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La direction du Budget et l’INSEE, 1949-1958. Le Budget et la statistique publique, acteur ou témoin ?

p. 625-646


Texte intégral

1L’analyse des relations entre l’INSEE et la direction du Budget s’inscrit dans le cadre de l’opposition entre deux conceptions et deux usages de la statistique : celui des outils approximatifs et prospectifs qui sont établis par des experts pour étayer la décision économique immédiate, celui des instruments rétrospectifs qui informent avec précision sur les structures économiques et sociales. Dans un contexte de rigueur budgétaire, la direction du Budget balance à priori du côté des évaluations peu coûteuses qui sont élaborées par des équipes proches de l’inspection des Finances aux dépens des statistiques lourdes qui proviennent d’un institut intégré à l’origine au ministère de l’Économie puis aux Affaires économiques.

2Toutefois, à partir de 1949 cette alternative n’est pas si nette. Les Finances confisquent bien à l’INSEE la production des instruments prestigieux destinés à la comptabilité nationale et au Plan. Les statisticiens sont bien cantonnés à l’élaboration des données structurelles, mais au bout du compte, ils ne sont pas totalement évincés des études économiques.

3La nomination de Claude Gruson, inspecteur des Finances, à la direction générale de l’INSEE en 1961 y introduit une partie de l’équipe du SEEF et marque la réconciliation entre les Finances et l’Économie.

4Le passage de Roger Goetze à la direction du Budget a préparé le terrain puisque cet inspecteur des Finances a utilisé sa marge de manœuvre pour donner à Francis-Louis Closon, le directeur de l’INSEE, les moyens d’améliorer la statistique publique. La stabilité de ces directeurs contrebalance celle des gouvernements et leur permet d’établir des relations personnelles. Bien que leurs réseaux d’alliances soient distincts, ils ont une conception commune du service de l’État. Leur projet est celui des générations de hauts fonctionnaires qui arrivent aux postes de responsabilité dans l’après-guerre. Il est profondément influencé par quelques personnalités du monde politique comme Pierre Mendès France et il ne peut se réaliser qu’à moyen terme.

5L’examen des relations entre la direction du Budget et l’INSEE ne peut donc pas se limiter à la période 1949-1958. Il faut tenir compte des années qui précèdent la nomination de Roger Goetze pendant lesquelles l’INSEE est créé. Il est également nécessaire d’élargir le sujet au-delà des seuls arbitrages budgétaires car ils ne sont que les manifestations apparentes de choix politiques profonds.

I. LA STATISTIQUE ET LE BUDGET : DES RELATIONS MARQUÉES PAR UN HÉRITAGE

6Le SNS (Service national de statistiques) est créé en octobre 1941 par la fusion de la SGF (Statistique générale de la France) d’avant guerre et du Service de la démographie organisé en août 1940. Il est rattaché au ministère des Finances et comme beaucoup d’administrations apparues pendant l’Occupation, il dispose d’un budget important.

7Le SNS est dirigé par son créateur, René Carmille, contrôleur général des armées, qui profite de l’effacement des oppositions politiques et budgétaires d’avant guerre pour réaliser ses projets de rationalisation de la comptabilité publique en introduisant des équipements mécanographiques dans l’Administration.

A. Vichy ne compte pas

8Les crédits, les équipements et le personnel accordés à René Carmille sont sans comparaison avec les faibles dotations de la SGF d’avant guerre (150 personnes, aucun relais en province excepté Strasbourg, un matériel introduit par Lucien March au début du siècle).

9Ces dotations augmentent jusqu’à la Libération. Le SNS compte alors 8 000 personnes réparties dans 16 ateliers régionaux et dans deux échelons de la direction générale (Paris et Lyon), il dispose d’un outillage moderne. Ces largesses budgétaires participent à l’inflation des administrations instituées par Vichy et tiennent à la mission dévolue au SNS.

1. Mission

10Le SNS est chargé d’effectuer des recensements réguliers, de dresser un inventaire permanent des personnes et des biens, de réaliser les études statistiques nécessaires au Gouvernement et de coordonner et de stimuler les statistiques administratives (formation des spécialistes de la statistique et de la mécanographie, uniformisation des nomenclatures, travaux de sous-traitance mécanographiques...).

11Le SNS a une double mission (études et technique). Il dispose d’une école d’application et d’un personnel regroupé en corps (inspection interne, administrateurs) et en cadres (attachés et commis). Du fait des circonstances et en attendant de pouvoir former suffisamment des spécialistes, René Carmille complète les effectifs des statisticiens issus de la SGF par des militaires démobilisés qui recrutent et encadrent le personnel des ateliers régionaux.

2. Un service de main-d’œuvre

12Pour son propre compte ou pour répondre aux commandes administratives, le SNS exploite les multiples formulaires provenant des opérations administratives de répartition des biens et d’encadrement des personnes. Cette fonction technique explique qu’il embauche de nombreux auxiliaires et vacataires peu qualifiés pour effectuer les tâches de dépouillement, de classement de perforation et de contrôle des données avant qu’elles soient traitées par les machines mécanographiques. Le SNS permet ainsi de fournir des emplois et des ressources à une main-d’œuvre féminine dans les villes de province et d’occuper les militaires démobilisés.

13Comme le service de la Démographie qui le précède, le SNS prend également en charge une partie des tâches des services de recrutement des armées dissous par la convention d’armistice. Il conserve ainsi le personnel des anciens bureaux de recrutement des armées.

3. Mission officieuse

14La mission officieuse attribuée à René Carmille consiste à dresser et à tenir à jour des listes-adresses de personnes mobilisables en utilisant les informations individuelles issues des opérations de sous-traitance administrative ou tirées de ses propres enquêtes (recensement des activités professionnelles en zone sud et en Algérie en juillet 1941). Ces listes sont entretenues clandestinement par l’atelier central de Lyon en accord avec l’État-Major de l’armée.

15La création du SNS met ainsi un terme à l’organisation de la statistique publique d’avant guerre qui n’accordait que de faibles crédits aux statisticiens et les cantonnait à un rôle d’expertise.

16Toutefois, le SNS ne coordonne et ne prend pas en charge l’intégralité des travaux quantifiés des administrations centrales puisque les statistiques industrielles reviennent au ministère de la Production industrielle tandis que des commissariats spécialisés et les directions ou les services liés aux Finances (Trésor, Banque de France, Régies) établissent leurs propres données.

17Le SNS n’en reste pas moins une structure imposante qui est très difficile à gérer après l’arrestation et la déportation de son directeur général en février 1944.

B. Libération et intérim : un devenir en question

18Henri Bunle1 assure l’intérim dans des conditions particulièrement difficiles. Il ne dispose pas du charisme nécessaire pour atténuer l’autonomie relative acquise par certains statisticiens à l’égard de leur directeur général depuis la création du SNS (c’est le cas par exemple de l’équipe de conjoncturistes animée par Alfred Sauvy). La libération du territoire accentue les difficultés de communication entre la direction générale et les directions régionales et nuit à la transmission des directives et aux échanges d’informations. De plus, Henri Bunle a peu de points communs avec les anciens collaborateurs de René Carmille. Il n’est ni militaire ni mécanographe et il n’a pas participé à leurs travaux clandestins.

19Malgré ces circonstances, sa mission essentielle consiste à faire fonctionner le SNS et à proposer un projet de réforme pour l’après-guerre.

