RCB et sécurité routière : brève histoire d’un choc de raison
p. 303-318
Texte intégral
1À trente ans d’intervalle, vers 1970 puis vers 2000, l’action publique de sécurité routière (APSER) a connu deux « chocs de rationalisation ». Nous n’évoquerons ici que le premier car la RCB en constitue la principale matrice1. Pourquoi parler de « choc de rationalisation » ? Disons que le changement dans l’APSER, comme dans bien d’autres domaines d’action publique, correspond raisonnablement bien au modèle de « l’équilibre ponctué » élaboré par Baumgartner et Jones2 dans le domaine des politiques publiques en s’inspirant du modèle du même nom concernant le changement organisationnel et proposé par Romanelli et Tushman3. Ce modèle stipule que pendant de longues périodes une action publique spécifique évolue de façon incrémentale au gré d’ajustements mutuels partisans tâtonnants entre acteurs rationnellement limités à propos des objectifs à poursuivre, des moyens à allouer et des effets à escompter4. Mais ce régime d’évolution à la marge est de temps en temps ponctué de courtes périodes de changements brusques, radicaux portés par des acteurs particulièrement entreprenants, opportunistes et agiles, et réussissant de ce fait à imposer des innovations majeures.
2Les bouleversements survenus au tournant des années 1970 dans l’APSER du fait d’un catalyseur nommé « démarche RCB » sont d’ordre constitutif. C’est en effet à partir de 1970 que commence à exister en France une véritable politique gouvernementale nationale de sécurité routière rassemblant de façon réfléchie tout un ensemble de mesures jusque-là éparpillées. Ainsi, jusqu’en 1970, la communication grand public en matière de prévention des accidents de la route était l’apanage de cette grande association de loi 1901, la Prévention routière, rattachée à la Fédération française des sociétés d’assurance (FFSA), et toujours existante aujourd’hui. En 1970, le gouvernement prend en main sa propre communication en matière de sécurité routière afin de légitimer des mesures5 que précisément les mondes de l’assurance et de la construction automobile rejettent de manière plus ou moins véhémente : limitations réglementaires des vitesses en rase campagne, contrôle technique des véhicules, lutte assumée contre l’alcool au volant, équipement des sièges avant de ceintures de sécurité. Notons par ailleurs qu’à la fin des années 1960, la direction des Routes du ministère de l’Équipement souhaitait instrumentaliser la sécurité routière afin de justifier un ambitieux programme de construction autoroutière. La nouvelle politique de sécurité routière a écarté explicitement cette option, signe supplémentaire de son affirmation en tant que politique publique spécifique désormais peu contingente par rapport à d’autres structures publiques et privés d’intérêts6.
3Voyons maintenant comment les choses se sont passées et en quoi le mouvement politico-administratif répondant au nom de RCB a joué un rôle déterminant dans cette courte période clé de l’APSER7.
RCB, Plan et ingénierie publique
4Dans les années 1960, la science économique française, en sécession par rapport aux facultés de droit, prend le pas sur la science juridique, jusque-là hégémonique comme outil d’aide à la décision publique8. D’une certaine manière, la RCB incarne cet esprit de conquête animant la communauté des économistes. Cependant, l’éclosion de la RCB au sein de la sphère gouvernementale nationale traduit aussi une lutte feutrée entre deux types de sciences économiques à usages gouvernementaux.
5D’un côté, nous avons la modélisation macro-économique qui sert de base rationnelle au processus de planification piloté par le Commissariat général au Plan (CGP) et ses commissions. Aux yeux des départements ministériels comme de la direction du Budget et la direction du Trésor (amputée du service des Études économiques et financières [SEEF] et donc de la direction de la Prévision en 19659), l’outil macroéconomique manque de finesse pour donner un caractère tranchant au processus de planification. En conséquence, le CGP est de plus en plus perçu comme un lieu de plaidoiries efficaces pour les compartiments « dépensiers » de l’État10.
6De l’autre côté, nous trouvons une science micro-économique florissante qui marie de façon innovante et pragmatique les principes du calcul économique des projets d’investissement publics, l’analyse coûts-bénéfices, l’analyse de systèmes, les méthodes de recherche opérationnelle, les modèles de choix multicritères combinés à des analyses probabilistes de risque, etc. Techniquement, la RCB agglomère tout cela et promet l’instauration d’un second système de planification bien plus tranchant et rigoureux que celui animé par le CGP. Cette dynamique alter-planificatrice peut d’autant plus facilement se développer que depuis 1962 le Plan a été détaché des Finances pour être rattaché à Matignon. Un lien plus direct peut ainsi s’établir entre le ministère des Finances et les ministères que la direction du Budget qualifie aimablement de dépensiers.
