Chapitre 8. Aryens et sionistes : les catégories racisantes
p. 71-79
Texte intégral
1La Dalit Voice emprunte ses catégories. La création y est accidentelle. Elle recueille dans le monde arabe et aux États-Unis des rumeurs et des bruits médiatiques. Elle transmet des concepts surannés venus de savoirs morts parce que leur ombre peut faire mal. La revue est le produit d’un univers de masses urbanisées où les médias jouent un rôle central. Les caractéristiques de la réalité y sont gommées au service d’un combat qui se veut total et de tous les instants. C’est une machine à créer des interférences entre des sources disparates, avec ce que cela suppose de contradictions, de créations hybrides ou de monstruosités, d’association d’éléments qui se détruisent ou poussent au délire conceptuel. Parallèlement, la Dalit Voice tend à réduire les mouvements d’idées et les corpus de savoir à des schémas simplificateurs, à de grands traits contrastés, pour les faire rentrer dans ses cadres interprétatifs réducteurs.
2Un discours colonial très conservateur, se voulant officiel autant que scientifique, est matriciel de l’argumentaire. Ses incarnations sont contradictoires. Le racisme, refusé, est aussi très pénétrant, le sentiment d’être « la civilisation » est abominé et repris, le tempérament missionnaire, valorisé, est abject s’il est hindou alors que les promoteurs de la revue sont tous, quelque part, hindous et qu’ils vantent par ailleurs les activités missionnaires des minorités. En d’autres termes, l’élite subalterne dalit se hait ou s’encense dans une spirale de mouvements de plus en plus violents, ce qui explique une part des excès provocateurs de ces gens aux chemises bien propres. Les références aux universalismes occidentaliste et chrétien se combinent avec de virulentes tirades anti-Occident. L’importance des débris de la « pensée d’Empire » à usage des dominés nous fait revenir sur le complexe culturel associant la haute administration indienne, les collèges chrétiens payants et la langue et la culture anglaises, de mouture vieillote mais grammaticalement correcte. Les nationalistes hindous partagent à peu près le même capital. La revue se prononce contre le mépris colonial envers les indigènes du monde entier, invention brahmane particulièrement pernicieuse, mais abomine les Brahmanes en s’appuyant sur des perceptions coloniales. L’écartèlement intérieur n’épargne aucun domaine.
3La perception orientaliste222 est essentielle. Le nombre de références est réduit mais le texte en est truffé. Quelques citations reviennent, des mêmes auteurs : Jones, Carey, Elphinstone, Bernier, Mueller, des érudits, des administrateurs, des missionnaires chrétiens et des hommes d’ordre, des gens connus fondant une vulgate. C’est de là que viennent les notions d’« Aryens » et Sémites, la croyance en une « invasion aryenne », les références aux védas et au védantisme, une part des commentaires sur le brahmanisme et l’histoire bouddhique. Les Orientalistes ne sont vantés par la Voix des Dalit que lorsqu’il est possible d’infléchir leurs propos dans le sens d’une critique du « BSO ». Ils sont soupçonnés d’être fascinés par l’hindouisme et les Brahmanes. Les conceptions et savoirs plus que séculaires, d’autres plus récents mais tout aussi datés (W. Durant223), sont utilisés sans qu’il paraisse utile de procéder à des actualisations224 ou des évaluations. La critique n’a qu’un objectif : le Brahmane. Elle procède au tri des sources orientalistes, jamais à la discussion de ces dernières. Cette naïveté devant le savoir autorisé, plus spécifiquement la vieille parole dominatrice européenne et nord-américaine, marque l’ensemble du mouvement dalit contemporain, cette crédulité nourrissant de brefs accès de colère xénophobe et d’autres manifestations de complexes d’infériorité.
4Le discours « indigéniste », apparu après la mise en place d’un régime colonial direct (1858), a été fabriqué par des intelligentsias régionales. Appuyé sur la science « anglaise » mais inversant les schémas coloniaux, il vante les « premiers arrivants ». Variation sur le thème, le discours des « Fils du sol » (Bhumiputra) a participé à la création des états linguistico-culturels de l’Union indienne, de l’Andhra Pradesh (1953) au Jharkhand (2000). Avec sa valorisation du sang, de la terre, des ancêtres, des liens, il englobe des éléments racialisants, mais ce n’est pas une théorie raciale. Le discours indigéniste se conjugue spécifiquement pour appuyer les exigences de statut et de pouvoir dalit. Le mouvement né entre Maharashtra et Penjab à la fin du XIXe siècle sous le nom d’adi-hindu (anté-hindou) est soucieux de classement égalitaire et de révision des textes sacrés. Il fait des basses castes les habitants originels de pays mais parle plus de fraternité, selon des termes de la bhakti, que de race, de culture ou de pureté. Reprenant une part de son héritage, la Voix des Dalit fait des Intouchables les fondateurs d’une pure culture indienne, qui n’est plus issue d’un long métissage mais de la préservation d’une réalité supérieure originelle. Ce discours fonde l’affirmation selon laquelle les premiers habitants restent frères et sœurs, d’une seule « espèce » sans castes225 en ouvrant la voie aux considérations raciales226.
