Minorités et justice environnementale
p. 43-60
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Mots-clés : éthique environnementale, diversité biologique, empreinte écologique, changement climatique, risque industriel
Texte intégral
1Dans les années 1970, la réflexion morale s’est donné un nouvel objet : l’environnement. Il s’agissait, devant la manifestation de problèmes environnementaux, de s’interroger sur la relation de l’homme et de la nature et d’en faire apparaître la dimension morale1. Quarante ans après, où en sommes-nous ? La réponse est claire : nous en sommes à l’époque de la globalisation. En 1992, le premier Sommet de la Terre, à Rio de Janeiro, a manifesté publiquement la dimension mondiale, ou planétaire, des questions environnementales et, aujourd’hui, le phénomène qui retient le plus l’attention est le changement climatique, changement global par excellence, puisque, de quelque point du globe que soient émis des gaz à effets de serre, ceux-ci ont le même effet. C’est cet horizon global que se donne aujourd’hui la réflexion morale sur l’environnement.
2La globalisation des questions environnementales a conduit à un recentrement sur les humains des questions éthiques. L’éthique environnementale, à ses débuts, se préoccupait essentiellement de protection de la nature ; on parle maintenant de développement durable, défini à la Conférence de Rio comme un développement économique et social qui vise à « satisfaire équitablement les besoins relatifs au développement et à l’environnement des générations présentes et futures ». Il est donc question d’équité ou de justice. Se recentrer sur les soucis humains, c’est passer de l’homme aux hommes, c’est se rendre compte que la relation de l’homme à la nature, que les éthiques environnementales envisageaient dans sa généralité, n’est pas identique ni entre les différentes sociétés ni à l’intérieur de chacune d’elles. Ce sont les groupes sociaux les plus défavorisés qui vivent dans les environnements les plus dégradés, à proximité d’un aéroport ou d’usines polluantes. Ils n’ont généralement pas les moyens (qu’ils soient financiers ou politiques) de s’opposer avec succès à l’implantation de dépôts de déchets toxiques. La même polarité entre riches et pauvres, groupes ou nations culturellement dominants et dominés, se retrouve entre les pays du Nord et les pays du Sud. Ceux-ci ont leurs problèmes environnementaux propres (liés au climat, mais tout autant à la dégradation de sols qui ont été soumis à une exploitation coloniale2) et, en plus, ils ne servent que trop souvent de poubelles aux pays du Nord. Comme l’écrit Dale Jamieson, un environnementaliste américain, au niveau national comme au niveau international, « les pauvres – ou les plus défavorisés – souffrent de façon disproportionnée d’une pollution environnementale qui est produite par la société dans son ensemble » (Jamieson, 2002 : 297).
3C’est pourquoi, contrairement à ce que l’expression pourrait suggérer au premier abord, la justice environnementale ne désigne pas la justice qu’il faudrait rendre à l’environnement (dégradé par les actions humaines), mais l’introduction des considérations environnementales dans les exigences de justice. Si ce sont ceux qui ont le moins contribué à la crise environnementale qui en souffrent le plus, comment répartir justement le fardeau environnemental ? Comme nous allons le voir, la distance qui sépare la constatation des inégalités écologiques (l’inégale répartition des accès à l’environnement, mais aussi l’inégale contribution aux impacts sur l’environnement) des propositions de justice qui peuvent répondre à ces inégalités rend la réponse à cette question difficile. Il ne suffit pas, comme nous le verrons dans un premier temps, en retraçant l’émergence des questions de justice environnementale, de proposer des schémas de justice sociale ou distributive préétablis, une fois constatée l’injustice. Il faut encore, comme nous le verrons dans un deuxième temps, caractériser préalablement les inégalités écologiques, au croisement de la nature et de la société. Nous serons alors amenés à nous demander, dans un troisième temps, si la réponse aux inégalités écologiques ne se trouve pas autant dans la responsabilité et le care que dans les cadres plus formels, moins politiques et plus économiques, de la justice distributive.
Quelle justice?