7La question de la reddition rationnelle d’arbitrages entre projets d’investissement public se présente avec une acuité toute particulière au sein des ministères des Transports et des Travaux publics et, après fusion des deux en janvier 1966, au sein du grand ministère de l’Équipement. Pour le transport de marchandises faut-il investir de préférence dans le rail, la route ou le fluvial ? Faut-il d’abord construire le RER A ou le B ? Faut-il vraiment concevoir et construire avec nos amis d’outre-Manche un avion civil supersonique ? Ces choix publics se révèlent d’autant plus cornéliens qu’ils mettent en jeu des volumes considérables d’argent public (microéconomie de macro-budgets !). Habitués à ces situations de choix difficiles, les ingénieurs des Ponts et Chaussées, formant le principal corps de hauts fonctionnaires des ministères précités, ont depuis longtemps sécrété une science micro-économique pouvant faciliter les arbitrages après calcul. On connaît Jean Tirole, prix Nobel d’Économie 2014, digne héritier de cette filière académique des ingénieurs des Ponts et Chaussées. On se souvient peut-être moins de l’initiateur de la filière, Jules Dupuit, qui dès les années 1840, dans les Annales des Ponts et Chaussées, s’est évertué, avec succès, à construire un cadre théorique et une méthodologie de mesure de l’utilité des travaux publics11. Après la Seconde Guerre mondiale, que cela soit au sein du corps des Mines ou du corps des Ponts et Chaussées, ce que l’on appelle le « calcul économique »12 revient au centre des pratiques des ingénieurs publics qui doivent trouver comment allouer de façon optimale des moyens budgétaires rares. Les revenus de l’impôt ne pouvant subvenir à tout, le calcul économique permet également de s’interroger sur le montant des taxes et autres redevances à l’usage. Enfin, l’industrialisation aidant, la préoccupation environnementale pointe aussi à l’horizon du calcul économique français, notamment dans le domaine des schémas de financement des infrastructures de traitement des eaux usées d’origine industrielle.
8Bref, le lancement de la RCB en 1968 donne surtout le signal d’un impératif de généralisation et de mise en ordre administratif de pratiques calculatoires déjà mûres dans certaines administrations techniques de l’État. L’existence du PPBS outre-Atlantique à partir de 1965 a principalement servi d’exemple légitimant auprès du ministre et du ministère des Finances une démarche qui sur le fond faisait partie depuis longtemps de la boîte à outils des ingénieurs publics français. On comprend mieux ainsi pourquoi la fin programmée du PPBS dès l’entrée de Richard Nixon à la Maison-Blanche, début 1969, n’a nullement remis en cause l’envol de la RCB. Il ne faut pas non plus négliger le fait que, dans le grand ministère de l’Équipement né en 1966, la démarche RCB est envisagée comme un outil de gouvernance globale non seulement intravertie (exemple de l’arbitrage entre rail et route), mais aussi extravertie. Car les grands corps de l’ENA ne maîtriseront jamais l’outil aussi bien que les X‑Ponts, lesquels resteront donc ainsi maîtres chez eux13. Le calcul économique procède donc aussi d’un calcul politique : l’énorme appétit d’investissement des différentes et nombreuses branches du ministère de l’Équipement sera d’autant mieux assouvi que, outre la voie classique du Plan, il emprunte aussi la voie RCB. C’est pourquoi, dès que Michel Debré, ministre des Finances, a donné son onction pour prétendument « importer » le PPBS américain, le ministère de l’Équipement, bon élève, s’est proposé comme pilote et expérimentateur de la démarche.
9Mais comment donc la thématique spécifique de la sécurité routière a-t-elle été choisie comme terrain d’expérimentation de la RCB ?
La sécurité routière, terrain d’expérimentation de la RCB
10La direction des Routes du ministère des Travaux publics a commencé à s’intéresser aux accidents de la route à partir du début des années 1950. Sous l’impulsion du premier Plan (1947-1953) et avec l’argent du Plan Marshall, l’industrie automobile nationale se restructure, se modernise et fait de l’automobile un bien de consommation de masse, ce qui engendre une montée en flèche des accidents de la route et donc des interruptions de la circulation. L’industrialisation du pays augmente très fortement le transport routier de marchandise, entraînant non seulement des accidents routiers mais également une détérioration physique rapide, jamais vue jusqu’à lors, des routes. À la direction des Routes, on comprend donc très vite que sécurité routière, d’une part, et gestion et développement durable du réseau routier, d’autre part, convergent. Avec l’arrêt de la manne Marshall en 1953, cette convergence devient encore plus évidente. La direction des Routes réussit en 195514 à s’imposer comme l’expert national de la sécurité routière15, en même temps qu’elle lance un premier « cycle [annuel] d’études sur la rentabilité des investissements routiers »16. C’est de ces cycles d’études qu’émergera progressivement le calcul de la « valeur tutélaire du mort » (fixée en 2017 à 3 millions d’euros). Parlant des accidents de la route, son directeur, l’ingénieur des ponts et chaussées Roger Coquand17, écrit en introduction du premier bilan national de sécurité routière en 1953 : « On les a justement comparés à un fléau et si l’on veut pouvoir le réduire, il faut d’abord dresser, sur des informations dûment contrôlées, un bilan complet et l’analyser avec la plus grande objectivité. C’est ce que s’efforce de faire le MTP [ministère des Travaux publics] qui est chargé d’établir la statistique de ces accidents avec l’indispensable collaboration des services de la Gendarmerie, de la Sûreté nationale et de la Préfecture de Police. Cependant, devant l’importance croissante de ces questions, il a semblé nécessaire de donner à ces résultats la plus large diffusion possible ; ils pourront ainsi servir de base à l’action que mènent, dans leur sphère respective, ingénieurs et techniciens de la circulation, officiers de police, éducateurs et propagandistes ». Cependant, la guerre budgétaire fratricide avec les ingénieurs des Ponts pro-rail ne faiblit pas. Ainsi, en 1958, le rapport de la sixième section, ferroviaire, de la commission Transports du IIIe Plan (1958-1962), débute de façon méchamment ironique et défiante en mettant côte à côte l’année 1957, catastrophique pour la SNCF avec plusieurs accidents ayant tué au total 70 personnes, et la même année sur les routes avec près de 10 000 morts ! En comparant les performances respectives du rail et de la route en termes de mortalité des usagers, les pro-rail savent qu’ils appuient « là où ça fait mal » chez les pro-route. Notons que parallèlement à la commission des Transports, celle des « industries de transformation », dans laquelle siègent les constructeurs automobiles, demande explicitement à l’État d’investir massivement dans l’aménagement routier urbain (notamment les autoroutes urbaines comme aux États-Unis), par exemple en désinvestissant le transport ferroviaire comme à Los Angeles18.
