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Le plan Marshall et l’électricité

p. 251-264


Texte intégral

Introduction

1En 1946 le système électrique français est dominé par trois facteurs essentiels :

  1. Les limitations autoritaires à la consommation de l’électricité et même l’interruption de l’alimentation à certaines heures imposées par l’insuffisance de la production sont durement ressenties par les Français et nuisent au redémarrage de l’activité économique1. Cette situation résulte elle-même de l’indisponibilité d’un certain nombre d’usines endommagées par faits de guerre ou souffrant de défauts d’entretien ou du manque de charbon et du retard pris par suite des hostilités dans le développement des moyens de production nécessaires à la satisfaction de la croissance normale de la consommation d’électricité.

  2. Les multiples sociétés assurant jusque-là la production et la distribution de l’électricité ont été fusionnées par la loi du 8 avril 1946 en un seul établissement national Électricité de France.

  3. Le plan de modernisation et d’équipement ou plus brièvement le plan Monnet donne dans le rapport remis au gouvernement à fin 1946 une place essentielle au développement de l’équipement électrique de la France.

2Étant donné les relations qui s’établirent naturellement entre le financement par l’aide Marshall et l’exécution du plan Monnet il y a lieu de rappeler les dispositions principales de ce plan en ce qui concerne l’électricité.

I. Le plan Monnet et l’électricité

3Entre le 3 janvier et le 23 novembre 1946 date de remise du rapport au gouvernement par le Commissaire au plan Jean Monnet, les Commissions de Modernisation élaborèrent les propositions devant permettre à la France de devenir un pays « moderne à niveau de vie élevé » suivant les termes mêmes utilisés dans l’introduction du rapport.

4L’une des plus actives de ces commissions et des premières à remettre ses conclusions fut la commission de l’électricité présidée par Roger Boutteville, un des hauts dirigeants de l’industrie électrique avant la nationalisation.

5Rappelons l’essentiel de ses conclusions reprises dans le rapport définitif de Jean Monnet :

6Pour assurer en 1951 une production de 39,5 milliards de kWh considérée comme nécessaire à une activité économique normale le plan prévoyait l’achèvement des travaux engagés avant la nationalisation de l’Electricité soit une trentaine de chantiers environ et l’ouverture d’un nombre équivalent de nouveaux chantiers de façon à assurer avant fin 1951 la mise en service des ouvrages de production dont les capacités globales sont indiquées ci-après.

7Centrales hydro-électriques : Production supplémentaire en année d’hydraulicité moyenne de 10 milliards de kWh par EDF, la CNR (Compagnie Nationale du Rhône) et dans une faible mesure la SNCF.

8Centrales thermiques utilisant les bas produits : 1 240 000 kW par les Houillères Nationales.

9Centrales dites de régularisation utilisant le charbon marchand : 510 000 kW par EDF.

10Centrales thermiques utilisant notamment les gaz de haut fourneau : 640 000 kW par les industries de la sidérurgie.

11On voit que contrairement à ce qui a été dit ensuite le programme dressé par le plan Monnet n’était pas exclusivement hydroélectrique et la large place donnée à la Houille Blanche n’avait été contestée par personne. Comme après la première guerre mondiale la pénurie d’électricité avait suffi à redonner à l’hydroélectricité son prestige dans la ligne de : « La Houille Blanche solution ouvrière » titre d’une brochure de Léon Jouhaux en 1919. De sorte que la proposition faite ensuite (rapport Taix) d’accroître la part du Thermique aux dépens de l’Hydraulique dans le programme d’EDF ce qui aurait permis d’obtenir plus vite et à moindre coût la fin des restrictions à la consommation de l’électricité souleva dans beaucoup de milieux et notamment dans les partis de gauche et les syndicats d’EDF une véritable tempête et la responsabilité de l’ECA2 dans ce changement de politique fut même invoquée (nous y reviendrons). Quoi qu’il en soit, un programme complémentaire thermique de 260 000 kW par EDF et de 480 000 kW par les Houillères nationales fut décidée en 1949.

12Le programme hydraulique conserva cependant une place essentielle dans les préoccupations d’EDF à l’époque en raison notamment de ses retombées médiatiques et de ses coûts d’investissements.

13Rappelons que le plan Monnet prévoyait aussi d’importants travaux pour le développement et la modernisation des lignes de transport (notamment création d’un réseau à 400 000 V et de la distribution (notamment passage de 25 à 50 périodes par seconde de l’important réseau du littoral méditerranéen).

14Le Plan évaluait comme suit en milliards de francs 1946 les dépenses à consentir pour l’équipement électrique pendant les années 1947 à 1950.

Aménagements hydroélectriques...

72

Centrales thermiques minières

16

Centrales sidérurgiques et de régularisation (EDF).........................

15

Lignes de transport et postes de transformation

15

Distribution

80

TOTAL...............................

198

15EDF et la CNR étaient concernés par près de 90 % du financement de ce programme et nous évoquerons essentiellement dans la suite la situation de ces établissements et particulièrement d’EDF et le concours que l’aide Marshall a apporté au financement des travaux leur incombant.

