L’Histoire
p. 23-49
Texte intégral
1La reconstruction de l’histoire de la dynastie des Pallava, essentiellement basée sur l’analyse des inscriptions sur pierre et sur tablettes, est une tâche difficile. Si l’on peut établir la succession des rois, leur datation reste cependant délicate. Les épigraphes sont en effet datées en année de règne, ce qui permet de déterminer approximativement la durée de celui-ci mais non pas de définir la date exacte d’accession au trône. Il faudra souvent se tourner vers les inscriptions des dynasties contemporaines pour tenter de situer avec plus de précision le règne d’un souverain2.
1. Les débuts de la dynastie pallava
2Bien que les premiers témoignages épigraphiques pallava, en prakrit, aient été retrouvés en Andhra Pradesh, il semble que, dès le début de leur règne, les souverains de cette dynastie aient pris pour capitale la ville de Kāñcipuram3. Dans les tablettes de Maidavōlu (district de Guntur, Andhra Pradesh)4, l’ordre de donation à un officiel de Dhaññakaḍa5 est émis depuis Kāñcipuram par le prince pallava Śivaskandavarman, du gotra de Bharadvāja. Les tablettes en prakrit d’Hirahaḍagaḷḷi (district de Bellary, Andhra Pradesh) du roi pallava Dharma Mahādirāja Sivaskan davarman6, fils de Bappa, appartenant au gotra de Bharadvāja et pratiquant l’Agniṣṭoma, le Vājapeya et l’Aśvamedha, enregistrent un don, depuis Kāñcipuram, à des brahmanes du village d’Āpiṭṭi (district de Bellary). Ces documents, auxquels s’ajoutent les autres inscriptions pallava retrouvées en Andhra Pradesh et datant des IVe – VIe siècles7, montrent donc que cette dynastie, à ses débuts, contrôlait le sud de l’Andhra Pradesh (districts de Guntur et de Bellary) ainsi qu’une partie du Toṇṭaimaṇṭalam où se situe leur capitale Kāñcipuram8.
3On peut alors penser, à la suite de D. C. Sircar (1939 : 14), que les Pallava se sont établis dans le sud de l’Andhra Pradesh aux dépens de la dynastie des Ikṣvāku qui y régnait encore au cours du IIIe siècle. D. C. Sircar rapproche paléographiquement l’une des premières inscriptions pallava des inscriptions ikṣvāku et suppose la conquête de ces derniers par le premier roi de la dynastie pallava, Siṃhavarman9. T. V. Mahalingam (1988 : XXXIII), en revanche, considère que Siṃhavarman a commencé cette conquête mais que c’est son fils, Śivaskandavarman, qui la complète, car ce dernier entreprend divers sacrifices, symboles de la puissance qu’il aurait acquise. Ces hypothèses expliqueraient la prise de pouvoir des Pallava en Andhra Pradesh. On s’étonne cependant de ne trouver, dans les inscriptions pallava qui nous sont parvenues, aucune mention de ce haut fait : les rois, en effet, aiment à se vanter de leurs exploits.
4Les tablettes du roi Vijaya Skandavarman retrouvées à Ōṃgōḍu (district de Guntur, Andhra Pradesh), datées de la trente-troisième année victorieuse, sont considérées comme les premières en sanskrit uniquement10. Ce sont également les premières à proposer une lignée historique qui se présente ainsi : Mahārāja Kumaraviṣṇu, roi pallava du gotra de Bharadvāja et pratiquant le sacrifice du cheval ; son fils, Mahārāja Skandavarman ayant acquis son royaume grâce à ses prouesses ; son fils Vīravarman, victorieux dans de nombreuses batailles et son fils, le donateur, Vijaya Skandavarman.
5Les quatre tablettes suivantes ont été émises sous le règne du roi Siṃhavarman11 : les tablettes d’Uruvupalli et de Neḍuṅgarāya (Andhra Pradesh)12, les tablettes de Vesanta (équivalent de Jalalpuram, district de Guntur, Andhra Pradesh)13 et de Sakrepaṭna (district de Chikmagalur, Karnataka)14.
6Ces tablettes établissent une généalogie dont le début est à peu près semblable : Mahārāja Skandavarman, son fils Mahārāja Vīravarman (c’est avec lui que commence la généalogie des tablettes de Vesanta), son fils Mahārāja Skandavarman. Ces écrits divergent cependant sur la descendance de ce roi. Bien que toutes soient datées du règne de Siṃhavarman II, les deux premières sont issues sur l’ordre du prince héritier Viṣṇugopavarman, fils de Skandavarman, tandis que les deux dernières sont issues sur l’ordre de Siṃhavarman lui-même, également fils de Skandavarman. On est donc tenté ici de considérer Viṣṇugopavarman comme frère, probablement cadet, de Siṃhavarman II, le roi régnant, qui, à la suite d’une dissension aurait créé une nouvelle branche15.
7Arrivée à ce point, il me paraît nécessaire de résumer les données précédentes. Un groupe d’inscriptions prakrites permet de déterminer peut-être le premier roi de la lignée des Pallava, Siṃhavarman I. Puis le Yuvamahārāja Śivaskandavarman, peut-être fils de Siṃhavarman, règne à son tour. Sous un roi nommé Skandavarman, qui devrait être le Yuvamahārāja Śivaskandavarman ayant accédé au trône, les tablettes de Guṇapadēya (IP no 4) nous apprennent que le prince héritier se nomme Buddhavarman, et que son épouse Cārudevī lui a donné un fils Buddhyaṅkura. De ces deux derniers, aucune inscription ne nous est parvenue.
8Les épigraphes sanskrites présentent systématiquement une généalogie historique, grâce à laquelle on peut établir la succession de souverains suivante :
9Les tablettes de Cendalūr (district de Nellore, Andhra Pradesh)18, datées de la deuxième année du règne d’un roi pallava Mahārāja Kumāraviṣṇu et émises de Kañcipuram, offrent une généalogie qui ne coïncide pas avec celle établie ci-dessus :
Mahārāja Skandavarman
Mahārāja Kumāraviṣṇu
Mahārāja Buddhavarman
Mahārāja Kumāraviṣṇu (donateur)
10Le nom de Buddhavarman rappelle le prince héritier des tablettes de Cārudevī, dont le père était Skandavarman, ce qui n’est pas le cas ici. Il est donc difficile d’insérer cette généalogie entre celle des inscriptions prakrites et celle des inscriptions sanskrites. C’est ce que vient confirmer l’étude paléographique d’E. Hultzsch (EI VIII, no 23, p. 234), qui assigne ces tablettes aux Ve – VIe siècles et non au IVe, en remarquant leurs similitudes avec celles de Pīkira, de Māṅgaḷūr et d’Uruvupalli. Néanmoins, cette généalogie ne correspondant à aucune de celles que l’on trouve dans les tablettes de cette période, il est impossible de situer ces rois avec précision19.
11Ces épigraphes ne comportent aucun élément interne de datation. Les historiens, s’appuyant alors sur la paléographie pour définir la période de l’ensemble de ces écrits, proposent une fourchette entre la fin du IIIe siècle et le VIe siècle. Cependant, une référence extérieure aux édits pallava mérite ici d’être mentionnée. Dans un ouvrage de cosmologie jaïn, le Lokavibhāga, il est écrit que le saint Sarvanandin aurait achevé ce texte dans le village de Pāṭaḷika dans le Pāṇarāṣṭra « in the twenty-second year of Siṃhavarman, lord of Kāñci, in three-hundred with eighty in front, of the Śaka year »20. Après avoir identifié ce roi Siṃhavarman avec le donateur des tablettes de Māṅgaḷūr et de Pīkira, J. F. Fleet (1915) exprime ses doutes sur la validité de cette date Śaka 380 (458 après Jésus-Christ). Il argue, et ce avec raison, que l’utilisation de ce type de datation est extrêmement inhabituel à cette époque et tout spécialement dans cette région, et qu’elle n’apparaît dans l’épigraphie que bien plus tard avec les Cāḷukya au VIe siècle. Il finit cependant, malgré ses réticences, à accepter cette date et place donc le début du règne du roi pallava Siṃhavarman en 436. Puisque les tablettes de Sakrepaṭna sont datées de sa quarante et unième année de règne, il aurait donc régné au moins jusqu’en 47721.
2. La lignée de Siṃhaviṣṇu
12La chronologie des rois de la lignée dite « de Siṃhaviṣṇu » est plus facile à établir que les deux segments précédents. L’inscription de Vāyalūr (EI XXVII, no 18) du roi Rājasiṃha, dans le premier quart du VIIIe siècle, propose une très longue généalogie selon laquelle le prédécesseur direct de Siṃahavarman, père de Siṃhaviṣṇu, serait Viṣṇugopa22. Les tablettes, la plupart composées en sanskrit et en tamoul, ainsi que les inscriptions sur pierre, sont nombreuses et fournissent plus de détails. Elles sont cependant toujours datées en années de règne, empêchant d’établir une chronologie sûre, d’où les différences selon les historiens23.
2.1. Siṃhavarman et Siṃhaviṣṇu, deuxième moitié du VIe siècle
13À partir du roi Siṃhavarman, père de Siṃhaviṣṇu, il semblerait que les Pallava perdent l’Andhra Pradesh qu’ils occupaient depuis la fin du IIIe siècle, car leurs inscriptions sur ce territoire se font rares. Les premières tablettes du roi Siṃhavarman, datées de la sixième année de son règne, ont été retrouvées à Paḷḷaṅkōyil (taluk de Tiruttuṟaipūṇṭi, district de Tanjavur)24. Elles proclament la conquête du pays cōḻa par son fils, Siṃhaviṣṇu. Par ailleurs, une inscription viṣṇukuṇḍin de Vikramandra-bhaṭṭārakavarman, découverte à Tummalagūḍem (taluk de Ramannapēṭa, district de Nalgoṇḍa), datée de l’an 488 de l’ère Śaka (566 après Jésus-Christ), mentionne également la défaite du roi pallava Siṃha25, ce qui vient appuyer l’hypothèse que les Pallava se replient au Tamil Nad. Que le roi conquis soit Siṃhavarman ou son fils Siṃhaviṣṇu, la date de 566 permet de situer approximativement ces deux rois dans la deuxième moitié du VIe siècle. Siṃhaviṣṇu est également un contemporain du roi gaṅga Avinīta, qui aurait régné au cours de la deuxième moitié du VIe siècle26.
14Une pierre de héros retrouvée à Naraciṅkanallūr (taluk de Ceṅkam, district de Tiruvaṇṇāmalai) est datée de la trente-troisième année de règne d’un roi nommé Ciṅkaviṇṇaparumaṉ27. Il est fort possible que ce nom réfère au souverain Siṃhaviṣṇu. Pas d’autres témoignages épigraphiques de ces deux rois pallava ne nous sont parvenus28.
15On apprend, grâce aux tablettes de Kācākkuṭi (État de Pondichéry) (IP no 77 ; SII II, no 73 ; SII XII, no 33), au VIIIe siècle, que Siṃhavarman a donné naissance à deux fils, Siṃhaviṣṇu qui fonda la lignée principale et Bhīmavarman qui sera à l’origine d’une lignée collatérale à laquelle appartiendra Nandivarman II (infra p. 39).
2.2. Mahendravarman I, fin du VIe siècle– premier quart du VIIe
16Une quinzaine d’inscriptions pariétales attribuées au souverain Mahendravarman ont été retrouvées, éparpillées sur un large territoire au Tamil Nad, s’étendant du district de Tiruvaḷḷūr au nord à celui de Putukkōṭṭai au sud29. Elles ne proposent pas de généalogie et, aucune tablette de ce roi n’étant parvenue jusqu’à nous, ce n’est qu’avec les témoignages épigraphiques postérieurs que l’on apprend qu’il est le fils de Siṃhaviṣṇu et père de Narasiṃhavarman I30. L’année de règne de ce souverain n’est pas mentionnée dans ses insciptions. Cependant, toute une série de pierres de héros est datée en année de règne d’un roi nommé Mayentiraparumar ou Macīntiraparumaṉ31 : la plus haute s’élève à trente-neuf, dans l’épigraphe de Cāttaṉūr32. Il est fort probable qu’il s’agisse du roi Mahendravarman I, puisque les Mahendravarman suivants, II ou III, n’ont régné que très peu de temps.
17Ses inscriptions ne nous apprennent rien sur ses activités guerrières et politiques. Seules les tablettes de Nandivarman II de Kācākkuṭi évoquent une bataille à Puḷḷalūr au cours de laquelle Mahendravarman aurait anéanti ses adversaires33. Selon E. Hultzsch (SII II, 343), ce village est situé dans le district de Kāñcipuram et il identifie les ennemis vaincus aux Cāḷukya qui auraient pénétré sur le territoire pallava. Or, aucun élément ne permet de définir ainsi ces ennemis défaits et il me semble hasardeux de se prononcer sur leur identité. De fait, on ne sait pas si les hostilités entre Pallava et Cāḷukya de l’Ouest ont commencé sous son règne ou sous celui de son successeur.
