce working group : « One thing on which the French and German Governments are agreed is that collaboration on aerospace is essentially a matter for Governments and the role of the European Commission should be limited », notait S.W. Treadgold, du Department of Trade and Industry, en juillet 197330. Les représentants allemands au sein du Tripartite group, Engelmann et Schomerus, soulignent que « the exploitation of the Commission document [le plan d’action pour l’aéronautique de Spinelli] would be a tactical ploy. Their general attitude that this was a matter between Governments rather than for the Commission had not changed31 ». La Commission européenne ne devait être qu’« a forum for discussion but little else of positive nature », car « they [the European Commission] could well have a negative effect by setting up rigid procedures which would limit our freedom of action ». Enfin, Bernard Esambert, le conseiller du président Pompidou pour les affaires industrielles et techniques, en parlant d’Airbus, a dit qu’il s’agissait d’un projet « européen mais non communautaire32 ». D’accord sur le sens de la coopération aéronautique, les trois États choisirent donc d’exclure le cadre communautaire et de procéder par la voie intergouvernementale. Paris devait faire front sur le maintien du groupement d’intérêt économique Airbus comme pilier de son aéronautique33. C’était la conclusion de la DGAC, tout en se préparant à parler d’un European Fighter Aircraft, et donc de l’hypothèse de produire en commun un avion de chasse aussi, à la différence de ce qu’on avait choisi avec le Multi-Role Combat Aircraft Tornado, mais à la condition pour la France d’avoir un leadership, de la cellule ou de la motorisation34, et cela au-delà du désir affiché par la suite par le président Mitterrand d’un avion « européen35 », ou de l’entente Dumas-Genscher. En outre, comme l’a ensuite écrit Roland Dumas, comme pour Ariane et Airbus, il s’agissait de « renforcer l’idée que l’Europe peut se construire dans un cadre aux dimensions variables36 ».
12Dès la fin des années 1960, donc, mais jusqu’aux « bouleversements » des années 1980, pour la survie de son aéronautique par l’entremise des coopérations internationales, la France, ou plus exactement son système de prise de décision, répondit selon la voie intergouvernementale renforcée par le modèle du groupement d’intérêt économique. De même, face aux Italiens proposant une joint venture dès la fin des années 1970 pour un autre type d’avion civil, les Français menèrent des négociations pour aboutir à un GIE, ATR, dont l’accord fut signé le 4 novembre 1981 par les présidents d’Aérospatiale et Aeritalia, Jacques Mitterrand et Renato Bonifacio. Après la question sur le sens que la France a contribué à donner à la coopération aéronautique européenne communautaire/intergouvernementale, il y a toutefois une deuxième question qu’il faudrait aborder et que la littérature récente sur l’industrie aéronautique française généralement n’aborde pas lorsqu’elle traite des coopérations aéronautiques avec, encore une fois, une exception, le colloque dirigé par Emmanuel Chadeau sur Airbus : la question du processus de décision français, c’est-à-dire des interconnexions entre industriels, hauts fonctionnaires, diplomates, militaires et les hautes instances de l’État, c’est-à-dire les ministres concernés et leurs administrations, le chef de l’État et ses conseillers. C’est à la jonction des modalités d’action de tous ces acteurs qu’à mon avis se trouve le potentiel du système français lorsqu’il projette ses intérêts nationaux dans la dimension internationale, lorsqu’il les défend grâce à sa politique étrangère.
