La déesse est dans la cour
Le culte de Rénénoutet maîtresse du grenier
p. 199-234
Résumé
This article stresses the fact that religion in ancient Egypt is not limited to the great temples, secluded from the outside world. The case-study of the cult of Renenutet, the « lady of the granary », shows that buildings meant for economic activities also left room for piety. Through epigraphy, iconography and scarce archaeological remains, this paper reviews the evidence for the presence of Renenutet in granaries throughout Egypt (but mostly in the Theban area). It also analyses the material conditions of her worship: situation and appearance of the chapel and cult statues, specific offerings, and staff members of the granary attached to the goddess’ service.
Texte intégral
1Dans quelques tombes ramessides, les décorateurs ont représenté de façon pittoresque la menace qui planait quotidiennement sur les greniers égyptiens, celle des volatiles friands de grain que l’on voit survoler la cour à ciel ouvert ou impunément posés sur les monticules de blé (fig. 6, 9). Comme les rongeurs, les oiseaux devaient dangereusement entamer les réserves1. Contre ces prédateurs à plumes ou à poils, volatiles ou furtifs, contre des humains mal intentionnés ou, a fortiori, contre l’armée d’esprits néfastes qui menaçait insidieusement les stocks de nourriture, la présence d’un personnel de surveillance ne suffisait pas. Alors, les Égyptiens, comme en toutes choses, faisaient appel à la protection des dieux, et en particulier de Rénénoutet.
2Cette déesse assez ancienne, puisqu’elle apparaît dans les Textes des Pyramides comme l’un des aspects du redoutable uræus, s’est progressivement spécialisée dans la protection et l’approvisionnement de la nourriture, au moins à partir du début du Nouvel Empire2. Elle intervenait alors très régulièrement comme hypostase ou auxiliaire des dieux dans leurs fonctions nourricières, et le souverain et son administration lui étaient redevables pour assurer l’approvisionnement du pays3. Cette bonne pourvoyeuse a donc trouvé tout naturellement, quoique tardivement, sa place et son culte à l’intérieur des structures de stockage, de gestion et de distribution des céréales. Pourtant, entretenir un culte dans une cour à grain ne va pas de soi aux yeux de l’égyptologie, qui a érigé en paradigme liturgique les rites se déroulant dans les grands temples, « au plus secret des sanctuaires, loin des yeux et des souillures du monde4 ». Mais les Égyptiens de l’Antiquité ne connaissaient pas de ségrégation entre espaces ou activités économiques d’une part et lieux et gestes sacrés d’autre part. Leur dévotion à Rénénoutet au cœur du grenier en est une manifestation supplémentaire et démontre que les bâtiments économiques et administratifs n’étaient pas moins empreints de religiosité que n’importe quel autre secteur de la vie quotidienne au bord du Nil.
I. Adorer Rénénoutet dans les greniers sous la XVIIIe dynastie
I.1. La dame du grenier dans les greniers des autres
3La présence de Rénénoutet dans les greniers de Haute Égypte est attestée dès le début du règne de Thoutmosis III à Karnak, Coptos et Ermant. Une statue théophore de Sénenmout présentant Rnnwtt (nt) šnwt nt ḥtp-nṯr n Mnṯw nb Ỉwny, « la Rénénoutet du grenier des offrandes divines de Montou, seigneur d’Iouny5 », permet d’affirmer que la déesse régnait sur le grenier de ce dieu à Ermant. De même, une table d’offrandes trouvée à Coptos par l’expédition Harvard University-Boston Museum of Fine Arts de 1923 laisse supposer qu’un grenier de cette ville abritait un culte conjoint d’Amon et de Rénénoutet6. Ce grand plateau rectangulaire en granodiorite de 21,6 cm de haut, 92,8 cm de long et 49 cm de large porte en effet sur son pourtour les dédicaces suivantes :
4À gauche :
‘nḫ Ḥr kȝ nḫt ḫ‘ (w) m Mȝ‘t nṯr nfr ḥqȝ Wȝst (?) nb tȝwy nb ỉr (t) ḫt nswt bỉty (Mn-ḫpr-R‘) sȝ R‘ n ẖt.f (Ḏḥwty-ms-ḥqȝ-mȝ‘t) mry Ỉmn nb nswt tȝwy ḫnt (y) šnwt ḥtp-nṯr
‘nḫ nṯr nfr sȝ Ỉmn mnwy mr (y) nṯrw nswt bỉty (Mn-ḫpr-R‘) d(w) ‘nḫ ḏt
Que vive l’Horus, le taureau puissant qui apparaît comme Maât, le dieu parfait souverain de Thèbes (?), le seigneur des Deux-Terres, le maître des cérémonies, le roi de Haute et Basse Égypte Menkhéperrê, le fils de Rê, de son corps, Thoutmosis-Héqamaât, aimé d’Amon seigneur des trônes des Deux-Terres qui préside au grenier des offrandes divines.
Que vive le dieu parfait, le fils d’Amon aux nombreux monuments, l’aimé des dieux, le roi de Haute et Basse Égypte Menkhéperrê, doué de vie éternellement.
5À droite :
‘nḫ Ḥr kȝ nḫt ḫ‘ (w) m Wȝst nṯr nfr nb ȝwt-ỉb nswt bỉty (Mn-ḫpr-R‘) sȝ R‘ n ẖt.f (Ḏḥwty-ms-ḥqȝ-mȝ‘t) mry Rnnwtt špst ḥr (y) t-ỉb šnwt ḥtp-nṯr
‘nḫ nṯr nfr nb ȝwt-ỉb ḥtp (w) ỉb Ỉmn ḥr mnw.f nswt bỉty (Mn-ḫpr-R‘) d(w) ‘nḫ ḏt
Que vive l’Horus, le taureau puissant qui apparaît dans Thèbes, le dieu parfait, seigneur de la joie, le roi de Haute et Basse Égypte Menkhéperrê, le fils de Rê, de son corps, Thoutmosis-Héqamaât, aimé de la noble Rénénoutet qui réside dans le grenier des offrandes divines.
Que vive le dieu parfait, seigneur de la joie, celui dont le cœur d’Amon se réjouit du monument, le roi de Haute et Basse Égypte Menkhéperrê, doué de vie éternellement.
6Mais c’est au sujet de Karnak que l’on trouve la documentation la plus abondante et la plus détaillée concernant la présence de Rénénoutet dans le grenier d’Amon, et ce dès le début du règne de Thoutmosis III. Son attestation la plus ancienne, à ma connaissance, se trouve sur une stèle que l’intendant du domaine d’Amon Sénenmout a fait ériger à Karnak-Nord après l’an 7 du règne. Après avoir exposé les détails d’une donation enregistrée dans le temple d’Amon en l’an 4, l’intendant annonce les offrandes qu’il a instituées pour Rnnwtt m šnwt, « la Rénénoutet dans le grenier7 ». Il est vrai que cette stèle a été fortement endommagée, puis restaurée à la fin de la XVIIIe ou à la XXVe dynastie, ce qui en a sans doute perturbé les graphies, sinon le texte original : W. Helck restitue ainsi le signe pour šnwt, là où le restaurateur avait gravé une image proche de 8. Cette stèle semble donc bien témoigner de la présence de Rénénoutet dans un grenier qui, étant donné le contexte, avait de fortes chances de se trouver à Karnak.