18Selon la légende, le roi pallava évoqué dans le chapitre 26 du célèbre Periyapurāṇam de Cēkkiḻār (traduction de T. N. Ramachandra, p. 269– 291), serait Mahendravarman. De jaïn qu’il était, il aurait été converti au śivaïsme sous l’influence du saint Appar, l’un des trois auteurs du Tēvāram. Aucun vestige archéologique ne permet de corroborer cette légende. En revanche, c’est sous son règne que les premiers temples dédiés à des divinités brahmaniques sont excavés dans le Toṇṭaimaṇṭalam. Cette innovation est exprimée clairement dans son inscription de Maṇṭakapaṭṭu : « Sans briques, sans bois, sans métal, sans mortier, le roi Vicitracitta fit construire ce temple qui porte les marques de Brahmā, Īśvara et Viṣṇu »34. L’un des plus beaux temples excavés sous son règne est la grotte de Trichy ornée de la représentation de Gaṅgādharamūrti, premier relief narratif pallava.
19Par ailleurs, Mahendravarman I est l’auteur d’une farce sanskrite, le Mattavilasa prahasana35, qui ridiculise un bouddhiste, un Kāpālika et sa compagne, se battant autour d’un bol à aumône fait d’un crâne, empli de viande et d’alcool. Ce roi pourrait aussi avoir composé une seconde pièce, le Bhagavadajjukaprahasana36. Enfin, pour compléter le portrait d’un artiste-roi, des inscriptions consacrées à la musique retrouvées dans le district de Putukkōṭṭai, à Kuṭimiyāmalai, à Tirumayam et à Malākkōṭṭai (Malayakkōvil)37, lui sont attribuées.
2.3. Narasiṃhavarman I Māmalla, deuxième quart du VIIe siècle-troisième quart du VIIe siècle
20À Mahendravarman I succède son fils, Narasiṃhavarman I38. L’on sait que c’est sous son règne que le conflit avec la dynastie des Cāḷukya prend de l’ampleur. Des affrontements sont en effet attestés dans l’inscription de Pulakeśin II à Aihoḷe, datée de 63439, à l’issue desquels un roi pallava non nommé, qui se serait auparavant opposé à la montée du pouvoir de Pulakeśin II, se réfugie derrière les murs de Kāñcipuram. Il peut s’agir de Mahendravarman I ou de Narasiṃhavarman I, selon l’année d’accession au trône du deuxième, qui n’est pas définie. Cependant, si Mahendravarman I avait été un frein à la puissance de Pulakeśin, les tablettes de ses successeurs auraient probablement mentionné ce fait. Or, c’est à Narasiṃhavarman I que sont le plus souvent attribuées les victoires sur les Cāḷukya. Je pencherais alors plutôt pour identifier ce roi réfugié derrière les murs de sa capitale comme Narasiṃhavarman I. En 634, il aurait donc déjà combattu au moins une fois Pulakeśin II et subi une défaite. Les tablettes de ses successeurs évoquent comme événement majeur de son règne ses combats contre les Cāḷukya40. Il semble que la défaite qu’il inflige à ses ennemis dans leur capitale même, au cours de la treizième année de son règne, marquée par l’installation d’un pilier de victoire sur lequel est gravée la fameuse inscription dite de Bādāmi (IP no 37), les plonge dans un certain chaos pendant plusieurs années41. Si cette épigraphe est abîmée à l’endroit où la date en ère Śaka est donnée, nous empêchant de connaître la date d’accession au trône de ce souverain pallava, elle nous renseigne cependant sur l’une des grandes étapes d’un conflit qui durera deux siècles.
21Sous le règne du Cāḷukya Vikramāditya I, la situation semble se retourner et Narasiṃhavarman I est vaincu par ce roi, comme le seront ses successeurs Mahendravarman II et Parameśvaravarman I42. Il est généralement considéré que Vikramā-ditya est monté sur le trône vers 655, et on peut donc en conclure que Narasiṃhavarman régnait toujours à cette date. De plus, si la défaite des Pallava est mentionnée dans les tablettes de Gadvāl de Vikramā ditya datant de 674, en revanche, les tablettes de Talamañci de ce même roi (EI IX, no 12) que l’éditeur, F. Kielhorn, date de 660 (p. 102), ne mentionnent pas ces nombreuses victoires. Il est donc possible que la défaite de Narasiṃhavarman I face à son plus grand adversaire se situe entre 660 et 674.
22Ce roi pallava aurait, selon les écrits de ses successeurs, également combattu d’autres ennemis, tels que les Pāṇḍya, Cōḻa, Keraḷa et Kaḷabhra43. Il aurait par ailleurs contribué à la mise sur le trône de Ceylan du roi Mānavamma44.
23Outre ses nombreuses campagnes militaires, ce roi semble avoir consacré une attention toute particulière à l’art religieux. C’est en effet probablement sous son règne qu’ont été sculptées les œuvres majestueuses du site de Mahābalipuram, tels que la fameuse descente du Gange sur un immense rocher au centre du village et le Govardhanadhara à sa droite, les temples monolithiques appelés ratha, les temples excavés sur la colline et une partie du Temple du Rivage45. Le Toṇṭaimaṇṭalam semble avoir joui, si l’on en croit les propos du pélerin chinois Hieun Tsang qui visita ce pays probablement sous le règne de Narasiṃhavarman I, d’une grande richesse et de nombreux monuments religieux, bouddhiques, jaïns et hindous46.
2.4. Mahendravarman II
24Aucune inscription ne nous est parvenue de ce roi nommé Mahendravarman, dont on connaît l’existence uniquement à travers les tablettes de ses successeurs47 et grâce à celles de Gadvāl du roi cāḷukya Vikramāditya I, dans lesquelles ce dernier se vante de l’avoir vaincu (voir note 42). On ne peut déterminer la durée de son règne48.
2.5. Parameśvaravarman I, dernier quart du VIIe siècle
25Les tablettes cāḷukya de Gadvāl citées ci-dessus montrent donc qu’en 674, Parameśvaravarman I avait déjà accédé au trône pallava et avait subi au moins une défaite face à Vikramāditya I (EI X, no 22, l. 17– 18 : vers 3 et l. 20– 22 : vers 6). La date exacte du début de son règne reste cependant difficile à déterminer. Seules les tablettes de la dix-neuvième année de règne de ce roi à Vunna Guravapāḷem (IP no 45 ; EI XXXII, no 9)49 fournissent un indice d’ordre astronomique : elles auraient été gravées le treizième jour de la quinzaine claire du mois de Pauṣya. D. Sircar et P. Seshadri Sastri considèrent une fourchette entre 668 et 67450 pour l’accès au trône de ce roi, et en déduisent que la dix-neuvième année se situe entre 687 et 693. Entre ces deux dates, le treizième jour de la quinzaine claire du mois de Pauṣya ne peut tomber, d’après leurs calculs, que le 22 décembre 687. Ainsi, leur raisonnement les conduit à situer la dix-neuvième année de règne de ce roi entre décembre 686 et décembre 688 (EI XXXII, no 9, p. 95– 96).
26Ces tablettes ne fournissent pas d’éléments concernant les activités guerrières du roi, contrairement aux tablettes de Kūram (IP no 46 ; EI XVII, no 22, révision de SII I, no 151) qui louent la victoire de Parameśvaravarman I sur son ennemi cāḷukya Vikramāditya I (vers 21). Comme les tablettes de Vunna Guravapāḷem sont muettes au sujet de cette victoire, on peut supposer que celles de Kūram sont postérieures. Ce souverain est qualifié de « celui qui écrasa la cité de Raṇarasika, le seigneur suprême Ugradaṇḍa » dans l’inscription de son fils, Rājasiṃha, au Kailāsanātha51. Dans les tablettes des successeurs du Pallava, une victoire remportée sur le « Vallabha » à Peruvaḷanallūr est évoquée52, et il est raconté que le souverain a détruit l’armée cāḷukya53.
27D’après les tablettes gaṅga de Bedirūr (MAR 1925, no 105, 85– 89), Bhūvikrama aurait vaincu Pallavanarendrapati à Viḷanda. Pallavanarendrapati est identifié comme Parameśvaravarman I par C. R. Srinivasan (1979 : 32)54 qui semble trouver confirmation de ce conflit entre Gaṅga et Pallava dans le fait que les tablettes de Gadvāl (EI X, no 22) enregistrent une donation du roi cāḷukya Vikramāditya I sur la demande de la reine Gaṅgamahādevī, ce qui démontre une alliance entre les deux dynasties55.
28On comprend également, à la lecture des inscriptions pariétales et des tablettes de Parameśvaravarman I, que ce roi est un adorateur de Śiva. Sa dévotion est exprimée de manière très claire dans les tablettes de Vunna Guravapāḷem (paramamāheśvaraḥ), dans celles de Kūram (voir toute l’invocation à Śiva qui ouvre les tablettes), dans les inscriptions de fondation du Gaṇeśa ratha, du Dharmarāja maṇḍapa et dans celles du Rāmānuja maṇḍapa et du temple d’Ādivarāha à Mahābalipuram, où ceux qui n’adorent pas Śiva sont maudits56.
29Les inscriptions de fondation au Gaṇeśa ratha et au Dharmarāja maṇḍapa nous permettent donc d’attribuer l’excavation de ces monuments à Parameśvaravarman I. C’est également sous son règne que les premiers temples construits en pierre au Tamil Nad auraient été élevés, sur la colline à Tirukkaḻukkuṉṟam et dans le village de Kūram57.
2.6. Narasiṃhavarman II Rājasiṃha, fin du VIIe siècle-premier quart du VIIIe
30Narasiṃhavarman II, surnommé Rājasiṃha, succède à Parameśvaravarman I. La date d’accès au trône est, encore une fois, difficile à définir. Parmi les témoignages épigraphiques qu’il a laissés, seules les tablettes de Rēyūru58, datées de sa onzième année de règne, fournissent un indice ; mais celui-ci est d’ordre astrologique et il est donc hasardeux de le considérer comme entièrement fiable. Ces tablettes auraient été écrites le jour de la pleine lune de Vaiśākha, lors d’une éclipse de lune. En considérant une fourchette entre 680 et 728, P. B. Desai a déterminé les années au cours desquelles cette éclipse de lune a pu avoir lieu et propose ainsi pour la onzième année de règne de ce roi 701, 702, 711 et 720, soit comme date de début de règne 690, 691, 700 ou 711. Soulignant le fait que plusieurs dates sont acceptables, il choisit arbitrairement celle de 700 pour le début du règne de Narasiṃhavarman II59. Mais il est tout à fait possible de se ranger à l’avis d’autres historiens, tels que T. V. Mahalingam, qui ont opté pour 690–691. Les sources chinoises semblent suggérer que ce souverain régnait toujours en 72060 et une pierre de héros, datée paléographiquement du VIIIe siècle, a été inscrite au cours de la trentième année d’un roi nommé Koviyaiya Naraciṅkaparumaṉ61, qui peut alors être identifié à Narasiṃhavarman II.
31Aucun des témoignages épigraphiques qui lui sont attribués ne mentionnent de conquêtes ou de batailles particulières. Les inscriptions de ses successeurs sont également silencieuses à ce propos62. Il semblerait donc que son règne se soit inscrit sous le signe de la paix et ce souverain, maître d’un royaume stable, s’est consacré à des activités religieuses et artistiques. C’est en effet Narasiṃhavarman II Rājasiṃha qui a fait ériger la pièce maîtresse de l’art pallava, le temple du Kailāsanātha à Kāñcipuram63. Mais il est également responsable de nouvelles constructions dans l’enceinte du Temple du Rivage à Mahābalipuram, de l’érection de temples à Kāñcipuram (infra p. 52–60) et à Paṉaimalai, de l’excavation de la grotte d’Atiraṇacaṇḍeśvara à Cāḷuvaṅkkuppam64. Ces temples étant dédiés à Śiva, ce souverain se présente alors comme un fervent dévot de cette divinité.
2.7. Mahendravarman III
32Les tablettes des descendants de Narasiṃhavarman II Rājasiṃha lui attribuent toutes Parameśvaravarman comme fils et successeur65. Cependant, un certain Mahendravarman, fils de Rājasiṃha, fait construire un sanctuaire à proximité de celui de son père au temple du Kailāsanātha à Kāñcipuram (IP no 69). Il semblerait donc que le souverain pallava Narasiṃhavarman II ait eu deux fils et que seul Paramesvaravarman soit monté sur le trône. On peut poser ici deux hypothèses. Soit Parameśvaravarman était l’aîné et a donc accédé au trône sans difficulté, soit il fut le cadet mais Mahendravarman quitta ce monde avant son père. C’est souvent la deuxième hypothèse qui est adoptée par les historiens66.
2.8. Parameśvaravarman II, deuxième quart du VIIIe siècle
33Nous savons peu de choses sur ce roi. Aucun de ses exploits n’est rapporté dans les tablettes de ses successeurs. La seule épigraphe inscrite du temps de ce souverain a été retrouvée sur une dalle dans l’enceinte du temple du Vīraṭṭāṉeśvara de Tiruvatikai, taluk de Paṇruṭṭi et district de Kaṭalūr (Cuddalore) (ARE 1903, no 56, p. 22 ; IP no 71 ; SII VIII, no 331). Datée de la troisième année de son règne, elle enregistre une donation d’un certain Maṇiyaṉ, serviteur de Maheśvara, au temple d’Agastīśvara à Aviṉūr (infra p. 61).
