La Turquie et le Plan Marshall
p. 565-575
Texte intégral
1C’est sans doute les conditions particulières de l’accès de la Turquie au plan Marshall qui expliquent les inquiétudes et les plaintes répétées du gouvernement turc devant la part modeste qu’il leur sera allouée ; Ankara considère cette situation comme une injustice par rapport aux sommes accordées et à l’aide fournie, dans ce même cadre, aux pays de l’Europe occidentale.
2Les Américains ne manquent pas de faire remarquer que cette aide est destinée au relèvement économique des pays européens dévastés ou épuisés par le conflit mondial, dans lequel la Turquie ne fut pas partie prenante. Pourtant, dans le cadre de la naissance de la guerre froide, et à la suite du désistement de la Grande-Bretagne en faveur des Américains pour la protection de la Grèce et de la Turquie1, ce dernier pays reçoit, dès l’été 1947, 100 millions de dollars au titre de l’aide militaire décidée par le président Truman2. Les Turcs étant reconnus comme les défenseurs de la cause de la liberté et de la démocratie, de la sécurité américaine même, la classe politique et la presse d’Ankara, qui nourrissaient quelques appréhensions à l’approche de la Conférence de Moscou3 se laissent aller à l’euphorie et sont bien décidés à saisir l’opportunité qui semble s’offrir de bénéficier, dans les meilleures conditions, de tout type d’aide américaine, et notamment du plan Marshall. En réalité, Ankara devra batailler pour se faire une petite place dans le dispositif d’aide économique et financière américaine à l’Europe d’après-guerre.
I. Les étapes
3Sur le plan de l’aide économique, le plan Marshall n’arrive pas, pour la Turquie dans terre en friche. Dès la fin de 1945, l’Import-Export Bank avait accordé à la Turquie un prêt de 3 millions de dollars pour la construction d’aérodromes, et en juillet 1946, elle avait dégagé 25 millions de dollars au crédit de la Turquie notamment pour l’achat de locomotives et d’équipements portuaires3 ; cette même banque accordait enfin, en novembre 1947, 8 millions de dollars de crédit pour l’armement de navires de commerce4. Si l’on ajoute deux autres prêts de l’Office de Liquidation et de la Commission Maritime américains5, c’est près de 50 millions de dollars qui avaient été ainsi prêtés, au moment où se met en place l’aide Marshall. Cette préoccupation turque dans la quête de crédits américains s’accompagne de réflexions sur la manière de les obtenir et, à cet égard, Ankara observe particulièrement ce qui se passe à Paris : « Ce qui intéressait les Turcs, ce n’était pas l’emploi que nous faisions de nos crédits américains, écrit l’ambassadeur de France, c’était le procédé par lequel nous les avions obtenus. Ils voyaient dans le Plan Monnet une formule d’une efficacité éprouvée pour ouvrir la porte de la caverne aux trésors ; ils s’étaient mis au travail pour se l’approprier à leur tour6. »
4On ne peut pas dire que les efforts turcs furent immédiatement pris en compte par Washington. Le 15 janvier 1948, Ankara prenait connaissance, avec le plus grand déplaisir, du rapport présenté au Congrès par le Département d’État sur les besoins des divers pays européens : à la Turquie était réservé le rôle de fournisseur de produits alimentaires, les États-Unis lui accordant simplement une priorité pour la fourniture de machines agricoles et de moyens de transport, à condition qu’elle en paie la facture. L’émotion est telle, chez les dirigeants et dans la presse, que le président Inönü reçoit le 16 janvier, à 22 heures, l’ambassadeur Wilson pour lui faire part de sa « profonde déception » de voir ainsi la Turquie écartée en fait de l’aide Marshall, alors que la Grèce est appelée à en bénéficier largement7.
5Dans un but d’apaisement, l’Administration américaine accorde, pour avril-juillet 1948, un crédit de 10 millions de dollars, invite la Turquie à sièger au comité exécutif de l’OECE à partir d’avril 19488 ; tout en attendant de plus substantielles décisions et « après avoir examiné chaque mot à la loupe pour s’assurer qu’il ne s’y cachait aucune survivance de l’esprit capitulaire9 », les Turcs signent avec les Américains, le 4 juillet 1948, l’« accord bilatéral de coopération économique », prélude au plan Marshall10. Les 10 millions de dollars, inutilisés immédiatement, sont intégrés aux crédits Marshall de 49 millions de dollars alloués à la Turquie pour l’année fiscale juillet 1948-juin 1949. Encore faut-il noter qu’il s’agit, non point d’un don, mais d’un prêt. C’est que la partie n’est pas pour autant gagnée par les Turcs. En effet, l’Administration américaine développe une argumentation en trois points qu’on peut ainsi résumer : la Turquie n’a pas besoin de dons, car elle s’est enrichie pendant la guerre, à la fin de laquelle elle s’est trouvée avec un stock d’or de plus de 200 millions de dollars ; les besoins de la Turquie ne sont pas évalués de manière assez précise et circonstanciée ; la Turquie bénéficie de sommes importantes au titre de l’aide militaire11.