5Le mouvement « dravidianiste » articulé autour de Periyar (1879-1973) demeure une référence importante. L’apologie des Dravidiens227 entreprise par ce rationaliste engagé et moderniste s’est peut-être racisée parce que les Brahmanes étaient aussi peu nombreux qu’arrogants dans le Sud228. Le rationalisme « scientifique » a montré qu’il pouvait être une voie de racisation des catégories de l’identité. La vulgate antidéiste, progressiste, antibrahmane229, localiste et racialiste de Periyar cohabite, dans la revue, avec la valorisation des monothéismes chrétien et musulman et de l’universalisme. Ce qui pourrait baser un débat houleux n’apporte pas de trouble. La confrontation d’idées est évitée par les fuites dans la provocation. Periyar ne s’adressait pas spécifiquement aux Intouchables. La revue détourne son héritage au profit d’« antédravidiens » deux fois opprimés par le brahmanisme et les puissants de tous ordres et « races » – les Dalit – reprenant au passage ses hypothèses, probablement infondées, sur le caractère « dravidien » de la société de Mohenjodaro. Il n’y a pas de ligne de démarcation entre culture et « race ». La perception dravidienne athée ne s’imagine pas sans la contre-catégorie des Aryens dont la revue retrouve l’influence dans le conflit de la Babri Masjid230. La catégorie « Dalit » s’en trouve à nouveau racialisée.
6Le discours émancipateur de Phule est invoqué. Il a été influencé par les missionnaires chrétiens, les orientalistes et les autorités coloniales. Il vivait au XIXe siècle. C’est en confrontant ces apports extérieurs à des traditions locales, comme la geste de Shivaji et la tradition religieuse de la bhakti, que Phule, qui n’était pas un Intouchable mais un mali (jardinier) d’une famille de bonne aisance, a le plus apporté à ceux qui tentent de promouvoir la justice sociale. Il était profondément humaniste, ce que la Dalit Voice oublie ou minorise. Les allusions à Phule sont des propos durs isolés des contextes. Les discussions sur ses thèses, périmées ou d’actualité, manquent. Tout ce qui, dans son œuvre, touche à l’héritage hindou, que Phule ne récusait pas, et surtout ce qui concerne la bhakti et le règne de Shivaji231, se trouve systématiquement éludé.
7La revue soumet Ambedkar à une sacralisation de plus en plus intolérante depuis 1992. Les évolutions ou les questionnements d’Ambedkar sont réduits aux interférences du « complot brahmane ». Ses apports sociologiques et économiques, qui sont considérables, n’intéressent pas ou très peu la revue. Les critiques que Rajshekhar a portées à l’endroit d’Ambedkar, qui n’étaient pas sans intérêt, ont de leur côté disparu. L’idolâtrie du chef spirituel n’est pas rare en Inde. Elle présente, dans ce cas, des traits caricaturaux, le journal s’adressant à des personnes instruites. La revue veut plaire aux Dalit les plus frustes, ce « plébéianisme » étant vécu mais fort peu argumenté. L’admiration que Rajshekhar a longtemps adressée à Karl Marx et Mao Ze Dong s’est réinvestie dans son apologie de la « pensée Ambedkar ». Le rapport aux livres et à la respectabilité petite-bourgeoise du personnage a enfin ce qu’il faut pour séduire des professeurs et des administrateurs.
8Le mouvement des Panthères dalit (Bombay, 1973) et les petits mouvements littéraires et poétiques des années 1970 ont marqué la Voix des Dalit. La Dalit Sahitya Academy en était. Les académies dalit constituent le luxe intellectuel d’une élite administrative par ailleurs peu critique, souvent même fort conservatrice. La provocation et l’insulte ont fait partie du capital symbolique de ces mouvements. Leur capacité de transgression, d’expression dans le milieu puritain étouffant de la petite-bourgeoisie urbaine, a fait leur notoriété sans les rendre populaires. Les tentatives organisationnelles n’ont pas été à la mesure des rhétoriques. La multiplicité des défis grandiloquents et sans suite lancés par la Dalit Voice aux « forces brahmaniques », aux nationalistes hindous, à l’État et à l’ordre mondial ne sauraient se comprendre sans rappeler ce que la publication doit à ce courant.