III. Le processus de décision français et l’aéronautique, aux origines de choix stratégiques
13Un épisode emblématique et pour lequel, grâce aux archives, on peut remonter jusqu’aux plus hautes personnalités de l’État, est celui de l’accord SNECMA-General Electric pour le développement d’un moteur d’avion civil. Cet accord est à la base de l’actuel consortium CFM International, aujourd’hui le premier producteur au monde de moteurs civils, un succès car il détient 54 % du marché. Il s’agit là d’un choix stratégique qui a garanti l’entrée de la France dans la motorisation civile au plus haut niveau tout en exploitant et en soutenant Airbus comme en coopérant avec les États-Unis, ainsi que d’ailleurs tous les pays européens tentaient de faire dans les années 1970, au-delà des déclarations d’européisme. Et donc, pour Paris aussi, la coopération en Europe devait être intergouvernementale et internationale c’est-à-dire euro-américaine avec un fort potentiel de compétition intra-européenne pour se garantir la technologie la meilleure, celle des États-Unis. Ce fut l’attitude choisie par l’Italie dans l’accord Boeing-Aeritalia de 1971 pour le développement du futur B 767 concurrent d’Airbus, une attitude suggérée, on l’a vu, par la commission Caron, mais une attitude choisie par d’autres pays « européistes » aussi, comme la France par l’accord SNECMA-General Electric qui a vu l’intervention directe du président Nixon et de son conseiller Kissinger37, ainsi que du président Pompidou car, grâce à l’argent français, la SNECMA devait obtenir de la General Electric la technologie du cœur du moteur destiné au bombardier stratégique. Pour ce faire, « the French Government will not seek new tariffs against US aircraft imports into the European Community », rappelle un document de la Maison-Blanche sur la rencontre Pompidou-Nixon à Reykjavik, les 31 mai et 1er juin 197338. Cela fut réaffirmé par un échange de lettres, à la demande du Département d’État, et à la suite de la demande ouverte de Ziegler et des producteurs européens pour une défense tarifaire en mars 197339. Comme le précisait en juin 1973 – après l’annonce de l’accord par la presse – le secrétaire d’État William Rogers à l’ambassade à Paris, le gouvernement américain avait obtenu « an undertaking by the French that they would not have imposed the suspended tariff on aircraft and components on US imports into EEC during the life of the license […] SNECMA officials had previously indicated that such an undertaking should not cause any difficulty for the French government40 ».
14On parlait d’un engagement temporaire, jusqu’à la conclusion du futur Nixon Round au sein du GATT, et on soulignait, de la part des Français, un engagement commun pour un futur désarmement tarifaire41… En tout cas, la demande du patron de l’aéronautique française Ziegler au président de la Commission Ortoli pour une défense tarifaire en mars 1973, mais aussi le « plan Schuman de l’aéronautique » de Spinelli en octobre 1975 pour une nouvelle PAC (politique aéronautique commune), tout cela venait donc d’être stoppé bien loin de Bruxelles et de l’Europe « communautaire », au nom d’un accord, celui entre SNECMA et General Electric, vital pour les industries française et américaine… mais il faut aussi prendre en considération le fait que la question d’un tel tarif commun aurait été soulevée lors des négociations de l’entrée de la Grande-Bretagne dans la Communauté… comme l’a écrit Bernard Esambert42 :
« La France souhaitait également le rétablissement de conditions équitables de concurrence entre firmes européennes et firmes américaines par la suppression du droit de 5 % qui frappait aux États-Unis l’importation d’appareils européens alors que les matériels aéronautiques américains n’étaient passibles d’aucun droit de douane à l’entrée dans la CEE. À défaut d’obtenir cette disparition de la taxe de 5 %, les Français s’étaient battus sans succès, à l’occasion des négociations relatives à l’entrée de la Grande-Bretagne dans le Marché commun, en faveur du rétablissement d’un droit de douane sur les matériels aéronautiques à l’entrée de la Communauté, au travers de l’abrogation d’un protocole dit n° 17 ».