II. Réalisation du plan Monnet. Contribution du Plan Marshall à son financement

16Dès leur entrée en fonction les dirigeants d’EDF considérèrent que la réalisation des objectifs du plan Monnet constituait pour eux une obligation ce qui nécessitait à la fois d’achever avec le maximum de célérité les nombreux chantiers en cours, la plupart engagés au titre du programme 1938 mais poursuivis au ralenti pendant l’occupation du pays et d’autres engagés avant avril 1946 par les anciennes sociétés mais aussi d’entreprendre de nouvelles réalisations.

17Ce n’est pas le lieu de rappeler toutes les difficultés auxquelles ils se heurtèrent : celles de toutes les réalisations industrielles à l’époque : manque de matières premières, désorganisation des usines, coupures d’électricité, etc., mais aussi celles résultant des modifications profondes des structures que la création d’EDF avait provoqué bien que, sous l’autorité de Pierre Massé, la continuité ait été remarquablement assurée pour les services chargés de l’équipement.

18Grâce à la mobilisation de toutes les énergies la réussite paraissait possible en 1947 si le problème de financement des travaux ne s’était immédiatement posé avec une gravité particulière à EDF.

19Comme nous l’avons déjà dit le plan Monnet avait évalué à 50 milliards de francs par an pendant les quatre années 1947 à 1950 les dépenses d’équipement pour l’électricité.

20Sur le financement, le plan Monnet était très discret se contentant d’évaluer les dépenses totales (2 250 milliards), les comparer au revenu national prévisible et d’estimer que si les Français avaient la sagesse de limiter leur consommation ce financement devrait être possible, sans indiquer par quel mécanisme les fruits de cette sagesse profiteraient à l’exécution du plan.

21De son côté la loi créant EDF n’avait prévu aucune dotation en capital pour EDF qui devait au contraire indemniser les actionnaires des anciennes sociétés. Les tarifs de vente de l’électricité ne permettaient aucun auto-financement et les gouvernements successifs n’apportaient aucun enthousiasme à autoriser leur majoration. Il n’était pas possible enfin de placer dans le public des emprunts que l’État se refusait à cautionner.

22Pour mettre en évidence l’importance du problème pour EDF il a paru utile de comparer pour chacune des années 1947 à 1950 trois séries de sommes d’argent évaluées en milliards de francs courants :

  • les prévisions du plan Monnet pour l’électricité réévaluées en francs de l’année considérée (A) ;

  • les dépenses effectives d’investissement d’EDF et de la CNR (B) ;

  • les recettes totales assurées à EDF par la vente de l’électricité (C).

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23Les dépenses sont bien de l’ordre de grandeur des prévisions du Plan Monnet mais elles sont aussi de l’ordre de grandeur de la recette de vente de toute la production d’électricité par EDF !

24En 1946 et 1947, les dirigeants d’EDF n’eurent d’autres solutions que de recourir à des prêts bancaires à court et à moyen terme et à fin 1947 EDF était débiteur des Banques pour 42 milliards de Francs et Roger Gaspard, Directeur Général à l’époque, ne manquait pas de rappeler les rebuffades dont il était l’objet de la part des dirigeants des grands établissements financiers.

25Aux réclamations d’EDF auprès du gouvernement le Président du Conseil, Paul Ramadier, qui ne croyait pas à un développement aussi rapide de l’électricité, répondit qu’EDF n’avait qu’à limiter ses dépenses d’investissement à ses disponibilités financières et effectivement pour maintenir en activité les chantiers en voie d’achèvement il fallut freiner le démarrage de nouveaux aménagements.

26Une solution à ce problème de financement fut apportée par la création du Fonds de Modernisation et d’Equipement (PME) par la loi du 7 janvier 1948 qui permettait à l’État d’accorder aux établissements nationaux et à EDF en particulier des prêts remboursables en 30 ans.

27Encore fallait-il que ce fonds soit alimenté convenablement, en plus du prélèvement exceptionnel de lutte contre l’inflation cité dans la loi, par des emprunts ou d’autres sources.

28C’est ici qu’intervient la contre-valeur de l’aide Marshall qui en alimentant le Fonds de Modernisation et d’Equipement contribua largement au financement des travaux d’EDF et de la CNR comme il résulte du tableau I annexé qu’on peut résumer par les proportions suivantes :

29La contre-valeur a financé 36,5 % des dépenses d’équipement des années 48 à 50 d’EDF et de la CNR. Ce qui représente 27 % du montant total de la contre-valeur3.

30Le Plan Marshall a donc apporté une aide décisive à l’exécution du programme de développement de l’équipement qui avait été dressé par le Plan Monnet.

Tableau I Dépenses d’investissement d’EDF et de la CNR et contribution de la contre-valeur Marshall (CVM) exprimées en milliards de francs courants

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31En 1951 l’aide Marshall à l’électricité diminua beaucoup, l’administration américaine ayant d’autres priorités et le gouvernement français ayant des charges militaires très lourdes, mais la situation générale d’EDF s’était beaucoup améliorée étant en mesure de placer à partir de 1950 des emprunts à long terme et sa trésorerie commençant à autoriser un substantiel auto-financement.