9Le mouvement de masse centré sur le nord de l’Inde, lancé par la BAMCEF de Kanshi Ram puis le DS4 et le Bahujan Samaj Party de Ram et K. Mayavati, a très tôt reçu l’appui de la revue. Cette position est devenue plus importante mais s’est aussi assortie de critiques à partir du milieu des années 1990 quand le BSP est devenu un parti de gouvernement. Les passages au pouvoir de cette mouvance, en alliance avec le Sapa (Samajvadi Party) et le BJP nationaliste hindou ont provoqué des débats passionnés dans la publication. Le manque de principe de l’alliance avec les nationalistes hindous a été fustigé mais V.T. Rajshekhar et plusieurs autres idéologues ont rappelé qu’il valait mieux s’associer à un ennemi franc (le BJP) que de se commettre avec des adversaires sournois (le Parti du Congrès) ou des amis susceptibles de traîtrise (le Sapa de M. Singh Yadav). Le débat sur la jati a été introduit par des cadres du BSP confrontés à la nécessité d’étendre leur influence en Inde du Nord. Ce sont eux, et non les intellectuels subalternes de la Voix des Dalit, qui ont défendu l’idée de mettre en avant la fierté de jati pour restaurer la dignité des Intouchables, rompant avec plus d’un siècle de discours de condamnation globale de la caste. Rajshekhar, qui n’est pas toujours sûr de lui à ce propos, prend parti pour la fierté de jati alors que nombre de lecteurs s’indignent de ce retournement qui leur paraît contredire la pensée d’Ambedkar. Ce fut, durant les années 1980 et 1990, l’un des seuls moments de véritable débat. De petits cadres ruraux ont donc bouleversé la pensée du mouvement dalit pendant que des débats développés dans le très plébéien BSP s’imposaient dans le laboratoire de pensée de l’élite dalit.
10Ces sources, références et matrices forment l’armature idéologique de la Dalit Voice. Il est d’une hétérogénéité remarquable. Des tendances qui n’ont pas de position aussi légitime impressionnent la revue. Des positions très éloignées de l’ambedkarisme et des perceptions dalit de tous ordres trouvent écho dans une perspective tactique de construction des alliances. D’autres bénéficient d’effets de mode ou d’évolutions doctrinaires peu conscientisées.
11Le courant conservateur islamique (deobandi ou barelvi) est important parmi les 120 millions de musulmans du pays quand le soufisme n’est pas au premier plan232, mais il existe beaucoup d’autres tendances et courants. Il est centré autour de religieux et d’institutions, comme le Bureau de la loi islamique et les institutions de gestion des biens musulmans. C’est un univers bureaucratique qui refuse farouchement l’innovation en matière de religion. Introduit dans la revue au milieu des années 1980, il y est considéré comme l’islam. La référence privilégiée à ce courant a servi pour accroître la haine des Brahmanes et « communautariser » l’ensemble dalit. Le discours arabe propalestinien mais antisaoudien a introduit une tonalité antisioniste, anti-israélienne et anti-impérialiste. La tendance extrémiste musulmane indienne autour du SIMI, qui condamne l’hindouisme comme une barbarie polythéiste et l’État indien comme un oppresseur, valet de Washington, a pris de l’influence entre 1988 et 1998. Prosélyte, le mouvement est aussi soucieux de politiser la vendetta. En ce qui concerne les rapports intercommunautaires, il prône la violence. Le mouvement musulman afro-américain, particulièrement celui qui est influencé par les Black Muslims et la Nation de l’islam de Louis Farakhan233, constitue une influence qui s’exerce par le biais de lecteurs émigrés aux États-Unis234. Ces derniers occupent un poids disproportionné dans la revue. L’antisémitisme de ce courant, très virulent, est associé à la lutte pour les droits d’une minorité noire à laquelle les Dalit de la revue aiment s’identifier, ce qui ne les empêche pas de représenter Ambedkar avec la peau rose pâle d’un « bébé Cadum ».
12Combinées au racialisme de Periyar et aux remugles de pensées coloniales très conservatrices, ces pensées essentialisantes, racialisantes ou franchement racistes, ont produit un champ de représentations caricaturales où évoluent des Brahmanes diabolisés pris en bloc, les « meilleurs ennemis » nationalistes hindous, les Aryens et les « blancs », le nazisme, le fascisme, les juifs235, Israël, ses alliés ouverts et ses complices cachés, la ploutocratie internationale, la franc-maconnerie, le B’nai B’rith (association d’entraide juive236), l’impérialisme et toutes les « forces obscures » ou « réactionnaires » acharnées à la sujétion des peuples et à l’oppression des Dalit dans le cadre de complots dont la CIA, les services secrets pakistanais et leurs équivalents indiens sont rarement exclus. Les chrétiens qui écrivent dans la revue n’ont pas été critiques vis-à-vis de ce déploiement tumultueux et brutal de thèmes racistes237, parfois extrêmement déshumanisants238. Il n’a été mis en cause que par des sikhs et par Rajshekhar lui-même, que la pensée d’Ambedkar ou le marxisme poussent parfois à des contorsions idéologiques. Interpellé par L. Poliakov, auteur du Mythe aryen239, à propos de ses envolées haineuses essentialisant les Aryens et les Sémites, il a fait amende honorable240 mais les propos racisants sont vite revenus pour se radicaliser. Après 1988, « brahmane », « blanc » et « aryen » sont devenus interchangeables et souvent accolés à « juif » et « sioniste », la svastika indienne et celle du parti national-socialiste hitlérien étant considérées comme semblables241.