15On peut encore souligner qu’au Coreper (comité des représentants permanents auprès de la Communauté) la question avait été stoppée bien avant la rencontre Nixon-Pompidou à Reykjavik43. Tout en faisant semblant de faire un joli cadeau – ou du moins c’est ce que l’administration Nixon semble avoir cru recevoir, objectif pour lequel le Département d’État en particulier avait bien travaillé44 –, Paris aurait accepté de donner à Washington un bouquet, disons, déjà fané, c’est-à-dire le renoncement à un tarif commun de la CEE que les États membres de la Communauté avaient déjà laissé tomber, le tout pour réaliser un accord stratégique qui a d’abord permis à l’industrie aéronautique française de survivre sur la longue durée, mais surtout l’a élevée aux toutes premières loges du leadership de l’aéronautique mondiale. Ce système décisionnel français mérite bien d’être étudié, surtout quand il marque une primauté comme celle-ci. Il ne faut pas oublier d’une part les gouffres économico-financiers qu’il a contribué à alimenter, en particulier dans le secteur aérospatial, comme Concorde qui a cependant permis à l’Aérospatiale de survivre, et d’autre part l’entrelacement liant « machines » civiles et « produits » militaires. De façon plus générale, selon François Caron « […] les années 1969-1973 marquent une étape décisive dans le processus d’intégration de l’économie française dans l’économie mondiale. Georges Pompidou savait qu’elle passait par la formation de multinationales françaises puissantes. Ce fut aussi l’un de ses grands desseins45 », et il le réalisa, avec ses collaborateurs, et avec les dirigeants des entreprises publiques, par l’accord SNECMA-GE d’un côté, mais aussi par l’opération Airbus, dont le cadrage très serré continue jusqu’à aujourd’hui. L’enjeu est de comprendre un des « accomplissements technologiques » destinés à « déboucher sur des réalisations industrielles concrètes » en promouvant « la coopération européenne des accords bi- ou multilatéraux plutôt que la voie communautaire46 » avec comme objectif l’« internationalisation des entreprises françaises face à la multinationalisation de l’économie47 ».
Conclusion
16Malgré les tentatives françaises au milieu des années 1950 de s’appuyer sur un cadre européen intégrationniste en comptant sur un leadership techno-politique escompté, comme la CED, le comité FINBAIR, le pool des armements centré sur l’UEO et enfin le projet de direction du Matériel aéronautique pour la future CEE, l’entrée de l’Europe dans le viseur de l’aéronautique française ne survint qu’au beau milieu des années 1960, à cause de la Grande-Bretagne. Ce fut ainsi dès le début des années 1970 que Paris dut se battre avec les autres pays européens pour un partage du travail dans un secteur de haute technologie à cycles longs, comme l’aéronautique, dont l’enjeu capital était le leadership dans les cellules et dans les moteurs, les deux étant complémentaires et nécessaires. C’était le même point de vue qu’avait proposé au Department of Trade and Industry la Hawker Siddeley Aviation qui défendait sa participation à Airbus, ou au Foreign Office par Lord Greenwood, président de British Aircraft Corporation, et du consortium Panavia du Tornado48. La condition d’un leadership était clairement posée par la nouvelle concentration British Aerospace lors du retour britannique dans Airbus Industrie en 1978. De là devait sortir en 1973-1975 le projet concurrent d’Airbus au britannique Europlane qui misait sur la participation des industries du Nord de l’Europe, et avant tout sur le complexe nord de la RFA49. D’autre part, les Allemands cherchaient non pas à se passer de la coopération bilatérale avec Paris, mais à ne pas en être exclusivement dépendants. Leur projet d’avion européen, le petit porteur VFW 614 qui fut un échec commercial complet avait pourtant comme objectif d’« ancrer l’industrie allemande du Nord du pays à l’Europe septentrionale » par souci de diversification50. Un tel objectif avait déjà amené Bonn à tenter des projets de V/STOL avec les États-Unis et avec l’Italie avant de se retourner décidément vers l’Europe avec un cadre politico-diplomatique renforcé grâce à son Ostpolitik, par-delà le soutien de Willy Brandt à l’idée de « produire des avions européens » tels que Tornado et Airbus, le premier contre l’avis de ses militaires, qui le jugeaient trop coûteux51, le deuxième en acceptant de bien en couvrir le développement et la mise en place des infrastructures nécessaires dans la région toulousaine tout en retardant l’entrée en service d’une chaîne d’assemblage allemande, les deux en suivant la ligne droite de la politique de soutien au complexe techno-industriel aéronautique allemand centré sur le Sud du pays, et donc tenant compte du choix politique de Franz-Josef Strauss.