20Depuis octobre 1941, Henri Bunle considère la fusion de la SGF et du Service de la démographie comme une mesure provisoire. Dès la Libération, il préconise de reconstituer un service central de statistiques peu coûteux (laboratoire d’études spécialisé dans la statistique et déchargé des fonctions mécanographiques) comme de nombreux responsables politiques et administratifs de la Reconstruction qui cherchent à dégager des économies budgétaires. Cependant, Henri Bunle est contraint de réclamer des crédits importants pour continuer à verser les traitements du personnel et à financer l’entretien des machines et des locaux du SNS. Sa suggestion de réforme n’est pas retenue puisqu’il est décidé de maintenir les structures et la double mission (études, technique) du SNS en janvier 1945.

21Le service conserve la plupart de ses fichiers (personnes et entreprises), l’intégralité de ses équipements mécanographiques et son organisation décentralisée. Il est rattaché au ministère de l’Économie nationale en attendant une réforme plus profonde de la statistique publique.

22Le SNS contribue à l’élaboration du bilan de l’Occupation qui étaye les demandes de réparations, fournit des informations aux services du ravitaillement, vend son numéro d’immatriculation individuel aux caisses de Sécurité sociale et organise le recensement démographique prévu pour 1946. Il hérite également de l’atelier chargé du recouvrement des forfaits de l’impôt sur le chiffre d’affaires des Contributions indirectes et doit collaborer à la mécanisation des services comptables des Finances.

23Le SNS abandonne les tâches militaires aux directions de l’armée qui récupèrent leurs archives, les locaux, le personnel (800 agents sont restitués) et quelques machines.

24Comme de nombreuses créations du régime de Vichy et parce qu’il a établi des fichiers dans une période de traques et de restrictions, il bénéficie d’une mauvaise image de marque dans l’opinion. Toutefois, ni le patriotisme de son directeur général ni celui de ses proches collaborateurs ne sont contestés après la Libération. Les commissions d’épuration traitent quelques cas individuels de collaboration qui sont sans rapport avec l’orientation générale du SNS pendant l’Occupation.

25Les critiques adressées au service ont des motifs budgétaires et économiques. Elles proviennent de la sous-utilisation de ses capacités de production. Ces critiques s’accentuent à mesure que le nombre de documents exploités par les directions régionales diminue du fait de la disparition progressive des mesures autoritaires d’encadrement de la population (déclaration individuelle de changement de domicile, enregistrement pour les chantiers de la jeunesse...).

26Malgré une diminution de 15 % de ses effectifs budgétaires depuis la Libération, le SNS dispose encore de sureffectifs en avril 1946 (création de l’INSEE).

C. L’INSEE

27L’INSEE est créé par la loi de finances d’avril 1946 sans susciter aucun débat au Parlement. André Philip et Albert Gazier le chargent de fournir à l’État et aux agents économiques et sociaux les outils quantifiés nécessaires à leurs décisions.

28Cette création s’inscrit dans le cadre des réformes structurelles de la Libération (nationalisations, planification) et dans celui de la réorganisation du ministère de l’Économie nationale. Outre la mission et les structures héritées du SNS, l’INSEE regroupe les équipes chargées des études et de la documentation des services de l’administration de l’Économie, exceptée celle du Plan qu’il continue à héberger pendant un temps. Sa vocation interministérielle lui vaut une autonomie de décision relative à l’égard de sa tutelle, mais son directeur général est nommé par décret et révocable, tandis que son pouvoir de coordination sur l’ensemble des travaux quantifiés de l’administration reste à établir.

29Bien que les fonctionnaires-statisticiens de l’INSEE doivent s’immiscer dans le domaine des études et des conseils économiques réservés jusque-là à l’inspection des Finances, elle ne s’oppose pas à sa création. L’inspection est momentanément effacée du fait de l’attitude de certains de ses membres pendant l’Occupation.

30L’INSEE est promis à un brillant avenir. Il est confié à un homme jeune (né en 1910) qui partage la volonté de la direction du Budget de continuer à réduire les crédits du service de Statistiques. Les relations entre le directeur de l’INSEE et la direction du Budget sont cordiales et impersonnelles.

31Entre avril et la fin de l’année 1946, 2 027 postes budgétaires sont supprimés sans nuire à l’exploitation du recensement de mars 1946.

1. Francis-Louis Closon, premier directeur général de l’INSEE

32Francis-Louis Closon dispose de plusieurs atouts pour mener à bien sa mission. Son cursus universitaire est brillant : concours de rédacteur du ministère des Finances en 1932, thèse de droit et d’économie politique sur la politique financière du président Roosevelt en 1937, boursier de la fondation Rockfeller en 1938, chef des services financiers d’achats français aux USA en 1939. Mobilisé sur place, il réagit rapidement à l’Armistice et rejoint Londres pour s’engager dans la Résistance en 1941. Il est successivement directeur par intérim des Finances de la France combattante, directeur au commissariat à l’Intérieur du Comité français de la libération nationale en 1942 puis délégué du Comité en territoire occupé en 1943-44. Ces fonctions lui permettent de nouer des contacts avec des personnalités qui joueront un rôle politique de premier plan après la Libération (Michel Debré, Pierre Mendès France, Robert Prigent...).

33En août 1944, Francis-Louis Closon est nommé commissaire de la République à Lille, puis directeur du SNS en mars 1946 et directeur général de l’INSEE en avril.

2. Points communs avec Roger Goetze

34Francis-Louis Closon appartient à la même génération que Roger Goetze et partage avec lui le fait d’être resté en dehors des compromissions à l’égard de Vichy.

35Toutefois, plusieurs caractéristiques de sa carrière vont le desservir dans ses négociations avec les responsables des directions ministérielles et du Budget. Tout d’abord et contrairement à Roger Goetze, il ne fait pas partie du microcosme parisien des diplômés de l’École libre de sciences politiques. Francis-Louis Closon est né à Marseille, il ne passe pas le concours de l’inspection mais celui de rédacteur du ministère des Finances. Il reste en marge des services centraux de cette administration pendant son bref passage au ministère.

36En outre, Francis-Louis Closon porte un jugement négatif sur l’attitude des représentants des Finances aux USA au moment de l’Armistice car beaucoup choisissent de rester à leur poste pour préserver leur carrière et ceux qui l’encouragent à s’engager dans la Résistance sont peu nombreux2. En choisissant cette voie, Francis-Louis Closon se met en marge de son administration d’origine qui le considère comme démissionnaire.

37À la Libération, cet engagement suscite une réaction de rejet dans les corps traditionnels de l’Administration qui se manifeste en particulier par le refus des moyens budgétaires réclamés3. Il faut attendre l’arrivée de nouvelles générations aux postes de décision pour que cette réaction disparaisse.

3. Roger Goetze, soutien potentiel

38La nomination de Roger Goetze à la direction du Budget en juillet 1949 y introduit une personnalité qui a ressenti le même sentiment d’indignation que Francis-Louis Closon au moment de l’Armistice.

39Cependant, Roger Goetze ne s’engage pas dans la Résistance mais il est affecté à l’Inspection des finances du Gouvernement général de l’Algérie au début de 1941, puis il devient directeur général des Finances de l’Algérie après l’arrivée de de Gaulle en mai 1943.

40Contrairement à celle de Francis-Louis Closon, l’activité de Roger Goetze pendant l’Occupation constitue un point très positif pour sa carrière car elle lui a permis de se tenir à l’écart des centres de décisions liés à Vichy.

