Chapitre 6. Un ennemi honnête et rassurant : le Rashtrya Sevayamsevak Sangh
p. 51-57
Texte intégral
1Depuis 1925, une secte socio-politique associe le nationalisme et une variété d’hindouisme réformé. Des Brahmanes de condition modeste et d’autres personnages de hautes castes « subalternisés » sont à la base du mouvement. La tentative vise à créer un « homme nouveau » à partir de la vie en commun, de la valorisation de l’héroïsme et du sacrifice, de l’endoctrinement et du « travail social »137. Le Rashtrya Sevayamsevak Sangh138, ou Organisation des volontaires nationaux, est fondé à Nagpur par de jeunes chitpavan marathisants, contre la violence et le séparatisme musulmans et pour une forme d’unité nationale basée sur la religion et la dévotion envers une patrie matricielle. Le Congrès national indien, la non-violence gandhienne et les hindous modérés sont fortement critiqués. Ce vivier de cadres a créé le parti politique Bharatya Jan Sangh139, un syndicat, le BMS140, une organisation d’unification religieuse, le Forum mondial hindou (Vishva Hindu Parishad) et d’autres branches spécifiques, des fronts de masse spécialisés à l’instar de ce qu’ont fait les partis communistes, au moment où Rajshekhar quitte l’Indian Express et se lance dans le mouvement dalit141. Le Jan Sangh a participé au gouvernement Janata, première alternative fédérale au pouvoir congressiste, née des excès de l’état d’urgence. Il n’est pas apparu comme une force extrémiste mais le RSS reste connu comme l’inspirateur des assassins de Gandhi, en même temps qu’un bastion des idées conservatrices et des intérêts des Brahmanes et banya (commerçants de multiples jati) de l’Inde du Nord. Il a évolué au cours des années 1960. Il continue à justifier la violence au service de son idéal national mais il parle d’humanisme « intégral », une sorte de troisième voie ni socialiste ni capitaliste. Il commence à influencer les hindous de très basses castes. Sa seule implantation dans le Sud est au Kerala, parmi des Brahmanes issus des familles qui ont fourni les cadres du Parti communiste, mais elle prend rapidement de l’ampleur.
2Les relations de la Dalit Voice avec cette organisation sont éclairantes. Dès 1978, VTR a l’habitude de citer l’édition en anglais de l’hebdomadaire du RSS142 (Organiser), comme s’il s’agissait de l’Autorité suprême en matière d’hindouisme mais aussi plus largement de tout ce qui concerne les hindous. C’est pour lui une vieille connaissance. Des extraits de 1972 sont cités143. Guru Golvalkar (ou Golwalkar), qui dirigea le RSS de 1940 à 1965, est apprécié comme le connaisseur en matière de brahmanisme144. Le RSS est contré par une majorité d’hindous dont de nombreux Brahmanes. Ce n’est évoqué que pour mieux le nier : ce sont des ruses. L’ensemble du mouvement de réforme hindou est amalgamé et réduit par Rajshekhar au RSS d’aujourd’hui, à surtout à l’image monstrueuse qu’il en construit. L’Arya Samaj, qui fut populaire parmi les premiers militants dalit, accompagnée d’une foule de mouvements parallèles, est aussi plongée dans le creuset de la haine. La totalité de l’ensemble hindou, des textes védiques aux renonçants syncrétiques, est décrite comme trouvant son achèvement dans le RSS. La réduction de l’hindouisme à la pensée armée du RSS, l’élévation de sa perspective de secte récente au rang d’orthodoxie hindoue millénaire, servent deux buts : faire émerger le cœur organisé de l’ennemi afin de rendre ce dernier socialement cernable et politiquement centré, le copier afin de déjouer les « complots » avec des armes adaptées. Il n’est pas impensable, enfin, de le soutenir afin de précipiter la société dans des désordres catastrophiques d’où le mouvement dalit pourrait sortir renforcé. Des alliances ont été constituées trois fois, entre 1995 et aujourd’hui, entre le BJP, issu du Jan Sangh en 1980, rebaptisé par la revue Brahmanical Jatiya Party (Parti de la caste brahmane), et le BSP de Kanshi Ram. La revue a plutôt soutenu cette initiative. Elle illustre la tentation de rechercher l’accord avec de « vrais » Brahmanes plutôt qu’avec de « faux socialistes, Brahmanes contrits » (Parti du Congrès) ou encore avec les trop proches représentants des Backward Classes ou Other Backward Classes (classes arriérées et autres classes arriérées) représentées par le Sapa145 en Uttar Pradesh ou le Rashtrya Janata Dal (Parti populaire national) de Lalu Prasad Yadav au Bihar.