17Au sein donc d’une Europe de l’aéronautique devenue nécessairement « coopérative » dès le milieu des années 1960, la pratique traditionnelle du « juste retour », de la « logique d’État » – selon l’expression de Pierre Muller pour Airbus52 –, de la « logique d’arsenal » pouvait difficilement résister face à la « logique du marché » prêchée en France par des hauts fonctionnaires et des responsables d’entreprises publiques, dont Ziegler lui-même, mais aussi amplement partagée par ceux qui, en Grande-Bretagne ou en RFA, avaient fait l’expérience des coopérations. Il leur fallait toutefois se positionner déjà dans une perspective de mondialisation bien annoncée par les prises de contacts en vue d’éventuelles coopérations de la part de la Chine communiste et de l’Inde dès le milieu des années 1960 avec les Occidentaux, et par l’entremise des pays du bloc communiste comme la Roumanie53, et accélérées dix ans plus tard dans le sillage de l’ouverture américaine à Pékin mais aussi des relations commerciales avec la CEE. Un tel marché ne pouvait amener qu’une multiplication à l’échelle mondiale des points d’ancrage de la production, de délocalisations sinon de la production, du moins de l’assemblage des avions afin de faciliter la conquête de nouveaux marchés. Une telle délocalisation compétitive est un phénomène qui vient aujourd’hui d’être pleinement déclenché par les implantations d’Airbus aux Indes et en Chine, même si c’est pour un modèle déjà bien établi comme l’A320.
18Face à de tels défis, la France de la Ve République a su bâtir deux piliers dans les cellules et la motorisation qui lui ont permis non seulement de faire survivre une industrie nationale dans le secteur civil – dont les retombées pour la production militaire sont encore à saisir au niveau de l’historiographie – mais encore d’acquérir un leadership non pas européen mais mondial. Tout cela a vu sa naissance au tournant des années 1970, mais après avoir passé le cap de différentes tentatives se nouant aux divers tournants des décennies précédentes. D’autre part, la France n’est pas seule. Paris a partagé son destin d’un côté et de l’autre de l’Atlantique… et du Rhin, mais le tout dans le cadre d’une Europe qui se veut non pas communautaire, mais aux multiples coopérations renforcées. De quoi compliquer l’avenir d’une aéronautique, toujours et avant tout nationale, mais en voie de mondialisation.
Notes de bas de page
1 Sur le rejet politique d’une coordination anglo-française, à une époque où la coopération est une affaire chaude : H. Ziegler, Défense Nationale, juin 1973, p. 28 ; C. Carlier, L’Aéronautique française (1945-1975), Paris, Lavauzelle, 1983, p. 46-47. De la documentation originelle toutefois émerge le sérieux des propositions et de leur examen par les Britanniques : Service historique de la défense, département de l’armée de l’Air, Vincennes, Papiers privés Ziegler, Z 20012/1 ; et The National Archives, Kew Gardens [dorénavant TNA], AVIA 9/86, AIR 51/457, CAB 80/92/36, et WO 193/194.
2 D. Burigana, « Des valeurs en action ? L’AGARD ou la Communauté Atlantique des savants hommes d’entreprise de l’aéronautique européenne (1952-1969) », V. Aubourg, G. Bossuat, G. Scott-Smith (dir.), European Community, Atlantic Community ?, Paris, Soleb, 2008, p. 376.