41Nommé directeur du cabinet de Pierre Mendès France au ministère de l’Économie nationale en septembre 1944, Roger Goetze participe aux discussions sur les projets de réorganisation des structures administratives (dont le SNS) puis il est à nouveau affecté en Algérie en mai 1945.

42Parallèlement, Francis-Louis Closon règle des conflits difficiles dans la région sinistrée du Nord-Pas-de-Calais (nationalisation des mines...). Sa réputation de meneur d’hommes énergique lui vaut d’être choisi pour diriger l’INSEE où il démontrera la même ténacité4.

43Contrairement à Roger Goetze mais comme beaucoup de commissaires de la République, Francis-Louis Closon doit s’imposer pour faire carrière. Roger Goetze le connaît par ses études et par sa réputation5. Il partage son enthousiasme pour la reconstruction sur des bases nouvelles et son attachement au projet et à la personnalité de Pierre Mendès France6.

44Les deux directeurs ont aussi une conception commune de leur fonction qu’ils perçoivent comme une magistrature qui dépasse le rôle de fonctionnaire d’exécution.

45Sous leur direction, la vocation d’études et l’autonomie relative du Budget comme de l’INSEE à l’égard des autorités politiques se développent. Cependant et de façon paradoxale en période de restriction budgétaire, le directeur du Budget réussit mieux à accroître sa marge de manœuvre et à se faire entendre par les responsables de la politique économique que celui de l’INSEE.

46Roger Goetze bénéficie du soutien de l’Inspection des finances qui confisque progressivement à l’INSEE les tâches nobles de la comptabilité nationale et de la prévision.

47Lorsque Roger Goetze arrive à la direction du Budget, l’INSEE est encore largement considéré comme un service trop coûteux composé de « militaires poussiéreux » par ses homologues des Finances qui cherchent à le cantonner à une position d’organisme technique7.

48En dépit des relations personnelles qui s’établissent entre Francis-Louis Closon et Roger Goetze, l’INSEE reste une administration dont la vocation d’études est difficile à faire reconnaître par l’administration des Finances jusqu’à la nomination de Claude Gruson (inspecteur des Finances) comme directeur général en 1961.

4. Un institut peu reconnu

49Contrairement à sa vocation initiale, l’INSEE consacre l’essentiel de ses crédits à de lourds travaux techniques (fichier électoral confié par la loi d’août 1946, raccordement des caisses de Sécurité sociale au numéro à 13 chiffres, exploitation du recensement). Il ne contribue pas directement à la création puis à l’activité des commissions d’études qui sont animées par le réseau de l’administration des Finances (revenu national, comptabilité nationale)8.

50Les décrets d’application et les règlements qui lui confèrent une position centrale dans la statistique publique sont l’objets de débats animés. Ils sont tardifs et leurs effets sont réduits comparés aux projets initiaux (fin 1947 pour les décrets d’application de la loi de finances d’avril 1946, juin 1951 pour la loi sur le secret et la création du Comité de coordination des statistiques et des enquêtes économiques)9.

51Les effectifs de statisticiens qui dépendent du nombre de postes offerts aux concours de recrutement sont insuffisants pour multiplier les études internes et pour assurer des détachements dans les administrations centrales. Ils sont limités par la rigueur budgétaire, tandis que la pénurie de main-d’œuvre spécialisée et la faiblesse des avantages offerts à ces promotions font de l’INSEE un débouché peu recherché par les jeunes polytechniciens.

52À la fin de 1947, Francis-Louis Closon menace de fermer l’école compte tenu du manque de crédits accordés au recrutement de statisticiens (« un corps anémique, vidé par le haut »).

53L’échec du ministère de l’Économie nationale auquel Francis-Louis Closon s’est rallié accentue sa marginalisation.

5. Une direction du ministère de l’Économie nationale, préjudice défavorable

54Contrairement aux services du Plan et à la suggestion de Francis-Louis Closon, l’INSEE n’est pas rattaché à la présidence du Conseil mais au secrétariat d’État aux Affaires économiques le 27 novembre 1947.

55Le Plan débauche plusieurs statisticiens pour monter son propre service de conjoncture. En s’opposant fermement à ce que le budget de l’INSEE continue à verser le traitement de spécialistes mis à la disposition d’autres foyers d’études (Plan ou comptabilité nationale), Francis-Louis Closon cherche à défendre la spécificité de l’INSEE. Cette attitude contribue à dégrader ses relations avec l’administration des Finances dont il critique la politique isolationniste10. L’absence de collaboration de cette administration ou de la Banque de France se manifeste lorsqu’elles n’envoient aucun représentant à la réunion de coordination des travaux statistiques organisée par l’INSEE en juin 1949. Francis-Louis Closon rappelle alors qu’ils sont les seuls qui disposent d’informations sur le montant des chiffres d’affaires, sur les bénéfices ou sur les mouvements de fonds...

56Cette attitude participe à l’éloignement de l’INSEE des centres de la décision politique et à le cantonner à un rôle d’exécutant. Sa direction générale n’est pas informée des projets déposés à l’Assemblée nationale, elle consacre la majeure partie de son temps à négocier avec les directions ministérielles pour obtenir les données et les crédits nécessaires à l’activité de ses divisions.

6. Restrictions budgétaires

57L’INSEE est une lourde structure qui consacre 85 % de ses dépenses aux chapitres du personnel. Bien qu’il soit une des cibles privilégiées des responsables en quête d’économies budgétaires, il n’est pas représenté au Comité central d’enquêtes sur le coût et le rendement des services publics installé par le décret d’août 1946. Entre la fin de 1947 et le printemps de 1949, les rapports d’inspection présentés au Comité et l’affirmation de pratiques restrictives à finalité purement budgétaire remettent en cause l’unité de l’INSEE. Il échappe cependant au transfert de certaines tâches à d’autres directions (statistiques aux Finances, mécanographie au ministère de l’Intérieur) en regroupant une partie des équipements mécanographiques, en organisant un contrôle interne de la productivité des ateliers rigoureux, et en réduisant les travaux d’études des directions régionales.

58Les capacités de production sont encore excédentaires mais les restrictions envisagées obligent à mettre en avant la vocation technique de l’INSEE dans les discussions budgétaires. L’entretien des fichiers (des électeurs, des véhicules automobiles), l’exploitation de documents administratifs (déclarations de chiffres d’affaires), l’établissement de nomenclatures homogènes et le raccordement des administrations (numéro individuel à 13 chiffres, nomenclature des activités économiques) sont des tâches coûteuses en personnel qui exigent des crédits réguliers et prévisibles et une certaine souplesse de gestion11.

59Or, la fréquence des rectificatifs budgétaires assortie de l’interdiction d’embaucher des titulaires réduit la marge de manœuvre de la direction de l’INSEE et freine l’amélioration de la productivité. La diminution des effectifs des directions régionales les prive des éléments les plus efficaces.

60À la fin de 1947, une nouvelle réduction des effectifs (-10 %) oblige à ajourner l’identification des entreprises et le dénombrement des fonctionnaires. En février 1948, l’INSEE est informé officieusement des décisions de la commission de la guillotine qui imposent de réduire les crédits de 10 % et les effectifs budgétaires de 6 % (soit 893 postes de fonctionnaires)12.

