Livre II. Les Acurar
p. 36-99
Texte intégral
1. Māyai
1Le roi des avuṇar (acurar), s’étant marié avec Maṅkaḷakēci, eut une fille du nom de Curacai. Pukar (CukkirācāriyaN) fut son précepteur. Il lui enseigna la science des māyai (māyā, prestiges et illusions). Curacai apprit vite cette science. Comme elle y excellait, son maître la surnomma Māyai. (st. 1-3).
2Un jour il dit à son élève : « Un grand nombre d’avuṇar ont été massacrés par l’époux de la femme qui siège sur le lotus (Viṣṇu), VācavaN (IntiraN) et les muNi. Leur perte a diminué beaucoup la puissance de ton père. Si la race des avuṇar doit se relever, cela n’est possible que par toi. Je te donne un conseil, suis-le. Assume la forme d’une jeune et belle femme et rends-toi auprès du sage KācipaN. Séduis-le par tes attraits. Quand il sera épris de toi, laisse-toi embrasser par lui. Tu auras alors des enfants acura. Enseigne-leur les règles des sacrifices et des ascèses et reviens ici. » (st. 4-10).
3Māyai obéit. Elle rapporta à son père ce que son précepteur lui avait dit et, avec son consentement, elle alla à l’endroit où le sage KācipaN pratiquait son ascèse. C’était au nord du mont Mēru. (st. 11-15).
4Māyai créa à cet endroit des pièces d’eau, des bosquets, de petites collines, des palais, etc… KācipaN s’étonna de l’existence subite de ces choses et se douta de ce qui allait se produire. Soudain devant lui, au sommet d’une belle colline, apparut Māyai, assumant la forme d’une jeune femme d’une beauté sans pareille. (st. 16-24).
5KācipaN la vit. Il abandonna son ascèse et se dirigea vers elle. Voulant engager une conversation avec elle, il lui demanda qui elle était, d’où elle venait et ce qu’elle souhaitait. (st. 25-65).
6Māyai lui fit remarquer que ses agissements étaient inconvenants et qu’il ferait bien de continuer son ascèse, Mais le sage insista sans s’écarter et manifesta son amour pour elle. (st. 67-77).
7Māyai quitta alors la colline et s’éloigna en disant qu’elle allait se baigner dans la Kaṅkai. (st. 78).
8KācipaN l’empêcha de partir et lui dit qu’il ferait venir sur place non seulement la Kaṅkai, mais aussi les six autres fleuves sacrés, si elle le voulait et se fit fort de faire tout ce qu’elle désirerait, (st. 79-84).
9Māyai fit semblant de ne pas prêter l’oreille à ses objurgations et commença à marcher rapidement dans la direction de la Kaṅkai. KācipaN la suivit. Après avoir parcouru quelque distance, Māyai, perdant sa forme corporelle, disparut aux yeux du sage. (st. 85-86).
2. Lamentation de KācipaN
10Après la disparition de Māyai, KācipaN commença à se tourmenter· Sa passion s’accrut. Pensant toujours à elle, il lui semblait la voir partout. Arbres, animaux, oiseaux, tout avait pour lui l’apparence de cette belle femme. Tout en errant, il s’adressait tantôt à une gazelle qu’il voyait sauter à ses côtés, tantôt à un paon qui passait devant lui, tantôt à un coucou qu’il entendait chanter ou à un arbre couvert de fleurs qu’il rencontrait sur son chemin. (st. 1-16).
11Des heures s’écoulèrent. Le soleil se coucha. L’affliction de KācipaN devint plus grande encore. Ne pouvant plus errer çà et là, il s’assit sur le sol et s’écria : « O belle femme ! Tu as éveillé en moi un amour qui me ronge. Au lieu d’apaiser ma passion, tu as disparu. Viens donc, viens vite. Sinon, je mourrai. » (st. 17-51).
12A ces mots, Māyai fit de nouveau son apparition devant KācipaN. (st. 52).
3. Naissance des acurar
13KācipaN fut ravi de revoir Māyai. Il s’approcha d’elle et la supplia de l’accueillir. (st. 1-3).
14« Ne te désole pas, lui dit-elle. Je consens à cohabiter avec toi à condition que tu prennes maintenant une forme adéquate à ma beauté superbe et que tu subisses ensuite des changements correspondants aux aspects différents que j’assumerai l’un après l’autre. » (st. 4).
15KācipaN accepta la proposition. Il prit la forme d’un magnifique tēvaN. Māyai le saisit alors par le bras et l’emmena dans un maṇṭapam agréable qu’elle créa aussitôt. (st. 5-7).
16Après le coucher du soleil, durant la première veille, tous les deux cohabitèrent. Māyai donna immédiatement naissance à CūrapaNmaN. De la sueur des deux amants naquirent des tāNavar (acurar) au nombre de trente mille veḷḷam. (st. 8-18).
17Māyai les laissa tous sur place et s’éloigna, suivie du sage. (st. 19).
18Durant la deuxième veille de la nuit, ils s’arrêtèrent dans un autre maṇṭapam, où ils cohabitèrent en assumant, KācipaN la forme d’un lion et Māyai celle d’une lionne. De leur union naquit CiṅkamukaN, avec mille têtes de lion et deux mille bras. De leur sueur sortirent des guerriers portant chacun une tête de lion, dont le nombre s’élevait à quarante mille veḷḷam. (st. 20-22).
19Māyai et KācipaN laissèrent sur place CiṅkamukaN et les autres et se dirigèrent vers un autre endroit.
20Après avoir parcouru quelque distance, la femme créa un autre maṇṭapam où ils s’installèrent. La troisième veille de la nuit venait de commencer. Ils prirent respectivement la forme d’un éléphant et d’une éléphante et cohabitèrent. TārakācuraN à tête d’éléphant, porteur de quatre défenses, naquit aussitôt. Il fut abandonné sur les lieux, en même temps que les autres enfants, au nombre de quarante mille veḷḷam qui, portant chacun une tête d’éléphant, surgirent de la sueur des deux amants. (st. 23-25).
21KācipaN et Māyai allèrent loin de cet endroit. Dans un beau palais, qui s’érigea par la puissance miraculeuse de Māyai, les deux amants assumèrent respectivement la forme d’un bouc et d’une chèvre et y cohabitèrent pendant la quatrième veille. Ils donnèrent naissance à une fille du nom d’Acamuki, qui avait une tête de chèvre. De leur sueur apparurent d’autres tāNavar (acurar) avec des têtes de bouc et leur nombre fut de trente mille veḷḷam. (st. 26-27).
22Les parents abandonnèrent comme toujours leurs enfants et partirent pour une autre destination.
23A l’aube, en peu de temps et dans plusieurs maṇṭapam, créés coup sur coup, ils s’unirent en se métamorphosant en tigre et tigresse, en cheval et jument, en bœuf et vache, en porc et truie, en ours et ourse, etc., et donnèrent ainsi naissance à soixante mille veḷḷam avuṇar, qu’ils abandonnèrent à l’endroit même de leur venue au monde. (st. 28-32).
24Le soleil se leva. Māyai et KācipaN reprirent leurs formes primitives. Ils voulurent revoir leurs enfants. Par leur pensée ils firent venir devant eux leurs trois fils, leur fille et les autres avuṇar. (st. 33-35).
25CūraN, ArimukaN (CiṅkamukaN), TārakaN et Acamuki eurent l’occasion de se rencontrer et de se reconnaître.
26Les parents, se tenant devant eux, un peu à l’écart, admirèrent avec beaucoup d’affection leurs quatre enfants et les avuṇar, au nombre de deux cent mille veḷḷam, qui les entouraient. (st. 37-38).
4. Prédication de KācipaN
27Cūra N, accompagné de ses frères, se rendit auprès de ses parents, les salua et leur demanda ce qu’ils devaient faire. (st. 1).
28Le sage KācipaN leur répondit : « Mes enfants ! Sachez que la préoccupation des grands hommes est de chercher et étudier ce qu’on appelle Pati, Uyir (Pacu) et Taḷai Pācam)*. (Seul le dieu à la gorge noire (CivaN) est Pati. Les êtres innombrables qu’on rencontre dans le monde sont l’objet de l’orgueil, de l’illusion et de la luxure. En raison de leurs actions résultant de ces trois souillures, ils naissent et meurent constamment. L’instruction, la bravoure, la richesse, la puissance, etc., que possèdent les hommes sont également susceptibles de disparaître. Seule la bienfaisance est stable, procurant le bonheur tant dans la vie présente que dans celle à venir. L’homme qui est doué du sentiment de bienfaisance aime son prochain et est généreux envers tous les êtres. Il est enclin à l’ascèse qui lui devient facile. N’est-ce pas l’ascèse qui délivre l’homme de toutes ses souillures et lui fait obtenir le salut ? Donc, il n y a rien de plus précieux que l’ascèse. Par conséquent, je vous conseille, mes enfants, de faire le bien et, partant, de vous libérer des péchés. Pensez toujours à CivaN et livrez-vous à l’ascèse. Le monde entier vous admirera et votre vie sera une vie exemplaire. Afin que vous en soyez convaincus, je vais vous raconter une histoire. » (st. 2-25).
5. MārkkaṇṭēyaN
29Dans la ville de Kaṭakam vivait un brahmane du nom de KuccakaN. Il avait un fils nommé KauccikaN qui connaissait bien les maRai (Veda), (st. 1-2).
30KauccikaN voulut pratiquer une ascèse. Il alla s’installer au bord d’un étang et se livra à une austérité sévère, sans nourriture, ni sommeil. Plongé dans la méditation, il était complètement immobile, ne se rendant pas compte de ce qui se passait autour de lui et de ce qui lui arrivait à lui-même. Les bestiaux qui passaient à ses côtés, se frottaient le corps contre lui quand ils avaient des démangeaisons, (st. 3-4).
31Tirumāl (Viṣṇu), étonné de la rigueur de la pénitence de KauccikaN, se présenta devant lui, accompagné des imayōr (tēvar). Il voulut le bénir et de sa main droite il lui caressa le corps et lui dit : « O sage ! Je te donne le nom de MirukakaṇṭūyaN*. » (st. 5-6).
32Aussitôt le sage se leva et adora les pieds de Tirumāl· Celui-ci continua : « Que le dieu qui porte sur la tête un croissant de lune (CivaN) t’accorde sa grâce et que tous tes péchés soient réduits à néant. » Cela dit, il disparut avec les célestes. (st. 7).
33MirukakaṇṭūyaN alla voir son père et lui raconta ce qui lui était arrivé. KuccakaN eut une émotion joyeuse, félicita son fils et lui conseilla de mener désormais la vie conjugale, car il estimait que son état de piramam (brahmacārya, célibat) devait prendre fin. (st. 8-14).
34MirukakaṇṭūyaN s’étonna de ce conseil qui l’ébranla. Il fit remarquer à son père que la vie conjugale, sans pouvoir le libérer de la chaîne des naissances, ne ferait que renforcer ses liens, que plusieurs des muNi et des tēvar avaient souffert à cause de leur amour pour les femmes et qu’il ne voulait que la vie solitaire et l’ascèse, cette dernière seule pouvant lui donner la béatitude. (st. 15-32).
35Le sage KuccakaN répliqua :
36« Ecoute, mon fils. Je ne te dis pas de t’adonner à la luxure. Tu sais bien qu’un garçon délivre ses ancêtres de tous leurs maux. Pour que toi et tes ascendants gagnent le Paradis et y restent, il faut que tu aies un fils et que par conséquent tu vives avec une femme. N’est-ce pas après la vie conjugale qu’on entre dans celle d’anachorète ? C’est la loi de la nature. Marie-toi avec une fille vertueuse et accomplis tes devoirs d’époux. Tu renonceras ensuite aux attaches mondaines. » (st. 33-51).
37MirukakaṇṭūyaN accepta la proposition de son père, ne voulant pas lui désobéir. Mais il lui posa une condition. « Je ne prendrai pour épouse, lui dit-il, qu’une fille possédant de belles qualités. Dans le choix d’une épouse il faut être prudent et circonspect. Il ne faut jamais choisir une fille orpheline de père et de mère, une fille qui n’a pas de frère ni de sœur, celle qui n’a pas d’autres parents, celle qui n’est pas belle, celle qui est née dans une famille de condition plus haute, celle dont les parents sont maladifs, celle qui porte le nom d’un animal, celle qui appartient à une religion étrangère, celle qui est sujette à une maladie, celle qui est muette, sourde ou atteinte d’une autre infirmité, celle qui fréquente les étrangers, celle dont le regard est pareil à celui d’une prostituée, celle qui se tient souvent à la porte de la maison, qui jette son regard sur les hommes, celle qui est gourmande, qui dort beaucoup, celle qui est plus âgée que le fiancé, celle qui appartient au même kōttiram (gōtra) que lui, celle qui est très grande ou très courte de taille, qui est grosse ou maigre, celle qui est noire ou de couleur d’or, celle qui n’a pas de honte, qui rit beaucoup, qui est violente, celle qui n’obéit pas à ses parents, qui se met vite en colère, celle qui aime les théâtres et les spectacles, celle qui n’a pas d’amour pour ῙcaN (CivaN), qui déteste les muNi, celle qui n’a pas un cœur généreux, celle qui parle-bruyamment comme le tonnerre, celle dont les yeux ressemblent à ceux du chat, celle dont les cheveux sont blancs, celle qui a une chevelure abondante, celle qui a des yeux petits, un nez allongé, des dents longues, un cou tordu, celle qui a des poils serrés aux jambes, celle dont la démarche ne ressemble pas à celle du hamsa et celle dont les lèvres, la paume de la main, les ongles, la plante des pieds ne sont pas rouges. Si vous trouvez une fille n’ayant aucun de ces défauts, je consentirai à la prendre comme mon épouse. » (st, 53-72).
38KuccakaN alla à la recherche d’une fille pouvant répondre au goût de son fils. Par des muNi qu’il rencontra sur son chemin, il apprit que dans le pays de CeNNi (CōLa) et dans la forêt appelée Anāmayam, vivait un sage du nom d’UcattiyaN, ayant une fille qui lui conviendrait. KuccakaN alla voir UcattiyaN et lui fit part de l’objet de sa visite. Ce dernier fit venir aussitôt sa femme et sa fille les présenta au visiteur et lui dit qu’il consentait au mariage de sa fille Viruttai avec MirukakaṇṭūyaN. Il pria ensuite le sage de rester quelques jours avec lui, ce qu’il accepta. (st. 73-78).
39Un jour Viruttai et ses compagnes allèrent se baigner dans une rivière voisine, autorisées par Maṅkalai, épouse d’UcattiyaN. Au retour elles entrèrent dans un bocage et se divertirent en cueillant des fleurs, qui attiraient leur attention par leur parfum et leur beauté. Soudain, un éléphant sauvage vint à passer. Les jeunes filles épouvantées, coururent dans tous les sens, à toute vitesse pour se sauver. Elles se dispersèrent et se séparèrent. Viruttai prit une direction et courut seule à toutes jambes. Dans sa fuite elle tomba dans un puits abandonné, couvert de broussailles, où elle trouva la mort. (st. 79-86).
40L’éléphant étant parti, les filles se rassemblèrent en un endroit du bocage, après s’être appelées par leurs noms, à haute voix. Viruttai ne répondit pas à l’appel. Les compagnes s’inquiétèrent et se mirent à sa recherche, mais en vain. Elle allèrent alors chez Maṅkalai et l’informèrent de la disparition de sa fille. Maṅkalai se lamenta et alla prévenir son mari. Les deux époux, accompagnés des amies de leur fille, se rendirent au bocage et cherchèrent Viruttai dans tous les coins et recoins. Ils aperçurent alors en un endroit quelques bijoux de leur enfant, répandus sur le sol. Pensant qu’elle les avait laissé tomber dans sa fuite, ils suivirent la direction de ces parures et arrivèrent au puits où ils trouvèrent Viruttai morte. UcattiyaN descendit dans le puits, souleva le cadavre et, avec l’aide de sa femme et des autres jeunes filles, le porta au dehors. Il le plaça sur le sol à côté du puits et se mit à pleurer avec sa femme et les compagnes de Viruttai. (st. 87-106).
41KuccakaN qui apprit cet évènement par sa vision spirituelle, arriva sur les lieux et consola UcattiyaN et les autres. Il leur dit qu’il ferait ressusciter Viruttai le lendemain et leur conseilla de mettre le corps dans de l’huile. Puis il se rendit à un étang. Il descendit dans l’eau et se mit à pratiquer une ascèse à l’égard de KūRRuvaN (YamaN). (st. 107-111).
42L’éléphant qui avait épouvanté les jeunes filles dans le bosquet, arriva à cet étang. Il y descendit, saisit le sage par sa trompe, le plaça sur son dos et s’en alla. Il fit un long chemin. KuccakaN qui ne savait pas d’abord l’intention de l’éléphant, vint à la comprendre, toujours par sa vision spirituelle. L’éléphant agissait ainsi par son propre destin. Voici son histoire : (st. 112-113).
43Dans la ville d’Aripuram du pays de Kaliṅkam, vivait un marchand du nom de TēvatattaN. Il avait un fils nommé TarumatattaN. TēvatattaN et sa femme étant morts, TarumatattaN menait une vie solitaire. Il était riche et en même temps charitable, (st. 114-116).
44Un jour un alchimiste vint chez lui. Il avait le corps frotté de cendre sacrée. Il était orné de boucles d’oreilles et d’un kaṇṭikai (collier de ruttirākṣam, grains d’Eleocarpus) et portait à l’a main un rotin. (st. 117).
45TarumatattaN le prit pour un sage, le reçut revérencieusement et lui donna l’hospitalité. Il lui demanda ensuite quel était l’objet de sa visite. (st. 118-119).
46L’alchimiste lui répondit : « Nous avons appris d’ĪcaN (CivaN) un art que nous voulons enseigner à quelqu’un qui soit vrai disciple de son maître, car cet art ne doit jamais être communiqué à un homme qui n’a pas d’amour et de respect pour celui qui l’enseigne. Comme nous constatons que tu possèdes de bonnes qualités et que tu es vertueux, nous croyons que tu mérites de l’apprendre. Nous avons également obtenu de Campu (CivaN) un composé de mercure avec lequel nous pouvons transformer en or tout autre métal, rendre une quantité d’or ou d’argent dix mille fois plus grande, faire voir en restant sur place les monts Mēru et Kayilāyam, etc… Si tu nous présentes tout ce que tu as comme richesse dans ta maison, nous ferons en sorte qu’elle se multiplie de façon qu’il n’y ait pas de place dans ta demeure pour la mettre. » (st. 120-125).
47TarumatattaN fut ébranlé. Poussé par l’ambition, il alla chercher les pièces d’or et les bijoux qui étaient en sa possession et les mit devant le visiteur. Ce dernier lui fit observer que cela était insuffisant. TarumatattaN vendit alors ses autres propriétés, telles que terrains, bestiaux, etc., et porta à l’alchimiste tout l’argent provenant de cette opération. (st. 126-130).
48Le nouveau venu fit fondre tous les bijoux et les pièces d’or. Il en fit un lingot et le mit dans un creuset qu’il ferma avec de l’argile. Le creuset fermé subit cent huit coupellations. L’alchimiste retira alors le contenu du creuset et dit à TarumatattaN qu’il restait encore une dernière opération à faire, laquelle consistait en une sublimation avec un produit spécial, dans une chambre hermétiquement fermée, (st. 131-134).
