Lendemains de défaite chez Tite-Live
p. 281-308
Texte intégral
1Après sa parution, le livre de N. Rosenstein, Imperatores Victi. Military Defeat and Aristocratic Competition in the Middle Late Republic, a suscité de nombreuses réactions plus ou moins favorables à sa théorie1. L’auteur a souhaité démontrer en effet que les défaites subies par un commandant en chef n’ont aucune incidence sur sa carrière future, voire peuvent même la favoriser2. Ceux qui sont totalement d’accord avec lui sont relativement rares3 ; plus nombreux sont ceux qui sont opposés à sa théorie ou à certains de ses aspects4. C’est ainsi que M. Waller montre que les tableaux fournis par N. Rosenstein ne sont pas complets : ce dernier ne tient pas compte des commandants en chef qui ont certes été vaincus dans un premier temps, mais qui ont ensuite été victorieux et de même ne fait pas la différence entre les commandants en chef qui ont été victorieux d’abord, puis vaincus, et les commandants en chef seulement vaincus5. M. Waller propose donc d’autres tableaux, qui tiennent mieux compte de ces différents facteurs, et sa conclusion est qu’il n’y a pas de règles fixes, mais que la tendance générale semble être que les commandants victorieux sont avantagés lors des votes ; même si les commandants vaincus ne sont pas désavantagés par rapport à l’ensemble de leurs pairs, le nombre de commandants victorieux est si grand par rapport au nombre de postes qu’en réalité ceux qui ont été vaincus sont quand même désavantagés lors de la compétition pour l’obtention des magistratures6. J. Rich a également repris le sujet, en s’appuyant sur les tableaux de M. Waller qu’il a légèrement modifiés7. Lui aussi souligne les limites des sources et le petit nombre des cas des généraux vaincus, qui ne permet pas vraiment de comparer les succès électoraux des commandants en chef vaincus et ceux de leurs pairs victorieux. En revanche, il est incontestable qu’être vaincu n’est pas fatal pour la carrière future d’un membre de l’élite, et c’est le mérite de N. Rosenstein que de l’avoir montré8. Pour expliquer que les défaites n’aient pas d’influence sur la carrière future, N. Rosenstein avance que pour assurer la stabilité du système qui repose sur la compétition aristocratique et pour soutenir « le mythe de la compétence aristocratique universelle9 », les Romains évitent de blâmer les généraux pour les défaites subies, cherchent d’autres explications et trouvent d’autres coupables : les manquements religieux, volontaires ou non, et les soldats.
2Que l’on soit d’accord ou non avec les théories de N. Rosenstein, son livre a eu le mérite de susciter un certain nombre d’études sur les défaites ou les désastres à Rome. Tous ces livres et ces articles s’attachent à étudier deux aspects. Soit la défaite elle-même d’une part (descriptions de la bataille) et ses causes, en s’inspirant souvent du livre de N. Rosenstein : raisons religieuses (omission volontaire du commandant en chef ou omission involontaire)10 ; caractère et/ou origine sociale du commandant en chef (pour le caractère, temeritas, ferocitas, jeunesse ; pour l’origine sociale, origine plébéienne des commandants en chef qui sont vaincus par exemple à la Trébie, à Trasimène et à Cannes pour Varron, qui a le mauvais rôle)11 ; comportement des soldats (selon N. Rosenstein, ils sont les seuls à devoir être blâmés lors d’une défaite, si des raisons religieuses ne peuvent pas être avancées)12 ; soit les conséquences des défaites militaires d’autre part (sort des prisonniers par exemple ou encore traité passé entre le commandant en chef vaincu et les ennemis vainqueurs, l’exemplum par excellence étant l’épisode des fourches Caudines) ou les réactions des autorités pour faire face (nomination d’un dictateur) et parfois des civils quand ils apprennent la nouvelle13. Ainsi, dans un livre récent, J. Toner écrit que si beaucoup de Romains ont sans doute souffert du syndrome de stress post-traumatique, on n’en trouve aucune trace dans les sources car cela ne correspond pas à la représentation que le Romain a de lui-même comme un peuple qui triomphe et ne montre jamais le moindre signe de faiblesse14. Pour lui, le système romain est très résilient face aux chocs externes générés par les désastres, il n’y a pas beaucoup de preuves de panique parmi l’élite dirigeante face aux guerres destructrices et aux défaites importantes, et les désastres ne constituent pas une opportunité pour l’introduction de réformes radicales ou un déclic pour un changement rapide15. Il s’attache à la réaction des autorités romaines lors d’une défaite. La question de la réaction des soldats et du commandant en chef au soir (ou au lendemain) de la défaite n’est pas vraiment abordée.