3 G. Bossuat, « Armements et relations franco-allemandes, 1945-1963 », in Centre des hautes études de l’Armement, Histoire de l’Armement en France, 1914-1962, Paris, Addim, 1996, p. 147-206.
4 P. Facon, Histoire de l’armée de l’air, Paris, La Documentation française, 2009, p. 306-308.
5 P. Facon, Histoire de l’armée…, op. cit., p. 306.
6 E. Calandri, “The Western European Union Armaments Pool : France’s Quest for Security and European Co-operation in Transition (1951-1955)”, Journal of European Integration History, vol. I, n° 1, 1995, p. 37-64.
7 D. Burigana, P. Deloge, « Pourquoi la standardisation des armements a-t-elle échoué dans les années 1950 ? Éléments de réponse et pistes de réflexion autour d’un cas : le comité FINABEL », Entreprises et Histoire, n° 51, juin 2008, p. 103-116 ; et dans le sillage des idées de 1950 du chef d’état-major des forces armées de l’Air, le général Léchères : P. Facon, « Le projet de programme commun européen aéronautique du général Léchères, 1950-1953 », J.-P. Hébert, J. Hamiot (dir.), Histoire de la coopération européenne dans l’armement, Paris, CNRS Éditions, 2004, p. 17-26, et P. Facon, Histoire de l’armée…, op. cit., p. 318-323.
8 Archives historiques de l’Union européenne, Florence [dorénavant AHUE], CM 3 56, groupe de travail transports aériens, 12 janvier 1956 ; et TNA, DG 1/152, WEU Archives, n. 643/SP, 20 mars 1956, étude ; archives du Conseil de l’Union européenne, Bruxelles [dorénavant A Cons UE], CM3/NEGOC. 0056/ac-a, b, c, et 0063/ab-a et b.
9 Le 12 octobre 1951, le comité du matériel civil avait publié une note sur un avion moyen-courrier envoyée à l’Industrie par la Direction technique et industrielle. La proposition de Sud Aviation de Toulouse devait être retenue en juillet 1953. La Caravelle a été vendue à 86 compagnies et 11 forces armées en 282 exemplaires.
10 D. Burigana, « Toujours troisième ? La République Fédérale et la survivance technologique de l’espace aérien européen du bilatéralisme à Airbus, entre rêve intégrationniste et pratique intergouvernementale (1959-1978) », in J. Elvert, S. Schirmann (dir.), Zeiten im Wandel : Deutschland im Europa des 20. Jh. Kontinuität, Entwicklungen und Brüche, Bruxelles, PIE-Peter Lang, 2008, p. 177-196.
11 P. Beckouche, La nouvelle géographie de l’aéronautique européenne. Entre monde et nations, Paris, L’Harmattan, 1996, p. 146 ; T. Vivier, La politique aéronautique militaire de la France (janvier 1933-septembre 1939), Paris, L’Harmattan, 1997, p. 344-363.
12 G. Jalabert, J.-M. Zuliani, Toulouse, l’avion et la ville, Toulouse, Privat, 2009.
13 Les études lancées par l’université de Toulouse-Le Mirail au début des années 1990 : G. Jalabert, J.-P. Laborie, M.-T. Gregoris, F. Laumière, J.-M. Zuliani, Activités économiques, internationalisation des villes et relations interurbaines. Toulouse, ville de l’aéronautique, rapport de recherche pour le ministère de la Recherche et de la Technologie, CIEU, université de Toulouse, Toulouse, février 1993 ; M. Grossetti, G. Jalabert (dir.), Réseaux et territoires : l’exemple de la technopole toulousaine, rapport de recherche pour le plan urbain, programme mutations économiques et urbanisation, CIEU, université Toulouse-Le Mirail, 1991.
14 G. Jalabert, Les industries aéronautiques et spatiales en France, Toulouse, Privat, 1974 ; E. Chadeau, Histoire de l’industrie aéronautique 1900-1950. De Blériot à Dassault, Paris, Fayard, 1987.