34Puisque l’épigraphie pallava ne founit que très peu d’éléments sur le règne de ce souverain, c’est à nouveau vers celle des autres dynasties qu’il faut se tourner. Il semblerait que vers 731, le Cāḷukya Vikramāditya, alors Yuvarāja, ait envahi Kāñcipuram67. C’est sur le trajet du retour qu’il fait donation des villages d’Uḷchaḷa et de Pariyaḷu au Gaṅga Durvinīta Eṟeyappa, peut-être en récompense de l’assistance de celui-ci dans cette conquête68. T. V. Mahalingam (1969 : 135 – 136) suppose que Parameśvaravarman II fut tué sur le champ de bataille au cours d’un affrontement contre le Gaṅga Śrīpuruṣa69. La mort brusque du souverain plonge alors le royaume dans le chaos, comme en témoignent les inscriptions et les tablettes de Nandivarman II, roi qui succèdera à Parameśvaravarman II.
2.9. Nandivarman II Pallavamalla, deuxième quart du VIIIe siècle– fin du VIIIe siècle
35Nandivarman II Pallavamalla succède à Parameśvaravarman II. Malgré les tablettes d’Utayēntiram (IP no 76 ; SII II, no 74), datées de la vingt et unième année du règne du roi Nandivarman, qui présentent ce dernier comme le fils de Parameśvaravarman70, on comprend d’après les divers écrits de ce souverain qu’il est le fils d’Hiraṇyavarman, descendant du roi Bhīmavarman, frère de Siṃhaviṣṇu, qui fonda une lignée collatérale71. Les conditions d’accession au trône pallava de Nandivarman restent encore assez obscures. Selon les épigraphes datées de son règne, il aurait été choisi par ses sujets72 ou aurait accepté la charge de souverain à l’âge de douze ans, après que ses trois frères aient refusé, lorsqu’une délégation se présenta devant son père Hiraṇyavarman afin de quérir un successeur au trône73. On ne peut cependant écarter l’hypothèse que Nandivarman, à la mort soudaine de Parameśvaravarman II, se soit emparé par la force du trône pallava laissé vacant. Quelles que soient les conditions d’accession à la souveraineté, Nandivarman doit faire face, au cours de son règne, à l’attaque d’autres princes pallava, peut-être deux princes dont le nom est mentionné dans les tablettes gaṅga d’Haḷḷegere (note 66) et Citramāya, laissant ainsi supposer que son règne est contesté. Ce dernier opposant sera défait par Udayacandra, un fidèle général de Nandivarman, qui semble avoir mené de nombreuses expéditions contre les ennemis du roi74.
36Le long règne de Nandivarman75 est ponctué de nombreuses guerres. Ses tablettes mentionnent des victoires contre les Śabara, les Niṣāda, peut-être les Cāḷukya de l’Est, les Pāṇḍya, les Gaṅga, les Keraḷa, les Coḷa, les Maḷava, les Kaḷabhra, les Bāṇa, les Sāndhra, les Saindhava, les Śāntavaṃkurava, les Kadaṃba, les Vallabha, les Tuḷu76. Les Cāḷukya de l’Ouest continuent leurs invasions répétées du territoire pallava jusqu’au milieu du VIIIe siècle77. Mais leur puissance décline et leur territoire passe aux mains de la dynastie des Rāṣṭrakūṭa dont le pouvoir grandit. Les relations entre Pallava et Rāṣṭrakūṭa sont peu claires et périodes de guerre alternent peut-être avec périodes de paix78. Le souverain rāṣṭrakūṭa Dantidurga (725– 758), qui renversa le pouvoir cāḷukya, aurait conquis Kāñcipuram79. Dans la deuxième moitié du VIIIe siècle, Nandivarman II, allié aux Gaṅga et aux Cāḷukya de l’Est, prend le parti du roi rāṣṭrakūṭa Govinda II qui livre une guerre de pouvoir à son frère Dhruva. Ce dernier punira les Pallava une fois sur le trône80. C’est probablement ce même roi qui mène une expédition contre les Pallava au cours de laquelle tombe un Gaṅga81.
37Cette alliance des Pallava avec les Gaṅga s’est formée après une longue période de conflit82 et ne semble pas avoir duré. Dans des tablettes de la cinquante-huitième année de son règne, il est dit que Nandivarman porte sur la poitrine le collier arraché à Gaṃga, orné de l’Ugrodaya83. Les Pāṇdya sont également engagés dans des combats contre le Pallava Nandivarman II. En témoignent d’une part les inscriptions et tablettes de Nandivarman II lui-même84, d’autre part les écrits des Pāṇḍya85. Si les ennemis du Pallava sont nombreux, il semble cependant pouvoir compter sur ses fidèles vassaux, les Bāṇa86.
38Malgré les évènements guerriers qui ponctuent son règne, Nandivarman II est responsable de l’érection de plusieurs temples. On pense en premier lieu à la pièce unique qu’est le Vaikuṇṭha Perumāḷ à Kāñcipuram et qui porte l’une de ses épigraphes (IP no 93). Des inscriptions datées de son règne se retrouvent aussi sur le temple du Vaikuṇṭha Perumāḷ d’Uttaramērūr (IP no 78 ; no 96). Ces deux temples reflètent l’orientation de sa dévotion, le viṣṇuïsme, ce que viennent corroborer les éloges de Viṣṇu dans ses tablettes (bien que des références à Śiva soient également présentes, montrant que le roi n’est pas sectaire). On peut encore évoquer le temple du Mukteśvara à Kāñcipuram dont l’inscription sur le soubassement (IP no 80) est datée du règne d’un Nandivarman qu’on suppose être Nandivarman II (infra p. 62– 64). Si ce temple est érigé sous son règne, le Mātaṅgeśvara qui lui ressemble fortement, sur le même site, l’est probablement aussi.
39Soulignons par ailleurs que la présence de plusieurs inscriptions pariétales (IP no 74 ; no 85 ; no 88) évoquant des jaïns semble témoigner d’une certaine tolérance religieuse sous le règne de Nandivarman II.
3. Les Pallava au IXe siècle
3.1. Dantivarman, fin du VIIIe–milieu du IXe siècle
40Les tablettes de Vēlūrpāḷaiyam de Nandivarman III (IP no 121) et celles de Ciṟṟūr de Nṛpatuṅgavarman (IP no 152) présentent le roi Dantivarman comme le fils de Nandivarman II. Selon les premières, ce souverain épouse la princesse kadamba Aggaḷanimmaṭī. Aucun exploit ou conquête particuliers ne lui sont attribués, mais il aurait subi plusieurs attaques rāṣṭrakūṭa dès le début du IXe siècle87. Il semble qu’il ait régné au moins cinquante et un ans88 et que Muttaraiyar et Bāṇa soient ses vassaux89.
41Les historiens ont remarqué l’absence d’inscriptions de Dantivarman entre sa vingt et unième et sa quarante-neuvième année de règne. Les épigraphes appartenant à cette période pourraient avoir disparu ou n’avoir pas encore été découvertes90. Mais plusieurs historiens supposent un interrègne pour expliquer ce phénomène. Les preuves sont cependant peu tangibles et aucune source épigraphique n’y fait allusion91.
42Beaucoup des inscriptions du règne de Dantivarman se situent sur des pierres qui semblent avoir fait partie d’un temple et enregistrent des donations à ce sanctuaire. Cependant, peu d’entre eux ont survécu.
3.2. Nandivarman III, troisième quart du IXe siècle
43D’après les tablettes de Vēlūrpāḷaiyam (IP no 121 ; SII II, no 98 ; S. Brocquet [1997 : no 60]) et celles de Kumaraṭimaṅkalam (N. Ramesan : 1976), datées respectivement de la sixième et de la dixième année de règne du souverain Nandivarman III, ce dernier est le fils de Dantivarman92 et de son épouse, la princesse kadamba, Aggaḷanimmaṭī. Ce roi aurait régné au moins vingt-trois ans93. À partir de sa dixième année de règne (IP no 122), il prend le titre, dans ses inscriptions, de teḷḷāṟṟerinta nandippottaraiyar, signifiant qu’il a été vainqueur d’une bataille dans la ville de Teḷḷāṟu (taluk de Vantavāci, district de Tiruvaṇṇāmalai)94. Or toute tentative d’identification de ses adversaires demeure caduque95.
44D’une part, Pāṇḍya et Pallava semblent entretenir des relations amicales96, d’autre part, une alliance matrimoniale a été contractée avec les Rāṣṭrakūṭa et Nandivarman III épouse la princesse Śaṅkhā97. Ces dynasties ne guerroient probablement donc pas. Enfin, la dynastie des Cōḻa reste subordonnée aux Pallava, si l’on considère la donation décrite dans les tablettes de Vēlūrpāḷaiyam, qui est faite sur la demande de Kumārāṅkuśa, décrit comme le « joyaux sur la coiffe de la lignée Cōḻa ». Les Bāṇa restent les alliés fidèles des Pallava, comme le montrent plusieurs inscriptions qui les mentionnent98. Parmi les vassaux, on compte apparemment encore les Gaṅga99 et Vikrampūti, le chef Koṭumpalūr de la dynastie des Irukkuvēḷ100.
45Les inscriptions de Nandivarman III enregistrent essentiellement des donations à des temples, montrant que beaucoup d’entre eux existaient déjà à cette époque tels que ceux de Paḷḷikoṇṭa, taluk et district de Vēlūr (IP no 114), de Kīḻūr (Kīḻaiyūr), taluk de Tirukkōyilūr, district de Viḻuppuram (IP no 118), de Tillaittānam, taluk de Tiruvaiyāṟu et district de Tanjavur (IP no 122), de Tiruvatikai, taluk de Paṇruṭṭi et district de Kaṭalūr (IP no 123), etc. C’est sous son règne que le temple viṣṇuïte de Kiḷiyaṉūr, taluk de Vāṉūr et district de Viḻuppuram, aurait été construit (IP no 115).
3.3. Les derniers rois, fin du IXe siècle
3.3.1. Nṛpatuṅgavarman
46Fils de Nandivarman III et de la princesse rāṣṭrakūṭa Śaṅkhā, Nṛpatuṅgavarman succède à son père sur le trône pallava (tablettes de Ciṟṟūr : IP no 152 ; tablettes de Bāhūr : IP no 155 et EI XVIII, no 2). Les inscriptions datées de son règne, couvrant un large territoire allant du sud de l’Andhra Pradesh au district de Trichy, définissent une période de vingt-six ans dans un premier temps (IP no 150 à 190). Puis aucun témoignage épigraphique n’est relié à ce souverain jusqu’à une inscription à Maṭavalam, taluk de Ūttukkōṭṭai, district de Tiruvaḷḷūr (IP no 335), datée de sa quarante et unième année de règne. Comme nous le verrons plus loin, cette longue interruption est probablement due à la victoire de Kampavarman, frère de Nṛpatuṅgavarman.
47La date de l’accès au trône du souverain pallava a été calculée sur la base de données astrologiques mentionnées dans une inscription de Tiruccenampuṇṭi (IP no 175). Or les résultats sont variés, montrant la fragilité de tels éléments : K. V. Subramanya Aiyer (SII VII, p. III) propose 845, K. R. Srinivasan (1964 : 13), 859 et T. V. Mahalingam (1969 : 212), 869.
48Sur les traces de son père, Nṛpatuṅgavarman semble continuer d’entretenir des relations amicales avec les Pāṇḍya. C’est ce que l’on peut déduire tout d’abord du vers 16 des tablettes de Bāhūr, dans sa huitième année de règne, où il est dit que « Ce roi, dont la faveur valut autrefois une armée à Pāṇḍya, dans un combat, fut l’incendie qui réduisit en cendre une coalition ennemie, sur l’autre rive de l’Aricit »101. Il faut encore poser la question de l’identification de cette coalition ennemie. E. Hultzsch (1925– 1926, EI XVIII, no 2, p. 7) suppose qu’il s’agit des Cōḻa. Cette hypothèse me paraît tout à fait acceptable, car, comme le souligne T. V. Mahalingam (1969 : 214– 216), quelques inscriptions du règne d’Āditya I se trouvent en territoire pallava approximativement à la même période102, montrant ainsi que le règne de Nṛpatuṅgavarman fut troublé par la montée de cette dynastie. Une autre épigraphe qui permet de conclure à une entente entre Pāṇḍya et Pallava est inscrite dans le temple de Tiruvatikai (IP no 167) : elle enregistre une donation de Pāṇṭi Varaguṇa Mahārājaṉ au cours de la dix-huitième année de règne de Nṛpatuṅgavarman.
49Si les Pallava subissent des attaques des Noḻamba (IP no 188 et 189), ils semblent néanmoins pouvoir compter sur l’appui des Gaṅga (IP no 188 et 189). Leurs fidèles vassaux, Bāṇa (tablettes de Ciṟṟūr : IP no 152 ; inscription de Guḍimallam : IP no 181) et Muttaraiyar (inscription de Nārttāmalai : IP no 154 ; tablettes de Bāhūr : IP no 155 ; inscription de Tirumukkūṭal : IP no 185), ne les ont pas délaissés en ces temps troublés.
50Parmi les monuments qui ont vu le jour pendant le règne de Nṛpatuṅgavarman, on relève essentiellement le temple excavé de Nārttāmalai (taluk de Kuḷattūr et district de Putukkōṭṭai) dont la fondation est due à un Muttaraiyar (IP no 154) et le temple construit de Parameśvarmaṅgalam (taluk de Ceyyūr, district de Kāñcipuram) sur les bords de la rivière Pālār (IP no 159).