3Par soir ou lendemain de défaite, il faut entendre le moment qui suit la fuite, c’est-à-dire après la fin de la bataille et jusqu’au lendemain. La fuite, qui se produit à un moment du combat, est en effet plutôt et généralement le signe de la défaite, ce qui la déclenche. Il arrive que Tite-Live insiste sur cette fuite, pour montrer l’ampleur du désastre, en précisant parfois que les soldats (et leur commandant) ne se conduisent alors pas comme devraient le faire des soldats romains. C’est le cas par exemple lorsqu’il décrit la bataille de l’Allia, en 39016, ou encore celle de la Trébie, fin 218 (ou début 217)17. Le mouvement de panique le pire, sans doute, est celui qui se produisit en 178, lors d’une attaque du camp romain par les Istriens18. Tite-Live le relate longuement19 : la panique est partie de deux corps de l’armée romaine attaqués par les Istriens, la cohorte de Plaisance et les manipules de la seconde légion ; ces derniers, ayant pensé l’ennemi plus nombreux qu’il n’était, fuirent vers le camp où ils répandirent la panique, et la fuite vers la mer devint générale ; là, les soldats cherchèrent à embarquer, mais les matelots, craignant de voir les embarcations surchargées, les repoussèrent ; il y eut lutte, morts ; bref, ce fut un désastre. Au soir ou au lendemain de la défaite, qu’elle ait été marquée ou non par une fuite, les soldats ont été vaincus, le savent et doivent « gérer » cette réalité. La présente étude porte sur Tite-Live, et donc l’époque républicaine ; une partie seulement de l’époque républicaine cependant, puisque dans les Periochae, s’il y a bien mention de défaites, il n’est presque jamais question de la réaction des soldats. Il ne s’agit pas ici de discuter de la réalité historique de ces batailles : même si elles n’ont pas eu lieu, ce qui est intéressant, c’est la façon dont Tite-Live se figure et dépeint les réactions des soldats à l’occasion d’une défaite.
4Le moins que l’on puisse dire, c’est que les passages du récit livien se rapportant à ce sujet sont peu nombreux. Il faut exclure tout de suite un cas, particulièrement rare, où il n’y a aucune réaction des soldats, pour la bonne raison qu’ils sont tous morts. C’est ce qui se passe lors d’une bataille contre les Gaulois Sénons, en 295 : tous les soldats, peu nombreux précise l’historien, de L. Cornelius Scipion Barbatus, alors propréteur durant l’absence du camp du consul Q. Fabius Maximus Rullianus, ont été tués20. Ou encore en 178 : le tribun M. Licinius Strabo a été tué par les Histriens avec ses quelques hommes21.
5Les notations physiques sont très rares, et il n’est jamais question directement de douleur, de souffrance. L’historien fait parfois allusion à la présence de mourants et de blessés. C’est ainsi que lors du siège de Pometia, en 502, des blessés ont été laissés dans le camp, y compris l’un des consuls, dont l’état était jugé désespéré ; l’armée, quant à elle, est retournée à Rome. Tite-Live se contente de noter qu’un court espace de temps a suffi pour guérir les blessures22. On ne sait rien de l’état d’esprit de cette armée face à son échec ni de ce qu’ont pu endurer les soldats blessés. L’historien ne mentionne ni leurs cris ni leurs plaintes, qui n’ont pas dû contribuer à remonter le moral des autres soldats. En principe, les bons généraux devaient du reste s’occuper de faire soigner les blessés, de façon précisément à ne pas aggraver le découragement de leurs hommes23.