61Francis-Louis Closon cherche alors à accélérer les procédures pour obtenir le paiement des travaux effectués pour d’autres administrations conformément au décret de juillet 1947. Le décret finit par être signé mais la direction du Budget refuse que l’INSEE puisse embaucher en contrepartie du règlement des travaux effectués pour le compte de la Sécurité sociale13 .

62Début avril, les décisions définitives qui sont notifiées sont plus restrictives que les rumeurs : l’INSEE procède à 206 licenciements parmi ses titulaires, ses auxiliaires et ses chargés de mission, ce qui représente une diminution de 24 % des effectifs présents.

63Ces restrictions sont d’autant plus fortes qu’elle restent assorties de l’interdiction d’embaucher et qu’elles s’accompagnent de l’augmentation des tarifs de locations de machines (les tarifs de la firme électro-comptable, principal fournisseur, augmentent de + 112 %) alors que les crédits de matériel sont amputés de 10 %.

64Les discussions budgétaires pour 1949 prévoient de réduire le nombre des auxiliaires de 8 % (2 957 à 2 710 en province, réduction de 10 à Paris). En janvier, Francis-Louis Closon estime que ces diminutions seront supportables mais il change d’opinion lorsque deux abattements supplémentaires (8 millions et 10,5 millions de francs) lui sont imposés par la commission des finances qui réagit à la transformation d’un crédit d’achat non utilisé en crédit d’entretien et de location de matériel. L’INSEE a été contraint de prendre ces mesures car en retenant l’année 1946 comme base de départ (100), les prix des matériels mécanographiques atteignent l’indice 352 pour les machines et 300 pour les cartes perforées, alors que les crédits correspondants ne s’élèvent qu’à l’indice 213 en 194914.

65Ces restrictions s’accompagnent de l’augmentation des travaux. En juillet 1948, le dépouillement des déclarations de chiffre d’affaires est confié à l’INSEE par la direction des Impôts qui s’engage à l’aider à défendre son budget15.

66Ainsi, à la veille de l’arrivée de Roger Goetze à la direction du Budget, pour une base 100 en 1946 et en francs constants, l’indice du budget de l’INSEE s’élève à 185, alors que les prix des matériels et des services atteignent 35016. L’effectif budgétaire prévu pour l’année 1949 doit être ramené à 3 812 personnes dont 2 990 auxiliaires, ce qui représente une diminution de 47 % par rapport à celui de janvier 1946 (7 166 agents dont 6 015 auxiliaires). Fin janvier, la direction du Budget informe l’INSEE qu’elle ne prend plus en charge les frais de métro de ses agents parisiens17.

II. ARRIVÉE DE ROGER GOETZE EN JUILLET 1949 ET PREMIERS BUDGETS (1949-1952)

67La nomination de Roger Goetze à la direction du Budget correspond à la confirmation des pratiques déflationnistes. L’INSEE est encore considéré comme un service qui peut faire des gains de productivité mais la présence de Roger Goetze et sa volonté de développer les études et d’asseoir ses pratiques sur des statistiques de qualité constituent un point favorable pour les statisticiens.

68Contrairement à son prédécesseur, il établit des relations directes avec Francis-Louis Closon et cherche à élargir sa marge de manœuvre. Ces nouvelles pratiques ne peuvent produire que des effets à moyen terme.

69Dans l’immédiat, les statisticiens sont officiellement écartés de l’élaboration des outils de la décision économique par l’inspection des Finances (création du SEEF) tandis que l’arrivée d’Antoine Pinay en 1952 entraîne des restrictions budgétaires qui vont au-delà des capacités de l’INSEE.

70Après cette date, le Budget acquiert plus d’autonomie et joue un rôle d’entité à l’égard de l’INSEE. Le retour de Pierre Mendès France au Gouvernement confirme ensuite des tendances nettement plus favorables aux statisticiens.

A. Un nouvel interlocuteur dans une conjoncture défavorable

71L’effervescence statistique évoquée par Roger Goetze lorsqu’il est nommé directeur du Budget est animée par des inspecteurs des Finances autour de François Bloch-Lainé et Claude Gruson. Elle lui profite peu puisqu’il installe un service d’études dans sa direction sans recourir à cette équipe18.

1. Le Budget devient utilisateur de statistiques

72Le nouveau bureau d’études est composé d’un agent permanent qui fait des prévisions de recettes à partir d’évaluations approximatives. La direction du Budget s’attribue ainsi une nouvelle fonction qui la fait dépasser son rôle d’exécutant des politiques budgétaires et devenir utilisatrice de statistiques.

73Son directeur est convaincu de la nécessité d’améliorer les coûteuses données exhaustives de l’INSEE car il a clairement conscience qu’elles constituent la base de toutes les estimations du Plan, de la comptabilité nationale et de la politique économique et budgétaire. Il les utilise également pour établir le bilan sur la situation budgétaire et financière qu’il communique aux entrants et aux sortants à chaque changement de ministère.

74Contrairement à son prédécesseur, Roger Goetze va prendre en compte l’importance des efforts et la qualité des études des statisticiens ainsi que l’efficacité de leurs contributions aux travaux des administrations centrales depuis 1946. Il devient ainsi un interlocuteur à part entière de Francis-Louis Closon sans intervenir dans les conflits qui l’opposent à l’inspection des Finances.

75Cette attitude ne peut suffire à elle seule à inverser les tendances défavorables aux statisticiens, mais elle permet d’atténuer les conséquences des restrictions budgétaires qui leur sont imposées.

2. Restrictions budgétaires freinées

76La marge de manœuvre du directeur du Budget est limitée par la détermination politique de réduire les dépenses publiques. Au moment de la nomination de Roger Goetze, Francis-Louis Closon précise que « l’Institut est apparu comme un réservoir d’emplois où il était normal de puiser lorsqu’il fallait répartir les économies demandées par le Parlement » mais il précise aussi que ces réductions atteignent les limites acceptables19.

77Les premiers budgets préparés par Roger Goetze montrent qu’il entend ce discours puisqu’ils entraînent une stabilisation des effectifs comme l’indique le tableau suivant20 :

Effectifs budgétaires par grade entre 1944 et 1950

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78Malgré cette évolution, le directeur général de l’INSEE n’obtient pas le nombre d’auxiliaires qu’il réclame, l’importance de l’absentéisme n’est pas compensé tandis que le maintien de l’interdiction d’embaucher empêche de contrebalancer les nombreuses démissions.

79Cependant, les ateliers régionaux peuvent encore dégager des gains de productivité puisque Francis-Louis Closon propose à la commission nationale des économies de supprimer 500 postes d’auxiliaires (dont 250 au fichier des électeurs, 185 aux statistiques régionales et 65 aux « divers dont vacances de postes ») en avril 1950.

80Il précise toutefois que la limite des sacrifices serait ainsi atteinte et que toute réduction supplémentaire obligerait à supprimer le fichier automobile ou le fichier électoral pour lequel le Parlement doit se prononcer21.

81La fréquence des rectificatifs budgétaires empêche de prévoir les crédits annuels et elle montre que les conditions de travail de l’INSEE sont totalement méconnues.

82Ainsi, alors qu’il faut deux ans pour former un statisticien, le nombre de postes ouverts aux concours de recrutement ne suffit pas à satisfaire les demandes de spécialistes22. En 1951, les crédits votés pour rembourser les frais de déplacement des enquêteurs ne sont pas débloqués avant l’hiver. La direction générale de l’INSEE est contrainte de concentrer toutes les enquêtes en fin d’année ce qui surcharge les directions régionales et nuit à l’exploitation rapide des questionnaires.