15 D. Burigana, « Du transnational à l’Espace aérien européen ? La défense territoriale de l’innovation technologique au sein de la coopération aéronautique européenne (1967-1977) », in C. Bouneau, Y. Lung (dir.), Les dynamiques des systèmes d’innovation : logiques sectorielles et espaces de l’innovation, Bordeaux, Éditions de la Maison des Sciences de l’Homme d’Aquitaine, 2009, p. 153-172.
16 Le Rapport Plowden (décembre 1965), commandé par le nouveau gouvernement travailliste, sur les orientations de la politique aéronautique, insiste sur la nécessité de la coopération européenne, tout comme à Bonn Roy Jenkins, ministre de l’Aviation, auprès de Seebohm, ministre des Transports ; archives du ministère des Affaires étrangères, Paris [dorénavant AMAE], Pactes 326, Télégramme 7191/94, Seydoux, Bonn, 24 décembre 1965. Pour Airbus, la Grande-Bretagne soutient HSA contre Sud Aviation ; TNA, AVIA 65 2008, mémorandum ministère de la Technologie, D. R. Morris, directeur général (civil), au directeur Aviation civile (Research & Development), 21 juillet 1967 ; ibid., Lettre de Morris à Vialatte, directeur du Service technique au ministère des Armées, 27 juillet 1967.
17 D. Burigana, « L’atlantista europeista ? L’Italia e la cooperazione aeronautica in Europa (1955-1978) », in N. Labanca, Pier Paolo Poggio (dir.), Storie di armi, Milan, Unicopli, 2009, p. 88-89.
18 D. Burigana, « Toujours troisième ?… », art. cit., p. 187.
19 E. Chadeau (dir.), Airbus, un succès industriel européen, Paris, Éd. Rive Droite, 1995.
20 D. Burigana, « L’atlantista europeista ?… », art. cit., p. 91.
21 F. Pigliacelli, « Space : another Field of European Integration ? », in C. Bouneau, D. Burigana, A. Varsori (dir.), Les trajectoires de l’innovation technologique et la construction européenne : des voies de structuration durable ?/Trends in Technological Innovation and the European Construction : the Emerging of Enduring Dynamics ?, Bruxelles, PIE-Peter Lang, 2010, p. 210.
22 Il s’agissait des colloques internationaux organisés par la Commission technologique et scientifique de l’assemblée de l’UEO, à la suite du sommet de Paris des chefs d’État et de gouvernement de la CEE, en octobre 1972, relançant une politique industrielle et consacrés à l’avenir de l’industrie aéronautique en Europe « Pourquoi un marché aéronautique uni pour l’Europe… », en 1973, 1975, 1977, avec la participation de hauts fonctionnaires, parlementaires et industriels ; Centre des archives contemporaines, Fontainebleau [dorénavant CAC], DGAC, 880420/66.
23 D. Burigana, « Per uno spazio aereo europeo, o l’impossibile via all’integrazione (1972-1978) », in L. Grazi, F. di Sarcina, L. Scichilone (dir.), Europa vicina e lontana. Idee e percorsi dell’integrazione europea, Florence, CET, 2008, p. 165-177.
24 British Aircraft Corporation, Hawker Siddeley et Westland, Aeritalia, Fokker, Fokker-Vereinigte Flugtechnische Werke, Dornier, Messerschmitt-Bölkow-Blohm, Société Nationale Industrielle Aérospatiale et Dassault-Breguet.
25 AHUE, BAC 28/1980 21.
26 AMAE Europe 70-75, RFA 3027, Télégramme circulaire, MAE-DAE et F, C. d’Aumale, Paris, 15 novembre 1972 ; et protestation auprès du secrétaire au Trésor Schultz ; ibid., télégramme 702/09, La Gorge, Washington, 1er février 1973 ; et 942/48, La Gorge, le 7.