32En définitive les objectifs du Plan Monnet pour l’équipement électrique furent réalisés avec un retard qui ne dépassa jamais deux ans comme il résulte de l’examen des tableaux II et III annexés.

33Dans les autres domaines : transport et distribution des résultats analogues furent obtenus mais il est plus difficile de les comparer aux objectifs du Plan Monnet qui n’étaient pas indiqués avec précision.

34Signalons cependant que le passage à 50 périodes par seconde du réseau du Littoral Méditerranéen qui ne put être entrepris faute de crédits qu’avec deux ans de retard fut achevé début 1955.

Tableau II Réalisation du Plan Monnet pour les équipements de production d’électricité centrales hydroélectriques. Capacité exprimée en milliards de kWh production en année de conditions hydrologiques moyennes

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Tableau III Réalisation du Plan Monnet pour les équipements de production d’électricité centrales thermiques. Capacité exprimée en milliers de kW de puissance installée

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III. Dans quelle mesure l’utilisation de matériels d’origine américaine a-t-elle été accrue par le Plan Marshall ?

Quelle a été son influence sur les choix techniques ?

35D’après une source américaine le matériel importé des États-Unis pour EDF au titre du Plan Marshall a représenté pendant les années 48, 49 et 50 une valeur de 5,5 milliards de francs. C’est certes important mais ne représente que 1,8 % des dépenses d’équipement d’EDF pour la même période.

36Il s’agissait soit de très gros matériels de chantier peu fabriqués en Europe soit de matériels électro-mécaniques de très grande puissance ou de techniques nouvelles servant en quelque sorte de prototypes. Dans ce cas les commandes étant passées en général à une association entre un constructeur américain et un constructeur français qui bénéficiait ainsi de l’expérience américaine.

37Ex. : chaudières de grande puissance à resurchauffe, compensateurs synchrones ou alternateurs refroidis à l’hydrogène, etc.

38Ces commandes étaient évidemment soumises à l’accord préalable de l’ECA qui, à notre connaissance, n’influait pas sur le choix des constructeurs et conseillait au contraire à EDF d’envoyer des ingénieurs passer un temps suffisant aux États-Unis pour mettre en concurrence plusieurs fournisseurs et traiter aux prix normaux du marché américain.

39Il faut rappeler toutefois que les grandes sociétés françaises de production et de distribution de l’électricité n’avaient pas attendu le plan Marshall pour lier des relations avec l’industrie américaine et le premier groupe 100 000 kW de Gennevilliers fut notamment commandé aux États-Unis dès 1945 à la suite d’un voyage d’Ernest Mercier. On pourrait s’étendre longuement sur les relations anciennes entre dirigeants et techniciens de l’industrie française et leurs collègues américains.

40Les ingénieurs français connaissaient donc les moyens mis en œuvre par les États-Unis dans leurs grands chantiers (exemple de la T.V.A. Tennessee Valley Authority) ou le développement des matériels de très grande puissance.

41Le manque de devises devenu particulièrement aigu en 1947 aurait toutefois empêché, sans le plan Marshall, les commandes aux Etats-Unis de se développer comme elles le firent et les missions de productivité dont nous reparlerons ont certainement contribué à donner aux participants qu’ils représentent le maître d’œuvre ou le fournisseur l’idée et la volonté d’utiliser tel ou tel matériel jusque-là peu employé en France.

42Mais ces emplois de matériels américains ne paraissent jamais avoir résulté de pressions ou à fortiori de chantages de la part de l’ECA.

43Citons enfin les principaux ensembles de matériels importés des États-Unis pendant la période considérée :

44Pour la première tranche de 100 000 kW de Gennevilliers : les turbo-alternateurs et une partie des chaudières et des auxiliaires.

45Pour les 2 groupes 50 000 kW de Nantes Cheviré : une partie des chaudières.

46Pour le premier groupe 100 000 kW d’Arrighi à resurchauffe : les chaudières.

47Pour les 2 groupes 50 000 kW de Yainville : un alternateur.

48Pour les centrales de Harnes (2 groupes 60 000 kW) et de Dechy (2 groupes de 60 000 kW) des Houillères nationales l’essentiel des matériels.

49Des transformateurs, des compensateurs synchrones, etc.

IV. Influence du plan Marshall sur les programmes d’équipement électrique

50L’ECA est-elle intervenue de manière significative dans la définition des programmes d’équipement électrique de la France et notamment dans la remise en cause à fin 1948 du programme hydraulique au profit d’un programme thermique complémentaire ? Orientation très critiquée par les syndicats notamment qui y voyaient l’influence des États-Unis.