3.3.2. Kampavarman
51Le règne de Kampavarman est difficile à situer. Plus d’une trentaine d’inscriptions datées de son règne, l’année de règne la plus haute s’élevant certainement à 26 (IP no 232), peut-être à 32 (IP no 233), ont été retrouvées essentiellement dans le nord du Toṇṭaimaṇṭalam. Son nom n’apparaît dans aucune tablette, excepté dans celles de Vēḷañcēri de son fils Aparājitavarman103 qui mentionnent un combat entre Nṛpatuṅgavarman et Kampavarman duquel ce dernier sort vainqueur (vers 7). Kampavarman aurait donc arraché le pouvoir des mains de Nṛpatuṅgavarman, ce qui expliquerait le silence épigraphique de ce dernier jusqu’à la résurgence de l’une de ses inscriptions datée de sa quarante et unième année de règne (supra p. 46), après qu’Aparājitavarman soit tombé.
52Il est alors possible d’envisager Kampavarman comme le frère de Nṛpatuṅgavarman. Or, son règne n’ayant probablement pas précédé celui de Nṛpatuṅga puisqu’il n’est pas évoqué dans les tablettes de celui-ci, il serait son frère soit cadet, soit de mère différente. Considérant que ces trois derniers rois, Nṛpatuṅgavarman, Kampavarman et Aparājitavarman, ont régné grosso modo au cours du dernier quart du IXe siècle, le règne des deux premiers l’un à la suite de l’autre (vingt-six et trentedeux ans) dépasserait largement ce cadre. En 1935– 36, V. Venkatasubba Aiyar104 propose alors l’idée que Nṛpatuṅgavarman et Kampavarman ont régné conjointement pendant un certain nombre d’années, en se basant sur des inscriptions de ces deux rois dans les mêmes temples (Uttaramērūr, district de Kāñcipuram ; Kāvērippākkam, taluk d’Arakkōṇam, district de Vēlūr ; Tiruvoṟṟiyūr, taluk d’Ampattūr, district de Tiruvaḷḷūr).
53Kampavarman semble pouvoir compter sur les mêmes alliés que Nṛpatuṅgavarman, à savoir les Gaṅga (IP no 201, 209, 221) et les Bāṇa (IP no 202, 209). La donatrice d’une des inscriptions de Tiruvoṟṟiyūr, Pūti Aṟintikai, épouse de Viṭelviṭuku Iḷaṅkōvēlār de la famille de Koṭumpalūr (IP no 219) est la même que celle du temple de Kīḻūr (Kīḻaiyūr) dans une inscription de Nandivarman III (IP no 124), montrant que la famille de Koṭumpalūr est encore attachée aux Pallava en cette fin de IXe siècle.
54Les temples de Cōḻapuram (IP no 201) et de Kavantantalam (IP no 213 et 214) ont été érigés sous le règne de Kampavarman. Une inscription à Mallam (IP no 226), district de Nellore, nous apprend que le sacrifice de sa propre chair remise aux pieds de la déesse est tenu en haute estime et mérite récompense.
3.3.3. Aparājitavarman
55Aparājita, dont le règne durera au moins dix-huit ans (IP no 246), est le fils de Kampavarman et d’une princesse gaṅga nommée Vijayā105. Les tablettes de Vēḷañcēri, datées de sa neuvième année de règne, signalent quelques faits importants. Tout d’abord, il se serait battu contre les Bāṇa. Or, deux inscriptions de la quatrième année de son règne à Tiruvoṟṟiyūr (IP no 238 et 239) mentionnent une donation faite par la maîtresse d’un Bāṇa, montrant qu’en ses premières années, Aparājita comptait toujours cette dynastie mineure parmi ses vassaux. Les Bāṇa semblent jouir d’une période d’indépendance dès 810 de l’ère Śaka (888 de notre ère)106, subissant désormais les attaques du Pallava. Les tablettes de Vēḷañcēri évoquent encore la victoire d’Aparājitavarman sur les Pāṇḍya à Kāraṇi, et sur les Cōḻa à Ciṟṟaṟṟūra.
56Āditya I, le souverain des Cōḻa, est probablement contemporain du Pallava. En effet, en cette fin de IXe siècle, des inscriptions du roi cōḻa apparaissent dans le Tonṭaimaṇṭalam107, signalant que cette dynastie prend peu à peu possession de cette région. La défaite d’Aparājita face à Āditya et l’annexion de son territoire sont des événements rapportés dans les tablettes de Tiruvālaṅkāṭu de Rājendracōḻa (SII III, part III, no 205, vers 49). Il est de plus stipulé, dans une inscription de Vīrājendra à Kanyākumari (EI XVIII, no 4), qu’un roi pallava a péri sous la main d’Āditya I. On peut penser ici à Aparājita, mais il est aussi possible qu’il s’agisse, comme le propose K. R. Srinivasan (1964 : 17), de Nṛpatuṅgavarman qui semble encore être vivant à la fin du IXe siècle. Quel que soit ce roi, on comprend que la dynastie des Cōḻa, Āditya I à sa tête, s’installe dans le Toṇṭaimaṇṭalam après avoir vaincu les Pallava à la fin du IXe siècle ou peut-être au début du Xe siècle. Ces derniers ne se relèveront pas de ces défaites et ce tournant marque la fin de la grande dynastie des Pallava.
Notes de bas de page
2 Pour les ouvrages consacrés à l’histoire des Pallava, voir entre autres R. Gopalan (1928), K. R. Srinivasan (1964), T. V. Mahalingam (1969, 1977 et 1988), C. R. Srinivasan (1979).
3 Personne, jusqu’ici, n’a pu déterminer l’origine des Pallava. On suppose qu’ils sont étrangers au Toṇṭaimaṇṭalam pour au moins deux raisons. Tout d’abord, toutes les données des Pallava anciens se situent en Andhra Pradesh et T. V. Mahalingam (1969 : 23) remarque de fortes similitudes avec une dynastie de cette région, les Śālaṅkāyana. Ensuite, leurs inscriptions sont en prakrit puis en sanskrit et le tamoul n’apparaît qu’à partir de la deuxième moitié du VIe siècle, laissant supposer que celui-ci n’est assimilé qu’après un long séjour dans la région. Proposée par Mr. Venkayya, L. Rice et V. Smith cités par R. Gopalan (1928 : 15– 18), l’assimilation entre les Pallava et les Pahlava — les Parthes d’origine perse présents dans le Nord-Ouest de l’Inde avant l’ère chrétienne — a été rejetée. Comme le soulignent justement R. Gopalan (1928 : 16– 21) et T. V. Mahalingam (1969 : 21), elle ne repose que sur une similitude phonétique. Rien, en effet, ne permet de supposer une telle migration du Nord-Ouest vers le Sud-Est dont nous n’avons aucune trace. Par ailleurs, les Pallava, se réclamant du gotra de Bharadvāja dès la première inscription recensée (inscription de Mañchikallu, Andhra Pradesh, du roi Pallava Siṃhavarman : EI XXXII, no 8 – 2) et pratiquant entre autres le sacrifice du cheval (tablettes d’Hirahaḍagaḷḷi du prince pallava Śivaskandavarman : EI I, no 1), ne sont de toute évidence pas étrangers à la péninsule indienne. La seule conclusion que les historiens peuvent alors tirer est que les Pallava ne sont ni originaires du Toṇṭaimaṇṭalam ni étrangers à l’Inde, mais qu’ils viennent d’une région que l’on ne peut déterminer, au nord du Tamil Nad.
4 EI VI, no 8 ; IP no 2 : T. V. Mahalingam les assigne au premier quart du IVe siècle.
5 Dhānyakaṭa ou Dhaññakaḍa est une ville généralement identifiée par les historiens comme Amarāvatī. Contra A. Bareau (1965) qui, se basant sur la description de ce site dans les écrits du pèlerin chinois Hiuen Tsang, assimile Dhānyakaṭa à Bezwada. Je remercie ici E. Francis d’avoir porté cet article à ma connaissance.
6 EI I, no 1 ; IP no 3. T. V. Mahalingam les date du milieu du IVe siècle.
7 Inscription pariétale de Mañchikallu, en prakrit, de Siṃhavarman (EI XXXII, no 8 – 2 ; IP no 1) ; tablettes prakrites et sanskrites datant du règne de Mahārāja Vijaya Skandavarman (EI VIII, no 12 ; IP no 4), commanditées par la reine Cārudevī, épouse du prince Buddhavarman, et mère de Buddhyaṅkura, retrouvées à Guṇapadēya (district de Guntur, Andhra Pradesh). T. V. Mahalingam assigne ces tablettes à la deuxième moitié du IVe siècle. Ce sont les dernières à utiliser le prakrit. Les inscriptions suivantes, jusqu’aux tablettes de Paḷḷaṅkōyil du roi Siṃhavarman III (IP no 17), presque toutes situées en Andhra Pradesh, sont écrites en sanskrit uniquement.
8 C’est encore Kāñcipuram comme capitale des Pallava qu’une épigraphe de la dynastie des Kadamba évoque. Voir l’inscription du pilier de Tāḷaguṇḍa (État de Mysore, taluk de Shikārpur, district de Shimoga) du roi Kadamba Kākuṣṭhavarman (EI VIII, p. 24– 36, éditée par F. Kielhorn, qui l’assigne approximativement à la première moitié du VIe siècle). Cette inscription, commanditée par le roi Śāntivarman, fait référence au premier souverain de la dynastie, Mayūraśarman, qui se rend à Kāñcipuram, se querelle avec les Pallava, s’engage dans une bataille contre eux, défait leurs gardiens de frontière, les Bāṇa, jusqu’à Śrī Śailam. Puis, le roi pallava reconnaissant sa valeur, tous deux deviennent amis et le souverain Kadamba se met au service du Pallava, jamais nommé dans cette inscription.
9 Dans EI XXXII, p. 87– 89, D. C. Sircar commente l’inscription prakrite en écriture brāhmī du roi pallava Siṃhavarman de Mañchikallu (district de Guntur, Andhra Pradesh). Cette inscription est considérée comme la première de la dynastie des Pallava et est assignée par l’éditeur à la fin du IIIe siècle sur des critères paléographiques, comme le suppose également T. V. Mahalingam dans IP no 1. D. C. Sircar (p. 87) rapproche paléographiquement cette inscription de celles des Ikṣvāku de Jaggayapeṭa et de Nāgārjunakoṇḍā, datées de la deuxième moitié du IIIe siècle. Selon lui (p. 89), cette ressemblance entre les inscriptions de ces deux dynasties suggère que l’une, celle des Pallava, a supplanté l’autre, celle des Ikṣvāku, dans la vallée de Kṛṣṇa-Guntur à la fin du IIIe siècle. Il pose l’hypothèse que le roi pallava, présent non loin de Vijayapura, la capitale des Ikṣvāku dans la vallée de Nāgārjunakoṇḍā, est responsable de la destruction de cette ville et de ses établissements bouddhiques. Cependant, aucun témoignage ne nous est parvenu de cet événement.
10 IP no 5 ; S. Brocquet (1997 : no 2) ; EI XV, no 11– A, éditées par H. Krishna Sastri, qui les rapproche paléographiquement des inscriptions d’Uruvupalli, de Māṅgaḷūr et de Pīkira (Ve siècle) du roi Siṃhavarman.
11 Si l’on prend en compte le Siṃhavarman de l’inscription prakrite de Mañchikallu (supra p. 23– 24), premier roi de la dynastie pallava ayant laissé des traces dans l’épigraphie, on peut alors qualifier le souverain de ces tablettes comme Siṃhavarman II.
12 ARE 1941–42, A, no 2 ; IP no 6 – 7 ; S. Brocquet (1997 : no 3 – 4) ; TCP, 283– 290 et 303– 308. Toutes deux établies à partir de Palakkaḍa, les premières sont datées de la onzième année de règne de Siṃhavarman tandis que les deuxièmes sont datées de la douzième année du même souverain, bien que le donateur soit le prince héritier Viṣṇugopavarman, fils du roi Skandavarman.
13 IP no 8 et S. Brocquet (1997 : no 5). Ces tablettes sont émises de Kāñcipuram et datées de la dix-neuvième année de règne du roi Siṃhavarman.
14 IP no 9 ; S. Brocquet (1997 : no 6) ; EI XXXVIII, part III, no 18, éditées par G. S. Gai qui rapproche la paléographie de ces tablettes de celle des tablettes de Māṅgaḷūr, de Pīkira et de Vesanta. Elles sont émises au cours de la quarante et unième année de règne du roi Siṃhavarman. G. S. Gai rappelle que D. C. Sircar a déjà identifié le Sēndrakarājya comme une partie du district moderne de Shimoga dans l’État de Mysore. C’est un village de cette région que le roi pallava donne, ce qui permet donc de penser que son royaume s’était étendu à l’est du Karnataka.