13Pour comprendre ces délires et leur réception favorable, il faut souligner que des perceptions anglo-saxonnes contemporaines fort cotées influencent les discours de la Dalit Voice. Le courant le plus important est l’école « ethnique » nord-américaine242, qui analyse les sociétés et leurs contradictions en termes de différenciations collectives, les ethnies ressemblant aux « races » d’avant-guerre à cette différence près que l’opposition bipolaire (Noirs-Blancs) cède le pas à une multiplicité de couleurs associées à des cultures. Les « races ethniques » ne sont plus hiérarchisées, comme c’était dans le cas dans les racismes antérieurs243, mais cette inflexion n’implique pas de distanciation vis-à-vis des catégories raciales. La perception ethno-raciale est reprise par la revue qui y trouve un argument pour faire des Dalit une entité homogène. La fascination et la peur du ghetto sont des cadeaux encombrants de la pensée des maîtres. Par ailleurs, la perception d’un centre sociétal (blanc, occidental, etc.) multifétiche et d’une périphérie ethnicisée, très courante dans les études nord-américaines, plaît à la revue qui retrouve là un nœud de la pensée impériale, se contentant de mettre « dalit » à la place de « blancs-aryens-hindous-nazis » dans ses représentations du futur.
14La récapitulation des pensées fragmentées et durcies qui influencent l’univers de la Dalit Voice permet de comprendre pourquoi les discours les plus contradictoires y ont leur place, et pourquoi, par ailleurs, des dérives essentialisantes, hétérophobes et racistes s’y fraient leur chemin, malgré des prétentions émancipatrices et humanistes qui peuvent être sincères. Les promoteurs sont écartelés entre désir de reconnaissance et affirmation de la différence. Cette tension s’incarne dans la fascination pour le regroupement communautaire (musulmans, afro-américains) et une volonté brutale de placer les élites dalit à tous les échelons, dans tous les rôles de la société indienne. Comme il est difficile de faire s’accorder la pensée d’Ambedkar et les doctrines essentialisantes racisantes, la fuite en avant dans l’agression ou l’adoption d’une position de victime tend à occuper une place croissante. L’hyperpolitisation utilitaire des perspectives, élément omniprésent, doit être relativisée en la confrontant au capital idéologique de la revue et aux tensions internes qu’il induit. L’élite administrative anglicisée de basse caste a soif de pouvoir et peur d’agir. Elle avance sans bouger en usant de schémas hétérophobes et de slogans haineux qui dévalorisent l’héritage d’Ambedkar en influençant la totalité de la scène indienne.
Notes de bas de page
222 Lire Edward W. Saïd, Culture and Imperialism, Vintage, Londres, 1994, XXVII1-380 p. ; L’Orientalisme. L’Orient créé par l’Occident, Seuil, Paris, 1980, 392 p.
223 Durant n’est pas seulement conservateur et adepte des théories « civilisationnistes » de l’histoire faisant la part belle à « l’homme blanc ». C’est aussi un adversaire précoce de l’Islam, ce que l’art de la citation tronquée permet d’éluder.
224 Ce qui se fait, sur certains points seulement, au RSS et à la Vishwa Hindu Parishad. Voir par exemple Hindu Vishwa, Vishwa Hindu Parishad Silver Jubilee Special Issue, 1989-1990.
225 « All the original inhabitants are blood brother and sisters » (« Tous les habitants originels sont des frères et des sœurs de sang »), Dalit Voice, vol. 13, no 4, 1994. Le caractère « originel » ignore l’histoire ou du moins sa complexité évolutive, mais se nourrit de visions du « sang partagé », protoraciales, fréquentes dans l’univers communautariste.
226 L’idée selon laquelle les SC-ST (Tribus et castes répertoriées) sont des groupes ou des peuples indigènes apparaît comme leitmotiv dans la revue, qui cite notamment André Beteille (une des rares références récentes) pour soutenir cette assertion. Cf. Dalit Voice, vol. 11, no 13,1992.
227 C’est sans doute en tant que membre d’une minorité linguistique (tulu) peu reconnue par les autorités locales du Karnataka (mais non entravée ou dévalorisée dans son expression particulière, comme les Bretons ou les Corses en France) que Rajshekhar s’est senti attiré par le mythe de l’unité dravidienne, perspective brandie par Periyar et mise à mal par l’irruption des états linguistiques.
