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    Plan

    Plan détaillé Texte intégral I. La planification de la recherche et le discours sur le retard comme norme pour la réflexion et l’action II. Les objets du discours sur le retard dans la planification de la recherche III. Retard et comparaison géographique Notes de bas de page Auteur

    Entreprises de haute technologie, État et souveraineté depuis 1945

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    Table des matières

    État, planification, recherche et discours sur le retard

    Julie Bouchard

    p. 25-43

    Texte intégral I. La planification de la recherche et le discours sur le retard comme norme pour la réflexion et l’action II. Les objets du discours sur le retard dans la planification de la recherche A. Les disciplines comme objet du retard, une référence dominante jusque dans les années 1980 B. La montée en puissance de la référence à la technologie, à l’innovation et à l’industrie III. Retard et comparaison géographique Notes de bas de page Auteur

    Texte intégral

    1Le retard ne constitue pas simplement pour l’histoire et les sciences sociales un « problème » à objectiver. Les diagnostics savants, accompagnés de leurs analyses des causes et des conséquences, à la fois abondants et controversés, laissent dans l’ombre la vie sociale d’un « discours » agissant, omniprésent dans l’espace public en général et dans la politique de la recherche en particulier. Mon objet et mon objectif ne seront donc pas ici le « problème » du retard et son diagnostic suivant une posture évaluative et positiviste mais bien plutôt le « discours » sur le retard et son analyse suivant une posture compréhensive et constructiviste.

    2Je borderai à cette fin l’analyse de trois préoccupations épistémologiques et méthodologiques. Premièrement, je traiterai le discours sur le retard sans préjuger a priori de ce qui le définit et le caractérise. Je me contenterai d’une définition minimale de départ, celle du discours sur le retard comme rhétorique de l’insuffisance et du changement, qui délimite grossièrement les contours de l’objet approché tout en mettant de côté un ensemble d’usages du terme « retard » (correspondance, horlogerie, marée, musique…) qui s’en éloignent. Partant de cette définition, je considérerai que le discours sur le retard n’a pas de substance essentielle déterminée qui imposerait par la seule force du matter of fact ou de l’évidence la légitimité du changement ou de l’action. Sur la très longue durée d’ailleurs, le discours sur le retard n’a pas toujours existé. Comme rhétorique de l’insuffisance et du changement, le discours sur le retard est apparu avec le siècle des Lumières et l’idéologie du progrès dont il est le revers. Dans une quête continuelle d’amélioration, « retard » est employé pour énoncer et dénoncer un état de fait et agir sur sa transformation1. Deuxièmement, je m’attacherai à une analyse du discours sur le retard en action tel qu’il est effectivement produit et utilisé par les acteurs et les institutions dans le cadre de la politique de la recherche. Je m’appuierai pour cela sur les énoncés du corpus comportant le mot « retard ». La planification de la recherche, qui servira de terrain d’analyse, livre à cet égard un corpus de textes significatifs issus d’une situation de communication concrète déterminée2. Ce corpus, composé des rapports et des plans sur la recherche du Commissariat général du Plan, en plus d’être relativement homogène, permet d’observer le discours sur une période longue (1954-1993), et de suivre ses permanences et ses transformations. Troisièmement, la portée de l’analyse ne réside pas dans une contribution théorique au champ de l’analyse de discours. Mon ambition est plutôt de contribuer, dans la limite du corpus, à la compréhension du discours sur le retard comme élément constitutif de l’histoire de la politique de la recherche au cours du dernier demi-siècle. Aussi récurrent soit-il depuis le xviiie siècle, aussi contenu soit-il dans la gangue idéologique du progrès, le discours sur le retard dans la politique française de la recherche ne joue pas une partition unique et l’interrogation systématique sur l’usage de la notion de progrès, qu’a préconisée Philippe Pignarre3, peut s’appliquer avec la même pertinence à la notion de retard. Le discours sur le retard, comme la notion de progrès, intègre des représentations et des croyances multiples sur la science et sur les rapports science, technologie et société qui interdisent qu’on les traite comme allant de soi. Derrière une enveloppe commune, le discours sur le retard recèle des significations multiples.

    3Dans les trois parties de l’analyse qui suit, j’exposerai d’abord en quoi le discours sur le retard constitue une norme dans la planification de la recherche. Je resituerai celle-ci dans le cadre implicite de la planification mais aussi dans le cadre d’une prescription explicite qui, au-delà du registre discursif, oriente la décision et l’action. Dans une deuxième partie, j’analyserai les objets du discours sur le retard en m’attardant sur deux évolutions au cours du dernier demi-siècle. Jusque dans les années 1980, le discours sur le retard est centré sur les disciplines scientifiques. Dans les années 1980, il est axé sur la technologie, l’innovation et l’industrie. Enfin, le discours sur le retard évolue non seulement par ses objets mais aussi par ses façons de l’établir. Dans un troisième moment, j’insisterai sur la montée en puissance de la comparaison géographique.

    I. La planification de la recherche et le discours sur le retard comme norme pour la réflexion et l’action

    4La planification de la recherche est un cadre institutionnel normatif pour l’usage du discours sur le retard. Comme l’indique la figure 1, le discours sur le retard y a toujours été à l’œuvre au cours du dernier demi-siècle, mais sa présence varie dans le temps : les périodes d’usage relativement peu intense du discours (1954, 1971 et 1985) alternent avec les périodes d’usage relativement concentré (1957, 1962, 1966, 1976, 1981) ou moyennement concentré (1989 et 1993). Cet usage normé du discours sur le retard, lié à un usage de fait, s’inscrit dans le cadre général implicite de la planification de la recherche et résulte aussi parfois d’une prescription explicite.

    Figure 1. Nombre moyen de pages entre deux occurrences du mot « retard » dans les rapports des commissions de la recherche entre 1954 et 1993

    Image 1.png

    Source : Rapports des commissions de la recherche scientifique et technique, 1954, 1957, 1962, 1966, 1971, 1976, 1981, 1985, 1989, 1993. Commissariat général du Plan. Dépouillement manuel, comptage d’occurrences.

    5Rhétorique de l’insuffisance et du changement, le discours sur le retard se déploie dans le grand dessein programmatique de la planification de la recherche. Les commissions de la recherche sont mues par un « éternel optimisme » au sens de Peter Miller et Nicolas Rose4, c’est-à-dire par la croyance que le domaine de la recherche peut toujours être mieux gouverné. Les rapports des commissions de la recherche sont élaborés avec la même aspiration consensuelle à contribuer au développement de la recherche. De plan en plan, les priorités varient mais chaque commission est animée d’une volonté constante de réformer ou d’améliorer la recherche en s’appuyant sur un « état des lieux » de la recherche en France, plus ou moins conçu en termes de retard.