15 Voir G. S. Gai, EI XXXVIII, part III, p. 102. L’auteur suppose que Siṃhavarman II n’a pas eu de fils et que la continuité de la lignée a donc été assurée par Viṣṇugopavarman. Or, les tablettes d’Utayēntiram de Nandivarman (EI III, no 23 ; IP no 10 ; S. Brocquet [1997 : no 7] ; sur critères paléographiques, F. Kielhorn, éditeur des ces tablettes dans EI les considère comme postérieures à celle d’Uruvupalli [milieu Ve ]), émises de Kāñcipuram au cours le la première année de règne, proposent une généalogie qui semble indiquer qu’il est le petit-fils de Siṃhavarman II : Skandavarman, son fils Mahārāja Siṅghavarman (très probablement Siṃhavarman II lui-même), son fils Skandavarman et son successeur Nandivarman. Je serais donc tentée de suivre ici T. V. Mahalingam (1969 : 28 – 29 et 1988 : LXXXIV) et C. R. Srinivasan (1979 : 24) qui supposent une branche collatérale créée par Viṣṇugopavarman. Ceci semble d’ailleurs assez clair si l’on considère un groupe d’inscriptions dont le donateur est Siṃhavarman, fils du prince héritier Viṣṇugopavarman : 1) tablettes d’Ōṃgōḍu, quatrième année de règne : EI XV, no 11– B, éditées par H. Krishna Sastri qui émet l’hypothèse d’une copie, au VIIe siècle, de tablettes du Ve – VIe siècle ; IP no 12 ; S. Brocquet (1997 : no 9) ; 2) tablettes de Pīkira, cinquième année de règne : EI VIII, no 15, éditées par E. Hultzsch ; IP no 13 ; S. Brocquet (1997 : no 10) ; 3) tablettes de Māṅgaḷūr, huitième année de règne : IAV, 154– 157, éditées par J. F. Fleet ; IP no 14 ; S. Brocquet (1997 : no 11) ; 4) tablettes de Viḻavaṭṭi, dixième année de règne : EI XXIV, no 43, éditées par C. R. Krishnamacharlu ; IP no 15 ; S. Brocquet (1997 : no 12). On peut ajouter à cet ensemble une autre inscription émise sous le règne de Mahārāja Viṣṇugopavarman, fils du Mahārāja Siṅghavarman, petit-fils du Mahārāja Viṣṇugopavarman (tablettes de Curā : EI XXIV, no 18, éditées par C. R. Krishnamacharlu, qui suppose que ces tablettes sont une copie, au VIIe siècle, d’un original du Ve ; IP no 16 ; S. Brocquet [1997 : no 13]). Cette dernière montre que cette branche est devenue indépendante et que Viṣṇugopavarman, de Yuvamahārāja, a endossé le titre de Mahārāja, et l’a transmis à sa descendance.
16 Ce roi, mentionné dans les tablettes d’Ōṃgōḍu du roi Vijaya Skandavarman (EI XV, no 11– A, éditées par H. Krishna Sastri ; IP no 5 ; S. Brocquet [1997 : no 2]), serait, selon P. V. Parabrahma Sastri (EI XLII, no 5, p. 47), le donateur des tablettes de Babbēpalli. Il descendrait, selon ces tablettes que l’éditeur assigne au milieu du Ve siècle, de Vīrakūrca, Karāḷavarman et Skandamūlavarman. Sa présence obscurcit la transition entre la succession des rois des inscriptions prakrites et celle des inscriptions sanskrites puisqu’il n’apparaît pas dans les premières.
17 Les tablettes de Penukoṇḍa du roi Gaṅga Mādhava (EI XIV, no 24, éditées par L. Rice) stipulent que le roi Gaṅga Āyyavarman et son fils Mādhava Siṃhavarman ont été placés sur le trône respectivement par les souverains pallava Siṃhavarman et Skandavarman. Ce fait vient confirmer la succession, au sein de la généalogie pallava dont nous disposons, de Siṃhavarman II et de son fils nommé Skandavarman. Si ces tablettes permettent donc de corroborer la succession de ces deux rois, elles n’aident cependant pas à dater le règne de ces souverains, ne proposant pas de date elles-mêmes. Elles sont datées sur critères paléographiques par L. Rice de la fin du IVe ou du début du Ve siècle. Quant à J. F. Fleet (1915 : 472), il préfère les situer à la fin du Ve siècle.
18 EI VIII, no 23, éditées par E. Hultzsch ; IP no 11 ; S. Brocquet (1997 : no 8).
19 Suite à l’analyse paléographique de E. Hultzsch dans EI VIII, no 23, p. 234, C. R. Krishnamacharlu, dans son commentaire sur les tablettes de Viḻavaṭṭi (EI XXIV, no 43), propose une scission dans la lignée à la suite de Skandavarman I, dont le père s’appelait Kumāraviṣṇu selon les tablettes d’Ōṃgōḍu I. Il aurait ainsi eu deux fils, Kumāraviṣṇu II, ancêtre du Kumāraviṣṇu III donateur des tablettes de Cendalūr (dictrict de Nellore, Andra Pradesh), et Vīravarman, ancêtre de la lignée de Siṃhavarman II. De leur côté, T. V. Mahalingam (1988 : XXXII) et C. R. Srinivasan (1979 : 24) s’accordent pour placer cette succession de rois à la suite de la lignée établie grâce aux inscriptions sanskrites.
20 saṃvatsare tu dvāviṃśe kāñcīśaḥ siṃhavarmaṇaḥ | aśītyagre śakābdānām siddham etac cchatatraye || Vers 3.
Ce vers problématique est donné par J. F. Fleet (1915 : 475) d’après le Mysore Archaeological Report (MAR) de 1909 et 1910, qui fait état de la découverte de deux manuscrits de ce texte que Narasimhachar analyse.
21 La plupart des historiens acceptent cette date sans la discuter, ou comme J. F. Fleet, même après l’avoir discutée. Cependant, les rois nommés Siṃhavarman sont nombreux et celui que mentionne le Lokavibhāga pourrait être n’importe lequel d’entre eux. De plus, cette datation en année Śaka, est, comme le signale J. F. Fleet, si inhabituelle qu’elle en devient douteuse. On peut évoquer ici les tablettes de Muḍiyanūr des Bāṇa (IA XV, 172– 177, éditées par L. Rice) datées de l’année Śaka 261 (339– 340) qui, de fait, se situent selon toutes probabilités au IXe siècle.
22 Cette généalogie est cependant à considérer avec prudence. Elle présente, en effet, à la suite les uns des autres des souverains qui semblent avoir régné parallèlement, comme par exemple la branche de Siṃhavarman II et celle de Viṣṇugopavarman I. Plus qu’une généalogie, cette succession de noms apparaît comme une liste de tous les souverains pallava.
23 Voir le tableau de C. R. Srinivasan (1979 : 25) qui donne les datations proposées par chaque historien, variant considérablement parfois.
24 ARE 1958–59, A, no 10 ; TCP, 1–32 ; IP no 17 ; S. Brocquet (1997 : no 14). Ce sont les premières tablettes bilingues, sanskrit/tamoul. C’est également avec elles que la généalogie, jusque là d’ordre historique uniquement, débutera par une généalogie mythique, mettant en exergue l’origine divine de la lignée. La généalogie des tablettes de Paḷḷaṅkōyil se présente comme suit : Viṣṇu, Brahmā, Aṅgiras, Bṛhaspati (Gīrvāṇeśa), Śamyu, Bharadvājaka, Droṇa, Aśvatthāman (incarnation partielle de Śiva) puis éponyme Pallava, Aśoka, des rois pallava (?), Siṃhavarman, Siṃhaviṣṇu. Ce document enregistre une donation à un ascète jaïn et s’ouvre sur une invocation au Seigneur Jina.
25 M. Rama Rao dans JHI XLIII, 733– 748, ligne 41, p. 736. Le texte est corrompu et l’article ne publie pas de fac simile pour pouvoir le vérifier. Il se présente comme suit : […] pallavabhaṅgapelavabalaṃ siṃhātyayaṃ pallavamtyā. L’éditeur propose de lire siṃhāvayam (nommé Siṃha) au lieu de siṃhātyayam (l’attaque du lion) et pallavaṃ jitvā (ayant conquis les Pallava) au lieu de pallavamtyā qui ne fait pas sens. Je remercie ici D. Goodall de ses commentaires sur cette ligne. Que l’on accepte ou non les propositions de l’éditeur, il ressort de ce vers qu’un Pallava a été vaincu par un Viṣṇukuṇḍin. T. V. Mahalingam (1969 : 53), suivi par C. R. Srinivasan (1979 : 26), identifie ce roi comme Siṃhavarman. Plus tard (1988 : XLIV), il identifiera ce souverain comme Siṃhaviṣṇu.
26 Les tablettes d’Hosakōṭe (MAR 1938, 80– 90) du roi gaṅga Avinīta sont datées de sa douzième année de règne. L’éditeur situe ce document à peu près vers 570. Cette inscription enregistre une donation à un temple jaïn, érigé par l’épouse du Pallava Siṃhavarman, mère de Siṃhaviṣṇu, roi régnant. Cependant, la relation entre cette reine et le Gaṅga Avinīta n’est pas définie.
27 IP no 276. L’éditeur l’assigne au VIe siècle.
28 Siṃhaviṣṇu est présenté comme un roi important dans les écrits pallava postérieurs. La strophe 20 des tablettes de Nandivarman II de Kācākkuṭi (État de Pondichéry) mentionne le roi Siṃhaviṣṇu, père de Mahendravarman, qui aurait conquis le Malaya, le Kaḷabhra, le Mālava, le Cōḻa, le Pāṇḍya, le Siṃhala et le Keraḷa (SII II, no 73 ; IP no 77 ; S. Brocquet [1997 : no 55]) ; les tablettes de Nandivarman II d’Utayēntiram posent Siṃhaviṣṇu comme père de Mahendravarman, mais sans le présenter comme le conquérant du pays cōḻa (SII II, no 74 ; IP no 76 ; S. Brocquet [1997 : no 54]) ; la strophe 10 des tablettes de Vēlūrpāḷaiyam de Nandivarman III évoque la conquête du pays cōḻa par Siṃhaviṣṇu, fils de Siṃhavarman et père de Mahendravarman (SII II, no 98 ; IP no 121 ; S. Brocquet [1997 : no 60]).
29 Voir IP no 18 à no 36 et S. Brocquet (1997 : no 15– 28). Parmi les épigraphes de ce souverain, une seule provient d’Andhra Pradesh (IP no 18).
30 Tablettes de Parameśvaravarman I à Kūram (IP no 46) ; tablettes de Narasiṃhavarman II à Rēyūru (IP no 53) ; tablettes de Nandivarman II à Utayēntiram (IP no 76) ; tablettes de Nandivarman II à Kācākkuṭi (IP no 77) ; tablettes de Nandivarman III à Vēlūrpāḷaiyam (IP no 121).
31 IP no 277 à 286. Elles sont toutes situées entre la fin du VIe siècle et le VIIe siècle par l’éditeur.
32 Taluk de Ceṅkam, district de Tiruvaṇṇāmalai. Voir IP no 286. L’éditeur situe cette inscription au VIIe siècle. L’ARE 1971– 72, no 236, p. 55, propose la cinquante-neuvième année de règne au lieu de la trente-neuvième.
33 tato mahīm anvaśiṣan mahīndro mahendravarmmeti mahendrakīrtti[ḥ |*]
aśoṣayām āsa viśeṣitājño yā puḷḷalūre dviṣatāṃ viśeṣān | | […]
SII II, part III, no 73, p. 342– 361, lignes 52– 53.
« Puis un roi nommé Mahendravarman gouverna la terre,
Dont la gloire égala celle de Mahendra,
Et qui, jouissant d’une autorité insurpassée,
Anéantit à Puḷḷalūr ses principaux ennemis. », traduction S. Brocquet (1997 : no 55, 659– 660).
34 etad aniṣṭakam adruma[m
alo] ham asudhaṃ [vicitraci]ttena
nir(m)māpitan nṛpe[ṇa]
brahmeśvara-viṣṇu-la[kṣi]tāyatanam
Traduction de S. Brocquet (1997 : no 22, 476– 477). Voir aussi EI XVII, no 5 ; IP no 27.
35 Bien que l’inscription de Mahendravarman à Māmaṇṭūr (IP no 26) soit très abîmée, il semblerait que cet ouvrage soit mentionné, ligne 6 : mattavilāsādipadam prahasanottamaṃ. Cette farce est éditée et traduite par M. Lockwood et A. V. Bhat (1994).
36 Dans l’inscription de Māmaṇṭūr, citée dans la note précédente, on peut lire, toujours ligne 6, magavadajjuka, qui pourrait faire référence à cette pièce. Cet ouvrage a également été publié et traduit par M. Lockwood et A. V. Bhat (1994).
37 IP no 22, 23, 25, 30 et 31. La longue inscription de Kuṭimiyāmalai (no 22) se présente comme une véritable composition.
38 Les inscriptions pariétales de ce roi ne donnent pas de généalogie et aucune tablette de son règne n’a été retrouvée. Ce n’est donc qu’avec les tablettes de cuivre de ses successeurs que nous pouvons déterminer qu’il est le fils de Mahendravarman I. Voir tablettes de Vunna Guravapāḷem (IP no 45) et de Kūram (IP no 46) de Parameśvaravarman I ; tablettes d’Utayēntiram (IP no 76), de Kācākkuṭi (IP no 77) du roi Nandivarman II ; tablettes de Vēlūrpāḷaiyam (IP no 121) de Nandivarman III ; tablettes de Ciṟṟūr (IP no 152) du roi Nṛpatuṅgavarman.
39 EI VI, no 1. Le vers 29 évoque la retraite du Pallava derrière ses murs.
40 Dans les tablettes de Kūram (IP no 46), nous lisons :
l. 16 […] pariyaḷamaṇimaṃgalaśuramāraprabhṛtiraṇavida[r*]śśitapula
l. 17 keśipṛṣṭhapaṭṭalikhitavijayākṣarasya kalaśayoner iva vimathitavātāpeḥ […]
« qui, aux batailles de Pariyaḷa, Maṇimaṅgalam, Śūramāra et d’autres, obligea Pulakeśin à montrer son dos, sur lequel il avait gravé, comme sur une tablette, les lettres du mot « victoire » et qui, tel Kalaśayoni, écrasa Vātāpi », traduction S. Brocquet (1997 : 524).