83L’incohérence de ces décisions est en partie atténuée par Roger Goetze qui autorise certains arrangements budgétaires.

3. Arrangements limités

84Par arrêté du ministre des Travaux publics, l’INSEE se voit confier officiellement le fichier automobile à l’occasion de la distribution des cartes grises en février 1950.

85Il est autorisé à recruter 65 auxiliaires en juin (sur les 87 agents réclamés). Parallèlement, la commission centrale d’économies prévoit de supprimer 500 auxiliaires. Les fiches des préfectures commencent à arriver sans pouvoir être classées (75 000 fiches chaque mois). Francis-Louis Closon réclame alors de pouvoir embaucher immédiatement 35 auxiliaires. Au bout du compte, 65 recrutements sont effectués pour tenir le fichier à Paris et ils sont compensés par le même nombre de licenciements en province. La direction du Budget a refusé d’accorder l’autorisation d’embaucher mais elle a autorisé des transferts de postes.

86Cet équilibre est ébranlé par le décret du 22 septembre 1950 qui impose à l’INSEE de licencier 235 auxiliaires au 1er octobre. Le fichier survit pourtant.

87En mai 1951, le plan d’économies budgétaires pour l’exercice 1951 prévoit de réduire le crédit initialement fixé à 20 millions de francs, ce qui représente 100 postes d’auxiliaires en moins.

88Cette fois-ci le fichier automobile ne peut plus être maintenu et Roger Goetze intervient. Il autorise le ministère de la Défense à transférer un crédit équivalent à l’INSEE pour sauvegarder le fichier23.

89Malgré ce transfert, il manque 11 millions de francs pour tenir le fichier à la fin de l’exercice 1951. Francis-Louis Closon demande à la direction du Budget de lui accorder l’autorisation de dépassement. Il obtient l’accord de principe de Roger Goetze qui accepte aussi que l’INSEE recrute la totalité des effectifs budgétaires alors que le décret du 7 juillet 1951 sur le recrutement n’autorise l’embauche d’auxiliaires que dans la limite de 90 % des effectifs budgétaires. Cet accord n’est pas suivi d’effet car les pratiques d’austérité continuent de l’emporter.

B. Confirmation des tendances antérieures

90Les premiers budgets préparés par Roger Goetze correspondent à l’affirmation de l’administration des Finances dans le domaine des études économiques et à la marginalisation de celle des Affaires économiques et de l’INSEE.

1. L’INSEE est toujours en marge

91Conformément à la proposition d’Alfred Sauvy de l’été 1947, Roger Goetze fait précéder la présentation du budget d’un rapport économique et financier. Il n’est pas opposé à ce que l’INSEE fournisse les éléments fondamentaux de ce rapport comme le suggère son directeur général. Pourtant, la commission des comptes de la Nation échappe à l’INSEE.

92En février 1950, Francis-Louis Closon déplore une nouvelle fois que l’INSEE soit tenu à l’écart des projets et des préoccupations du Gouvernement et qu’il ignore l’orientation réelle de la politique économique extérieure et de la politique intérieure d’investissement24.

93Lors de la formation du Comité des experts de la comptabilité nationale (décret du 31 mars 1950) l’INSEE ne revendique aucune fonction d’étude car il considère que les statistiques sur lesquelles s’appuient ses travaux n’ont aucune valeur scientifique.

94Roger Goetze n’intervient pas dans les débats même s’il est conscient de la déception de Francis-Louis Closon et de son mécontentement à l’égard de François Bloch-Lainé25.

95La marginalisation de l’INSEE et de sa tutelle apparaît encore plus clairement lorsqu’ils s’éloignent du centre de Paris (et de la rue de Rivoli et des centres de la décision politique) pour s’installer dans de nouveaux bâtiments.

2. Une petite question d’immeuble

96La direction générale de l’INSEE et l’école d’application sont expulsées de leurs locaux en janvier 1949. Elles doivent être installées auprès de l’administration des Affaires économiques dans un immeuble qui va être construit quai Branly.

97Au cours de nombreuses négociations qui précédent le déménagement à partir de juillet 1949, les surfaces attribuées sont régulièrement amputées26. Les locaux proposés fin janvier 1951 sont jugés trop réduits et Francis-Louis Closon s’adresse directement à Robert Buron pour qu’il intervienne dans cette médiocre question d’immeuble.

98Le directeur obtient quelques améliorations et le déménagement se déroule en juin. Les surfaces attribuées restent insuffisantes et l’absence d’avance budgétaire empêche d’organiser le transfert de la bibliothèque avant l’automne.

99Le déménagement quai Branly est un révélateur pertinent de la mauvaise position de l’administration des Affaires économiques dans les arbitrages budgétaires. Comme le montrent les chiffres de mars 1951, elle est particulièrement défavorisée : alors qu’elle représente environ 1 % de l’effectif total des fonctionnaires civils (1,2 % en 1947 et 0,76 % en 1950), le nombre des suppressions d’emplois qu’elle subit entre 1946 et 1948 représente 6,5 % du nombre total des suppressions décidées, et le nombre effectivement réalisé représente 7 % des suppressions réalisées. Le ministère des Affaires économiques a été touché en proportion 6 à 7 fois plus que l’ensemble des autres ministères27.

100Ce contexte particulièrement défavorable aux travaux des statisticiens conduit à ajourner des opérations d’intérêt national comme les recensements.

3. Le report des recensements

101En janvier 1950, la direction du Budget refuse d’inscrire les crédits nécessaires à l’impression des bulletins du ministère de l’Intérieur pour le recensement démographique prévu en 1951.

102L’INSEE commence néanmoins les travaux préparatoires lorsque la décision d’entreprendre l’opération est soutenue par le secrétariat d’Etat à la Défense nationale et par Maurice Petsche en août 1950. Comme les crédits ne sont pas prévus par le budget de 1951 ces travaux sont interrompus.

103Malgré les mises en garde de Roger Goetze, Francis-Louis Closon tente de contourner l’obstacle budgétaire en passant directement par les chambres. Il est soutenu par Robert Buron, par Tanguy-Prigent (SFIO) et par Pierre Mendès France. Le projet de loi présenté par Robert Prigent (MRP) est rejeté par l’Assemblée nationale.

104Le recensement agricole subit le même sort au printemps de 1950 puis en mars 1951, bien qu’il ait obtenu l’accord de la commission de l’agriculture de l’Assemblée à la fin de 1949.

105Ainsi, les premières années de la présence de Roger Goetze à la direction du Budget correspondent à la fois au maintien d’une politique budgétaire restrictive qui épuise les dernières réserves de l’INSEE et à la mise en place des conditions d’une amélioration future de la statistique publique.

106La gestion économique de court terme adoptée par Edgar Faure (gouvernement Faure I, janvier 1951-mars 1952) puis par Antoine Pinay (mars 1952-janvier 1953) ne modifie pas ces tendances.

III. 1953-1956, L’INSEE EST RECONNU MAIS LES CRÉDITS SONT LIMITÉS

107À partir de 1952, les négociations budgétaires prennent une importance déterminante pour l’INSEE car il ne dispose plus de capacité de production excédentaire. Pourtant, alors que les commissions des économies s’effacent progressivement, les interventions de la direction du Budget à l’égard des statisticiens paraissent moins favorables.