11Afin, inter alia, de réguler ce conflit permanent entre fer et goudron et de l’empêcher autant que faire se peut de se poursuivre dans les salons du Commissariat général au Plan, le ministère des Transports procède à deux innovations institutionnelles. Primo, est mis sur pied en 1959 l’Organisme national de sécurité routière (ONSER). Il s’agit d’une association de loi 1901 d’utilité publique qui, malgré des liens institutionnels et budgétaires évidents avec la direction des Routes (DR), n’en est pas moins distincte du « service d’études et de recherches sur la circulation routière » (SERCR) de cette dernière, service au sein duquel l’exploitation patrimoniale de l’infrastructure routière importait autant que la sécurité des usagers de la route19. L’idée consiste donc à constituer un pôle d’expertise en sécurité routière pour le ministère des Transports intellectuellement indépendant de la DR. Son premier directeur et fondateur, Serge Goldberg20, ne vient d’ailleurs pas de la DR. C’est un X‑Ponts titulaire d’un master of city planning de l’université de Yale, justement choisi pour capter de l’expertise à l’étranger (Grande-Bretagne, États-Unis, pays scandinaves, essentiellement).
12Secundo, est adjoint en 1960 au cabinet du ministre un « service des affaires économiques et du Plan » (SAEP). D’abord cantonné au domaine des transports, le SAEP s’étoffera après 1966 pour devenir le SAEI qui s’occupera aussi du développement urbain (foncier, logement, services urbains, écoles, etc.). Employant une grosse soixantaine de personnes, le service des Affaires économiques et internationales, interlocuteur privilégié du CGP, de la direction de la Prévision et de l’INSEE sera par la suite le lieu d’introduction des méthodes américaines de gestion dans les services de l’Équipement et animera ainsi les opérations de RCB. C’est pourquoi il ne sera pas supprimé en 1968 en dépit du ralliement d’une partie de ses membres à l’insurrection estudiantine de mai et juin21. Sur le plan de la pacification entre rail et route au sein du corps des Ponts et Chaussées, la création du SAEP porte lentement ses fruits. En effet, ce n’est que le 25 septembre 1964 que le SAEP officialise une première synthèse des cycles d’études évoqués plus haut et ce, sous la forme d’une « Instruction provisoire sur les calculs de rentabilité appliqués aux investissements routiers ». La publication de cette instruction démontre que le cabinet du ministre des transports et la DR sont proches d’un accord solide sur les termes du calcul économique à déployer sur les projets routiers, y compris pour tenir compte de cette externalité négative majeure que constituent les accidents matériels et corporels de la route.
13On peut considérer qu’à ce moment-là tout est prêt pour le lancement d’une grande étude RCB de sécurité routière. Mais nous ne sommes qu’à la fin de l’année 1964 : la RCB n’existe pas encore et le PPBS est tout juste en train de sortir du cocon du département de la Défense américain pour être généralisé à toute l’administration fédérale ! Quelques étapes restent donc à franchir. L’Histoire va néanmoins s’accélérer, notamment sur son volet international.
14Tout d’abord, en 1965, un jeune et brillant avocat et activiste du nom de Ralph Nader publie un livre très bien documenté : Unsafe at any speed22. Ce livre montre avec force détails comment les constructeurs automobiles américains négligent la sécurité des usagers de la route (conducteurs, passagers, piétons…) et comment les pouvoirs publics de tous niveaux sont alignés sur cette position négligente et donc meurtrière. Unsafe at any speed et les nombreuses et très médiatiques conférences de présentation données par son auteur aboutissent rapidement à mettre la sécurité routière sur l’agenda gouvernemental (et scientifique) national avec comme conséquence en 1966 la création de la National Highway Traffic Safety Administration (NHTSA) doté d’un ambitieux programme intégré de recherches biomécaniques et statistiques, ainsi que le vote du National Traffic and Motor Vehicle Safety Act. Toujours en 1966, mais plus proche de la France, outre-Manche, la ministre britannique des transports, Barbara Castle, a en effet obtenu de haute lutte contre les constructeurs et les sociétés d’assurances le vote d’un « road safety act » s’attaquant aux accidents de la route de façon très complète23. Les expérimentations sur lesquelles la mise en œuvre de cette loi doit se fonder laissent entrevoir une amélioration très significative de la sécurité routière.
15Le fait que la première puissance automobile mondiale et la Grande-Bretagne mettent concomitamment sur pied de grandes politiques spécifiques de sécurité routière, s’appuyant explicitement sur des recherches scientifiques, ne peut pas, bien entendu, laisser indifférente la branche Transports du ministère de l’Équipement français né le 1er janvier 1966. Est-ce cela qui induit la décision de lancer en 1967 une étude pilote RCB se focalisant sur la thématique de la sécurité routière ? Oui, mais le processus s’avère moins mécanique qu’on pourrait le penser.
