Un nouveau corps de fonctionnaires techniciens : les ingénieurs et géomètres du cadastre, 1800-1830
p. 175-190
Plan détaillé
Texte intégral
1À la traditionnelle rupture introduite par la séquence révolutionnaire, sans doute pourrait-on ici substituer la puissante continuité du mouvement de réforme et d’affirmation de l’État sur un espace qui tend progressivement à devenir un territoire national. Dans cet « inventaire du territoire » initié depuis le début du XVIIIe siècle et après les dénombrements de population, le début du XIXe siècle inaugure simplement une nouvelle étape en portant son attention sur une cartographie raisonnée de l’espace et des biens au niveau national. Dans un cas comme dans l’autre, le projet relève de ce qu’Éric Brian a justement appelé La mesure de l’État1.
2Pour maîtriser cet espace et en assurer l’unité, pour en connaître et en exploiter les ressources, pour recevoir des informations de chacune de ses circonscriptions administratives et en faire la synthèse au niveau central, l’État moderne aspire à disposer d’une administration nombreuse et professionnalisée, travaillant selon des règles précises, à la hiérarchie clairement marquée, apte à une prise de possession administrative du territoire, comme l’a très bien montré Claude Nicolet à l’échelle de l’Empire romain2.
3À une échelle plus modeste, le projet cadastral mis en œuvre par le Premier Empire vise lui aussi à dresser un état des lieux – à vocation fiscale – des propriétés et des richesses, à manifester le contrôle public sur l’espace national, enfin à recréer une unité du territoire face à l’impôt, avec comme élément de comparaison la plus petite entité de production agricole, la parcelle. Mais pour disposer, à terme, d’un outil reconnu (ou du moins accepté) par tous comme incontestable, l’État post-révolutionnaire doit faire appel à un nouveau corps de fonctionnaires, bien formés, performants et partout présents. Ces ingénieurs et géomètres du cadastre, dépositaires et utilisateurs d’un savoir scientifique, mais également agents du fisc, trouvent progressivement leur place au sein d’une administration réorganisée dans le sens d’une plus grande efficacité, tout en restant au contact des populations.
4Ce sont justement les conditions d’apparition de ce nouveau « service public »3 qui sont au centre de cette étude, présentant successivement la filiation dans laquelle s’inscrivent ces nouveaux fonctionnaires conjuguant science et finance, leur recrutement et leur formation au sein d’écoles créées pour l’occasion, leur place dans la société et l’administration au cours des trois premières décennies du XIXe siècle, enfin la façon dont le projet cadastral se trouve bientôt placé au centre du débat sur la nature – publique ou privée – des fonctions d’arpenteurs-géomètres.
I. Héritages et parrainages
5Longtemps, les terriers et autres documents domaniaux à vocation fiscale sont levés et établis par des arpenteurs privés – on retrouve également les termes de priseurs ou de mesureurs – mais requis par la puissance seigneuriale qui entend ainsi établir et faire reconnaître ses droits sur une terre. Au cours du XVIIIe siècle, on voit se développer le recours à des officiers royaux tels que les agents des maîtrises des Eaux et Forêts4, sollicités pour mesurer et borner les bois privés ou partager un marais indivis entre plusieurs paroisses et, conjointement, le recrutement par la puissance publique d’arpenteurs jurés privés, ruraux et urbains, ayant pignon sur rue et parfois experts auprès des parlements provinciaux, pour dresser le « cadastre » d’une circonscription administrative allant jusqu’à la généralité, à l’image de celle de Paris étudiée par Mireille Touzery5, et dont les ingénieurs et géomètres du cadastre national sont les héritiers directs.
6Ces derniers s’inscrivent également dans la filiation des « géographes » et autres « géomètres » dont le nombre ne cesse de croître à mesure que les travaux cartographiques se développent et gagnent en qualité comme en précision, de la carte de Cassini aux arpentages de Guyenne6. Ils peuvent enfin se prévaloir du parrainage des officiers des grands corps du dernier siècle de l’Ancien Régime, tels que les ingénieurs de la marine, ingénieurs militaires et autres ingénieurs des Ponts et Chaussées7, qui ont tous publiquement manifesté la puissance de l’État et contribué à la prise de possession administrative de l’espace géographique. Tous, en développant un usage technique et surtout de plus en plus administratif des chiffres, participent de la volonté de rationalisation de l’action publique.
7Dans les années 1780, la réalisation d’un cadastre sur l’ensemble du territoire, prélude à une connaissance exacte de la valeur de toutes les propriétés et plus largement à une réforme complète du système fiscal, devient une revendication des réformateurs. Reprise par une partie des cahiers de doléances au moment de la convocation des États généraux, elle renforce progressivement l’idée qu’un corps d’agents publics est désormais nécessaire. Certains proposent alors de généraliser des initiatives locales, à l’image d’Echau, ancien inspecteur des travaux publics et professeur de géométrie à l’Académie royale des beaux-arts de Toulouse, qui, dès 1790, soumet au président du Comité d’agriculture l’idée d’un corps d’arpenteurs géomètres nationaux8. Ces derniers bénéficieraient d’un enseignement public et gratuit dans des écoles autorisées et protégées par l’Assemblée nationale et se verraient délivrer, au terme de leur formation, un certificat de capacité leur permettant d’exercer leur profession « partout où ils seront appelés », sur demande des particuliers comme de la puissance publique.