A. Le budget de la statistique et les gouvernements Faure et Pinay

108Les pratiques budgétaires qui caractérisent les gouvernements d’Edgar Faure et d’Antoine Pinay passent par de fortes réductions de crédits de paiement et réduisent la marge de manœuvre du directeur du Budget.

109Paradoxalement, les statisticiens trouvent de nouveaux soutiens car ils sont désormais reconnus parmi les protagonistes essentiels de la politique économique.

1. Nouveaux soutiens

110Pendant la présidence d’Edgar Faure, le partage des tâches de la comptabilité nationale est établi. Le SEEF est chargé des comptes du présent et l’INSEE des comptes du passé (décret du 18 février 1952). Francis-Louis Closon reçoit l’assurance d’Edgar Faure qu’aucune nouvelle tâche ne lui sera confiée sans crédit supplémentaire. Les administrateurs reçoivent des primes régulières et un engagement de 10 ans leur est imposé à la sortie de l’école d’application en mars 1952.

111Après le renversement d’Edgar Faure, l’élection d’Antoine Pinay surprend la haute fonction publique28. Il introduit au Gouvernement des dirigeants qui sont en marge des corps constitués et de l’inspection des Finances et qui attribuent à l’INSEE un rôle pivot dans la politique des prix. Ils choisissent de lier l’évolution du SMIG à l’indice des prix de détail des 213 articles de l’INSEE qui devient ainsi un partenaire essentiel de la politique économique et un interlocuteur à part entière des autorités politiques29.

112L’INSEE bénéficie en outre de la présence de Pierre Mendès France à la tête de la commission des comptes et des budgets économiques de la Nation. Pierre Mendès France plaide en faveur des recensements et réclame à deux reprises que les crédits nécessaires à celui de l’agriculture soient débloqués (juillet 1952, mars 1953).

113Malgré ces soutiens, le budget accordé aux statisticiens continue à diminuer.

2. Dégradations : un budget qui épuise les réserves

114En février 1952, Francis-Louis Closon précise que l’amélioration des rendements a permis d’exécuter les travaux nouveaux dans d’assez bonnes conditions jusqu’au milieu de 1951, mais que l’apparition d’un déficit en personnel en 1952 va entraîner des retards30.

115Un mois plus tard, il alerte Pierre Mendès France sur l’extrême resserrement des effectifs qui met en péril les inventaires fondamentaux, c’est-à-dire les bases des sondages et des recherches sur les éléments du compte production31.

116Pour étayer ses demandes, la direction générale de l’INSEE établit une note détaillée sur l’emploi du personnel auxiliaire (tâches manuelles et perforations) pour une exploitation normale. Elle souligne particulièrement l’ampleur et l’intérêt des travaux effectués pour les administrations des Finances et du Budget :

117Etat-civil : 155 personnes.

118Contrôle électoral : 175.

119Tenue des répertoires d’identification et de gestion : 220.

120Fichier des établissements : 348.

121Ce fichier est confié à l’INSEE par le décret du 15 juillet 1948. Il est indispensable aux administrations financières, et en particulier aux Contributions directes qui lui sont raccordées, car il leur permet de connaître les redevables des taxes sur le chiffre d’affaires. Il sert également aux études structurelles sur l’économie et constitue l’une des bases de la comptabilité nationale.

122Statistiques sur le chiffre d’affaires : 190.

123Ces statistiques sont dressées pour la direction générale des Impôts. Elles s’appuient sur l’exploitation des déclarations des redevables de la taxe sur le chiffre d’affaire et représentent la seule source disponible sur le chiffre d’affaires par activité.

124Statistiques des salaires (état 1024) : 37 personnes.

125Ces données sont établies pour la direction générale des Impôts. Elles proviennent de la déclaration des entreprises aux Contributions directes et servent à connaître la masse des salaires ainsi que ses ventilations.

126Fichier automobiles : 110 personnes.

127Recensement des agents du service public : 10.

128L’opération est entreprise pour la direction du Budget à partir des paiements des trésoriers payeurs généraux.

129Autre : 104.

130En conclusion, l’INSEE évalue ses besoins totaux à 1349 personnes, soit 1645 postes budgétaires en position normale en tenant compte d’un absentéisme de l’ordre de 18 % en moyenne. Le personnel disponible atteint 1486 personnes, ce qui signifie que les ateliers manuels ont un déficit de 159 personnes.

131Fort de ce constat, Francis-Louis Closon s’adresse à Roger Goetze pour obtenir les crédits nécessaires à la réalisation des nouvelles opérations qui sont confiées à l’INSEE (recensement des fonctionnaires ; fichier des automobiles financé par l’INSEE depuis le 1er janvier 1952 ; travaux préparatoires de la mobilisation générale et de la protection civile)32.

132La direction du Buget adresse une fin de non-recevoir ou répond par la réduction des crédits accordés aux statisticiens en missions en France et à l’étranger (diminution de 10 %).

133À l’évidence, les pratiques budgétaires et les décisions politiques ne concordent pas. Cette incohérence se manifeste par exemple lorsque la loi sur l’échelle mobile de juillet 1952 est étendue aux DOM par le décret du 20 août alors que ces départements ne disposent d’aucun service de statistique. C’est l’inspection générale des Finances qui est chargée de juger de l’utilité d’y affecter des spécialistes de l’INSEE33.

134Les discussions budgétaires qui se déroulent après le départ d’Antoine Pinay ne s’engagent pas sous de meilleurs auspices.

B. 1953 : un budget transitoire

135Le 19 mars 1953, Francis-Louis Closon obtient l’accord de Roger Goetze, de Pierre Mendès France et de Robert Buron pour titulariser les 57 chargés de mission de l’INSEE (120 en 1946). L’accord est confirmé en septembre mais la direction du Budget n’introduit aucun article relatif à cette question dans la loi de finances.

136Cette attitude conforte Francis-Louis Closon pour refuser les arrangements ponctuels auxquels l’autorise la direction du Budget. Ces arrangements constituent en effet des mesures provisoires qui ne font que reporter le règlement des problèmes de fond.

137Ainsi, il n’accepte pas le transfert de crédit proposé par le ministère de l’Agriculture pour financer la formation de statisticiens destinés aux services agricoles car il laisserait en l’état la question de l’organisation de la statistique de ce secteur.

138En juillet 1953, Francis-Louis Closon réclame à nouveau que toute amputation de personnel corresponde à l’abandon des tâches assumées par l’INSEE34.

139Les arguments avancés par le directeur de l’INSEE dans ses discussions avec le Budget soulignent l’insuffisance du personnel de certaines directions régionales et la médiocrité de la qualité des effectifs d’autres directions. Il réclame de pouvoir disposer de plus de souplesse et demande l’autorisation de recruter 50 agents supplémentaires en rappelant les services rendus par l’INSEE à la direction générale des Impôts et en précisant qu’il a obtenu l’accord de la commission Mendès France35.

140Le changement se dessine lentement à partir de 1953.

C. Embellie

141Le changement se manifeste tout d’abord par la première diminution des suppressions de postes décidées par le comité interministériel de novembre 1953.

142Dans un premier temps, l’INSEE doit effectuer 370 licenciements (crédits amputés de 300 millions) et il est prévu qu’il supprime 100 emplois de bureau sur le budget de 1954.

143Ces réductions qui obligeraient à abandonner le fichier automobile sont réduites de moitié.