La même comparaison avec Kalaśayoni (Agastya qui aurait écrasé un démon nommé Vātāpi) et la mention des trois villes où le roi a obtenu la victoire sur les Cāḷukya se retrouvent dans les tablettes de Nandivarman II à Utayēntiram (IP no 76, l. 14– 16). De manière plus brève, les tablettes de Kācākkuṭi (IP no 77, l. 24– 25) et celles de Vēlūrpāḷaiyam (IP no 121, l. 28) évoquent sa victoire à Bādāmi (Vātāpi). Dans l’une des inscriptions de Narasiṃhavarman I lui-même, sur un pilier du temple excavé de la colline à Tirukkaḻukkuṉṟam (IP no 42), le roi est nommé vātāpikoṇṭa Narasiṅkappōttaracar, « Narasiṃha qui a pris Vātāpi ».
41 Cette période de l’histoire de la dynastie des Cāḷukya demeure obscure. Selon P. B. Desai( EI XXXII, no 26, 213– 218), il semble qu’après la conquête de Bādāmi par les Pallava, aucune inscription de Pulakeśin ni de ses successeurs n’apparaisse, jusqu’à l’accession au trône de Vikramāditya I. Des tablettes du souverain Abhinavāditya, descendant de Pulakeśin, ont été retrouvées à Nelkunda, dans le district de Chitradurg, Karnataka (EI XXXII, no 26, 214– 215). L’éditeur, P. B. Desai, les assigne aux années qui précèdent l’avènement de Vikramāditya I en 655, en avançant l’argument qu’aucun autre membre de cette maison n’a dû pouvoir régner après la restauration du pouvoir Cāḷukya.
42 Voir tablettes de Gadvāl, EI X, no 22, lignes 17– 22, datées de l’année Śaka 596 (674).
43 Tablettes de Kūram du roi Parameśvaravarman I (IP no 46, l. 15).
44 Seules les tablettes de Kācākkuṭi du roi Nandivarman II font une vague allusion à cet événement (IP no 77, l. 53– 54) qui est conté en revanche dans la chronique de Ceylan, le Mahavaṃśa (chapitre XLVII, vol. II, 41– 46). Mānavamma se réfugie une première fois à la cour de Narasiṃhavarman. Une première expédition pour reprendre le trône de Ceylan échoue, et le roi déchu revient à nouveau à la cour pallava. Il y réside pendant que quatre rois se succèdent à Ceylan. Puis une nouvelle expédition est lancée, qui cette fois réussit, et Mānavamma se retrouve à la tête de ses sujets. Les dates attribuées à la remise sur le trône de Mānavamma varient selon les historiens entre 631 et 684. Voir C. R. Srinivasan (1979 : 30). Une sculpture rupestre mettant en scène des éléphants au temple d’Isurumunya à Ceylan mérite d’être signalée. Pour une image de ce relief, consulter http://kaladarshan.arts.ohio-state.edu. The Huntigton Archives, dans laquelle cette sculpture est datée du IIIe siècle avant J.-C. Pour ma part, la disposition du bas relief, au bord d’une fissure, sur un rocher les « pieds dans l’eau », et le thème choisi, rappellent fortement le dispositif de la descente du Gange de Mahabalipuram attribuée à Narasiṃhavarman I. Cette ressemblance témoignerait à mon sens du lien entre le roi Narasiṃhavarman et le souverain de Ceylan.
45 Dans les tablettes de Ciṟṟūr de Nṛpatuṅgavarman (IP no 152, l. 16–17, p. 440), on lit :
l. 16 […] siṃhaḥ śrīnarasiṃha ity ariku
l. 17 lastambheramāṇām a[bhū]d yaiś śayyāgṛham aśmabhir jjalanidhau cakre mahaccakriṇaḥ
« Naquit le nommé Śrī Narasiṃha ; qui pour la multitude de ses ennemis fut ce qu’est un lion pour des éléphants, et qui construisit en pierre, sur l’océan, un grand temple de repos pour le dieu au disque. », traduction S. Brocquet (1997 : 728). Ce passage laisse supposer que le Viṣṇu allongé du Temple du Rivage était déjà présent sur le site du temps de ce roi.
Il faut remarquer ici que, bien que Narasiṃhavarman I soit considéré généralement comme le patron de la majeure partie des monuments de ce site, d’autres hypothèses ont été proposées : voir M. Hirsh (1987) qui envisage Mahendravarman I comme le commenditaire et N. Nagaswamy (1962) qui penche plutôt pour Narasiṃhavarman II.
46 Voir T. Watters (1961 : vol. II, 224– 232) et S. Beal (1969 : vol II, 227– 234).
47 Les tablettes de son petit-fils Narasiṃhavarman II à Rēyūru commencent la généalogie de la lignée avec ce roi, nommé Mahendravikramavarman, qui « dut à son propre héroïsme la possession de son royaume » (sva-vīr(y) yādhigata-rājasya, ligne 2, traduction S. Brocquet [1997 : 544]. Voir également EI XXIX, no 11, 89– 97, éditées par P. B. Desai ; IP no 53). Il est également présenté comme fils de Narasiṃhavarman I et père de Parameśvaravarman I dans les tablettes de Kūram (IP no 46).
48 Une pierre de héros datée paléographiquement du VIIe siècle, retrouvée à Periyakōḷāppāṭi (taluk de Ceṅkam, district de Tiruvaṇṇāmalai) a été gravée au cours de la onzième année d’un roi nommé Mayentiraparumaṉ (IP no 296). T. V. Mahalingam la place entre les inscriptions datant du règne de Narasiṃhavarman I et Parameśvaravarman I, laissant ainsi supposer qu’il considère ce Mahendravarman comme Mahendravarman II. C. R. Srinivasan (1979 : 32) l’attribue également à ce souverain. Or, une durée de onze ans pour le règne de ce roi me paraît un peu excessive. En effet, il aurait sûrement laissé quelques inscriptions s’il avait occupé le trône aussi longtemps. Je serais donc tentée de considérer le roi mentionné dans cette pierre de héros comme Mahendravarman I.
49 Ces tablettes ayant été retrouvées en Andhra Pradesh, on peut supposer que les Pallava avaient repris le contrôle d’une partie de ce territoire, au moins momentanément.
50 Cependant, la date de 668 comme marquant la fin du règne de Narasiṃhavarman I est elle-même aléatoire.
51 Inscription de fondation sur le sanctuaire du Kailāsanātha, strophe 5 (teṣām vaṃśe prasūtād raṇarasikapuronmar(d) danād ugradaṇḍāt), traduction S. Brocquet (1997 : 553).
52 Tablettes d’Utayēntiram de Nandivarman II (IP no 76).
53 Tablettes de Vēlūrpāḷaiyam de Nandivarman III (IP no 121).
54 Cependant ces tablettes sont datées de l’ère Śaka 556, c’est-à-dire 634 de l’ère chrétienne. Si cette datation est correcte, le roi pallava serait donc Narasiṃhavarman I. Or, deux autres tablettes gaṅga évoquent cette victoire de Bhūvikrama sur le souverain pallava. Les premières sont les tablettes d’Haḷḷegere (EC III, Md. 113) du roi Śivamāra, frère cadet et successeur de Bhūvikrama, datées de l’année Śaka 635 (713 de notre ère). L’éditeur de ces tablettes (EC III, p. 2) suppose que le règne de Śivamāra a commencé en 679, ce qui rend l’identification du roi pallava vaincu avec Parameśvaravarman I possible. Les deuxièmes tablettes sont celles de Panekōḍupādi, publiées par J. F. Fleet (IA XIV, p. 229– 233). Elles ne sont pas datées, mais l’éditeur les assigne au IXe siècle.
55 Voir également les tablettes de Honnūr (MAR 1939, p. 129– 137), établies sur la demande du Gaṅga Śrī Mādhava, époux de la fille de Śrī Raṇarāgavarma, frère de Vikramāditya I.
56 Voir IP no 48 à 51. Une inscription en telugu, retrouvée à Nalajanampadu, a été attribuée à Parameśvaravarman I par A. Master (EI XXVII, no 38, 203– 206) qui considère parameśvara et Bādirāja qui apparaissent dans l’épigraphe comme deux personnes différentes. Cette inscription stipule que le souverain est adorateur de Maheśvara et qu’il médite sur les pieds d’Arhat. L’identification de ce roi est cependant remise en question par N. L. Rao (EI XXVII, no 38, 206– 208), à juste titre me semble-t-il. Il avance le fait que parameśvara peut être utilisé comme biruda pour un chef pallava, qui serait ici Bādirāja. En outre, un chef local qui évoque un aśvamedha n’est pas un fait unique selon lui. Mais son argument le plus convainquant est la structure des premières lignes : les lignes 1 à 6 qui donnent le nom de Parameśvara et décrivent l’aspect dévotionnel devraient pouvoir se rattacher au nom du chef local, Śrī Bādirāja.
57 Pour le temple de Vedagirīśvara à Tirukkaḻukkuṉṟam, voir K. R. Srinivasan (1964 : 103– 107) et infra p. 51 – 52. Dans les tablettes de Kūram (IP no 46 ; EI XVII, no 22, révision de SII I, no 151), la partie sanskrite évoque le temple de Vidyāvinītapallavaparameśvara, dédié à Śiva, auquel est faite une donation, tandis que la partie tamoule mentionne la construction d’un maṇḍapa, d’un temple et d’un réservoir. Il est généralement supposé que le temple qui apparaît dans ces tablettes est celui que l’on trouve aujourd’hui dans ce même village et dont l’arrière est de forme arrondie. Une autre inscription, en tamoul, attribuée à Paramesvaravarman I et datée de sa première année de règne, a été retrouvée sur une stèle aujourd’hui insérée dans l’escalier d’entrée du temple de Celliammaṉ à Ciṟṟampākkam (aujourd’hui dans la ville de Madras) (IP no 44 ; EI XXXII, no 23). Il est fait référence à un temple construit par une personne nommée Kumāraṉ et P. B. Desai (EI XXXII, no 23, p. 200) y voit l’évocation du premier temple construit en pierre. Or la construction de temples en matériaux périssables était encore probablement en vogue (voir E. Francis, V. Gillet et Ch. Schmid [2008]), et il est tout à fait possible que ce temple ait été l’un d’eux.
58 IP no 53 ; EI XXIX, no 11.
59 P. B. Desai, 1951–52, EI XXIX, p. 92. Il est suivi, en 1957– 58, par D. C. Sircar et P. Sashadri Sastri, EI XXXII, p. 96, qui, en revanche, ne se prononcent pas fermement sur la date d’accès au trône.
60 K. A. Nilakantha Sastri (1939, réimpression 2001 : 116–117).
61 Inscription retrouvée à Cāttaṉūr (taluk de Ceṅkam, district de Tiruvaṇṇāmalai), IP no 304. Voir également ARE 1971– 72, no 238, p. 55, qui date cette inscription de la cinquantième année du roi.
62 Il en est de même pour les Cāḷukya, principaux ennemis des Pallava, dont les tablettes ne mentionnent pas de batailles majeures. Seules les tablettes de Harihar de Vinayāditya (IA VII, p. 300– 303) évoquent une victoire sur plusieurs dynasties dont les Pallava, mais ceci est présenté, comme le signale C. R. Srinivasan (1979 : 35), d’une manière très conventionnelle qui tend à nous faire croire qu’il s’agit d’un fait plus général que particulier.
63 Voir l’inscription de fondation IP no 54 ; SII I, no 24. C’est aussi ce temple que mentionnent les tablettes de ses descendants Nandivarman III (IP no 121) et Nṛpatuṅgavarman (IP no 152).
64 Voir IP no 60, 62, 63, 64, 65, 66. Deux temples, l’un à Tiruppōrūr (taluk de Ceṅkalpaṭṭu, district de Kāñcipuram) et l’autre à Vāyalūr (taluk de Ceyyūr, district de Kāñcipuram), auraient également été érigés sous son règne, comme en témoignent deux inscriptions (IP no 67 et IP no 68) retrouvées sur des piliers insérés dans des structures postérieures.
65 Voir les tablettes de Nandivarman II à Utayēntiram (IP no 76), à Kācākkuṭi (IP no 77) ; celles de Nandivarman III à Vēlūrpāḷaiyam (IP no 121) et celles Nṛpatuṅgavarman à Ciṟṟūr (IP no 152).
66 T. V. Mahalingam (1969 : 133 et 1988 : LVII), K. R. Srinivasan (1964 : 8). Selon K. R. Srinivasan (1964 : 8), Mahendravarman serait le Kāṭuveṭṭi tué dans une bataille l’opposant au Gaṅga Śrīpuruṣa (deuxième et troisième quarts du VIIIe siècle), que les tablettes gaṅga d’Uṃcha, datant de 1077 (EC VIII, Nagar 35), évoquent ; contra T. V. Mahalingam (1969 : 136) qui identifie ce Kāṭuveṭṭi comme Parameśvaravarman II (infra note 69). Enfin, les tablettes gaṅga d’Haḷḷegere du roi Śivamāra (EC III, Md. 113) mentionnent deux princes pallava, Jaya et Vṛddha Pallavādhirāja, fils du Yuvarāja, sur la demande de qui la donation a été effectuée, en l’an Śaka 635 (713 de notre ère). T. V. Mahalingam (1969 : 134–135 et 1988 : LVII) considère ces deux personnages comme les fils de Mahendravarman III qui devait être Yuvarāja en 713 et non de Parameśvaravarman II, puisque l’accès au trône leur est refusé.