49TarumatattaN l’amena dans une chambre, dont il ferma les ouvertures. L’alchimiste plaça dans un nouveau creuset le contenu de l’ancien et alluma un feu ardent dans la chambre. La fumée qui ne pouvait s’évacuer, emplit tout l’appartement. TarumatattaN transpira, ses yeux laissèrent couler des larmes. Il ne put supporter l’effet de la fumée, qui commença à le suffoquer. Il ferma les yeux et resta assis, immobile devant le manipulateur. Celui-ci profita de cette circonstance pour soustraire le creuset. Il le cacha avec son contenu dans son linge et mit à sa place un autre creuset semblable qu’il gardait dissimulé dans son vêtement. Il invita ensuite TarumatattaN à prendre le creuset et à le mettre dans le feu. Ce dernier ouvrit ses yeux et prit, non sans difficulté, le creuset qu’il plaça au milieu du feu. (st. 135-138).
50L’alchimiste dit alors à TarumatattaN qu’il devait, en dernier lieu, faire un sacrifice dans un temple de Nili (Kāli) et que ce sacrifice durerait trois jours. Il ajouta que pendant ce temps TarumatattaN devrait surveiller le creuset sans le toucher tout en observant le jeûne. Cela dit, il quitta la maison du marchand et disparut. (st. 139-142).
51TarumatattaN suivit strictement les prescriptions de l’alchimiste qu’il ne vit plus revenir après trois jours. Il se mit alors à sa recherche. Il visita plusieurs temples de Nili (Kāli) où il ne le trouva pas. Il le chercha partout ailleurs, mais en vain. (st. 143-144).
52Il rentra chez lui, prit le creuset et constata qu’il ne contenait qu’un petit morceau de fer. Sa déception fut grande, le saisissement lui fit perdre la vie. A cause de son acte répréhensible, il devint un éléphant errant. (st. 145-147).
53KuccakaN qui se trouvait sur le dos de l’éléphant voulut que le pachyderme reprît son ancien corps. « Que l’effet d’un jour de mon ascèse aille à ce pauvre éléphant ! » s’écria-t-il. Immédiatement l’animal se transforma en TarumatattaN. Celui-ci étant alors débarrassé de sa faute, salua le sage et se rendit au ciel. (st. 148-152).
54KuccakaN retourna à l’étang et reprit son ascèse. Le gardien du côté sud (YamaN) apparut devant lui et lui demanda ce qu’il souhaitait. Le pénitent lui répondit que la fille d’UcattiyaN, qui devait être mariée à son fils, étant morte la veille, il voulait qu’elle fût ramenée à la vie. AntakaN (YamaN) ordonna alors à l’un de ses émissaires d’aller chercher l’âme de Viruttai et de l’introduire dans son cadavre, ce qui fut fait sur-le-champ. (st. 153-157).
55Viruttai revint à la vie, et se leva comme si elle venait de se réveiller d’un sommeil. Ses parents l’embrassèrent et lui demandèrent ce qui lui était arrivé. La fille leur conta son aventure. (st. 158-161).
56A ce moment KuccakaN revint chez eux. UcattiyaN et sa femme Maṅkalai lui adressèrent des compliments et le retinrent dans leur domicile pendant quelques jours. Sur la demande de leur convive, ils s’engagèrent à célébrer le mariage de leur tille dans leur propre maison et prièrent KuccakaN d’amener sont-ils. Le mariage entre MirukakaṇṭūyaN et Viruttai eut lieu en un jour propice, suivant les règles rituelles. (st. 162-166).
57KuccakaN resta plusieurs jours avec les deux époux et se réjouit de voir son fils mener la vie conjugale. Un jour il lui manifesta le désir de se livrer à une ascèse et le quitta pour se rendre dans une contrée du Nord. (st. 167).
58Quelque temps après, MirukakaṇṭūyaN eut un fils qu’il nomma Mirukaṇṭu. Celui-ci, après avoir observé assez longtemps le piramam, voulut se marier. Il prit donc la main de Maruttuvati, fille du sage MuRkalaN. (st. 168-171).
59Mirukaṇṭu et Maruttuvati passèrent plusieurs années sans avoir de postérité. Ils tirent un pélérinage à Kāci. Après leur bain purificateur dans la Kaṇkai, ils adorèrent le dieu dont la chevelure est ornée de la lune, dans le temple de MaṇikaNRikai. Mirukaṇṭu se livra ensuite à une pénitence rigoureuse, pendant un an, non loin du temple, en vue d’avoir un enfant. (st. 172-177).
60Le dieu destructeur des trois forteresses (CivaN) lui apparut. Mirukaṇṭu sollicita le don d’avoir un enfant. « Veux-tu un fils, lui dit le Maître, pouvant vivre cent ans, mais de mauvais caractère, inintelligent, muet, sourd, aveugle et maladif ou veux-tu un enfant dont la durée de la vie ne sera que de seize ans, mais d’excellente apparence, sans aucune infirmité, n’étant sujet à aucune maladie, connaissant toutes sortes de sciences et ayant de la piété envers nous ? » Mirukaṅṭu lui répondit qu’il préférait un enfant de courte vie, sans défaut et ayant de l’amour pour lui. ῙcaN accorda ce don et disparut. (st. 178-182).
61Mirukaṇṭu s’installa à Kāci avec ses parents. Sa femme devint enceinte. Un jour du mois de Mī Nam (Paṅkuni), où les astres étaient dans une situation particulièrement bonne, elle donna naissance à un garçon. Mirukaṇṭu, enchanté d’avoir un fils, fit des dons et des charités. Le dieu qui vit sur le lotus (Brahman) prit part à la fête. Il donna au nouveau-né le nom de MārkkaṇṭaN. (st. 183-189).
62A l’âge de cinq ans l’enfant fut confié à un précepteur qui lui donna une instruction solide et sérieuse. Il lui enseigna toutes sortes de sciences, notamment les vētam. L’élève intelligent les apprit vite et convaincu qu’AraN (CivaN) seul était l’Etre Suprême, il tourna vers lui sa dévotion, tout en aimant et respectant ses parents, (st. 190-192).
63MārkkaṇṭaN atteignit l’âge de seize ans. Ses père et mère devinrent mélancoliques. L’idée de la perte prochaine de leur fils les affligea. Ils commencèrent à dépérir. (st. 193).
64Le jeune homme qui constata cet état, demanda à ses parents quelle était la cause de leur chagrin. Ils lui dirent qu’Amalamūrtti (CivaN) ne lui avait donné que seize ans de vie et que cette durée devant s’achever bientôt, ils s’en inquiétaient beaucoup. Le fils les consola ; il leur dit que par sa dévotion à AraN (CivaN), il réduirait à néant la puissance de KūRRu (YamaN). (st. 194-196).
65Cela dit, il se rendit au temple de MaṇikanRikai, s’installa dans un coin, au côté sud et commença son ascèse. De nombreux jours s’écoulèrent. Un matin ῙcaN lui apparut et lui demanda ce qu’il désirait. « Seigneur ! lui répondit-il, daignez m’accorder la grâce de n’être point touché par KālaN (YamaN) ». AmalaN exauça son vœu, mit ses pieds sur sa tête en signe de protection et disparut. (st. 197-202).
66Il venait d’achever sa seizième année. Un envoyé de YamaN se présenta devant lui pour le capturer. Mais il n’osa pas le faire ; car le jeune homme était en ascèse, implorant le destructeur de Muppuram (CivaN). Il en fit part à son maître, qui lui reprocha sévèrement de n’avoir pas exécuté son ordre. (st. 203-209).
67TaṇṭakaN (YamaN) fit venir ensuite son comptable CittirakuttaN et lui demanda quelle était la durée de la vie de MārkkaṇṭaN. Il lui répondit que ce dernier ne devait vivre que seize ans et que cet âge était déjà atteint. Il ajouta qu’en raison de sa dévotion, il méritait le Paradis. (st. 210-215).
68A ces mots TaṇṭakaN devint furieux et ordonna à son ministre KālaN d’aller chercher l’âme de MārkkaṇṭaN sur-le-champ. Le ministre alla à Kāci et vit le jeune homme faisant sa dévotion au Maître des quatre MaRai (CivaN). Il s’approcha de lui, le salua et lui dit d’un air timide : « Je suis le serviteur de TaṇṭakaN. La durée de la vie que vous a attribuée l’Etre-Suprême a pris fin hier. Vous devez donc entrer maintenant dans le royaume de mon maître. Celui-ci n’est pas cruel comme on le croit. Venez donc avec moi. Vous serez bien reçu par lui et il vous accordera un bonheur égal à celui d’IntiraN. » (st 216-223).
69MārkkaṇṭaN se refusa à suivre KālaN, prétendant qu’il ne recherchait aucun autre bonheur que celui du monde de CivaN. (st. 224-225).
70KālaN retourna aussitôt chez son maître et lui fit part du refus de MārkkaṇṭaN. (st. 226).
71AntakaN (YamaN) rougit de colère. Il prit ses armes : trident, bâton, corde, etc…Monté sur son buffle et entouré de ses subordonnés, il alla auprès du fils du sage de Kāci (MārkkaṇṭaN) et d’un ton furieux lui dit : « Que crois-tu jeune homme ? Peux-tu méconnaître ton destin et la volonté d’ῙcaN ? La naissance et la mort sont communes à tous les êtres. Ta dévotion à ῙcaN peut écarter tes péchés, mais est-elle capable d’empêcher ma corde de te lier ? Sache que cette corde m’a servi à conduire même les tēvar. Viens donc sans tarder, car je ne quitterai pas cette place avant de capturer ton âme. » (st. 227-239).
72A ces mots le jeune homme fit observer à MaRali (YamaN) que les dévots du Maître (CivaN) étaient immortels, qu’ils n’avaient d’attrait pour aucun monde, excepté celui de CivaN, qu’ils étaient puissants et qu’ils ne craignaient rien. (st. 240-248).
73Courroucé davantage KūRRaN (YamaN) s’élança sur le garçon, qui continuait sa dévotion à ῙcaN et lança sur lui sa corde. L’ascète resta calme et ne ressentit aucun mal. Soudain le destructeur des trois cités (CivaN) apparut et d’un coup de pied, il terrassa KūRRaN qui expira de suite. Ceux qui l’avaient accompagné tombèrent morts, frappés de terreur. Il en fut de même du buffle, monture de YamaN (st. 249-256).
74CivaN se retourna vers MārkkaṇṭaN et lui dit : « Nous sommes satisfait de ta dévotion et nous rendons ta vie éternelle. » Puis il disparut. (st. 257-259).
75MārkkaṇṭaN alla de nouveau au temple de MaṇikaNRikai, révéra encore une fois le Maître et se rendit chez ses parents qui, en entendant son histoire, eurent une joie sans bornes. (st. 260-264).
76Le gardien du Sud (YamaN) étant mort, il n’y eut point de mortalité parmi les êtres qui, au contraire, se multiplièrent. La déesse de la terre ne pouvant supporter le poids considérable et croissant qui en résultait, alla s’en plaindre auprès de Mal (Viṣṇu). Celui-ci accompagné du dieu au lotus (Brahman) et du dieu armé de Kulicam (IntiraN) et des autres aṇṭar (tēvar), se rendit au Kayilai, exposa la situation à NilakaṇṭaN (CivaN) et le pria de faire revivre AntakaN (YamaN). (st. 265-275).
77AmalanāyakaN (CivaN) acquiesca au désir de Māl. KūRRuvaN fut ressucité, en même temps que sa monture et toute sa suite. Il révéra alors NittaN (CivaN) qui lui ordonna de reprendre ses fonctions. (st. 276-285).
6. Prédication de Māyai
78Quand KācipaN eut fini de conter cette histoire, Māyai éclata de rire. « O sage ! lui dit-elle, il est vrai que tout ce que vous venez de dire à nos enfants est susceptible de les mettre sur le chemin du salut, mais il ne faut pas oublier qu’ils sont encore jeunes et qu’ils ne peuvent pas dès à présent entreprendre une action qui est le propre des muNi. Laissons-les maintenant vivre une vie heureuse, opulente et glorieuse et indiquons-leur le moyen d’y parvenir. » Le sage invita alors Māyai à exposer elle-même ce moyen. (st. 1-4).
79La mère commença à parler. Elle dit : « Tout être animé de bon sens doit s’efforcer d’obtenir deux espèces de richesse : l’instruction et la fortune proprement dite. Je dirai même que cette dernière est plus importante que l’autre, car sans la fortune l’instruction ne brille pas. Cherchez, mes enfants, à acquérir une bonne fortune. Vous êtes des nirutar (acurar), donc les célestes qui sont au dessus de vous, sont vos ennemis. Vous devez en tout les surpasser. Voici le moyen d’y arriver, (st. 5-16).
80Le lieu où nous nous trouvons maintenant s’appelle Ālantīvu. Quittez ce lieu et allez vers le Nord. Vous trouverez un endroit qu’on nomme Uttarapūmi. Il est propre à l’ascèse des tāNavar (acurar). Installez-vous là, faites une fosse de sacrifice et allumez un feu avec des brindilles vénéneuses. Versez du sang et jetez de la chair animale dans ce feu et faites ainsi un sacrifice pendant plusieurs jours, implorant le dieu aux cheveux tressés (CivaN). Celui-ci apparaîtra et vous accordera tous les dons que vous désirerez. Dès que vous trois, mes fils, vous serez arrivés à Uttarapūmi, je vous ferai parvenir ce dont vous aurez besoin pour votre sacrifice. » (st. 17-22).
81Māyai enseigna ensuite à ses fils les mantiram (mantra) relatifs au sacrifice et leur indiqua le procédé à suivre pour son exécution. (st. 23).
82Le fils aîné (CūrapaNmaN) et ses deux frères saluèrent leurs parents et les quittèrent. (st. 24).
7. Séparation de Māyai
83Après le départ de ses enfants, Māyai voulut se séparer du muNi. Elle lui dit qu’elle ne pouvait rester désormais avec lui et qu’il était de son devoir d’aller aider et assister ses fils dans leurs austérités. Elle le quitta aussitôt et s’éloigna. (st. 1).
84Le sage la suivit. Māyai le pria de rester à sa place, en lui faisant observer qu’elle était venue dans l’unique intention d’avoir des enfants, mais non de vivre avec lui. Ce disant, elle disparut. Au même moment disparurent aussi toutes les choses qui s’étaient créées à cet endroit à l’arrivée de Māyai. (st. 2-4).
85Le muNi en fut affligé. Il se lamenta. Le dieu qui vit sur la fleur s’en rendit compte, vint auprès de son fils et le consola. Il lui dit : « Mon fils ! Tu as eu tort de t’éprendre d’une femme et de te chagriner à cause de sa séparation. Sache que la luxure est plus nuisible que le poison. D’ailleurs la femme que tu aimes est perfide. Tu as donc commis une faute grave en l’aimant. Pour te délivrer de tous les maux que ton union avec elle peut te causer, pratique de nouveau une ascèse. » Cela dit, il retourna à sa place. (st. 5-14).
86KācipaN se repentit de sa faute et, selon le conseil de son père, il alla pratiquer une ascèse. (st. 15).
87Afin d’obtenir tout ce qui était nécessaire au sacrifice de ses fils, la femme qui avait quitté le muNi alla voir Pukar (Cukkirācāriyar). Sur les instructions de ce dernier, elle commença à faire une pénitence, implorant VimalaN (CivaN). (st. 16-17).
8. Sacrifice des acurar
88CūraN s’apprêta à se rendre au pays du Nord (Uttarapūmi) pour y accomplir un sacrifice, selon les instructions de sa mère. Sa troupe s’étant mise en route, il se plaça en son milieu, tandis que ses frères CiṅkamukaN et TārakaN se mirent respectivement à la tête et à la queue. La marche des tāNavar (acurar) fit trembler la terre. La déesse de la terre et le roi des serpents (ĀticēṭaN) ainsi que les éléphants supportant le monde en ses huit directions tressaillirent de frayeur. AyaN et les gardiens des points cardinaux commencèrent à frémir. (st. 1-13).
89Le précepteur des tāNavar (acurar) voulut voir CūraN. Monté sur son char aérien, il se précipita dans la direction suivie par l’armée des avuṇar (acurar). De loin, il aperçut cette armée et s’étonna de son attitude farouche. Il se dit que si ces avuṇar avaient pratiqué des ascèses, ils auraient été encore plus forts et qu’ils auraient obtenu du dieu porteur de fleurs d’itaLi (cassia) des armes plus puissantes. (st. 14-20).
90Il se fraya un passage dans la masse et arriva auprès de CūrapaNmaN, tout en lui adressant des paroles de bénédiction. L’avuṇaN le salua, lui demanda son nom, sa demeure et l’objet de sa visite. (st. 21-29).
91« Je suis le précepteur de toute ta race, répondit le visiteur. Je m’appelle PukarōN. Je suis venu ici pour te donner de la force et du courage dans ton entreprise. Pendant ton ascèse, tes ennemis chercheront à te faire du mal. Pour en être quitte, je vais t’enseigner un mantiram (mantra), qui te protégera, si tu le récites tous les jours » Ceci dit, il lui donna une instruction orale. (st. 30-33).
92Le fils de Māyai continuant son chemin vers le Nord, arriva dans une forêt de banians. Il la choisit pour son lieu de sacrifice. Il fit élever tout autour de cette forêt des murailles avec des blocs de pierre qu’il fit apporter des montagnes voisines. Quatre portes furent pratiquées aux quatre côtés. Il en confia la garde à la déesse de la victoire. Il ordonna à ses armées, ainsi qu’à des démons et des diables qu’il fit venir, de garder les murailles. Au milieu de la forêt, il fit creuser des fosses de sacrifice, une très large et très profonde, entourée de cent huit autres plus petites, lesquelles étant environnées par mille huit autres fosses encore plus petites. Quant aux matériaux nécessaires pour le sacrifice, il pensa à sa mère. Celle-ci apparut aussitôt devant lui. (st. 34-48).
93Māyai fit venir, par sa puissance mystérieuse, de la chair d’animaux, diverses sortes d’huile, du lait, du riz, du safran, des fleurs, des herbes, des brindilles sèches de différentes plantes, des ustensiles, des vaches, une colonne de diamant, etc., objets requis pour un sacrifice, et les remit à son fils. (st. 49-56).
94CūraN commença ses austérités. Après ses prières, il fit des offrandes aux divinités. Il alluma le feu sacré dans les fosses de sacrifice. Il chargea son frère TārakaN de surveiller les mille huit fosses extérieures et laissa les cent huit autres à la garde de son autre frère à la tête de lion (CiṅkamukācuraN). Il se mit ensuite devant la grande fosse centrale, fit sa dévotion au dieu dont le corps a une moitié féminine (CivaN), planta la colonne de diamant et attisa le feu en y versant de l’huile et du beurre fondu, puis il y jeta des morceaux de chair d’animaux, du riz, des céréales etc., tout en implorant le dieu aux cheveux tressés, (st. 57-81).
95IntiraN, NāNmukaN et le dieu de la couleur de nuage eurent connaissance du sacrifice exécuté par CūrapaNmaN. Les muNi également parvinrent à le savoir. Ils furent tous saisis d’effroi, car ils craignirent beaucoup les conséquences de ce sacrifice, capable de leur nuire, (st. 82-83).
96CūraN continua ses austérités avec ses frères. Dix mille ans s’écoulèrent. Kaṇṇutal (CivaN) ne fit point son apparition. Le pénitent comprit. Il quitta subitement la forêt, s’éleva en l’air, et, se servant de son épée, il coupa la chair de son corps et la jeta dans le feu du sacrifice. Mais il constata qu’au fur et à mesure qu’il détachait de son corps des morceaux de chair, les parties blessées reprenaient leur état normal, de telle sorte qu’on n’y voyait aucune cicatrice ni trace de blessure. Il s’en étonna et pensa que cela ne pouvait être dû qu’à la bienveillance du Maître (CivaN). (st. 84-88).