    6L’usage implicitement normé du discours sur le retard peut s’entremêler encore à sa production explicitement prescrite par les responsables de la planification. Initiateur du Commissariat général du Plan et son premier commissaire, Jean Monnet avait inscrit en 1945 le retard comme un produit de la planification en incitant les membres des commissions à s’y intéresser à propos de la productivité :

    « La notion essentielle sur laquelle les Commissions devront guider tout leur travail sera celle de la productivité du travail. Elles devront déterminer celle-ci d’une façon aussi précise que possible et la comparer à la productivité du travail dans la même industrie à l’étranger, de façon à déterminer le retard à rattraper. Quand ce retard apparaîtra important, elles devront en rechercher les causes et proposer les moyens d’y mettre fin : formation technique de la main-d’œuvre, mécanisation, remplacement de l’outillage existant, amélioration de l’organisation, concentration technique et décentralisation géographique, développement des services de recherche5 ».

    7Le domaine de la science et de la technologie est lui-même appelé à évoluer à cette enseigne, comme le rappelle une Note pour messieurs les rapporteurs du Plan scientifique rédigée par la Délégation générale à la recherche scientifique et technique (dgrst) afin de guider les réflexions des rédacteurs du quatrième Plan. Pour chaque domaine scientifique, la dgrst demande notamment de :

    « donner une vue générale de l’aspect des travaux effectués en France par rapport aux études effectuées à l’étranger et situer autant que possible la place qu’occupe le pays dans les recherches en cours », d’« expliquer l’étendue des nouvelles tâches à entreprendre et les objectifs à réaliser », de « justifier les nouvelles implantations et les agrandissements des unités », de « préciser […] la faiblesse des investissements proposés par rapport aux besoins », etc.6

    8Implicitement ou explicitement prescrit dans le cadre de la planification, le discours sur le retard compte enfin comme un repère légitime pour l’action : ce qui est énoncé est aussi à combattre. Contrairement à ce que sous-entend la métaphore de la photographie pour décrire un état des lieux qualitatif ou quantitatif7, l’énonciation de retards est performative. Le discours sur le retard est une constatation en même temps qu’une dénonciation d’un état de fait destinée à engendrer son éradication dans le registre de l’action. Aussi est-ce moins la simple répétition qui caractérise la présence du discours sur le retard dans la durée que son renouvellement.

    II. Les objets du discours sur le retard dans la planification de la recherche

    9Les objets du discours sur le retard dans la planification de la recherche ont évolué au cours du dernier demi-siècle. Je m’attarderai ici sur deux évolutions. Des années 1950 aux années 1980, la référence aux disciplines scientifiques est dominante et disparaît à partir des années 1980. À partir des années 1960 et plus fortement encore dans les années 1980 et 1990, le discours sur le retard se concentre pour partie sur la technologie, l’innovation et l’industrie.

    A. Les disciplines comme objet du retard, une référence dominante jusque dans les années 1980

    10Jusqu’en 1981, année où les planificateurs s’exemptent de la conjoncture scientifique, les réflexions planificatrices ont été élaborées pour partie sur la base de l’état de certaines disciplines scientifiques. Des années 1950 jusqu’au début des années 1980, les rapports des commissions comportent une section qui dresse, discipline par discipline, un état de la situation et qui établit pour les années à venir un ensemble d’objectifs et d’actions.

    Tableau 1. Discours sur le retard et disciplines scientifiques dans les rapports des commissions de la recherche entre 1954 et 1980

    Commission
    1954-1957

    Commission
    1958-1961

    Commission
    1962-1965

    Commission
    1966-1970

    Commission
    1971-1975

    Commission
    1976-1980

    1. Physique

    2. Sciences sociales

    1. Recherche médicale

    2. Sciences sociales

    1. Mathématiques appliquées

    2. Automatique, informatique, électronique

    3. Physique

    4. Biologie

    5. Recherche médicale

    6. Recherche agronomique

    7. Génie civil

    8. Sciences sociales

    9. Océanographie

    1. Océanographie

    2. Biologie

    3. Recherche agronomique

    4. Énergie

    5. Mathématiques

    6. Automatique, informatique, numérique

    7. Instruments scientifiques

    8. Physique

    9. Chimie

    10. Recherche médicale

    11. Génie civil

    12. Sciences sociales

    1. Physique chimie

    2. Sciences de l’éducation

    3. Archéologie

    4. Métrologie

    5. Mécanique

    1. Immunologie

    2. Traitement de l’information et communication

    3. Géophysique énergie

    4. Ingénierie génétique

    5. Neurobiologie

    6. Sciences de l’homme

    11Dans ces conjonctures scientifiques, des retards mentionnés pour eux-mêmes à propos de telle ou telle discipline surviennent. Tout retard d’une discipline établit par rapport à son état le plus avancé pose problème en lui-même. Traditionnellement, dans son exercice mais aussi dans son histoire et dans ses réflexions épistémologiques, le domaine de la science a été et est encore conçu par certains comme un champ plus ou moins autonome, qui procède d’une logique interne de l’avancement continuel. Très souvent, les scientifiques évoluent dans une discipline en aspirant à contribuer à l’évolution ou à l’avancement d’un domaine8, et la référence à un certain « état » d’une discipline scientifique à un moment donné constitue un point fixe dans des recherches appelées à dépasser les précédentes. Hors de l’avancée scientifique, point de salut ! Ainsi, Claude Bernard, par exemple, invitait-il au xixe siècle ses élèves sur la voie de la médecine expérimentale en déployant la rhétorique du retard dans l’idée d’une évolution déterminée, autonome et heureuse de la science qui n’est et ne peut être que dans son état le plus avancé – ou n’est pas :

    « Je ne peux m’adresser qu’aux jeunes, qui n’ont pas de parti pris d’avance. Je leur montre la voie nouvelle et je leur dis : suivez-la, car sans cela vous serez en retard. Le progrès est une roue immense, qui élève ceux qui la poussent et qui écrase ceux qui veulent l’arrêter. Cette médecine expérimentale, dont je vous parle, arrivera malgré vous, malgré moi, malgré tous ceux qui ne veulent pas en entendre parler, parce qu’elle est le résultat nécessaire et fatal de l’évolution même de la science9. »

    12Depuis l’intérieur même du monde scientifique jusque dans l’espace public, l’idée du progrès de la science pour lui-même prend racine dans la représentation traditionnelle d’une science autonome fondée sur l’avancée et le progrès des connaissances, dont le retard constitue l’indissociable revers négatif, et vers laquelle convergent et les intérêts de la science et des scientifiques, et les intérêts de la politique et de la société10. Le retard de la science en lui-même est dénoncé et dénonçable non seulement en tant qu’il contrevient au mouvement naturel de la science vers le progrès mais aussi dans la mesure où ce mouvement est soutenu à la fois par les scientifiques et par la société qui lie pour partie et implicitement les progrès autonomes de la science au progrès de la société tout entière. En somme, l’énonciation et la dénonciation des retards renvoient à la croyance dans une dynamique interne du progrès scientifique profitable à la fois et à la science et à la société.