6Le gouvernement turc va s’efforcer de répondre aux arguments américains. Dans le tableau de la situation financière de la Turquie qu’il brosse, en janvier 1948, le ministre des Finances, Halit Namzi Kesmir indique qu’en 1946 la Turquie disposait d’une réserve d’or évaluée à 241.276.000 de dollars et d’une réserve de devises convertibles de 10.517.000 dollars ; les disponibilités actuelles de la Turquie sont de 145.823.000 dollars en or et devises fortes, soit une chute de 42 %. Après avoir précisé les obligations de la Turquie, le ministre estime que son pays « n’a pas les moyens de payer en dollars les fournitures qui lui seront attribuées pour les quinze prochains mois12 ». Situation d’autant plus critique que la réapparition, en 1947, d’une balance commerciale déficitaire, risque bien, selon les experts, de se perpétuer13. Et en effet, ce persistant déficit commercial, qui va à l’encontre même des objectifs du plan Marshall, devra bien être pris en compte par Washington, et le directeur général au Trésor a raison de dire que « c’est une nécessité inéluctable pour l’Amérique d’aider la Turquie14 ». Mais ce n’est que l’année suivante que l’allocation Marshall comportera, pour la première fois, un pourcentage important de dons.
7Au deuxième argument, la Turquie répond par un sérieux effort de clarification. Reprenant la nomenclature même du plan Marshall, les responsables turcs ont fait savoir, dès le début de 1948, que la Turquie ne désire ni de biens de consommation, ni de biens d’équipement (qu’elle estime pouvoir se procurer sur ses propres ressources ou par l’intermédiaire d’un emprunt auprès de la BIRD), mais de biens intermédiaires, comme des machines agricoles, des moyens de communication et de l’outillage en général14. Des projets beaucoup plus détaillés sont élaborés sous le contrôle de Nurullah Esat Sümer, ministre d’État chargé du plan Marshall, et en étroite collaboration de Henry Wiens, adjoint du président du plan Marshall pour la Turquie, Russell Dorr. Ces projets chiffrés, acceptés par Washington au printemps 1949, ont trait à la mécanisation de l’agriculture, à la modernisation des centres miniers et au développement du réseau routier15.
8Le ministre turc ne se montre pas pour autant pleinement satisfait : non seulement il estime les crédits américains insuffisants, mais il prône, comme son parti, la thèse de la priorité des crédits à accorder à l’industrie, contre la thèse américaine de la priorité à l’agriculture et aux routes. Finalement R. Dorr obtient le départ de N. Sümer, qui démissionne au mois de juin 1949 et est remplacé par le ministre du Commerce Cernai Barlas ; celui-ci restera à la gestion de l’aide Marshall jusqu’aux élections générales de mai 1950.
9Nul doute que l’adoption du multipartisme et la victoire des Démocrates aux élections de mai 1950 ne renforcent les bonnes dispositions des Américains envers les Turcs. Du reste, R. Dorr ne cache pas sa satisfaction : « Le président de la République Ismet Inönü, le président du Conseil Semseddin Günaltay et son adjoint Nihat Erim, qui ont témoigné d’une grande impartialité en appliquant la loi électorale, ont acquis des droits au respect du monde démocratique pour la façon dont ils ont dirigé la Turquie dans la voie démocratique16 ». Il continuera à collaborer comme par la passé pour le plan Marshall, d’autant qu’il connaît Celai Bayar « homme capable et franc16 ».
10C’est une des raisons pour lesquelles la baisse progressive des sommes globales allouées au titre du plan Marshall a moins touché la Turquie, en 1950-51, qu’on ne le craignait à Ankara. Cela n’empêche pas certaines divergences entre le gouvernement démocrate et la mission américaine dans la répartition de certains matériels. Ainsi, en mars 1951, R. Dorr parvenait à signer un accord sur une répartition, jugée équitable, de tracteurs américains livrés à la Turquie, avec Nihat Egriboz, ministre de l’Agriculture. En réalité, cet arrangement visait à diminuer la quote-part trop avantageuse prévue précédemment pour les riches producteurs de coton des régions d’Adana et d’Izmir. Or, ces grands propriétaires sont précisément les principaux soutiens d’Adnan Menderes et de son équipe. Estimant que N. Egriboz avait indûment donné son aval à ce qu’il jugeait être une immixtion injustifiée de la mission américaine dans les affaires intérieures turques, le chef du gouvernement exigea la démission de son ministre. R. Dorr fit le gros dos17. De plus, le ministère d’État chargé du plan Marshall fut supprimé et ses attributions transférées au ministère des Affaires étrangères18.
11Le troisième argument nous ramène à une des constantes de la politique extérieure d’Ankara vis-à-vis des États-Unis jusqu’en 1989-90 : la Turquie est la plus directement exposée au danger soviétique, et à ce titre, elle doit bénéficier d’une aide particulière. Obéissant visiblement à un mot d’ordre, la presse turque développe la thèse selon laquelle « on ne peut maintenir une armée sur pied de guerre sans l’appuyer sur une économie saine19 ». Sans doute les Américains fournissent-ils une aide militaire importante, mais à quoi pourront bien servir les 500.000 tonnes de matériel de guerre fourni, sans une réelle amélioration de l’environnement économique, et notamment des communications20 ? D’un autre côté, l’aide militaire ne peut être utilisée à son plein rendement que par l’imposition de charges sur les ressources économiques et en main d’œuvre du pays. Le président Truman ne reconnaît-il pas, en mars 1949, dans son rapport au Congrès, que l’armée turque dans son entraînement « a fait des progrès marqués21 ». Les États-Unis doivent en tirer les conséquences pour leur aide économique à la Turquie.