16En effet, parallèlement au mûrissement de l’idée d’établir un système RCB présenté comme raisonnablement inspiré du PPBS américain, quelque chose d’important se passe dans la sphère transports. L’X‑Ponts Gilbert Dreyfus24, directeur de cabinet du secrétaire d’État chargé des Transports, André Bettencourt, prend au printemps 1967 les rênes de la direction des Routes et de la circulation routière (DR). Contrairement à son prédécesseur René Coquand – qui a mis en administration publique la thématique de la sécurité routière d’abord via les statistiques, puis la constitution de l’ONSER –, Gilbert Dreyfus (1916-2007) entreprend deux démarches. Primo, utiliser l’argument de la sécurité routière pour mieux budgétiser les aménagements routiers. Une part significative de ces derniers (rectification de tracés, élargissement des chaussées ou de bas-côtés, etc.) se retrouvent versés de façon souvent forcée dans le cadre d’une « politique de résorption de points noirs » fondée sur la théorie d’action selon laquelle beaucoup d’accidents de la route proviennent d’erreurs et non pas de fautes de conduite et donc qu’une bonne infrastructure pourra briser le lien causal erreur/accident25. Secundo, utiliser l’argument de la sécurité routière pour justifier la construction d’autoroutes reliant les pôles urbains du pays, dans le cadre d’une politique d’aménagement du territoire où le rural ne compte plus pour grand-chose26. Infrastructures à flux séparés, les autoroutes sont beaucoup plus sûres que les autres types de routes.
17Courant 1967, à côté de ce projet d’instrumentalisation de la sécurité routière, la direction du Budget du ministère des Finances et le SAEI du ministère de l’Équipement arrêtent officieusement trois secteurs d’intervention pour faire l’objet d’études pilotes de RCB27 : les centres urbains, l’urbanisation périphérique et la sécurité routière. Il s’agit, selon Hubert Lévy-Lambert et Henri Guillaume, « d’une part de tester la validité de la démarche générale d’une étude RCB et d’autre part d’appliquer un ensemble ordonné de techniques économiques à l’éclairage des décisions »28. Pour ces deux auteurs qui travaillent à la direction de la Prévision du ministère des Finances, le choix d’appliquer la RCB à la sécurité routière répond à plusieurs considérations : la sécurité routière concerne tout le monde, elle ne constitue pas un enjeu politique pour un parti, elle n’est pas non plus investie par des intérêts privés et des groupes de pression (ce qui est pour le moins discutable). De plus, la circulation routière constitue un système complexe. Des études et recherches sont disponibles et n’ont pas été utilisées pour une action publique. C’est pourquoi il est possible d’obtenir des résultats rapidement29.
18Deux projets de politique de sécurité routière cohabitent donc en 1967. L’un, plutôt ministériel, car porté par la direction des Routes (DR), entend faire de la sécurité routière une politique d’accompagnement d’un vaste programme routier et autoroutier. L’autre, plutôt interministériel, puisque porté par la direction du Budget et le SAEI, cherche à faire de la sécurité routière une politique interministérielle autonome et emblématique du nouveau « régime RCB » de gestion publique. Pour des raisons assez évidentes, le premier prend rapidement de l’avance sur le second. En effet, la DR domine l’action publique de sécurité routière, elle dispose notamment des services experts de l’ONSER et de l’appui du secrétaire d’État chargé des Transports. De plus, le plan de déploiement de la RCB n’est pas encore tout-à-fait bouclé en 1967.
19En octobre 1967, c’est officiel, la DR prépare, à la demande conjointe des administrations de l’Équipement, de l’Intérieur et de la Défense (pour la gendarmerie nationale), un programme d’action sur la sécurité routière intitulé le « dossier bleu ».
Le « dossier bleu » de la DR sur la sécurité routière
20Le programme d’action sur la sécurité routière porte sur les éléments du système de la circulation routière (infrastructure, véhicule et usager) et utilise les méthodes modernes de préparation des décisions : établissement des coûts/avantages des politiques publiques possibles comprenant les dépenses monétaires, la satisfaction des usagers, les coûts sociaux.
21Par la conjugaison des expertises du SERCR (service d’études et de recherches sur la circulation routière) et de l’ONSER, les mesures proposées dans ce « dossier bleu » concernent surtout le conducteur dont on espère modifier le comportement au moyen d’une information soutenue et de la réglementation : régulation du trafic routier, contrôle technique des véhicules, secours aux accidentés, suspension du permis de conduire des conducteurs en cas de grande infraction, limitation de vitesse, répression de l’alcool au volant, information des usagers de la route.
22Le programme d’action sur la sécurité routière défini par le SERCR et l’ONSER tend à la mise en place d’une politique publique concertée avec l’ouverture d’une table ronde envisagée initialement en novembre 1967 – le rapporteur général devant être le directeur du SERCR – et la publication en juin 68 d’un livre blanc intégrant les apports de la recherche et les conclusions de la table ronde.
23Le « dossier bleu » est donc remis par les ministères intéressés (Équipement, Intérieur et Défense) au président de la République lors du conseil des ministres le 8 mai 1968. Cependant, deux mois plus tôt, le SAEI a lancé officieusement l’étude RCB qui sera entérinée en conseil des ministres en avril 1968 à des fins d’aide à la décision. Plus précisément, il s’agirait de déterminer les goulets d’étranglement entravant l’action de l’État et définir les seuils au-delà desquels le pouvoir politique jugerait l’action inacceptable30. D’après celui qui a été choisi pour conduire l’étude RCB, le jeune X‑Ponts Michel Ternier31, il s’agissait également de dissocier clairement le chantier d’élaboration d’une politique interministérielle intégrée de sécurité routière de la politique routière et autoroutière menée par la direction des Routes et de la circulation routière, cette dernière politique suscitant logiquement moult réserve à la direction du Budget du ministère des Finances.
24En apparence donc, l’étude pilote RCB de sécurité routière n’entre ni en concurrence, ni en porte-à-faux par rapport au « dossier bleu ». Cependant, son portage par le SAEI et non par la direction des Routes pourtant institutionnellement « primo-compétente » est lourd de sens gouvernemental.