228 Sous l’influence des partis dravidianistes, dont les membres ont usé d’insultes, de coups et d’humiliations de toutes sortes, une partie notable des Brahmanes tamouls ont migré en ville ou dans le Nord.
229 Auquel on doit la popularisation de l’adage populaire : « On n’adore pas le serpent, on le tue », repris souvent par la Dalit Voice à propos de vaidik, d’« Aryens » ou d’ennemis politiques, Dalit Voice, vol. 16, no 1, 1996. La revue se plaint ensuite de ce que l’hindouisme est une « culture de la haine » (« Their very value System is based on hate », Dalit Voice, vol. 18, no 4, 1997). Voir aussi l’affirmation selon laquelle le crime dalit (Periyar aurait écrit « dravidien », il s’agit d’un glissement de catégories avec usage de la même logique) est une faiblesse, le crime brahmane étant un fait d’essence (Dalit Voice, vol. 18, no 2, 1998). La perspective ouverte par Periyar est une dissociation violent de Nous et des Autres, hiérarchisée par les catégories du bien et du mal, de l’originel et de l’étranger, de la barbarie et de la culture, l’ensemble se résumant en deux pôles « raciaux », Dravidiens (bons) et Aryens (nuisibles).
230 « What is going today is a war between Aryas and Dravidas » (« Ce qui se passe aujourd’hui est une guerre entre les Aryens et les Dravidiens »), Dalit Voice, vol. 12, no 4, 1993.
231 Celui vanté par Tilak, Le Samyukt Maharashtra et la Shiv Sena, trois moments historiques autour d’un élément de mythistoire. Cf. Gérard Heuzé, « Shiv Sena, history, myth and Shivajji » in Jackie Assayag (dir.), The Resources of History. Tradition, Narration and Nation in South Asia, École française d’Extrême Orient/Institut français de Pondichéry, Pondichéry, Paris, 1999, XIV-374 p.
232 Le soufisme est conservateur mais il peut innover par rapport au Coran et à la Sunna. L’école de formation d’ulema de Deoband (près de Delhi), fondée en 1864, est l’aboutissement d’un processus de durcissement de la doctrine de l’islam après la perte du pouvoir politique. C’est la plus importante du monde.
233 Louis Farakhan est considéré un moment comme celui qui peut unir les Noirs et les Dalit dans le cadre de l’Islam (Dalit Voice, vol. 15, no 4, 1996). La Voix des Dalit transmet à son lectorat des nouvelles « scientifiques » concernant le peuplement de l’Afrique et de l’Asie par des « Noirs » : « A distinguished black physicist historian and linguist was among the first to establish that Egypt was the first civilisation of the world. It was Black » (« Un chercheur distingué, “noir”, historien, médecin et linguiste, a été l’un des premiers à démontrer que l’Égypte fut la première civilisation du monde. Elle était “noire” »), Dalit Voice, vol. 15, no 4, 1996. Les nationalistes hindous ont aussi leurs références extérieures parmi des professeurs ou des militants européens et nord-américains qui prennent leur parti. Le cas de Koenraad Elst, un Flamand qui s’est érigé en historien du génocide des hindous par les musulmans et a reçu un accueil favorable dans les milieux nationalistes hindous, n’est pas unique. Cf. Koenraad Elst, Negationism in India, Voice of India, New Delhi, 1992, 176 p.
234 « A Black Recipe for Revolution in India » (« Une recette noire pour la révolution en Inde »), lettre d’un lecteur de l’Illinois, Dalit Voice, vol. 1, no 10,1982. « Gandhi was a racist, US scholar confirms Gandhi was racist », (« Un chercheur états-unien confirme que Gandhi était raciste »), écrit un lecteur d’Atlanta, Dalit Voice vol. 12, no 1, 1992. Pour faire bonne mesure, le consulat des États-Unis en Inde sera lui aussi traité de « raciste » (Dalit Voice, vol. 15, no 4, 1996).Velu Anamasai (c’est un nom tamoul), de Houston, a envoyé des articles et du courrier sur le thème : « Le système des castes, c’est l’apartheid en pire. » Il organisera en collaboration avec la Dalit Voice une conférence sur les luttes dalit en Inde, avant de tenter de constituer un lobby pro-Dalit indiens aux États-Unis (intervention dans Dalit Voice, vol. 15, no 2, 1995). On notera que les sommes d’argent citées dans la Dalit Voice sont très souvent données en dollars, malgré la grande ancienneté de la monnaire indienne, sa forte popularité et l’absence de marché noir des monnaies en Inde qui obligerait à se référer au cours de devises extérieures. Comme dans bien des cas de gens soumis profondément aux symboles américains, ces tendances vont avec les dénonciations les plus outrées de l’impérialisme et de la domination (nord) américaine. Raju Thomas, de Chennai (Madras), qui est l’un des collaborateurs les plus virulents, les plus racisants et les plus assidus de la revue, écrira en 1996 à V.T. Rajshekhar : « Cela fait quinze ans que vous critiquez le brahmanisme mais vous n’avez jamais mis en cause les Brahmanes. Les Américains (des États-Unis) ne comprennent pas cela. »Voir aussi « Black Dalits of India », lettre de lecteur (Dalit Voice, vol. 15, no 2, 1995). Lorsque la Dalit Voice est citée dans des journaux ou des revues internet nord-américaines, c’est considéré comme un titre de gloire particulièrement important, même s’il s’agit de publications « blanches », « racistes » et probablement « huttingtoniennes », comme le Washington Post (Dalit Voice, vol. 15, no 5,1996). Le rédacteur note cependant avec dépit : « Even the pissing of a pandit is reported in the Washington Post » (« Lorsqu’un Brahmane va pisser, ils le mettent dans le Washington Post »).