8Pour autant, il ne s’agit pas là d’agents publics exclusivement chargés de la réalisation d’un cadastre à vocation fiscale comme le sont, au moins partiellement, les élèves de l’École des ingénieurs géographes placée sous la direction de Prony9. La mission de ce dernier est de rassembler les informations relatives à la population, à l’étendue territoriale et aux productions en vue de la « construction de cartes et autres objets de même nature propres à représenter géographiquement les ressources territoriales de la République ». La filiation est cette fois directe, même si ce bureau est successivement rattaché au département des Contributions publiques puis, après sa disparition en l’an II, à la Commission des subsistances, enfin au ministère de l’Intérieur sous le Directoire, qui transforme l’École en un bureau du Cadastre. Les états de paiement et organigrammes conservés aux Archives nationales donnent une idée de l’importance accordée à cette question par le pouvoir révolutionnaire et directorial : en vendémiaire an III, le cadastre compte 44 employés, chiffre porté à 61 en nivôse an V, parmi lesquels 16 géographes géodésistes, 4 dessinateurs, 23 employés « au calcul des grandes tables logarythmiques et trigonométriques » ou encore un archiviste10. On apprend enfin, au détour d’une correspondance, que les employés du cadastre bénéficient d’un privilège d’importance en cette période de guerre continentale puisqu’ils sont exempts de conscription, protégés par leurs connaissances spéciales, alors que « la formation de nouveaux employés est longue et préjudiciable au progrès et à la perfection des travaux de la division »11. Mais il s’agit là d’une initiative encore limitée, ne serait-ce que par la localisation exclusivement parisienne des bureaux.
9L’extension nationale du projet cadastral hérité de la Révolution prend une tout autre dimension sous le Consulat, avec le choix de réaliser un cadastre par masses de cultures en 1802, et plus encore sous l’Empire, lorsque la loi du 15 septembre 1807 opte finalement pour un cadastre parcellaire. Ce dernier ambitionne de « donner le plan figuratif de chacune des parcelles de terrain qui composent le territoire français, pour faire connaître la contenance et le revenu des biens de chaque propriétaire […] et finalement de la France entière »12.
II. Recrutement et formation des agents du cadastre
10Il devient dès lors urgent de disposer d’un personnel nombreux, bien formé et présent sur tout le territoire ; or le ministère des Finances constate bientôt la « difficulté à trouver des sujets instruits dans l’art de l’arpentage »13. C’est la raison qui justifie l’ouverture, dès le 27 nivôse an XII d’un cours de géométrie pratique dans le département de la Seine, sur autorisation du ministre des Finances. Installé au 96 rue de Cléry, c’est-à-dire dans les bureaux même du Cadastre au ministère des Finances, il s’agit d’un « cours relatif à faciliter aux citoyens qui se destinent à l’arpentage général des communes le moyen de s’instruire ou de se perfectionner dans l’art de lever les plans ».
11Le programme théorique reprend l’essentiel des connaissances nécessaires en arithmétique, géométrie et géodésie, respectivement assurés par les mathématiciens Reynaud, Hautier et Pommiès et couvre ce qui est aujourd’hui enseigné dans les cours de mathématiques des collèges et lycées de la sixième à la terminale scientifique. Chaque enseignement fait l’objet de deux séances hebdomadaires, organisées selon un « ordre tel que les élèves qui entendront le premier jour la leçon d’arithmétique et le second jour la leçon de géométrie pourront comprendre la leçon de géodésie donnée le troisième jour », instaurant une forme de contrôle continu sur douze semaines. La partie pratique prévoit quant à elle des exercices de levé de plans, sous la direction des géographes Laprade et Chantraine, complétés par un « Historique de l’impôt foncier et des recherches sur l’origine de cette contribution, ainsi que sur les différentes formes auxquelles son recouvrement est assujetti [qui] feront connaître les nombreuses tentatives qu’on a faites à plusieurs époques et depuis plusieurs siècles pour rectifier les inégalités qui existent dans sa répartition ». Le cours, imprimé à la demande de ses élèves, sert de référence à l’enseignement prodigué dans les écoles départementales et se retrouve, peu ou prou, à la base de nombreux manuels postérieurs, et en premier lieu du Manuel de l’ingénieur du Cadastre rédigé par Pommiès14.
12Les élèves formés à Paris ont ensuite vocation à occuper les postes vacants dans les différents départements confrontés à un manque de personnel, mais face aux besoins croissants en personnel qualifié, il semble plus efficace d’inciter les départements de province à mettre sur pied des écoles calquées sur le modèle parisien. Le gouvernement sollicite, en premier lieu, les départements où existe déjà une école des surnuméraires des Contributions directes, parce qu’ ils ont « pour chefs-lieux de grandes villes où il doit se trouver un plus grand nombre de jeunes gens propres à entrer dans cette carrière. Ils sont d’ailleurs placés sur les principaux points de la France et pourraient distribuer dans les départements voisins les sujets qu’ils auraient formés. Enfin, ces départements peuvent présenter sur les dépenses variables quelques moyens d’accorder quelque rétribution aux professeurs qui se chargeraient de ces cours15 ». Son incitation rencontre un certain succès puisqu’à la date du 30 messidor an XII, on recense une École du cadastre dans vingt-trois départements (Ain, Aisne, Aveyron, Bouches-du-Rhône, Côte-d’Or, Calvados, Dyle, Gironde, Haute-Garonne, Loiret, Loire inférieure, Mont-Tonnerre, Meurthe, Moselle, Nord, Pô, Hautes-Pyrénées, Bas-Rhin, Rhône, Seine, Seine inférieure, Somme) mais une rapide observation de la répartition de ces établissements sur le territoire indique clairement que le tiers nord-est est largement favorisé, alors que le centre-ouest semble délaissé. Par ailleurs, on compte trois écoles installées dans des départements réunis, géographiquement situés au nord (Dyle), à l’est (Mont-Tonnerre) et au sud (Pô) de ce qui nest pas encore le Grand Empire, mais manifestant par là, et dès l’an XII, la vocation européenne du projet cadastral.