27 D. Burigana, « Du transnational à l’espace aérien européen ?… », art. cit.
28 La documentation conservée dans les archives historiques du Conseil de l’UE, Bruxelles [dorénavant AHConsUE] est encore à exploiter.
29 TNA, T 225 3890, Note, Project on Aeronautical industry and European integration, S.W. Treadgold, Department of Trade and Industry, 18 juillet 1972. Créé par la Grande-Bretagne, la France, la RFA, et avec la participation des Pays-Bas ; en activité en 1972-1974.
30 Ibid.
31 TNA, T 225 3890, Conversation de David B. Jones, de l’[Air] Ministry, à Bonn avec le Dr Engelmann et le Dr Schomerus, 31 août 1972 ; Note, 4 septembre 1972.
32 B. Esambert, « L’Airbus : un projet européen mais non communautaire », in E. Chadeau (dir.), Airbus…, op. cit., p. 67-74.
33 D. Burigana, « L’Europe, s’envolera-t-elle ? Le lancement d’Airbus et le sabordage d’une coopération aéronautique “communautaire” (1965-1978) », Journal of European Integration History, vol. XIII, n° 1, 2007, p. 91-109.
34 G. Chamboist, Rafale. La véritable histoire, Paris, Le Cherche-midi, 2007, p. 79-80 ; J.-P. Philippe, Rafale. Le défi français, Paris, Tallandier, 1991, p. 36-37.
35 J. Attali, Verbatim, t. I : Chronique des années 1981-1986, Paris, Fayard, 1993, p. 811.
36 R. Dumas, Le Fil et la Pelote. Mémoires, Paris, Plon, 1996, p. 333.
37 Pour le point de vue américain, et la décision d’accorder une licence sur du matériel « secret défense » : D. Burigana, « Le jeu de dupes… The SNECMA-General Electric Agreement or Survival and Cooperation in Aircraft Cooperation between communitarian Tensions and Atlantic Alliance », in Ch. Bouneau, D. Burigana, A. Varsori (dir.), Les trajectoires de l’innovation technologique…, op. cit., p. 229-240.
38 National Archives and Record administration, Washington [dorénavant NARA], Nixon, HSDM H-240, National Security Decision Memorandum 220, Henry A. Kissinger aux Secretaries of State, Defence, Trade, Treasury, 4 juin 1973, Confidentiel ; et mémorandum de Flanigan au président, 25 mai 1973, confidentiel.
39 AMAE, Amérique 1971-1976, États-Unis 791, télégramme 3750/53 Washington, 12 juin 1973, Kosciusko-Morizet.
40 NARA, RG 59 SNF 70-73 Ec 632, télégramme 23072, Department of State, Rogers à Ambassy, Paris, 27 juin 1973.
41 AMAE, Amérique 1971-1976, États-Unis 791, télégramme 1516/18, MAE-Service de coopération économique, Nanteuil, Paris, à Ambafrance, Washington, 24 juillet 1973.
42 B. Esambert, Pompidou, capitaine d’industries, Paris, Odile Jacob, 1994, p. 191.
43 A Cons UE, 629054, réunion groupe des questions économiques, 27 février 1973.
44 L’échange de notes pour arriver à l’entente gouvernementale à la base œuvrant pour la concession du moteur pour le bombardier B-1 effectué le 5 septembre 1973 ; AMAE, Amérique 1971-196, États-Unis 791.
45 F. Caron, « La politique industrielle et le Marché commun », in Association Georges Pompidou, Georges Pompidou et l’Europe, Bruxelles, Complexe, 1995, p. 504.
46 Ibid.
47 B. Esambert, « La politique industrielle de Georges Pompidou et l’Europe », in Association Georges Pompidou, Georges Pompidou…, op. cit., p. 505.