12Tout compte fait, comment apprécier l’aide obtenue par la Turquie dans le cadre du plan Marshall (voir tableaux 1 et 2) ? Si l’on en juge d’après les conditions de départ, on constate qu’un relatif rattrapage a été tenté dans les trois dernières années du plan, mais dans un période où les chiffres absolus de l’aide étaient en grande diminution. La Turquie n’était nullement dans les priorités américaines pour l’aide proprement économique. Avec 2,55 % des allocations Marshall, la Turquie se situe assez loin derrière la Grèce et le couple Belgique-Luxembourg. Néanmoins les 350 millions de dollars obtenus représentent une manne non négligeable, même si le pourcentage des dons (58,69 %) marque la véritable différence avec les grands bénéficiaires (de 100 % pour la Grèce à 73,23 % pour la Grande-Bretagne). Il n’empêche que, sur place, le sentiment prévaut que la Turquie a été brimée : c’est ce que dit le ministre turc des Affaires étrangères, Kôpülü, et plusieurs de ses amis politiques, à une délégation de huit sénateurs américains de passage à Ankara en juillet 1951 ; il leur est répondu que le plan Marshall est destiné aux pays détruits par la guerre et que la Turquie devrait se féliciter des sommes néanmoins obtenues22. Il est probable qu’aucun des deux partenaires n’est vraiment dupe23.
II Les secteurs
13Dès le début, les experts américains avaient conclu qu’il convenait, pour la Turquie, « de développer, pour commencer, son hygiène, son agriculture et l’extraction des matières premières. Tantôt par la persuasion, tantôt en employant des moyens plus énergiques ils sont parvenus à leurs fins24 », écrit l’ambassadeur de France à Ankara. Le bilan de l’aide Marshall à la Turquie, tel qu’il est reflété par le tableau n° 3 confirme cette assertion et la complète dans certains autres secteurs.
14C’est, en effet, le secteur agricole qui a été le plus favorisé. Sur un total de 202 millions de LT de contre-valeur, l’agriculture en a absorbé 76 millions ; de plus elle prend une bonne part de l’assistance technique et des 32 millions des fonds des entreprises privées ; enfin, les industries du coton et du froid, qui la concernent, sont les seules auxquelles les statistiques précisent l’attribution de crédits : si bien qu’il est raisonnable de penser que le secteur agricole a bénéficié de la moitié de la contre-valeur des crédits Marshall.
15Quelques chiffres suffiront à montrer l’efficacité de l’aide mais aussi le chemin restant à parcourir : le parc de tracteurs estimé, en 1950, à 3.000 unités, est passé à 10.000 à la fin de 1950 et à 15.000, chiffre encore modeste, en 1952 ; sans compter l’acquisition de 25.000 machines agricoles diverses. L’utilisation de ce matériel, l’augmentation de fournitures d’engrais et l’activité de techniciens spécialisés, expliquent pour une large part l’envolée des rendements : en 1951, la récolte de blé a augmenté de 70 % par rapport à 1945-47, celle de coton a presque triplé et celle de la betterave à sucre doublé ; les industries du froid ont fait aussi de sensibles progrès25.
16La culture du tabac a pu conserver un bon niveau à la suite d’une décision américaine favorable à la Turquie. En effet, Ankara avait vu avec inquiétude les tabacs turcs évincés du marché de la zone américaine d’occupation en Allemagne, au profit des tabacs américains26. A la suite d’une vigoureuse intervention turque, Washington promit d’y penser et, dès 1949, grâce au financement de l’E.C.A., l’Allemagne a été en mesure d’acheter pour 11.000.000 de dollars de tabacs turcs, rouvrant ainsi la voie à un trafic traditionnel27.
17C’est ensuite dans le domaine des industries d’extraction que la collaboration turco-américaine a donné de bons résultats. Ce secteur a absorbé environ 51.000.000 de LT de contre-valeur gérées pour l’essentiel par l’Eti Bank, organisme d’État spécialisé. Il s’agit d’un vaste programme de modernisation des mines : charbon à Zonguldak, Tumbilek, Degirmisaz, Soma et Celtek, cuivre à Ergani et Murgul, chrome à Guleman et Sori, fer à Divrigi, plomb aurifère à Bolkardag-Keban, antimoine à Turhal. Ainsi, à Zonguldak, on améliore le port existant et l’on commence la construction d’un nouveau port, on entame l’électro-mécanisation des mines d’Eregli, on perce de nouveaux puits et galeries, on construit des lavoirs modernes. Un effort particulier est porté sur les mines de lignite occidentales, notamment à Soma, érigée en mine modèle. Dans les mines de chrome, on met en exploitation de nouveaux gisements, et le ministère de l’Économie, l’Eti Bank et l’Institut de Recherches Minières ont donné leur plein accord pour encourager l’accroissement de la production de chrome par les firmes privées28. Partout la production s’élève : entre 1947 et 1951, elle s’est accrue de 118 % pour le cuivre, 80 % pour le minerai de fer, 57 % pour le chrome et 25 % pour le charbon29.