13Annoncé à grand renfort de publicité dans les feuilles publiques du département, un cours de géométrie théorique et pratique s’ouvre par exemple à Douai, alors préfecture du Nord, le 1er germinal an X1116. En échange d’un traitement de 500 francs, le Sieur Raux, professeur de mathématiques à l’École d’artillerie de Douai17, dispense les enseignements théoriques sur une durée de quatre mois, à raison de trois cours par semaine (les lundi, mercredi et vendredi), de 14 à 16 heures ; il accepte également de se charger de la mise en œuvre des travaux pratiques en surveillant l’arpentage général de la commune de Dechy, près de Douai, par ses élèves. Cette formation, dont le programme a fait l’objet d’une concertation entre l’enseignant et le maître d’œuvre du cadastre départemental, est gratuite pour tous mais obligatoire pour les surnuméraires des Contributions directes ; chaque mois, un compte rendu détaillé des progrès de chaque élève est transmis au directeur départemental des Contributions directes qui s’engage, en retour, à recruter de préférence les anciens élèves au sein de son administration.
14Qui sont donc ceux qui se destinent à entamer une carrière de géomètre du cadastre ? On connaît par un « État des élèves inscrits au Cours de géométrie théorique et pratique en l’an XII » le profil des dix-neuf premiers élèves douaisiens18. Tous sont nordistes, sauf un, ancien professeur de mathématiques à Clermont-Ferrand, qui est également le plus âgé (45 ans). Les autres ont entre 17 et 30 ans, mais une large majorité des élèves est formée de jeunes hommes sans doute à peine sortis du collège, en quête d’une profession et espérant peut-être échapper à la conscription en embrassant la carrière administrative. Trois d’entre eux ont déjà été employés dans les bureaux de l’ingénieur en chef des Ponts et Chaussées du Nord, illustrant bien par là en quoi la dimension du projet cadastral est transversale au sein de l’Administration française toute entière ; enfin deux peuvent déjà, au regard de leurs connaissances, commencer immédiatement le travail sur le terrain, les dix-sept autres « ne pouvant être employés que lorsque le cours sera achevé ».
15Des examens périodiques débouchent sur la délivrance d’un certificat constituant un titre d’admission aux fonctions de géomètres du cadastre au rythme des vacances et des promotions Jusque-là, les anciens élèves ont vocation à être surnuméraires au sein des services cadastraux de l’administration des Finances. Tous ne trouvent d’ailleurs pas à s’employer dans le Nord et quittent sans doute le département, puisqu’on ne retrouve pas leurs noms dans les états du personnel du service du cadastre des années 1800 à 183019.
III. Entre science et finance, les services départementaux du cadastre
16Ces services sont organisés selon une structure pyramidale et bureaucratique à trois échelons, la progression de l’un à l’autre conjuguant ancienneté et mérite. Au sommet de la hiérarchie, on trouve le géomètre en chef, également connu sous le nom d’ingénieur vérificateur. Ce titre évocateur place son détenteur au niveau des ingénieurs des Ponts et Chaussées ou des Mines, et plus généralement de l’ensemble des ingénieurs civils de l’État, certains titulaires du poste étant même d’anciens élèves de l’École polytechnique20 ; il dispose d’ailleurs d’un traitement annuel comparable, de l’ordre de 3 500 à 4000 francs par an. Véritable chef de service, il est nommé par le ministre des Finances et chargé de la surveillance et de la vérification des travaux du cadastre.
17Au niveau intermédiaire, les géomètres de première classe, nommés par arrêté préfectoral sur proposition de l’ingénieur vérificateur et affectés aux opérations de délimitation et d’arpentage dans les communes, disposent d’un traitement composé d’une part fixe de 1800 francs par an et d’une part variable de 3 à 4 centimes par arpent traité. Sous leurs ordres, viennent enfin les géomètres de seconde classe (ou secondaires), agréés par l’ingénieur vérificateur et adjoints à un géomètre de première classe pour la réalisation de ses travaux21.
18La consultation des états de personnel fait apparaître de fréquentes dynasties d’agents : dans le Nord, les frères Berger ou les frères Derrulder, distingués par les mentions « aîné et cadet », se croisent ainsi dans l’exercice de leurs fonctions ; alors, les Barbotin père et fils travaillent de concert à Roubaix, respectivement comme géomètre délimitateur et géomètre de deuxième classe22. Les mêmes états signalent également, sur la moyenne durée, une augmentation notable du nombre d’agents, en tout cas jusqu’à la réalisation complète du cadastre : l’Annuaire statistique du département du Nord recense ainsi un total de 13 agents en l’an XIII, un ingénieur et 12 géomètres ; ils sont au moins quinze en 1814, un ingénieur et 14 géomètres de première classe (ce qui laisse présumer l’existence d’un nombre indéterminé de géomètres de seconde classe) ; enfin, en 1830, le service du Cadastre se compose dans ce même département de 31 fonctionnaires, soit un ingénieur, un chef de bureau, deux dessinateurs, trois calculateurs, un géomètre délimitateur, 10 géomètres de première classe et 12 géomètres de seconde classe, sans qu’il ait été possible de déterminer combien d’entre eux sont effectivement passés par l’École du cadastre de Douai.