3La mise en avant du RSS, qui est une organisation structurée pourvue d’une doctrine et d’une stratégie, donne de la consistance à la thèse du complot brahmane. Il ne fait pas de doute que les dirigeants RSS ont des visées politiques et sociales, qu’ils mènent un combat pour les concrétiser par des moyens divers, dont la provocation, la violence, les alliances utilitaires et l’usage corrupteur de l’argent ne sont pas à exclure. Cela n’en fait pas un bloc ou une puissance faramineuse. Au mépris des faits, la Dalit Voice refuse toute autonomie au BJP (parti), à la Vishva Hindu Parishad et aux autres branches du nationalisme hindou. La Shiv Sena de Mumbai n’est citée que rarement, malgré ses éclats, comme « force nazie et fasciste »146. Cela vient probablement de son opposition patente à certains thèmes du RSS et de sa « Famille »147.
4Le RSS étaye les arguties selon lesquelles brahmanisme et nazisme sont plus que proches, le premier étant « père » du second148. Le propos peut s’appuyer sur We and Our Nation Defined (1939) du guru Golvalkar149, ainsi que sur le mode de structuration de l’organisation, avec des branches aux activités intenses, des centres d’entrainement à la lutte et des rassemblements de masse en uniformes. L’Inde qui ne produit jamais rien de neuf a au moins inventé le « nazisme ».
5Les ressemblances entre le discours de la Voix des Dalit et celui du RSS relèvent partiellement du syncrétisme stratégique150. Les traits sont cependant trop systématiques pour relever tous de la volonté de faucher ses bonnes idées à l’ennemi. Troublement obnubilés par les Brahmanes, VTR et ses lecteurs sont absolument fascinés par le RSS. En 1980 une description élogieuse de la BAMCEF de K. Ram souligne : « On dit que la BAMCEF est dotée d’une organisation de cadres, comme le RSS, qui compte plus de 90 000 membres151.» En 1982 : « Le RSS est le fascisme indien mais c’est aussi la force qui croît le plus vite. En remerciant le RSS pour cette situation, nous demandons aux Dalit d’en prendre avantage152. » Après la destruction de la Babri Masjid153, lors de l’interdiction du mouvement nationaliste hindou, la revue s’inquiète : « Nous préférons en toutes circonstances un ennemi honnête. [...) Un ennemi honnête est bien préférable à un adversaire sournois. Le RSS (aryen) hindou est peut-être antinational et violent mais il ne peut être banni. |...] Le RSS représente 15 % de la population. Le RSS est une idée. Il est impossible d’interdire une idée. C’est le principal parti154 hindou nazi. Les nazis ont leur place en Inde. » Le thème sera repris ad nauseam, ainsi en 1999 : « Le RSS est un ennemi honnête. Les “Nazis” (hindous) ont montré à de nombreuses reprises qu’ils étaient les honnêtes ennemis des musulmans, des Dalit, des chrétiens [...] mais le Parti du Congrès fait de même sans s’afficher155. » Le développement d’une force « brahmane » centralisée est plus qu’un défi pour les mouvements dalit. C’est un besoin. Il participe de la volonté de stabiliser sa propre identité dans la confrontation. Des emprunts sémantiques, croisés ou parallèles, associent la Dalit Voice et les « Nazis de l’Inde ». Lorsque les nationalistes hindous mettront en avant le thème de l’« Hindou en colère » (kruddh hindu) au début des années 19801156, on verra apparaître l’expression « angry ambedkarite » (ambedkarien en colère) dans les colonnes de la Voix des Dalit. La revue a aussi emprunté à l’Organiser (RSS) le slogan de « conscientisation des masses » (Jan Jugaran) pour en faire celui de l’éveil des Dalit (Dalit Chetan).