7Par ailleurs, deux statues – l’une du même Sénenmout, l’autre de Sendjéhouty, un autre intendant du domaine d’Amon à la fin du règne – invoquent conjointement Amon et Rnnwtt špst nt šnwt, « la noble Rénénoutet du grenier9 ». Or ces deux statues, si l’on en croit leurs inscriptions, se trouvaient initialement dans un grenier des offrandes divines qui devait être celui du dieu à Karnak10. On peut émettre l’hypothèse que ce grenier se trouvait dans le secteur septentrional du site. En effet, on a trouvé dans cette zone les restes d’une porte appartenant à un grenier d’Amon de la fin de la XVIIe dynastie11. Or la stèle de donation de Sénenmout se dressait dans une chapelle au nord de la porte de Thoutmosis Ier, et la statue de Sendjéhouty a été trouvée dans les abords immédiats du temple de Ptah. Il n’est pas impossible que la stèle comme la statue aient été découvertes à proximité de leur emplacement d’origine.
8Le culte conjoint d’Amon de Karnak et de Rénénoutet maîtresse du grenier s’est poursuivi sous les règnes des successeurs de Thoutmosis III, comme en témoigne certainement une scène de la tombe de Djéserkarêséneb (TT 38), comptable du grain d’Amon sous Thoutmosis IV. Dans un tableau agricole (fig. 1), le défunt est représenté en train de faire des offrandes à Amon, qui a minutieusement été effacé, et à Rnnwtt nbt šnwt, « Rénénoutet, dame du (double) grenier12 ». De même, sur un fragment de paroi de la tombe de Nébamon, le naos de « Rénénoutet, dame du grenier » était probablement installé en vis-à-vis de celui d’Amon, même si aujourd’hui il ne reste que le premier signe du nom du dieu en bordure du fragment13.
9Ces deux mentions lacunaires sont confirmées par les représentations assez complètes et convergentes d’un grenier qui peut être identifié avec celui d’Amon et que l’on trouve dans d’autres tombes datant des règnes d’Amenhotep II à celui d’Amenhotep III : celles de Sennéfer14 (TT 96), de Khnoummosé15 (TT 253 ; fig. 2) et d’Amenemhat dit « Sourer16 » (TT 48). La comparaison de ces représentations, effectuée par N. Davies et Ch. Van Siclen, permet d’affirmer que Rénénoutet disposait d’une chapelle à l’intérieur de la première cour du grenier, au moins sous le règne d’Amenhotep III et probablement dès celui de son grand-père17. Les réaménagements que le grenier d’Amon a connus sous la XVIIIe dynastie ne semblent pas avoir radicalement modifié son organisation si l’on se fie à ces représentations.
I.2. Les supports du culte dans les greniers à Thèbes sous la XVIIIe dynastie
10Les représentations des greniers thébains semblent suffisamment détaillées et cohérentes pour pouvoir proposer une reconstitution assez précise des supports matériels du culte de Rénénoutet dans les greniers à la XVIIIe dynastie, alors même que l’archéologie n’a pour l’instant rien livré de concluant à ce sujet.
I.2.1. La chapelle dans la première cour
11Les tableaux des TT 253 et TT 48 (fig. 2-3) permettent de connaître l’aspect général de la chapelle de Rénénoutet dans un grenier d’Amon, certainement celui de Karnak, sous Amenhotep III. Une autre représentation contemporaine complète et confirme ces deux images : il s’agit d’un relief de la tombe de Khâemhat (TT 57), dans lequel ce dernier présente des offrandes à « Rénénoutet, dame du grenier18 ». Celle-ci est assise dans un kiosque, au-dessus de l’image hiéroglyphique du double grenier-šnwt (fig. 4). Selon les principes de l’art égyptien, cette composition signifie certainement que l’édicule était placé à l’intérieur du bâtiment. Le schématisme de l’image ne permet pas de savoir s’il s’agit du même grenier que celui représenté dans la TT 48 sous le même règne. En réalité, cela semble peu probable dans la mesure où Khâemhat ne porte aucun titre qui le lie au domaine d’Amon. Ses fonctions de « directeur du double grenier de Haute et Basse Égypte », illustrées par les reliefs de la première chambre de sa tombe, l’amenaient à fréquenter davantage les institutions de l’État et le souverain. Il est donc plus réaliste de penser que le grenier de la TT 57 relève de l’administration du double grenier de Haute et Basse Égypte, et non du domaine d’Amon.
12Pourtant, les chapelles représentées dans les TT 253, TT 48 et TT 57 sont remarquablement semblables. S’il ne s’agit pas d’une même construction dans la même structure de stockage, elles supposent au moins un modèle commun pour les architectes des différents greniers ou pour les décorateurs des trois tombes. Le point commun aux trois représentations semble être la présence de deux colonnes hathoriques à l’entrée de la chapelle – si l’on veut bien valider les reconstitutions des scènes de la TT 48 et de la TT 253. Ce type de colonnes semble adapté à la nature féminine de Rénénoutet, dangereuse mais bienveillante, qu’elle partage pour ainsi dire avec toutes les déesses égyptiennes. De telles colonnes évoquent également certaines pratiques liées à l’accouchement et aux rites qui le suivent immédiatement19, ce qui serait parfaitement cohérent dans la scène de la TT 57, qui se déroule « le jour de la naissance de Néper » (fig. 4).
13Dans la TT 253, les colonnes – aujourd’hui disparues – se dressaient manifestement de part et d’autre de la porte qui communique avec la cour du grenier, en avant de la façade de la chapelle. Le naos d’Anoukis dédié par Kasa de Deir el-Médina, conservé à Turin, donne sans doute une bonne idée de ce que pouvait être l’apparence d’un tel portique20. En revanche, aucun mur n’est représenté dans les TT 48 et TT 57, l’artiste ayant sans doute choisi de ne faire figurer que les éléments significatifs de l’édifice, à moins que cette chapelle ne soit qu’un dais dépourvu de murs21. Dans la TT 57, le kiosque et les colonnes sont sans doute représentés de face, tels que les verrait le prêtre, tandis que Rénénoutet est normalement représentée de profil, tournée vers les porteurs d’offrandes.
14Notons également que dans cette scène, une guirlande de fleurs est tendue entre les deux colonnes, et représentée derrière la déesse. Un dispositif comparable est visible dans la TT 77, où des guirlandes passent devant et derrière l’image de Rénénoutet auprès du pressoir à vin22.
I.2.2. Les statues dans la chapelle
15Dans le grenier d’Amon de la TT 48 (fig. 3), la chapelle de Rénénoutet contient deux effigies. La première est une image de la déesse lactans, donnant le sein à un enfant royal identifié par ses cartouches comme étant Amenhotep III. La seconde est un grand cobra coiffé de la couronne hathorique et dressé, dans le dos d’un petit roi, sur les signes (nbw) et (kȝ)23. Ce groupe figure certainement une sculpture, puisque le roi est dessiné en profil véritable. Deux statues au moins provenant de Karnak ont été rapprochées de ces images par Ch. Van Siclen malgré plusieurs discordances iconographiques24. La première, trouvée dans la Cachette, représente Rénénoutet allaitant Thoutmosis III25 ; la seconde, découverte près du temple de Khonsou, mais dédiée à Amon, montre Amenhotep II sous la protection d’un grand uræus26. Le fait que cette statue présente des restaurations du nom d’Amon témoigne qu’elle était encore visible et accessible quelque part à Karnak après le règne d’Akhénaton. Ainsi, si les deux statues identifiées par Ch. Van Siclen ne sont pas précisément celles représentées, elles ont au moins pu servir de modèle pour les statues d’Amenhotep III dans le grenier qu’il a réaménagé27 – ou de source d’inspiration pour le tableau de la tombe d’Amenemhat-Sourer.