144Une autre manifestation de l’amélioration de la situation des statisticiens tient à la décision d’entreprendre un double recensement (agricole et démographique) qui est adoptée au printemps de 1953. Cette décision comble une lacune importante car le dernier recensement agricole remonte à l’avant-guerre et celui de la population à mars 1946.

1. Un double recensement

145Les discussions budgétaires pour financer ces opérations prennent plus d’un an et elles sont marquées par des hésitations et des arbitrages qui montrent que ces projets coûteux ne font pas l’unanimité. Le Gouvernement envisage même de recourir à la participation financière d’organismes privés pour financer le dénombrement agricole36.

146Au printemps de 1954, il est finalement décidé que les deux recensements auront lieu en même temps en dépit des réticences du directeur de l’INSEE. Ils seront entrepris sans engagement de dépenses nouvelles et sans nouveau transfert.

147Les caisses de Sécurité sociale sont mises à contribution car elles renoncent aux cotisations versées aux agents recenseurs.

148Cependant, les crédits ne suivent pas. Au début du mois de mai, alors que l’opération démographique commence le 10, Francis-Louis Closon n’a pas reçu l’autorisation d’embaucher des vacataires. Il charge les directions régionales de mettre en paquets les documents en attendant de disposer du personnel nécessaire.

149Comme les crédits attribués s’avèrent insuffisants, l’INSEE doit renoncer à exploiter les états nécessaires aux statistiques mensuelles du chiffre d’affaires et à évaluer les salaires distribués. Toutefois, le recensement de 1954 marque un tournant majeur dans les relations entre l’INSEE et la direction du Budget car il obtient de pouvoir embaucher une partie des vacataires recrutés pour l’opération au titre de « vacataires permanents ».

150Les directions régionales disposent alors d’équipes d’enquêteurs qui se chargent des nombreux sondages entrepris.

2. 1954

151L’élection de Pierre Mendès France à la présidence du Conseil (juin 1954-janvier 1955) marque un nouveau tournant pour l’INSEE.

152Elle correspond à la présentation du rapport Malterre au Conseil économique et social (printemps 1954) qui dénonce l’absence d’inventaire de base comme l’une des lacunes les plus graves de la statistique publique française et qui l’explique par l’insuffisance notoire des finances de l’INSEE.

153Parallèlement, le recensement des exploitations agricoles est prévu par le décret du 30 avril 1954 qui est publié le 2 septembre.

154Francis-Louis Closon indique que ses collaborateurs sont prêts à effectuer l’opération à l’automne 1955. Mais il ne reçoit aucun accord du nouveau gouvernement d’Edgar Faure (février 1955-janvier 1956).

155Le directeur de l’INSEE indique alors que si le recensement ne se déroule pas à l’automne 1955, le fichier des établissements constitué au printemps sera périmé. Il précise que sa mise à jour sera aussi coûteuse que le recensement lui-même.

156Finalement, l’opération se déroule début janvier 1956 sans qu’aucun accord sur son financement n’ait été réglé.

157Roger Goetze conseille alors de limiter son exploitation à un sondage et il avertit Francis-Louis Closon que le Parlement refusera les 571 millions réclamés pour le dépouillement intégral.

158L’Assemblée rejette en effet la demande de l’INSEE en octobre 1955.

159Le manque de crédit oblige à réitérer la pratique de l’Occupation qui consiste à faire remplir les questionnaires dans les mairies.

160Cependant, le directeur du Budget informe l’INSEE que des crédits budgétaires spéciaux vont lui être attribués pour qu’il s’équipe d’un matériel moderne de dépouillement et d’exploitation des résultats du recensement.

161En novembre 1955, des spécialistes de l’INSEE font une étude de marché pour choisir le premier calculateur électronique introduit dans l’Administration française (CAB 3026 à ruban magnétique et à impression directe de tableaux sur microfilm).

162Le matériel est acheté lorsque les 120 millions de francs nécessaires sont débloqués juste après le départ d’Edgar Faure par le gouvernement de Guy Mollet (janvier 1956-juin 1957).

163Ces largesses budgétaires ne se produisent pas pour financer l’exploitation du recensement démographique.

164En mars 1956, les crédits accordés pour l’année en cours sont réduits de 422 millions. Bien qu’elles soient révisées à la baisse (200 millions), ces restrictions empêchent d’achever l’exploitation du recensement démographique.

165Francis-Louis Closon n’obtient pas les crédits nécessaires (149 millions) pour traiter les données en attente. Il précise que cette somme est fortement majorée par la nécessité de réembaucher et de former de nouveaux auxiliaires.

166Comme le Budget ne la débloque pas, l’exploitation de l’opération doit être limitée à un sondage au vingtième dans la région parisienne où seulement 38 % des bulletins sont chiffrés.

167Ainsi, lorsque Roger Goetze quitte la direction du Budget, les crédits accordés aux statisticiens restent très serrés.

3. Bilan

168La comparaison des effectifs réels de l’INSEE (3020 à 2488 entre 1950 et 1959) et de ceux du SEEF (113 en 1953, 135 en 1957 et 153 en 1959) montre que la situation des statisticiens est beaucoup plus défavorable que celle du personnel des services rattachés à l’administration des Finances37.

169Dans une note adressée au secrétaire d’État aux Affaires économiques, Francis-Louis Closon précise en août 1957 qu’il lui est « impossible de recruter et de maintenir des collaborateurs de classe dans le statut administratif présent car ils font la fortune des entreprises privées qui débauchent les meilleurs espoirs d’une administration encore jeune où chaque unité compte38 ».

170Ce propos est assorti de la comparaison des rémunérations dans l’industrie et à l’INSEE d’une promotion de polytechniciens significative.

171Un polytechnicien sorti d’une grande école depuis six ans gagne 90 000 F par mois à l’INSEE, ce qui est moins qu’un monteur de radiateurs ou un bon comptable.

172D’une façon générale, le bilan dressé par Francis-Louis Closon indique que « les milieux administratifs étaient ironiques, parfois méprisants. Les moyens de l’INSEE paraissaient énormes eu égard aux services rendus. En un mot, la réputation était mauvaise, la propagande de l’INSEE inexistante, et quelle que fût la vague d’économie qui déferlât sur l’Administration française, l’Institut était le premier visé39 ».

173La nomination de Claude Gruson à la direction générale de l’INSEE met un terme à cette période. Elle montre à la fois la reconnaissance et l’acceptation de l’INSEE par l’inspection des Finances et la réconciliation de la statistique et de la comptabilité nationale40.

174Contrairement au projet de Francis-Louis Closon qui suggérait de créer un INSEEF, l’INSEE réformé en 1961 n’est pas un établissement public et il ne bénéficie d’aucune autonomie financière.

175La réforme adoptée confirme en revanche le choix politique de 1946 qui place la statistique publique parmi les services de l’État et qui la fait dépendre des pratiques de la direction du Budget.

176Il a fallu beaucoup de ténacité et de volonté aux magistrats du chiffre qui ont eu la responsabilité des statisticiens et du Budget public pendant la IVe République pour démarquer leurs services de leurs rôles d’exécutants. En défendant cette conception, Francis-Louis Closon et Roger Goetze ont incontestablement contribué à la modernisation de la gestion des affaires publiques.