51Rappelons en quelques mots les raisons de cette inflexion du programme d’équipement électrique : les centrales thermiques sont moins onéreuses en investissements et plus rapides à construire que les centrales hydro-électriques. Se substituant partiellement à ces centrales anciennes de mauvais rendement elles permettent pendant quelques années une certaine économie de charbon et enfin leur production est indépendante des aléas atmosphériques argument particulièrement ressenti pendant la sécheresse 1948-1949 qui entraîna le maintien des restrictions d’électricité une année de plus que prévu !

52Il est certain que le gouvernement américain invitant régulièrement le gouvernement français à assurer l’équilibre de son budget et à accroître les dépenses sociales, ne pouvait qu’être favorable aux propositions de réduction des dépenses d’équipement électrique qui absorbait une part importante de leur aide.

53Dans son rapport du 26 mars 1949, Taix, Conseiller du Ministre de l’Industrie et principal avocat d’un programme thermique complémentaire s’exprime ainsi : « l’administration américaine, si nos renseignements sont exacts, verrait d’un très bon œil une semblable affectation (à un programme thermique) des crédits Marshall car elle redoute une crise énergétique qui rende vaine l’utilisation de tout ou partie de l’équipement qui aura été livré (par les États-Unis) pour les industries de transformation ».

54Plus loin, Taix évoque aussi la répartition entre les équipements hydrauliques et thermiques dans les programmes américains.

55Il y a donc eu très vraisemblablement un appui de l’ECA à la thèse des partisans du thermique mais il est difficile d’en déterminer le véritable poids.

56Quant aux intentions prêtées par certains à l’Administration américaine de vouloir substituer aux aménagements hydro-électriques français des aménagements européens concédés à des groupes internationaux à dominante américaine, il faut les replacer dans le cadre de l’interconnexion européenne dont nous allons parler.

Le plan Marshall et l’Interconnexion européenne

57La volonté américaine de considérer l’Europe dans son ensemble pour l’octroi de son aide économique s’était traduite notamment par la création de l’OECE, qui comportait un Comité de l’Electricité, lequel organisa en mars 1949 sur une suggestion de l’ECA une mission d’experts européens de l’industrie électrique (missions TECAID 10 pays représentés) avec pour objectif d’étudier aux États-Unis les progrès réalisés pendant la guerre dans le domaine des interconnexions entre les réseaux.

58A la suite de cette mission et sur la suggestion de son Comité de l’Electricité, l’OECE recommanda aux pays membres, en décembre 1950, de créer entre eux des « Unions pour la coordination de la production et du transport de l’électricité » et c’est ainsi que fut créée en mai 1951 l’UCPTE groupant des représentants de huit pays : Belgique, RFA, France, Italie, Luxembourg, Pays-Bas, Autriche et Suisse.

59Le caractère de libre coopération entre les pays fut mis en évidence par le fait qu’il s’agissait d’une association de personnes membres des sociétés d’électricité ou d’administrations mais ne les représentant pas et n’agissant que par leur compétence et leur pouvoir de persuasion dans leur pays. Telle qu’elle était, PUCPTE fut bien l’amorce d’une coopération qui permit aux services publics de l’électricité de mieux se connaître et reconnaissant l’intérêt à relier leurs réseaux, à s’entraider et coordonner dans une certaine mesure leurs exploitations.

60En fait les techniciens européens et particulièrement français n’avaient rien à apprendre de l’Amérique sur les techniques d’interconnexion mais c’était la volonté politique de travailler en commun de pays à pays qui manquait.

61Il est certain que l’ECA avait à l’origine des intentions beaucoup plus directives, donnant sa préférence à un programme de développement des installations de production d’électricité ne tenant compte que des conditions techniques et économiques sans se soucier des frontières entre Etats.

62Un tel programme qui aurait été financé par des groupes bancaires américains ne souleva aucun enthousiasme de la part des responsables européens et provoqua de véhémentes protestations en France où certains y voyaient un moyen de mettre en échec la nationalisation de l’Electricité (cf. article du Journal Combat du 9 février 1950 : « L’équipement sera réalisé, mais des nouveaux maîtres de l’électricité commanderont la vie de l’Europe. »).

63Ces projets n’eurent pas de suite et l’UCPTE demeura une organisation indépendante des pouvoirs politiques et de l’OECE en particulier.

64Ajoutons que l’UCPTE existe toujours avec les mêmes missions et la même efficacité.

V. Les missions de productivité

65Le moment est venu de parler d’une forme très particulière de l’intervention américaine dans l’industrie française, nous voulons parler des missions de productivité financées essentiellement par les fonds Marshall.

66Il faut les distinguer des missions d’achat qui ont déjà été évoquées, bien que dans certains cas, les deux objectifs aient été poursuivis au cours d’une même mission.

67Les missions de productivité proprement dites organisées à partir de 1949 par l’ECA réunissaient des dirigeants, ingénieurs, syndicalistes qui groupés par profession parcouraient les États-Unis, visitaient les usines et les chantiers pour étudier l’organisation et les méthodes américaines afin de pouvoir, s’inspirer des exemples américains pour améliorer en France le rendement du travail.