A côté de ce qui est écrit sur les « Noirs » des États-Unis et concernant ces groupes, ce qui intéresse les Africains apparaît singulièrement mince. On relève cependant des entrefilets sur les « Indiens racistes » au Kenya et la légitimité des mesures anti-indiennes (contre les Indiens riches de hautes castes) ou, mais c’est exceptionnel, sur l’esclavage au Brésil.
235 L’antisémitisme ne faisait pas partie des fondements de la Dalit Voice. En 1980, Shetty annonce son intention de publier une brochure traitant des « Juifs de l’Inde », ces persécutés étant les Dalit. L’antisémitisme s’introduisit après 1985, atteignant des niveaux élevés de haine déshumanisante au début des années 1990. Il n’a pas faibli depuis mais il prend moins de place, la pensée-Ambedkar monopolisant beaucoup de papier. On a notamment pu lire en 1993 (Dalit Voice, vol. 13, no 5,1993) un article se référant au Protocole des Sages de Sion (faux antisémite issu de la police secrète de Russie au début du siècle et qui connaît un regain d’intérêt marqué au Proche-Orient : lire B. Lewis), titré : « Marxism : a Zionist Invention to Dominate the World » (« Le marxisme : une invention sioniste pour dominer le monde »). L’article n’est pas un courrier des lecteurs « arrangé » comme il en est souvent publié. Il argumente : « The jewish history is the best example that class theory is bogus. This class struggle theory is the invention of master brains for a world dictatorship. Karl Marx, a Jew,/...[financed the soviet revolution […] Gold and money are monopolised by the international jewish bankers. » (« L’histoire juive est la meilleure preuve de l’inanité de la théorie de la luttes des classes. Cette théorie est l’invention de cerveau de maîtres désireux de dominer le monde. Karl Marx, un juif [rappelons qu’il était fils de pasteur protestant, il n’est juif que pour des racistes], finança la révolution soviétique. [...] L’or et la finance sont monopolisés par les banquiers juifs internationaux. ») C’est signé K. Vijayaraju, de l’Andhra Pradesh, ce qui peut être le nom d’un Dalit qui ne s’embarrasserait pas de détails historiques mais connaîtrait en revanche Christiistaadt International, qui semble un groupement antisémite et anticommuniste chrétien basé en Allemagne (possiblement néonazi). Ayant demandé leur propagande, nous n’avons obtenu que des documents lénifiants sur l’amour entre les peuples et celui de Jésus-Christ. Ce n’est pas ce qu’en a tiré Vijayaraju. Dans le même numéro de la revue, il est révélé que « les écrits et les pensées sionistes sont des fabrications aryennes », ce que la Dalit Voice avait, comme toujours, anticipé par ses publications. Page 6, on annonce « des faits sensationnels sur la domination sioniste mondiale » et le « New World Order » (Nouvel Ordre mondial), la dictature globale, « ce réseau de l’Antéchrist a déjà infiltré la société humaine », précise l’article. Ces passages semblent aussi avoir été inspirés par l’organisation allemande. En 1998, les écrits antisémites sont peut-être encore plus virulents, sous le label « antisioniste » comme le titre « Zionists Laid Monica Trap » (« Les sionistes ont organisé le piège Monica ») (Dalit Voice, vol. 18, no 4, 1999), imputant aux « sionistes » la responsabilité des agissements sexuels du président Clinton, ou la proclamation selon laquelle Rajiv Gandhi aurait été la victime d’une « conspiration sioniste-vaidik » (Dalit Voice, vol. 18, no 4,1999), ou encore ces notes sur « les sionistes qui contrôlent l’Occident » parsemant l’ensemble de la publication.