18Les crédits Marshall ont également permis la modernisation de quelques autres secteurs industriels : c’est ainsi qu’une particulière attention est portée aux fonderies et aciéries de Karabük, et aux cimenteries de Zeytinburnu, Darica et Izmir. A Erzurum ont été créées des fabriques de conserves de viande, à Istanbul des laboratoires de produits pharmaceutiques et des filatures. Les graisses végétales sont maintenant travaillées en Cukurova (Adana).
19Pour alimenter ces nouveaux centres industriels, un vaste plan de développement des sources d’énergie électrique est en cours de réalisation : mise en place de lignes à haute tension, telle celle qui relie, dès 1952, Catalagzi aux rives du Bosphore, construction de barrages, comme celui de Sariyer sur la Sakarya qui mobilise des milliers d’ouvriers30.
20Enfin, un soin tout particulier a été apporté à l’amélioration et à l’extension des moyens de communications. Pour les routes, l’aide Marshall (une contre-valeur d’environ 38 millions de LT) n’est qu’un supplément qui vient s’ajouter à l’importante aide américaine apportée en ce domaine au titre des fournitures militaires : il s’agit de doter la Turquie d’un réseau routier véritablement national et permanent par la réfection ou la création de plus de 6.000 kilomètres de routes ouvertes à la circulation des voitures et des camions lourds. Les liaisons ferrées se sont accélérées grâce à la mise en service d’automotrices Diesel. Enfin l’achat à l’étranger d’appareils et de bateaux modernes a permis la multiplication des services aériens et maritimes30.
21Il est difficile de chiffrer l’assistance technique, mais la transmission du savoir-faire, indispensable pour que tout pays aidé puisse prendre en main ses propres affaires et devenir éventuellement un partenaire fiable, est menée avec détermination par les Américains. Au titre des crédits Marshall, cette assistance se fait d’abord par le personnel permanent de l’Administration de Coopération Européenne (E.C.A.) en Turquie, dont le chef de mission R.H. Dorr31, son adjoint Mc Junkins et le chef de la section du programme H. Wiens, ainsi que des spécialistes notamment en minerai, en charbon, en agriculture, en finances. S’y ajoutent des experts que l’E.C.A. fait venir en Turquie pour étudier et donner un rapport et à l’E.C.A. et au gouvernement turc sur de nombreuses questions qui vont des réserves en minerais stratégiques et de la production métallurgique, aux problèmes des pâturages et des possibilités touristiques32. Les crédits Marshall financent également les frais de séjour des techniciens qui vont compléter leur formation aux États-Unis33. En outre, en dehors du plan Marshall, un fonds spécial d’« assistance technique » permet à une soixantaine de spécialistes américains de travailler pour le compte du gouvernement turc.
22Donnons enfin, à titre de point de repère, deux indicateurs globaux concernant les années de fonctionnement de l’aide Marshall, et permettant de mesurer, mais aussi de relativiser les progrès accomplis par l’économie turque entre 1948 et 1952. Pendant ces cinq ans le volume total des biens et services produits en Turquie a progressé de 41 % et le PNB par habitant a crû de 28 %. Les performances du commerce extérieur sont impressionnantes, les importations turques ayant augmenté de 84 % et les importations de 102 % ; il y a pourtant un revers à la médaille, l’approfondissement du déficit commercial, le taux de couverture glissant de 71 % à 65 %34. Bien entendu, l’aide Marshall n’est point l’unique source de cette incontestable croissance de l’économie de la Turquie, et l’effort proprement turc, tant en investissement qu’en main-d’œuvre, reste primordial. D’autre part, l’industrialisation de la Turquie n’en est encore qu’au démarrage et beaucoup reste à faire35. Faut-il estimer, avec l’ambassadeur de France à Ankara que, grâce à Faction américaine, « la Turquie, déjà évoluée politiquement, s’introduit économiquement dans la société des nations modernes36 » ? Sans doute. Mais l’aide Marshall s’inscrit dans deux tendances durables, qu’elle a peut-être contribué à accentuer, de l’économie turque : le déficit de la balance des paiements, due essentiellement au déficit commercial et l’inflation. Ces évolutions vont à l’encontre des objectifs premiers de l’aide économique américaine à l’Europe. Et la transformation de l’aide Marshall en un « Programme de Sécurité Mutuelle37 », plus axé désormais vers une aide militaire, laisse la Turquie aux prises avec de sérieux problèmes financiers qu’elle doit affronter dans le cadre de l’O.E.C.E. et de l’U.E.P., où la France joue un rôle actif.
III. La France et l’aide Marshall à la Turquie
23Le gouvernement français ne peut qu’approuver l’accès de la Turquie à l’aide Marshall, mais à condition que celle-ci reste modérée. Ainsi, en août 1948, l’ambassadeur de Turquie à Paris, Menemencoglu, vient se plaindre auprès du directeur général des Affaires économiques, financières et techniques du Quai d’Orsay, de la modicité de la somme obtenue par la Turquie pour 1948-1949. Avec un brin de mauvaise foi, ce haut fonctionnaire fait remarquer à l’ambassadeur que 49 millions de dollars c’est déjà beau, puisque la somme originelle prévue était de 39 millions (il oublie que les 10 millions de différence représentent des crédits ouverts mais non encore utilisés). Dans la note à son ministre R. Schuman, après avoir précisé qu’il n’avait visiblement pas convaincu l’ambassadeur, il conseille « de ne pas rompre l’accord européen dans ce domaine38 ». L’affaire est entendue, la France n’interviendra pas pour un accroissement de la part turque.