19Le corps des géomètres du cadastre est directement rattaché à la direction départementale des Contributions directes et plus précisément à son bureau de la contribution foncière, qui porte sur les propriétés immobilières. Le directeur départemental des Contributions directes est donc le supérieur hiérarchique de l’ingénieur vérificateur, d’ailleurs nommé sur sa proposition et avec son aval. Ce même directeur délègue un inspecteur des Contributions directes, spécialement chargé des questions relevant du cadastre et plus spécifiquement chargé de transformer les informations relevées sur le terrain en documents fiscaux permettant le recouvrement de l’impôt, les matrices cadastrales. Au niveau national, les opérations sont enfin placées sous la houlette d’un Commissariat général au cadastre, installé à Paris et relevant de la 1re division du ministère des Finances, celle des Contributions directes. Son responsable est un vieux routier des Finances, Albert Joseph Ulpien Hennet, entré au Contrôle général des Finances en 1779 et nommé commissaire chargé de la confection du cadastre le 20 décembre 1802, après avoir gravi tous les échelons de la hiérarchie administrative23. Il occupe cette fonction sans discontinuer jusqu’en 1823, servant ainsi la Restauration comme il avait servi l’Empire, le Directoire, le gouvernement révolutionnaire, la monarchie constitutionnelle et celle de droit divin. C’est à ce titre qu’il apparaît comme l’auteur du Recueil méthodique des lois, décrets, règlements, instructions et décisions sur le cadastre en France de 181124 et qu’il entretient une abondante correspondance avec les directeurs départementaux des Contributions directes et autres ingénieurs du cadastre à travers la France.
20Le projet cadastral rencontre pourtant certaines difficultés dans sa mise en œuvre, en raison de sa complexité qui le place à la confluence de plusieurs sciences appliquées. Il relève en premier lieu de la science mathématique, puisqu’il suppose la mise en pratique des connaissances arithmétiques, géométriques et géodésiques nécessaires au levage des plans. Cela passe par la mesure des angles et des distances, des hauteurs et des surfaces, et donc par la mobilisation d’un outillage particulier, tel que le jalon et la balise, la chaîne, le pied ou encore le graphomètre qui permet le calcul des angles25. Il s’agit de mesurer l’espace naturel et de le restituer sous la forme d’un plan, qui se veut reflet du réel, inventaire de ses richesses comme de ses potentialités. En cela, le cadastre s’apparente à une véritable enquête économique de terrain, le levé du plan ne se limitant pas à une « simple » représentation de l’espace mais servant de support à la description du système général d’un territoire plus vaste, communal, cantonal, départemental, dans lequel il s’inscrit et se fond.
21Le cadastre s’apparente également à une science sociale, ou plutôt du social. Travail en extérieur, au cœur d’un espace le plus souvent rural, d’un territoire vivant puisqu’exploité au quotidien, il suppose un apprentissage des relations humaines et de la gestion des conflits, selon les cas avec les autorités municipales, les propriétaires et/ou les exploitants. Le sous-préfet de Douai informe ainsi son supérieur de la plainte du maire d’Ecaillon envers l’arpenteur chargé des opérations cadastrales dans sa commune : ce dernier est en effet passé avec son porte-chaîne au milieu des blés en pleine période de mûrissement et le sous-préfet demande qu’on interdise aux agents du cadastre l’accès des terres ensemencés jusqu’à la récolte26.
22Le cadastre est enfin par essence une science fiscale appliquée dans la mesure où il vise à évaluer la valeur de chaque parcelle et donc à terme le produit fiscal qu’elle dégage. Il en découle là encore une forme de tension entre les différents interlocuteurs, puisque la tendance observée vise à une plus juste évaluation du revenu des parcelles et donc à une augmentation globale de l’impôt. Mais la procédure cadastrale relève d’un processus au long cours, procédant par étapes, du général au particulier, pour finalement mettre à disposition de l’administration comme des contribuables un outil à la fois incontestable, aisément compréhensible et surtout évolutif pour tenir compte des transferts de propriété, qu’il s’agisse de legs, de dons ou encore de ventes, sans qu’une refonte complète soit nécessaire.
23Il faut en effet au moins quatre ans entre le moment où débutent les opérations cadastrales sur une commune et l’entrée en vigueur des matrices fiscales et l’on distingue au cours de cette période les opérations techniques, relevant de l’art du levage et confiées aux géomètres du cadastre, et les opérations administratives dont la charge revient aux agents des Contributions, visant à la classification des biens-fonds, à l’évaluation du revenu de chaque classe et à la distribution des parcelles par classe. La première année est destinée à la délimitation des communes, de leur territoire pour en fixer les bornes et ainsi faire disparaître toute contestation avec les communes limitrophes, opération qui peut aller jusqu’à un éventuel remodelage de la carte administrative27. La deuxième année est consacrée à la triangulation de l’espace communal. La troisième est celle du relevé du plan parcellaire, avec indication de la superficie exacte de chaque parcelle, des noms du propriétaire et de l’exploitant (si ce n’est pas la même personne), enfin de la nature des cultures, le tout étant reporté sur des « tableaux indicatifs » en vue d’une vérification par l’ingénieur vérificateur et de l’établissement d’un bulletin qui rassemble sur un document unique l’ensemble des possessions d’un propriétaire, bulletin qui lui est remis pour examen et éventuellement rectification et/ou observation. La quatrième année enfin est tout entière consacrée à l’expertise du revenu cadastral des parcelles et à l’établissement de la matrice, dont les deux exemplaires sont déposés pour l’un à la direction départementale des Contributions directes, pour l’autre à la mairie de la commune concernée, de même que les plans et les états de section.
