Introduction
p. 15-17
Texte intégral
1En Suisse, la plupart des personnes ayant une déficience intellectuelle résident ou travaillent dans des structures institutionnelles. Le transfert des financements fédéraux des institutions vers un financement cantonal, au1er janvier 2011, amène une réévaluation et un re-questionnement quant aux prestations allouées. C’est dans ce contexte que s’insère ce projet de recherche.
2Le droit international récent insiste sur l’importance pour les personnes en situation de handicap1 de prendre part aux décisions importantes de leur vie. Les institutions qui les accueillent devraient être sensibles à cette dimension et créer des dispositifs individuels et collectifs permettant de les écouter, de recueillir leurs besoins et de les impliquer dans les décisions et les réalisations qui les concernent.
3Contrairement à la France, la Belgique ou le Canada, il n’existe aucune obligation en Suisse de proposer des espaces collectifs pour l’expression des usagers à l’intérieur des institutions. En effet, les mutations institutionnelles de ces trente dernières années ont surtout permis une meilleure réponse aux besoins individuels des personnes avec la mise en place de projets personnalisés. Pourtant, des recherches récentes et des rapports d’audit ont montré que pour favoriser les bonnes pratiques et la participation au sein de ces organisations ainsi que pour prévenir d’éventuels négligences ou abus, une des mesures importantes consiste à renforcer la place donnée à la parole collective et à la représentation des usagers dans les organes de décisions (Brown, 2002 ; Juihlard & Blanc, 2003 ; Gottraux & Perdrix, 2005 ; Masse & Petitpierre, 2011).
4Cet ouvrage rend compte d’une recherche effectuée en deux phases. La première a été réalisée d’octobre 2010 à septembre 2011. Elle consiste en une analyse par questionnaire qui vise à établir une première typologie des espaces d’expression collectifs existant dans les institutions auprès de cette population en Suisse romande.
5La seconde a fait l’objet d’une demande de subsides au FNS DORE le 1er mars 2011 : le subside ayant été accordé, la deuxième phase a été menée dès le 1er octobre 2011 jusqu’en mars 2013. Elle analyse les groupes d’expression représentant les différentes typologies identifiées dans la première phase, détermine quels en sont les fonctionnements et met en évidence quels sont les facteurs facilitant le passage ou l’articulation de l’expression de besoins individuels à la coconstruction d’un intérêt commun, puis à son éventuelle appropriation dans une dimension représentative et citoyenne. Pour répondre à ces questions, la seconde phase interroge trois catégories distinctes de personnes impliquées dans ces groupes : des personnes ayant une déficience intellectuelle, des accompagnants ayant initié ces groupes ou y participant, et des membres de la direction.
6Cet ouvrage est construit en quatre parties : le cadre théorique est présenté dans la première partie, puis la deuxième partie expose la méthodologie de chacune des deux phases de la recherche. La troisième partie présente de manière très succincte la première phase de la recherche, les lecteurs qui s’intéressent aux résultats complets de cette phase peuvent les obtenir en ligne à l'adresse http://bit.ly/28WM2cS. La quatrième partie rend compte de manière complète des résultats obtenus dans la deuxième phase de la recherche. Le dernier chapitre présente la typologie finale : en effet, l’analyse complémentaire de la première et de la deuxième phase permet d’identifier cinq catégories d’espaces collectifs d’expression : les groupes de reproduction politique, les groupes fédératifs, les groupes de satisfaction, les groupes de développement personnel et les groupes d’organisation de vie collective. Ces catégories de la typologie finale ont été définies en fonction de plusieurs critères : la légitimité de ces groupes, les courants qui les inspirent, leur organisation interne, les conditions pour en devenir membre, le contenu et la forme des débats, le rôle de l’animateur, ainsi que le suivi des décisions par l’institution. Enfin, des éléments qui facilitent ou freinent l’articulation entre une expression en « Je », en « Nous » et en « Nous Tous » au sein de ces groupes d’expression, de l’institution et dans la communauté élargie, sont mis en évidence afin de donner des repères aux institutions qui souhaiteraient développer de tels espaces collectifs d’expression.
Notes de bas de page
1 Le choix de l’expression « personne en situation de handicap » dans l’ensemble de ce texte est fait en cohérence avec la dernière classification internationale du handicap de l’OMS (CIF ; OMS, 2001) et la classification québécoise nommée Processus de production de handicap (PPH ; Fougeyrollas, 1998, 2010) relatives au concept de handicap. Ce choix est explicité au chapitre 3 de la première partie (p. 35). L’expression « personne handicapée » sera reprise uniquement lorsqu’elle est citée par d’autres auteurs ou lorsqu’elle apparaît dans des textes juridiques.
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