6L’état physique des soldats n’est mentionné qu’à trois reprises. En 294, les soldats mirent en avant leur fatigue physique occasionnée par le combat, fatigue qu’une nuit n’a pas suffi à dissiper, parce qu’ils n’ont pas pu dormir24. Après la bataille du lac Trasimène, l’historien note que les soldats étaient, entre autres maux, pressés par la faim25. Les circonstances sont très particulières, puisqu’il s’agit d’un groupe de 6 000 hommes qui ont fait une percée au cours de la bataille et se sont arrêtés sur une hauteur. Le brouillard enfin dissipé leur a montré l’étendue de la défaite romaine, et ils ont décidé de s’éloigner pour ne pas être capturés par l’ennemi. Mais ils n’avaient rien avec eux, et l’on comprend que le lendemain, ils aient ressenti les effets de la faim, d’autant plus qu’ils avaient fourni un gros effort physique la veille. Sans doute aussi du découragement et de la peur, mais l’historien, pour ce qui est des notations psychologiques, se contente d’un terme très général26. Au lendemain de Cannes enfin, il note également que les Romains du petit camp se rendirent rapidement à Hannibal, plus rapidement que ce dernier ne l’espérait, parce qu’ils étaient accablés par les fatigues, les veilles et les blessures27. Pour ce qui est du grand camp, ce furent les blessés (et les lâches) qui pareillement se rendirent28. La faiblesse physique entraîne la faiblesse morale. Le représentant des prisonniers envoyé par Hannibal à Rome pour négocier le rachat de ces derniers mit lui aussi en avant la fatigue et les blessures qui les avaient accablés29, mais c’est pour souligner que malgré cela, ils ont continué toute la nuit à défendre les retranchements. Il récusa l’accusation selon laquelle ils se seraient rendus pendant le combat sous l’effet de la peur et mit en avant leur situation désespérée face à la foule des ennemis qui les entourait, et tout particulièrement le manque d’eau : sans elle, ils ne pouvaient pas tenir30. Silius Italicus est le seul, avec Tite-Live, à dépeindre les soldats après la défaite de Cannes, au moment où ils se sont réfugiés dans les villes aux alentours31. Ce qui ressort de sa description, c’est le fait que l’on n’a plus affaire à une armée : pas d’aigles, pas de drapeaux, des soldats sans armes. Les soldats sont également découragés, fatigués, en état de choc. Mais il souligne aussi l’acharnement du combat (les boucliers sont en pièces, tous les cavaliers sont blessés, il y a encore des flèches ennemies qui pendent de leur cuirasse) et montre que si certains soldats sont la proie du découragement, d’autres réagissent et préparent tout ce qu’il faut pour s’opposer à l’ennemi. Chez ceux qui ont fui et ont trouvé refuge dans des villes, il y a, pour beaucoup, un état de choc traumatique lié à la fois à leur épuisement physique et au choc psychologique32. Ces deux éléments ont poussé les soldats qui s’étaient réfugiés dans les camps près du champ de bataille à se rendre à l’ennemi.
7Les notations psychologiques ne sont pas beaucoup plus nombreuses que les notations physiques, Tite-Live se contentant souvent de noter la défaite, sans plus. Ainsi en 170, en Illyrie, le légat L. Coelius essaya de reprendre Uscana en Pénestie ; « mais repoussé par la garnison macédonienne qui défendait la ville, il reçut lui-même des blessures et ramena ses troupes à Lychnidus33 ». Même chose pour P. Sempronius Tuditanus dans le Bruttium en 204, Tite-Live notant simplement que les soldats rentrèrent précipitamment dans leur camp34, ou encore pour Sex. Digitius, en Hispanie Citérieure, en 19435. Ce silence concernant l’après-défaite est une façon, pour Tite-Live, de ne pas insister sur la défaite subie, mais c’est peut-être aussi la preuve que cela ne l’intéresse pas, du moins quand les circonstances ne sortent pas de l’ordinaire. Le silence peut cependant s’expliquer parfois par la façon dont les faits sont rapportés : en 189, c’est une ambassade marseillaise qui a annoncé au Sénat la défaite de L. Baebius Diues face aux Ligures et sa mort, des suites de ses blessures, alors qu’il s’était réfugié à Marseille avec une faible escorte et sans licteurs36. En 196, c’est une dépêche qui a appris au Sénat que C. Sempronius Tuditanus était mort des suites de ses blessures, après avoir subi une défaite37.