24Cette dernière opération est sans conteste la plus longue et la plus complexe ; elle résulte de la confrontation de deux approches d’une même réalité mais qui doivent, au terme d’une négociation, trouver un terrain d’entente : si l’objectif d’établir de façon incontestable la surface possédée et/ou exploitée est reconnu comme nécessaire par chacun, sa transcription en termes fiscaux demeure potentiellement conflictuelle. Alors que les agents des Contributions tendent à évaluer au plus juste la valeur foncière de chaque parcelle, les propriétaires sont partagés entre la tentation de voir la valeur de leurs biens majorée (une vente n’en serait que plus profitable) et le risque de voir leurs charges fiscales immédiates s’alourdir. Les évaluations établies par le fisc sont donc soumises au conseil municipal qui nomme cinq commissaires classificateurs choisis parmi les principaux propriétaires de la commune en vue de la fixation d’un tarif provisoire, approuvé après enquête contradictoire par une commission départementale et enfin transmis au directeur des Contributions directes. Ce dernier est chargé de rédiger les états de section et la matrice cadastrale, « sorte d’inventaire des propriétés territoriales de la commune ; dressé par ordre alphabétique, elle rassemble sous le nom de chacun d’eux les parcelles qu’il possède dans les diverses sections et la réunion de toutes les parcelles d’un propriétaire forme un article de la matrice ». Et pour éviter les erreurs, les propriétaires peuvent encore pendant une période de six mois après la mise en recouvrement du premier rôle cadastral poser réclamation contre les erreurs de classement ou de contenance commises à leur encontre ; après cette date, aucune réclamation n’est plus admise28. Les fonctionnaires du fisc et en premier lieu ceux du cadastre se trouvent, en somme, placés au centre « d’une sorte de champ de force où s’affrontent les intentions du Gouvernement et des intérêts particuliers »29.
25Il s’agit là, on le comprend, d’un travail de longue haleine qui explique ou justifie que sa réalisation à l’échelle de tout le territoire national ait demandé autant de temps. De fait, on ne peut que constater sa relative lenteur d’exécution : au début de l’an XIII, les plans ont été levés dans environ 2900 communes françaises, mais il faut attendre la fin de 1808 pour atteindre le chiffre de 1248 communes cadastrées, alors que les travaux sont en voie d’achèvement dans près de 2000 autres, et attendre 1811 pour dépasser les 5000 communes. En 1814, les estimations recensent 9000 à 10000 communes cadastrées, soit environ 37 millions de parcelles couvrant une superficie de 12 à 15 millions d’hectares sur les 51,9 qui composent la France métropolitaine (soit 23 à 29 %) ; et encore s’agit-il dans la plupart des cas d’un cadastre par masses de cultures. Si l’on se place au niveau départemental, le bilan n’est guère plus brillant : sur les 669 communes du Nord, seules 246 (soit 36,7 %) sont effectivement cadastrées à la chute de l’Empire (1814) ; dans la Loire des premières années de la monarchie de Juillet (1832), on ne compte encore que 47 % des 418 communes cadastrées30 et il faut attendre 1845 pour que tous les départements disposent finalement de leurs matrices.
26Ces différents éléments expliquent que le projet même du cadastre soit remis en cause dès la chute de l’Empire, imposant l’intervention du commissaire général Hennet, qui entend défendre l’action de ses services et n’hésite pas à prendre la plume pour rappeler l’importance de sa mission, pour l’État comme pour les particuliers31.
IV. La « revanche » des arpenteurs
27D’autres éléments, en se conjuguant, militent également en défaveur d’une administration publique du Cadastre, puisqu’à mesure que les travaux progressent, la justification du maintien d’un personnel nombreux et donc fatalement coûteux tend à s’amoindrir, alors que l’idée même de cadastre parcellaire se voit remise en cause.
28Dès 1806, la formation de nouveaux agents du Cadastre ne semble plus nécessaire dès lors que, selon les termes du ministre des Finances, « ces cours ont rempli leur objet : presque tous les géomètres ont un nombre suffisant de collaborateurs et la modicité des fonds affectés au cadastre ne permet plus de continuer les dépenses des différents cours de géométrie »32. L’expérience n’a fonctionné au total que deux ans et les anciens élèves sont donc appelés à disparaître à mesure que la réalisation d’un cadastre à l’échelle du territoire tout entier devient effective.
29La période de la Restauration coïncide pour sa part avec une offensive des arpenteurs qui entendent prendre une forme de « revanche » sur les fonctionnaires du Cadastre qui les ont si longtemps privés d’ouvrage. Dès le Consulat, la question de la nature juridique de la profession d’arpenteur-géomètre s’était posée : en l’an XII, le préfet du Pas-de-Calais demande au ministère de l’Intérieur qui doit les nommer et se voit répondre que les arpenteurs sont des agents privés qui ne sont assujettis à aucune formalité particulière auprès des autorités publiques, alors que les géomètres sont des agents publics qui prêtent serment, entre les mains de l’autorité qui leur délègue leurs pouvoirs33.
30Mais si l’Empire met sur pied une administration cadastrale efficace et lui affecte une mission clairement définie, la Restauration tend à fragiliser la position institutionnelle des employés du Cadastre en remodelant la structure même de leur organisation administrative. Cela débute par la nouvelle dénomination des ingénieurs vérificateurs : le règlement du 10 octobre 1821 les désigne comme des géomètres en chef et parfois même des inspecteurs vérificateurs, choisis uniquement parmi les géomètres de première classe en activité, et de préférence chez les géomètres triangulateurs. Si les fonctions demeurent les mêmes, le déclassement hiérarchique est patent puisqu’ils n’occupent plus désormais qu’une position intermédiaire, voire subalterne, au sein de l’administration des Finances et que leur nomination est désormais prononcée par un simple arrêté préfectoral. Certes, « les anciens ingénieurs vérificateurs offrent en général toutes les conditions [requises à l’exercice de ces fonctions] et l’Administration est fondée à penser qu’ils y apporteront la même exactitude […] si toutefois ils consentent à supporter une réduction dont les dépenses de l’arpentage auront paru susceptibles »34, alors que sont renégociés à la baisse les tarifs de chaque opération cadastrale, le plus souvent aux dépens des agents publics.