    13Encore faut-il nuancer cette croyance en portant attention à la variation de l’intensité du discours sur le retard entre 1950 et 1980, et ce en distinguant la période d’avant et d’après 1968. Trois aspects peuvent aider à comprendre l’usage intensif du discours sur le retard dans les années 1960. D’abord, l’euphorie qui imprègne les rapports entre science et économie ou entre science et société fait de l’essor de la science en lui-même un enjeu politique et économique. Le rapport science, technologie et société est conçu tout à la fois comme linéaire, direct et positif. Le progrès technique est en effet considéré comme tributaire des progrès de la science et il découle du constat d’un changement technique de plus en plus rapide, l’idée d’un accroissement des efforts de recherche à la mesure du mouvement accéléré de l’innovation et en soutien à celui-ci. « Condition indispensable du renouvellement [des] techniques », source « d’améliorations techniques constantes », « un des moteurs essentiels [du] développement », la recherche est appréciée dans sa contribution à l’innovation pour laquelle elle apparaît, dans une relation linéaire, comme la source. L’enthousiasme n’est pas moindre pour les effets de la recherche sur la croissance économique : « la recherche scientifique et technique apparaît désormais comme le plus sûr moyen d’expansion et de progrès économique » et « the more you spend in research the better » est non seulement le nouveau credo des économistes américains mais aussi celui des planificateurs français. Les plans qui suivent dès le début des années 1970, sceptiques sur le lien de cause à effet sans aller jusqu’à remettre en cause l’idée d’un niveau nécessaire d’investissement dans la recherche, réapprécient constamment les modalités des relations vertueuses et non linéaires entre science, technologie et société. Autour des années 1990, les planificateurs se veulent détachés de la linéarité des années précédant le choc pétrolier de 1973 et défendent une « approche système » ou « réseaux » des rapports science, technologie et société.

    14Ensuite, le discours sur le retard dérive dans les années 1960 de l’idée d’une « science moderne », plus spécifiquement de la notion d’interdépendance qui l’accompagne. L’interdépendance entre les disciplines scientifiques (l’interdisciplinarité) est, depuis la première moitié du xxe siècle dans l’industrie américaine et de manière plus répandue depuis la seconde guerre mondiale, à la fois un attribut de la modernité scientifique, un objectif à poursuivre au nom de l’efficacité (et de la productivité), et un des motifs de la pensée et de l’action sur les sciences et les techniques11. L’interdépendance est identifiée dans les réflexions planificatrices des années 1950 et 1960 comme une des caractéristiques de la science moderne qui justifie l’idée d’un nécessaire soutien, même minimum, à chacune des disciplines scientifiques supposées agir sur l’ensemble.

    « L’interdépendance des disciplines s’accentue sans cesse, est-il écrit dans le troisième Plan, et tend à effacer les anciennes divisions […] Il en résulte que, s’il peut et doit être fait un choix entre les objectifs à poursuivre, chacun de ceux-ci postule l’existence d’une infrastructure prête suivant les circonstances des moyens de recherche dans tous les domaines scientifiques et techniques, quitte seulement à ce que ces moyens soient différenciés dans leur puissance relative. »

    15Dans le même esprit, on argue pour le quatrième Plan que « l’interaction des différentes branches de [la Science] est, en effet, telle que tout retard, dans l’évolution de l’une d’elles est préjudiciable à l’ensemble des autres12. »

    16Aussi, en vertu des caractéristiques des conditions modernes de la recherche, on affirme que :

    « Tout progrès nouveau accompli dans une direction doit, en effet, pouvoir bénéficier aux autres secteurs : de même tout retard constaté dans une branche doit rapidement être comblé, si l’on ne veut pas tôt ou tard gêner la progression de l’ensemble ».

    17Enfin, le discours sur le retard s’amplifie dans un contexte de libéralisation européenne des échanges (avec la signature du traité de Rome en 1957) et la perspective d’une concurrence ouverte et redoutée avec les États-Unis (avec le sixième cycle de négociations du Gatt (General agreement on tariffs and trade), le Kennedy Round qui se déroule entre 1964 et 1967). Par la perspective de la libéralisation des échanges entre les pays européens qu’il introduit, le traité de Rome, facteur de transformation que le quatrième Plan, de manière générale, entend prendre en compte, conforte la France dans l’optique d’une action soutenue dans le domaine de la recherche, soutien associé à la concurrence tout autant qu’à la coopération scientifique et technique entre les nations. La compétition comme la coopération supposent un équilibre des ressources consacrées à la recherche entre les nations. Les réflexions planificatrices insistent ainsi, au début des années 1960, sur l’écart qui sépare la France (en retard), de la Grande-Bretagne et de l’Allemagne fédérale :

    « Jusqu’à ce jour, les plans successifs ont essentiellement permis à la nation de suivre et de s’adapter au progrès et conserver ainsi sur le plan international une place de choix. Le IVe Plan devrait permettre – la solidité et la qualité de son infrastructure lui ouvrant aujourd’hui cette possibilité – de prendre en divers domaines une position de pointe et de produire, de provoquer ainsi plus intensément par lui-même ce progrès. Les heureuses et considérables incidences économiques que cette position de novateur accorde à un pays ont déjà été fort précisément reconnues par diverses nations industrialisées (la Grande-Bretagne, l’Allemagne fédérale, par exemple) et les moyens qu’elles accordent à la recherche tendent à s’accroître d’année en année suivant un mouvement que la France est loin de suivre ».