16Le fait que le culte de la « dame du grenier » dans la TT 57 soit adressé à une Rénénoutet lactans (fig. 4), comme la statue de Thoutmosis III mentionnée ci-dessus, renforce l’idée qu’une telle effigie avait sa place dans les greniers thébains, au moins sous Amenhotep III. L’image de la déesse cobra allaitant est en effet la forme la plus expressive du rôle protecteur et bienfaisant de l’uræus envers les richesses stockées, en même temps qu’elle sert une idéologie royale assimilant le souverain à Néper comme nourrisson de Rénénoutet.
I.2.3. L’offrande des gerbes et des cailles
17Sur la stèle de Sénenmout à Karnak-Nord comme dans les scènes de culte représentées dans les tombes thébaines, les offrandes dédiées à Rénénoutet sont dans l’ensemble assez communes (fruits, fleurs, pains et galettes, pièces de viande). Toutefois, deux offrandes, parfois associées, marquent plus particulièrement le culte de la patronne du grenier : les gerbes de blé et les cailles (fig. 1, 3, 4). Dans la TT 38, les épis n’apparaissent pas sur l’autel à holocauste d’Amon et sont donc peut-être un présent réservé à la maîtresse du grenier. En revanche, ces offrandes étaient peut-être spécifiques aux cérémonies de l’engrangement de la récolte, comme cela ressort des inscriptions qui accompagnent les scènes des TT 38, TT 48 et TT 57. Dans les deux premières, l’offrande à Amon et Rénénoutet est faite m hrw pn (n) ḫȝt skỉ n ȝbd 4 prt sw 27, « en ce jour de mesurer le grain vanné, le 27e jour du 4e mois de la saison péret28 », soit au moment où le grain, séparé de la paille et de son enveloppe, quittait l’aire de battage dans les champs pour être stocké dans le grenier. La scène de la TT 57 quant à elle se déroule trois ou quatre jours plus tard, m ȝbd 1 šmw sw 1 hrw pn n mswt Npr, « en (ce) 1er jour du 1er mois de la saison chémou, jour de la naissance de Néper ». Les deux dates, séparées par quelques jours seulement, prennent donc place à la transition entre le huitième mois de l’année, placé sous le patronage de Rénénoutet29, et le premier jour du neuvième mois, par ailleurs attesté comme la fête de Rénénoutet par excellence30.
18On consacrait donc à la déesse l’ensemble de la récolte sur laquelle elle devait veiller, en ne lui en abandonnant concrètement qu’une infime partie, selon le principe magique de la pars pro toto31. Il était par ailleurs courant d’offrir à une divinité ce qui la constituait ou lui appartenait, afin qu’elle le dispensât en retour32. Ce même principe s’appliquait bien au culte de Rénénoutet, à qui l’on offrait le blé même qu’elle protégeait, afin qu’elle continuât à veiller sur lui et qu’elle le fît même prospérer.
19Quant à la caille, en plus d’être un mets fort goûté des Égyptiens, elle est aussi un symbole répandu de la fin de la moisson, en Égypte comme ailleurs33. En effet, elle habite fréquemment les champs de céréales et, au fur et à mesure de la récolte, se réfugie parmi les derniers épis encore debout. Dans les tableaux égyptiens, elle apparaît le plus souvent dans des champs déjà moissonnés, comme dans les reliefs de la TT 5734. Par ailleurs, il semble que les cailles pullulaient dans la vallée du Nil aux environs du mois de mars, lorsque le grain était mûr35. Or cette période correspondait théoriquement au huitième mois de l’année égyptienne, placé sous le patronage de Rénénoutet, et aux dates indiquées dans les TT 48 et TT 57 comme l’occasion d’offrir ce gibier à Rénénoutet. Capturées à la fin de la récolte, les cailles étaient donc toutes prêtes à être offertes au seigneur du champ, humain ou divin36, ou à la maîtresse du grenier, qui recevait le produit de la moisson. Qui plus est, l’offrande de cailles rejoint la conception égyptienne du sacrifice animal, anéantissement symbolique des ennemis de la maât37. Les cailles étant friandes de grain, elles ont pu être assimilées à des ennemis du blé. Leur consécration à Rénénoutet appellerait alors, en la reproduisant, la destruction des forces nocives par l’uræus. L’association des cailles et du blé revenait donc à consacrer à Rénénoutet l’ensemble de la récolte, le bénéfice végétal comme animal. Elle souligne la continuité entre le culte que la déesse pouvait recevoir dans les champs (comme dans la TT 38) et celui qu’elle recevait dans les greniers.
II. Rénénoutet et les déesses cobras dans les greniers depuis la fin de la XVIIIe dynastie
20On ignore le destin de la chapelle de Rénénoutet à Karnak pendant l’épisode amarnien, mais il est certain que le grenier d’Amenhotep III a été détruit par Horemheb38, qui sans aucun doute en a fait construire un nouveau. À partir de cette époque, les cas explicites et détaillés de culte rendu à Rénénoutet dans des greniers se font plus rares, mais dépassent la Haute Égypte.
II.1. Dans les greniers thébains
21La présence de Rénénoutet dans les réserves d’Amon à l’époque ramesside est moins assurée qu’au début du Nouvel Empire. Elle reste cependant fort probable étant donné, notamment, l’existence d’une « Rénénoutet du domaine d’Amon » à la XIXe dynastie39. Par ailleurs, une scène de la TT 54 tend à prouver que le culte continuait à Karnak au moins sous les premiers Ramessides. Cette tombe a été aménagée sous Thoutmosis IV ou Amenhotep III, puis réoccupée au début de la XIXe dynastie par Kaner, un supérieur de l’atelier-šn‘ de Khonsou40. Malgré la confusion due à la réappropriation du décor, une scène montre nettement Kaner à l’intérieur d’un petit grenier en train d’adorer Rénénoutet qui prend la forme d’un grand cobra adossé au mur du fond, tandis que des employés procèdent à l’estimation des quantités de blé stocké (fig. 5). La légende est assez mal tracée et très effacée, mais on peut y lire les signes , où l’on suppose que le restaurateur ramesside a tracé le signe au lieu de 41. On pourrait alors lire Rnnw[tt] ḥr[yt-ỉb] <šnwt>, « Rénénoutet qui réside dans le grenier42 ». Étant donné l’omniprésence de Khonsou et de son temporel dans les titres de Kaner et les textes de cette paroi43, on peut légitimement supposer que ce grenier et cette Rénénoutet étaient rattachés au domaine de ce dieu à Karnak, au moins lors de la récupération de la tombe.
22Quant au grenier d’Amon, il faut attendre la XXe dynastie pour retrouver des traces plausibles d’une chapelle de Rénénoutet dans son enceinte. Norman et Nina Davies ont décrit une scène peinte dans la tombe d’un certain Pahemnetjer (TT 284), qui se déroule à l’intérieur d’un vaste grenier aux murs crénelés (fig. 6) – vraisemblablement celui d’Amon puisque Pahemnetjer était « scribe des offrandes divines des dieux souverains de Thèbes ». La cour principale du bâtiment est traversée par une allée centrale, reliant le portail d’entrée et une chapelle installée contre le mur du fond. La porte de celle-ci est encadrée par deux grands cobras. Ces deux cobras, et leur position, rappellent ceux visibles sur un relief probablement amarnien conservé au musée de Florence44 (fig. 7) : contre le mur au fond d’une cour allongée desservant des magasins, deux statues de cobras à tête de femme, posées sur des socles à corniche, encadrent une haute stèle cintrée. Ces serpents, pas plus que ceux du grenier de la TT 284, ne sont identifiés par une légende.