31Il ne s’agit en somme que d’une tentative de procéder à des économies sur le budget de l’État alors que de nouvelles instructions ministérielles sont publiées au début de l’année 1822. Elles prévoient que dans chaque département, le préfet dispose désormais de la possibilité de confier les travaux relatifs à l’arpentage des communes à un géomètre de son choix, ce dernier traitant, sous sa seule responsabilité, avec les collaborateurs dont il a besoin. Cette « externalisation » des opérations cadastrales constitue une menace directe pour les services administratifs d’une monarchie restaurée qui semble prête à abandonner une de ses prérogatives régaliennes. Elle donne en revanche des idées à certains hommes de l’art qui proposent dès lors directement leurs services aux préfets au moment où ceux-ci renégocient les traités qui les lient à leurs agents. C’est le cas d’Étienne-Marie Bouis, ancien géomètre de première classe dans les Bouches-du-Rhône, un temps attaché en qualité d’officier géographe à l’État-Major général d’un corps d’armée. Installé à son compte depuis 1816, à Paris, au 71 rue de Richelieu, il est l’auteur « de quelques réflexions sur le cadastre qui fixèrent l’attention du Gouvernement et devaient donner lieu à des améliorations dans cette partie », dans lesquelles il préconise le recours à des arpenteurs privés35. Fort de ce succès d’estime, il adresse à tous les préfets de France une lettre circulaire commençant par ces termes : « Je me hâte de vous adresser ci-joint la soumission que j’ai l’honneur de vous faire pour l’arpentage parcellaire des communes du département que vous administrez ». Proposant une économie de 25 % sur les prix généralement accordés aux géomètres en chef, tout en précisant que la soumission n’est valable « qu’autant que le service de l’ingénieur vérificateur actuel ne vous soit pas agréable ou qu’il ne juge pas à propos de souscrire les traités qu’il conviendra de lui proposer », il se prévaut de la confiance et de la protection des préfets des Bouches-du-Rhône et des Ardennes36. Et si celui du Nord ne semble pas avoir fait appel à lui, il est possible que d’autres lui ont répondu plus favorablement.
32Certains vont jusqu’à réclamer, comme dans l’Orne en 1817, que l’Administration cesse ses relevés pour les confier à « un jury composé d’un certain nombre de personnes de chaque commune pour l’exécution du cadastre »37. On voit alors tout un ensemble de professionnels de l’arpentage réclamer l’organisation d’un corps parallèle, para-public, d’arpenteurs jurés ou de géomètres. La menace se précise et s’amplifie tout au long des années 1820 par le biais de pétitions transmises aux parlementaires : le 1er juin 1820, le Sieur Barbin présente des observations sur la nécessité d’établir des conditions d’admission pour l’état d’arpenteur et demande que les pouvoirs publics fixent un nombre d’arpenteurs par arrondissement et procèdent à l’organisation particulière de la profession ; en 1824, c’est le géomètre en chef des Basses-Pyrénées, J.– F. Barrau, qui fait parvenir à la Chambre un Mémoire sur la nécessité d’instituer un corps de géomètres experts dont le ministère est requis par l’administration, les tribunaux et les particuliers ; les années suivantes voient s’accumuler des projets comparables, comme ceux de Jean-François-Louis Robiquet, notaire royal à Buironfosse (Somme), proposant aux députés la création d’arpenteurs jurés en nombre déterminé par canton (de 2 à 4) et assujettis à cautionnement, de Lefebvre, arpenteur géomètre à Sucy (Seine-et-Oise), demandant l’organisation des arpenteurs en corps en 1829, ou encore de l’arpenteur parisien Loire qui fait la même demande en 183238.
33D’autres enfin vont plus loin et réclament purement et simplement l’arrêt des opérations du cadastre parcellaire. C’est ce dont se fait l’écho Chassepot de Chaplaine, préfet de l’Ariège, lorsqu’il indique que « les opinions émises dans les chambres sur le cadastre parcellaire doivent faire craindre que par suite de cette légèreté, de cet esprit de changement et de contradiction assez naturel à notre nation, on se décide à faire cesser entièrement le cadastre ». S’il s’inscrit en faux avec cette opinion, au nom d’une plus grande égalité fiscale, il poursuit en reconnaissant volontiers que les opérations d’arpentage, en dépit de leur nécessité absolue, demeurent excessivement coûteuses. Ainsi, sous les aspects d’une défense rigoureuse de l’utilité du cadastre, il paraît prêt à sacrifier une partie de l’administration qui l’a réalisé en préconisant une plus grande intervention des propriétaires dans le processus et conclut en estimant que le cadastre « coûtera moins s’il était fait au moins partiellement par les communes qui ne peuvent se dispenser d’en avoir un »39.
34En quelques années, le sort de ces nouveaux fonctionnaires techniciens que sont les ingénieurs et géomètres du cadastre connaît finalement une évolution notable. Le Consulat et le Premier Empire se donnent les moyens d’atteindre un objectif considéré comme majeur pour le Trésor comme pour les particuliers : la réalisation d’un cadastre, par masse de cultures puis parcellaire, à l’échelle du territoire national. À cet effet, on voit apparaître une branche nouvelle de l’Administration des Finances, bien que dépendant des Contributions directes, dotée d’une hiérarchie propre et d’un personnel nombreux, disposant enfin d’établissements spécifiques, destinés à la formation de ses agents sur tout le territoire.