24D’autre part, il n’est pas sans intérêt de remarquer qu’un nombre considérable de lettres et de télégrammes de l’ambassade de France à Ankara sont consacrés à la « pénétration américaine en Turquie ». Pas la moindre visite d’un officier ou d’un fonctionnaire américains, pas la moindre escale d’un navire de guerre américain, qui ne soient signalées et commentées. On s’étonne de l’ampleur des missions militaires et économiques américaines, soit à demeure dans la capitale, soit itinérantes aux quatre coins du pays. Car la question reste bien, en effet, pour la France, de savoir comment espérer s’insérer dans des mailles aussi serrées, ou à tout le moins préserver l’avenir.
25Le tableau, à cet égard, n’est guère encourageant. Commentant le programme turc d’achats de matériels au titre de la première année de l’aide Marshall, une note au ministre des Affaires étrangères souligne que la Turquie achète pratiquement tout aux États-Unis : 100 % du matériel de transport, 97,1 % du matériel agricole, 99 % des autres équipements ; c’est la question des machines agricoles qui paraît la plus scandaleuse à l’auteur du document39. Et aucune commande ne sera faite ailleurs tant que ce premier crédit ne sera pas épuisé. L’année suivante, le délégué français chargé, par le groupe de travail de l’O.C.D.E., d’examiner le programme turc à long terme, ne manque pas d’attirer l’attention des Turcs sur cette question ; Ankara promet d’acheter du matériel agricole à d’autres partenaires40. En réalité il n’en fait rien et continue d’acheter la totalité de ses tracteurs aux États-Unis.
26Un espoir se fait jour du côté français, à l’automne 1949, à l’occasion d’une demande de prêt d’Ankara auprès de la Banque Mondiale. Celle-ci envoie alors en Turquie une délégation présidée par George Mason, chef du service des emprunts, mais où se trouve un Français, de Farges, spécialiste des questions hydro-électriques. Le projet turc comprend, entre autres, un programme d’irrigation et d’équipement hydro-électrique de la région du Seyhan. Las ! Quand il s’agit de passer aux actes, on commence par envoyer en stage aux États-Unis tous les ingénieurs turcs sélectionnés, y compris les spécialistes en hydro-électricité41;
27Commentant, en juillet 1951, le départ aux États-Unis de vingt ingénieurs turcs de la Sümerbank, dans le cadre de l’assistance technique du plan Marshall, l’ambassadeur J. Lescuyer précise que, par ailleurs, plusieurs spécialistes américains sont attendus dans le cadre d’un programme de modernisation des chemins de fer, et de travaux publics : « Tous les projets de grands travaux sont élaborés par des firmes américaines ». L’ambassadeur n’a pourtant pas manqué de diffuser dans les divers services officiels turcs la documentation que le Département lui a adressée sur les possibilités françaises en ce domaine. « Malheureusement, cette diffusion, ainsi que nos démarches personnelles, n’ont pas permis, jusqu’à ce jour, d’établir un plan de collaboration avec les autorités turques. Celles-ci ont tendance à s’orienter vers les solutions les moins onéreuses pour leur budget, et à donner la préférence à la technique qui ne lui coûte rien ». Petite consolation, la valeur des techniciens français semble reconnue, puisqu’un « nombre appréciable d’étudiants ou de stagiaires turcs vont se perfectionner en France42 ».
28En attendant des jours meilleurs, la France cherche à préparer l’avenir en veillant à prendre toujours la position la plus bienveillante possible à l’égard des problèmes financiers de la Turquie, tant à l’O.E.C.E. qu’à l’Union Européenne des Paiements (U.E.P.). Pourtant, il s’agit d’un exercice qui deviendra de plus en plus acrobatique.
29En octobre 1951, lors de l’établissement de la deuxième liste commune de libération des échanges, la délégation turque a compté les figues sèches au nombre des produits qu’elle désirait voir figurer sur cette liste. La délégation française, afin de sauvegarder les intérêts des producteurs d’Afrique du Nord, s’est opposée à cette mesure, mais elle a accordé des compensations à la Turquie, sur le plan bilatéral, qui ont satisfait Ankara43.
30En février 1952, la France a dû suspendre la libération de ses échanges et réduire ses importations en provenance des pays membres de l’O.E.C.E. Pourtant, afin de tenir compte de la situation particulièrement difficile de certains pays débiteurs de l’U.E.P., elle n’a prévu dans ses programmes d’importation aucune réduction de ses achats à ces pays, au nombre desquels se trouve la Turquie44.
31Les graves difficultés de la Turquie, à l’automne 1952, permettent de bien illustrer la position de la France vis-à-vis de ce pays. Le 11 août 1952, la Turquie demande au Conseil de l’O.E.C.E. un moratoire ou des crédits spéciaux, l’état de ses réserves en or et en dollars ne lui permettant pas de régler son déficit du mois de juillet dans l’U.E.P. La Fédéral Reserve Bank de New-York accorde alors un prêt de 30 millions de dollars, épargnant ainsi à Ankara un refus de l’O.E.C.E.