23Il est tentant de voir dans ces images anonymes la figure tutélaire de Rénénoutet, mais il pourrait aussi s’agir de n’importe quelle déesse représentée sous la forme de l’uræus, notamment Ouret-Hékaou. Cette dernière est vraisemblablement la déesse cobra adorée au fond du grenier représenté dans un relief de Tjaouy (de son vrai nom Sa-Rénénoutet), chef des prêtres et directeur de l’atelier-šn‘ d’Ouret-Hékaou sous Amenhotep III45.
II.2. Dans les greniers du Delta aux époques tardives
24De rares mentions écrites plus tardives témoignent de la présence de Rénénoutet dans des greniers de Basse Égypte, mais leur caractère isolé et leurs spécificités en limitent l’exploitation. Le papyrus dit « géographique » trouvé à Tanis mentionne une Rnnwt (t) nb (t) […] ḫt m šnwty (n) pr Ỉmn, « Rénénoutet, dame de […] denrées dans le (double) grenier du domaine d’Amon46 ». Si le document a été trouvé dans des niveaux d’époque romaine, si le tracé des hiéroglyphes est visiblement tardif, certains contenus pourraient être plus anciens, bien que l’attribution du texte par son copiste à l’époque de Khéops soit fortement sujette à caution. La graphie du nom de Rénénoutet, par la combinaison des signes et l’ajout du trait au-dessus du cobra, fait plutôt penser à des écritures ramessides47. Il semble en effet que les textes ptolémaïques n’utilisaient déjà plus la combinaison des signes et , qui ne transcrivaient plus alors la prononciation réelle48. De même, il est très rare que les textes de ces époques omettent, comme ici, le signe de l’œuf qui était devenu depuis longtemps un déterminatif des noms de déesses. Nous pouvons donc supposer que le copiste a effectivement reproduit des données telles qu’il les a trouvées dans un document déjà ancien, peut-être ramesside ou de la Troisième Période intermédiaire. Le texte confirmerait donc la présence, à une époque antérieure à l’Empire romain, d’une Rénénoutet chargée de denrées dans le grenier d’un domaine d’Amon – peut-être celui de Tanis.
25En revanche, sur une table d’offrandes de Nectanébo II, « Rénénoutet dans le grenier » apparaît au sein d’une liste de divinités présentes dans les ensembles sacrés d’Athribis49. À la suite de la découverte, à proximité du temple d’Horus-Khentykhéty, d’un sceau en calcaire servant à estampiller les briques et portant l’image et les épithètes de Rénénoutet, K. Myśliwiec a supposé qu’un bâtiment en briques dédié à la déesse devait exister dans la ville. L’objet provenant d’une couche de la seconde moitié du ive s. av. J.-C., l’égyptologue a suggéré qu’il pourrait s’agir du grenier mentionné sur la table d’offrandes de Nectanébo II50. Toutefois, lui-même ne cache pas la fragilité de cette hypothèse.
26Enfin, quelques mentions dans les temples gréco-romains laissent supposer que la déesse a continué de veiller à la prospérité des greniers sous les Lagides et dans la province romaine51. L. Habachi a d’ailleurs découvert les restes de ce qui pourrait être un grenier à ciel ouvert d’époque gréco-romaine à Tell Basta, dans lequel une grande statue de cobra manifestait peut-être encore la présence vigilante de Rénénoutet au débouché d’un axe central, comme dans les scènes de la TT 284 ou du relief de Tjaouy52.
II.3. La patronne est au fond de la cour
27Ces représentations du culte rendu à Rénénoutet ou à une divinité équivalente montrent une disposition alternative à la chapelle dans le grenier d’Amon sous Amenhotep III. La déesse loge au fond de la (dernière) cour, à l’aboutissement de l’axe central. L’objet du culte, qui est représenté en grandes dimensions53, peut apparaître en plein air ou dans une petite chapelle.
28Ces dispositifs appellent une comparaison avec une scène de la tombe de Tjay (TT 23) à Gournah (fig. 8), qui représente le défunt, un scribe royal de Mérenptah, à l’intérieur du « bureau des lettres du palais dans le domaine de Ramsès-Méryamon ». Comme les greniers depuis la XVIIIe dynastie (fig. 2, 6) ou comme l’entrepôt du relief de Florence (fig. 7), le plan de ce bâtiment est structuré par un axe central, scandé par une succession de portes séparant des espaces distincts. La première salle est une zone de rédaction et de réception des missives, tandis qu’à l’aboutissement de l’allée centrale se trouve une chapelle dédiée à Thot sous forme de babouin.
29Dans le bureau des dépêches royales comme dans les structures de stockage, une divinité spécialiste présidait donc aux activités de l’administration. À ce propos, il est significatif que le babouin qui trône dans le sanctuaire axial soit désigné comme Ḏḥwty n [t]ȝ st nȝy š‘wt Prwy-‘ȝ, « le Thot du bureau des lettres du Palais54 ». Il est la manifestation ad hoc du grand dieu des écrits, spécialement affectée à cette administration, exactement comme Rnnwtt špst nt šnwt, « la noble Rénénoutet du grenier55 ». Ces divinités spécialistes disposaient d’un lieu de culte à l’intérieur même des bâtiments où se déroulaient les activités économiques qu’elles patronnaient.
30La position éminente qui est donnée à l’effigie de la divinité rappelle la position de toute statue de culte dans un temple classique ou du trône royal dans les palais cérémoniels. Dans le grenier d’Amon sous la XVIIIe dynastie, c’est la stèle matérialisant la présence d’Amon-Rê, maître des lieux et dispensateur de bienfaits, qui se trouvait dans cette position magistrale56 (fig. 2). Ce n’est pas le cas dans les greniers du relief de Tjaouy et de la TT 54 (fig. 5), et sans doute pas non plus dans la TT 284 (fig. 6). Dans ce cas précis, la paire d’uræus qui précède la chapelle ne devait certainement pas être l’objet principal du culte : de même que la grande statue de Thot dans la chancellerie de Ramsès II, qui est annoncée par deux statues de babouin, est la seule à recevoir des offrandes (fig. 8), de même la divinité à l’intérieur de cette chapelle devait être le véritable objet du culte, sans doute une troisième statue de la déesse. C’est d’autant plus probable que la scène immédiatement voisine du grenier montrait Pahemnetjer adorant une déesse cobra coiffée des attributs hathoriques, fréquents chez Rénénoutet57. Si le bâtiment de la TT 284 est bien une version ramesside du grenier d’Amon, hypothèse suggérée par les époux Davies, le déplacement de la chapelle de la déesse cobra depuis l’entrée, qui était sa position sous Amenhotep III, vers le fond de la cour serait lourde de signification quant à la position relative d’Amon dans ses propres réserves.
31L’existence de ces sanctuaires à l’intérieur de bâtiments à vocation d’abord économique et administrative invite à relativiser la distinction moderne entre le domaine du sacré et les domaines d’activités économiques. La conservation et la gestion des stocks de grain, ou de nourriture en général, étaient affaire de religion, et pas seulement lorsqu’il s’agissait des réserves destinées à l’offrande divine. Ce mélange des genres – de nos genres –, que l’on sait être une caractéristique de la civilisation égyptienne, se manifeste également dans le profil des officiants qui avaient la charge du culte de la Rénénoutet du grenier.