L’étude pilote de préparation rationnelle des décisions administratives
25Au niveau gouvernemental, l’opération RCB est lancée le 4 janvier 1968 par Michel Debré qui précise que la RCB diffère du PPBS par l’abandon du principe de l’autoritarisme centralisé qui caractérise le PPBS. Le décret du même jour introduit des techniques nouvelles de gestion à base de calcul économique et d’analyse de système.
26Les évènements de mai et juin 68, bien qu’ils ébranlent fortement les réseaux gaullistes au gouvernement (départ de Michel Debré et arrivée du plutôt pompidolien François-Xavier Ortoli au ministère des Finances en juin) ne remettent pas en cause l’étude RCB de sécurité routière. Ils en retardent juste la mise en œuvre de quelques semaines, principalement du fait de l’agitation suscitée au sein du SAEI même. Pour conduire l’étude dont la première phase est réalisée de juillet 1968 à mars 1969, le SAEI a donc constitué autour d’un jeune ingénieur des Ponts et Chaussées, Michel Ternier, une équipe d’une demi-douzaine de personnes, certaines détachées de la direction de la Prévision, d’autres déjà en poste au SAEI. Après une première prise de contact logiquement glaciale avec le directeur des Routes et celui de l’ONSER, ce dernier accepte à contrecœur institutionnel l’idée de mettre à disposition de l’équipe du SAEI quelques-uns de ses agents (dont le psychologue Jean L’Hoste, un des auteurs du livre P.-E. Barjonnet et al., op. cit.). Des chercheurs intègrent donc l’équipe, ce qui entraîne la mise en œuvre d’une approche clinique multidisciplinaire et une analyse multifactorielle des accidents de la route. On retrouve là l’influence de l’étude clinique sur les accidents que l’ONSER a menée de 1966 à 1969 avec la participation de professionnels de la santé publique. S’ajoutent enfin à l’équipe des représentants des ministères concernés par la sécurité routière (Justice, Défense, Intérieur, et Équipement bien sûr), ce qui permet d’analyser le fonctionnement des institutions. Considérant la circulation routière comme un système comprenant divers éléments (les individus, les automobiles, les infrastructures, etc.), l’accident apparait comme le résultat du dysfonctionnement de ces différents éléments en interaction constante. Dès lors, la démarche entreprise consiste à : circonscrire et décomposer le problème de façon cartésienne, réfléchir sur les finalités des actions menées pour réduire les conséquences des accidents de la route, analyser les bilans coûts/avantages des actions déployées, élaborer des politiques alternatives par combinaison de ces actions, réfléchir sur les critères d’évaluation de l’efficacité de ces politiques32. La structure du programme peut être appréhendée comme un effort de classement des différentes actions inventoriées en spécifiant les objectifs concrets, en les hiérarchisant en soulignant les liaisons entre les uns et les autres.
27Les principales mesures d’action répertoriées ont été analysées à partir de plusieurs critères : coût budgétaire de lancement, effets budgétaires indirects, efficacité, coût pour la collectivité, popularité33. Sans surprise, elles concernent l’infrastructure (aménagement des points noirs, signalisation horizontale, lutte contre le verglas), le véhicule (généralisation de la ceinture de sécurité) et le conducteur (ciblage des comportements à risque (alcool, vitesse, etc.), formation, information, dissuasion et répression. L’étude RCB, comme le « dossier bleu », préconise également la création de structures administratives dédiées, à l’image de ce qui s’est passé aux États-Unis en 1966 : au niveau national, mise en place d’une instance de coordination de la politique de sécurité routière et renforcement des structures spécialisées dans les ministères concernés ; au niveau régional, création de bureaux de sécurité routière. La formation de spécialistes en la matière est également proposée. Par ailleurs, est envisagée une multiplication des études et recherches appliquées.
28Le rapport de Michel Ternier est remis au ministre de l’équipement en avril 1969. Mais il reste d’abord sans suite du fait de la démission du président Charles de Gaulle le 28 du même mois.
Table ronde et mise en place d’une politique interministérielle
29La nomination de Jacques Chaban-Delmas au poste de Premier ministre en juin 69 ouvre une nouvelle fenêtre d’opportunité : personnellement éprouvé par l’insécurité routière, le nouveau Premier ministre inscrit la sécurité routière dans son programme de « Nouvelle Société » concocté par Jacques Delors et Simon Nora et présenté le 16 septembre 1969 à l’Assemblée nationale.
30Auparavant, en juillet 1969, le secrétaire d’État auprès du Premier ministre, Jacques Baumel, a commandé au ministère de l’Équipement le « dossier vert » sur la sécurité routière. Il s’agit grosso modo d’une reprise actualisée du « dossier bleu » préparé deux ans plus tôt par la direction des Routes. Mais il englobe aussi les mesures de lutte contre l’alcool au volant, absentes du « dossier bleu » et incluses en revanche dans l’étude RCB car elles nécessitent une position interministérielle. Ce « dossier vert » présenté par le ministère de l’Équipement en septembre 1969 est suivi de l’ouverture d’une table ronde sur la sécurité routière à l’initiative de Jacques Chaban-Delmas. La table ronde, qui se tient deux ans après avoir été décidée, se compose de deux sessions : la première, de décembre 1969 à mars 1970 consiste à définir les actions à entreprendre, la seconde, de janvier à juin 1971, porte sur l’évaluation des actions mises en œuvre. Toutes les institutions et les acteurs concernés par la sécurité routière (assurances, constructeurs, transporteurs, pétroliers, associations d’automobilistes) sont présents au travers de cinq groupes de travail : conducteur, véhicule, infrastructure, information, secours aux blessés. Il importe de souligner qu’à ce moment-là le nombre d’accidents routiers mortels continue son inexorable montée : il dépassera les 15 000 en 1969 et les 17 000 en 1972. L’inquiétude règne.