32Pourtant, dès le 13 août, la Turquie demande de nouveau à l’O.E.C.E. un crédit spécial de 30 millions de dollars pour août et septembre. Le Comité de direction de l’U.E.P. émet un avis défavorable, des crédits à court terme ne pouvant être utilisés à couvrir des déficits permanents. Ankara refuse dans un premier temps la suggestion américaine de l’envoi en Turquie d’une mission de l’O.E.C.E. qu’il n’a nullement l’intention d’inviter. Pourtant au milieu de septembre, Ankara doit se plier à cette obligation, sans ignorer que les conclusions seront sévères : la Turquie est accusée de ne pas prendre de mesures efficaces contre une inflation qui nourrit le déficit de la balance des paiements courants. L’O.E.C.E. propose seulement 17 millions de dollars en attendant des explications plus convaincantes. La délégation turque refuse et insiste : la R.F.A., traditionnellement créditrice, l’Autriche, les pays Scandinaves, l’Irlande, la Grèce et le Portugal se rangent aux côtés de la Turquie ; la France, la Grande-Bretagne, l’Italie et le Benelux défendent les thèses du Comité de direction45. En réalité, la Suisse, appuyée par la France, suggère un compromis46, finalement adopté le 16 octobre, tandis qu’un mois plus tard, jugeant satisfaisantes les explications turques, l’U.E.P. sauve de nouveau la mise à la Turquie en accordant un nouveau crédit47. Lorsque, deux ans plus tard, la situation de la Turquie se sera encore aggravée, Paris, tout en soutenant le raidissement de l’O.E.C.E., se demande jusqu’à quand il faudra tenir compte « de la situation spéciale de ce pays et des raisons d’ordre politique qui s’opposent à la condamnation formelle d’un membre important du pacte Atlantique48 ». C’est qu’en effet, ce genre de bricolage financier ne peut durer qu’un temps.
33Faudrait-il donc voir, dans cette situation d’accumulation de la dette extérieure turque, un effet pervers à long terme de l’aide Marshall, quelque peu entretenu par Ankara, vue la situation géostratégique particulière de la Turquie ? En tout cas, la situation s’aggravera dès la fin des années 1950, pour prendre un tour catastrophique après le premier, puis le second choc pétrolier : alors sera mis en place, en 1979, dans le cadre de l’O.C.D.E., successeur de l’O.E.C.E., le Consortium d’aide à la Turquie, qui mettra sur pied un rééchelonnement de la dette turque, sans qu’on puisse dire encore que la partie est définitivement gagnée pour Ankara.
34Il ne faudrait pas pour autant ne voir que les effets négatifs de l’aide Marshall. Il faut au contraire insister sur deux conséquences utiles : d’abord cette aide a contribué à renforcer un dynamisme économique qui n’a cessé de se perpétuer et, si les conséquences immédiates n’ont pas été favorables à l’abandon de l’étatisme, à plus long terme elle a sans doute préparé certains esprits au passage du pays à l’économie de marché. D’autre part, au sein de l’O.E.C.E., la Turquie a appris à travailler avec les pays européens, favorisant ainsi l’approche par la Turquie du futur Marché commun49, sans que, dans ce secteur, les résultats aient encore été à la mesure des espérances.
Notes de bas de page
1 Note britannique du 24 février 1947 au général Marshall, Secrétaire d’État du gouvernement des États-Unis.
2 Discours du président Truman du 12 mars 1947. Des signes avant-coureurs avaient montré l’intérêt particulier que les États-Unis attachaient à la Turquie lorsque, le 2 novembre 1945, Washington manifestait sa volonté de participer aux discussions éventuelles sur la révision des accords de Montreux, et lorque, le 5 avril 1945, les États-Unis envoyaient à Istanbul leur plus puissant bâtiment de guerre, le Missouri.
3 AEP EU-EUR Turquie 19, G. Maugras, ambassadeur à Ankara, à G. Bidault, ministre AE Paris, le 16.3.1947. Ce papier repose essentiellement sur les Archives du ministère de Affaires étrangères à Paris (AEP), série Direction économique-coopération économique (DE-CE), dossiers 317, 318, 361, 379, et série États-Unis-Europe (EU-EUR), Turquie, dossiers 19, 20, 21 et 22, ainsi que sur les statistiques turques.
4 Le journal Istanbul, 20.11.1949.
5 Au début de 1946, l’Office de Liquidation accorde à la Turquie un crédit de 8 millions de dollars pour l’achat d’équipements non militaires dans les surplus de l’armée américaine (camions, machines-outils, hangars, pièces détachées), et au début de 1947, la Commission Maritime accorde 5,575 millions de dollars pour l’achat de navires.
6 EU-EUR Turquie 19, G. Maugras à G. Bidault, le 13.6.1947.
7 Id., le 21.1.1948.
8 Dans les discussions préliminaires à la mise en place de l’O.E.C.E., la Turquie, qui craint, sans doute à tort, un retour massif de Grecs réduits au chômage par la guerre civile, fait les plus expresses réserves sur l’article 8 des statuts, qui demande aux membres de l’Organisation « de lever progressivement entre eux les obstacles au libre mouvement des personnes ». Autres temps, autres points de vue... DE-CE Turquie A22 379, G. Maugras à G. Bidault, le 8.4.1948.