III. Les hommes du culte de Rénénoutet dans les greniers
32L’accomplissement des rites dans les structures de stockage de la nourriture incombait logiquement à ceux qui étaient chargés d’assurer la prospérité des réserves, ceux qui avaient intérêt à y maintenir la protection de Rénénoutet, sans laquelle ils ne pouvaient mener à bien leur mission.
III.1. « Le roi comme prêtre de la moisson58 »
33Le souverain en personne a pu accomplir les rites dans le grenier d’Amon à Karnak, au moins lors des cérémonies de l’engrangement à la XVIIIe dynastie59. Dans la TT 48, Amenhotep III est représenté au centre du grenier, la main tendue en direction du kiosque de Rénénoutet60. Le socle sous ses pieds pourrait indiquer que cette image est en fait celle d’une statue qui se serait trouvée dans le bâtiment au moins pour l’occasion. Toutefois, le roi est aussi représenté dans la cour principale en train de faire des offrandes au dieu solaire, et l’on peut supposer qu’il était effectivement présent et qu’il aurait également consacré les offrandes à Rénénoutet. Contrairement aux tableaux gravés dans les temples, qui montrent une action cultuelle théorique, mais actualisée par l’image, cette scène dans une tombe de particulier pourrait reproduire une situation réelle, quoique éventuellement idéalisée, à l’instar des scènes de récompense ou de rapport officiel, pour faire vivre la proximité du défunt avec le roi et sa participation aux missions souveraines. D’ailleurs, s’il vivait probablement la plupart du temps à Memphis, Amenhotep III résidait parfois à Thèbes, ne serait-ce qu’à l’occasion de ses jubilés ou d’autres cérémonies61, si bien que sa présence physique est envisageable. Cela est d’autant plus probable que cette journée d’action de grâces était certainement un moment fort de son emploi du temps, une fête agricole cruciale pour le pays et la royauté, et plus particulièrement dans son processus de déification62.
34Sous la XXe dynastie, dans le grenier de la TT 284, un homme porte l’image réduite d’un souverain coiffé du khepresh (fig. 6). À l’époque de ce tableau, le roi résidait une partie de l’année dans le Delta63, et sa présence à Thèbes n’est plus assurée. À vrai dire, la statue la plus importante de la scène – par sa taille et son emplacement – est celle de la reine, à moins qu’il ne s’agisse de l’épouse royale elle-même, dans son rôle de chanteuse-šm‘yt64.
35En dehors des cérémonies visiblement exceptionnelles représentées dans ces tombes, il ne semble pas que le culte de Rénénoutet dans les greniers ait nécessité la présence des souverains. La Rénénoutet de tel ou tel domaine restait une déesse secondaire, une divinité auxiliaire dont le culte était confié à des substituts.
III.2. Les administrateurs et employés des greniers
36Lorsque le souverain ne pouvait remplir ses missions, celles-ci étaient déléguées à l’échelon inférieur de la hiérarchie, qui pouvait les déléguer à son tour. Ainsi, lors des célébrations qui étaient des jours de fête pour les greniers, on peut voir des administrateurs et employés des domaines agricoles rendre un culte à Rénénoutet à la place du souverain, sans qu’on leur connaisse de titre sacerdotal ad hoc. C’est notamment le cas du comptable du grain d’Amon Djéserkarêséneb (TT 38 ; fig. 1) et du directeur du double grenier de Haute et Basse Égypte Khâemhat (TT 57). Ce dernier, dans la scène de culte en question (fig. 4), est suivi par deux porteurs d’offrandes de dimensions légèrement inférieures et relativement moins bien vêtus que lui. Ces auxiliaires sont sans doute les fonctionnaires identifiés en légende, un scribe de l’administration royale et un comptable du grenier du palais65. En tant que directeur du double grenier, Khâemhat avait la préséance sur eux, c’est pourquoi c’est lui qui entrait en contact avec la déesse.
37Dans la tombe d’Ipouy à Deir el-Médina (TT 217), un notable non identifié consacre des offrandes à une déesse cobra à l’intérieur d’un petit grenier (fig. 9). Si l’on ignore son statut et ses fonctions officielles, son pagne long et sa perruque témoignent de son rang supérieur dans la petite société de ce grenier. En effet, le porteur d’offrandes qui le suit, comme les deux individus occupés – avec plus ou moins de zèle – à éloigner les oiseaux, sont de jeunes garçons nus. Ils forment sans doute le petit personnel de l’établissement, recruté pour accomplir des tâches simples dans un grenier modeste, dont l’objet de culte est une statue de particulier66. Cette scène semble offrir une version plus populaire, mais comparable point par point, du relief de la tombe de Khâemhat. Elle témoigne à sa manière que le culte de Rénénoutet dans les greniers pouvait être assuré par des particuliers, dont la notabilité dépendait de l’importance de l’institution, assistés de subordonnés au statut visiblement proportionnel.
38Les scènes de culte rendu par des particuliers ne manquent pas dans les tombes et les monuments de piété personnelle du Nouvel Empire. Mais, alors que ces représentations dépeignent un face à face idéel et atemporel entre l’individu et la divinité, les scènes d’offrandes à la Rénénoutet du grenier montrent un personnage non royal en train d’accomplir les rites dans un cadre bien concret : l’aire de vannage ou le grenier. Ce n’est pas en leur nom propre, mais en tant que fonctionnaires, par délégation du souverain et au bénéfice de l’État ou du temple d’Amon, que Djéserkarêséneb, Khâemhat et ses adjoints rencontrent la déesse. Leurs tableaux funéraires documentent donc moins leur religiosité individuelle qu’une partie de leur activité professionnelle. Il est vrai, en revanche, que se faire représenter dans l’exercice de leurs fonctions devait garantir la permanence post mortem de leur statut social privilégié, ainsi qu’une proximité éternelle avec la « dame de la nourriture », excellente pourvoyeuse d’offrandes. Cet accaparement du monopole royal théorique concernant les cultes allait peut-être d’autant plus de soi que ce culte pouvait être conçu comme une activité agricole parmi d’autres, relevant de la gestion des ressources alimentaires.
III.3. Les prêtres titulaires
39Cette conception est parfaitement illustrée par l’oushebti AE 33925 du British Museum (fig. 10). Ce fragment en stéatite, haut de 17,6 cm et daté de la XIXe dynastie, est inscrit au nom d’un certain Hat qui cumulait les fonctions de w‘b n Rnnwtt, « prêtre pur de Rénénoutet », et de ḫȝy n šnwt ḥtp-nṯr, « mesureur (du grain) du grenier des offrandes divines ». Même si ce n’est pas explicite, on connaît suffisamment de Rénénoutet rattachées au grenier des offrandes divines67 pour penser que Hat assurait le culte de la déesse dans l’établissement où il officiait par ailleurs.
40Le titre de prêtre de Rénénoutet est remarquablement rare dans l’histoire égyptienne, et les ministres de la déesse du grenier le sont d’autant plus. Le seul homologue de Hat attesté aujourd’hui est un certain Houy. Il est connu – et encore, si peu – par une statue-cube fragmentaire en roche cristalline, de 21 cm de haut et 9,5 cm de large, conservée à l’Institut d’égyptologie de Strasbourg sous le numéro 18968 (fig. 11). Datée probablement de la XXe dynastie, elle a été acquise à Louqsor en 1896 et présente sur sa face avant l’image gravée de « l’épouse du dieu Ahmès-Néfertari ». Sur le pilier dorsal, une colonne de texte dédie ce petit monument : n kȝ n w‘b n Rnnw(tt) (nt) šnwt (y) Ḥwy, « Au ka du prêtre pur de la Rénénoutet du (double) grenier, Houy69 ».