    18C’est aussi dans le cadre du Kennedy Round que Gaston Palewski, ministre d’État chargé de la Recherche scientifique et des Questions atomiques et spatiales de 1962 à 1965, adresse en 1963 au Premier ministre Georges Pompidou une note à propos des « conséquences pour la recherche de la négociation tarifaire entre les États-Unis et l’Europe des Six ». Dans le contexte d’ouverture à la concurrence, les actions entreprises par les autres pays et certaines de leurs caractéristiques sont tenues par les planificateurs, implicitement ou explicitement, comme des éléments devant intervenir dans la définition d’une ligne de conduite à l’échelle nationale. Dans la logique d’ouverture à la concurrence, n’agit plus le souvenir d’une grandeur perdue à reconquérir mais le temps présent et une géographie des forces où il s’agit de se situer, autant que possible, à son avantage. « Les décisions qui seront prises en matière de recherche, mentionne le rapport de la commission de la recherche du quatrième Plan, prennent un relief particulier du fait de la volonté exprimée récemment par la France de pratiquer une politique commerciale libérale à l’égard de pays dont le potentiel scientifique et industriel est, pour quelques-uns d’entre eux, supérieur au sien ». L’essor de la recherche se conçoit comme une injonction dictée pour partie par l’ouverture de la compétition économique entre les nations, elle est la « contrepartie obligatoire de toute mesure qui tend à réduire les taux de protection et à ouvrir plus largement le marché national aux producteurs des autres pays », la rançon d’une « vision mondiale où chacun doit, pour survivre, faire un effort à l’échelle de celui des autres ».

    19Les autres, c’est-à-dire principalement l’Amérique, « élément puissant d’entraînement pour les autres nations qui désirent maintenir leur compétitivité et assurer en tout ou partie leur indépendance ».

    B. La montée en puissance de la référence à la technologie, à l’innovation et à l’industrie

    20Centré jusqu’au début des années 1980 sur le développement des disciplines scientifiques, le discours sur le retard dans les réflexions planificatrices prend à partir de cette période une autre inflexion autour d’une préoccupation ancienne et récurrente : celle du développement des relations entre la recherche et l’industrie. Cette thématique monte alors en puissance en même temps qu’elle est en partie renouvelée.

    21La faiblesse des relations entre la recherche et l’industrie est une préoccupation constante des réflexions planificatrices sur la recherche au cours du dernier demi-siècle. Ce problème acquiert dans les années 1960 une attention particulière autour des secteurs industriels dits « de pointe » ou de « haute technicité ». Outre l’augmentation générale des dépenses de recherche, l’analyse de l’expérience américaine au cours des années 1960 est marquée par la découverte d’une industrie constituant un pôle majeur de financement et d’exécution de la recherche, contrairement à la France. Pour les planificateurs, l’enseignement est le suivant : il importe non seulement, à l’image des États-Unis, d’augmenter les dépenses publiques de recherche en général, mais aussi d’orienter celles-ci davantage vers la recherche appliquée et l’industrie.

    « À un moment où, dans les pays les plus avancés tant du point de vue scientifique que technique, l’effort de recherche privé se voit appuyé par des crédits d’État sans cesse plus considérables, il apparaît que notre pays devrait s’engager, sous l’égide et avec l’aide de l’État, dans une coordination plus étroite du public et du privé. Il y a quelques années, on considérait que la recherche appliquée et le développement devaient relever presque exclusivement du domaine de l’industrie et être financés par elle seule. Le soutien financier considérable fourni par le gouvernement américain à ces types de recherche oblige aujourd’hui toute nation industrielle qui veut garder une certaine autonomie technique et valoriser les meilleurs résultats de ses laboratoires à soutenir l’effort de l’industrie par une aide financière publique complémentaire ».

    22Si le financement de la recherche industrielle sur fonds publics s’impose comme un impératif de la politique de la recherche, il apparaît que ce financement est particulièrement crucial dans quelques secteurs dits de « haute technicité ». Les planificateurs constatent avec regret que, contrairement aux pays les plus industrialisés, la France demeure exportatrice de produits faiblement élaborés tandis que la part des biens d’équipement les plus sophistiqués ne cesse d’augmenter sur les marchés internationaux. On évoque alors une « production révélant ses faiblesses devant la haute technicité des produits américains », une « évolution [qui] exprime avec non moins d’évidence le retard que prend notre appareil de production dans les secteurs de fabrication de produits élaborés où l’innovation technique joue un rôle prépondérant ». C’est à la « modicité de l’effort de recherche français » que les planificateurs attribuent ce retard dans les « industries importantes », selon le terme des planificateurs.

    Tableau 2. Discours sur le retard et références à la technologie, à l’innovation et à l’industrie

    Commission
    1954-1957

    Commission
    1958-1961

    Commission
    1962-1965

    Commission
    1966-1970

    Commission
    1971-1975

    Commission
    1976-1980

    Commission
    1981-1985

    Commission
    1985-1989

    Commission
    1989-1992

    Commission
    1993-1998

    1. Techniques de construction et du bâtiment

    –

    –

    1. Secteurs de haute technicité ou de pointe

    2 Recherche appliquée

    1. Innovation

    2. Automatisation industrielle

    –

    1. Technologie

    2. Aides indirectes à la recherche industrielle

    3. Financement de la recherche industrielle

    1. Nombre de chercheurs dans l’industrie

    1. Branches à moyenne technologie

    2. Recherche industrielle

    3. Nombre de chercheurs dans l’industrie

    4. R&D des entreprises

    1. Dirde/pib

    23On retrouve là un des principaux éléments associés au thème du « science gap » entre l’Europe et les États-Unis, développé par Pierre Cognard, chef du service du Plan à la dgrst. À propos de « la puissance de renouvellement des industries de pointe » (électronique, calculatrice, télécommunications spatiales, matériaux nouveaux, moteurs à réaction, industries chimiques fines et biochimiques, matériel de précision et optique de précision, telles qu’énumérées), Pierre Cognard parle du « fait le plus frappant dans l’industrie américaine d’aujourd’hui ». De plus, analyse Pierre Cognard, l’investissement massif et concentré du gouvernement fédéral américain dans les « industries nouvelles ou de pointe » préfigure un clivage entre les activités industrielles traditionnelles fondées sur les matières premières et sur les capitaux et ces industries nouvelles fondées sur la science et l’innovation. « Seule, sans doute, conclut alors Pierre Cognard, une puissance industrielle fortement concentrée, appuyée sur un potentiel scientifique non moins tonique, pourra mener le jeu ou le soutenir ». Engagés dans des « batailles pour l’innovation », les pays « pionniers » seront ceux qui s’appuieront sur « une utilisation systématique des progrès de la science dans l’industrie » de même que sur une industrie dont l’ampleur d’échelle et de moyens permettra « des débouchés et des perspectives d’application insoupçonnés ». Les « grands programmes technologiques » civils et militaires et plusieurs actions concertées lancés durant cette période découlent de cette analyse.