48 TNA, FCO 14 837, compte rendu, J.E. Cable, FCO, 5 septembre 1971, réservé.
49 Après avoir quitté Airbus (avril 1969), les Anglais misaient sur Europlane [BAC et HSA, MBB, SAAB (novembre 1972)] pour négocier avec les États-Unis ; TNA, CAB 139 19, note Department of Trade and Industry, Hamilton, 17 janvier 1973, réunion avec le général Wolff, président de l’Association aérospatiale hollandaise ; et TNA, FCO 55 1268, Note Department of Trade and Industry, avec les Suédois, le 5 juin.
50 En particulier avec les représentants américains : NARA, RG 59 SNF 70-73 Ec 634, Télégramme A-7282, Amembassy, Rush, Bonn, 5 mars 1970.
51 Akten zur Auswärtigen Politik der Bundesrepublik Deutschland, 1969, t. II, Munich, Oldenbourg, 2006, Doc.408, Note du Secrétaire de Légation Behrends, II A 7-82.02/1-5873/69 VS-vertraulich, 23 décembre 1969, sur le rapport du ministère de la Défense sur le MRCA, fait par les généraux Limberg et Steinhoff à la commission de la Défense du Bundestag le 11.
52 P. Muller, Airbus. L’ambition européenne. Logique d’État, logique de marché, Paris, L’Harmattan et – à noter – Commissariat général du Plan, 1989.
53 À partir de 1962, la demande roumaine de reproduire les moteurs Rolls-Royce Spey, leur application dans le militaire, la vente de BAC-111, et enfin la motorisation RR pour le chasseur ; le tout en faisant miroiter à Londres la possibilité de faire le pont non seulement avec Moscou, mais avec Pékin. Paris en avait eu vent, et même Bucarest l’avait sondé pour une éventuelle vente sous licence du moteur SNECMA, proposition abandonnée face au meilleur produit RR. La documentation des archives anglaises et françaises est encore à exploiter.
Auteur
Maître de conférences d’histoire des relations internationales à l’Université de Padoue, David Burigana est docteur en histoire des relations internationales de l’Université de Florence (2002). Il a été boursier à l’IHEE (Université de Strasbourg III, 2005), à l’Université de Padoue (2004-2010), et professeur invité à l’Université de Toulouse II en 2010. Il est l’auteur de Armi e Diplomazia. L’Unione sovietica e le origini della Seconda Guerra Mondiale, Florence, Polistampa, 2006. Il a codirigé avec Christophe Bouneau et Antonio Varsori Les trajectoires de l’innovation technologique et la construction européenne. Des voies de structuration durable ? Bruxelles, P.I.E.-Peter Lang, 2010, et avec Pascal Deloge le numéro de Histoire, Économie et Société d’octobre-décembre 2010 sur L’Europe des coopérations aéronautiques. Il est l’auteur de “The European search for aeronautical technologies, and technological survival by co-operation in the 1960s-1970s : with or without the Americans ? Steps, ways, and hypothesis in international history”, HumanaMente. Journal of Philosophical Studies (16, 2011) ; “Europe and Le Défi Américain : a nonsense question ? The European Strategy for an Intergovernmental and Euro-American Techno-Industrial Cooperation”, in A. Varsori, G. Migani (dir.), Europe in the International Arena during the 1970s. Entering a Different World, Bruxelles, P.I.E.-Peter Lang, 2011 ; “A European intergovernmental defence ? Italy, Germany and the European policy approach to armaments cooperation”, in M. Gehler, M. Guiotto (dir.), Italien, Österreich und die Bundesrepublik Deutschland in Europa. Ein Dreiecksverhältnis in seinen wechselseitigen Beziehungen und Wahrnehmungen von 1945/49 bis zur Gegenwart, Weimar, Böhlau, 2012. Ses recherches abordent diplomatie et coopération techno-scientifique et civilo-militaire depuis les années 1950 ; il vient de lancer un projet sur Alitalia, outil de la politique étrangère italienne.
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