4L’expression de « justice environnementale » est apparue dans les années 1980, aux Etats-Unis, pour désigner des actions militantes regroupant les habitants de sites pollués ou en passe de l’être. La lutte de la communauté d’Afton dans le comté de Warren en Caroline du Nord, qui s’est mobilisée dans des actions de désobéissance civile contre les dangers représentés par des sols surchargés en pyralène (PCB), est considérée comme le point de départ de ces mouvements populaires de protestation (Grassroots Movements) contre l’implantation de dépôts toxiques, l’usage excessif de pesticides, la contamination des airs et des eaux par des sites miniers ou industriels, notamment dans les réserves indiennes. Cela a été le point de départ d’études sur les inégalités écologiques. Elles ont montré à quel point ces risques environnementaux frappaient prioritairement des populations défavorisées pour des raisons socio-économiques ou raciales : la population d’Afton était à 84 % afro-américaine et le comté de Warren, où se trouvait le plus fort pourcentage d’Afro-Américains de toute la Caroline du Nord, était aussi particulièrement frappé par la pauvreté et le chômage (Figueroa & Mills, 2005 : 429).
5Avec la globalisation des questions environnementales, la justice a été envisagée également à ce niveau. Dès sa mise en route, le programme des Nations Unies pour l’environnement s’est efforcé de conjuguer la protection de la nature et l’équité sociale. La Convention de Rio sur la diversité biologique (1992) affirme, dans son préambule « la valeur intrinsèque » de la diversité biologique. Elle se donne aussi comme objectif, en son article 1, d’assurer « le partage juste et équitable des avantages découlant de l’exploitation des ressources génétiques ». Mais c’est surtout autour du changement climatique que les questions de justice environnementale globale ont été le plus développées, particulièrement lorsqu’il s’est agi de réfléchir sur ce que pourrait être une allocation équitable des émissions de gaz à effet de serre entre les différents pays du monde, c’est-à-dire, le plus souvent, de proposer des schémas de distribution, entre les différents pays, des permis d’émission de Co2 (Gardiner et al., 2010). Comme dans le cas du développement durable, les questions de justice, au niveau global, ne sont pas seulement intragénérationnelles (prenant en compte la diversité des sociétés à une même époque), mais également intergénérationnelles, puisque les dommages environnementaux, sur la longue durée, affectent aussi les générations futures.
6Ainsi globalisée, spatialement et temporellement, la question de la justice environnementale s’est dès lors située au croisement de deux courants jusque-là distincts (et qui l’étaient restés quand la justice environnementale était une affaire intérieure) : d’une part, la réflexion environnementale, aussi bien dans sa dimension éthique que dans le contexte factuel où elle se place et, d’autre part, la réflexion sur la justice, telle qu’elle s’est développée à partir de la Théorie de la justice de Rawls (1971). La justice environnementale est donc le plus souvent définie comme une justice sociale, ou distributive : elle concerne la distribution des bénéfices et des coûts (burdens, en anglais) environnementaux au sein de la communauté politique et les principes de cette distribution (Dobson, 1998 : 6).
7Et il est vrai qu’au centre de la question de la justice environnementale, il y a une injustice manifeste, « le constat essentiel selon lequel une minorité s’est approprié les aménités communes du milieu (ou de l’environnement) tout en exposant la majorité aux effets de la dégradation de l’écosystème terrestre » (Deléage, 2008 : 14). Aux différents niveaux où l’on peut les définir, les inégalités écologiques s’appréhendent comme des inégalités de distribution, ou de répartition. A un premier niveau, que l’on peut dire passif, de ces inégalités, il s’agit d’inégalités d’exposition et d’accès : cela désigne l’inégale répartition de la qualité de l’environnement entre les individus et les groupes sociaux. A un deuxième niveau, que l’on peut dire actif, les inégalités renvoient aux différences d’impact : les activités humaines, de production comme de consommation, sont génératrices d’effets très différenciés sur l’écosystème, dont la notion d’empreinte écologique est un indicateur bien connu. Enfin, un troisième niveau conjugue les deux premiers et en fait ressortir l’injustice : ce sont ceux qui contribuent le moins aux dégradations environnementales qui en supportent le plus durement les conséquences3. C’est particulièrement net pour le changement climatique. Il est la conséquence des émissions massives de gaz à effet de serre qui ont accompagné la révolution industrielle. Et pourtant, les effets de ce changement frappent plus durement des zones tropicales (montée des eaux menaçant les deltas du sous-continent indien, ou ayant déjà recouvert certaines îles), dont les habitants n’ont pas contribué à cette révolution ni n’en ont profité et qui se trouvent maintenant démunis des moyens nécessaires pour faire face à un environnement dégradé. Si l’on ajoute à cela que les pays riches cherchent, autant qu’ils le peuvent, à se décharger sur les pays pauvres du fardeau environnemental (ce que l’on désigne en anglais par burden), soit en exportant leurs problèmes vers les pays du Sud, soit en cherchant à les faire contribuer le plus possible aux frais que ces problèmes entraînent4, on atteint le summum de l’injustice.