C’est dans Brahminism, Father of Fascism, Racism, nazism, publié en 1993 à Bangalore par la DSA, que le fondateur de la Sahitya Academy a commencé à théoriser ces perspectives. Sur la page de garde, il est écrit : « Les Noirs, les musulmans, les Dalit doivent s’unir pour combattre la menace aryenne. » Dessous l’auteur a dessiné une croix gammée (svastika, considérée comme symbole auspicieux en Inde), avec au centre « Brahmanism » et sur les branches : « Nazism », « Fascista », « Racism », « Zionism ». En quatrième de couverture, la brochure est vantée comme « the hottest stuff of the year » (« la publication la plus osée de l’année »). Le polémiste compare les Krupp aux Birla (industriels indiens liés au mouvement national). Il dénonce un New World Order (Nouvel Ordre mondial), ou NWO – pour rappeler le BSO –, mis en place par les Juifs et le président Bush, le rôle satanique des États-Unis et annonce la troisième guerre mondiale. Il explique aussi que Hitler était un avatar hindou, ce qui implique une certaine confiance dans les représentations hindoues. Dans un écrit de gauche qui date de l’époque du populisme congressiste (K. K. Gangadharan, Sociology of Revivalism, Kalamkar Prakashan, New Delhi, 1970, vi-166 p.), l’auteur, tentant d’expliquer le caractère virulent et nationaliste hindou des Brahmanes chitpavan du Maharashtra, fait état de la thèse selon laquelle ces derniers proviendraient d’un groupe sémite ou juif, ce qui ne repose sur rien. La veine est donc ancienne. La culture passablement antisémite des collèges chrétiens a des canaux d’influence puissants.
236 Jean-Marie Le Pen y a fait allusion à plusieurs reprises, notamment en 1992, comme à un ensemble secret aux capacités de manœuvres infinies, sur le ton adopté par la Dalit Voice. L’organisation des « Fils de l’Alliance » a été fondée en 1843 aux États-Unis par des migrants allemands. Il s’agissait d’unir les Israélites, de défendre leurs valeurs et de secourir les nécessiteux et victimes de persécutions. En 2003 elle revendique 500 000 membres dans 58 pays. Cf. David Malkam, L’Histoire du B’nai B’rith, Berg International, Paris, 2003,298 p.
237 Le racialisme de la Voix des Dalit peut être déroutant. Si de très nombreuses interventions soulignent l’importance des « racines dravidiennes », l’ancienneté du sang dalit et parfois sa pureté, l’authenticité de la « race noire de l’Inde » soumise à « l’apartheid de la caste », d’autres, dont certaines de Rajshekhar (qui pense peut-être à ses enfants) soulignent que les shudra, catégories à laquelle Ambedkar et Periyar se réfèrent beaucoup et de manière positive, sont les fils illégitimes des concubines des Brahmanes (cette affirmation se fonde sur une lecture globalisante et figée de shastra brahmanes), ce qui permet de jeter l’opprobre sur ces derniers au nom de valeurs puritaines mais détruit les constructions racialisantes. Malgré le respect obsédant qu’il adresse à Ambedkar, Shetty en conclut que les Dalit ne sont pas des shudra, mais des « purs SC-ST-BC » (Scheduled Castes, Scheduled Tribes, Backward Classes, le fourbi de catégories différenciées d’origine officielle est très caractéristique de la scène, surtout dans son association à l’exigence de pureté !). « Non ! Nous ne sommes pas des bâtards, nous ne sommes ni Shudra ni hindous », termine-t-il (V.T. Rajshekhar, Christian and Dalit Revolution, Dalit Sahitya Academy, Bangalore, 1987). Lire Peter Robb (éd.), The Concept of Race in South Asia, Oxford University Press, Delhi, 1995, 354 p.