68Une association permettant aux « missionnaires » de se rencontrer pour échanger leurs expériences et en faire profiter leurs collègues restés en France avait même été constituée. Il s’agissait de l’AFAP (Association Française pour l’Accroissement de la Productivité) qui publiait un bulletin et diffusait les comptes rendus des missions.

69Pour s’en tenir aux électriciens, il est à signaler qu’une des premières missions de productivité fut celle des constructeurs de matériels électriques qui eut lieu en août et septembre 1949 et à laquelle les principaux constructeurs français participèrent. Elle fut suivie de plusieurs autres.

70EGA organisa aussi des missions pour EDF telles que celle de mars 1950 de Raymond Giguet, Directeur de l’Équipement, et celle d’août et septembre 1951 consacrée surtout à l’exploitation des ouvrages et dont le compte rendu constitue un volume de 200 pages contenant des détails très précis sur l’organisation des secteurs électriques américains.

71Parmi les conclusions de ce rapport citons celles-ci qui se retrouvent souvent sous une forme voisine dans les comptes rendus des missions :

72« Leur organisation n’est faite que d’une foule d’éléments basés avant tout sur le bon sens, sur l’ingéniosité, sur la persévérance et aussi sur la confiance.... On réalise des installations robustes aussi simples que possible... On s’efforce de rendre minimum toute intervention de main-d’œuvre ».

73Au cours des réunions organisées après les missions les participants se plaisaient souvent à citer des exemples d’amélioration de la productivité de leurs usines acquise en utilisant les enseignements recueillis au cours de leur voyage. On a le droit de s’interroger parfois sur la sincérité de ces témoignages et nous nous contenterons de citer ici deux exemples intéressant l’électricité où les missions de productivité ont eu des conséquences concrètes.

1. Développement des usages de l’électricité

74De nombreux participants aux missions de productivité et pas seulement d’EDF ou de la construction électrique avaient été frappés des efforts faits en Amérique par les distributeurs d’électricité mais aussi le constructeur de matériels pour développer les usages de l’électricité dans l’industrie, à la campagne, les applications domestiques, etc. par l’information, l’octroi de crédits, etc.

75Raymond Giguet dit : « Ils apportent à encourager la consommation d’électricité autant d’ingéniosité que nous avons dû en mettre à la décourager ».

76Le rapport de la mission EDF déjà citée donne des listes impressionnantes des utilisations de l’électricité dans les fermes et les foyers américains.

77Le compte rendu de la mission de productivité des Charbonnages de France (janvier-mars 1952) insiste sur la généralisation de l’utilisation de l’électricité dans les mines américaines et sur l’intérêt que son développement dans les mines françaises présenteraient pour améliorer la productivité et les prix de revient. Comme en témoignent les quelques citations de ce rapport qui suivent : « Toutes les mines visitées même les moins modernes sont électrifiées... même dans nos mines difficiles, la machine, animée par l’électricité, est là qui ne demande qu’à nous servir si nous savons la concevoir et l’utiliser intelligemment ».

78Ces constatations maintes fois renouvelées provoquèrent la création des organismes suivants :

79UNIMAREL : Union pour l’étude des marchés de l’électricité associant EDF et les constructeurs.

80SODEL : Société pour le développement des applications de l’électricité, pour informer le public.

81CETELEM : Crédit pour l’équipement électro-ménager, réunissant des grandes banques et les principaux Industriels.

2. Électrifications rurales

82Ce domaine où la France avait été longtemps en avance sur les autres pays reçut une nouvelle impulsion mais un peu plus tard car la mission productivité de l’électrification rurale groupant des représentants des Ministères de l’agriculture et des travaux publics, des collectivités locales et d’EDF n’eut lieu qu’au début 1954. L’exemple américain inspira de nouvelles conceptions de la distribution rurale en vue d’abaisser les coûts de développement et de renforcement des réseaux ce qui exigea certaines modifications de la réglementation technique.

83L’exécution systématique des travaux sous tension attira aussi spécialement l’attention de la mission. Elle avait été déjà signalée par les précédentes missions des ingénieurs d’EDF mais ne se développa en France que beaucoup plus tard.

VI. Les industries de la construction électrique

84Pour être précis il faudrait distinguer dans la construction électrique les industries du gros matériel électromécanique pour la production de l’électricité ou son utilisation dans les industries lourdes (SNCF, Houillères, Sidérurgie, etc.) et celles fournissant le matériel pour les applications industrielles ordinaires, artisanales, agricoles, domestiques.

85Seules les premières étaient directement visées dans le plan Monnet et ce qui sera dit dans la suite s’appliquera plus particulièrement à elles, mais toute l’industrie de la construction électrique a en définitive profité du développement des usages de l’électricité soutenu par l’exemple américain.

86Comme toute l’industrie française la construction électrique se trouvait à la libération considérablement affaiblie par le défaut d’entretien et de renouvellement pendant cinq ans de ses équipements quand ils n’avaient pas été détruits par faits de guerre ou systématiquement pillés par l’occupant (ex. : Alsthom à Belfort).