8Pourtant, cette approche distributive de la justice (et de l’injustice) n’épuise pas la question de la justice environnementale. Elle restreint la justice aux seuls humains, mettant hors de son champ tous les non-humains, vivants ou non vivants, éléments naturels ou nature dans son ensemble. Il n’est question de nature, ou d’environnement, que comme d’un ensemble de ressources, il s’agit de coûts et de bénéfices, de biens, de grandeurs marchandes. Or c’est cette instrumentalisation, cette marchandisation de la nature que l’éthique environnementale met à l’origine de nos problèmes écologiques : une attitude plus respectueuse de la nature devrait se montrer soucieuse de sa dignité. Il faudrait, selon Dale Jamieson, étendre les « bénéficiaires » de la justice environnementale (Jamieson, 2002 : 299)5.
9Mais, même si l’on s’en tient aux limites de la communauté humaine, l’approche en termes de justice distributive est loin d’épuiser la question ou se révèle très insatisfaisante. On le voit bien à propos de la justice climatique. C’est là que l’on trouve les schémas les plus élaborés de justice distributive (ou redistributive) en ce qui concerne l’allocation des permis d’émission6. Et sans doute, cela devrait-il permettre, sur une question que l’on pourrait considérer comme purement technique (quelles sont les actions efficaces pour limiter le volume des émissions de gaz à effet de serre ?), de faire intervenir des considérations d’équité. Mais cela n’aboutit guère. La constatation de départ est cependant simple : « Les philosophes qui écrivent sur ces questions sont à peu près unanimes à conclure que les pays développés devraient principalement prendre en charge les coûts du changement climatique, tandis que les pays les moins développés devraient être autorisés à accroître leurs émissions dans un avenir prévisible », remarque Stephen Gardiner (Gardiner et al., 2010 : 14)7. Telle n’est cependant pas la doctrine officielle. Le principe, énoncé à l’article 7 de la Déclaration de Rio (1992) et repris dans l’article 10 du Protocole de Kyoto (1997), d’une « responsabilité commune mais différenciée » se garde bien de spécifier qui a part à cette responsabilité, ni quels sont les critères de différenciation. Aussi les propositions sont-elles multiples, certaines allant même en sens contraire de ce que suggère la constatation des inégalités : une fois fixé un taux moyen d’émission, il faudrait, selon une étude, que les pays les plus riches soient autorisés à émettre plus, et que les pays les plus pauvres émettent moins que ce taux moyen (Gosseries, 2006).
10Cela tient peut-être à ce que, avant d’aborder les modèles de distribution, il faut avoir répondu à des questions préalables et débattues, qui portent sur la responsabilité et sur sa reconnaissance. Sans doute l’origine, dans le développement industriel de l’Occident, du changement climatique ne fait-elle pas de doute, mais il s’agit, objecte-t-on souvent, d’une responsabilité causale, nullement d’une responsabilité morale : ceux qui ont lancé la révolution industrielle ne connaissaient ni les mécanismes de l’effet de serre ni la probabilité de sa survenue. Ces actions non intentionnelles, accomplies dans l’ignorance de leurs conséquences néfastes, ne peuvent être imputées à ceux qui les ont accomplies (Caney, dans Gardiner et al., 2010 : 122-145 ; Gosseries, 2006 : 41). Pourtant, les victimes de ces changements, qui n’y ont pas participé, voudraient que soit reconnue et même mesurée la part prise par l’Occident dans la situation actuelle : c’est à cette ambition que la notion de dette écologique et, plus précisément, de dette carbone pour le changement climatique, vient donner forme. Elle se définit, selon un de ses instigateurs, Joan Martinez Alier, comme « la dette accumulée par les pays du Nord industrialisés vis-à-vis des pays du Tiers-Monde en comptabilisant le pillage des ressources, le commerce inéquitable, les dégâts environnementaux et l’occupation de l’espace environnemental pour y déposer des déchets » (Joan Martinez Alier, cité par Emelianoff, 2008 : 23). L’objectif d’une telle notion est politique et vise à faire pression sur les pays du Nord pour réduire la dette financière des pays du Sud (qui se trouve, comme par hasard, être à peu près égale à la dette écologique des pays du Nord). Mais l’enjeu, au-delà des chiffres, est celui d’une reconnaissance de responsabilité, à laquelle les pays concernés se refusent. Reconnaître cette responsabilité serait non seulement admettre, vis-à-vis des pays du Sud, la réalité de l’impérialisme, mais également celle de ses effets environnementaux. Ce serait accepter de prendre connaissance de cette intrication de l’environnemental et du social qui définit les inégalités écologiques et qui est si difficile à reconnaître, aussi bien par ceux qui en subissent les effets que par ceux qui en sont les agents.