6Ambedkar est le symbole opposant le « Nous Dalit » aux Autres, Brahmanes ou hindous nazis. Plus question de féliciter le RSS quand il y touche. Lorsque le RSS tente de séduire les basses castes allant, dès 1982157, jusqu’à installer et décorer des statues d’Ambedkar, donnant son nom à des cercles littéraires ou des bâtiments. Rajshekar fulmine : « Ils l’ont persécuté vivant, ils l’idéalisent mort. » Cette manière d’englober l’adversaire dans un ensemble conceptuel va peut-être pourtant au delà de la tactique. Il y a des siècles que le Bouddha est considéré comme le neuvième avatar de Vishnou par certains courants hindous. L’absorption du différent par intégration à son panthéon et son propre univers conceptuel fait partie d’un mode de pensée courant de l’advaytiya (monisme), influent au RSS. La revue ne se préoccupe cependant pas tellement du monisme, comme de toute philosophie. Elle débusque des complots. A. Shourie provoque, de son côté, des accès de rage quand, devenu compagnon de route du RSS après 1993, il se met à critiquer Ambedkar158. L’appareil vieillot du Sangh (l’Organisation, le RSS), d’abord ravi d’accueillir un intellectuel moderniste, refuse d’ailleurs de soutenir le polémiste sur ce point. La Voix des Dalit et le RSS sont finalement d’accord sur cet important sujet159 !
7L’activité de la Sangh Parivar (la « famille » du RSS) est cependant contrée, en certaines occasions avec tous les moyens, y compris les plus sales. En 1993, la Voix des Dalit diffuse une « circulaire secrète du BJP », qui fait de ce parti fort conservateur mais légal, plus soucieux que la moyenne de démocratie interne, une organisation criminelle d’envergure. Le document ressemble trop au Protocole des Sages de Sion160 pour ne pas être suspect. La Dalit Voice se nourrit de « documents » européens (voir infra) du genre de ce « Protocole ». Il est très difficile d’accorder du crédit à sa « révélation ». Rajshekhar jurera : « Ce document existe, j’en ai vu des copies », ce qui ne constitue pas une preuve très tangible d’autant plus qu’il explique plus loin : « Ces textes sont faits pour être détruits une fois lus. » Les pires délires circulent dans la mouvance du BJP, du RSS et de la Shiv Sena, mais à propos des musulmans. Les Dalit constituent un sujet plutôt secondaire et il n’est surtout pas question de les agresser mais bien plutôt de les séduire. Ces « instructions » n’ont de sens que dans une perspective de diabolisation des nationalistes hindous et de recentrage de la scène autour des victimes dalit. On y retrouve par ailleurs l’imaginaire de l’employé ou du professeur indien de n’importe quelle caste, avec son rapport extrêmement tendu à à la sexualité et à la transgression. La rumeur a été féconde. Nous l’avons retrouvée, aggravée et actualisée par la guerre de Kargill (1999) et la nucléarisation du Pakistan, en 2001 à Kanpur. Un lecteur est chargé de dévoiler ce texte161 où les hantises puritaines et le rôle central des représentations du corps se combinent à une vision apocalyptique du politique.
8La « circulaire » enjoint aux « hindous nazis » de se procurer des armes et des explosifs, de promouvoir l’hindutva parmi les médecins afin qu’ils intoxiquent subrepticement les Avarna162, surtout les ambedkariens, et les shudra (basses castes, intouchables et musulmans163), l’injection de poison et de médicaments périmés aux Avarna, la sous-nutrition systématique des Avarna, l’empoisonnement de la nourriture des non-hindous, le développement du « modèle de Surat » (ville du Gujarat où la peste venait de se déclencher, le BJP tenant la mairie164), la retardation mentale et physique des écoliers avarna, des manœuvres pour montrer à tous les parties sexuelles des filles avarna, inciter aux baisers sur la bouche et autres dépravations165, la multiplication des dons du sang afin de souiller celui des Avarna et transmettre des maladies, l’usage de matières toxiques par les photographes dans les localités avarna, l’incitation donnée aux joaillers et banquiers pour qu’ils drainent les richesses des non-hindous, la prononciation de la syllabe aum166 près des maison des avarna, la promotion du jeu, des loteries et de l’alcool dans les localités avarnas, l’entraînement des filles musulmanes dans la prostitution, la multiplication des émeutes intercommunautaires167, la publication de textes prouvant que les églises et les mosquées sont d’anciens temples hindous168, la destruction de la littérature antibrahmane, dalit et ambedkarienne, l’« hindouisation » des jaïn, sikhs et bouddhistes, l’assassinat des Dalit et des antibrahmanes169.