Notes de bas de page

1  Henri Bunle est entré à la SGF en 1907.

2  Francis-Louis Closon, entretien à son domicile, Paris, mai 1995.

3  Michel Volle, Histoire de la statistique industrielle, Economica, Paris, 1982, 302 pages, p. 36.

4  SAEF, H 1574, n° 1132/C, 2 décembre 1947, lettre de Francis-Louis Closon à Alfred Sauvy, 7 pages. « Je n’ai d’autre domus que les affaires de l’État, ma tâche est de mettre de l’ordre, d’augmenter la productivité des services qui me sont confiés. Cela ne va pas sans difficulté ni opposition : ma conviction est solidement établie que rien de neuf ne se fait sans heurter les habitudes, sans exciter les critiques, sans agacer les imaginations. »

5  Roger Goetze, cassette du Comité pour l’histoire économique et financière de la France (CHEFF).

6  Francis-Louis Closon et Jçan Filippi, L’Économie et les Finances, coll. l’Administration française, PUF, Paris, 1968, 515 pages, p. 493. A propos du ministère de l’Économie nationale : « La formule a du souffle et de l’élan ».

7  Roger Goetze et Claude Gruson, cassettes CHEFF.

8  SAEF, H 1574, n° 112/C, 29 janvier 1947, note de Francis-Louis Closon au ministre de l’Économie nationale dénonçant le fait que l’INSEE n’ait pas été contacté lors de la création du Conseil supérieur de la comptabilité nationale (décret du 16 janvier 1947).

9  En mars 1948 par exemple, la direction du Budget s’oppose au premier projet de loi sur l’organisation de la statistique publique présenté par l’INSEE un an auparavant car il le soustrait aux droits de communication dévolus aux Régies financières.

10  SAEF, H 1574, n° 179/C, 23 avril 1947, compte rendu de la réunion des directeurs régionaux des 22-23 avril 1947, 24 pages. Intervention de Francis-Louis Closon : « La plupart des directions du ministère des Finances dominées par un esprit aussi archaïque que celui qui régnait à la Statistique générale ne veulent pas considérer les besoins généraux de la Nation qui les dépassent quelque peu. »

11  SAEF, H 1574, n° 996/C, 8 octobre 1947, note de Francis-Louis Closon sur le problème du corps interministériel des statisticiens. Il dénonce « la politique à la petite semaine qui oblige à mener une action par bribes selon les occasions que l’on a d’arracher des crédits » et réclame plus d’autonomie financière.

12  SAEF, H 1575, n° 228/C, note de Francis-Louis Closon au sujet des difficultés d’action de l’INSEE. Les réductions de crédits de personnel pour l’ensemble des Affaires économiques, dont l’INSEE constitue le poste le plus dépensier après le Contrôle économique, ne sont que de 3,44 %.

13  SAEF, H 1575, n° 297/C, 12 mars 1948, note de la direction du Budget à Francis-Louis Closon.

14  SAEF, H 1578, n° 681/920, 5 novembre 1950, note du cabinet de l’INSEE sur l’évolution du budget depuis 1945. En mai 1949, la direction générale de l’INSEE constate que l’achat de matériel est plus intéressant que la location. Mais l’acquisition de matériel n’est pas autorisée et FINSEE est contraint de s’équiper auprès de la firme qui propose des locations aux dépens de Bull dont les tarifs sont moins élevés à la vente.

15  SAEF, H 1575, n° 875/C, 25 août 1948, note du cabinet sur la réunion présidée par P. Delouvrier, directeur général des Impôts

16  SAEF, H 1578, n° 681/920, 5 novembre 1950, note du cabinet de l’INSEE sur l’évolution du budget depuis 1945.

17  SAEF, n° 1576, n° 111/C, note de service, 17 janvier 1949.

18  Roger Goetze, cassette CHEFF.

19  SAEF, H 1576, 8 mars 1949, note de Francis-Louis Closon sur les difficultés d’action de l’INSEE.

20  Non signé, « Étude sur l’évolution des effectifs et des crédits de l’INSEE en 1949 », Bulletin d’information, INSEE, septembre-octobre 1950, n° 8, 87 pages, p. 17à21, p. 21.

21  SAEF, B 55 472, n° 426/Cab, 26 avril 1950 réponse de Francis-Louis Closon à la commission d’économies.

22  SAEF, H 1576, n° 839/C, 28 juillet 1949, note de Francis-Louis Closon au ministre des Finances sur le recrutement des statisticiens, 8 pages. En juillet 1949, sur un effectif budgétaire de 113 administrateurs et de 87 attachés, 38 sont détachés (22 administrateurs et 16 attachés). Le budget de 1950 prévoit des détachements supplémentaires alors que le nombre de postes ouverts aux concours de recrutements de l’INSEE (administrateurs et attachés) n’est pas augmenté.

23  SAEF, B 55 499, n° 706/920, SNS-INSEE, incidence des mesures générales d’économies, 16 novembre 1951, note de Francis-Louis Closon pour la direction du Budget.

24  SAEF, H 1577, 17 février 1950, rapport de Francis-Louis Closon au secrétariat d’État aux Finances et aux Affaires économiques, 6 pages.

25  Roger Goetze, cassette CHEFF.

26  SAEF, H 1578, n° 4/920, note de Francis-Louis Closon pour le cabinet du secrétaire d’État aux Affaires économiques dénonçant la proposition du précédent cabinet qui suggérait d’organiser les cours de l’école d’application dans les locaux de la direction générale de l’INSEE et en dehors des heures de bureau.

27  SAEF, H 1578, n° 224/920, 22 mars 1951, note de Francis-Louis Closon pour Jacques Dumontier.

28  Roger Goetze, cassette CHEFF.

29  L’indice des prix de détail de l’INSEE est choisi comme pivot de l’évolution du SMIG en juillet 1952.

30  SAEF, H 1578, n° 89/920, 19 février 1952, note de Francis-Louis Closon sur la charge de travail de l’INSEE.

31  SAEF, H 1578, n° 152/920, 25 mars 1952, note de Francis-Louis Closon à Pierre Mendès France, 3 pages.

32  SAEF, H 1578, n° 172/920, 2 avril 1952, note de Francis-Louis Closon à Roger Goetze.

33  La décision de monter un service de statistique à Fort-de-France ne sera prise qu’en 1958.

34  SAEF, B 55 499,, n° 385/920, 20 juillet 1953, Francis-Louis Closon au directeur de cabinet des Affaires économiques, SNS-INSEE, incidence des mesures générales d’économies.

35  SAEF, B 55 423, n° 168/920, note de Francis-Louis Closon du 19 mars 1953 pour le ministre des Affaires économiques.

36  SAEF, H 1579, n° 410/920, 26 août 1953, note de Francis-Louis Closon pour le secrétaire d’État aux Affaires économiques.

37  SAEF, B 55 499, SNS-INSEE, incidence des mesures générales d’économies.

38  SAEF, H 1581, n° 358/920, 1" août 1957, note de Francis-Louis Closon pour Émile Hugues, secrétaire d’État aux Affaires économiques sur la Situation de l’INSEE.

39  Francis-Louis Closon, Souvenirs, Bulletin de / 71/5’, janvier-juin 1958, n° 33-34, p. 35 à 37.

40  Claude Gruson, cassette du CHEEF : « le sort de Closon est assez lamentable car l’INSEE est la cible du Budget qui ne peut se débarrasser de titulaires et sacrifie les études... Le Budget n’avait aucune idée de ce qui pouvait être l’information économique, ce qui touche la modernité lui échappe. »

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