67 Une inscription en kannada retrouvée à Uḷchaḷa, dans le district de Kurnool (AI V, p. 54), est datée de la trente-cinquième année de règne du roi Vijayāditya, qui correspondrait environ à 731. Selon le résumé que propose AI V, p. 22, le Yuvarāja Vikramāditya s’en retourne de la conquête de Kāñcipuram à la suite de laquelle il prélève tribut sur le roi pallava Parameśvara.
68 Voir une inscription kannada du village de Jangamarahaḷḷi, dans le hobli de Niḍugal (MAR 1941, no 45) qui mentionne la prise du Kāṭuveṭṭi et de Kāñcipuram par Vikramādityar et Koṅguṇi Aracar, ainsi qu’une pierre de héros retrouvée à Hire Madhure, un village du hobli de Challakere (MAR 1939, no 23, p. 121– 125), qui enregistre la mort d’un serviteur de Koṅguṇi Aracar au cours de la bataille qui eut lieu lors de la prise de Kāñcipuram par Vikramādityaracar.
69 Voir les tablettes gaṅga d’Uṃcha (EC VIII, Nagar 35 et supra note 66) qui réfèrent à une bataille de Śrīpuruṣa au cours de laquelle il tue le souverain pallava à Viḷarde ou Viḷande et s’empare de son parasol ainsi que de son nom Permmānaḍi. Bien que les tablettes datent de 1077, donc près de trois siècles après cet événement, T. V. Mahaliṅgam (1969 : 135– 136) suggère, à juste titre selon moi, que c’est Parameśvaravarman II qui tombe aux mains des Gaṅga.
70 Les tablettes de Ciṟṟūr de Nṛpatuṅgavarman (IP no 152) présentent également ce souverain comme le fils de Parameśvaravarman.
71 La succession des rois de cette lignée collatérale se présente ainsi : Bhīmavarman (frère cadet de Siṃhaviṣṇu, deuxième moitié du VIe siècle) ; Śrī Buddhavarman ; Ādityavarman ; Govindavarman ; Śrī Hiraṇya ; Nandivarman. Voir tablettes de Kācākkuṭi (État de Pondichéry), vingt-deuxième année de règne de Nandivarman II (IP no 77 ; SII II, no 73 ; SII XII, no 33). Ces tablettes débutent avec une généalogie mythique semblable à celles des tablettes d’Utayēntiram, y ajoutent Aśoka puis une série de rois, dont ni la succession ni parfois les noms ne sont en accord avec les séries reconstituées d’après les témoignages épigraphiques du début de la dynastie : Skandavarman, Kalindavarman, Kāṇagopa, Viṣṇugopa, Vīrakūrca, Vīrasiṃha, Siṃhavarman, Viṣṇusiṃha. Puis vient la série de souverains que nous connaissons mieux, de Siṃhaviṣṇu à Parameśvaravarman. C’est ici que Nandivarman (et la lignée collatérale de laquelle il descend) entre en scène, en tant que souverain du royaume de Parameśvaravarman. Le début des tablettes de Taṇṭantōṭṭam (taluk de Kumbakonam, district de Tanjavur : IP no 89 ; SII II, 99 ; SII XII, no 36, datées de sa cinquante-huitième année de règne) manque, mais il devait comporter une généalogie mythique, du moins historique, puisque les tablettes que l’on a aujourd’hui commencent par une phrase incomplète et le premier roi mentionné est Hiraṇyavarman, père de Nandivarman. Les tablettes de Paṭṭattāḷmaṅkalam (taluk de Tiruttuṟaipūṇṭi, district de Tiruvārūr, IP no 90 ; EI XVIII, no 14 ; SII XII, no 35), datées de la soixante et unième année de règne de Nandivarman, évoquent plusieurs rois pallava sans les nommer, et donnent simplement le nom de l’un d’entre eux, Vīrakūrca. Puis est introduit Hiraṇyavarman, père de Nandivarman.
72 Tablettes de Kācākkuṭi de la vingt-deuxième année de règne de Nandivarman II (vers 27 ; IP no 77 ; SII II, no 73 ; S. Brocquet [1997 : no 55]).
73 L’arrivée d’une délégation devant Hiraṇyavarman, le refus des trois frères, l’acceptation de Nandivarman, alors nommé Pallavamalla alias Parameśvara, âgé de douze ans, son entrée dans Kāñcipuram et son couronnement sont décrits dans l’inscription tamoule que l’on trouve dans la galerie du Vaikuṇṭha Perumāḷ à Kāñcipuram, dans l’angle sud-est. Voir IP no 93 ; SII IV, no 135 ; T. V. Mahalingam (1969 : 139–143). Voir aussi C. Minakshi (1941 : 33–38 et 54–55) et E. Francis (à paraître). L’inscription est placée sous une série de panneaux sculptés mettant en scène cet épisode.
74 Les tablettes d’Utayēntiram de Nandivarman II (IP no 76 ; SII II, no 74 ; S. Brocquet [1997 : no 54]) font l’éloge du général Udayacandra. Issu de la famille des Pūcān qui sert les Pallava de père en fils, seigneur de Vilvalapura et de la rivière Vēkavatī, il mena de nombreuses batailles et restitua le royaume au Pallava. L’un de ses exploits militaires majeurs est le meurtre de Citramāya, prince pallava prétendant au trône, alors que celui-ci, assisté des Pāṇḍya, assiégeait Nandivarman réfugié à Nandipura. Ce général compte encore parmi ses exploits la victoire sur le chef Śabara, Udayana, sur le chef Niṣāda, Pṛthivīvyāghra, sa conquête de la province de Viṣṇurāja (peut-être le sud de l’Andhra Pradesh gouverné par les Cāḷukya de l’Est) et sa victoire sur les Pāṇdya.
Le prince pallava Citramāya a été identifié par T. V. Mahalingam (1969 : 157 et 1988 : LX-LXI) comme le souverain Skandaśiṣya, dont on a retrouvé des tablettes datées de sa quatorzième année de règne (IP no 257 et S. Brocquet [1997 : no 71]). Ces écrits, retrouvés à Rāyakōṭā (taluk de Kiruṣṇakiri [Kṛṣṇagiri], district de Tēṉkaṉikkōṭṭai) ont été assignés au VIIIe siècle sur des critères paléographiques. La généalogie offerte par ces tablettes est semblable à celle des Pallava en général, en ce qui concerne la partie mythique. En revanche, l’éponyme Pallava, né d’Aśvatthāman, est remplacé ici par Skandaśiṣya. C’est dans la lignée de ce dernier qu’est né le seigneur Skandaśiṣya, auteur de ces tablettes. Il semble gouverner avec le soutien des Bāṇa, puisque c’est sur la demande de Mahāvalivāṇarāyar qu’est faite cette donation. Cette identification proposée par T. V. Mahalingam reste cependant, à mes yeux, très incertaine.
75 Une inscription sur dalle retrouvée dans la grotte d’Ādivarāha à Mahābalipuram est datée de la soixante-cinquième année du règne de Nandivarman (IP no 92 ; SII XII, ṇo 38).
76 Voir tablettes d’Utayēntiram (IP no 76 ; SII II, no 74 ; S. Brocquet [1997 : no 54]) ; tablettes de Pullūr (IP no 81 ; EI XXXVI, 143–162 ; S. Brocquet [1997 : no 56]) ; tablettes de Taṇṭanttōṭṭam (IP no 89 ; SII II, no 99 et XII, no 36 ; S. Brocquet [1997 : no 57]) ; tablettes de Paṭṭattāḷmaṅkalam (IP no 90 ; EI XVIII, no 14 ; S. Brocquet [1997 : no 58]).
77 Les tablettes de Narwan du Cāḷukya Vikramāditya II (EI XXVII, no 23), datées de l’année Śaka 664 (741– 742), mentionnent la prise de Kāñcipuram. Une inscription de la reine Lokamahādevī, épouse du roi cāḷukya Vikramāditya II, à Paṭṭadakkal (IA X, p. 164–165), attribue à son roi trois invasions de Kāñcipuram. Les tablettes de Kendūr (EI IX, no 28) du Cāḷukya Kīrtivarman II, fils de Vikramāditya II, datées de l’année Śaka 672 (environ 750 de notre ère), évoquent longuement la conquête non destructive de Kāñcipuram, la beauté de son temple construit par Narasiṃhavarman (le Kailāsanātha), la défaite de Nandipotavarman qui s’enfuit devant l’attaque de Vikramāditya II (l. 31–45) ainsi que la défaite du roi pallava face à Kīrtivarman II (l. 46–54). Voir aussi les tablettes de Vakkaleri du même souverain (EI V, no 22 ; IA VIII, p. 23– 29) datées de l’année Śaka 677 ou 679 (755 ou 757 de notre ère). La conquête cāḷukya de Kāñcipuram et l’admiration de la part des conquérants envers le Kailāsanātha érigé par Narasiṃhavarman II sont également corroborées par une épigraphe que Vikramāditya II a laissé dans le temple même (SII I, p. 146– 147 ; EI III, 359–361). Par ailleurs, une inscription sur pierre retrouvée dans le temple de Subrahmaṇya à Mallam, en Andhra Pradesh (district de Nellore ; IP no 75) est datée de la quinzième année de règne de Nandippōttaracar et enregistre une donation au temple de Subrahmaṇya de Tiruvaṉmūr sur la demande d’Āḷuvaracar. L’exécuteur de cette donation est un certain Cāḷukki-aracar. Le nom de ce dernier n’est pas donné et son identification est difficile. Si l’on considère le lieu où cette inscription a été retrouvée, on pourrait penser au Cāḷukya de l’Est, Viṣṇuvardhana III. Cependant, les Āḷupa sont considérés comme des vassaux des Cāḷukya de l’Ouest (voir tablettes d’Harihar : IA VII, p. 300–303). M. S. Govindaswami (1965 : 150– 152) rapporte ainsi l’hypothèse de Dr. Venkataramanayya (JOR VIII) qui associe ce Cāḷukya à Vikramāditya II contra T. V. Mahalingam (1969 : 170–171) qui l’identifie à Kīrtivarman II. C. R. Srinivasan (1979 : 39– 40) résume les différentes hypothèses.
78 T. V. Mahalingam (1969 : 157 et 162–163) émet l’hypothèse que Nandivarman se réfugie à la cour de Dantidurga à la suite de l’attaque des Cāḷukya qui envahissent Kāñcipuram. Mais les éléments sur lesquels se base l’auteur — essentiellement des jeux de mots — sont de bien maigres évidences. La princesse Revā, épouse de Nandivarman que mentionnent les tablettes de Vēlūrpāḷaiyam (IP no 121), est considérée comme princesse rāṣṭrakūṭa (C. R. Srinivasan [1979 : 41]). Mais le rapprochement entre cette princesse et cette dynastie est lui-même douteux.
79 Les tablettes de Bagumrā (Śaka 836 soit 915 de notre ère) du roi rāṣṭrakūṭa Indrarāja III (EI IX, no 4) évoquent la conquête de Kāñcipuram par Dantidurga (vers 6). Une inscription, probablement inscrite sous le règne de Dantidurga, devant la grotte Daśāvatāra à Ellorā dresse une liste de tous les souverains vaincus par ce roi, et parmi eux figure Kāñcīśam, « le Seigneur de Kāñci » (ligne 10). Voir J. Burgess (1883, réimpression 1994 : 87– 89).
80 Les tablettes de Jethwai (EI XXII, no 17) de la reine rāṣṭrakūṭa Śīlamahādevī, épouse de Dhruva, sont datées de l’année Śaka 708, c’est-à-dire 786 après J.-C. Le vers 24 évoque, par une comparaison du roi avec Śiva, l’arrêt du flot de la Gaṅgā et la prise de l’insigne du taureau. D. R. Bhandarkar (EI XXII, no 17, p. 104) pense, à juste titre, qu’il s’agit d’une métaphore des victoires du Rāṣṭrakūṭa sur les Gaṅga et les Pallava. C’est donc avant 786, date de ces tablettes, que ces représailles sont lancées. Les tablettes de Paiṭhan (EI III, no 17, l. 29– 32) de Govinda III (794) évoquent l’alliance des souverains du Mālava, de Kāñci, de Veṅgi et des Gaṅga qui épousent la cause de Govinda II contre son frère Dhruva. Voir aussi les tablettes de Rādhanpur de Govinda III (EI VI, no 23, vers 7).
81 Parmi les inscriptions pallava de Nandivarman II, une pierre de héros retrouvée à Kuḷitikai (Kuḷitikki), taluk de Kuṭiyāttam, district de Vēlūr (IP no 86), datée de la cinquante-deuxième année de Nanticcuraparumaṉ, décrit la chute de Kaṅkatiyaraiyar (Gaṅga) dirigé par Vāṇaraiyar (Bāṇa) lors de l’attaque de Vallaraiyaṉ (Rāṣṭrakūṭa) contre Perumāṉaṭikaḷ (probablement le Pallava). Contra V. Venkatasubha Aiyar (EI XXII, no 18) qui lit Pallavaraiyaṉ au lieu de Vallavaraiyaṉ.