238 Dès 1986, dans Who is Ruling India ? (Dalit Sahitya Academy, Bangalore), V.T. Rajshekhar écrira des phrases comme : « Le peuple de l’Inde peut être divisé en deux catégories, les hindous et les êtres humains », mais il y a plus haineux comme ce passage un peu plus tardif (Dalit Voice, vol. 13, no 6, 1994) : « The mentally sick Aryans are injecting their virus tuto our healthy society. Corruption and bastardization has brought in tremendous unrest and tension. » (« Les Aryens déments [Brahmanes] sont en train de diffuser le poison de leur virus dans notre société saine. La corruption et la bâtardisation apportent une tension et des désordres intenses. ») Le « virus brahmane » est aussi invoqué (Dalit Voice, vol. 12, no 5, 1993), ainsi que des comparaisons avec des insectes peu appréciés : « Like coakraches they will adjust themselves to any situation. » (« Comme des cafards ils s’adaptent à toutes les situations. ») L’organicisme social, le refus du « mélange » entre « les races » et l’association de la « race » dépréciée à la pourriture, à la vermine, aux maladies et à la corruption ont appartenu au registre extrémiste des dérives racistes européenne et nord-américaine. Ils font aussi partie, en Inde, des métaphores communautaristes et laïques anticommunautaristes les plus répandues. Le « virus » ou le « cancer » communautariste sont particulièrement appréciés dans les polémiques menées par les laïques contre les nationalistes hindous qui leur retournent le compliment. Il y a beaucoup de médecins parmi les cadres des mouvements indiens de tous ordres. C’est peut-être un facteur explicatif. Quand à la manie de traiter les parties adverses d’« antinationales », elle est commune à presque toutes les tendances politiques et semble avoir été introduite par les congressistes à propos des communistes. On lit encore : « Most of the bribe takers and givers are pure Aryans. » (« La plupart des corrupteurs et des corrompus sont des Aryens pure race »), Dalit Voice, vol. 15 no 5, 1996. Le « presque » tient sans doute à ce que Rajshekhar a épousé une Brahmane (de race pure ?). La « peste aryenne » (Aryan plague) est aussi fréquemment évoquée (Dalit Voice, vol. 12, no 1, 1992). Le fondateur de la revue affirme cependant : « Nous ne détestons pas les Aryens » (Dalit Voice, vol. 12, no 4,1993), ce qui fait partie du système de contradictions de la pensée de la revue, mais aussi de ses arguments de base (le propos est qu’un ennemi est nécessaire et utile), et n’évite pas d’ériger « les Aryens » en entité raciale. Les catégories de classes sont systématiquement racialisées, comme dans cette phrase : « No rich (read Aryan) man goes to these hospitals » (« Aucun riche [lire Aryen] ne va dans ces hôpitaux »), Dalit Voice, vol. 12, no 4, 1993.
239 Léon Poliakov, Le Mythe aryen, Calmann-Lévy, Paris, 1971. Voir aussi Choudhury, The Aryans : a Modern Myth, New Delhi, 1993, 354 p. ; Ram Sharan Sharma, Looking for the Aryans, Orient Longman, New Delhi, 1995,106 p., textes qui replacent le débat dans le contexte indien. Sur l’Arya Samaj : Kenneth W. Jones, Arya Dharma, Manohar, New Delhi, 1989, xvi-343 p. Il existe beaucoup de littérature sur ce mouvement arya réformiste hindou. Le projet de l’Arya Santaj n’a rien d’« aryen » au sens où l’utilise Rajshekhar, mais la catégorie raciale était inévitable à l’époque et dans ce contexte.
240 L’intervention de Léon Poliakov, refusant l’usage du terme aryen faite par la Dalit Voice, a été reproduite dans le volume 2 du no 16 de la revue en 1983. Rajshekhar le rappelle en 1993 dans Brahminism, the Father of Fascism, Racism, Nazism. L’auteur de la brochure précise immédiatement qu’à la mort d’Hitler les Juifs ont été autorisés à venir en Palestine et ont traité durement les Arabes musulmans. Cela aurait porté les Brahmanes, dirigeant l’Inde vers l’admiration pour l’État juif, instituant une collusion de fait, avant qu’elle ne devienne de cœur, avec l’imposition du Nouvel Ordre mondial, la Guerre du Golfe et la destruction de l’Union Soviétique. Rajshekhar demande alors : « Que peut penser monsieur Poliakov de ces nouveaux développements ? » Il conclut : « Le monde d’aujourd’hui est divisé entre deux camps : (1) l’impérialisme, le racisme, le sionisme, le brahmanisme ; (2) ceux qui leur sont opposés : musulmans, Noirs, Dalit de l’Inde et Jaunes », ces derniers étant rarement cités.
241 On trouve des porteurs de la logique indigéniste (Fils du sol et dravidianisme) pour affirmer que la svastika était un symbole des habitants originels, dalit et dravidiens, que les « Aryens » brahmanes n’ont fait qu’emprunter, ou, plus justement décrit, voler. Nier tout apport extérieur est une constante du discours indigéniste. Par ailleurs, il est fort possible que des lecteurs de la Dalit Voice soient attachés à la svastika, associée en Inde à des événements festifs et à la lumière (Dalit Voice, vol. 18, no 2,1998). Ces symboles solaires sont répandus sur toute la planète.
242 Vue depuis les bureaux de la Dalit Voice, c’est-à-dire l’appartement de Rajshekhar, cette école apparaît dominante, unifiée, et scientifique, ce qu’elle n’est pas, au moins pour les deux derniers termes. Les nuances n’intéressent pas la Dalit Voice.
243 Taguieff, 1987. La race demeure une expression courante chez les Anglo-Saxons. Elle se réintroduit sous leur influence et celle de la génétique dans les publications de sciences humaines en France. En hindi, il n’existe pas un mais plusieurs mots pour cette création de l’esprit humain.
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