97Cependant NimalaN (CivaN) n’apparut pas. CūraN continua son action pendant un millier d’années. Point d’apparition de NimalaN. Le pénitent décida alors de se suicider en se jetant dans le feu ardent de la fosse du sacrifice. Il sauta sur la colonne de diamant plantée au milieu de la première fosse et, se laissant glisser tout le long de la colonne, il arriva au fond de la fosse, où il fut dévoré par le feu. (st. 89-91).
98CiṅkamukaN, son frère TārakaN et ses compagnons se lamentèrent, tandis que le roi des tēvar (IntiraN) qui apprit la mort de CūraN par ses émissaires, en devint content et alla voir, monté sur son éléphant, la désolation des avuṇar. (st. 92-109).
99CiṅkamukaN, très affligé, se coupa les têtes et les jeta dans le feu du sacrifice ; mais ces têtes repoussèrent aussitôt. TārakaN imita son frère ; le même phénomène se produisit chez lui. Un grand nombre d’acurar qui avaient vu cela se coupèrent les têtes, mais ils ne purent en avoir d’autres et ils trouvèrent la mort. (st. 110-115).
100CiṅkamukaN, ne voulant plus vivre après son frère, se résolut à mourir en se jetant comme lui dans le feu. A cet effet il s’éleva en l’air. Le Maître (CivaN) sut son intention et daigna lui accorder sa grâce, (st. 116).
9. Obtention de dons
101CuntaraN (CivaN) prit la forme d’un vieux brahmane et, s’appuyant sur un bâton, alla à pas tremblants près de la fosse du sacrifice. Il vit CiṅkamukaN et lui demanda pourquoi il se lamentait. CīyamukaN (CiṅkamukaN) lui raconta toute son histoire et lui dit qu’il préférait mourir comme son frère. (st. 1-8).
102Le vieillard le consola et lui promit de faire ressusciter son frère. Il fit donc venir Kaṅkai et la fit pénétrer dans la fosse centrale du sacrifice. Aussitôt le roi des avuṇar (CūrapaNmaN) sortit de la fosse avec toute sa splendeur. ArimukaN (CiṅkamukaN) et TārakaN en furent ravis. (st. 9-15).
103Le Maître (CivaN), disparut ; mais il fit son apparition en l’air, monté sur le taureau avec son épouse. CūraN et ses frères se prosternèrent devant eux et les vénérèrent. (st. 16-17).
104Il lui demanda alors ce qu’il souhaitait. CūrapaNmaN répondit : « Seigneur ! Mon vœu est de devenir roi de tous les univers, d’avoir un corps invulnérable, de posséder une monture capable de me transporter sans difficulté d’un monde à l’autre, des armes puissantes et une force formidable afin de vaincre les tēvar et même le dieu qui dort sur l’océan (Viṣṇu), s’il m’arrive de lutter contre eux, et, enfin, avoir une vie éternelle. » (st. 18-20).
105Le dieu dont la tête est ornée de la lune (CivaN) lui dit : « Il existe dans l’atmosphère des univers au nombre de dix milliards, je te donne le don de régner sur mille huit de ces univers, pendant cent huit yukam (yuga). Je te donne également un char appelé Intirañālam, une monture de lion et des armes puissantes, dont Pācupatam. Tu auras en outre un corps solide et dur comme le diamant et qui sera impérissable, (st. 21-23).
106Il créa ensuite les quatre sortes d’armée ayant chacune cent milliards d’unités et les mit à la disposition de CūrapaNmaN. (st. 24-25).
107Les deux frères de ce dernier se prosternèrent de nouveau devant le Maître. Celui-ci les bénit leur donna le don de vivre pendant cent huit yukam et leur conseilla d’être toujours au service de leur frère et de l’aider dans toutes ses entreprises. (st. 26-27).
108Il les quitta ensuite en leur disant qu’aucune force, sauf la sienne, ne pourrait les vaincre. (st. 28).
10. Instruction de CukkiraN
109A la suite des dons accordés par CivaN à CūraN et ses frères, les tāNavar (acurar) manifestèrent leur joie en poussant des vivats et en jetant des fleurs aux pieds de leurs maîtres. (st. 1-10).
110CūraN alla ensuite, accompagné de ses frères et de ses soldats, auprès du sage KācipaN et lui demanda de lui indiquer ce qu’il avait à faire. KācipaN lui conseilla d’aller prendre des instructions auprès de son guru, le sage PārkkavaN (Cukkirācāriyar). (st. 11-15).
111Ce dernier reçut avec bienveillance CūraN qui lui raconta son histoire et le pria de lui indiquer ce qu’il devait faire désormais, (st. 16-23).
112Cukkirācāriyar parla en ces termes : « Il n’y a plus de Pācam (lien). ῙcaN (Seigneur) et Pacu (âme) ne sont qu’un. Le Seigneur CivaN qui n’a ni naissance ni mort, se présente sous forme de lumière intense et s’enferme, de par sa volonté, dans les corps qui ne proviennent que de Māyai (illusion). Quand les corps disparaissent, il ne se détruit pas ; il est éternel. Il n’est pas exact qu’il y ait des actions bonnes et des actions mauvaises, produisant respectivement du bonheur et du malheur. Dire qu’il y a une béatitude et qu’il faut essayer de l’atteindre, c’est mentir purement et simplement. Il n’est pas juste de parler des cinq sens et des cinq organes et du pacu (âme individuelle) qui en jouirait. L’intelligence, la parole, la forme, tout est faux, Naître, agir et mourir ne concernent que le corps. ParaN (CivaN) en est exempt. Toute action doit être faite comme venant de Māyai (illusion) sans chercher à y voir un effet bon ou mauvais. Ce qu’on voit en songe ne se reproduit pas quand on est éveillé ; de même, ce qu’on fait dans la vie présente n’a aucun effet dans la vie future, qui d’ailleurs n’existe pas. Tous les êtres sont égaux ; il n’y a point de supériorité ni d’infériorité entre eux. Un vrai sage le sait parfaitement. (st. 24-45).
113Tu possèdes maintenant un royaume immense et une richesse considérable. Tu es égal à PiramaN (Brahman), donc tu n’as pas à le respecter. Les célestes étant tes ennemis, tu dois les châtier. Jadis IntiraN a massacré plusieurs avuṇar (acurar). A toi maintenant de le vaincre et de le mettre en prison. Prends sous tes ordres les muNi et les dieux gardiens des points cardinaux. Fais tout ce que tu veux, même des actes que les autres peuvent qualifier de répréhensibles, car il ne t’arrivera aucun malheur. Va de suite visiter les mille huit univers que le dieu qui a pour monture le taureau t’a donnés, prends possession de ces univers pour y exercer ton autorité et reviens ensuite ici où tu fixeras ton siège impérial. » (st. 46-51).
11. Le Cosmos
114CūrapaNmaN, après avoir écouté les mauvais conseils du précepteur (CukkirācāriyaN), pria ce dernier de lui raconter l’histoire des mille et huit univers que Dieu lui avait donnés. (st. 1).
115Le maître lui raconta cette histoire ainsi.
116Le Mūlam (Mūlappirakiruti) donne naissance à Punti (Puttitattuvam, intellect), d’où sort Akantai (akaṅkāratattuvam, égoisme) qui est la source des cinq sens auxquels sont liés les-cinq éléments. De l’élément « terre » proviennent dix milliards d’univers, dont mille huit seulement t’ont été donnés. Il suffit que je te parle d’un seul de ces mille huit univers. (st. 2-4).
117Un kacākkirakam (extrémité fine d’un cheveu) est égal à vingt quatre tukaḷ (atomes), huit kacākkirakam sont égaux à une ilīkkai (lente), huit ilīkkai sont égales à un yūkai (pou), huit yūkai sont égaux à un iyavai (grain de riz), huit iyavai forment un aṅkulam (pouce), vingt-quatre aṅkulam forment un karam (coudée), quatre karam sont égaux à un taNu (arc), deux taNu forment un taṇṭam (perche), deux mille taṇtam forment un kurōcam, quatre kurōcam forment un yōcaNai. (st. 5-6).
118La longueur et la largeur d’un univers sont égales à un milliard de yōcaNai. Au dessus du globe terrestre on compte un demi milliard de yōcaNai et une distance pareille au dessous de la terre. De la partie centrale du mont Mēru, on compte dans tous les sens, jusqu’au zénith une distance d’un demi milliard de yōcaNai. (st. 7-8).
119Au dessous de la terre, à sa dernière limite, se trouve une sorte de coque appelée Aṇṭakatam. Au dessus de cette coque sont respectivement superposés le monde de Kālaccentiyuruttirar (KālākkiNi ruttirar), deux cent vingt-quatre millions de nirayam (narakam, enfers), le monde de Kūrmāṇtar, les sept Pātalam (gouffres), le monde d Āṭakar et enfin le monde terrestre supporté par huit éléphants et huit gros serpents, ainsi que par CēṭaN (ĀticēṭaN). (st. 9-17).
120Sur la terre se trouvent les îles appelées Campu, Cākam, Kucai, Kiravuñcam, Ilavu, Kōmetakam et Puṭkaram, entourées par sept mers, lesquelles sont : la mer d’eau salée, la mer de lait, la mer de lait caillé ! la mer de beurre fondu, la mer de jus de canne à sucre, la mer de miel et la mer d’eau douce. (st. 18-21).
121L’île Campu et la mer d’eau salée qui l’entoure ont chacune une longueur de cent mille yōcaNai. Les autres îles et les mers qui les entourent ont chacune une longueur progressive, double de celle de l’île ou de la mer qui la précède. La longueur totale des sept îles et des sept mers est donc de vingt-cinq millions quatre cent mille yōcaNai (st. 22).
122Autour de ces îles et de ces mers, il y a la terre d’or qui a une étendue de cent millions de yōcaNai. Cette terre d’or est entourée par Nēmiccaiyam (Cakkiravālakiri), dont l’étendue est de dix mille yōcaNai. Le grand océan extérieur qui entoure Nēmiccaiyam, s’étend jusqu’à une distance de douze millions sept cent mille yōcaNai. L’étendue du monde sombre qui l’entoure est de trois milliards cinquante et un millions neuf cent quarante mille yōcaNai. La coque qui l’entoure a une épaisseur de dix millions de yōcaNai. De sorte que la longueur totale du monde terrestre est de dix milliards de yōcaNai (st. 23-25).
123ANpuṭaivirataN (PiriyavirataN), fils de Cuvāyampu qui est sorti de l’épaule droite du dieu sur le lotus (Brahman), régna sur toute la terre. Il eut sept fils : AṅkitīraN, Mētāti, Vapuṭṭu, Cōtiṭṭu, TutimāN, AvviyaN et CavaNaN, qui étaient chacun à la tête d’une île. AṅkitīraN, empereur de Camputtīpam, divisa son île en neuf continents et les donna à ses neuf fils PārataN, KimpuruṭaN, Ari, KētumālaN, PattirācuvaN, IḷāvirutaN, IramiyaN, IraṇiyaN et Kuru, (st. 26-28).
124Au milieu du Camputtīvu se trouve le mont Mēru. Il a une hauteur de quatre-vingt-quatre mille yōcaNai, à partir du sol, dans lequel il s’enfonce jusqu’à une distance de seize mille yōcaNai. La largeur de son sommet est de trente-deux mille yōcaNai et celle de sa base dans le sol est de dix mille yōcaNai, de sorte qu’il présente la forme d’un bouton de lotus. Il comporte trois couches. La couche supérieure possède plusieurs pics. Sur le pic du milieu se trouve MaNōvati, demeure de PiramaN ; sur celui de l’ouest on trouve Vaikuṇṭam, séjour de NāraṇaN ; sur le pic du nord-est réside le Maître (CivaN) dans son Cōtiṭkam. Autour de ces résidences se trouvent installés les gardiens des huit points cardinaux. (st. 29-30).
125A l’est du mont Mēru est située la montagne appelée Mantaram, de couleur blanche. Au sud, à l’ouest et au nord du Mēru, se trouvent respectivement les montagnes KantamātaNam, de couleur d’or, Vipulam, de couleur bleue et Cupārcuvam, de couleur de la fleur de grenadier. Sur ces montagnes poussent respectivement les arbres kaṭampu (Eugenia racemosa), campu (Nāval, Calyptranthes caryophyllifolia), aracu (ficus religiosa) et āl (banian). Au pied du mont Mēru, se trouvent les étangs Aruṇam, MāNatam, Acitōtam et Māmaṭu, ainsi que les forêts Cayittiratam, Nantanam, Vaippiracam et Tirutākkiyam. (st. 31-32).
126L’étendue de terre située au sud du mont Mēru, comportait des arbres Naval (Calyptranthes caryophyllifolia). Elle fut appelée en conséquence Nāvalantīvu. Le jus des fruits de Naval coulait comme une rivière au nord du Mēru, en le contournant. Ce courant prit le nom de Cāmpanatam. Ceux qui buvaient ce jus vivaient treize mille ans et leur corps prenait la couleur d’or. (st. 33).
127Tout autour du mont Mēru existent d’autres petites montagnes qui sont : à l’est, MāliyavāN, an sud Nicatam, Ēmakūṭam et Imayam, à l’ouest KantamātaNam et au nord Nīlam, Cuvētam et Ciruṅkam. (st. 34).
128Le Navālantīvu, appelé aussi Camputtīvu est divisé en les neuf continents suivants : 1° Kuruvaruṭam, depuis la mer du nord jusqu’au mont Ciruṅkam, 2° Iraniya Varuṭam, depuis Ciruṅkam jusqu’au mont Cuvētam, 3° Iramia Varuṭam, depuis Cuvētam jusqu’à la montagne Nīlamalai, 4e Iḷāvirutam, terrain qui entoure le mont Mēru, 5° Pattiram, depuis le mont MāliyavāN jusqu’à la mer orientale, 6° Kētumāl Varuṭam, depuis le mont KantamātaNam jusqu’à la mer occidentale, 7° Arivaruṭam, du mont Nicatam au mont Ēmakūṭam, 8° Kimpuruṭam, du mont Ēmakūṭam au mont Imayam et 9° Pāratam, du mont Imayam à la mer méridionale. (st. 35-36).
129Kētumālam et Pattirācuvam ont chacun une longueur de trente-quatre mille yōcaNai ; les sept autres s’étendent chacun sur une longueur de neuf mille yōcaNai. A l’exception de Pāratam, tous les autres ressemblent au monde des umpar (tēvar). (st. 37).
130En Kuruvaruṭam les frères et les sœurs se marient entre eux. Ils sont tous de couleur verte, ils se nourrissent des fruits de l’arbre Tevatāru (arbre divin du Svarga) et vivent treize mille ans. Dans la partie septentrionale du Kuruvaruṭam se trouvent des cittar, des ascètes et des muNi. Ils sont de peau blanche et la durée de leur vie est de treize mille ans. Les habitants de Pattirācuvam sont de couleur rouge et vivent pendant treize mille ans, en se nourrissant de fruits. Ceux d’Iraṇiyam se nourrissent aussi de fruits, mais ils ont un teint semblable à celui de la lune et vivent pendant douze mille cinq cents ans. Les habitants d’Iramiyam ont la couleur du kuvalai, (nénuphar noir). Ils ne mangent que des fruits de banian et vivent pendant douze mille ans. Ceux qui se trouvent dans l’Ilāvirutam sont blancs et se nourrissent du jus de canne à sucre. La durée de leur vie est de douze mille ans. Dans le Kētumālam, il y a des gens de la couleur du nénuphar rouge. Ils se nourrissent des fruits de jujubier et vivent pendant dix mille ans. Les occupants d’Arikaṇṭam (Arivaruṭam) ont une couleur semblable à celle de la lune. Ils mangent des fruits et ont une vie de dix mille ans. Enfin, les habitants de Kimpuruṭam sont blancs. Ils se nourrissent des fruits d’itti (Ficus virens) et vivent pendant dix mille ans. (st. 38-40).
131Dans le Kimpuruṭam se trouve le mont Kayilai. Il est situé entre les montagnes Ēmakūṭam et Imayam. Sur son sommet réside MukkaṭpakavaN (CivaN) avec son épouse Umai. (st. 41-42).
132Les habitants du Pāratam exercent divers métiers, notamment celui de l’agriculture. Ils acquièrent la vertu ou le péché suivant leurs actions bonnes ou mauvaises et obtiennent le salut par la grâce de Dieu. La grandeur, la force, la moralité, l’intelligence, la longueur de la vie, la forme, la nourriture et la conduite de ces gens changent suivant les yukam (âges). Ils se nourrissent de fruits, de racines et de céréales. Les habitants des huit autres Kaṇṭam viennent parfois à Pāratam et subissent les conséquences des actes bons ou mauvais qu’ils y commettent. Les tēvar et les muNi dans ce continent pratiquent l’ascèse et se délivrent de leurs maux. (st. 42-44).
133Le pays sur lequel a régné ParataN fut appelé Pāratam. ParataN le divisa en neuf parties et en donna huit à ses huit fils IntiraN, KacērukaN, TāmirapaNNaN, Kapatti. NākaN, CaumiyaN, KantaruvaN et VaruṇaN. A sa fille Kumari, il attribua la dernière partie qui était la meilleure. C’est dans cette partie, nommée Kumarikaṇtam que se trouvent les rivières Kaṅkai, Kantami, YamuNai, Kumari, Vāni (Caracuvati), Kāviri, Narmatai, PālāRu, Tuṅkapattirai, Pāñcāli, Carayu, Vēṇi, Porunai, Peṇṇai etc., les montagnes Makēntiram, Potiyam, Caiyam, CattimāN, Viruṭcam, Pāriyāttiram et Vintam, les sept villes sacrées, dont Kāñci et les mille huit temples de CivaN.
134Tout cela est compris dans le Kumarikaṇṭam. (st. 45-47).
135A côté du Camputtīvu se trouve le Cākattīvu, entouré de la mer de lait. Il eut pour roi, Mētāti qui eut sept fils, dont l’aîné s’appelait CantavayaN. Ce roi partagea son pays entre ses sept enfants. Dans le Cākattīvu, il y a sept montagnes dont la plus importante est le mont Cōmakam et sept rivières parmi lesquelles la Civai est la principale. Ce pays est habité par les Āriyar, les Vintakar et les Kukarar. Leur dieu est Vāyu. (st. 48).
136Après le Cākattīvu se trouve le Kucattīvu qui est entouré de la mer de lait caillé. Vapuṭṭu fut son roi. Celui-ci le divisa en sept parties qu’il distribua à ses sept fils, CuppirataraN, etc… Ce pays comporte sept montagnes et sept rivières. La plus célèbre des montagnes est UNNatam et la plus célèbre des rivières est la CōNai. Ce pays est habité par les Tarppakar, les Kapilar, les Cāraṇar, les Nīlar, les Taṇṭar et les Vitaṇṭar. Ulavai (Vāyu) est leur dieu. (st. 49-50).
137Après le Kucattīvu vient le Kiravuñcattīpam, entouré de la mer de beurre fondu. Cōtiṭṭu en fut le roi. Celui-ci divisa son pays en sept parties qu’il attribua à ses sept fils, dont l’aîné s’appelait CāraṇaN. Dans le Kiravuñcattīvu il y a sept montagnes et sept rivières. La plus célèbre des montagnes est le Kucēcayam. Parmi les rivières, la Civai est la plus importante. Les habitants de ce continent sont les Tapatar, les Caṭāvakar, les Mantēkar et les Anēkar. PaṅkayaN (Brahman) est leur dieu (st. 51-52).