87Elle avait aussi à rattraper le retard technique dans lequel l’avait plongé ces cinq années (et même plus compte tenu de la récession des années 30) d’activité réduite, retard particulièrement marqué vis-à-vis de l’industrie américaine que les années de guerre avaient au contraire dynamisée et qui produisait des matériels de performances supérieures que les grands clients nationaux parfaitement informés, par les missions de productivité notamment, ne manquaient pas d’exiger de leurs fournisseurs.

88Or cette industrie électrique fut immédiatement très sollicitée non seulement pour satisfaire aux exigences précises du plan Monnet dans les domaines de l’énergie et des industries de base mais aussi parce que ses fournitures étaient indispensables à la reconstruction et au développement de toutes les activités du pays.

89Comment et de quelle manière l’aide Marshall aida les industriels de la construction électrique à relever ce défi est le sujet de ce chapitre.

90On notera d’abord qu’ils ne furent pas pris au dépourvu en 1946 parce que dès avant la libération une concertation s’était établie entre eux et les grands distributeurs d’électricité pour évaluer les besoins à satisfaire et qu’ensuite ils furent associés à l’élaboration du plan Monnet qui tenait compte de leurs possibilités.

91Le fait est que les entreprises de la construction électrique développèrent leurs productions plus rapidement que la moyenne des entreprises industrielles ainsi qu’il résulte du tableau ci-dessous donnent les indices de production par rapport à 1938 pour les années 1947 à 1952.

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92Pour les industries du gros matériel électrique les indices étaient encore supérieurs, ex. : 3,14 pour 1951.

93Pour apprécier le rôle que le plan Marshall a joué dans cette croissance on peut tenter de déterminer l’aide qu’il a pu apporter aux industriels pour surmonter chacune des difficultés principales qu’ils avaient à affronter.

1. Reconstruction et développement des équipements industriels

94Le plan Marshall a certainement eu une grande importance en permettant l’importation des machines-outils dont les industriels avaient cruellement besoin.

95Un document du syndicat général de la construction électrique évalue à 200 millions de francs en 1949 et 850 millions de Francs en 1950 le montant de ces importations. Ces valeurs nous paraissent faibles.

2. Matières premières

96Essentiellement le cuivre pour lequel la France dépendait des importations. Il n’apparaît pas clairement que la pénurie de cuivre souvent évoquée ait été un frein effectif de la production ni d’ailleurs que l’aide Marshall soit intervenue.

3. Crédits

97Cette question paraît constituer une des préoccupations majeures des industries qui devaient financer l’équipement de leurs usines et reconstituer leur trésorerie.

98En dépit des demandes et des espoirs parfois exprimés, il ne semble pas que le fonds de modernisation et d’équipement et par conséquent la contre-valeur de l’aide Marshall aient apporté un soulagement sensible aux problèmes financiers des entreprises de construction électrique comme d’ailleurs aux entreprises privées en général (ce qui souleva à l’époque quelques protestations).

99Il est certain par contre que les très importantes commandes d’EDF, de la CNR mais aussi des Houillères Nationales et de la SNCF financées elles en partie par le plan Marshall ont aidé les entreprises de construction du gros matériel à assurer l’autofinancement du développement de leurs installations, car si l’on en croit au moins le rapport général de la Commission de l’énergie préparant le 2e plan les marchés de matériel pour l’exécution du premier plan laissaient à leurs titulaires des marges bénéficiaires notables : « Les centrales thermiques allemandes coûtent deux fois moins cher que les centrales thermiques analogues françaises réalisées au cours du premier plan... Mais il faut reconnaître que l’industrie électro-mécanique a dû se moderniser en partie par autofinancement ».

100Une partie des marchés en question avaient été conclus avant la nationalisation et EDF aurait pu les résilier en application de l’article 19 de la loi du 8 avril 1946 ; ce qui fut fait effectivement pour beaucoup de marchés de travaux mais jamais pour des marchés de fourniture de gros matériels car la renégociation de nouveaux contrats aurait été trop difficile et aurait entraîné des retards inadmissibles dans la mise en service d’installations impatiemment attendues.

101Les constructeurs protestaient d’ailleurs sur l’incertitude dans laquelle ils étaient sur le déroulement des programmes d’équipement d’EDF et des grands clients nationaux. Du fait du financement partiel de ces programmes sur le fonds de modernisation et d’équipement, ils devaient en effet être approuvés chaque année par le Parlement (loi du 21 mars 1948) et pouvaient être remis en cause à toutes les étapes de la procédure et les constructeurs avaient beau jeu de comparer les aléas de cette situation avec la continuité des programmes américains décrite par les missions de productivité comme une des raisons de l’efficacité de l’industrie américaine.

Concurrence de l’industrie américaine

102L’importation des États-Unis de gros matériels électriques n’a jamais été considérée par les constructeurs français comme une concurrence fâcheuse car EDF avec l’entier accord de l’ECA associait toujours un constructeur français aux commandes américaines ce qui lui permettait d’acquérir l’expérience de matériels plus puissants ou utilisant des techniques nouvelles et que d’autre part les constructeurs français étaient saturés par les commandes intérieures et n’étaient pas fâchés qu’EDF importe des États-Unis mais aussi de Suisse, de Belgique ou d’Italie quelques matériels et leur laisse un peu de disponibilité pour servir, en prévision de l’avenir, des clients étrangers4.