Les inégalités écologiques : quelle société ? Quelle nature ?
11Aux Etats-Unis, les mouvements de justice environnementale ont suscité la mise en place d’enquêtes administratives officielles sur les inégalités écologiques8. Une controverse s’est alors élevée pour savoir s’il s’agissait simplement d’une discrimination économique ou si les inégalités environnementales visaient plus particulièrement les populations de couleur et les minorités ethniques, ce qui a conduit à parler de « racisme environnemental » (Figueroa & Mills, 2005 : 428). La controverse peut sembler curieuse. Pourquoi vouloir départager des facteurs qui peuvent très bien se cumuler ? La réponse généralement donnée est que les inégalités socio-économiques peuvent être attribuées à des mécanismes de marché, alors que les inégalités raciales sont le résultat de discriminations qui peuvent être intentionnelles (et comme telles condamnables) et qui, même inintentionnelles, doivent faire l’objet de politiques spécifiques visant à les faire disparaître. La réponse n’est pas très satisfaisante, car on ne voit pas très bien pourquoi il faudrait accepter tout ce qui vient du marché sans essayer d’en combattre au moins les conséquences nocives et notoirement injustes : par exemple, que des populations socio-économiquement défavorisées seront plus exposées à habiter dans des quartiers environnementalement désavantagés, ou moins capables de s’opposer à des projets d’implantation de dépôts toxiques dans leur zone de résidence.
12La différence importante est ailleurs : non dans les caractéristiques des populations exposées aux inégalités, mais dans le point de vue que l’on a sur la situation sous l’angle des intérêts économiques de ces populations, ou sous l’angle de leur appartenance culturelle (ou ethnique, ou raciale suivant le vocabulaire retenu). Aborder la question du point de vue économique, c’est prendre en compte des intérêts, qui sont toujours multiples. Non seulement, les différentes parties prenantes (celles qui vont implanter un dépôt toxique, celles chez qui on va l’implanter) n’ont pas les mêmes intérêts, mais chaque partie prenante peut avoir des intérêts distincts, divergents et peut-être même opposés dans l’affaire. Lorsqu’il s’agit d’une implantation polluante sur un site, aux intérêts des habitants (s’inquiéter des dangers), s’opposent ceux des salariés éventuels de ces mêmes implantations (trouver du travail), ou ceux des responsables administratifs ou municipaux (des taxes professionnelles qui pourront permettre d’améliorer le cadre de vie). La ligne de fracture entre ces différents intérêts peut donc passer au sein de la même famille, voire du même individu (Emelianoff, 2008 : 20-21). Etudier les intérêts en présence est ce qui permet d’envisager la négociation et de rechercher le compromis (certains diront que, lorsque le rapport de force est trop inégal, il ne s’agit pas de négociation mais de chantage), mais le fractionnement en intérêts conduit aussi à distinguer l’environnemental et le social, et à pousser à sacrifier le premier au second.
13L’approche culturelle unifie. S’en tenir à l’explication économique, c’est prendre en considération des individus (dont on agrégera ensuite les intérêts), alors que la dimension culturelle est, d’emblée, collective : « Des gens qui se mobilisent pour s’attaquer à une menace environnementale s’identifient comme un groupe culturellement unifié, non comme des individus maximisant leurs intérêts dans un objectif commun, mais comme des gens situés de façon semblable dans une même expérience historique, géographique et culturelle » (Figueroa, dans Bauer, 2006 : 360). Ils sont donc portés à avancer un intérêt collectif et l’appartenance raciale (ou ethnique, ou culturelle) est, de ce point de vue, plus mobilisatrice que la caractérisation socio-économique. Si les minorités ethniques ont joué un rôle si important dans la mobilisation autour des questions de justice environnementale, aux Etats-Unis, ce n’est pas parce qu’elles seraient plus atteintes par les inégalités écologiques du fait de cette appartenance culturelle, mais parce que cette identité favorise la mobilisation autour d’objectifs communs. Plus encore que l’appartenance de classe (qui ne joue pas aux Etats-Unis le rôle qu’elle joue, ou a pu jouer, en Europe), l’identité culturelle opère la liaison entre l’environnemental et le social. Là où l’approche en termes d’intérêts tend à masquer la dimension environnementale des problèmes sociaux, l’appréhension culturelle des questions non seulement fait émerger la dimension environnementale mais en fait une référence unifiante.