138Au delà du Kiravuñcam on trouve le CāNmāli avec une mer de jus de canne à sucre. Son roi, du nom de TutimāNaN eut sept fils, dont KucalaN. Il partagea entre eux son pays où il y a sept montagnes, dont Timiram et sept rivières, dont Kumutam. Les habitants de ce pays sont les Puṭkalātar, les Puṭkarar, les Taniyar et les Cicirar. ῙcaN (CivaN) est leur dieu. (st. 53-54).
139A la suite du CāNmali se trouve le Kōmētakam. Une mer de miel l’entoure. AvviyaN en fut le roi. Il eut sept fils, dont l’aîné portait le nom de VimōkaNaN. AvviyaN divisa son pays en sept parties et en donna une à chacun de ses fils. Le Kōmētakam a sept montagnes, dont le Ciṅkam et sept rivières, dont l’Ayati. Ses habitants sont les Mantakar, les Āmaṅkar, les Mākatar et les MāNacar. Mati (CantiraN.la lune) est leur dieu. (st. 54-55).
140Vient ensuite le Puṭkaram, entouré d’une mer d’eau douce. Son roi fut CavaNaN. Il eut deux fils, Tātaki et MāpitaN, qui reçurent chacun une moitié de ce pays. Comme les autres continents, Puṭkaram possède sept montagnes et sept rivières. Iṭapam est la plus célèbre des montagnes et Rutilai, la plus importante des rivières. Les habitants de ce pays sont les Nakarar et les Nākar. Leur dieu est VeyyavaN (Soleil). (st. 56-57).
141Au delà du Puṭkaram se trouve la grande montagne appelée MāNacōttaram, de forme ronde, ayant une hauteur de cinquante mille yōcaNai. A ses huit côtés sont situées huit cités où résident les gardiens de cette montagne.
142A l’extrémité de chaque mer s’étend une montagne.
143A l’exception de Camputtīvu, les habitants des autres continents sont exempts de cheveux gris, de rides et de vieillesse. La durée de leur vie est de dix mille ans. (st. 58).
144Tout autour du MāNacōttaram il y a ce qu’on appelle TapaNiyappār (terre d’or) et la montagne Nēmiporuppu (Cakkaravāḷakiri) de la couleur du rubis. La terre d’or est habitée par les Iyakkar, les Irākkatar et les Pēy. (st. 59).
145Au delà du Cakkaravāḷakiri s’étend la grand océan extérieur, bordé par la terre sombre, laquelle est limitée par la coque. Sur cette terre sombre on trouve les idiots et les suicidés.
146A proximité de la coque se trouve le mont Kailācam, où réside ῙcaN (CivaN), avec ses kana. L’étendue comprise entre le Camputtīvu et la coque s’appelle Puvi (monde terrestre). (st. 60).
147Au dessus du monde terrestre, à une distance de cent mille yōcaNai, se trouve le monde du Soleil. Avec ce dernier circulent trois cent trente millions de tēvar. Entre la terre et le monde du soleil, se trouvent respectivement l’un au dessus de l’autre les demeures des Kaṇar, des Kuyyakar, des dix vents (tacavāyu), des sept nuages (captamēkam), des Kimpuruṭar, des Karuṭar, des Cittar, des Viñcayar et des TevaKaṅkai. (st. 61).
148Au dessus du monde solaire se trouve à une distance de cent mille yōcaNai le monde de la Lune et au dessus de ce monde et à la même distance on trouve le monde des étoiles, (st. 62).
149Après les étoiles viennent respectivement PutaN Mercure), Pukar (Vénus), Cey (Mars), AracaN (Jupiter), et MantaN (Saturne), distants l’un de l’autre, de deux mille yōcaNai. Au dessus de ces astres sont situés les mondes des sept muNi et le monde de TuruvaN, séparés l’un de l’autre par une distance de cent mille yōcaNai.
150Tout cela, c’est-à-dire depuis le monde du soleil jusqu’au monde de TuruvaN, est connu sous le nom de Puvar Ulakam. (st. 63).
151Au dessus du Puvar Ulakam il y a le Cuvar Ulakam, à une distance de huit millions cinq mille yōcaNai, Il est habité par les tēvar, dont le roi est PurantiraN (IntiraN).
152Après le Cuvar Ulakam, on voit le Makalōkam, à une distance de vingt millions de yōcaNai. Il est habité par des muNi, comme Mārkkaṇṭar. (st. 64).
153Viennent ensuite 1° le Camalōkam, habité par les Pitir et distant de Makalōkam de quatre-vingt millions de yōcaNai ; 2° le Tavalōkam distant du précédent de cent vingt millions de yōcaNai et occupé par les MakāmuNi, tels que Canakar et 3° le Cattiyalōkam, à une distance de cent soixante millions de yōcaNai du Tavalōkam. C’est là que AyaN (Brahman) exerce ses fonctions de créateur par opération d’émanation. Au delà du Cattiyalōkam et à une distance de trente millions de yōcaNai se trouve le Piramapatam (Brahmalōkam). Vient ensuite le Pērulakam (Viṣṇulōkam), demeure de NāraṇaN, à une distance de trente autres millions de yōcaNai. Puis on voit le Civalōkam, situé à une distance de quarante millions de yōcaNai du Pērulakam. En dernier lieu se trouve la coque à une distance de dix millions de yōcaNai du Civalōkam. (st. 65).
154Les vētam et les tantiram décrivent les univers de différentes façons ; mais cette différence n’est ni grande ni importante, car elle se limite à la formation même de ces univers, (st. 66).
155A toi (CūrapatmaN), j’ai parlé maintenant d’un univers seulement. Les mille huit univers que Dieu t’a donnés sont semblables entre eux. Va donc les visiter d’abord et tu exerceras ensuite ton autorité sur eux. (st. 67).
12. Conquête des pays
156CūraN et ArimukaN (CiṅkamukācuraN) quittèrent le guru, après lui avoir fait des révérences et allèrent rejoindre leurs guerriers. Ils racontèrent au commandant d’armée TārakaN tout ce que le maître leur avait dit. Le commandant s’apprêta aussitôt à un siège des pays étrangers. (st. 1-3).
157A ce moment Māyai fit son apparition en l’air. Ses enfants la saluèrent. Elle les bénit et leur dit : « Je suis très contente de ce que vous venez de faire. Si vous éprouvez quelque difficulté dans vos entreprises, pensez à moi. Je viendrai de suite à votre aide. » Cela dit, elle disparut. (st. 4-8).
158CūraN ordonna à ses armées de se diriger vers le nord et d’assiéger la cité du dieu de la richesse (KupēraN). Immédiatement ses quatre corps d’armée se mirent en route. CūraN monta sur le char Intirañālam, qui lui avait été donné par le dieu dont la moitié du corps est féminine (CivaN) et se mit au milieu de ses soldats. (st. 9-19).
159La troupe des tāNavar (acurar) cerna la cité de TaNataN (KupēraN) et l’assiégea. Aḷakai annal (KupēraN) saisi de frayeur se rendit auprès de CūraN, le salua et lui dit qu’il devenait son esclave. CūraN s’étonna de son geste et le renvoya en lui disant de lui être toujours fidèle. Les avuṇar pénétrèrent ensuite dans la ville et s’emparèrent d’une bonne partie du trésor de Nitipati (KupēraN), qui resta coi, tout confus, (st. 20-39).
160CūraN continua son expédition. Il dirigea son armée vers IntiraN. Celui-ci eut peur de son arrivée et alla se cacher dans les cieux. CūraN le sut. Il se rendit alors au monde céleste et l’incendia, (st. 40-41).
161Ensuite le chef des acurar alla à la cité du feu, (Ti, AkkiNi). Celui-ci lui opposa une résistance considérable. Plusieurs guerriers avuṇar furent brûlés, TārakaN, le commandant d’armée, devint furieux. Il prit alors dans ses mains l’arme de TēvaN (flèche de CivaN) pour la lancer contre Eri (AkkiNi). Ce dernier incapable d’anéantir l’effet de cette arme, courut vers TārakaN, les mains jointes et le pria de ne pas s’en servir. Le commandant s’abstint, excusa Aṅki (AkkiNi) et le quitta, après lui avoir enjoint d’exécuter les ordres qu’il pourrait lui donner. (st. 42-56).
162Après la défaite d’Aṅki, les armées des avuṇar se dirigèrent vers la cité de NaṭuvaN, (cité de YamaN, Yamapuri). KūRRuvaN (YamaN) qui était déjà au courant de l’échec de KupēraN et d’AkkiNi, n’hésita pas à se présenter devant l’ennemi et à se déclarer vaincu, (st. 57-64).
163CūraN alla ensuite en guerre contre, successivement, Niruti, VarunaN, Marutu (Vāyu) et le roi des serpents AticēṭaN. Ces derniers incapables d’attaquer les avuṇar qui étaient plus puissants qu’eux, devinrent aussitôt les sujets de CūraN. (st. 65-72).
164L’expédition suivante fut contre MāyōN (Viṣṇu), dans l’océan de lait. Les avuṇar troublèrent cet océan. Tirumāl sortit de son sommeil spirituel. Monté sur le roi des milans (KaruṭaN), il les attaqua. Beaucoup d’entre eux furent tués. TārakaN en devint furieux. Il lança contre KaṇṇaN (Tirumāl) des flèches en grand nombre. Mais son adversaire détruisit son char et tua son conducteur. Le frère cadet de CūraN (TārakaN) prit alors une massue avec laquelle il essaya de frapper Ari (Tirumāl). Celui-ci envoya alors son disque, qui se heurta contre la poitrine de TārakaN et y resta comme un médaillon de collier. (st. 73-94).
165MāyōN s’en étonna. Il se souvint d’un don que CaṅkaraN (CivaN) avait jadis accordé à TārakaN et se rendit compte de la puissance qu’il avait acquise grâce à ce don. Il cessa alors le combat, adressa des félicitations à TārakaN et s’en alla. Le commandant d’armée rapporta cet évènement à son maître qui en fut content, (st. 95-99).
166CūraN alla ensuite au monde céleste. VācavaN (IntiraN) et sa femme, assumèrent la forme de coucous et s’envolèrent. Les avuṇar pénétrèrent dans la ville, mais ils ne trouvèrent plus le roi des célestes (IntiraN). Ils arrêtèrent les amarar (tēvar) qu’ils rencontrèrent et les amenèrent, les bras liés, devant leur roi (CūrapaNmaN). Celui-ci leur demanda où se trouvait leur maître. Ils répondirent qu’il avait disparu et qu’ils ne connaissaient pas son lieu de refuge. Ils le prièrent ensuite de ne leur infliger aucun châtiment et de les considérer comme ses sujets. CūraN les fit mettre alors en liberté, en leur imposant une soumission complète. (st. 100-115).
167Puis, accompagné toujours de ses frères, il se rendit au Makālōkam et aux deux autres mondes de son espèce (Canalōkam et Tavalōkam). Ceux-ci tombèrent sous son autorité sans aucune opposition, (st. 116).
168CūraN alla ensuite au monde d’AyaN (Brahman) et au monde du dieu orné de feuilles de basilic (Vaikuṇṭam, séjour de Viṣṇu). L’un et l’autre firent son éloge et lui adressèrent leurs vœux de bonheur. (st. 117-128).
169Content des gestes de ces deux dieux, il les laissa à leur place et partit pour le monde de ParamaN (Civalōkam). Autorisé par le gardien Nanti, il pénétra dans le palais du dieu à trois yeux et se présenta devant ce dernier qu’il trouva assis avec son épouse Kavuri. Il leur fit ses révérences. Le dieu qui a le venin à la gorge le bénit, CūraN le salua de nouveau et prit congé de lui pour se rendre aux autres mondes lointains. (st. 129-133).
170Il rencontra les Uruttirar qui lui indiquèrent le chemin à suivre pour atteindre ces mondes. Il continua donc ses expéditions. Il vainquit les chefs de ces mondes qu’il plaça sous l’autorité de quelques-uns de ses guerriers et revint ensuite à TuRakkam (Cuvarkkalōkam) (st. 134-136).
13. Visites
171La victoire du fils de Māyai (CūrapaNmaN) et son arrivée à TuRakkam (Cuvarkkalōkam) rassurèrent les tāNavar (acurar) qui craignaient d’être persécutés par les aṇṭar (tēvar). Leur roi, enchanté d’apprendre cette nouvelle, alla voir Pukar (Cukkirācāriyar). Il lui dit qu’il désirait rendre une visite de courtoisie à CūraN et le pria d’en aviser celui-ci. (st. 1-4).
172Le précepteur des avuṇar, monté sur son char aérien, partit de suite pour le TuRakkam (Cuvarkkalōkam). Le roi le suivit, accompagné de ses parents et amis. (st. 5).
173CūrapaNmaN et ses frères reçurent Pukar avec tout le respect qui lui était dû et lui souhaitèrent la bienvenue. Le visiteur leur présenta ses vœux et leur fit part de l’intention du roi des avuṇar, en portant à leur connaissance que ce dernier était le père de leur mère Māyai, qu’il avait mené une longue lutte contre VacavaN (IntiraN) qui l’avait finalement vaincu, que depuis sa défaite il vivait caché, tout affligé et que les expéditions heureuses lui donnaient l’espoir de regagner son honneur et sa puissance, (st. 6-15).
174Sur ces entrefaites le roi des avuṇar arriva au palais de CūraN. Celui-ci l’accueillit affectueusement et s’informa de sa situation. Le visiteur lui adressa ses compliments, lui parla de son angoisse et le pria de mettre fin aux tourments que lui donnaient les tēvar. Il se retira ensuite du palais, pour rentrer chez lui. (st. 16-18).
175Après cette visite, le fils de Māyai (CūraN) retourna au monde terrestre. Le dieu qui est sur le lotus (Brahman) et le roi des amarar (IntiraN) en furent mécontents. Ils allèrent voir MāyōN. Celui-ci leur fit comprendre que CūraN était invincible, grâce au don que lui avait accordé ParāparaN (CivaN) et qu’il était préférable de se rendre chez lui et de gagner sa sympathie, plutôt que de chercher à se débarrasser de lui. (st. 19-22).
176Le dieu qui siège sur le lotus rouge (Brahman), les tēvar et les muNi acquiescèrent. MāyōN accompagné de ces derniers alla auprès de CūraN et lui présenta ses souhaits. Ce dernier, satisfait de la visite de ces dieux, leur exprima sa joie. Puis, constatant la présence des cent dix millions d’Uruttirar à la fois, devant son palais, il s’étonna de leur apparence et demanda au dieu porteur de guirlande de feuilles de basilic, qui étaient ces individus qui ressemblaient à son Maître à trois yeux. Tirumal commença alors à lui raconter l’histoire des Uruttirar. (st. 23-26).
14. Histoire des Uruttirar
177Tirumal raconta à CūraN l’histoire des Uruttirar, ainsi qu’il suit :
178« Seigneur ! A la suite d’un KaRpam, VētaN (Brahman) créa les trois mondes et les êtres. Il en devint fier et se dit que tout dépendait de lui et qu’il était maître de tout. (st. 1).
179Cette fierté entraina une conséquence fâcheuse. Les êtres ne se multiplièrent point. Tout resta dans un état stagnant. Il s’en rendit compte, mais il ne parvint pas à en savoir la cause. Il entra alors en ascèse, implorant Kaṇṇutal (CivaN). Ses austérités durèrent des années et des années. Dieu ne fit pas son apparition, ce qui l’affligea beaucoup. Il se lamenta et pleura. Ses yeux laissèrent couler des larmes d’où sortirent des démons. L’attitude de ces derniers fut tellement effroyable qu’il tomba sans connaissance. (st. 2-5).
180Le Maître (CivaN) lui apparut alors en songe et lui dit : « O mon enfant ! Console-toi. Sache que tu as eu ce malheur parce que tu as agi en Maître Suprême, méconnaissant l’existence d’un être supérieur à toi. Maintenant que tu penses à moi, j’enverrai chez toi mes Uruttirar, qui t’aideront dans tes fonctions de création et tu n’auras point de souci. » (st. 5-6).
181VētaN revint à lui. De son front sortirent onze Uruttirar, qui lui dirent que sur les ordres de NampaN (CivaN) ils étaient prêts à le servir, ViriñcaN (Brahman) leur dit alors de créer des êtres. Ils créèrent immédiatement cent dix millions d’autres Uruttirar qui leur ressemblaient. Cette sorte de création parut étrange à VētaN. Il fit observer aux onze premiers Uruttirar que les êtres devaient être créés en rapport avec les actions bonnes ou mauvaises, faites par eux dans leur vie antérieure, (st. 7-10).
182A ces mots ces Uruttirar dirent à PōtaN (Brahman) qu’il pouvait désormais remplir lui-même sans difficulté ses fonctions de création et qu’ils allaient rentrer chez eux, en laissant vivre avec les amarar (tēvar) les cent dix millions d’Uruttirar qu’ils avaient créés, le plus célèbre d’entre eux s’appelant Pavar. (st, 11-12).
15. Création de villes
183CūrapaNmaN fit venir l’architecte céleste et lui ordonna d’ériger sur terre une ville belle et vaste, afin d’y fixer sa résidence. L’architecte s’adressa alors à PukarōN (Cukkirācāriyar), pour en savoir les limites. Ce dernier lui donna des indications précises. (st. 1-2).
184KaṭavuḷtaccaN (TēvataccaN, l’architecte des tēvar) construisit une ville dans la mer du sud, s’étendant dans tous les sens sur une longueur de quatre-vingt mille yōcaNai. A cet effet, il combla d’abord, avec des montagnes et des collines, la partie de la mer où la ville fut érigée. Il construisit ensuite des murailles épaisses et des tours hautes en or sur tout le pourtour et établit des rues larges et longues avec des palais splendides, des allées, des lieux de promenade, des salons de danse etc. Au centre de la ville s’érigea un palais magnifique servant de demeure au fils de Māya val (CūrapaNmaN). Ce palais fut entouré de superbes maisons pour les ministres, de casernes de soldats, de salles de munitions, etc… (st. 3-21).
185Cette ville nouvelle, entourée d’eau de mer de tous côtés, présentait un aspect ravissant. L’architecte céleste lui donna le nom de Vīramakēntiram. (st. 22).
186A quelque distance de Makēntiramāpuram (Vīramakēntiram) et aux huit points cardinaux, il créa huit autres villes, non moins ravissantes auxquelles il donna les noms de Ēmapuram, Imayapuram, Ilaṅkaipuram, Nīlapuram, Cōmapuram ou Cuvētapuram, Avuṇarpuram, Vāmapurām, et Patumapuram. (st. 23).
187Il créa ensuite une autre ville au milieu de la mer du nord, pour CiyamukaN (CiṅkamukacuraN). Il la nomma Ācuram. (st. 24).
188Puis il construisit plusieurs petite villes dans les différentes mers environnantes et dans les îles avoisinante, pour les soldats de CūrapaNmaN. (st. 25).
189Une autre ville du nom de Māyāpuram fut érigée pour TārakaN, au sud du mont Mēru, à proximité du mont PoRkūṭam (Ēmakūṭam). (st. 26-27).
190Chacun des trois frères prit possession de la ville qui lui était attribuée et y demeura avec ses armées. (st. 28).