103Les constructeurs étaient beaucoup plus inquiets de la concurrence allemande mais le relèvement rapide de l’économie allemande n’était-il pas la contrepartie acceptée par la France du plan Marshall ?

104En résumé si les industries de la construction électrique ont pu grâce au plan Marshall importer des États-Unis des matériels nécessaires à leur modernisation et leur équipement, elles n’ont guère bénéficié directement de la contre-valeur. Mais les entreprises de construction des gros matériels en ont bénéficié indirectement par les contrats des grands clients nationaux EDF d’abord mais aussi la CNR, les Houillères et la SNCF et les exigences de ces clients instruits par l’expérience américaine a constitué une incitation efficace pour rattraper le retard pris pendant les années d’occupation.

105Enfin l’unanimité avec laquelle les missions de productivité quel que soit le secteur professionnel qu’elles représentaient ont affirmé que le nombre et la variété des utilisations de l’électricité dans la société américaine était un des facteurs de sa productivité a certainement largement contribué à développer les usages de l’électricité en France ce dont en définitive toutes les industries de la construction électrique ont profité.

Entreprises de Travaux Publics

106Bien que non spécifiques de l’électricité, on peut dire un mot de ces entreprises parce que les « Chantiers de barrage » ont été pour elles une activité importante pendant cette période et que ces chantiers étaient en raison de leurs dimensions particulièrement adaptés à l’usage des engins de grande puissance notamment pour les terrassements.

107Grâce à des acomptes à la commande substantiels les entreprises travaillant sur les chantiers de barrage purent s’équiper avec ces matériels grâce à l’aide Marshall en plein accord avec l’ECA.

VII. Les agents d’EDF et le Plan Marshall

108La place tenue par la contre-valeur de l’aide Marshall dans le financement des travaux d’équipement était évidemment connue des dirigeants d’EDF et probablement de nombre de cadres mais on n’en parlait pas, sans doute pour éviter de provoquer les réactions des syndicats opposés à l’intervention américaine en Europe.

109M.D. Olivier Martin, Directeur-adjoint de l’Equipement à l’époque, se souvient que R. Gaspard, Directeur Général, lui avait dit : « Le plan Marshall, je m’en occupe, ce n’est pas votre affaire ».

110Effectivement dans les comptes rendus des réunions des chefs de service, des Commissions du Conseil et même du Conseil d’administration lui-même, il n’est fait que très rarement mention du Plan Marshall. Les rapports de gestion de 1949 et 1950 précisent cependant que le FME est alimenté (pour la plus grande part en 1949) par la contre-partie de l’aide Marshall... pour regretter ensuite la précarité de cette situation.

111Il ne semble pas y avoir eu non plus de relations directes entre les agents d’EDF et l’ECA à propos des programmes d’équipement. Pourtant ces programmes devaient recevoir l’agrément de l’ECA comme tous ceux financés par le FME pour que l’ECA accepte que la contre-valeur soit versée au FME.

112Cette question devait être discutée directement entre l’ECA et l’administration française qui elle-même avait à soumettre chaque année les programmes d’équipement à l’approbation de l’Assemblée nationale en application de la loi du 31 mars 1948.

113Les agents d’EDF avaient par contre des relations directes avec l’ECA :

  • Pour l’organisation des missions de productivité.

  • Pour avoir l’autorisation de passer des commandes aux États-Unis au titre du plan Marshall.

114Ces relations ne paraissent pas avoir soulevé de difficultés particulières, l’ECA s’employant à faciliter la tâche d’EDF dans les deux cas. Les achats aux États-Unis donnaient lieu d’ailleurs à des marchés dans les formes ordinaires avec la seule différence que grâce au plan Marshall les paiements étaient faits en Francs.

115Signalons enfin qu’un ingénieur d’EDF, M. Vibert, fut secrétaire du Comité de l’électricité de l’OECE de juillet 1948 à mars 1949.

VIII. Les travaux de l’équipement électrique ont-ils été un bon « faire-valoir » de l’aide Marshall ?

116On sait l’importance que le gouvernement américain attachait à ce que son aide soit largement connue et appréciée par les populations des pays assistés et que des signes sensibles de ce sentiment de reconnaissance parviennent jusqu’au Congrès américain souvent réticent à approuver l’octroi des crédits Marshall.

117La place du programme d’équipement électrique dans le plan Monnet et la renommée favorable dont paraissait jouir dans le public la « Houille Blanche » avaient assez vite convaincu les Américains, aidés en cela par le gouvernement français et Jean Monnet en premier, que l’équipement électrique était un bon domaine à faire bénéficier de l’aide Marshall.

118Encore fallait-il que la population française soit bien informée de l’importance de ces travaux et de la place de l’aide Marshall dans leur financement.