14Cela peut expliquer le retard pris par l’Europe dans l’étude des inégalités écologiques et la réflexion sur la justice environnementale (Laurent, 2011 : 185), tout particulièrement en France, où les traditions républicaines de neutralité et de laïcité interdisent de prendre en compte officiellement l’appartenance culturelle ou ethnique et où toute attention à des formes d’unité culturelle intranationale est suspectée de favoriser le communautarisme. Mais la difficulté pour appréhender les inégalités écologiques ne renvoie pas seulement aux conceptions de la société, elle a aussi à voir avec ce que l’on entend par nature ou par environnement.
15Sur ce point aussi, l’exemple américain est intéressant. Dans le milieu des années 1980, les habitants (pauvres et de couleur) d’un quartier de Los Angeles se sont mobilisés contre un projet d’implantation d’un incinérateur de déchets toxiques. Ils ont cherché des soutiens et sont allés voir des représentants du Sierra Club (la très ancienne et très puissante ONG environnementale américaine). Ils ont été poliment éconduits : ces questions, leur a-t-on expliqué, étaient certes préoccupantes, mais c’étaient des questions de santé publique, pas des problèmes environnementaux. Les problèmes environnementaux, ce sont ceux de la protection de la nature, d’une nature qu’on protège en la laissant sauvage, en la mettant hors des atteintes humaines (Di Chiro, 1995 : 299).
16La distinction est assez fréquente pour qu’on la retrouve dans d’autres pays (comme la Chine, l’Inde ou le Japon) et que l’on puisse parler de deux types d’environnementalisme : un environnementalisme dominant (mainstream environnementalism) qui vise à la protection des espaces naturels et qui est caractéristique, à la fois des populations occidentales blanches et des classes favorisées des pays non occidentaux, et un environnementalisme qui se préoccupe de la pollution et de qui elle atteint dans des populations humaines vulnérables, environnementalisme qui est celui des couches sociales les moins favorisées dans les pays du Sud (Bauer, 2006 : 1-17). A ce clivage à la fois social et culturel correspondent deux idées de nature : l’une qui est celle de la nature, extérieure à l’homme, qui doit être protégée comme telle, mise à l’abri des interventions humaines (ce à quoi visent les parcs naturels), l’autre d’une nature comme communauté, d’une nature dont nous faisons partie, avec laquelle nous avons des relations d’interdépendance. D’une nature aussi qui ne soit pas uniquement vue du point de vue des Occidentaux (qui sont aussi les colonisateurs), mais en prenant en compte la diversité culturelle des rapports à l’environnement. C’est ce qui a amené de nombreux mouvements américains de justice environnementale à se retrouver en octobre 1991, au premier Sommet national des peuples de couleur sur l’environnement (Di Chiro, 1995 : 304-317 ; Schlosberg, 1999 : 154-160), qui a cherché une autre vision de la nature que celle qui structurait les mouvements blancs américains traditionnels de défense de la nature sauvage.
17Comme le remarque Dale Jamieson, la déclaration de ce sommet des peuples de couleur ne se préoccupe guère de justice distributive, elle met plutôt l’accent sur les principes d’autodétermination et sur le respect de la diversité des perspectives culturelles (Jamieson, 2007 : 91). Cela montre bien la dimension politique des questions de justice environnementale : avant d’envisager la distribution économique des biens environnementaux entre différents partenaires, il faut qu’au préalable ces partenaires se soient fait connaître et aient fait reconnaître leurs demandes. Mais, à ces demandes, ce n’est pas forcément la justice distributive qui peut répondre.
Justice, responsabilité et care
18A la différence des Etats-Unis, où la wilderness a joué un rôle central dans le développement de l’environnementalisme (Nash, 1967), celui-ci s’est constitué en Europe autour de la résistance au nucléaire, qui a servi de référence au risque industriel. Une histoire comme celle des habitants d’une banlieue de Los Angeles se faisant éconduire par le Sierra Club parce que leurs problèmes n’avaient rien à voir avec la protection de la nature n’aurait sans doute pas pu arriver en Europe, où des habitants concernés par un cas comparable auraient sans doute trouvé un soutien auprès des partis verts. Cela ne signifie pas pour autant que les accidents liés au risque industriel soient vraiment reconnus comme des injustices écologiques, dans leur dimension à la fois sociale et environnementale. Laura Centemeri a étudié toutes les difficultés qui ont accompagné la reconnaissance du dommage environnemental après l’accident de Seveso en 1976, où un nuage toxique, émané d’une usine possédée par la multinationale suisse Hoffmann-La Roche, avait déposé ses effluves sur les territoires environnants. Seveso fut la localité la plus contaminée du fait des vents dominants (Centemeri, 2011 : 218). Ces difficultés lui paraissent caractéristiques de ce qu’elle appelle « le paradoxe de Seveso » : si l’accident de Seveso fut à l’origine de la directive du même nom qui a fixé, au niveau européen, « les normes, les règles juridiques, les mesures et les standards » du traitement du risque industriel majeur, cela s’est fait au détriment de toute reconnaissance des caractéristiques proprement locales de l’accident et du dommage à l’environnement qu’il avait entraîné (Centemeri, 2011 : 238). La demande des habitants de Seveso, celle d’une reconnaissance d’un dommage lié au territoire, a été ignorée aussi bien par les représentants de l’administration en charge du traitement de l’accident que par les militants du comité constitué pour obtenir la reconnaissance du dommage.