8Les circonstances mêmes de la défaite sont importantes, parce qu’elles conditionnent d’une certaine façon les réactions des soldats. Il en va de même de l’importance de la défaite. Le plus souvent en effet, les réactions des soldats ne sont pas les mêmes selon qu’ils ont pu se replier plus ou moins en ordre ou qu’ils ont été mis en fuite et selon qu’ils comptent parmi leurs rangs un nombre plus ou moins grand de blessés. Dans ces circonstances, l’existence d’un camp est un élément non négligeable. Il est en effet considéré comme un refuge, un élément de sécurité au milieu du danger, quand bien même il peut être assiégé et attaqué par l’ennemi. L’armée ne dispose certes pas toujours d’un camp dans lequel se réfugier. C’est le cas en particulier quand elle a été attaquée alors qu’elle était en marche. Dans ce dernier cas, construire un camp après la défaite permet de se prémunir contre une nouvelle attaque-surprise de l’ennemi, c’est aussi le signe que la défaite n’a pas été marquée par une débandade totale des soldats, c’est enfin la preuve que la situation est redevenue d’une certaine façon « normale ». En 189, les troupes du consul Cn. Manlius Vulso, qui revenaient de leur campagne en Asie Mineure chargées de butin, ont été attaquées par des Thraces dans un défilé, il y a eu combat ; le combat a cessé à la tombée de la nuit parce que les Thraces sont partis, après s’être emparés de presque tout le butin ; une partie de l’armée romaine a alors campé dans un lieu découvert, la partie qui est restée dans le défilé s’est entourée d’une double palissade38. Plus tard, deux des légats qui accompagnaient le consul contestèrent la présentation de la campagne faite par ce dernier, qui demandait le triomphe, et déclarèrent que l’armée avait subi un désastre, en employant volontairement un mot très fort, clades, qui est utilisé par exemple pour la bataille de Cannes ou encore la défaite de Varus ; ils ajoutèrent que l’armée avait passé la nuit dans les refuges des bêtes sauvages, au milieu des halliers39. C’était faux, mais nier la construction de la double palissade leur permettait d’insister sur l’ampleur de la défaite. En 218, le préteur L. Manlius Vulso est tombé dans une embuscade tendue par les Boïens parce qu’il n’a pas fait reconnaître le terrain ; il a perdu de nombreux soldats et n’est parvenu que difficilement à gagner la plaine, où il a établi un camp (castra communita) ; les pertes élevées ont certainement découragé les soldats, mais le fait que les Gaulois n’aient pas cherché à attaquer le camp leur a redonné courage (refecti sunt militum animi). Le camp leur a également permis de retrouver leurs esprits, de se remettre de la défaite, et ils ont pu alors reprendre la route40. Leur arrière-garde a cependant été à nouveau attaquée par les Boïens et à nouveau vaincue, les soldats ayant été en proie à une terreur qui n’a disparu que quand ils ont été en terrain découvert41. Polybe, qui relate l’épisode42, ne mentionne qu’une seule attaque des Boïens : ils ont tué une grande partie des troupes, les survivants se sont débandés à travers la forêt et leur fuite n’a retrouvé un semblant d’ordre qu’une fois hors de la forêt, comme lors de la seconde attaque dans le récit livien.