9La publication de ce texte, à côté de condamnations essentialisantes et amalgamantes des hindous, vaidik et autres « nazis » férus d’« apartheid », montre que le jeu de la haine et de la fascination, des valeurs partagées et des oppositions peut aller très loin. Un mouvement d’élites qui dit porter l’espoir de libération des opprimés, tout en valorisant l’instruction, la raison et l’effort, se place au niveau des peurs de la rue de soir d’émeute et de certains fantasmes de salle de classe, des professeurs appuyant la diffusion de ces monstruosités.
Notes de bas de page
137 Samajik kam, « social work », expression fondamentale pour comprendre la scène indienne et apprécier comment la politique se trouve évaluée à l’aune de la charité pendant que l’État est dévalué, tout en fournissant un cadre et des fonds aux ONG, clubs de notables et autres organisation de bienfaisance. La BAMCEF a commencé en flirtant avec le « travail social ». Elle a ensuite changé de perspective. La Voix des Dalit n’en fait pas et n’en veut pas. C’est une grande originalité. La difficulté qu’il y a en Inde à rompre les relations associées aux différents tissus paternalistes, à s’extraire des structures quasi familiales et inégalitaires restées omniprésentes, est sans doute derrière la virulence de certains propos et les provocations de la Dalit Voice. Ce sujet important mériterait une approche spécialisée.
138 Walter K. Andersen et Shridhar D. Dande, The Brotherhood in Saffron. The Rashtriya Swayamsevak Sangh and Hindu Revivalism, Vistaar Publications, New Delhi, 1987, xi-317 p. ; Madhav Sadashiv Golwalkar, Bunch of Thoughts, Jagaran Prakashan, Bangalore, 1966, xxxiv-437 p. ; K. Jayaprasad, RSS and Hindu Nationalism, Deep and Deep Publications, New Delhi, 1991, xx-396 p. Ces trois textes sont plus ou moins favorables au RSS ou émanent de lui. Voir aussi Jaffrelot, 1993 ; Tapan Basu et al, Khaki Shorts, Saffron Flags, Orient Longman New Delhi, 1993, 116 p. ; Thomas Hansen, The Saffron Wave. Democracy and Hindu Nationalism in Modem India, Oxford University Press, Delhi, 1999, VI-293 p. Le RSS aurait deux millions de membres, diversement engagés.
139 Bharatya Jan Sangh, ou Organisation indienne du peuple, créé en 1950. Craig Baxter, The Jana Sangh. A Biography of an Indian Political Party, University of Pennsylviana Press, Philadelphie, 1969, XII-352 p. ; Bruce Graham, Hindu Nationalism and Indian Politics. The Origins and Development of the Bharatya Jan Sangh, Cambridge University Press, Cambridge, 1990, XII-283 p.
140 Bharatya Mazdoor Sangh, Organisation indienne des travailleurs, créé en 1955 à Bhopal.
141 L’aile féminine, la Sewa Bharati, date de 1937. Lire les travaux de P. Bachetta.
142 Qui publie aussi Panchjanay en hindi et de multiples éditions régionales. La présence à Bangalore des Suruchi Prakashan, le second centre d’édition du RSS, après celui de la capitale, a peut-être indisposé et fasciné l’éditeur de la Dalit Voice.
143 Le journal du RSS pratique la polémique mais il est constitué d’articles assez disparates, la ligne éditoriale paraissant parfois confuse, avec beaucoup plus de pluralité que dans le Dalit Voice.