19Ce comité, le CSTP (Comité scientifique et technique populaire), composé de militants de gauche, relevant de la culture politique rouge italienne (syndicats, PCI), s’est d’autant plus détourné des conditions locales que celles-ci relevaient de la culture politique « blanche », catholique et traditionnelle, qui défendait le lien au territoire dans ses valeurs, mais se montrait peu préparée à mobiliser les habitants autour d’un accident considéré comme une épreuve que la communauté chrétienne devait endurer en restant unie. A l’opposé de cette culture de la résignation, le CSTP a refusé aussi bien l’interprétation par la fatalité que l’acceptation du risque inséparable du progrès technique. Alors que les autorités se montraient hésitantes sur l’importance de l’accident et la gravité de ses conséquences, il s’est employé à établir scientifiquement la réalité du dommage et à en diffuser l’information auprès de la population concernée. Dévoilant les intérêts masqués dans l’accident, il y a fait voir un crime du capitalisme, qui associait, dans une même complicité, l’entreprise responsable et les autorités publiques et dont les habitants de Seveso étaient les victimes. Centemeri parle ainsi de « mobilisation nationale sans relais locaux » : Seveso a été traité comme un cas exemplaire d’une relation générale, où la prise de conscience de l’injustice subie supposait que l’on se détachât des conditions particulières de l’accident, qui perdait toute assise spatiale, pour mieux illustrer la généralité de la lutte de classe des travailleurs (Centemeri, 2011 : 220).
20Le dommage à l’environnement a été traité comme un problème de société et les militants du CSTP se sont montrés aussi dualistes que ceux du Sierra Club, séparant les questions de nature des questions de société. Le dommage entraîné par l’accident de Seveso a été envisagé comme un dommage à la santé causé par le système de production capitaliste et il a été traité dans le cadre des luttes pour la santé au travail : revendication des droits violés, dévoilement des relations de pouvoir masquées, mobilisation de l’expertise scientifique au service de la population. Avec celle-ci, le CSTP s’est donc opposé à un projet de construction sur place d’un incinérateur pour les déchets, avec les risques qu’il comportait. Mais la solution finalement adoptée, celle d’un enfouissement des déchets sur un territoire ensuite reboisé, transformé en désert dont les habitants étaient exclus, réparait techniquement le dommage mais ne répondait pas à la demande des habitants. Celle-ci ne se limitait pas à une simple réparation financière, mais aspirait à ce que les liens brisés avec le territoire soient recomposés, que la vie puisse y reprendre, d’une façon ou d’une autre. Cette demande a été ignorée. La « montée en généralité » (Centemeri, 2011 : 234) des militants du CSTP, qui a assuré le succès de la campagne contre le nucléaire, a conduit à leur échec à Seveso.
21Ce qui a été de la sorte occulté, c’est l’articulation du social et de l’environnemental, le fait qu’à Seveso les habitants n’ont pas été atteints seulement dans leur santé, mais en même temps dans celle de leur cadre de vie : le dommage de Seveso a été un dommage environnemental, une atteinte au territoire qui a été brutalement « blessé », les habitants ont souffert d’une « soustraction de nature » (habitant de Seveso cité par Centemeri, 2011 : 229). Cette nature n’est pas celle du Sierra Club, ce n’est pas une nature sauvage dont on protège l’extériorité : de ce point de vue, la solution du désert plairait plus aux défenseurs de la wilderness, à la façon dont certains d’entre eux se sont réjouis que, sur le territoire atteint par les radiations de Tchernobyl et abandonné par ses habitants, la nature ait pu « reprendre ses droits ». Mais ce n’est pas non plus l’environnement tel que l’envisage la conception européenne du risque industriel. L’environnement n’y est appréhendé que dans ses effets négatifs sur la santé humaine : il s’agit de prévenir les risques ou d’en réparer les dommages. Mais le cas de Seveso montre que l’environnement y intervient comme un cadre de vie auquel on est attaché. Cela n’enferme pas les habitants de Seveso dans un localisme traditionnel et identitaire. Sans doute n’ont-ils découvert qu’après l’accident leur attachement à un environnement avec lequel ils voulaient continuer à avoir des liens : la nature, en cela, était autant devant eux que derrière eux. Il y a, de ce point de vue, une nette convergence entre la « politique attachée au territoire » des habitants de Seveso et la « nature comme communauté » des habitants de la banlieue de Los Angeles, celle des participants du sommet des peuples de couleur ou des mouvements environnementalistes des pays du Sud.