9 Id., le 9.7.1948.
10 La Grande Assemblée Nationale approuve le texte à l’unanimité le 8 juillet.
11 Arguments présentés en maintes circonstances et notamment au cours d’une conférence de presse de Russell H. Dorr, chef de la mission de l’European Coopération Administration (E.C.A.) pour le Turquie, sur la participation de ce pays à l’European Relief Program (E.R.P.).
12 EU-EUR Turquie 19, annexe à une dépêche d’Ankara du 22.1.1948.
13 Déficit d’autant plus fâcheux que les invisibles sont encore insignifiants.
14 EU-EUR Turquie 19, annexe à une dépêche d’Ankara du 29.1.1948.
15 DE-CE A22 379, J. Lescuyer à R. Schuman, le 5.4.1949. Conférence de presse de H. Wiens, et le 2.5.1949, conférence de presse de R.H. Dorr.
16 EU-EUR Turquie 21, J. Lescuyer à R. Schuman, le 20.5.1950.
17 DE-CE A22 379, J. Tarbe de Saint-Hardouin à R. Schuman, le 13.5.1952.
18 EU-EUR Turquie 21, J. Lescuyer à R. Schuman, le 1.4.1951.
19 DE-CE A22 379, B. de la Sablière c.i. à R. Schuman, le 23.3.1949.
20 EU-EUR Turquie 19, Larmailler consul de France à Iskenderun à G. Maugras ambassadeur à Ankara, le 25.2.1948.
21 Texte du rapport du président Truman concernant la Turquie, annexe à la dépêche citée note 19.
22 EU-EUR Turquie 21, Ankara à Paris, le 19.7.1952. Sans doute agacé par les plaintes turques répétées, un sénateur demande ce que ferait la Turquie si l’Azerbaïdjan était attaquée par l’URSS. Le ministre turc, interloqué, répond que le gouvernement turc n’a jamais souscrit à aucune obligation de ce genre. C’est au tour des sénateurs de faire la tête !
23 En mars 1952, le député Nihat Erim, ancien vice-président du Conseil, comparant les subsides reçus par les membres du Pacte Atlantique, faisait remarquer que la Turquie, pourtant la plus exposée à la menace soviétique, avait reçu une aide beaucoup moins généreuse que celle accordée à la Belgique, à la France et à l’Italie. R.H. Dorr réplique dans le journal Ulus du 21 mars, en faisant remarquer que les 400 millions de dollars reçus par la Belgique ont en fait permis à d’autres pays européens d’acheter des produits belges. Quant aux dons et prêts consentis à la France, ils sont en rapport avec « l’équivalent de 10 divisions engagées en Indochine par la France qui défend ainsi, face au communisme, les positions des peuples libres dans l’Asie du Sud-Est ». En ce qui concerne l’Italie, l’appui financier des États-Unis constituait le seul moyen de triompher des difficultés économiques et sociales que ce pays rencontrait et qui faisait de lui un terrain d’élection pour la propagande communistes. En apportant notre concours à la France et à l’Italie, conclut R.H . Dorr, c’est la cause du monde libre, dont fait partie la Turquie elle-même, que nous défendons ». N. Erim réplique le 23 mars, en répétant que la Turquie est le maillon le plus faible économiquement et le plus exposé militairement, et qu’elle doit donc bénéficier d’une aide prioritaire des États-Unis. La controverse se poursuivra de nombreuses années. EU-EUR 21, J. Tarbé de Saint-Hardouin à R. Schuman, le 27.3.1952.
24 Id. J. Lescuyer à R. Schuman, le 30.1.1952.
25 DE-CE 379, J. Tarbé de Saint-Hardouin à R. Schuman, le 13.5.1952.
26 Id., G. Maugras à G. Bidault, le 9.7.1948.
27 Id. Déclaration à la presse de R.H. Dorr, le 16.3.1949. Avant la guerre, 40 % de la production de tabac turc était absorbée par le marché allemand. L’ambassade des États-Unis à Ankara avait insisté pour que l’administration militaire américaine tînt compte des courants commerciaux existant avant la guerre entre la Turquie et l’Allemagne elle a obtenu satisfaction, du moins pour la zone américaine d’occupation.
28 Dès février 1949, R.H. Dorr précise dans une conférence de presse : « Contrairement à certains rapports, le gouvernement n’a pas essayé d’arrêter le développement du capital privé, mais au contraire il a pris des dispositions pour l’aider ». DE-CE 379, de la Sablière à R. Schuman, le 23.3.1949.
29 Id., J. Tarbé de Saint-Hardouin à Schuman, le 11.5.1952. Les statistiques données par l’E.C.A. en Turquie sont confirmées par les statistiques turques. Voir notamment Türkiye Istatistik Yiligi 1983, avec rétrospective 1923-1983.
30 EU-EUR 21, J. Lescuyer à R. Schuman, le 30.1.1952. Il semble, en revanche, que les demandes turques pour l’exploitation du pétrole de Raman Dag n’ait pas eu beaucoup d’écho.
31 L’ambassadeur de Saint-Hardouin note au moment du départ de R.H. Dorr, que celui-ci laissera derrière lui des regrets mérités : « Il est parvenu, au cours de sa mission à travailler avec les fonctionnaires, les ingénieurs, les hommes d’afaires turcs sans heurter de front leur susceptibilité... Ses qualités d’organisation... la souplesse de son caractère, joints à son charme personnel et aux manières qu’il doit à ses origines – il est d’une vieille famille de Boston – ont fait merveille ici ». R.H. Dorr est alors nommé délégué permanent des États-Unis au Conseil de l’Atlantique. DE-CE 379, dépêche du 13.5.1952.