16. Couronnement
191NāNmukaN (Brahman) et les célestes voulurent couronner CūrapaNmaN. Ils commencèrent immédiatement à faire les préparatifs. Les tēvar allèrent chercher de l’eau de mer pour un bain purificateur (st. 1-3).
192CūrapaNtnaN se baigna dans cette eau, s’habilla de riches vêtements et porta sur lui de belles parures. Suivi de ses frères, il alla à la Cour et monta sur le trône, où il s’assit majestueusement. NaNmukaN (Brahman) qui tenait dans ses mains la couronne, la posa sur sa tête. Les amarar et les muNi jetèrent des fleurs à ses pieds et les tāNavar (acurar), qui se trouvaient rassemblés dans la cour, se prosternèrent devant lui. (st. 4-8).
193Les frères de CūrapaNmaN donnèrent alors des ordres aux tēvar. Selon ces ordres MakavāN (IntiraN) porta dans ses mains le crachoir. Le dieu de la richesse (KupēraN) prit le sac à bétel. CamīraṇaN (Vāyu) tint l’éventail. Le Soleil et la Lune portèrent des parasols. VarunaN agita un chasse-mouche. Le roi des nirutar (AcurēntiraN) armé de son épée, maintint l’ordre, (st. 9-10).
194KūRRu et ALaRkatavul (YamaN et AkkiNi) chantèrent les louanges de Cūra N. Le maître des tēvar et celui des acurar aspergèrent le couronné d’eau de la Kaṅkai qu’ils apportèrent à cette intention. Les filles célestes telles que Arampai, MēNakai etc., chantèrent et dansèrent. (st. 11-13).
195Ainsi furent accomplies les cérémonies du couronnement de CūrapaNmaN. (st. 14.)
17. Règne de CūraN
196CūraN, assis sur son trône, s’adressa aux principaux tēvar qui se trouvaient groupés dans sa cour, pour les charger chacun d’une fonction particulière.
197Il leur dit : « Tirumāl ! Tu es le grand-père de mon père. Donc, tu répondras à tous mes appels. (st. 1).
198Toi ! TicaimukaN ! Tu viendras tous les jours à mon palais avec tes fils pour consulter les cinq aṅkam (Pañcāṅkam, almanach indien.) (st. 2).
199O ArukaN ! (Soleil). La muraille qui entoure ma cité est tellement haute que tu ne peux passer au dessus. Donc pour faire ton trajet, tu entreras tous les jours par la porte de l’Est et tu sortiras par celle de l’Ouest. (st. 3).
200Toi aussi Mati (Lune) ! Tu feras comme le Soleil. Je te donne le don de conserver ta plénitude, sans décroître ni croître ensuite, (st. 4).
201A toi, ALal (AkkiNi), je donne l’ordre de te mettre au service de tous mes sujets. Si ces derniers te touchent, tu leur seras froid, sans être chaud. (st. 5).
202KūRRu (YamaN) ! Ton rôle est nul dans les mondes qui sont sous mon autorité. Tu iras donc aux autres endroits pour faire ce que tu voudras (st. 6).
203Toi ! Ulavai (Vayu) ! Tu enlèveras les choses au rebut que tu trouveras dans les rues. (st. 7).
204Varuṇa ! Tu aspergeras les endroits publics, d’eau parfumée, (st. 8).
205Enfin, toi Vācava (IntiraN) ! Tu te présenteras tous les jours devant moi, avec les muNi et les gardiens des points cardinaux, pour recevoir les ordres que j’aurai à te donner. » (st. 9).
206Les tēvar, sans pouvoir contrarier la volonté de CūrapaNmaN, répondirent qu’ils acceptaient ses ordres de plein gré et qu’ils les exécuteraient strictement. (st. 10).
207CūrapaNmaN conçut l’idée de se marier. Il voulut également marier ses frères.
208La fille de l’architecte des célestes (TevataccaN), nommée Patumakōmalai, était jolie et vertueuse. Le père consentit à marier sa fille à CūraN. Celui-ci l’épousa. Le mariage fut célébré par Pukar (CukkiraN). (st. 11).
209CūrapaNmaN entra ensuite en relation avec plusieurs filles des tēvar, des kantarvar, des cittar, etc., qu’il entretint dans son palais. (st. 12).
210ArimukaN (CiṅkamukācuraN) se maria avec Viputai, fille d’AntakaN (YamaN) et KarimukaN (TārakācuraN) épousa Cavuri, fille de Niruti. (st. 13).
211Après le mariage, CūraN mit à la disposition de ses frères des armées, au nombre de vingt millions de veḷḷam et les envoya chacun à la ville qu’il lui avait destinée. Il envoya également vingt autres millions de veḷḷam aux différentes villes qu’il fit créer dans les îles et dans les mers. Il chargea les autres acurar, au nombre de soixante millions de veḷḷam, d’aller résider aux autres endroits des trois mondes, (st. 14-16).
212CūrapaNmaN garda dans sa grande cité une armée composée de cent mille veḷḷam d’unités et plaça dans les huit villes érigées aux huit côtés de sa cité, huit avuṇar principaux aux visages respectifs d’éléphant, de cheval, de yāḷi*, d’ours, de tigre, de porc, de lion et de bouc, comme gardiens de ces côtés. Il plaça également bon nombre de soldats aux quatre grandes portes de la ville de Makēntiram donnant sur les quatre points cardinaux. (st. 17-20).
213De cette façon il exerça son autorité sur tout l’univers en prenant pour ministres les nommés TurkkuṇaN, TarumakōpaN, TuNmukaN, CaṅkapālaN, VakkirapāLaN et MakiṭaN. (st. 21).
18. Soumission des tēvar
214Un jour CūraN fit venir à sa cour le chef des célestes (IntiraN) et les amarar et leur donna l’ordre de pêcher des poissons dans la mer et de les lui apporter. Les tēvar hésitèrent devant cet ordre qui leur inspirait de la répugnance. Mais de crainte de représailles, ils s’engagèrent à se livrer à cette tâche méprisable. (st. 1-4).
215Ils se rendirent au bord de la mer, tout en regrettant leur sort. Ils firent appel à VaruṇaN et lui dirent d’apporter sur la rive des poissons grands et petits, qui vivaient dans la mer. VaruṇaN plongea dans l’eau et amena sur le rivage une quantité considérable de poissons, (st. 5-7).
216Les tēvar en firent des paquets, en les attachant avec des serpents de mer qui leur servaient de cordes. IntiraN plaça ces paquets sur la tête des célestes, qui, vexés de les transporter, s’affligèrent et se lamentèrent. Cependant obligés d’obéir aux ordres de CūrapaNmaN, ils marchèrent vers sa ville, leur fardeau sur la tête. (st. 8-16).
217Les avuṇar, qui les rencontraient sur le chemin, se moquaient d’eux, en demandant s’ils n’avaient pas honte de se livrer à un acte contraire à leurs mœurs. (st. 17-23).
218CūraN en voyant devant son palais le tas des poissons apportés par les imayavar (tēvar) leur manifesta sa joie et dit : « Je suis satisfait de votre travail. Comme aujourd’hui, vous irez tous les matins à la mer et vous pêcherez pour moi des poissons. » (st. 24).
219Ces paroles attisèrent davantage l’affliction des tēvar. Cependant la pêche devint en quelque sorte leur principale obligation. Elle entraîna pour eux l’inobservance et même l’abandon total des règles relatives à la conduite normale de leur classe. (st. 25).
19. Procréation
220Le roi des avuṇar (CūrapaNmaN) eut, de sa femme Patumakōmaḷai, un fils charmant. A l’occasion de sa naissance il distribua de l’argent et des objets de valeur, à titre de présents, à tous ses parents, amis et connaissances. (st. 1-2).
221La cérémonie de mise au berceau de l’enfant fut célébrée avec pompe. Les femmes des avuṇar et les filles célestes, convoquées à cette fin, bénirent le bébé et le placèrent dans un berceau magnifique. (st. 3).
222Un jour que l’enfant dormait dans son berceau, un rayon du soleil, pénétrant par l’interstice d’une fenêtre, tomba sur lui. L’enfant se réveilla aussitôt. Il devint furieux et se fâcha contre le soleil. Il sortit donc du berceau, s’éleva d’un saut en l’air, saisit par les bras le dieu du jour qu’il emmena en un instant à sa couchette, au pied de laquelle il l’attacha. Après quoi, il alla se bercer, (st. 4-6).
223Le mouvement du soleil s’étant arrêté, les célestes s’en étonnèrent et craignirent les conséquences désastreuses qui pouvaient en résulter. NāNmukaN, IntiraN et les autres dieux se rendirent auprès du roi des Nirutar (CūrapaNmaN) et se plaignirent de ce que le soleil avait été séquestré par son enfant, (st. 7).
224En apprenant cette nouvelle le roi cruel (CūrapaNmaN) se réjouit de la bravoure et de la vaillance de son fils. Il leur conseilla de s’adresser directement à l’enfant lui-même pour avoir la liberté de l’astre du jour et d’amener ensuite ce dernier devant lui. (st. 8-10).
225NāNmukaN alla à l’endroit du berceau, adressa des paroles de bénédiction à l’enfant qui s’y trouvait couché et sollicita de lui la délivrance du soleil. L’enfant lui répondit qu’il lui donnerait satisfaction à condition qu’il lui reinette son arme. NāNmukaN accepta la proposition. Il remit son arme puissante Mōkavempaṭai (Mōkāstiram) au bébé qui mit aussitôt en liberté le soleil séquestré, (st. 10-13).
226PankayaN (Brahman) accompagné de ce dernier revint chez CūrapaNmaN. Tous les deux le saluèrent, prirent congé de lui et retournèrent chez eux.
227Le même jour CūraN donna à son fils le nom de PāNukōpaN.* Et depuis ce moment, il l’éleva avec beaucoup d’affection et de soin. (st. 14).
228PāNukōpaN grandit. Un jour il partit en guerre contre l’époux de Tiru (Tirumāl) qu’il vainquit. De ce fait il gagna une bonne réputation dans les trois mondes. (st. 15).
229Après la naissance de PāNukōpaN, Patumakōmaḷai donna successivement le jour à trois enfants qui furent appelés AṅkimāmukaN (AkkiNiMukaN) IraṇiyaN et Vacciravāku. (st. 16).
230De ses autres femmes, CūraN eut trois mille enfants qu’il éleva d’un amour égal, en les gardant tous dans sa cité. (st. 17).
231CiṇkamukaN eut de sa femme légitime (Viputai) un garçon du nom d’AticūraN. De ses autres femmes, il eut cent fils robustes et forts. (st. 18).
232Cavuri, femme de TārakaN, donna naissance à un fils qui fut appelé AcurēntiraN. Celui-ci était d’une beauté ravissante. Il possédait en outre de belles qualités et connaissait bien toutes les sciences (st. 19-23).
20. VilvalaN et Vātāvi
233Acamuki, sœur de CūrapaNmaN, n’était pas mariée. Elle errait partout et troublait les sacrifices des muNi. Elle tuait les gens qui parlaient mal de ses parents et les mangeait. S’adonnant aux plaisirs de l’amour, elle forçait les hommes qu’elle rencontrait et qu’elle trouvait beaux à avoir des relations charnelles avec elle. Elle enlevait quelquefois les femmes des célestes pour en faire les maîtresses de ses frères. Vicieuse et corrompue, elle n’avait aucun sentiment de compassion ni de pitié. Elle était, en un mot, l’incarnation du péché, (st. 1-3).
234Un jour elle eut à passer près de l’ermitage de TuruvācaN. Elle s’approcha du sage, qui était alors en pénitence. L’instinct sexuel se réveilla subitement en elle. Elle eut envie de s’unir au muNi. Elle essaya de troubler son austérité. Elle lui fit part de son intention. Le sage s’y refusa. Mais Acamuki le saisit avec violence et le força à l’embrasser. De cette union elle donna naissance à deux garçons qui furent nommés respectivement VilvalaN et Vātāvi. (st. 4-10).
235Les deux enfants, selon les conseils de la mère, saluèrent TuruvācaN qui leur demanda ce qu’ils souhaitaient. « Que tout le bénéfice de vos austérités nous soit acquis, » répondirent les garçons. Le sage s’en étonna et leur dit qu’il leur accorderait tout autre don, sauf celui-là. VilvalaN et Vātāvi devinrent mécontents et essayèrent de tuer leur père. Celui-ci lança contre eux une imprécation. Il leur dit : « Vous deviendrez ennemis des sages et vous leur ferez toujours du mal. Il arrivera un jour où vous aurez affaire à KuRumuNi qui vous tuera. » Cela dit, il disparut subitement de cet endroit, en usant de son pouvoir magique. (st. 11-14).
236VilvalaN et Vātāvi se séparèrent de leur mère. Ils entrèrent dans une forêt où, implorant TicaimukaN (Brahman), ils firent une pénitence en se tenant debout au milieu d’un feu qu’ils y allumèrent. Malgré la longue durée de leur pénitence, AyaN n’apparut pas. VilvalaN tua d’un coup d’épée son frère, récita le mantiram du créateur du monde (Brahmamantra) et fit un sacrifice en son honneur, en se servant du sang et de la chair de son frère, en guise de beurre et d’offrande. (st. 15-17).
237CaturmukaN (Brahman) fit alors son apparition et demanda au pénitent ce qu’il désirait avoir. « Je demande que mon frère soit ressuscité », dit VilvalaN. « Qu’il en soit ainsi », répondit AyaN. Aussitôt Vātāvi revint à la vie. (st. 18-19).
238VilvalaN demanda ensuite au dieu qui a pour siège le lotus (Brahman) un autre don. « Seigneur, lui dit-il, si mon frère Vātāvi qui a un visage de bouc, trouve la mort sous les coups d’épée, je voudrais qu’il ressuscite dès que je lui dirai : O mon frère, reprends vie et lève-toi ». VētaN (Brahman) lui accorda également ce don et regagna ensuite sa demeure, (st. 20-22).
239VilvalaN et Vātāvi se rendirent alors chez leur oncle CūraN. Ils lui racontèrent leur histoire et lui firent part des dons qu’ils avaient reçus de VētaN. CūraN embrassa de joie ses neveux et les retint chez lui pendant plusieurs jours, (st. 23-24).
240Après ce séjour chez leur oncle, les deux frères allèrent au monde terrestre. Ils descendirent dans le pays Kuṭaku et entrèrent dans une forêt épaisse. Au carrefour des quatre chemins de cette forêt, ils installèrent leur demeure. Ils y firent venir toutes les provisions nécessaires et menèrent leur vie, l’aîné, en se déguisant comme un anachorète et le cadet, en assumant la forme d’un bouc. (st. 25-26).
241VilvalaN sortait tous les jours de son logement et se promenait dans la forêt. Lorsqu’il rencontrait un muNi, il le saluait, lui adressait des paroles mielleuses et l’emmenait chez lui pour lui offrir un repas. Il tuait son frère, le bouc, et préparait avec sa viande des plats qu’il présentait au muNi. Dès que ce dernier avait fini de manger il criait : « Vātāvi ! reprends vie et viens devant moi. » Aussitôt Vātāvi déchirait le ventre du muNi qu’il mettait à mort et en sortait en reprenant sa forme normale de bouc. Les deux frères mangeaient ensuite la chair de leur convive. (st. 27-30).
242De cette façon ils vécurent pendant longtemps dans cette forêt, (st. 31).
21. La vie cachée d’IntiraN
243Le fils de Māyai (CūrapaNmaN) exerçait son autorité sur les mille huit mondes. A cet effet, il quittait tous les matins sa cité principale et se rendait dans son char aérien Intirañālam à l’un quelconque de ces mondes, où il passait la journée. Le soir il regagnait sa résidence habituelle, (st. 1-4).
244Un jour il conçut l’idée d’enlever la femme d’IntiraN pour en faire sa maîtresse. A l’un de ses commandants d’armée, il donna l’ordre d’aller chercher VācavaN et il chargea les quatre-vingt-dix millions de femmes qui gardaient son palais, d’amener l’épouse du roi des amarar (Intirāṇi). Les émissaires se rendirent aussitôt au pays d’or (Amarāvati). (st. 5-9).
245Les espions d’IntiraN, qui parvinrent à savoir l’arrivée des avuṇar dans leur pays et leur intention, en firent part immédiatement à leur chef. Celui-ci qui connaissait déjà leur force, quitta sa ville sur le champ et partit avec sa femme pour le monde terrestre, en usant de son pouvoir magique, (st. 10-11).
246Les avuṇar des deux sexes ne pouvant trouver ni le dieu des sacrifices (IntiraN) ni son épouse, désespérèrent. Ils saisirent les tēvar qu’ils rencontrèrent et exercèrent des violences sur eux, en leur demandant de leur indiquer le refuge de leur roi et de leur reine. Ils ne purent obtenir aucun renseignement utile. Ils retournèrent alors à Makēntiramānakar et rendirent compte à leur chef qu’IntiraN et sa femme avaient disparu de leur royaume. Le roi des avuṇar (CūrapaNmaN) devint furieux. Il fit appeler ses espions et leur donna l’ordre d’aller immédiatement à la recherche des époux disparus, (st. 12-20).
247En l’absence du roi qui a pour monture le nuage (IntiraN) et de son épouse, le monde d’or prit un aspect morne. Il n’y eut point de bonheur ni de prospérité. Tout paraissait mélancolique, (st. 21-22).
248CayantaN, fils d’IntiraN, était allé chez son oncle paternel UpēntiraN, qui n’était autre que Tirumāl. Pendant qu’il se trouvait à Vaikuṇṭam, il apprit la fuite de ses parents et la misère des célestes. Il revint de suite à son royaume. Constatant la situation désolée de ses habitants, il commença lui-même à se lamenter. (st. 23-27).
249A ce moment le sage NārataN se présenta devant lui, le consola et lui dit que son père chercherait sans doute la mort de CūraN, comme il avait été jadis la cause de la ruine de TantimukaN (KayamukaN) qui avait torturé les célestes. Il lui conseilla en outre de patienter et de se soumettre aux ordres de CūraN, en attendant le jour de la délivrance. (st. 28-37).
250PurantaraN (IntiraN), venu sur terre avec son épouse, s’installa dans la ville de KāLi (CikāLi), où il créa un jardin de fleurs. Se servant des diverses fleurs provenant de ce jardin, il adorait tous les jours, en compagnie de sa femme, le dieu CivaN de cette localité, (st. 38-43).
251Un jour il apprit que des espions, envoyés par le roi des avuṇar (CūrapaNmaN), étaient à sa recherche. Immédiatement, lui et sa femme, prirent la forme de bambous et se fixèrent en bordure du jardin de fleurs. Les espions qui passèrent par ce jardin continuèrent leur chemin, sans pouvoir les reconnaître. (st. 44-45).
252Leurs recherches étant devenues inutiles, ils firent défense aux nuages de laisser choir leurs gouttes d’eau sur la terre. De ce fait il y eut une sécheresse terrible. Les plantes à fleurs d IntiraN commencèrent à périr. Celui-ci s’en affligea beaucoup et vénéra très pieusement ParaN (CivaN). Une voix céleste se fit alors entendre. Elle disait : « MakavāN (IntiraN) ! Ne crains rien. Ton jardin ne sera pas détruit. Un cours d’eau viendra bientôt l’arroser. » (st. 46-47).
253Rassuré par ces mots, IntiraN attendit l’arrivée de la rivière, en plaçant toute sa confiance en Dieu. (st. 48).