22De tous ces cas se dégage une caractéristique commune : l’insuffisance, parfois même l’inadéquation, du cadre juridique de réparation des dommages environnementaux. Quand, vingt ans après l’accident de Seveso et l’échec de la mobilisation de gauche à faire reconnaître le dommage environnemental, une nouvelle génération de militants et de militantes est revenue à Seveso pour y investir les lieux de nature abandonnés et y développer, avec les habitants, une « politique attachée au territoire habité » qui permette une réparation du dommage précédemment manquée9, cette recherche d’une solution politique a fait ressortir l’insuffisance de la réparation par le droit. Celle-ci s’était aussi soldée partiellement par un échec, puisque Hoffmann-La Roche n’avait jamais reconnu sa responsabilité. Certes, des indemnisations furent proposées, mais sur une base privée, d’accords contractuels, ce qui provoqua des conflits, les habitants indemnisés ayant été accusés de profiter individuellement d’un malheur collectif.
23On retrouve, dans le traitement d’affaires comparables (comme celui de la pollution par le mercure au Japon, à Minamata), la même idée que les indemnités attribuées individuellement ont des effets de division sur la communauté collectivement affectée par le dommage10. La compensation financière revient à évaluer l’environnement atteint en termes de grandeurs marchandes, qui peuvent donner lieu à des marchandages. Ce type d’instrumentalisation convient à une nature que l’on s’approprie privativement et que l’on exploite, nullement à un environnement dont on fait partie. C’est cette réduction du dommage à sa base matérielle et individuelle, qui convient aux cadres juridiques de la réparation financière, que la recherche d’une réparation politique du dommage rejette. Il s’agit de recomposer un collectif, qui unisse le mien au commun dans un collectif englobant les humains et les non-humains.
24Cette critique de l’inadéquation des cadres juridiques dominants et de l’insuffisance des schémas de justice distributive (dont relève la compensation) conduit à penser que les questions d’inégalités écologiques peuvent être abordées à partir des conceptions du care, telles qu’elles ont été introduites par les travaux de Gilligan et Tronto (Gilligan, 2008 ; Tronto, 2009).
25Ces travaux ont montré qu’à côté des approches en termes de justice, où il s’agit d’arbitrer entre des droits ou des intérêts individuels, concurrents, il y a place pour des approches en termes de care, c’est-à-dire de responsabilité dans une situation où comptent les relations et le contexte (Paperman & Laugier, 2005). Or, c’est sur la question de la responsabilité qu’achoppent les tentatives pour répondre, par des formes de justice distributive, aux inégalités et aux injustices écologiques. La mise en évidence de l’injustice climatique est celle de la responsabilité des pays occidentaux dans le changement climatique. Mais les schémas de distribution des permis d’émission se font sur une base égalitaire, dans laquelle est annulée la responsabilité historique des pays du Nord. Hoffmann-La Roche propose des indemnités aux habitants de Seveso, mais refuse de reconnaître sa responsabilité dans l’accident.
26Sans doute, dans ces dénis, y a-t-il d’évidents intérêts financiers. Mais reconnaître une responsabilité aurait une portée plus vaste, car ce serait remettre en cause les cadres habituels dans lesquels sont compartimentées les situations. Admettre sa responsabilité, pour Hoffmann-La Roche, serait admettre que les usines ont des entours, que les entreprises ont un environnement et pas seulement des actionnaires et des salariés. Ce serait rendre visible l’invisible, en revenant sur les divisions entre lesquelles notre vie se répartit : la distinction du privé et du public, de l’entreprise et de la famille, du personnel et du collectif. Ce sont ces dualités que perpétua la mobilisation classique de la gauche et qui conduisirent à son échec. Revenir à Seveso pour essayer de dégager la solution qui avait été ratée, c’est, comme le dit Centemeri, « descendre dans les espaces du familier pour y reconnaître la présence d’attachements spécifiques ainsi que des biens que ces attachements garantissent » (Centemeri, 2011 : 227).