144 R. Shetty, Untouchability. Can it be Removed ?, 1980.
145 Samajwadi Party, parti socialisant fondé en 1989, influent dans la plaine du Gange.
146 Dalit Voice, vol. 13, no 6, 1994. Il y aura des allusions à ce mouvement lors de la destruction de la Babri Masjid, en 1993, des branches de ce parti ayant revendiqué la destruction du monument, mais sa spécificité ne sera jamais prise en compte. Bal Thakre, qui dirige la Shiv Sena de Mumbai, est cité comme un leader « hindou nazi » parmi d’autres.
147 Après avoir passé alliance avec le BJP en 1989, la Shiv Sena a gouverné le Maharashtra avec ce parti, au prix de très nombreux tiraillements et de polémiques parfois féroces. En 1998, la Shiv Sena s’inséra dans la coalition de vingt-quatre partis dirigée par le BJP, recevant trois postes de ministres. Elle a quitté cette coalition avant d’y revenir à l’automne 2001. Les nationalistes hindous ont quitté le gouvernement central en 2005. En 2006, leur force électorale reste importante et ils sont à la tête de plusieurs gouvernements provinciaux.
148 Dans nombre de jati brahmanes et d’autres rangs « supérieurs », le fils (aîné) est considéré comme la prolongation, religieuse et substancielle, du père.
149 Second Sarsangchalak du RSS, ancien étudiant en zoologie. Ce texte contient des passages ouvertement favorables aux fascismes.
150 Voir Jaffrelot, 1993.
151 R. Shetty, Untouchability. Can it be Removed ?, 1980.
152 Dalit Voice, vol. 1, no 9, 1982.
153 Dalit Voice, vol. 12, no 4 et vol. 12, no 5, 1993.
154 Le RSS est dirigé par un guide suprême (sarsangchalak) et des conseillers formant direction collégiale, sans publicité aux débats bien que le RSS eût été obligé d’adopter une constitution interne en 1949. Il ne présente pas de candidats aux élections. Il lui arrive d’en coopter ou d’en appuyer. S’il est vrai que la RSS soutient plutôt le Bharatya Janata Party, il lui est aussi arrivé de donner son appui à d’autres formations, notamment le Parti du Congrès. Ce n’est pas pour cette raison que la Voix des Dalit répète souvent que le BJP est le fils du Parti du Congrès (Dalit Voice, vol. 17, no 10,1998 par exemple), mais parce que le brahmanisme politique est considéré comme une entité à deux ou plusieurs têtes, qui s’adapte avec le temps sans jamais changer d’essence.
155 Dalit Voice, vol. 18, no 7, 1999.
156 Expression sans doute empruntée au cinéma commercial.
157 Dalit Voice, vol. 1, no 13, 1982.
158 Arun Shourie, Worshipping False Gods. Ambedkar and the Facts which Have Been Erased, ASA Publications, New Delhi, 1997, xii-663 p. Shourie soutient que les activités d’Ambedkar en font un soutien du Raj, ainsi qu’un ennemi de Gandhi et du nationalisme. Il ajoute que son rôle dans la rédaction de la Constitution a été beaucoup exagéré. Cette rhétorique ne semble pas soutenable, mais la manière dont certains militants dalit ont voulu la faire payer à A. Shourie, en le couvrant de goudron, montre qu’il y a là davantage qu’un débat d’idées.
159 Il est très difficile d’analyser ce que les cadres du RSS pensent vraiment d’Ambedkar. Ils ont tenté avec une apparente conviction de l’enrôler dans l’espèce de panthéon nationaliste hindou qu’ils élargissent depuis le début des années 1980 en faisant preuve d’un sens syncrétique et d’une capacité d’englober l’adversaire idéologique de plus en plus importants. Il reste cependant probable que nombre de pracharak (cadres RSS) ne portent pas ce « Docteur » dans leur cœur.
160 Voir les nombreux textes de Henry Coston, antisémite militant et éditeur en France du Protocole des Sages de Sion.
161 La circulaire est aussi dévoilée et citée in extenso dans le livre de Ha Bir Angar Ee, Pali is the Mother of Sanskrit, Tarachand Chavhan, Nagpur, 1994. Ce texte est une contestation point par point du délire d’un Brahmane pseudo-philologue qui tente, suivant une tradition séculaire, de montrer que les mots anglais contemporains proviennent du sanskrit. L’auteur, probablement dalit militant, ridiculise le Brahmane en « démontrant » que c’est le pali, langue liturgique du bouddhisme, qui tient ce rôle. Ces excursions abracadabrantes, il y en a toute une série, ne sont pas au centre du projet de la Dalit Voice, qui les recommande pourtant régulièrement comme des textes « cent pour cent dalit et authentiquement scientifiques ». Les instructions sont données en appendice III, comme un « document du RSS trouvé à Bhopal ». Leur contenu n’a rien à voir avec le sujet.