22. Le mont Vintakiri
254Le sage NārataN alla voir un jour le mont Vintakiri. Celui-ci, ravi de sa visite, le reçut avec respect, lui adressa des paroles de bienvenue et lui demanda ce qu’il devait faire pour lui. (st. 1-2).
255NārataN lui répondit qu’il n’attendait rien de lui, mais qu’il était venu uniquement le mettre au courant de l’attitude arrogante et insolente qu’avait prise depuis quelque temps le mont Mēru. (st. 3).
256Il ajouta que le Mēru prétendait être le roi de tous les monts, avec ses mille pics de hauteur considérable, posséder près de lui le mont Kayilai, avoir servi d’arc à CivaN et avoir même élevé son épouse, (st. 4-8).
257En entendant ces mots Vintakiri éprouva de l’aversion contre le Mēru. Il se moqua de lui et fit observer à son interlocuteur qu’Umai, n’était pas née fille du Mēru mais qu’elle était venue demeurer chez lui, grâce à la pénitence d’ImavāN (roi des Himālaya), que le mont Kayilai n’avait pas cherché à se placer près du Mēru, mais au contraire c’était ce dernier qui avait voulu se trouver auprès de lui, que son orgueil d’avoir été l’arc de Kaṇṇutal (CivaN) ne s’expliquait pas, étant donné que, sans courage ni fermeté, il s’était courbé, comme une femme pour assumer la forme d’un arc et qu’il avait oublié qu’il n’avait été qu’un simple caillou aux pieds de Vīrapattirar, lorsque ce dernier avait pris la forme gigantesque de l’oiseau Carapam* devant Kēcari (Naraciṅkam).* (st. 9-22).
258Vintakiri continua : « O Sage ! Je suis plus grand et plus fort que cette montagne du nord (Mēru). Je vais de suite lui faire voir ma puissance et la confondre. » (st. 23).
259Cela dit, le Vintam se grandit au point de toucher le monde du dieu qui vit sur le lotus (Cattiyalōkam) et s’élargit jusqu’aux PaNivarai (monts Himalaya) (st. 24-25).
260Les astres qui se virent barrer le passage, s’en étonnèrent et craignirent les conséquences fâcheuses de cette situation. Ils pensèrent qu’en faisant venir sur place le sage qui avait absorbé les eaux (AkattiyaN), ils pourraient faire apaiser la haine du Vintam contre le Mēru et lui faire reprendre sa forme primitive. (st. 26-29).
23. AkattiyaN
261Le soleil et les autres astres pensèrent à VaṇṭamiLmāmuNi (AkattiyaN) et lui adressèrent mentalement des prières. « O muNi, dirent-ils, notre cours est arrêté par le Vintam qui, devenu rival du Mēru, s’est élevé très haut. Toute la terre en souffre. Daigne venir ici et écarter ce malheur.’) (st. 1-9).
262Le muNi qui était alors en pénitence sur le mont Mēru le sut. Il pria le dieu aux cheveux tressés (CivaN). Celui-ci apparut devant lui, monté sur son taureau. Le sage sollicita de lui le don d’avoir la puissance nécessaire pour vaincre le mont Vintam. CivaN lui accorda ce don et lui dit d’aller s’installer sur le mont Potiyai, après avoir réprimé l’orgueil du Vintam. (st. 9-16).
263Le sage lui demanda ensuite de créer une eau sacrée dans le Sud pour son bain, en vue de ses oblations. Le dieu dont la chevelure est ornée de la lune fit appel à PoNNi (Kāviri), un des sept fleuves du mont Kayilāyam et lui ordonna de se rendre avec le sage dans la contrée méridionale. (st. 17-20).
264Kāviri lui fit remarquer qu’étant femme elle n’osait pas suivre un homme, bien qu’il fût un sage ayant dompté ses sens. Le dieu à la gorge noire (CivaN) lui dit qu’AkattiyaN était le premier de ses dévots et qu’elle n’avait rien à craindre. Kāviri lui demanda alors combien de temps elle devait rester avec lui. Le Maître lui répondit qu’elle le quitterait le jour où il lui dirait de partir. (st. 21-25).
265Le mamuNi (AkattiyaN), qui était le mari d’Ulōpāmuttirai et qui avait un fils très intelligent (PulattiyaN), prit Kāviri dans sa calebasse et se mit en route dans la direction du Sud. (st. 26-28).
24. KiravuñçaN
266Lorsque KuRumuNi, quittant le mont Mēru, se rendit vers le Sud, il eut à passer par la ville de Māyamūtūr (Māyapuri). Dans cette ville vivait un avuṇaN portant le nom de l’oiseau aNRil (KiravuñçaN). Il était fort en magie. Il avait le pouvoir de transformer la terre en océan et l’océan en terre. Par son pouvoir magique un atome devenait une montagne et une montagne un atome, le soleil se transformait en lune et la lune prenait l’aspect du soleil. (st. 1-4).
267Cet avuṇaN magicien, nommé KiravuñçaN, aperçut TamiL muNivaN (AkattiyaN). Il prit aussitôt la forme d’une montagne, présentant en son milieu une sorte de passage dont l’entrée donnait vers le côté d’où venait le muNi. Celui-ci s’étonna de la présence subite de cette montagne devant lui et, se décidant à y pénétrer, suivit le chemin qu’il y voyait. A peine eut-il parcouru quelque distance que le chemin disparut. Un autre s’ouvrit dans une autre direction. Le sage s’y engagea, mais ce chemin disparut également en très peu de temps. Il vit alors un nouveau chemin devant lui. Il le suivit. Soudain il aperçut une grande flamme à ses côtés. Celle-ci s’étant éteinte après quelques instants, un orage éclata et tout l’endroit fut couvert de ténèbres. (st. 5-8).
268Le nain (AkattiyaN) médita sur cet évènement. Il parvint à savoir par sa vision spirituelle que tout cela était dû à l’avuṇaN (KiravuñçaN). Furieux, il piqua du bâton qu’il avait à la main le rocher qui obstruait son passage et le crevassa ainsi en maints endroits. Puis il maudit le malveillant, disant qu’il s’immobiliserait à cet endroit en une montagne, qu’en compagnie des autres avuṇar il ferait du mal aux dieux qui y viendraient et qu’enfin, ce faisant, il serait tué par Cevvēḷ (MurukaN) (st. 9-12).
269Cela dit, il prit un peu d’eau de sa calebasse dans sa main et la jeta sur le rocher tout en récitant un mantiram, ce qui fit perdre à KiravuñçaN tout son pouvoir magique. L’avuṇaN prit la forme d’une montagne et TamiLmuNivaN continua son chemin vers le Sud (st. 13).
25. Vintam enfumé dans l’abîme
270TamiL muNivaN (AkattiyaN) arriva à Kāci (Banaras). Il fit ses dévotions à AkilanātaN (VicuvanātaN) et poursuivit son voyage. Il rencontra le mont Vintam qui emplissait tout l’espace. Le sage lui demanda de lui laisser le passage. Vintam lui dit de rebrousser chemin, en lui faisant remarquer qu’il était puissant, que le soleil et la lune, le craignant, n’avaient pas osé le franchir et qu’il ne pouvait pas tolérer l’audace d’un nain, comme lui. (st. 1-5).
271Le muNi éclata de rire. Il pensa à NātaN (CivaN) et leva son bras qui s’allongea jusqu’au monde de MalarayaN (Brahman). Il mit la main sur le sommet du Vintam et le pressa. La montagne s’enfonça dans l’abîme et alla jusqu’à l’endroit où se trouvait CēṭaN (ĀticēṭaN). De là il s’écria : « O muNi ! J’ai eu tort de te mépriser. J’ai donc perdu maintenant tout mon prestige. Pardonne-moi et dis-moi quand je dois reprendre ma place. » Le sage lui répondit qu’il sortirait de l’abîme, lorsqu’au retour de son voyage, il passerait par ce même endroit, (st. 6-9).
272Celui qui a dompté ses sens (AkattiyaN) raccourcit son bras. Les Curar (tēvar) jetèrent sur lui des fleurs. Le soleil et la lune le remercièrent du service qu’il leur avait rendu en leur libérant le passage. (st. 11-12).
273Le muNi quitta le Vintam et arriva au pays Kuṭaku, où VilvalaN et Vātāvi l’aperçurent, (st. 13).
26. Mort de VilvalaN et de Vātāvi
274A la vue d’AkattiyaN, VilvalaN et Vātāvi décidèrent de le tuer. Le frère cadet, sous sa forme de bouc, alla brouter de l’herbe au pied d’une colline voisine, tandis que l’aîné, sous l’apparence d’un grand sage, se dirigea vers le muNi, le salua trois fois et l’invita à le suivre à son ermitage. (st. 1-5).
275Sans connaître l’intention de VilvalaN, le sage acquiesça. Le faux sage lui fit encore des révérences et le pria d’accepter un repas chez lui. Il ajouta qu’il se contenterait de ce qui resterait du repas, (st. 6-9).
276AkattiyaN consentit. VilvalaN alla se baigner dans un étang, rentra dans sa cuisine, la purifia en y étendant une couche de bouse de vache délayée dans de l’eau et alluma le four. Il prépara du riz. Puis il alla chercher son frère, le bouc. Il l’amena de force et, en présence du muNi, le tua avec une serpette. Il le dépeça, mit la viande dans des vases propres et la lava trois fois avec de l’eau pure. Il en prépara ensuite des mets délicats avec des ingrédients et des aromates divers. Ensuite il alla chercher des fruits délicieux. Ayant ainsi apprêté le repas, il se rendit auprès de KaṭamuNi et le pria de venir déjeuner, (st. 10-23).
277Le sage mangea le riz, les plats de viande et les autres ragoûts offerts par l’acuraN (VilvalaN) et alla se reposer dans un coin de l’ermitage. VilvalaN fit appel à son frère Vātāvi. Celui-ci cria du ventre du muNi : « O mon frère ! Ce sage m’a avalé, comme il avait autrefois absorbé toute l’eau de la mer. Je vais donc déchirer son ventre et sortir sain et sauf, en le mettant à mort. » (st. 24-30).
278En entendant ces mots, KumpamuNi comprit la trahison des avuṇar. En caressant son ventre de sa main droite, il lança une imprécation contre Vātāvi, en disant qu’il périrait, en étant digéré comme tout autre aliment, dans son estomac. Cette malédiction produisit immédiatement son effet. (st. 31).
279VilvalaN devint furieux. Il reprit son ancienne forme, et, armé d’une massue, s’élança sur le muNi pour le tuer. Celui-ci prit alors un morceau de taruppai (darbha) qu’il considérait comme le Maikkaṇṭarpaṭai (Śivāstra ou Pāśupatāstra) et le lança sur VilvalaN, qui s’écroula. Après sa mort, le sage continua son chemin. (st. 32).
27. Séparation de Kāviri
280Pendant que le muNi nain (AkattiyaN) marchait vers le pays Koṅku, les fantômes de VilvalaN et de Vātāvi le poursuivirent et commencèrent à le harceler. Le muNi réfléchit et comprit que les deux acurar tués par lui étaient les fils d’un grand pénitent brahmane (Turuvācar) et qu’ils le poursuivaient en Piramakatti (péché du meurtre de brahmane). Pour se délivrer de ce péché, il s’installa en un endroit convenable, à quelque distance du Koṅkunāṭu, érigea un çivaliṅkam et l’adora pendant longtemps. Le péché du meurtre s’écarta de lui. (st. 1-9).
281Le sage NārataN parvint à savoir tout ce qui était advenu à TamiL muNi. Il alla voir le roi des célestes (IntiraN) qui faisait pénitence sous la forme d’un bambou, dans la ville de CīkāLi, où il s’était réfugié. Il s’informa de son état. VacavaN (IntiraN) lui dit qu’en vue d’adorer NātaN (CivaN) avec des fleurs, il avait créé un jardin de fleurs, que faute d’eau les plantes périssaient et que la pénurie de fleurs le chagrinait beaucoup, (st. 10-14).
282NārataN le consola et lui conseilla de faire venir à CīkāLi la rivière PoNNi (Kāviri), qui se trouvait dans le kamaṇṭalam de KumpamuNi. Il ajouta que ce dernier était en pénitence près du Koṅkunaṭu, afin d’expier le péché du meurtre de VilvalaN et de Vātāvi. Il lui dit encore que s’il adorait le dieu au visage d’éléphant, ce dieu renverserait le kamaṇṭalam et ferait venir ainsi la rivière à CīkāLi. PurantaraN remercia le sage (NārataN), qui le quitta pour se rendre au monde des Curar (tēvar). (st. 15-23).
283Le pénitent installa une idole du fils aîné de celui qui porte dans sa chevelure le croissant de lune, le serpent et la Kaṅkai et l’adora en lui faisant diverses sortes d’offrandes. Le dieu au visage d’éléphant apparut devant lui, accompagné de ses kana. MakavaN (IntiraN) se prosterna à ses pieds, lui exposa ses doléances et le pria de faire venir à son lieu de pénitence la PoNNi (Kāviri) enfermée dans la calebasse d’AkattiyaN. (st. 23-33).
284Le dieu assuma la forme d’un corbeau et alla se poser sur la calebasse du muNi. Celui-ci leva les bras pour le chasser. L’oiseau renversa la calebasse et ordonna à l’eau de couler sur le sol, ce qu’elle fit aussitôt. (st, 35-37).
285Le corbeau se métamorphosa ensuite en un garçon parpaNaN (brahmane) et s’en alla. AkattiyaN devint furieux. Il le poursuivit, la main fermée, pour lui donner une taloche sur la tête, mais il ne put l’atteindre. Le fils d’Umai ne voulant pas laisser le poursuivant se fatiguer davantage, apparut devant lui sous sa forme normale. (st. 38-43).
286AkattiyaN devint stupéfait. Il s’attrista ensuite de son geste. De ses mains fermées, il se donna des coups sur les tempes pour se punir. Le dieu lui demanda la raison de son acte. Le savant tamoul répondit qu’il l’avait pris pour un simple enfant antaṇaN (brahmane) audacieux, qu’il l’avait poursuivi pour le frapper à la tête avec sa main et que cette tentative, bien que faite par ignorance à son égard méritant châtiment, il se frappait lui-même. Il le pria ensuite de lui pardonner. (st. 44-47).
287Le dieu au visage d’éléphant, le sourire aux lèvres, lui parla du vœu de PurantaraN (Intira N) et de ce qu’il avait fait lui-même pour l’exaucer. Il lui demanda ensuite ce qu’il souhaitait. (st. 48-50).
288« Mon Maître, dit le muNi, daigne accorder ta grâce à tous ceux qui, devant ton sanctuaire, se donneront des coups comme je l’ai fait tantôt et veuille me procurer une eau sacrée à la place de celle que j’ai perdue. » (st. 51-57).
289Celui qui auparavant assuma la forme d’un corbeau s’approcha de l’eau qui coulait. Il en prit une petite quantité dans sa main et la mit dans la calebasse du muNi. Cette eau s’accrut de façon à déborder la calebasse et à couler sur le sol. Le muNi le remercia et sollicita de lui un autre don, celui de venir à son aide toutes les fois qu’il penserait à lui. Le fils du Maître Suprême lui accorda ce don et disparut, (st. 58-65).
290Le muNi tout en chantant ses louanges, traversa le pays Koṅku et se dirigea encore vers le Sud. (st. 66).
28. TirukkuRRālam
291Pendant son voyage KuRumuNi eut à passer par le lieu sacré de KuRRālam, où se trouvait un temple d’AccutaN, nommé TirumuRRām. Bon nombre d’antaṇar habitaient KuRRālam. Bien qu’ils fussent instruits, ils avaient une aversion à l’égard des dévots du Maître (CivaN). (st. 1-3).
292KuRumuNi passa devant le temple de TirumuRRam. Les vaiṇavar (viṣnouites) l’aperçurent. Furieux de le voir frotté de cendre, ils lui défendirent de traverser la ville et l’engagèrent à rebrousser chemin. (st. 4-5).
293Le MuNi obéit. Il se dit à lui-même que les imprécations lancées autrefois contre les visnouites par Nanti, NāNmukaN, TiruvācaN, Piruku, KavutamaN, KaṇṇuvaN, Tatīci et autres étaient bien justes et raisonnables. Voulant leur donner une leçon, il se déguisa en un PākavataN (dévot viṣnouite) et retourna au quartier des vaiṇavar. Ceux-ci, enchantés de voir un dévot de leur secte, se présentèrent devant lui, le saluèrent et s’informèrent de son lieu d’origine et du but de son voyage, (st. 6-10).
294Le faux vaiṇavaN leur dit qu’il avait sa demeure à ALakarmalai (Tirumāliruñcōlai qu’il allait à Attikiri (Kāñcipuram) pour s’y installer et qu’avant de s’y rendre il avait voulu faire ses dévotions au dieu de KuRRālam. Les habitants de cette ville le conduisirent au temple et lui fournirent de l’eau, du santal, des fleurs, etc., pour son adoration. (st. 11-14).
295Le muNi entra dans le sanctuaire. Absorbé dans la pensée du dieu à la chevelure rousse (CivaN), il mit sa main sur la tête de NāranaN et dit : « rapetisse-toi. » La statue s’affaissa comme de la cire. Le muNi lui donna la forme d’un civaliṅkam et l’adora suivant le rite civaïte. (st. 15-16).
296Les brāhmanes s’étonnèrent de son acte. Ils pensèrent qu’il les avait trahis. Ils s’élancèrent alors sur lui pour le maltraiter. Le muNi fit sortir le feu de sa colère qui commença à les brûler. Ils se dispersèrent aussitôt dans tous les sens et se sauvèrent. (st. 17-18).
297Depuis lors le temple de KuRRālam devint un temple de CivaN.
298AkattiyaN, après avoir adoré CivaN, quitta cette ville et arriva au mont Potiyai, où il entra en pénitence. (st. 19).
29. Adoration d’IntiraN
299Kāviri qui coulait sur le sol s’accrut progressivement et accéléra son allure. Traversant forêts et terres en friche, elle charriait toutes sortes d’objets : troncs d’arbre de santal, défenses d’éléphants, perles, etc… Se dirigeant vers l’est elle arriva à la forêt où PurantiraN (IntiraN) faisait sa pénitence. (st. 1-9).
300MakavāN l’aperçut et sauta de joie comme s’il avait vaincu CūraN. Son jardin de fleurs absorba l’eau de la PoNNi (Kāviri) et se revivifia, tel un homme affamé qui a trouvé et mangé de l’ambroisie. Grâce à cette régénération tout le jardin se couvrit de fleurs de toutes les couleurs. Il présentait donc un aspect ravissant. Ce spectacle enchanta davantage IntiraN. (st. 10-27).
301Celui-ci se levait tous les jours de bonne heure, cueillait les fleurs fraîches et pures, non encore souillées par le contact des insectes et s’en servait pour faire ses adorations à Kaṇṇutal (CivaN). (st. 28-30).
30. Lamentation des tēvar
302Pendant que le roi des célestes (IntiraN) faisait sa pénitence à KāLi, quelques-uns des tēvar vinrent à cette ville à la recherche de leur maître, ne pouvant plus supporter les sévices de CūraN. Ils se prosternèrent aux pieds de leur roi, lui firent part de la dureté de cœur des avuṇar et lui reprochèrent de s’être réfugié à KāLi, après les avoir abandonnés dans une situation très pénible. (st. 1-9).