41Le culte de la déesse du grenier sous les Ramessides semble donc avoir été assuré par des prêtres purs, des ritualistes attitrés, et s’apparenter aux cultes classiques des temples. Même s’il ne faut pas systématiquement supposer qu’un prêtre pur se trouvait plus bas dans l’échelle sacerdotale qu’un prêtre desservant, ou « prophète » (ḥm-nṯr), la différence résidant avant tout dans leurs fonctions70, le ministre de la Rénénoutet du grenier ne devait pas occuper une position éminente dans la hiérarchie. Nous ne savons pour ainsi dire rien de Houy, mais le fait que le seul titre inscrit sur son monument soit celui de prêtre pur laisse deviner un rang social modeste. Quant à Hat, il était également mesureur du grain, un métier qui n’était pas parmi les plus enviables du secteur agricole, mais qui jouait un rôle crucial dans l’administration et sur lequel pesaient de lourdes responsabilités économiques et déontologiques71. Ces prêtres de la Rénénoutet du grenier semblent donc avoir appartenu à une classe moyenne du clergé et de l’administration, assez privilégiés pour se payer de petites statues en pierre inscrites, qui témoignent en même temps de la modestie de leur avancement. Toutefois, d’autres prêtres encore inconnus avaient peut-être des statuts plus élevés et des fonctions plus étendues.
42On ignore si le titre de prêtre pur de Rénénoutet était une spécificité ramesside ou s’il existait déjà au temps de Djéserkarêséneb et Khâemhat, à la XVIIIe dynastie, ce qui limite la comparaison de l’une et l’autre des situations. Pourtant, on est en droit de se demander si le culte de la déesse incombait systématiquement à tel ou tel employé du grenier comme une partie intégrante de sa profession. On ignore aussi ce qui faisait la spécificité des prêtres titulaires, alors que des membres du personnel sans titre sacerdotal pouvaient mener les rites à la XVIIIe dynastie. On peut supposer qu’un tel titre garantissait certains revenus et prérogatives. Il traduisait peut-être aussi la régularité de l’activité, contre une implication du souverain et des administrateurs limitée aux grandes célébrations de l’engrangement (jour de mesurer le grain vanné dans les TT 38 et TT 48 ; jour de la naissance de Néper dans la TT 57).
43Ces prêtres étaient avant tout des professionnels, des techniciens détenteurs d’un savoir-faire, qui faisaient leur travail en s’attirant les faveurs de la patronne du grenier. A priori, on ne peut parler d’une piété personnelle les concernant72. Toutefois, la dévotion profonde de ces fonctionnaires envers leur génie économique se laisse peut-être deviner, derrière leur probité professionnelle, à travers d’autres documents.
III.4. Dévotion personnelle pour une patronne professionnelle
44Une proportion importante des invocations à Rénénoutet dans des monuments privés est due à des personnages amenés par leur métier à fréquenter les réserves et leur déesse. Ce fait témoigne peut-être d’un attachement sincère prenant ses racines dans le cadre professionnel, et étendu au-delà.
45Sénenmout apparaît comme le champion de Rénénoutet, avec au moins cinq monuments connus l’invoquant, plus ou moins directement, par le texte ou l’image73. Il est évident que l’utilisation du cobra dans l’écriture cryptographique du nom « Maâtkarê », employée à profusion par Hatchepsout et son intendant74, a facilité la prolifération d’images de Rénénoutet. À l’inverse, l’affichage du cryptogramme royal a été facilité par les choix religieux et iconographiques de Sénenmout, qui pouvait à la fois manifester son dévouement à sa bienfaitrice royale et rendre hommage à la patronne divine de ses activités professionnelles – assimilant subtilement l’une et l’autre – tout en valorisant ses fonctions dans l’administration du temporel des dieux.
46De son côté, le fils royal de Koush sous Ramsès II, Sétaou, a dédié au moins trois stèles à Rénénoutet, trouvées à Ouadi Halfa et Ouadi es-Séboua75. Sur ce dernier site, deux stèles ont été exhumées dans les avant-cours du temple, au sud de l’axe central, à proximité d’une petite cour qui comptait deux constructions circulaires ouvertes à leur base, certainement des silos à grain76. Vraisemblablement, Rénénoutet apparaissait ici comme la patronne des réserves où l’on stockait le grain nécessaire au fonctionnement économique et rituel du temple. Or Sétaou dit, dans un autre de ses monuments installé sur place : « J’ai construit le temple de Méryamon-Ramsès dans le domaine d’Amon, en creusant dans la montagne occidentale (…) tandis que ses magasins étaient remplis de produits atteignant [le ciel], à savoir de l’orge, de l’épeautre et du blé abondant77. » Ce soin porté aux réserves par le chef de l’administration royale en Nubie explique sans doute la place relativement importante qu’occupait Rénénoutet dans son panthéon personnel.
47J’ai aussi montré ailleurs que des administrateurs agricoles avaient la possibilité, au moins sous Thoutmosis III, d’ériger une statue personnelle dédiée à Rénénoutet et d’autres dieux à l’intérieur des greniers des offrandes divines78. Cela leur permettait non seulement de bénéficier du reversement des offrandes présentées aux divinités du grenier, mais aussi d’affirmer leur dévotion à ces dernières, tout en attirant la bienveillance de Rénénoutet à l’endroit même où son action bénéfique était espérée. Sétaou n’avait sans doute pas d’autre objectif en la faisant apparaître sur ses stèles à Ouadi es-Séboua.
48Il y a des raisons de penser que la déesse accompagnait aussi ses dévots au-delà de leur cadre professionnel, dans leur vie privée et jusqu’à la tombe, où l’on attendait d’elle qu’elle garantisse les provisions pour les offrandes, et peut-être les linceuls. Elle est ainsi invoquée parmi des divinités funéraires dans quelques monuments privés, dont les plus notables appartiennent à des fonctionnaires de l’administration des greniers et des ressources agricoles. L’exemple le plus révélateur sans doute se trouve au plafond de la TT 82. Une prière y est adressée à Rénénoutet par Amenemhat, qui cumulait diverses fonctions agricoles sous Thoutmosis III et Amenhotep II, notamment celle de sš ḥsb ỉt m šnwt ḥtp-nṯr n Ỉmn, « scribe comptable de l’orge dans le grenier des offrandes divines d’Amon ». L’inscription demande offrandes et provisions à Rnnwtt ỉmyt tȝ ḏsr špst wrt nt ẖrt-nṯr ḥnwt nt nỉwt nt nḥḥ, « la Rénénoutet qui est dans la terre sacrée, la grande noble de la nécropole, souveraine de la ville d’éternité79 ». Étant donné que le culte de Rénénoutet est fréquemment attesté à cette époque80, il est difficile de ne pas relier les fonctions de ce personnage et son appel à une forme funéraire de la déesse, qui devait tenir une place si particulière dans sa vie professionnelle. C’est d’ailleurs directement, et à la deuxième personne, qu’Amenemhat s’adresse à Rénénoutet, comme dans d’autres tombes les paysans occupés à vanner le grain ou à fouler le raisin81. Or il ne prend pas cette liberté dans les prières parallèles qu’il adresse à Maât, à Amon, à Anubis, à Horakhty, au Nome thinite et à l’Occident. Cela peut n’être qu’une coïncidence, ou bien traduire une certaine familiarité avec la déesse, que l’on ne saurait imputer seulement à son supposé rang de divinité mineure.