    24Les relations sciences et industries restent une préoccupation majeure dans les décennies suivantes mais les planificateurs envisagent celles-ci d’un autre œil. La politique volontariste des grands programmes technologiques est critiquée pour accaparer une part trop importante des dépenses publiques sur la base d’un engagement pluriannuel peu flexible, pour favoriser la concentration, pour ne pas engendrer les retombées attendues sur l’ensemble de l’économie et pour rester trop éloignée du marché. Or, analysent les planificateurs en 1971, « plusieurs secteurs importants de l’industrie française accusent des retards dans le domaine de l’innovation ». Sans tourner le dos aux secteurs de pointe et aux grands programmes qui seront prolongés dans les « programmes de développement technologiques » et les nationalisations des années 1980, les planificateurs stigmatisent dorénavant la concentration et prônent le développement de l’innovation dans les secteurs dits de base (chimie, métallurgie, mécanique, textile…) par des aides directes et surtout indirectes de l’État. Ce type d’analyse perdure tout en connaissant quelques évolutions au cours des années 1980 et 1990 où la « recherche industrielle » reste une priorité pour les planificateurs. Le rapport du comité recherche du VIIIe Plan (1981-1985) identifie comme une des « composantes du retard français » la faiblesse relative du ratio « financement de la recherche industrielle/pib » où « les chiffres montrent un net retard de la France ». L’inégalité du financement de la recherche est révélée non seulement selon les types de secteurs mais aussi selon les types d’entreprises. Les déséquilibres identifiés entre les secteurs de pointe et traditionnels ou entre les « branches à haute technologie », les « branches à moyenne technologie » et les « branches à faible technologie » selon une terminologie du début des années 1990 sont associés à des analyses favorables à la déconcentration et à une politique recentrée sur les branches à moyenne et à faible technologie. De plus, après la grande entreprise ou le « champion national » qui constituait une des pièces maîtresses du discours de la politique de la recherche et de l’innovation des années 1960, la petite et moyenne entreprise (pme) innovante devient au cours des années 1980 un nouveau foyer d’attention… à nouveau à travers la référence aux études américaines :

    « Les petites entreprises innovatrices rencontrent en France de grandes difficultés à naître et à se développer, au point que certaines préfèrent s’installer outre-Atlantique, analysent les planificateurs en 1981. Elles trouvent aux États-Unis un environnement plus favorable, que les analyses de la National Science Foundation expliquent bien : une étude des innovations majeures survenues entre 1953 et 1973 montre que plus de la moitié d’entre elles ont été réalisées dans des petites entreprises, avec une productivité, par rapport aux moyens financiers et en personnel employés, bien supérieure à celle observée dans les entreprises moyennes ou grandes ».

    25La montée en puissance de la référence à la technologie, à l’innovation et à l’industrie n’incombe pas seulement à la fin de la conjoncture scientifique. Autour du soutien à la recherche pour elle-même, il n’y a pas de remise en cause ou de problématisation mais bien le consensus. À côté de cette idée consensuelle et peu problématisée, les réflexions planificatrices accordent de plus en plus d’attention à la question des relations entre la recherche et l’industrie, et en repensent les rapports non plus en termes linéaires mais en termes « systémiques » ou de dynamiques de « réseaux ».

    III. Retard et comparaison géographique

    26Le discours sur le retard implique non seulement des objets mais aussi des manières ou des façons de le définir. Or, tout comme les objets du discours évoluent, ce par rapport à quoi les retards sont établis varie au cours du dernier demi-siècle (état idéal d’une science, état d’une autre discipline scientifique, objectif…). Il existe plus particulièrement une série d’énoncés sur le retard fondés sur la comparaison géographique, où le retard est défini comme un écart négatif d’une science ou d’un aspect d’une science dans le cadre de la comparaison géographique (pays, régions, villes, etc.). L’importance de la comparaison géographique aujourd’hui est évidente si l’on considère avec quelle spontanéité elle est associée au retard dans les esprits. Elle a connu un véritable essor au cours du dernier demi-siècle dans la politique de la science.

    27Bien que la référence étrangère intervienne depuis longtemps dans les débats, notamment dans les débats sur l’université tels que les a analysés Christophe Charle13, une des caractéristiques du dernier demi-siècle est la montée en puissance du retard géographique. On l’a souligné, Jean Monnet a inscrit dès 1945 le retard géo-comparatiste comme une source et un produit de la planification. L’intérêt des premiers planificateurs pour la comparaison géographique est cependant assez peu perceptible lorsqu’on observe les usages effectifs du « retard » dans les premiers rapports des commissions de la recherche. C’est en fait au cours des années 1960, en plein essor de la pratique de la comparaison internationale, dans le champ politique et dans le champ des sciences sociales aussi14, que le retard devient une notion de plus en plus étroitement liée à la comparaison géographique, comme l’illustre la figure 2, au point d’y être exclusivement associé depuis les années 1980 dans notre corpus.