31À sa grande surprise, Michel Ternier, dont le rapport de 1969 sert pour partie de base de travail, est nommé rapporteur général de la table ronde et ce, à la demande de Jacques Eisenmann34, conseiller du Premier ministre, ingénieur des Ponts et Chaussées, qui a eu connaissance de l’étude RCB et en a apprécié le parti-pris interministériel empruntant toutes les pistes sérieuses pour juguler l’hécatombe routière. Décision marquée, cette nomination signale en effet que la direction des Routes, malgré ses efforts, n’est plus en mesure de garder la politique de sécurité routière dans son giron : celle-ci est devenue un objet interministériel autonome de la politique routière nationale. Michel Ternier est par ailleurs depuis un décret du 2 septembre 1970, secrétaire de la Commission interministérielle RCB qui, sous la présidence du ministre des Finances, Valéry Giscard d’Estaing, remplit une fonction consultative. Toutefois, la RCB s’est transformée : ce n’est plus seulement l’instrument de la direction du Budget destiné à contenir l’augmentation des dépenses publiques. Elle est devenue un outil de planification et un outil de renouveau de la planification qu’il s’agit d’encourager35.
32La table ronde dont les débats s’articulent autour des propositions dans l’étude RCB permet aux partisans d’une politique volontariste de sécurité routière de prendre la mesure des forces du statu quo. Les constructeurs automobiles (Régie Renault incluse), qui bénéficient de la bienveillance du président de la République Georges Pompidou, grand amateur des voitures du constructeur allemand Porsche, s’opposent au principe des limitations de vitesse hors zones urbaines au motif officiel qu’il stériliserait le progrès technologique dans leur branche. Idem s’agissant du contrôle technique des véhicules ou de l’obligation d’équiper de ceintures de sécurité les sièges des voitures. Les assureurs luttent aussi becs et ongles. Ils évoluent dans une situation radicalement différente de celle prévalant au début des années 1950, car désormais toute amélioration de la sécurité routière diminue leur chiffre d’affaire, donc leur marge, donc leur profit. Ainsi qu’ils le concèderont en 1990 dans le cadre d’un groupe de travail de l’OCDE, ils « considèrent que leur rôle consiste à indemniser les victimes d’accidents plutôt que de prévenir ces accidents »36. Moins puissants que les constructeurs, car ils représentent moins d’emplois et moins d’agitation sociale, les assureurs peuvent néanmoins s’appuyer sur un organe de propagande efficace, la Prévention routière, et son alors demi-million d’adhérents d’alors. La direction des Routes et les forces de l’ordre n’accordent, quant à eux, qu’un appui très mitigé aux concepteurs « rcbistes » d’une première véritable politique nationale de sécurité routière. En effet, ces derniers estiment que l’ambitieux plan autoroutier défendu par la DR dans le cadre du « dossier bleu » n’aura qu’un impact faible sur la sécurité routière. Les gendarmes et les policiers peuvent, quant à eux, voir poindre avec la RCB une fixation exogène d’objectifs de performances et d’activités.
33Face à une telle adversité, les « forces du progrès » de la sécurité routière emmenées par Matignon ouvrent plusieurs fronts. Un front institutionnel (ou constitutif au sens de Th. Lowi)37 tout d’abord : la sécurité routière devient une politique nationale avec la décision de créer en mai 1970 une mission interministérielle, chargée de la coordination de la politique et de la mise en œuvre d’une politique d’information, est instituée en mai 197038. Pour celle-ci, qui sera transformée en Délégation interministérielle en 1972, l’État doit d’abord emporter l’assentiment des usagers de la route pour pouvoir prendre ensuite des mesures plus règlementaires (contre l’avis des constructeurs et des assureurs) comme par exemple la mise en place d’un taux légal d’alcoolémie au volant en juillet 197039. On trouve là une des explications de l’investissement massif et précoce de l’État français dans la communication publique en matière de sécurité routière40 (campagnes télévisuelles, sondages d’opinion, etc.). Des crédits importants sont affectés aux aménagements de sécurité sur le réseau urbain. C’est un signal constructif adressé aux « routiers » du ministère de l’Équipement, ce qui permet d’améliorer sensiblement les conditions de négociation avec les constructeurs au sein de la table ronde. Le contrôle technique des véhicules est reporté à plus tard (rendu obligatoire en 1992), seuls les sièges avant des voiture devront être équipés de ceintures de sécurité à partir de 1975 (il faudra attendre 1990 pour les sièges arrière), etc. en échange du lancement en 1970 de l’expérimentation des limitations de vitesse en rase-campagne (autoroutes comprises) dans trois départements (l’ONSER pilote l’expérimentation), ce qui aboutira à la généralisation des limitations de vitesse en 1973 (avant le choc pétrolier d’octobre, dont on doit néanmoins avouer qu’il arrive à point nommé !).
34Bref, si sur le très court terme les conséquences de la table ronde n’ont rien eu de flamboyant, celle-ci est parvenue à mettre sur les fonts baptismaux une solide politique publique de court, moyen et long terme, y compris sur le volet de la recherche scientifique à l’ONSER, mais aussi au CNRS et à l’INSERM41. La Sécurité routière est d’ailleurs érigée en opération pilote dans le VIe Plan par décision du conseil des ministres le 28 avril 1971. À partir de 1972 (près de 18 000 morts), la mortalité routière entame une forte et irréversible décrue : moins de 14 000 en 1975, moins de 12 000 en 1984. En termes d’innovation dans l’action publique, les faits d’armes de la RCB ne sont pas nombreux, mais la politique nationale de sécurité routière en constitue un indéniablement et il est de taille d’un point de vue administratif, politique et sociétal.