27On est bien dans le domaine du care : celui des relations, des attachements, des sentiments. Celui des femmes. La deuxième génération des militants de Seveso comprend des militantes, qui ont une expérience des luttes féministes (Centemeri, 2011 : 224-232). Carolyn Merchant remarque que les mouvements contre les dépôts toxiques réunissent, aux Etats-Unis, une énorme majorité de femmes (80 à 85 %), parmi lesquelles beaucoup de femmes hispaniques ou afro-américaines. La même chose peut être dite des mouvements écologiques du tiers-monde, très souvent dirigés par des femmes : le groupe Chipko, qui réunit des femmes indiennes dans la sauvegarde de la forêt, le mouvement de la Ceinture verte au Kenya, mouvement de femmes qui plantent des arbres au Kenya pour lutter contre la déforestation, et les nombreux mouvements comparables en Amérique latine, au Nicaragua, au Chili ou au Brésil. Le mouvement contre les inégalités écologiques et pour la justice environnementale fait ainsi partie de la lutte des femmes (Merchant, 1996 : 161).
28Dans ce rôle important des femmes, on peut voir la marque d’un partage traditionnel des tâches. Les hommes sont censés aller gagner leur vie au-dehors, dans un monde qui est celui des intérêts et des droits, de l’économie et de la justice distributive, monde de l’indépendance individuelle, de la séparation des sphères et de la domination de la nature. Les femmes s’occupent des enfants et assurent l’unité du foyer, ont une vision plus relationnelle, ou même plus holiste, des choses. Mais en entrant dans la lutte militante, elles s’appuient sur ces caractéristiques pour mieux les subvertir : elles rendent public le privé, elles font apparaître la dépendance d’un monde masculin qui se prétend indépendant, et si elles s’appuient sur le local, c’est pour mieux le relier au global (Larrère, 2012). De ce point de vue, faire des inégalités écologiques une affaire de care, c’est en faire ressortir la dimension politique et placer la solution à ce niveau.
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Notes de bas de page
1 Sur ce courant de réflexion morale, principalement anglophone, voir Larrère (1997) et Afeissa (2007).
2 Sur la conjonction entre catastrophes naturelles et exploitation coloniale et sur ses effets dans ce qu’on appelle le « sous-développement », voir Davis (2006).
3 Sur la distinction entre un niveau passif (d’accès ou d’exposition), un niveau actif (d’impact) et le cumul de ces deux niveaux, voir Zaccai (2011 : 206-210). Emelianoff (2008 : 22) distingue entre « inégalités environnementales » (accès) et « inégalités écologiques » (impact).
4 Eloi Laurent parle de la « capacité des riches à imposer les coûts de leurs comportements environnementaux aux plus pauvres » et en fait une des causes de la crise écologique (Laurent, 2011 : 28).
5 Et ce d’autant plus que les espèces non humaines auront bien plus de mal que les humains à s’adapter au changement climatique.
6 Voir notamment l’article de Singer : « One atmosphere », dans Gardiner et al. (2010 : 181-199).
7 Gardiner renvoie à Henry Shue (101-111, 146-162 et 200-214) et Peter Singer (181-199).
8 Dans les années 1990, le président Clinton établit un bureau de justice environnementale dépendant de l’Agence de protection de l’environnement et, en 1994, signa un acte de l’exécutif sur les « actions fédérales en matière de justice environnementale à l’égard des minorités et des populations à faibles revenus » (cité dans Jamieson, 2007 : 89).
9 Notamment en balisant un parcours sur le site où l’on avait enfoui les déchets et planté un bois. (Centemeri, 2011 : 232-237)
10 Figueroa (2006 : 366) parle de « the divisive effect of compensation ».
Auteur
Professeur émérite à l’Université de Paris I - Panthéon-Sorbonne. Spécialiste de philosophie morale et politique, elle s’intéresse aux questions éthiques et politiques liées à la crise environnementale et aux nouvelles technologies (protection de la nature, prévention des risques, développement des biotechnologies), et a contribué à introduire en France les grands thèmes de l’éthique environnementale d’expression anglaise.
Parmi ses publications récentes : Les philosophies de l’environnement (Presses universitaires de France, 1997), Du bon usage de la nature : Pour une philosophie de l’environnement avec Raphael Larrère (Paris : Aubier, 1997 ; rééd. Champs Flammarion, 2009)
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