162 Avarna : sans varna. Ce terme de l’époque de Phule désigne spécifiquement les Intouchables et les tribaux. Les Shudra ne sont pas avarna, puisque shudra est le quatrième varna. En revanche personne n’est sans jati (ajati) vu le caractère souple de ce niveau d’appartenance.
163 Ce vocabulaire était aussi celui d’Ambedkar.
164 Cet événement grave semble relever d’une sous-gestion, ou d’une incapacité à gérer doublées d’une incapacité de résister aux appétits des marchands de main-d’œuvre et des petits entrepreneurs, plus que d’un modèle.
165 Se rappeler à quel point le cinéma indien est porté sur l’excitation des sens et en premier lieu la sexualité, le baiser tabou ne faisant que renforcer cette tendance.
166 La syllabe aum est au moins aussi importante chez les bouddhistes que chez les hindous. Elle aurait présidé à la création.
167 Les émeutes intercommunautaires se sont multipliées au cours des années 1980 (voir aussi infra) avec des inflexions inconnues jusqu’alors. Il est certain que des nationalistes hindous et des extrémistes musulmans ainsi que des hommes d’État connus comme modérés et centristes, comme les congressistes Narasimha Rao et Sharad Pavar, ont favorisé leur éruption. Personne ne semble en revanche contrôler la montée générale, par vagues, des tensions. Sur ces phénomènes : Sandria B. Freitag, Collective Action and Community. Public Arenas and the Emergence of Communalism in North India, Oxford University Press, Delhi, 1990, xvii-328 p. ; Hasan, 1979 ; Sudhir Kakar, The Colors of Violence, University of Chicago Press Chicago, 1996, XII-217 p.
168 Comme l’ouvrage de Kuttihkat Purushotama Chon, The Cross, Hindu Symbol (Mahesh Badlani, Bombay, 1994, 185 p.) (délire mythistorique et philologique), ou celui de Ishwar Sharan, The Myth of Saint Thomas and the Mylapore Shiva Temple (Voice of India, New Delhi, 1991, iv-68 p.) (texte nationaliste hindou).
169 Ce texte a été aussi divulgué par un Brahmane, R. K. Upadhyaya, de Bhopal, qui dit l’avoir vu circuler dans sa classe (il est professeur), dans les mains d’un militant « hindou nazi » (lire : du BJP).
Le texte seul est utilisable sous licence Licence OpenEdition Books. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.
Le vagabond et son ombre
G. Nagarajan
G. Nagarajan François Gros et Kannan M. (éd.) François Gros et Élisabeth Sethupathy (trad.)
2013
Vâdivâçal
Des taureaux et des hommes en pays tamoul
Cinnamanur Subramaniam Chellappa François Gros (éd.) François Gros (trad.)
2014
The legacy of French rule in India (1674-1954)
An investigation of a process of Creolization
Animesh Rai
2008
Deep rivers
Selected Writings on Tamil literature
François Gros Kannan M. et Jennifer Clare (dir.) Mary Premila Boseman (trad.)
2009
Les attaches de l’homme
Enracinement paysan et logiques migratoires en Inde du Sud
Jean-Luc Racine (dir.)
1994
Calcutta 1981
The city, its crisis, and the debate on urban planning and development
Jean Racine (dir.)
1990
Des Intouchables aux Dalit
Les errements d’un mouvement de libération dans l’Inde contemporaine
Djallal G. Heuzé
2006
Origins of the Urban Development of Pondicherry according to Seventeenth Century Dutch Plans
Jean Deloche
2004
Forest landscapes of the southern western Ghats, India
Biodiversity, Human Ecology and Management Strategies
B.R. Ramesh et Rajan Gurukkal (dir.)
2007