49Rappelons en dernier lieu le cas de Sa-Rénénoutet, qui était supérieur des prêtres purs, directeur de l’atelier-šn‘ d’Ouret-Hékaou et qui supervisait l’approvisionnement du grenier de cette dernière, selon le texte porté par une stèle du musée de Boston82. Que le nom de naissance de ce personnage, qui préside au culte d’une déesse cobra à l’intérieur d’un grenier, soit littéralement « Fils de Rénénoutet » n’est sans doute pas un hasard. Comme l’a écrit A. Forgeau, « le nom égyptien est programme depuis l’Ancien Empire, il est coutumier d’y inscrire, entre autres motivations, la future activité à laquelle sera consacré l’enfant83 ». Peut-être la dévotion à Rénénoutet décelable dans l’onomastique, allant de pair avec certains postes dans l’administration des domaines, était-elle une tradition familiale.
50Les hommes attachés au culte de Rénénoutet dans le grenier témoignent bien de l’interpénétration constante de la religion et des activités économiques. Ils étaient des administrateurs ou des employés subalternes de l’institution, portant parfois un titre sacerdotal qui ne faisait qu’officialiser une fonction qui leur incombait sans doute de fait. Avec eux, les structures de stockage apparaissent comme un lieu de religiosité, où le mortel ressentait la présence de la divinité en constatant sa générosité, où il implorait sa bienveillance et la remerciait pour ses bienfaits.
Conclusion : au-delà du grenier
51Adorée dans le grenier, en particulier au moment de l’engrangement de la récolte, Rénénoutet veillait sur le grain soumis à sa garde tutélaire jusqu’à ce que les employés du domaine viennent le prélever pour fabriquer le repas des maîtres des lieux. Il semble que la « dame du grenier » veillait aussi sur les céréales et la nourriture là où elles étaient utilisées. De même que le blé et l’orge n’étaient pas les seules denrées sur lesquelles veillait Rénénoutet, le grenier n’était pas la seule institution utilisant les stocks alimentaires sur laquelle la déesse exerçait sa tutelle.
52Ainsi la déesse semble-t-elle familière des activités culinaires de l’atelier-šn‘, où les denrées tirées des réserves étaient transformées pour le repas divin. Par exemple, une statuette de « la Rénénoutet du domaine de Montou » a été trouvée dans ce qui était vraisemblablement l’atelier-šn‘ du Trésor de Thoutmosis Ier à Karnak sous la XVIIIe dynastie84. Rénénoutet pouvait aussi être adorée dans les cuisines de particuliers si l’on en croit quelques exemples du Nouvel Empire. À Deir el-Médina notamment, B. Bruyère a exhumé des fragments de naos domestiques dédiés à Rénénoutet et à Méresger, pourvoyeuses de nourritures, « dans de nombreuses cuisines » du village85.
53Finalement, le grain prélevé sous le regard de la « maîtresse du grenier » ne servait pas uniquement à la préparation des repas du dieu ou de la famille. Il pouvait également être destiné à divers paiements et salaires, les céréales servant largement de monnaie d’échange86. Qu’elle veille sur le grain comme base de l’alimentation ou comme ressource thésaurisée, que l’on considère le grenier comme une réserve alimentaire ou comme une banque, Rénénoutet ne s’est pas éloignée de son rôle historique de gardienne des trésors et du Trésor87. On conçoit alors l’importance qu’a pu avoir cette divinité dite « secondaire », mais qui régnait pourtant, depuis le Nouvel Empire au moins, sur les greniers à grain qui ont fait la puissance économique et démographique de l’Égypte ainsi que sa réputation jusqu’au cœur des textes bibliques et des cultures qui s’en sont imprégnées. Son culte, (ré)conciliant le sacré et l’économique, rappelle qu’en Égypte, les dieux logeaient partout, dans la pure pénombre encensée du Saint des Saints, au cœur du palais divin, ou entre les tas de grain, au fond de la cour.
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Strudwick 1996
N. Strudwick, The Tombs of Amenhotep, Khnummose, and Amenmose at Thebes (Nos. 294, 253, and 254), Griffith Institute Publications, Oxford, 1996.
Thiers, Zignani 2013
C. Thiers, P. Zignani, « Le domaine du temple de Ptah à Karnak. Premières données de terrain », CahKarn 14, 2013, p. 493-513.
Traunecker 2005
C. Traunecker in J. Leclant (éd.), Dictionnaire de l’Antiquité, Paris, 2005, p. 1793, s.v. « Prêtre ouab ».
Valbelle 1972
D. Valbelle, « Le naos de Kasa au musée de Turin », BIFAO 72, 1972, p. 179-194.
Van Gennep 1999
A. Van Gennep, Le Folklore français, vol. II : Cycles de mai, de la Saint-Jean, de l’été et de l’automne, Paris, 1949, 1999 (4e éd.).
Van Siclen 1982
C.C. Van Siclen III, Two Theban Monuments from the Reign of Amenhotep II, San Antonio, 1982.
Vandier 1961
J. Vandier, Le Papyrus Jumilhac, Paris, 1961.
Vernus 2009
P. Vernus, Dictionnaire amoureux de l’Égypte pharaonique, Paris, 2009.
Wegner 2009
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Wreszinski 1923
W. Wreszinski, Atlas zur altägyptischen Kulturgeschichte, Leipzig, 1923.
Yoyotte 1995
J. Yoyotte, « Quelques divinités retrouvées : Nenout, obscure collègue d’Ermouthis, et les collèges de génies économiques », ACF 95, 1995, p. 647-683.
Annexe
Notes de bas de page
1 Pour un témoignage plus tardif, mais très éloquent, voir Antonius Gonzales, Voyage, p. 121.
2 Mougenot 2014.
3 Voir par exemple, dans la tombe de Rekhmirê (TT 100), une inscription présentant le vizir comme ḥsy (n) Npr ḥsy n Rn (n) wtt ḥsy n Sḫȝt-Ḥr (ỉ) r(y)-p‘t ḥȝt (y)-‘ mḥ (.w) wḏȝw sḫdw šnwt, « le favori de Néper, le favori de Rénénoutet, le favori de Sekhat-Hor, le noble, le prince qui remplit les entrepôts et enrichit les greniers » : Davies No. 1943, p. 39-40, pl. XL, 2.
4 Sauneron 1998, p. 90.
5 Brooklyn Museum of Fine Arts, 67.68 ; James 1974, p. 75-77, pl. XLVI.
6 Boston, Museum of Fine Arts, 24.980. Je tiens à remercier L. Berman de m’avoir facilité la lecture de l’inscription sur ce monument et de m’autoriser à la publier ici.
7 Christophe 1951, p. 87, pl. XV ; Helck 1960, p. 24 ; Helck 1975, p. 123.
8 Helck 1960, p. 27.
9 Musée égyptien du Caire, CG 42117 et CG 42123 : Legrain 1906, p. 65-66, 73-74, pl. LXVIII, LXXIII.
10 Mougenot 2012, p. 201-202.
11 Thiers, Zignani 2013, p. 509-510.
12 Davies Ni. 1963, p. 4, pl. II.
13 Ägyptisches Museum und Papyrussammlung, inv. 18532 (Thoutmosis IV ou Amenhotep III) : Parkinson 2008, p. 118.