    28L’analyse des énoncés dans les rapports des commissions au cours du dernier demi-siècle révèle tant la géopolitique qui à un moment donné infléchit la comparaison que les changements dans le dispositif, dans l’outillage ou dans la « technologie intellectuelle », pour reprendre le terme de Jack Goody15, contribuant à la transformation et à la diffusion du retard géo-comparatiste. Au cours des années 1950, la référence aux autres pays dans les énoncés sur le retard est strictement qualitative et répartie dans trois énoncés entre la référence aux États-Unis, aux pays anglo-saxons et à l’Urss. La décennie suivante est marquée par l’essor de la comparaison géographique au sens où les références aux pays eux-mêmes dans les énoncés sur le retard sont à la fois plus nombreuses dans un même énoncé, plus diversifiées et surtout dominées par les États-Unis. Les États-Unis représentent le tiers des occurrences ; le trio États-Unis, Grande-Bretagne, et pays anglo-saxons compte pour près de la moitié des occurrences (48 %). Le pôle européen (pays scandinaves, Suisse, Pays-Bas, pays européens et pays européens les plus avancés, Belgique, Allemagne) totalise environ 36 % des mentions. Enfin, le pôle des pays de l’Est (urss, pays de l’Est, Pologne, Tchécoslovaquie) compte 15 % des mentions. La géo-comparaison dans les réflexions planificatrices renvoie aux grandes représentations géopolitiques du moment, analysées dans un autre domaine par Luc Boltanski et Ève Chiapello16 : d’une part, un monde libre et capitaliste, incarné par les États-Unis d’une façon largement prépondérante et par les pays d’Europe occidentale ; d’autre part, le bloc de pays communistes. La prépondérance de la référence aux États-Unis témoigne non seulement de la domination objective et indéniable de la puissance scientifique américaine, mais aussi d’un changement, à une échelle très générale, des relations dans un monde bipolaire. Au cours des années 1960, comme l’a analysé Robert Gilpin17, la France et les pays d’Europe occidentale changent de discours en effet : l’exemple soviétique (discours d’avant-guerre) ou la menace militaire soviétique (discours d’après-guerre) ne sont plus en ligne de mire (comme l’illustre d’ailleurs l’usage relativement faible de la référence à l’Union soviétique dans les années 1960) ; dorénavant, la recherche française est évaluée et pensée, en grande partie, à l’aune de l’exemple et de la menace économique de l’Amérique. De fait, si dans la pratique de la comparaison avec les pays étrangers, la référence aux États-Unis apparaît comme une constante des réflexions planificatrices, dans le passage des années 1950 aux années 1960, celle-ci change de signification. Dans les années 1950, l’évocation de l’Amérique est diluée dans un géo-comparatisme bon teint. En général, elle est le fait de scientifiques et d’industriels qui ont une connaissance de terrain et qui ont incorporé celle-ci de manière plus ou moins explicite dans leurs réflexions. Au cours des années 1960, avec l’ouverture de la concurrence économique, la référence aux États-Unis est non seulement manifestement plus importante mais elle change de valeur. Une dialectique de l’exemple, du modèle et de la menace se met en effet en place, qui épouse les contours d’un discours économique sur la recherche qu’incarnent les travaux du service du Plan à la dgrst18.

    Figure 2. Retard et comparaison géographique entre 1954 et 1993 (pourcentage des énoncés ayant recours à la comparaison géographique)

    Image 2.png

    Source : Rapports des commissions sur la recherche scientifique et technique, 1954, 1957, 1962, 1966, 1971, 1976, 1981, 1985, 1989, 1993. Secrétariat général du Plan. Comptage d’occurrences.

    29Vécue à l’aune du « Défi américain » d’une époque, la comparaison géographique est en même temps promue par les administrateurs et les planificateurs comme un outil de saine planification dans une économie ouverte. Pour Pierre Massé, commissaire au Plan de 1959 à 1966 et responsable de l’élaboration des quatrième et cinquième Plans, la comparaison géographique, et plus particulièrement l’observation des écarts par rapport aux autres pays étrangers, doit être un élément constitutif de la planification dans le cadre d’une économie ouverte. Deux types d’arguments sont évoqués par Pierre Massé lui-même. Premièrement, dans la réflexion intellectuelle sur la prospective et sur la décision publique éclairée – centrale chez ce commissaire au Plan –,
    l’Autre est considéré comme une des sources d’aléas de l’économie d’une nation et doit à ce titre être pris en considération dans la préparation de l’avenir. Deuxièmement, dans la perspective politique de la construction économique européenne, l’analyse des écarts par rapport aux autres pays rejoint la volonté d’harmonisation ou de convergence des politiques économiques.

    « […] Dans une économie ouverte sur le monde comme est désormais la nôtre, écrit Pierre Massé, l’étranger constitue symboliquement un centre de décision de plus en plus important. Il y a là une source d’aléas au moins égale aux précédentes. En particulier, il est difficile de penser qu’une véritable communauté économique européenne puisse se créer et s’affermir s’il n’y a pas un rapprochement des conceptions des différents partenaires sur les instruments de la politique économique à moyen terme19. »

    30La comparaison géographique ou plus précisément une de ses modalités, le benchmarking, aujourd’hui un des dispositifs de management des politiques publiques en vogue dans l’Europe de l’enseignement supérieur et de la recherche20, est plus encore que dans l’après-guerre encouragée tout à la fois en tant qu’instrument nécessaire de la planification et en tant que philosophie de « réaction » pour l’action.

    « Dans ces circonstances, a écrit encore Pierre Massé, le Plan ne peut plus se contenter de dessiner à l’avance une ligne d’avenir considérée comme ne varietur. Il doit comporter des moyens d’observation des écarts. Si ceux-ci sont importants et défavorables, et s’ils ne se compensent pas dans l’ensemble, le programme initial doit être complété par une stratégie de réaction à l’événement, qui “accepte les faits, mais non les fatalités21”. »

    31L’essor de la comparaison géographique et sa pérennité s’appuient en outre sur la mise en place dans les années 1960 d’un dispositif de surveillance dont le nerf réside dans la production de statistiques sur la science et la technologie. Les rapports des commissions du Plan, progressivement au cours du dernier demi-siècle et comme la plupart des documents ayant trait à la politique nationale de la science et de la technologie ainsi que l’a analysé Benoît Godin22, vont comporter une image souvent quantitative du contexte international ou des principaux compétiteurs. La production et l’utilisation de statistiques sur la science et la technologie se sont systématisées dans la plupart des pays industrialisés à partir des années 1960 sous l’impulsion de l’Organisation de coopération et de développement économiques (ocde) qui promeut un instrument permettant tout à la fois de conduire des enquêtes économiques sur la science et la technologie, d’informer la décision politique et de comparer les politiques nationales23. On voit dans les énoncés eux-mêmes comment la statistique participe à la montée en puissance du régime de la comparaison géographique et à son inflexion économique. Le chiffre, dans le discours sur le retard, ne vient pas seul en effet et il est souvent associé à un pays, mariage répété plus ou moins plusieurs fois dans un énoncé. Cette démultiplication de la référence géographique, indissociable de la démultiplication des nombres, imprègne de références économiques le discours sur le retard. Les chiffres correspondent aussi à des conventions ou des indicateurs économiques (« moyens », « dépenses », « dird/pib », « dirde/pib », « personnel de recherche pour 1 000 habitants », etc.).