35Les pesanteurs inhérentes à un tel projet en limitent grandement l’efficacité sans en amoindrir le coût et alimentent bientôt les critiques des tenants d’une plus grande rigueur budgétaire comme de ceux qui récusent l’intervention de l’État dans le domaine de la propriété privée. Avec la chute de l’Empire, c’est le projet cadastral lui-même qui est remis en cause, au moment même où la puissance publique peine à affirmer sa prééminence dans une société post-révolutionnaire en quête de repères. Les fonctionnaires du cadastre sont les premières victimes d’une telle situation et doivent finalement sacrifier leur autorité et le prestige de leur mission au profit de leur existence administrative.
Notes de bas de page
1 Éric Brian, La mesure de l’État. Administrateurs et géomètres au xviiie siècle, Paris, Albin Michel, « L’évolution de l’humanité », 1994, 462 p.
2 Claude Nicolet, L’inventaire du monde. Géographie et politique aux origines de l’Empire romain, Paris, Fayard, 1988, en particulier son introduction.
3 « Le service public, l’économie, la République (1780-1960) », numéro spécial de la Revue d’histoire moderne et contemporaine, juillet-septembre 2005 et en particulier l’article de Dominique Margairaz, « L’invention du "service public" : entre "changement matériel" et "contrainte de nommer" », p. 10-32.
4 Les Eaux et Forets du xiie au xxe siècle, Paris, Éd. du CNRS, « Histoire de l’Administration française », 1987 ; voir aussi « Maîtrises particulières, maîtres particuliers des eaux et forêts », Dictionnaire de l’Ancien Régime, L. Bély (dir.), Paris, PUF, 1996, p. 786-787.
5 Mireille Touzery, Atlas de la généralité de Paris au xviiie siècle. Un paysage retrouvé, Paris, CHEFF, 1995, 175 p. Voir également l’article de l’abbé Roger Desreumaux, « L’arpenteur, témoin du cadre social de son temps », Actes du Congrès national de la Fédération des sociétés savantes du Nord de la France, mars 1986, p. 36-45.
6 François de Dainville, « Enseignement des "géographes" et des "géomètres" », René Taton (dir.), Enseignement et diffusion des sciences en France au dix-huitième siècle, Paris, Hermann, 1986, p. 481-491.
7 Hélène Vérin, La gloire des ingénieurs. L’intelligence technique du xviie au xviiie siècle, Paris, Albin Michel, « L’évolution de l’humanité », 1993, 455 p. ; Anne Blanchard, Les ingénieurs du roy de Louis XIV à Louis XVI : étude du corps des fortifications, Montpellier, Université Paul-Valéry, 1979, 635 p. et Dictionnaire des ingénieurs militaires, 1691-1791, Montpellier, Université Paul-Valéry, 1981, 786 p. ; Antoine Picon, L’invention de l’ingénieur moderne. L’École des Ponts et Chaussées, 1747-1851, Paris, Presses de l’ENPC, 1992, 768 p.
8 Arch. nat., F1a547 : Projet de création d’un corps d’arpenteurs géomètres nationaux, Toulouse, 24 juillet 1790.
9 Voir la communication de Paul-Marie Grinevald dans ce volume ainsi que l’article de Y. Chicoteau, A. Picon et C. Rochant, « Gaspard Riche de Prony ou le génie "appliqué" », Culture technique, 1984, n° 12, p. 171-183.
10 Arch. nat., F1b I 44 : Personnel des professeurs et élèves de l’École des ingénieurs géographes, an V-an VIII, en particulier la Notice abrégée sur l’organisation et les travaux des bureaux du cadastre et de la situation des transports, les états des sommes à payer et les organigrammes de la division du Cadastre. Voir également F17 1393 : École des géographes du cadastre.
11 Ibid., lettre de Prony au Directoire exécutif en date du 2 nivôse an IV.
12 J. Josat, Le Ministère des Finances, son fonctionnement, Paris, Berger-Levrault, 1882, p. 446 (« Le cadastre parcellaire prescrit par la Loi du 15 septembre 1807 »).
13 Arch. dép. Nord, P 24/1 Circulaire du ministre des Finances aux préfets, Paris, 16 germinal an XI.
14 Michel Pommiès, Manuel de l’ingénieur du Cadastre, précédé d’un Traité de trigonométrie rectiligne par André-Antoine-Louis Reynaud et des instructions publiées pour l’exécution des arpentages parcellaires, approuvées par le Ministre des Finances, Paris, Imprimerie impériale, 1808, XXXVI-XLVI-218 p. [BNF : 4° V 7257].
15 Arch. dép. Nord, P 24/1 : Lettre du ministre des Finances au préfet du Nord, Paris, 14 nivôse an XII. On observe en passant que le gouvernement trouve ainsi le moyen d’indiquer qu’il ne prendra pas en charge les dépenses relatives à cette création.
16 Arch. dép. Nord, P 24/1 : l’information est également transmise aux préfets des départements voisins de la Lys, de Jemappes, des Ardennes et du Pas-de-Calais, sans doute en vue de recruter des élèves, ce que confirme indirectement le préfet du Pas-de-Calais dans une lettre du 26 prairial suivant en indiquant qu’un arpenteur de Frévent souhaite y envoyer son fils.
17 Nouvelle preuve du lien entre officiers des armes techniques et ingénieurs du cadastre. Raux est par ailleurs recommandé par l’ingénieur en chef des Ponts et Chaussées du Nord.
18 Arch. dép. Nord, P 24/1 : État nominatif des élèves qui se sont fait inscrire pour suivre le cours gratuit de géométrie ouvert à Douay le 1er germinal an XII par M. Raux, professeur de mathématiques, établi par le directeur des Contributions directes, 17 prairial an XII.