14 Amenhotep II : Van Siclen 1982, p. 19, fig. 12.
15 Thoutmosis IV-Amenhotep III : Strudwick 1996, p. 37-39, pl. 2B, XIV.
16 Amenhotep III : Säve-Söderbergh 1957, p. 41-43, pl. XLI-XLII.
17 Davies No. 1929, p. 41-48 ; Van Siclen 1982, p. 18-25. Voir aussi Bickel 2006, p. 18-21.
18 Prisse d’Avennes 1847, pl. XLII ; Wreszinski 1923, pl. 198.
19 Wegner 2009. Un grand merci à M.-L. Arnette pour m’avoir suggéré cette interprétation et signalé cette référence bibliographique.
20 Valbelle 1972.
21 Bernhauer 2005, p. 29-30.
22 Comparer Prisse d’Avennes 1847, frontispice, et Manniche 1988, p. 26-28.
23 Comme équivalent de nbt kȝw, « dame de la nourriture » ; Robins 1999, p. 109.
24 Van Siclen 1982, p. 30.
25 JE 36912 : Broekhuis 1971, p. 53, 195 ; Cachette de Karnak, CK 273 (consulter la base de données en ligne : http://www.ifao.egnet.net/bases/cachette).
26 JE 39394 : Van Siclen 1982, p. 30-31, où il est souligné qu’Amenhotep II a dû effectuer d’importants travaux dans le grenier d’Amon.
27 Bickel 2006, p. 14.
28 Version de la TT 38 ; la TT 48 indique par erreur le 3e mois de la saison péret, sans doute par l’oubli ou la disparition d’un trait.
29 Depuydt 1997, p. 116, fig. 15.
30 Schott 1950, p. 103.
31 Van Gennep 1999, p. 1917.
32 Altenmüller 1980, col. 581.
33 Frazer 1983, p. 193-194.
34 Houlihan 1986, p. 75-77. Voir aussi Blackman 1924, pl. XIV ; Parkinson 2008, p. 112, 118.
35 Voir le témoignage de Frederick Hasselquist, en Égypte en 1750-1751, cité dans Houlihan 1986, p. 76.
36 Houlihan 1986, p. 78.
37 Voir Bouanich-Aquain, dans ce volume ; Hamonic, dans ce volume ; Teeter, dans ce volume.
38 Bickel 2006, p. 14-15.
39 Nelson 1981, pl. 220 ; Gardiner 1935, p. 30, pl. 57.
40 Polz 1997, p. 134-135.
41 Voir la stèle de Sénenmout évoquée plus haut et Helck 1960, p. 27.
42 Cette épithète rare est attestée sur une table d’offrandes au nom de Thoutmosis III trouvée à Coptos ; voir supra.
43 Polz 1997, p. 74-79, pl. 24.
44 Florence, Museo Egizio, 5412 ; Badawy 1948, p. 126 ; Roccati, Capriotti-Vittozzi (éd.) 2002, p. 137-138 ; Chappaz et al. 2008, p. 268.
45 Boston, Museum of Fine Arts, inv. 1972.651 : Simpson 1973, p. 70-79 ; Kozloff 1993.
46 British Museum, EA 10673 : Griffith, Petrie 1889, pl. XII.
47 Collombert 2005-2007, p. 23.
48 Lacau 1970, p. 47. Voir par exemple le papyrus Jumilhac, comparable à celui de Tanis : Vandier 1961, pl. IV, col. 8, pl. XII, col. 9.
49 Turin, Museo Egizio, inv. 22055 : Habachi 1977, p. 95, 98, 158. La déesse est en réalité désignée par le nom Rnt qui, s’il n’évoque pas la forme classique de Rénénoutet, fait référence au moins à une version locale de la déesse, nommée parmi d’autres divinités serpents ; Yoyotte 1995, p. 664.
50 Myśliwiec 1997.
51 Par exemple Chassinat 1932, p. 251, pl. CLXXVII ; Chassinat, Daumas 1965, p. 11, 131.
52 Habachi 1957, p. 93-94 ; Van Siclen 1982, p. 38-39.
53 Le fragment de cobra trouvé par L. Habachi à Tell Basta l’est également : Habachi 1957, p. 93-94.
54 Borchardt 1907, p. 59.
55 Voir plus haut les statues de Sénenmout (CG 42117) et Sendjéhouty (CG 42123).
56 Van Siclen 1982, p. 26 ; Davies No. 1929, p. 48-49.
57 Davies, Davies 1939, p. 155.
58 Davies No. 1929, p. 41 : « The King as Priest of the Harvest ».
59 Davies No. 1929, p. 41-49 ; fig. 2 supra.
60 Säve-Söderbergh 1957, pl. XLII.
61 Berman 1993, p. 31 ; Cabrol 2000, p. 212-215.
62 Bickel 2006, p. 20-22.
63 Grandet 1993, p. 67-70.
64 Davies, Davies 1939, p. 155.
65 Prisse d’Avennes 1847, pl. XLII ; Wreszinski 1923, pl. 198.
66 Mougenot 2012, p. 202-203.
67 Mougenot 2012, p. 201-202.
68 PM I2, p. 794.
69 Le premier déchiffrement de l’inscription par J. Černý a été proposé à J. Leclant par R. Moss dans une lettre du 28 mars 1962. Je dois à Fr. Colin l’autorisation de publier ces informations et la photographie de cette statue : qu’il en soit très sincèrement remercié.
70 Traunecker 2005.
71 Sur ce point, voir les réflexions de P. Vernus (2009, p. 167-170).
72 Dunand, Zivie-Coche 2006, p. 140-141.
73 Stèle de Karnak-Nord (Christophe 1951, p. 87 ; Helck 1960, p. 24) et statues CG 42117 (Legrain 1906, p. 65, pl. LXVIII), Louvre E 11057, Brooklyn Museum 67.68 et Kimbell Art Museum AP 85.2 (Roehrig [éd.] 2005, p. 122-123, 128-130).
74 Robins 1999, p. 108-110.
75 L’une au British Museum : EA 1055 (Bierbrier 1982, p. 20, pl. 44-45) ; les deux autres au Caire : JE 41394 (Gauthier 1912, p. 36-37) et JE 41396 (Barsanti, Gauthier 1911, p. 75-77, pl. III).
76 Gauthier 1912, p. 34-35, pl. XII B, XIII A.
77 Stèle Caire JE 41395 ; trad. Obsomer 2012, p. 375.
78 Mougenot 2012.
79 Davies, Gardiner 1915, p. 43, pl. XXX.
80 Voir supra.
81 TT 96 : Urk. IV, 1419. TT 100 : Davies No. 1943, p. 42, pl. XLV. TT 90 : Davies No. 1923, p. 31, pl. XXX.
82 Museum of Fine Arts, 1972.651. Voir supra ; Simpson 1973, p. 70-79 ; Kozloff 1993.
83 Forgeau 1984, p. 165.
84 Jacquet-Gordon 1999, p. 32-35 ; Maruéjol 2007, p. 184. Voir aussi la stèle du musée des Beaux-Arts de Budapest no 51.2148, dédiée à « la Nekhbet-Rénénoutet de l’atelier-šn‘ », dans Kótay, Liptay (éd.) 2013, p. 48-49.
85 Bruyère 1939, p. 77, pl. XV-XX, et p. 287.
86 Grandet 1993, p. 150-151.
87 Mougenot 2014, p. 156-165.
Auteur
Conservateur du patrimoine, musée des Civilisations de l’Europe et de la Méditerranée
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