303MakavāN (IntiraN) poussa un soupir et parla en ces termes : « Mes chers tēvar ! Grâce à sa grande et rigoureuse pénitence, CūraN a pu conquérir notre monde et nous rendre ses esclaves. Nous avons même accepté d’obéir à ses ordres en exécutant de vils travaux auxquels nous ne devons jamais nous livrer. Mais, non content de cela, l’acuraN cruel a cherché à me mettre en prison et à s’emparer de Pulōmacai (Intiraṇi). Si j’avais été incarcéré, il m’aurait été difficile de faire une pénitence en vue de notre délivrance et de la destruction des avuṇar. Si ma femme avait été enlevée, cela aurait été un déshonneur tant pour moi que pour tous les célestes. C’est pour cette raison que je vous ai quittés sans vous prévenir. Je suis donc venu avec ma femme ici, où je fais une pénitence dans le double but de mettre fin à notre malheur et d’éteindre la race des avuṇar. Puisque vous êtes arrivés en assez grand nombre, je préfère que nous allions tous à la montagne d’argent (Kayilai) pour exposer nos doléances à Dieu. (st. 10-19).
304Les célestes trouvèrent excellente cette idée et prièrent PurantaraN de les emmener de suite auprès d’AttaN (CivaN). Le roi des célestes leur promit de le faire et alla voir sa femme Ayirāṇi (Intiraṇi). (st. 20-25).
31. Affliction d’Ayirāṇi
305Ayirāṇi s’étonna de l’arrivée subite de son mari et lui demanda la raison de cette visite inattendue. Le roi lui dit que sur les instances des tēvar, il se proposait de se rendre avec eux auprès de l’époux d’Umai pour le prier de réprimer les méfaits des avuṇar afin que lui et les siens retournent à leur monde pour vivre une vie de paix et de tranquillité. Il ajouta qu’il était venu chez elle uniquement pour l’en aviser. (st. 1-4).
306En entendant ces mots Ayirāṇi se désola. Elle fit remarquer à son mari qu’elle ne pouvait être séparée de lui, car en son absence elle craignait de la part des méchants avuṇar toutes sortes de tourments et de tortures. Elle le pria de l’emmener avec lui au mont de MukkaṇṇaN. (st. 5-17).
307Son époux la consola. Il lui dit qu’AiyaN (AiyaNār), fils de celui qui est orné du croissant de lune et de celui qui dort sur l’océan, pourrait lui servir de gardien et qu’il viendrait se mettre à son service dès qu’elle penserait à lui. (st. 18-20).
308Ayiraṇi demanda alors à AmarēcaN (IntiraN) de raconter l’histoire d’AiyaN. (st. 21).
32. Makā Cāttā
309Jadis MukuntaN (Tirumāl) et les Curar (tēvar) avaient baratté l’océan de lait avec les tāNavar (acurar) sans obtenir au préalable la grâce de ParamaN (CivaN). Il en sortit du poison. Les Curar terrifiés, se rendirent au mont Kayilai pour implorer AmalaN (CivaN). Celui-ci les consola, absorba le poison et leur dit que s’ils continuaient à baratter l’océan, il en sortirait de l’ambroisie.
310Ils retournèrent à l’océan de lait et reprirent le barattement avec les tāNavar, mais ils oublièrent de faire à l’avance des invocations au dieu à la tête d’éléphant (VināyakaN). La conséquence en fut que le baraton s’enfonça dans l’abîme. Ils s’en rendirent compte et adorèrent ce dieu. Le mont Mantaram qui servait de baraton s’éleva et reprit sa place. (st. 1-5).
311On recommença le barattement. De l’océan de lait surgit une cruche en or contenant de l’ambroisie. Les Curar prétendirent qu’eux seuls avaient le droit de la prendre. Les tāNavar de leur côté voulurent s’emparer de la cruche. Les deux clans se disputèrent. Mal chercha à éviter un combat entre eux. Il prit donc la forme d’une MōkiNi (femme séduisante). Les tāNavar furent épris de cette femme. Celle-ci leur dit qu’elle se donnerait à eux s’ils abandonnaient leur prétention sur la cruche d’ambroisie. Ils acceptèrent la proposition. Les célestes prirent possession de la cruche, (st. 6-13).
312MōkiNi se mit dans le groupe des tāNavar. Chacun d’eux voulut l’avoir pour sa femme ; ce qui donna lieu à une lutte entre eux et le résultat fut qu’ils se tuèrent tous dans le combat. (st. 14-17).
313Deux d’entre eux, qui comprirent la ruse d’Ari, assumèrent la forme des Curar et allèrent se mettre dans leur groupe. (st. 18).
314Tirumāl reprit sa forme naturelle et alla rejoindre les amarar. Sur la demande de ces derniers, il leur distribua l’ambroisie contenue dans la cruche d’or. Les deux tāNavar déguisés, obtinrent aussi leur part ; mais ils commencèrent à l’avaler aussitôt, sans réciter au préalable les mantiram prescrits, ignorant cette formalité. (st. 19-20).
315Le Soleil et la Lune s’en rendirent compte et le signalèrent à Ari en clignant des yeux. Celui-ci devint furieux et trancha leurs têtes avec la cuiller qu’il avait à la main. Grâce à l’ambroisie qui restait encore dans les bouches, les têtes remuaient, mais les troncs étaient inertes. (st. 21-23).
316Celui qui, de ses pieds, a mesuré les mondes (Tirumāl) s’adressant à ces têtes dit qu’elles méritaient de rester au monde céleste en raison de l’ambroisie qui se trouvait encore dans leurs bouches et leur ordonna de devenir des astres. (st. 24).
317Les deux têtes implorèrent le dieu orné de serpents (CivaN) et devinrent deux astres, assumant respectivement les formes de serpent noir et de serpent roux et prenant les noms de Rāku et de Kētu. Elles montèrent au ciel et se placèrent parmi les autres astres. Elles se mirent ensuite à circuler comme eux, masquant de temps à autre le Soleil et la Lune qui les avaient révélées à Tirumāl. (st. 25-26).
318Celui-ci, sous sa forme de MōkiNi, alla ensuite se reposer au bord de l’océan de lait. Le dieu à la gorge noire (CivaN) voulut prouver au monde qu’AccutaN (Tirumāl) n’était qu’une de ses quatre Catti (Śakti). Il se présenta alors devant lui et manifesta le désir de s’unir avec lui. MāyaN (Tirumāl) fut gêné et lui dit que son désir ne pouvait pas se réaliser, étant donné qu’une union entre deux personnes de même sexe était impossible. Le Maître lui fit remarquer qu’il était une de ses Catti (Śakti) et que c’était pour cette raison qu’il avait pu donner naissance à VētaN (Brahman) et prendre une fois la forme d’une femme, dans la forêt de Tārukam. NāraṇaN (Tirumāl) persista dans ses dires. Le Maître le saisit par le bras, le conduisit sous l’ombre d’un arbre Cālam (Eugenia racemosa), situé à proximité du bord de la mer, dans la partie septentrionale du pays Nāvalantīvu. Là, il s’unit avec lui qui avait toujours la forme de MōkiNi. (st. 27-40).
319La salive crachée par eux se transforma en un fleuve qui prit le nom de Kaṇṭaki. Dans l’eau du fleuve naquirent, en groupes, des vers de couleur d’or nommés Vacciratanti, ayant sur le corps la marque du disque. (st. 41-42).
320Ces vers construisirent dans le fleuve, avec du sable, des nids dans lesquels ils vécurent pendant quelques jours seulement. Après leur mort, ces nids qui portaient l’empreinte de leur disque, étaient poussés sur le rivage. Les gens les ramassèrent, les considèrent comme Tirumāl, à cause de leur empreinte, et les adorèrent en leur donnant le nom de Cālakkirāmam, (st. 43-46).
321De l’union du Maître et de Māl naquit un enfant de corps noir, de chevelure rousse, portant un bouquet à la main. Le dieu à trois yeux lui donna le nom d’ArikaraputtiraN, lui accorda plusieurs dons et le plaça parmi les uruttirar. Il lui donna ensuite un monde dont il devint le maître. (st. 47-51).
322De cette façon IntiraN raconta à son épouse Pulōmacai l’histoire d’ArikaraputtiraN et lui dit que ce dernier ne manquerait pas de la protéger. (st. 52-56).
323IntiraN pensa ensuite à ArikaraputtiraN qui, en compagnie de ses femmes Pūrani et Puṭkalai, apparut devant lui, monté sur un éléphant blanc et entouré des Kaṇa. VācavaN se prosterna à ses pieds, lui fit part de ce qui lui était advenu et le pria de prendre sous sa garde son épouse Pulōmacai, jusqu’à son retour. (st. 57-64).
324AiyaN (AiyaNār) fit venir le nommé KāḷaN, le plus célèbre de ses guerriers escrimeurs, lui donna l’ordre de veiller à ce qu’il n’arrivât aucun malheur à l’épouse du roi de la ville d’or (Intirāṇi) pendant son absence et quitta les deux époux, après les avoir bénis. (st. 65-68).
33. L’arrivée d’IntiraN à Kayilai
325Après avoir consolé son épouse, IntiraN alla au mont Kayilai, en compagnie des célestes. A la porte de la demeure du Maître, il trouva le gardien Nanti. Il le salua et lui fit part de l’objet de sa visite. Nanti lui dit que son maître enseignait les sciences spirituelles aux muNi et que personne ne pouvait entrer dans son appartement. (st. 1-5).
326VācavaN (IntiraN) et les célestes désappointés, décidèrent de rester devant la porte du Maître jusqu’à ce que celui-ci finisse ses instructions aux muNi. (st. 6-7).
327IntiraN s’approcha de Nanti. Il le salua de nouveau et lui dit que les sévices dont lui-même et ses sujets étaient victimes de la part de CūrapaNmaN, devenaient de jour en jour plus insupportables et que seul le Parfait (CivaN) pouvant remédier à ces abus, ils voudraient à tout prix le voir et lui exposer leurs doléances. Il ajouta qu’ils préféraient l’attendre sans retourner au monde terrestre de peur d’être incarcérés par CūraN qui serait furieux de leur venue au mont Kayilai. (st. 8-18).
328Nanti calma VācavaN et les célestes et les autorisa à rester à l’extérieur du palais en un endroit convenable, en attendant la sortie des muNi. (St. 19-20).
34. Acamuki
329Après le départ de son époux Caci commença à faire une pénitence dans la forêt de KāLi (CaṇpakavaNam), afin que son mari revienne avec succès. Un temps assez long s’écoula, mais il ne rentra pas. (st. 1-2).
330Un jour la sœur de CūrapaNmaN, la nommée Acamuki, suivie de sa compagne TuNmuki, arriva en ces lieux. Elle avait une tête de chèvre et était armée d’un javelot. Encline au mal, elle ne connaissait aucune vertu. Robuste et forte, elle était capable de faire en un instant le tour des trois mondes. (st. 3-13).
331Le gardien l’aperçut. Il voulut savoir ce qu’elle allait faire, prêt à lui donner une correction si elle se livrait à des actes répréhensibles. Il se trouva donc caché en un endroit de la forêt, (st. 14-15).
332Acamuki se promena avec TuNmuki en long et en large et vit Caci en pénitence. Comme il n’y avait personne à ses côtés, elle s’approcha d’elle dans l’intention de l’enlever et de la conduire à son frère afin que celui-ci la prenne comme épouse. (st. 16-22).
333La pénitente, saisie de peur à la vue d Acamuki, essaya de s’enfuir. Mais celle-ci l’empêcha de le faire et lui adressa les propos suivants : « Ayirāṇi ! Ne crains rien. Je ne te ferai aucun mal. Abandonne cette vie austère, car tu ne tires aucun profit de ta jeunesse et de ta grande beauté, qui ne sauraient durer toujours. Le rois des célestes ne mérite nullement d’être ton mari. Il n’est roi que du monde céleste. Mon frère CūrapaNmaN est le Seigneur de tous les mondes. Il est immortel, sans défaut, toujours heureux. IntiraN et les tēvar sont ses esclaves. je te ferai sa femme. Il t’aimera mieux que la reine Patumakōmaḷai. Je t’en assure. Viens donc avec moi. » (st. 23-32).
35. Le refus d’Intirāni
334Les paroles d’Acamuki pénétrèrent dans les oreilles d’Intirāṇi comme des lances de fer chauffées au rouge. Elle ne put tolérer ce qu’elle lui avait dit. Elle devint furieuse et se récria :
335« Va-t’en, femme insolente et sotte. Quels propos tiens-tu devant moi ? Te rends-tu compte du malheur qui t’attend ? Il est étrange de te voir prononcer de tels mots. Etant fille d’un sage, peux-tu concevoir de pareilles idées ? Ne sais-tu pas que quiconque fait du mal à son prochain, ne cherche que son propre malheur ? J’aime mon mari et je n’aimerai nul autre que lui. Si tu veux vivre encore quelque temps, oublie ce que tu viens de dire. Mon honneur sauvegardera mes sens et ma vie. Sache que je suis sous bonne garde et sors d’ici. » (st. 1-13).
336Cette réponse ne calma pas Acamuki, mais au contraire elle l’enragea. Elle se mordit les lèvres, tapa des mains, sauta en l’air et s’élança contre l’épouse du roi des célestes tout en disant : « D’où te vient cette audace ? Comment oses-tu refuser ma proposition ? Pour ta désobéissance, je te tuerai et te mangerai ; mais je te laisse en vie, parce que je sais que mon frère t’aime. Malgré ton refus, je te conduirai de force chez lui, alors même que les trois dieux viendraient à ta rescousse. » (st. 14-19).
337Cela dit, elle saisit par le bras Ayirāṇi et l’entraîna brutalement et précipitamment. (st. 20).
338La pauvre pénitente, incapable de résister, se laissa faire comme un petit oiseau dans la bouche d’un chat sauvage, en poussant des soupirs et en se lamentant. (st. 21-24).
36. L’arrivée de Makākāḷar
339Le Chef guerrier MākāḷaN entendit les lamentations d’Ayirāṇi. Il sortit aussitôt de sa cachette et se précipita, tout en brandissant son épée. Dès qu’il vit Acamuki traîner de force Caci, il alla au devant d’elle, il l’arrêta et s’écria : « Où traines-tu cette femme innocente ? Tu as cru qu’elle était seule et, comme une voleuse, tu as profité de sa solitude pour l’enlever. Laisse-la, sinon je te couperai le bras qui l’a saisie. » (st. 1-6).
340Cette apostrophe rassura la victime d’Acamuki laquelle devint furieuse. Elle grinça des dents, poussa des cris de colère et dit à MākāḷaN qu’elle ne reviendrait pas sur ce qu’elle avait décidé et qu’elle ne craignait rien, étant plus forte que les trois dieux qui ont des fonctions différentes et les huit gardiens des points cardinaux, lesquels n’oseraient même pas se présenter devant elle. Le guerrier essaya de la calmer et lui dit qu’il la laisserait partir saine et sauve si elle lâchait Caci. (st. 7-10).
341Acamuki voulut alors savoir qui était cet individu qui, prenant fait et cause pour Intirāṇi, était venu à son secours. MākāḷaN lui déclina son identité et ajouta qu’il agissait sur l’ordre d’AiyaN, au corps noir, protecteur des trois inondes et ayant pour monture un éléphant blanc. (st. 11-12).
342Ces indications s’appliquant tant à IntiraN qu’à AiyaNār, Acamuki pensa qu’il était le préposé d’IntiraN. Elle voulut donc le tuer. Elle lança sur lui le trident qu’elle avait à la main. MākāḷaN, d’un coup de son épée, le coupa en deux morceaux. Acamuki confia alors Caci entre les mains de TuNmuki et lui prit le javelot dont elle était munie. Dirigeant cette arme contre MākāḷaN, elle s’élança sur lui : mais son adversaire coupa également ce javelot en deux morceaux, avec son épée. (13-20).
343Acamuki fit un écart en arrière, courut vers une colline voisine, l’arracha du sol et la lança violemment contre son ennemi. Ce dernier la para par son épée, mais celle-ci se brisa. Enhardie par ce fait, Acamuki menaça MākāḷaN de le tuer et de le manger, s’il continuait de rester devant elle sans chercher à s’enfuir. (st. 21-23).
344Le guerrier lui répondit qu’il ne craignait rien de sa part, qu’il était assez fort pour la tuer, mais qu’il ne voulait pas le faire, étant donné qu’elle était une femme. Il lui demanda de laisser libre Ayirāṇi et de s’en aller. (st. 24).
345Acamuki pensa qu’il n’était pas logique d’entrer en lutte avec lui, qui était désarmé et fut en outre qu’elle ne pourrait le vaincre si le combat était engagé. Elle décida donc de partir avec sa compagne, en traînant toujours Caci après elle. Elle prit celle-ci des mains de TuNmuki et commença à marcher en toute hâte. (25-26).
346Le chef guerrier d’AiyaN (MākāḷaN) courut derrière Acamuki, la saisit d’une main par les cheveux et de l’autre, il sortit son cimeterre avec lequel il lui trancha le bras qui retenait Intirāni et libéra celle-ci de cette façon. Puis d’un coup de pied il fit rouler sur le sol son adversaire. Il s’élança ensuite sur TuNmuki et lui coupa un bras, tout en disant qu’elle avait aussi contribué à l’enlèvement de Caci, en la retenant de sa main. Il la fit également rouler sur le sol, en lui administrant un coup de pied. (st. 27-29).
347Les deux femmes poussèrent des cris plaintifs et restèrent assez longtemps étendues sur le sol. (st. 30).
37. Affliction d’Acamuki
348Acamuki, très affligée de ce qui lui advint, ne put tolérer l’acte du guerrier (MākāḷaN). Les sentiments de colère et de tristesse l’envahirent tour à tour. De sa main valide, elle frappait sur le sol et se donnait des coups sur la poitrine. Elle grinçait des dents, se levait en sursaut et s’écriait : « Epouse de PurantaraN ! Ne crois pas que tu es sauvée. Je viendrai à ta recherche. Je te tuerai et te mangerai. Tout le monde a peur de moi et personne n’ose me toucher. Cependant ce vil serviteur d’IntiraN a réussi à couper mon bras. C’est un grand deshonneur pour moi. Je ne manquerai pas de le réparer et je le ferai sans tarder. Je vais donc maintenant bouleverser le monde terrestre, détruire le pays d’IntiraN et écraser son éléphant. Le soleil et la lune seront anéantis en un instant. (st. 1-19).
349TuNmuki, qui avait également perdu un bras, se lamentait de son côté. Mais quand elle entendit les imprécations de son amie, elle essaya de l’exhorter au calme. Elle lui dit que si elle détruisait les mondes, son frère CūraN, sous l’autorité duquel ils se trouvaient, en deviendrait mécontent et lui conseilla d’aller lui faire part de ce qui lui était advenu, afin que lui-même cherche le moyen de châtier les méchants. (st. 20-26).
350TuNmuki invita ensuite Acamuki à l’accompagner chez son frère CūraN. Acamuki partit avec elle, après avoir lancé encore d’autres imprécations contre Caci qu’elle voyait dans un état de douce tranquillité. (st. 27-30).
38. Le retour d’IntiraN
351MākaḷaN s’approcha de Caci et lui dit qu’il prendrait soin d’elle jusqu’au retour de son mari et qu’elle n’avait rien à craindre. Rassurée par ses paroles, Pūlōmacai (Intirāni) se rendit à son ancienne place où elle reprit sa pénitence. (st. 1-2).
352Le sage NārataN parvint à savoir par sa vision mentale tout ce qui s’était passé dans la forêt (CaṇpakavaNam). Il alla à la montagne d’argent (Kayilai) où il vit IntiraN qui y attendait une audience de CivaN. Il lui fit part de ce qui était arrivé à Pulōmacai pendant son absence. (st. 3).