19 Arch. dép. Nord, P 24/2 et 3 : Cadastre, Personnel, nominations et congés, an XI-1819 et 1820- 1849.
20 C’est le cas d’Antoine André François Marie Derrien, polytechnicien de la promotion 1798 et géomètre en chef du cadastre du département du Gard en 1830.
21 On retrouve là, transposés au cadastre, les niveaux d’instruction repérés par A. Picon à propos des ingénieurs des Ponts et Chaussées, op. cit., p. 36.
22 J’avais déjà observé des éléments comparables dans le département de l’Escaut étudié dans « La formation du cadastre impérial dans le département de l’Escaut », Territoires, pouvoirs et identités : voies de renouvellement de l’histoire de l’Empire, Natalie Petiteau (éd.), Paris, Boutique de l’Histoire, 2003, p. 123-138.
23 Sur le personnage et sa carrière administrative, on pourra se reporter, outre son dossier de Légion d’honneur (Arch. nat., LH 1282/51) à Arthur Dinaux, « Le chevalier Hennet », Archives historiques et littéraires du Nord de la France et du Midi de la Belgique, 1re série, t. I, 1829, p. 477-485 et Michel Bruguière, Gestionnaires et profiteurs de la Révolution. L’administration des finances françaises de Louis XVI à Bonaparte, Paris, O. Orban, 1986, notice 140, p. 260.
24 Paris, Imprimerie impériale, 1811, 400 p. [BNF : F 21977]. On se reportera à la présentation qu’en fait Pierre Clergeot dans ce même volume.
25 On en trouve des reproductions fidèles dans l’ouvrage de Roger Schonaerts, Géomètres-arpenteurs du xve au xviiie siècle dans nos provinces, Catalogue de l’Exposition organisée pour le centenaire de l’Union des géomètres experts de Bruxelles, Bruxelles, Bibliothèque royale Albert Ier, 1976, planche 20.
26 Arch. dép. Nord, P 24/3 : Lettre du sous-préfet de Douai au préfet du Nord, Douai, le 28 juillet 1823.
27 C’est plus particulièrement observable dans les départements réunis où la notion de « commune » recouvre à l’occasion des réalités administratives différentes de celles admises en France ; cf. M. de Oliveira, « La formation du cadastre de l’Escaut », art. cité.
28 Pour l’ensemble de ce développement, nous avons suivi l’Annuaire statistique du département du Nord et J. Josat, op. cit., p. 445-446.
29 H. Vérin, op. cit., p. 181.
30 Arch. nat., F1a 544 : Situation des travaux du cadastre dans le département de la Loire au 1er janvier 1832.
31 Il publie en particulier Du Cadastre, réponse à l’ouvrage intitulé La vérité sur le Cadastre, sl, 1817, 30 p. [BNF : 8° Lf16817] ; Rapport présenté à SE le Ministre Secrétaire d’État des Finances par le Commissaire royal du cadastre, 6 novembre 1817, Paris, Imprimerie royale, sd, VIII-272 p. [BNF : 4° Lf168 125] ; Note du Commissaire royal du cadastre pour le maintien du cadastre parcellaire, Paris, Imprimerie royale, 1818, 4 p. [BNF : 8° Lf16829] ; Réponse du Commissaire royal du cadastre à un mémoire des propriétaires du département de la Drôme, Paris, Imprimerie royale, 1818, 8 p. [BNF : 8° Lf16828]. Voir également la communication de Nadine Vivier sur cette question.
32 Arch. dép. Nord, P 24/1 : lettre du ministre des Finances au préfet du Nord, Paris, 12 février 1806.
33 Arch. nat., F1a 547 : lettre du préfet du Pas-de-Calais au ministre de l’Intérieur, Arras, 13 floréal an XII et réponse.
34 Arch. dép. Nord, P 24/3 : lettre du ministre des Finances au préfet du Nord, Paris, le 27 novembre 1821.
35 Il s’agit d’un ouvrage intitulé Réflexions sur la nécessité, les avantages et l’entretien d’un cadastre propre à former un monument authentique des propriétés territoriales, et sur les moyens d’éviter qu’il soit un surcroît de dépenses pour l’État, Marseille, A. Ricard, 1816, 80 p. [BNF : 4° LF168 11],
36 Arch. dép. Nord, P 24/3 : Lettre d’Étienne Marie Bouis au préfet du Nord, Paris, 21 février 1822.
37 Arch. nat., F1a544 : Pétition du Sieur Pichon-Prémélé, de Seéz, à la Chambre des députés en date du 18 janvier 1817.
38 On retrouve l’ensemble de ces pétitions dans le carton F1a547 des Archives nationales.
39 Arch. nat., Fla544 : Rapport du préfet de l’Ariège au ministre de l’intérieur, Foix, 1er juillet 1819. C’est lui qui souligne.
Auteur
Agrégé d’histoire, est maître de conférences en histoire contemporaine à l’Université de Lille 3 et membre de l’UMR 8529 IRHIS. Auteur d’une thèse intitulée Argent public et argent privé sur les routes du Nord. Réseaux et flux financiers en Europe du nord-ouest de la Révolution à l’Empire, ses recherches portent – entre autres – sur l’organisation et le fonctionnement des administrations financières au XIXe siècle. Il a publié « La formation du cadastre impérial dans le département de l’Escaut », in Territoires, pouvoirs et identités : voies de renouvellement de l’histoire de l’Empire, Natalie Petiteau (éd.), Paris, Boutique de l’Histoire, 2003 et collaboré au tome III (1848-1870) du Dictionnaire biographique des ministres des Finances de la Révolution française au Second Empire, avec Guy Antonetti et Fabien Cardoni (à paraître au Comité pour l’histoire économique et financière de la France).
Le texte seul est utilisable sous licence Licence OpenEdition Books. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.
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