32 Istanbul, le 20.11.1949. Les possibilités touristiques de la Turquie sont naturellement reconnues par les experts américains, et du reste l’art.5 de l’accord bilatéral turco-américain est consacré au développement du tourisme. Ils estiment cependant qu’il faudrait d’abord supprimer les restrictions aux voyages et construire des hôtels. R.H. Dorr pense qu’il est bien que le gouvernement turc ait créé un département du Tourisme, mais la mise en place des infrastructures indispensables exige l’appel aux capitaux privés étrangers découragés jusqu’ici par la législation en vigueur. EU-EUR 21, J. Lescuyer à R. Schuman, le 8.9.1949.
33 Id., le 7.7.1951.
34 Türkiye Istatistik Yilligi 1983, Basbakanlik Devlet Istatistik Enstitüsü, pp. XXXIV et 355.
35 Voir L’accession de la Turquie à la civilisation industrielle. Actes du colloque d’Istanbul, 2-4 décembre 1985, publiés par J. Thobie et J.L. Bacqué-Grammont, Isis, Istanbul-Paris, 1987, 234 pages.
36 EU-EUR 21, J. Lescuyer à R. Schuman, le 30.1.1952.
37 A partir du 1er janvier 1952, une Administration de Sécurité Mutuelle (Mutual Security Administration) remplace l’E.C.A., mais le chef en demeure R.H. Dorr. Id., le 11.1.1952.
38 DE-CE 379, Direction des Aff. Ec. Fin. et Techn., Note pour le ministre du 27.8.1948.
39 Id„ Note du 23.10.1948.
40 Id., Ministre AE à Amb. Ankara, le 7.11.1949.
41 Les autres membres de la délégation de la B.I.R.D. sont l’Américain Malmos, ingénieur des ports, et le Canadien Mc Ausch, membre de la F.A.O. chargé de la question des silos. En effet, le programme prévoit également la construction de silos dans différents centres et l’agrandissement des ports d’Istanbul, d’Izmir et de Mersin.
42 EU-EUR Turquie 21, J. Lescuyer à R. Schuman, le 7.7.1951. Il y a au moins un point sur lequel les compétiteurs étrangers en Turquie sont sur le même pied, c’est celui des investissements privés. La législation est ici parfaitement dissuasive. Si l’on excepte la Banque Ottomane et l’Union des Assurances Parisiennes, rescapées d’un autre âge, il n’y a aucun investissement direct français repérable du temps de l’aide Marshall. Du côté américain, il n’existe qu’un seul cas de collaboration importante entre capitaux privés américains et turcs, une fabrique d’ampoules à Istanbul, par la General Electric, la Is Bank et la firme Koç. Il faudra attendre la loi turque n° 6224, du 18 janvier 1954, pour voir le premier assouplissement de la législation destiné, en principe, à attirer les capitaux étrangers. Mais l’application restrictive de cette loi en annulera pratiquement les effets bénéfiques attendus. Les années 1980 apporteront des décisions plus efficaces de la Turquie dans cette direction. J. Thobie, « France et Turquie, les relations entre un ancien et un nouveau pays industriels depuis 1945 », dans L’accession de la Turquie à la civilisation industrielle, op. cit., pp. 155-184.
43 DE-CE 379. Note pour le président sur les rapports franco-turcs dans le cadre de l’O.E.C.E., le 9.3.1953.
44 DE-CE 379. Note pour le président sur les rapports franco-turcs dans le cadre de l’O.E.C.E., le 9.3.1953.
45 DE-CE A22 361, Ministre AE à Amb. Ankara, le 27.10.1952.
46 Le montage est le suivant : le gouvernement turc versera à la Banque Centrale de Turquie à Ankara la moitié du déficit de septembre, soit 8,5 millions de dollars, l’autre moitié étant versée à l’U.E.P. à la date de valeur mois d’octobre, c’est-à-dire vers le milieu de novembre, conformément à la position du Comité de direction.
47 DE-CE 361, Ministre AE à Amb. Ankara, le 24.11.1952.
48 Id., Note pour le Secrétaire d’État, situation de la Turquie à l’O.E.C.E., le 22.12.1954.
49 Voir Turquie, Moyen-Orient, Communauté européenne, Actes du colloque de Chantilly 15-17 septembre 1987, L’Harmattan, 1989, 398 pages.
Auteur
Docteur ès lettres, agrégé d’histoire, professeur d’histoire contemporaine à l’université de Paris VIII, département histoire, 2, rue de la Liberté, 93526 Saint-Denis Cedex 02. A déjà publié : « France et Turquie : les relations économiques entre un ancien et un nouveau pays industriel depuis 1945 », dans L’accession de la Turquie à la civilisation industrielle, Actes du colloque d’Istanbul, 2-4 décembre 1985, édités par J. Thobie et J.-L. Bacque-Grammont, Isis, Istanbul-Paris, 1987, p. 155-184. Travaux et recherches : Les relations économiques et financières de la Turquie avec les pays de l’Europe occidentale.
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