    32À partir des années 1980, avec l’abandon de la conjoncture scientifique, la comparaison géographique, quasi systématiquement liée au nombre et au discours économique sur la science et la technologie, domine les réflexions planificatrices. Le discours sur le retard chemine alors au gré de paysages statistiques économiques, devenus routiniers, peuplés de tableaux et de graphiques qui situent l’état de la France par rapport à un ensemble de pays. Une nouvelle géopolitique de la comparaison distingue les années 1980-1990 des années 1960. L’Union soviétique et les pays de l’Est sont absents du décor et ont laissé place à la triade États-Unis/Japon/Europe qui constituent les trois grands pôles de la concurrence internationale depuis la montée en puissance du Japon au cours des années 1970 et la mise en place progressive d’une politique de la recherche à l’échelle européenne depuis les années 1980. Le discours sur le retard de la France se déploie alors principalement à travers la comparaison avec les États-Unis, le Japon et l’Allemagne (République fédérale d’Allemagne) qui, comme le Japon, a augmenté sa position relative dans les classements de l’Ocde au cours des années 1970 pour se placer devant la France.

    33Le progrès chez les planificateurs est ainsi passé peu à peu au cours du dernier demi-siècle d’une quête de l’avancée des connaissances à une quête de la compétitivité, de la productivité, de l’efficacité et de la performance de la recherche.

    Notes de bas de page

    1 J. Bouchard, Comment le retard vient aux Français. Analyse d’un discours sur la recherche, l’innovation et la compétitivité (1940-1970), Presses Universitaires du Septentrion, Villeneuve d’Ascq, 2008 et « L’invention du retard comme rhétorique de l’insuffisance et du changement », Mots. Les langages du politique, nº 80, mars, 2006, p. 93-104.

    2 A. Prost, « Les mots », in René Rémond (dir.), Pour une histoire politique, Paris, Seuil, 1988, p. 255-287.

    3 P. Pignarre, Comment sauver vraiment la Sécu, Paris, La Découverte, 2004, 130 p.

    4 P. Miller & N. Rose, « Governing economic life », Economy and Society, vol. XIX, nº 1, février 1990, p. 1-28.

    5 P. Mioche, Le plan Monnet. Genèse et élaboration. 1941-1947, Paris, Publications de la Sorbonne, 1987, 323 p.

    6 dgrst, Note pour messieurs les rapporteurs du Plan scientifique, 77 321 article 637 (archives du service inventaire et statistiques), non datée, non paginée.

    7 E. Didier, En quoi consiste l’Amérique ? Les statistiques, le New Deal et la démocratie, Paris, La Découverte, 2009.

    8 J.-M. Berthelot, O. Martin & C. Collinet, Savoirs et savants, les études sur la science en France, Paris, PUF, 2005.

    9 C. Bernard, Principes de médecine expérimentale, Paris, PUF, 1987 (1865).

    10 J.-J. Salomon, Science et politique, Paris, Seuil, 1970, p. 401. P. et H. Nowotny, « The Changing Nature of Public Science », in H. Nowotny, D. Pestre et al., The Public Nature of Science Under Assault, Politics, Markets, Science and the Law, Berlin, Springer, 2005, p. 1-27.

    11 D. Pestre, « L’évolution des champs de savoir, interdisciplinarité et noyaux durs », Natures sciences société, vol. XII, 2004, p. 191-196.

    12 S. a. (probablement P. Cognard), « La recherche scientifique et technique dans le cadre du ive Plan d’équipement et de modernisation (1962-1965) », Le progrès scientifique, nº 8, 1er juillet 1961, p. 1./p. 3.

    13 C. Charle, « Les références étrangères des universitaires. Essai de comparaison entre la France et l’Allemagne, 1870-1970 », Actes de la recherche en sciences sociales, nº 148, juin 2003, p. 8-19.

    14 M. Lallement & J. Spurk (dir.), Stratégies de la comparaison internationale. Paris, cnrs Éditions, 2003.

    15 J. Goody, La raison graphique, la domestication de la pensée sauvage. Paris, Éditions de Minuit, 1979 (1977).

    16 L. Boltanski & È. Chiapello, Le nouvel esprit du capitalisme. Paris, Gallimard, 1999.

    17 R. Gilpin, La science et l’État en France. Paris, Gallimard, 1970 (trad. France in the Age of the Scientific State, Princeton, Princeton University Press, 1968).

    18 Voir P. Cognard, « Le service du Plan à la dgrst », in A. Chatriot et V. Duclert (dir.), Le gouvernement de la recherche, Paris, La Découverte, 2006, p. 269-274.

    19 P. Massé, Le Plan ou l’anti-hasard, Paris, Hermann, 1991 (1965), p. 67.

    20 I. Bruno, À vos marques, prêts,… cherchez. La stratégie européenne de Lisbonne. Vers un marché de la recherche, Bellecombes-en-Bauges, Éditions du Croquant, 2008, 267 p.

    21 Ibid.

    22 B. Godin, Technological Gaps. Quantitative Evidence and Qualitative Arguments, Project on the History and Sociology of Science and Technology Statistics, Working Papers, nº 23, Montréal, 2003. Paru dans Technology in Society, nº 24, 2002, p. 387‑413. Disponible sur http://www.csiic.ca/PDF/Godin_23.pdf.

    23 B. Godin, The Measurement and Statistics on Science and Technology. 1920 to the Present, Londres & New York, Routledge, 2005.

    Auteur

    Julie Bouchard

    Maître de conférences de sciences de l’information et de la communication à l’Université Paris XIII, elle est aussi chercheur au Laboratoire des sciences de l’information et de la communication (LabSic) de cette université.
    Après avoir consacré sa thèse et ses recherches à l’analyse des discours sur le retard dans les politiques de la science et de la technologie, elle poursuit son analyse des discours et des représentations sur les sciences et les technologies (histoire de la communication dans les organismes de recherche, médiatisation des classements sur la recherche et l’enseignement supérieur…). Elle est collaboratrice au magazine La recherche et membre du comité de rédaction de la revue Futuribles. Ses publications récentes : « La fabrique d’un classement médiatique de l’enseignement supérieur et de la recherche », Quaderni, nº 77, L’évaluation de la recherche : pour une réouverture des controverses, Séverine Louvel (dir.), 2012 ; « Universités et organismes publics de recherche. Quelles interactions aujourd’hui et demain ? » avec François Bourse et Catherine Raffour, in Jacques Lesourne et Denis Randet (dir.), La recherche et l’innovation en France, Paris, Odile Jacob, 2009, p. 125-173 ; « La communication, le nombre, et le néolibéralisme », Revue Mei, nº 28, 2008, p. 23-35 ; Comment le retard vient aux Français. Analyse d’un discours sur la recherche, l’innovation et la compétitivité. 1940-1970, Lille, Presses universitaires du Septentrion, 2008 ; « Le discours sur le retard dans la politique de la science et de la technologie », Futuribles, nº 335, novembre, 2007, p. 49-72 ; « Analyse de la controverse médiatique sur le déclin économique de la France », Hermès, nº 44, juin, 2006, p. 115-120 ; « L’invention du retard comme rhétorique de l’insuffisance et du changement », Mots. Les langages du politique, nº 80, mars 2006, p. 93-104.