Notes de bas de page
1 Pour le second choc dont la principale matrice est l’évaluation interministérielle de la politique de sécurité routière qui s’est déroulée entre 1999 et 2003, le lecteur intéressé pourra se reporter à Michel Ternier, L’évaluation de la politique de contrôle de la sécurité routière, Paris, La Documentation française, 2003, ainsi qu’à Fabrice Hamelin, Vincent Spenlehauer, « L’action publique de sécurité routière en France. Entre rêve et réalisme », Réseaux, 14, 2008, p. 49‑86 et à V. Spenlehauer, Des sciences sociales engagées dans l’évaluation des politiques publiques, Paris, L’Harmattan (coll. Logiques Sociales), 2016.
2 Frank Baumgartner, Brian Jones, The Politics of Attention. How Government Prioritizes Problems, Chicago, the University of Chicago Press, 2003.
3 Elaine Romanelli, Michael L. Tushman, « Organizational Transformation as Punctuated Equilibrium: An Empirical Test », Academy of Management Journal, 37(5), 1994, p. 1 141‑1 166.
4 Cf. Charles Lindblom, « The Science of “Muddling Through” », Public Administration Review, 19, Spring, p. 79‑88, 1959 et C. Lindblom, The Intelligence of Democracy. Decision-Making through Partisan Mutual Adjustment, New York (NY), The Free Press, 1965.
5 Samuel Brunet, « La communication, composante de l’action publique et politique : le cas de la sécurité routière », thèse de doctorat en science politique sous la direction de Jean-Claude Thoenig et Vincent Spenlehauer, ENS Cachan, 2007, 503 p.
6 F. Hamelin, V. Spenlehauer, « L’action publique de sécurité routière en France… », op. cit.
7 Ce travail repose sur l’exploitation de plusieurs sources de données et notamment de Pierre-Emmanuel Barjonnet, Jean-Pierre Cauzard, F. Hamelin, Jean L’Hoste, Mobilisation de la recherche orientée vers la maîtrise d’effets induits par le développement de l’automobile. Analyse à partir du cas de la recherche en sécurité routière, Arcueil, INRETS, 1980 ; Hubert Lévy-Lambert, Henri Guillaume, La rationalisation des choix budgétaires, Paris, Presses universitaires de France, 1971 ; Claudine Pérez-Diaz, Anne Kletzlen, Marie-Sylvie Huré, Recherche, expertise et sécurité routière, les politiques de contrôle de l’alcool au volant, Rapport PREDIT, CESAMES, Paris, 2005 ; V. Spenlehauer, « L’évaluation des politiques publiques, avatar de la planification », thèse de science politique sous la direction de François d’Arcy, Grenoble II, université Mendès France, 1998 ; M. Ternier, Étude pilote de préparation rationnelle des décisions concernant les accidents de la route, Rapport au ministre, Paris, ministère de l’Équipement, 1969. Ont été également consultées les archives administratives des ministères des Transports conservées au Centre des archives contemporaines (Archives nationales), celles du ministère des Finances déposées au Centre des archives économiques (CAEF) à Bercy et à Savigny-le-Temple. Des entretiens ont été effectués par Vincent Spenlehauer auprès de la direction de la Prévision du ministère des Finances et du SAEI du ministère de l’Équipement dans le cadre d’une précédente recherche.
8 Delphine Dulong, Moderniser la politique, Aux origines de la Ve République, Paris, L’Harmattan, Logiques politiques, 1997.
9 Depuis une douzaine d’années, la DP fait de nouveau partie intégrante de la grande direction générale du Trésor.
10 Michel Margairaz, Henri Rousso, « Le Plan, une affaire d’État ? Les responsables des commissions du Ier au IXe Plan », in H. Rousso, (dir.), La planification en crises (1965-1985), Paris, CNRS, 1987, p. 19‑78.
11 Jules Dupuit, « De la mesure de l’utilité des travaux publics », Annales des Ponts et Chaussées, 1844, n° 116, 2e semestre, p. 332‑375 ; lire aussi le passionnant Luc Baumstark, Alain Bonnafous, « La relecture de Jules Dupuit par Maurice Allais face à la question du service public », in Pierre Dockès, Ludovic Frobert, Gérard Klotz, Jean-Pierre Pottier, André Tiran (dir.), Les traditions économiques françaises, 1848‑1939, Paris, CNRS Éditions, 2000, p. 397‑412.
12 François Etner, Histoire du calcul économique en France, Paris, Economica, 1987.
13 Jean-Claude Thoenig, L’ère des technocrates. Le cas des Ponts et Chaussées, Paris, L’Harmattan, 1987.
14 À cette date, déjà 25 % des ménages français étaient équipés d’une automobile. Ils étaient moins de 2 % en 1946.
15 André Brunot et Roger Coquand, Le corps des Ponts et Chaussées, Paris, CNRS, 1982.
16 X‑Ponts (P 1955), Claude Charmeil, « Faut-il croire au calcul économique », Bulletin Ponts et Chaussées Mines (PCM), Septembre 1968, p. 73‑81. NDLR.
17 Roger Coquand (1906-2001), X‑Ponts (P 1925), ingénieur en chef et délégué interdépartemental du ministère de la Reconstruction et de l’Urbanisme (Bourges, 1945-1952), adjoint au directeur des routes (1952-1959), directeur des Routes et de la circulation routière à l’administration centrale (1960-1967), président de la Caisse nationale des autoroutes (1963-1967).