82 Les Gaṅga auraient été les alliés des Cāḷukya dans les conflits contre les Pallava. Voir supra note 68.
83 Tablettes de Taṇṭantōṭṭam : IP no 89 ; SII II, no 99 et XII, no 36 ; S. Brocquet (1997 : no 57).
84 Dans les tablettes d’Utayēntiram (IP no 76 ; SII II, no 74 ; S. Brocquet [1997 : no 54]), les exploits du général de Nandivarman, Udayacandra, sont mis en valeur. Il serait venu délivrer son roi assiégé dans la ville de Nandipuram par le prince pallava Citramāya soutenu par les Dramiḷa (Dravidiens), terme qui fait référence sans doute aux Pāṇḍya. Ce général aurait également défait les Pāṇḍya dans le village de Maṇṇaikuṭi. Les Pāṇḍya figurent encore dans la liste des rois qui rendent hommage au Pallava, mais de manière suffisamment conventionnelle pour qu’on ne puisse en déduire aucun fait précis (tablettes de Pullūr [IP no 81] et tablettes de Paṭṭattāḷmaṅkalam [IP no 90]).
85 La strophe 12 de la partie sanskrite des tablettes de Vēḷvikkuṭi (EI XVII, no 16) évoque la fuite de Pallavamalla (Nandivarman II) devant le Pāṇḍya Rājasiṃha, père du donateur des tablettes, Parāntaka I Varaguṇa, qui commence son règne dans les années 770. Dans la partie tamoule, plusieurs batailles sont évoquées. Tout d’abord, le même roi est dit avoir vaincu les Pallava à Kuḻumpūr (l. 76– 78) et avoir contracté une alliance matrimoniale avec les Gaṅga (l. 84) ; puis Parāntaka I est présenté comme ayant défait les Pallava à Peṇṇākaṭam, sur les bords de la Kāvēri (l. 92– 94). Voir également les tablettes de Ciṉṉamaṉūr du même roi, SII III, no 206, 441– 462.
86 Voir par exemple IP no 91, inscription de Tiruvallam. Voir aussi la pierre de héros de Kuḷitikai (Kuḷitikki) (IP no 86 ; voir supra note 81). Pour plus de détails sur la dynastie des Bāṇa, voir essentiellement M. S. Govindaswami (1965 : 1 – 37), B. L. Rice dans son introduction à EC X et V. Venkayya (EI XI, p. 229–240).
87 Voir les tablettes du British Museum de Govinda III, en kannada, datées de 804 (EI XXXIII, no 60). G. S. Gai, éditeur de ce texte, comprend que le roi Govinda III est en marche pour conquérir Kāñci et qu’il établit son camp sur les bords de la rivière Tuṅgabhadrā (p. 328). Il en déduit donc que la conquête de Kāñci n’a pas encore eu lieu en 804, mais qu’elle est en cours, contra J. F. Fleet (IA XI, 125–127) qui suppose la conquête achevée. Les tablettes de Jharikā (803 ; EI XXXII, no 18), de Nēsarikā (805 ; EI XXXIV, no 19, p. 123–135), de Rādhanpur (808 ; EI VI, 23, p. 239– 251) du même roi mentionnent la conquête du Pallava.
88 Voir l’inscription de Tiruccānūr (taluk de Tirupatti rurale, district de Chittor) qui est datée de sa cinquante et unième année de règne (IP no 111 ; SII XII, no 43). Elle enregistre une donation au temple d’Emperumāṉaṭikaḷ à Tiruvēṅkatam par Cōḻaṉār Ulakaperumāṉār de Cōḻanāṭu.
89 Deux inscriptions datées de son règne présentent un Muttaraiyar. La première (IP no 106), dans le temple de Vākīśvara à Malaiyaṭipaṭṭi (taluk de Maṇappāṟai, district de Trichy), annonce que Viṭelviṭuku Muttaraiyar alias Kuvāvaṉ Cāttaṉ est responsable de l’excavation de ce temple. La deuxième (IP no 112) à Piḷḷaipāḷaiyam (district de Kāñcipuram) réfère à une demande de donation de la part de [Kāṭuve] ṭṭi Muttaraiyar pour le sanctuaire et le math à Iṟaiyāṉcēri. En la dix-septième année de règne de Dantivarman, Maṇikkattār Nakkaṉār, épouse ou concubine (bhokiyār) de Vāṇakōvaraiyar, fait une donation au temple de Tiru[vīraṭṭā] ṉam à Tirukkōvalūr (IP no 108 ; inscription de Kīḻūr (Kīḻaiyūr), taluk de Tirukkōyilūr, district de Viḻuppuram).
90 Deux inscriptions, l’une à Piḷḷaipāḷaiyam (IP no 112) et l’autre à Tiruccānūr (IP no 113) font référence au règne de Dantivarman mais l’année de règne n’est plus lisible. Il est donc difficile d’affirmer qu’aucune inscription n’appartient à cette période.
91 T. V. Mahalingam (1969 : 191) élabore cette hypothèse en s’appuyant sur une inscription située sur la base du Vaikuṇṭha Perumāḷ à Kāñcipuram (IP no 262) qui mentionne un certain Abhimānasiddhi alias Pallavaṉ. Selon l’historien, le nom de Siddhi est utilisé par les Cōṭa, particulièrement les Telugu-Cōṭa aux XIIe et XIIIe siècles. Cependant, comme le souligne C. R. Srinivasan (1979 : 44), on peut envisager la possibilité qu’Abhimānasiddhi soit un nom de Dantivarman lui-même ou d’un membre de la dynastie. T. V. Mahalingam (1969 : 192) évoque ensuite les tablettes pāṇḍya de Taḷavāypuram (PCP, p. 83– 140, l. 110– 114) de la deuxième moitié du IXe siècle, qui présentent le roi Parāntaka Vīranārāyaṇa comme le fils de Akkaḷanimmaṭi, fille de Śrīkaṇṭha, Cōḻa de la famille Pottappi, appelé aussi Tuḷakkilli, souverain de Toṇṭiyar. L’auteur (1969 : 192– 193) en déduit donc que ce personnage, qui a dû régner au cours de la première moitié du IXe siècle, gouvernait le Tonṭaimaṇṭalam à la place du Pallava et avait bénéficié de l’aide de son beau-fils, le roi pāṇḍya, pour obtenir ce territoire. On ne peut donc nier l’existence d’un Śrīkaṇṭha présenté dans les tablettes de Taḷavāypuram. Mais on pourrait imaginer qu’il n’avait pris possession que d’une petite partie du Toṇṭaimaṇṭalam sans pour autant chasser Dantivarman qui a peut-être continué à régner sans abandonner son trône.
92 Les tablettes de Ciṟṟūr (IP no 152) et celles de Bāhūr (IP no 155) de son fils Nṛpatuṅgavarman confirment ce fait.
93 Une inscription retrouvée à Guḍimallam (IP no 144 ; EI XI, no 22 D) est datée de sa vingt-troisième année.
94 Contra K. R. Srinivasan (1964 : 18) qui suppose un Nandivarman IV (904–926), vainqueur de la bataille de Teḷḷāṟu. Cette victoire lui aurait permis de récupérer temporairement son royaume tombé aux mains des Cōḻa. C. R. Srinivasan (1979 : 45–46) contredit ses arguments un par un.
95 Les tablettes de ses successeurs n’évoquent pas cette victoire. Le Nantikkalampakkam, ouvrage tamoul qui chante probablement les louanges de Nandivarman III, ne précise pas quels sont ses adversaires dans ce combat. Voir T. V. Mahalingam (1969 : 208–210).
96 C’est ce que semble suggérer une inscription sur le temple de Lālkuṭi, dans le district de Trichy. Datée d’une année opposée à quatre mais sans mentionner de souverain régnant, cette épigraphe enregistre une donation de Nandipōttaraiyar (EI XX, 3 A). Or, cette datation est celle que les Pāṇḍya utilisent pour compter leur année de règne. Il est donc fort probable que le Pallava ait fait donation au temple de Lālkuṭi qui se trouvait en territoire occupé par les Pāṇḍya. Sur ce même temple, une autre inscription datée de neuf années opposées à quatre du règne d’un roi pāṇḍya Māṟañcaṭaiyaṉ, probablement Varaguṇa II, enregistre une autre donation (EI XX, 3 B).
97 Voir tablettes de Ciṟṟūr (IP no 152) et de Bāhūr (IP no 155) de Nṛpatuṅgavarman, fruit de cette union. Nandivarman aurait également épousé une certaine Aṭikaḷ Kaṇṭan Maṟampāvai dont le nom figure dans les inscriptions du temple de Tiruccenampuṇṭi (IP no 145 et 147).
98 Voir IP no 130, 132, 134, 144. La pierre de héros retrouvée à Ceṉṉivāyakkāl, taluk de Lālkuṭi, district de Trichy (IP no 141), narre l’attaque d’un monastère menée par un Bāṇa. Une inscription à Paḷḷikoṇṭa, taluk et district de Vēlūr (IP no 114), mentionne la construction d’un maṇḍapa par Celvaṉ Vāṇarāyaṉ (Bāṇa), fils d’Amaṉi Gaṅgaraiyar qui gouverne Vittūr.
99 Voir note ci-dessus et une inscription dans le temple de Cīyamaṅkalam qui met en scène le Gaṅgaraiyar Nērkuṭṭi Perumāṉ donnant son accord pour la construction d’un maṇḍapa devant le sanctuaire (IP no 117).
100 Voir IP no 124 et 129 dans le temple de Kīḻūr (Kīḻaiyūr, taluk de Tirukkōyilūr, district de Viḻuppuram). Plusieurs noms sont attribués à ce chef : Viṭelviṭuku Iḷaṅko Atiaraiyaṉ, Teṉṉavaṉ Iḷaṅkovelār, Maṟavaṉ Pūṭi. Voir aussi K. G. Krishnan (EI XXXII, no 10, p. 99–102). Ce personnage apparaît également dans des inscriptions cōḻa d’Āditya I (EI XXXII, no 10, p. 99). Il est donc possible que ce chef ait changé son allégeance par la suite.
101 yatprasādā[r *](j) jitā senā pāṇḍyena samare purā | pāre’ricit sa rājāgnir (d)dadāha ripusaṃhatim || 16, traduction S. Brocquet (1997 : 737 et 744). Une inscription pāṇḍya à Ambasamudram du roi Varaguṇa II (EI IX, no 10) évoque également son campement sur les bords de la rivière Aricil, faisant peut-être référence au même événement. La question de savoir à quelle occasion le Pallava a prêté son armée au Pāṇḍya est débattue par T. V. Mahalingam (1969 : 213– 214) qui en conclut que c’est pour aider Varaguṇa II à reprendre son trône contre un opposant. Les arguments de l’auteur restent cependant à préciser. De plus, le vers suivant dans les tablettes de Bāhūr compare la renommée de Nṛpatuṅga et celle de Rāma. Sur la base du Mahāvaṃśa (part II, chapitre 50) qui évoque une conquête pāṇḍya de Ceylan, des tablettes de cette dynastie qui confirment un raid dans l’île (grandes tablettes de Ciṉṉamaṉūr, SII III, part IV, p. 457, vers 11), et de l’aide accordée par le Pallava, T. V. Mahalingam (1969 : 213) considère, de manière peut-être un peu légère, que cette comparaison entre Nṛpatuṅgavarman et Rāma renvoie à cette incursion à Ceylan à laquelle le Pallava aurait participé. Voir aussi H. K. Narasimhaswami et K. G. Krishnan (1957– 1958 : EI XXXII, no 31, p. 273).
102 Grâce à une inscription de Takkōlam (EI XIX, no 12, p. 85), le début du règne d’Āditya I Cōḻa a été fixé en 870– 871. Une autre inscription à Tirumālpuram, dans le taluk d’Arakkōṇam, district de Vēlūr, datant du règne d’Uttama Cōḻa, fait référence à une donation d’Āditya dans sa vingt et unième année (SII III, part III, no 142).
103 R. Nagaswamy (1979) et S. Brocquet (1997 : no 66).
104 EI XXIII, no 22, p. 143– 147. Cette hypothèse est reprise par T. V. Mahalingam (1988 : LXXI).
105 Tablettes de Vēḷañcēri, R. Nagaswamy (1979) et S. Brocquet (1997 : no 66).
106 Plusieurs inscriptions bāṇa ne mentionnent plus de dynastie suzeraine, mais sont datées du roi bāṇa lui-même ou en année de l’ère Śaka : inscription de Tiruvallam du roi Māvali Vāṇarāja, 810 de l’ère Śaka (888) (SII III, part I & II, no 44) ; inscription de Guḍimallam du roi Vijayāditya Māvali Vāṇarāya, fils de Mahādevī Aṭikaḷ, reine de Vāṇavidhyādhara, 820 de l’ère Śaka (897– 898) (EI XI, no 22 D) ; inscription de Guḍimallam du roi Vijayāditya Māvali Vāṇarāya, 827 de l’ère Śaka (904– 905) (EI XI, no 22 E) ; une inscription dans le taluk de Mulbagal (EC X, Mb 229) semble également être datée de l’ère Śaka ; quatre inscriptions de Tiruvallam (SII III, part I & II, no 45– 48) sont datées du règne d’un roi bāṇa sans que l’ère Śaka ne soit donnée.
107 Voir par exemple SII III, no 93 ; SII V, no 1368 ; SII VI, no 360 ; SII XIII, no 322.
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La création d'une iconographie sivaïte narrative
Incarnations du dieu dans les temples pallava construits
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2010
Bibliotheca Malabarica
Bartholomäus Ziegenbalg's Tamil Library
Bartholomaus Will Sweetman et R. Ilakkuvan (éd.) Will Sweetman et R. Ilakkuvan (trad.)
2012