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    1 J. Bouchard, Comment le retard vient aux Français. Analyse d’un discours sur la recherche, l’innovation et la compétitivité (1940-1970), Presses Universitaires du Septentrion, Villeneuve d’Ascq, 2008 et « L’invention du retard comme rhétorique de l’insuffisance et du changement », Mots. Les langages du politique, nº 80, mars, 2006, p. 93-104.

    2 A. Prost, « Les mots », in René Rémond (dir.), Pour une histoire politique, Paris, Seuil, 1988, p. 255-287.

    3 P. Pignarre, Comment sauver vraiment la Sécu, Paris, La Découverte, 2004, 130 p.

    4 P. Miller & N. Rose, « Governing economic life », Economy and Society, vol. XIX, nº 1, février 1990, p. 1-28.

    5 P. Mioche, Le plan Monnet. Genèse et élaboration. 1941-1947, Paris, Publications de la Sorbonne, 1987, 323 p.

    6 dgrst, Note pour messieurs les rapporteurs du Plan scientifique, 77 321 article 637 (archives du service inventaire et statistiques), non datée, non paginée.

    7 E. Didier, En quoi consiste l’Amérique ? Les statistiques, le New Deal et la démocratie, Paris, La Découverte, 2009.

    8 J.-M. Berthelot, O. Martin & C. Collinet, Savoirs et savants, les études sur la science en France, Paris, PUF, 2005.

    9 C. Bernard, Principes de médecine expérimentale, Paris, PUF, 1987 (1865).

    10 J.-J. Salomon, Science et politique, Paris, Seuil, 1970, p. 401. P. et H. Nowotny, « The Changing Nature of Public Science », in H. Nowotny, D. Pestre et al., The Public Nature of Science Under Assault, Politics, Markets, Science and the Law, Berlin, Springer, 2005, p. 1-27.

    11 D. Pestre, « L’évolution des champs de savoir, interdisciplinarité et noyaux durs », Natures sciences société, vol. XII, 2004, p. 191-196.

    12 S. a. (probablement P. Cognard), « La recherche scientifique et technique dans le cadre du ive Plan d’équipement et de modernisation (1962-1965) », Le progrès scientifique, nº 8, 1er juillet 1961, p. 1./p. 3.

    13 C. Charle, « Les références étrangères des universitaires. Essai de comparaison entre la France et l’Allemagne, 1870-1970 », Actes de la recherche en sciences sociales, nº 148, juin 2003, p. 8-19.

    14 M. Lallement & J. Spurk (dir.), Stratégies de la comparaison internationale. Paris, cnrs Éditions, 2003.

    15 J. Goody, La raison graphique, la domestication de la pensée sauvage. Paris, Éditions de Minuit, 1979 (1977).

    16 L. Boltanski & È. Chiapello, Le nouvel esprit du capitalisme. Paris, Gallimard, 1999.

    17 R. Gilpin, La science et l’État en France. Paris, Gallimard, 1970 (trad. France in the Age of the Scientific State, Princeton, Princeton University Press, 1968).

    18 Voir P. Cognard, « Le service du Plan à la dgrst », in A. Chatriot et V. Duclert (dir.), Le gouvernement de la recherche, Paris, La Découverte, 2006, p. 269-274.

    19 P. Massé, Le Plan ou l’anti-hasard, Paris, Hermann, 1991 (1965), p. 67.

    20 I. Bruno, À vos marques, prêts,… cherchez. La stratégie européenne de Lisbonne. Vers un marché de la recherche, Bellecombes-en-Bauges, Éditions du Croquant, 2008, 267 p.

    21 Ibid.

    22 B. Godin, Technological Gaps. Quantitative Evidence and Qualitative Arguments, Project on the History and Sociology of Science and Technology Statistics, Working Papers, nº 23, Montréal, 2003. Paru dans Technology in Society, nº 24, 2002, p. 387‑413. Disponible sur http://www.csiic.ca/PDF/Godin_23.pdf.

    23 B. Godin, The Measurement and Statistics on Science and Technology. 1920 to the Present, Londres & New York, Routledge, 2005.

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    Ce livre est cité par

    • Pestre, Dominique. (2014) Le gouvernement des technosciences. DOI: 10.3917/dec.pest.2014.01.0285
    • Seiffert, Marc-Daniel. (2013) Entreprises aéronautiques mondialisées et États souverains. Entreprises et histoire, 73. DOI: 10.3917/eh.073.0007
    • Sánchez Sánchez, Esther M.. (2022) The training in France of Spanish nuclear personnel, c. 1950s–1990s. History and Technology, 38. DOI: 10.1080/07341512.2022.2076402

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    Bouchard, Julie. « État, planification, recherche et discours sur le retard ». In Entreprises de haute technologie, État et souveraineté depuis 1945, édité par Patrick Fridenson et Pascal Griset. Vincennes: Institut de la gestion publique et du développement économique, 2013. https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/books.igpde.1880.
    Bouchard, Julie. « État, planification, recherche et discours sur le retard ». Entreprises de haute technologie, État et souveraineté depuis 1945, édité par Patrick Fridenson et Pascal Griset, Institut de la gestion publique et du développement économique, 2013, https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/books.igpde.1880.

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    Fridenson, Patrick, et Pascal Griset, éd. Entreprises de haute technologie, État et souveraineté depuis 1945. Vincennes: Institut de la gestion publique et du développement économique, Comité pour l’histoire économique et financière de la France, 2013. https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/books.igpde.1595.
    Fridenson, Patrick, et Pascal Griset, éditeurs. Entreprises de haute technologie, État et souveraineté depuis 1945. Institut de la gestion publique et du développement économique, Comité pour l’histoire économique et financière de la France, 2013, https://0-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.4000/books.igpde.1595.
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