18 Bernard Marchand, The Emergence of Los Angeles, London, Pion Ltd, 1986.
19 A. Kletzlen, L’automobile et la loi..., op. cit.
20 Serge Goldberg, né en 1927, X‑Ponts (P 1948), directeur de l’Office national de la sécurité routière (1959-1960), il est ensuite directeur des Études générales à l’Institut d’aménagement et d’urbanisme de la région parisienne (IAURP) de 1960 à 1967.
21 V. Spenlehauer, L’évaluation des politiques publiques, avatar de la planification..., op. cit.
22 Ralph Nader, Unsafe at any Speed. The Designed-in Dangers of the American Automobile, New York, Grossman, 1965.
23 Geoffrey Dudley, « The Next Steps Agencies, Political Salience and the Arm’s-length Principle: Barbara Castle at the Ministry of Transport 1965-1968 », Public Administration, 72 (2), 1994, p. 219‑240.
24 Gilbert Dreyfus, né en 1916, X‑Ponts (P 1935), directeur du cabinet d’André Bettencourt, secrétaire d’État aux Transports (1966-67), directeur des Routes et de la circulation routière au ministère de l’Équipement (1967-71). Il est le créateur du « Centre d’informations routières » de Rosny. En 1971, il est directeur général d’Aéroports de Paris.
25 Jean-Pierre Galland, « Trois façons d’appréhender la sécurité routière », in Claudine Dourlens, J.‑P. Galland, Jacques Theys et Pierre-André Vidal-Naquet, Conquête de la sécurité, gestion des risques, Paris, L’Harmattan, coll. Logiques sociales, 1991, p. 111‑126.
26 J.-C. Thoenig, L’ère des technocrates…, op. cit.
27 F. Hamelin, V. Spenlehauer, « L’action publique de sécurité routière en France… », op. cit.
28 H. Lévy-Lambert, H. Guillaume, La rationalisation des choix budgétaires, Paris, Presses universitaires de France, 1971, p. 136.
29 P.-E. Barjonnet, et al. Mobilisation de la recherche orientée…, op. cit.
30 P.-E. Barjonnet et al., Mobilisation de la recherche orientée…, op. cit.
31 Michel Ternier, né en 1938, X‑Ponts (P 1957), auteur de l’étude RCB Sécurité routière (1969), secrétaire de la Commission interministérielle de la RCB en 1970, sous-directeur des études à la direction de la Prévision puis chef du SAEI au ministère de l’Équipement. Pour en savoir plus, « L’étude pilote sur la sécurité routière », RCB. Bulletin interministériel pour la rationalisation des choix budgétaires, n° 1, septembre 1970, p. 33‑45.
32 H. Lévy-Lambert, H. Guillaume, La rationalisation des choix budgétaires, op. cit., p. 136‑137.
33 H. Lévy-Lambert, H. Guillaume, La rationalisation des choix budgétaires, op. cit. p. 143 ; M. Ternier, Étude pilote de préparation rationnelle des décisions concernant les accidents de la route, Rapport au ministre, Paris, Ministère de l’Équipement, 1969.
34 Jacques Eisenmann, X‑Ponts (P 1922).
35 V. Spenlehauer, L’évaluation des politiques publiques, avatar de la planification, op. cit. p. 393.
36 OCDE, L’assurance automobile et la prévention des accidents de la route, Paris, 1990, 137 p.
37 Theodore Lowi, « American Business, Public Policy, Case-Studies, and Political Theory », World Politics, 1964 16(4), p. 677‑715.
38 P.-E. Barjonnet, J.-P. Cauzard, J. L’Hoste, Besoins de mobilité et demande de sécurité. Production de modèles de régulation et de contrôle social, Rapport de Recherche, 1e phase, ONSER, août 1979.
39 Même si la possibilité légale pour les forces de l’ordre de procéder à des contrôles aléatoires d’alcoolémie n’interviendra qu’en 1978.
40 S. Brunet, La communication, composante de l’action publique et politique : le cas de la sécurité routière, op. cit.
41 F. Hamelin, A. Kletzlen, « La recherche en sécurité routière en France et en Grande-Bretagne : retour vers le futur ? », in Jérôme Aust et Cécile Crespy, La recherche en réformes, EAC, 2014.
Auteurs
Ingénieur et urbaniste de formation, Vincent Spenlehauer est docteur en science politique et habilité à diriger des recherches en sociologie. Il dirige le pôle de formation à l’action publique de l’École nationale des Ponts et Chaussées. Ses recherches portent sur l’évaluation des politiques publiques, les rapports entre sciences sociales et décision publique et l’innovation organisationnelle dans divers champs d’action publique comme l’anti-terrorisme, la sécurité routière ou l’énergie. Il est membre du LISIS (laboratoire interdisciplinaire Sciences Innovations Société) et a publié en 2016 l’ouvrage Des sciences sociales engagées dans l’évaluation des politiques publiques, Paris, L’Harmattan (coll. Logiques Sociales).
Docteur en droit, Anne Kletzlen, est chercheuse associée au LAMES/AMU/CNRS (Axe 4 Déviance et Action publique). Ses recherches portent sur la socio-histoire des politiques publiques et leur dimension normative appréhendées à partir de l’exploitation des archives institutionnelles et parlementaires. Dans le domaine de la circulation routière, elle a publié notamment L’automobile et la loi, comment est né le code de la route, Paris, L’Harmattan, 2000 et De l’alcool à l’alcool au volant, la transformation d’un problème public, Paris, L’Harmattan, 2007.
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