353Makapati (IntiraN) devint furieux, regretta de s’être séparé de son épouse et décida d’aller la rejoindre. Accompagné de ses tēvar, il se rendit auprès de Nanti. Il le salua et lui demanda de le laisser partir, en lui disant que CivaN n’ayant pas encore daigné le recevoir, il préférait faire une pénitence plus rigoureuse, au monde terrestre, afin de gagner sa compassion. Nanti l’autorisa à partir. (st. 4-6).
354IntiraN arriva à KaLumalam (CīkāLi). Il rencontra MākaḷaN, le remercia du service qu’il avait rendu tant pour son épouse que pour lui-même et lui dit qu’il pouvait laisser la pénitente à sa charge et aller rejoindre AiyaN (AiyaNar). (st. 7-8).
355IntiraN pensa à ce qu’il devait faire ensuite. Les imprécations d’Acamuki le troublèrent. Il emmena donc son épouse et les tēvar au mont Mēru, où il resta caché avec eux. (st, 9).
39. CūraN sur le trône
356Acamuki se rendit avec TuNmuki à Makēntiranakar. CūraN se trouvait alors sur son trône, dans la cour royale. Celle-ci, très spacieuse, était magnifiquement ornée. La toiture, supportée par des piliers d’or, était d’une beauté ravissante. Le trône, fait également d’or et de pierres précieuses, brillait et lançait des éclats dans tous les sens. Au dessus du trône se dressaient deux parasols superbes et identiques, semblables à la lune. (st. 1-10).
357Aux côtés de CūraN étaient assis ses deux frères. Quelques-uns des avuṇar, se tenant debout près du trône, agitaient des éventails. Les nymphes Uruppaci (Urvaci), Tilōttamai et d’autres, dansaient devant le trône. VētaN (Brahman) attendait dans un coin l’heure de la lecture d’AintiRam (Pañcāṅkam). Les muNi chantaient les louanges de CūraN et de ses frères. Les gardiens des points cardinaux jetaient des fleurs au pied du trône et saluaient le roi. (st. 11-27).
40. L’arrivée d’Acamuki
358Acamuki, accompagnée de TuNmuki, arriva à la porte Est de la ville. De son bras coupé coulait encore du sang. Son attitude fut telle qu’elle pouvait être considérée comme un signe avant-coureur du malheur de la cité de Makēntirapuram. (st. 1-4).
359Les avuṇar l’aperçurent. Fort étonnés de son sort, ils se demandèrent comment et par qui elle avait pu perdre son honneur. La nouvelle s’ébruita vite dans toute la ville. Les gens qui vaquaient à leurs travaux accoururent dans la rue pour voir Acamuki. Hommes et femmes tenaient des langages différents. Les uns disaient que la sœur de leur roi avait dû recevoir une punition de la part du dieu de la couleur du feu (CivaN) ; d’autres pensaient que cela était un châtiment du fils de MāyaN et du dieu à la gorge noire (AiyaNār) ; d’autres encore attribuaient le fait au dieu à la tête d’éléphant (VināyakaN) ou au dieu qui couche sur le serpent (Tirumāl). Quelques-uns croyaient qu’Acamuki et TuNmuki s’étaient battues entre elles. Mais personne n’osa aborder les deux amputées pour les interpeller et connaître la vraie cause de leur malheur. (st. 5-31).
360La sœur de CūraN, suivie toujours de TuNmuki, précipita ses pas et rentra dans le palais royal. (st. 32-33).
41. Complainte d’Acamuki
361La méchante femme au visage de chèvre (Acamuki) arriva à la cour de CūraN et poussa des cris plaintifs. (st. 1).
362Elle pensa à sa mère et s’écria : « O ma mère ! Lorsque le dieu des dieux (CivaN) nous a accordé quelques dons, tu nous a promis de ton côté de venir nous protéger toutes les fois qu’il y aurait un danger pour nous. Or, tu n’as rien fait quand MākāḷaN m’a coupé le bras. » (st. 2-3).
363Puis s’adressant à ses frères, elle dit : « Ecoutez, mes frères. Croyant que vous étiez tout puissants, et, partant ne craignant rien, j’ai essayé d’enlever Pulōmacai, pour l’amener en ces lieux. MākāḷaN accourut à sa rescousse et me coupa le bras. Vous vous vantez d’avoir subjugué les tēvar. N’avez-vous pas honte maintenant de voir votre sœur déshonorée par un vil serviteur d’IntiraN ? » (st. 4-8).
364Voyant ensuite ses neveux VaNNimukaN (AkkiNimukaN), IraṇiyaN et Vacciravāku, elle s’exclama : « Vous donc mes neveux ! Vous avez respectivement deux, trois et dix têtes. A quoi sert de les avoir ? Un individu qui n’en a qu’une a tranché mon bras, sans vous craindre. » (st. 9).
365Puis s’adressant à PāNukōpaN, elle lui fit l’observation suivante : « Et toi ! Tu as appréhendé et séquestré autrefois le soleil, dont un rayon t’avait touché. Mais maintenant tu ne te soucies même pas de l’acte odieux dont ta tante a été victime. » (st. 10).
366Acamuki se retournant ensuite vers ses frères leur parla de nouveau en ces termes :
367« O TārakaN ! Autrefois tu as pris sur ton corps comme un bijou, le disque que le dieu qui a mesuré le monde de son pied (Tirumāl) avait lancé sur toi pour te tuer. Aujourd’hui c’est une injure qui te sert de parure. Où donc est passée ta vaillance ? » (st. 11).
368« O Frère à la tête de lion ! Jadis tu as saisi d’une main l’éléphant de PurantaraN sur lequel se trouvait celui-ci et, d’un coup de pied, tu les a fait monter tous les deux au ciel. Maintenant qu’un de ses serviteurs m’a fait perdre un bras, qu’attends-tu pour t’en venger ? (st. 12).
369« O toi CūraN, qui fais le bonheur des avuṇar ! Tu gouvernes tous les mondes sans exception. Les célestes sont tes esclaves. Cependant MākāḷaN qui est aux gages du maître de la ville d’or (IntiraN) ne semble pas te craindre. Un muNi a tué autrefois mes enfants. Aujourd’hui un serviteur méprisable s’est permis de me couper un bras. Ce sont des faits odieux qui se passent sous ton règne. Ne constituent-ils pas une ignomnie pour toi ? Allons ! l’honneur avant tout. Déshonorée que je suis, je préfère mourir plutôt que de vivre dans cet état. » (st. 13-15).
42. Châtiments de CūraN
370Acamuki, affolée et répandant des pleurs, se jeta sur le sol et se prosterna devant le trône de CūrapaNmaN. TuNmuki la suivit. Les gens de la cour en furent impressionnés. CūrapaNmaN devint furieux et demanda à sa sœur qui était son agresseur. Celle-ci répéta son aventure. Dès qu’il l’entendit, ses yeux devinrent rouges de colère et de son front ruisselaient des gouttes de sueur. Il lança de longs soupirs et grinça des dents. (st. 1-7).
371A la vue de cette manifestation de fureur, les danseuses célestes sortirent précipitamment de la Cour, les célestes furent saisis d’épouvante, les muNi commencèrent à trembler, le monde terrestre comme le monde céleste s’agitèrent, la cité de NeṭiyōN (Tirumāl) et celle d’AyaN furent également désolées. (st, 8-10).
372CūrapaNmaN conçut l’idée de tuer tous les amarar. Il fit observer à ses frères et à ses fils que son prestige était perdu par le fait qu’un simple serviteur du roi des célestes (IntiraN) avait coupé le bras à sa sœur, sans les respecter ni les craindre. Puis il s’adressa à lui même des reproches et méprisa son propre règne. (st. 11-21).
373Un de ses fils, PāNukōpaN, qui l’entendit se leva brusquement de son siège et s’avanca vers son père. Il le salua et lui dit qu’il irait de suite à l’endroit où sa sœur avait été blessée et qu’il appréhenderait son agresseur ainsi qu’IntiraN, Caci et les amarar, pour les amener devant lui. Il ajouta que s’ils n’étaient pas là, il ne manquerait pas d’aller à leur recherche dans les autres mondes qu’il incendierait au besoin. Cela dit, il sollicita de son père l’autorisation de partir. Le roi des avuṇar (CūrapaNmaN) apprécia beaucoup la bravoure de son fils et lui permit l’expédition qu’il voulait tenter. PāNukōpaN présenta ses respects à son père et à ses oncles et quitta la cour pour se rendre à son palais. (st. 22-31).
374Après le départ du fils, CūrapaNmaN fit venir NāNmukaN et lui donna l’ordre de faire repousser les bras d’Acamuki et de TuNmuki, afin qu’ils reprennent leur état primitif. Par sa pensée NāNmukaN fit croître les bras. CūraN le félicita. Il demanda à Acamuki de rester dans sa ville et ordonna à TuNmuki d’aller rejoindre PāNukōpaN pour lui indiquer l’endroit où se trouvait Pulōmacai (Intirāṇi). (st. 32-36).
375Puis CūrapaNmaN fit venir à sa cour le soleil, les étoiles et les autres astres. Il leur reprocha sévèrement d’être restés indifférents lorsque sa sœur fut blessée, sans chercher à saisir et amener devant lui son agresseur qu’ils avaient certainement pu voir, en circulant dans les airs. A ces reproches, ils répondirent d’une voix craintive qu’ils n’avaient vu dans leurs trajets aucune scène de ce genre et qu’ils ne l’avaient même pas apprise. En entendant cette réponse, CūrapaNmaN devint plus furieux et donna immédiatement l’ordre de les mettre en prison. (st. 37-43).
376Il envoya chercher ensuite le groupe des vents. Il leur adressa les mêmes reproches qu’aux astres, en leur faisant remarquer qu’en raison de leur accès en tous lieux ils ne pouvaient pas ignorer ce qui était advenu à sa sœur. Il les fit également mettre en prison. (st. 44-50).
377Après les vents, comparurent devant lui les dieux des temps. Ils subirent le même sort que les autres, accusés par lui d’avoir été complices de Makapati (IntiraN). (st. 51-54).
378CūraN fit sommer les rois de la terre de se présenter de suite devant lui. Ils répondirent immédiatement à son appel, émus et tremblants. Il porta à leur connaissance l’attaque dont avait été victime sa sœur de la part d’un serviteur de VācavaN (IntiraN). Il leur adressa de vifs reproches et leur dit qu’IntiraN se trouvant caché en un endroit de la terre, ils ne pouvaient pas l’ignorer et que s’ils ne s’en étaient pas rendu compte, c’est parce qu’ils se trouvaient en extase, ou s’adonnaient à des plaisirs, négligeant ainsi l’administration de leurs pays. (st. 55-61).
379Les rois répondirent qu’ils n’avaient pas vu Acamuki et TuNmuki dans leurs royaumes et qu’ils ignoraient totalement ce qui leur était arrivé. Cette réponse irrita davantage CūraN qui donna l’ordre aux chefs d’armée qui se trouvaient dans la cour, d’infliger des peines corporelles à ces rois. L’ordre fut immédiatement exécuté. On coupa aux uns la langue et aux autres le nez. D’autres eurent les oreilles déchirées. Quelques-uns furent égorgés, certains perdirent leurs bras ou leurs jambes. (st. 62-66).
380Après l’exécution de ces peines, CūraN descendit du trône et donna congé à ses frères et à AyaN (Brahman). Celui-ci s’avança vers lui et le pria de faire élargir le soleil, la lune et les autres astres, ainsi que les dieux des temps, en lui faisant remarquer que le monde ne pourrait subsister si leurs fonctions respectives n’étaient pas exercées et que désormais ils se soumettraient strictement à ses volontés. Le roi fit venir tous ces gens et, sur leur promesse expresse d’exécuter rigoureusement ses ordres, il leur accorda la liberté. Puis il laissa partir tous ceux qui se trouvaient dans la cour et rentra lui-même dans son palais. (st. 67-71).
43. Incarcération des amarar
381Le fils de CūraN (PāNukōpaN) prit ses armes dans ses mains et quitta son palais, pour son expédition. Monté sur son char où étaient attelés des chevaux vigoureux et entouré d’une armée de taNavar, il alla à la recherche de celui qui avait blessé Acamuki. Dès qu’il arriva sur la terre, il aperçut TuNmuki qui lui indiqua l’endroit où elle et sa maîtresse avaient été attaquées. C’était la forêt de CīkāLi. L’armée de PāNukōpaN entra dans cette forêt et la dévasta. On n’y trouva ni VācavaN, ni son protecteur. PaNukōpaN et ses soldats firent des recherches sur toute la terre, mais en vain. (st. 1-11).
382Ils se rendirent ensuite au monde céleste. Les habitants du ciel en informèrent le fils d’IntiraN (CayantaN). Le jeune prince en l’absence de ses parents et surtout de son kuru (ViyāLaN), ne sut que faire. Il resta un bon moment perplexe devant cette situation imprévue. Il arriva ensuite à une décision ; celle d’opposer une résistance à l’attaque de l’armée des tāNavar. (st. 12-27).
383Il descendit de son trône et pensa à son éléphant (Airāvatam), qui apparut de suite devant lui. Il monta sur lui et alla à la rencontre de PāNukōpaN. Un combat terrible éclata entre les avuṇar et les célestes. Ceux-ci plus faibles que les avuṇar essayèrent de s’enfuir ; mais poursuivis par l’armée ennemie, ils furent arrêtés et emprisonnés. (st. 28-43).
384CayantaN devint furieux. Il lança sur ses ennemis des flèches innombrables et tua ainsi bon nombre d’entre eux. D’autres furent tantôt piétinés par l’éléphant, tantôt blessés mortellement par ses défenses. A ce moment un avuṇaN du nom de NīlakēcaN se présenta devant CayantaN et lui lança des flèches. De son arc, CayantaN fit sortir des flèches considérables qui mirent en morceaux la cuirasse de NīlakēcaN. Ce dernier lança alors contre son adversaire un PiRaiyampu (flèche de forme de croissant de lune) qui cassa l’arc de CayantaN. Désarmé, celui-ci eut recours à d’autres moyens. Par son pouvoir magique il assuma, l’une après l’autre, diverses formes et continua son attaque. NīlakēcaN incapable de résister, succomba. (st. 44-57).
385L’armée de PāNukōpaN, saisie de frayeur, battit en retraite. Mais les commandants CōmācuraN, Māyāpali, Curakēcari, PatumaN, Mārutapali, TaṇṭkaN, VāmaN, VaruṇaN et MakataN revinrent à la charge, en usant de leur pouvoir magique à leur tour. Malgré tous leurs efforts, CayantaN leur parut loin d’être vaincu. Ils se lassèrent, (st. 58-60).
386PāNukōpaN s’en rendit compte. Il se rappela le mantiram que lui avait enseigné Pukar (Cukkirācāriyar). Tout en le récitant il se dirigea vers son ennemi. Le pouvoir magique de ce dernier ne produisit aucun effet. Les deux guerriers se battirent à coups de flèches. CayantaN blessé, s’affaissa sur son éléphant qui s’élança alors contre le char de PāNukōpaN, dont il tua les chevaux et le conducteur. PāNukōpaN sauta de son char. L’éléphant le piqua de ses défenses, mais celles-ci se brisèrent. L’ennemi saisit sa trompe d’une main et de l’autre il lui donna une violente gifle. L’animal poussa un barrissement formidable et roula sur le sol. (st. 61-84).
387CayantaN revint à lui quelques instants après. Les tāNavar se précipitèrent sur lui pour le maltraiter. PāNukōpaN ordonna alors de le mettre en prison avec les autres Curar, ce qui fut fait sur-le-champ. Il dit ensuite à ses soldats d’aller arrêter les fuyards et d’incendier le monde d’IntiraN. Cet ordre fut également exécuté ; mais PurantaraN se sauva de son royaume. (st. 85-96).
388PāNukōpaN descendit sur la terre avec son armée et les tēvar qui avaient été faits prisonniers. Il alla à Vīramakēntirapuram et dit à son père que, n’ayant pu trouver le roi des célestes et Caci, il avait incendié leur ville. CūraN le félicita et l’embrassa. (st. 97-100).
389Sur l’ordre de leur roi, les avuṇar coupèrent, en présence d’Acamuki, les bras et les jambes des célestes qu’ils avaient arrêtés. Mais ces membres repoussèrent vite, grâce à la rigoureuse pénitence qu’ils avaient faite auparavant. CūraN étonné de les voir dans cet état, ordonna leur incarcération. Les émissaires mirent les menottes à leurs mains et les amenèrent à la prison. Les femmes des prisonniers se lamentèrent. (st. 101-111).
390L’éléphant, qui était renversé sur le sol, se releva quelques instants après et se rendit à la forêt lumineuse (Tiruveṇkāṭu), où il installa et adora un liṅkam. Le dieu à trois yeux lui accorda sa grâce. Ses défenses brisées reprirent leur état primitif, (st. 112-115).
391Le roi des amarar (IntiraN) qui s’était caché dans une forêt, alla avec son épouse au monde céleste. Il constata que sa ville était incendiée. Ecœuré, il se rendit au mont Mēru, où il entra en pénitence. Le dieu dans la chevelure duquel réside Kaṅkai (CivaN), lui apparut et lui demanda ce qu’il souhaitait. Il le pria alors de mettre fin à son malheur et à celui des siens, en faisant disparaître toute la famille de CūraN. Le Maître (CivaN) lui fit savoir que de son union avec Umai, il aurait un fils qui anéantirait la race des avuṇar et qui le protégerait, lui et les siens, en leur faisant reprendre leur vie paisible et heureuse. Ceci dit, il disparut. (st. 116-119).
392MakavāN (IntiraN) fit part de cette promesse à Ari et AyaN. Tous les trois conférèrent entre eux et envoyèrent MataNaN (MaNmataN) chez le dieu à la gorge noire. Celui-ci ouvrit son œil frontal, d’où jaillirent des étincelles de feu qui brulèrent et réduisirent en cendres MataNaN (MaNmataN). Les tēvar se rendirent alors eux-mêmes auprès du Maître (CivaN). Ils lui exposèrent directement leurs doléances et lui rappelèrent la promesse qu’il leur avait faite. Le dieu alla donc aux monts Himalaya, se maria avec Umai et retourna à Kayilai. Il fit naître ensuite MurukaN, qui sortit de son œil frontal. (st. 120-121).
393Plus tard les tēvar allèrent voir MurukaN. PoNNōN (ViyāLapakavāN) porta à sa connaissance les circonstances dans lesquelles il était né, lui fit part des sévices exercés sur les tēvar par CūraN et le pria d’aller tuer ce dernier et les siens sans tarder, en lui faisant remarquer que nul autre que lui ne pouvait le faire, (st. 122-135).
394MurukaN écouta patiemment tout ce que lui avait dit PoNNōN, lui mit doucement la main sur le dos et lui accorda sa grâce. Puis s’adressant à CatamakaN (IntiraN) qui était à côté, il lui dit qu’il détruirait toute la race de CūraN et qu’il lui ferait reprendre son règne dans le monde céleste. Makapati (IntiraN) enchanté, le remercia et lui présenta ses respects. (st. 136-141).
Notes de fin
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La création d'une iconographie sivaïte narrative
Incarnations du dieu dans les temples pallava construits
Valérie Gillet
2010
Bibliotheca Malabarica
Bartholomäus Ziegenbalg's Tamil Library
Bartholomaus Will Sweetman et R. Ilakkuvan (éd.) Will Sweetman et R. Ilakkuvan (trad.)
2012