119D’après ce qui a été dit au chapitre précédent on peut douter que les agents d’EDF aient été de bons intermédiaires de cette information.

120M. Margairaz évoque dans sa thèse sur le plan Marshall l’incident Génissiat où les responsables de la CNR nièrent devant des journalistes américains que l’achèvement de cette usine ait bénéficié de l’aide Marshall alors que le contraire avait été dit par des responsables français à l’ECA.

121Autre anecdote : M.J. Janiaud, journaliste très proche à l’époque du parti communiste, raconte dans un livre récent EDF et la main invisible comment il avait été sanctionné pour avoir fait disparaître des brochures éditées par l’ECA où le programme d’équipement d’EDF était décrit et la participation de l’aide Marshall à son financement largement vantée.

122Nous avons eu la chance de retrouver dans les archives d’EDF une de ces brochures datée de 1951. La description des travaux et l’indication du montant global de la participation de l’aide Marshall à leur financement ne soulèvent pas d’observations particulières ni la liste des matériels importés des États-Unis.

123Ce qui est plus surprenant, c’est la répartition chantier par chantier de l’aide Marshall, faite certainement à posteriori proportionnellement aux dépenses faites pendant l’année sur chaque aménagement.

124Tous les témoins de cette période que nous avons pu interroger ont dit n’avoir jamais vu cette brochure et ignorer qui à EDF avait pu participer à sa rédaction.

125A l’occasion de l’inauguration de certains aménagements particulièrement importants il a été rendu un hommage de reconnaissance à l’aide Marshall.

126A l’inauguration de l’Usine de Donzère-Mondragon sur le Rhône, le Président Vincent Auriol s’exprima ainsi :

127« Sans doute le plan Marshall nous a-t-il aidé et nous en avons dit souvent les bienfaits avec gratitude. Mais hélas la défense de la liberté en Indochine nous a déjà coûté matériellement à peu près le double de ce que nous avons reçu à ce titre et au titre du plan d’aide militaire ».

128Nous pouvons citer aussi l’usine de Passy dans les Alpes inaugurée en 1952 en présence de l’ambassadeur des États-Unis. M.P. Wyart, Chef du Service Régional de la Production Hydraulique, à l’époque, se souvient encore des inquiétudes et des recommandations de la Direction générale d’EDF qui craignait des manifestations hostiles du personnel.

129De cette inauguration a subsisté une plaque rendant témoignage de la contribution de l’aide Marshall à la réalisation de l’usine.

130A la lecture de ce qui précède on ne doit pas être trop surpris qu’assez vite l’ECA, devant l’absence de résonance dans la presse et le public de l’aide Marshall à l’équipement électrique, ait demandé au gouvernement français que cette aide profite à des investissements plus directement sensibles aux Français comme la construction de logements sociaux.

Conclusion

131En conclusion, il faut reconnaître que l’équipement électrique de la France entre les années 1948 et 1952 a largement bénéficié du Plan Marshall même si on ne retrouve dans les documents de l’époque qu’assez peu de déclarations le reconnaissant pour les raisons que nous avons indiquées.

132La première et la plus importante forme de cette aide est évidemment la contribution de la contre-valeur au financement des travaux d’équipement d’EDF et de la CNR avec les retombées évidentes pour les entreprises et constructeurs travaillant pour ces établissements.

133Ce traitement privilégié de l’équipement électrique paraît lui-même résulté de deux facteurs au moins :

  • La place tenue par l’électricité dans le plan Monnet.

  • L’activité avec laquelle ces travaux ont été conduits par EDF anticipant parfois dangereusement sur les ressources espérées ce qui est personne ne le contestera la meilleure façon d’obtenir ces ressources.

134Si l’aide financière est évidemment la plus importante et la plus facile à mesurer il ne faut pas négliger non plus, bien qu’il soit impossible de dire ce qui se serait passé sans l’aide Marshall :

  • L’émulation au progrès technique suscitée par les missions aux États-Unis de productivité ou d’achat.

  • L’incitation au développement des emplois de l’électricité apportée par l’expérience américaine.

135L’établissement EDF nouvellement créé dans l’enthousiasme que l’on sait était parfaitement préparé à bénéficier de ce levain. Il le fit en pleine association avec les constructeurs de matériel électrique.

Notes de bas de page

1  Coupures et restrictions pendant 4 mois de l’année au moins et déficit de puissance de 20 % environ les jours les plus chargés de l’année.

2  Economic Cooperation Administration.

3  Le financement des centrales thermiques réalisées par les Houillères et la sidérurgie n’est pas comptabilisé dans le tableau 1 parce que la sidérurgie prit beaucoup de retard dans la réalisation de ses centrales (retard en partie compensé par EDF) et que nous n’avons pas été en mesure de faire un bilan des dépenses faites par les Houillères pour la construction des centrales thermiques.

4  D’après un article de la revue Travaux (janvier 1951), 30 % environ des matériels des centrales thermiques du plan Monnet et du programme complémentaire d’EDF et des Houillères furent commandés à l’étranger.

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