9Le camp peut être déjà construit. En 464, le consul Sp. Furius Medullinus Fusus a été repoussé par les Èques et s’est réfugié dans son camp avec ses hommes. Les Èques l’assiégèrent et empêchèrent même l’envoi de messagers à Rome. Le consul tenta (trop tard, estime Tite-Live) une sortie qui tourna mal, et les Romains se replièrent à nouveau dans leur camp. Mais la situation n’était plus la même, le consul a été blessé lors de la sortie et son frère, un de ses légats, a été tué, ainsi que des soldats. L’historien souligne que ni l’espoir ni les forces n’étaient alors les mêmes43. Cela veut dire que l’état d’esprit des hommes était bien moins bon, dans la mesure où la situation leur paraissait maintenant désespérée, ce qui n’était pas le cas au début : le repli dans le camp était alors considéré comme un moyen de reprendre des forces. Un même acte, le repli dans le camp, peut provoquer des réactions différentes chez les soldats, selon l’ampleur de la défaite qu’ils viennent de subir.
10Après cette sortie malheureuse, l’état d’esprit des soldats devait ressembler à celui des soldats du consul M. Atilius Regulus en 29444. Lors d’un combat contre les Samnites, les deux camps se sont séparés sans vainqueurs ni vaincus. Cela n’a pas empêché les soldats romains de se considérer comme vaincus : ils ont un nombre plus important de blessés et de morts, et le vaincu a toujours plus de blessés et de morts que le vainqueur. Cela a suscité chez les soldats de la terreur45. Dans cette terreur entraient certes la honte d’avoir été vaincus, mais aussi l’inquiétude à propos de ce qui les attendait : attaque immédiate du camp par les Samnites vainqueurs ou à nouveau combat contre eux le lendemain, un combat inégal entre des vainqueurs encouragés par leur victoire et des vaincus découragés par leur défaite. Les officiers ont bien dépeint cet état d’esprit au consul qui, le lendemain, souhaitait mener ses hommes au combat, et eux-mêmes le dirent au consul qui les exhortait à combattre : les soldats se considéraient comme vaincus, ils étaient découragés46. L’utilisation du mot animus n’est pas neutre. L’animus, c’est précisément ce dont le soldat a besoin pour pouvoir combattre de façon efficace, c’est l’énergie, aussi bien mentale que physique, c’est leur moral, leur état d’esprit, et rien de tel que la terreur pour avoir un effet particulièrement néfaste sur l’état d’esprit des soldats47. Les hommes étaient aussi épuisés par la bataille de la veille, ils n’avaient plus ni force ni sang, et la nuit n’avait fait que renforcer ces sentiments. Ils l’avaient passée à veiller parmi les blessés et les plaintes des mourants48. La pudor (la honte) fut certes en définitive la plus forte, et ils se décidèrent finalement à combattre. Mais ils le firent comme des vaincus : Tite-Live utilise deux fois segniter pour décrire la façon dont ils prirent les armes et sortirent du camp, indique qu’ils étaient abattus (maesti) et presque vaincus, et qu’ils n’arrivaient pas à garder les rangs. Ils agissaient à contrecœur, et il fallut toute l’énergie du consul, qui finit par vouer un temple à Jupiter Stator, pour que les soldats romains finissent par l’emporter, au prix de très nombreux morts49. Tite-Live a délibérément choisi de mettre en valeur le découragement et l’abattement des soldats (qui est égal du reste chez les Samnites). Les soldats étaient pour ainsi dire en état de choc, parce que, écrit Tite-Live, ils n’avaient pas l’habitude d’être vaincus. Ils se sont donc retrouvés face à une situation inédite et le consul a commis une faute en ne se préoccupant pas de l’état d’esprit de ses hommes tout de suite après la bataille. Or l’attitude du commandant en chef est très importante après une défaite : il doit montrer qu’il se soucie de ses hommes, rendre visite aux soldats blessés, s’occuper de les faire soigner50. M. Atilius Regulus n’a fait le tour de ses soldats que le lendemain, pour les pousser à reprendre les armes.
11C’est une faute que n’a pas commise M. Claudius Marcellus en 209, alors qu’il était proconsul. Ses hommes ont commencé par soutenir un combat indécis contre Hannibal à Canusium. Le lendemain, le combat s’est terminé par une déroute de l’armée romaine et de nombreux morts. Les soldats vaincus se sont réfugiés dans le camp. Mais Marcellus ne leur a pas laissé le temps de se remettre, de soigner leurs blessures. Il les a convoqués en assemblée (contio) et leur a fait honte de leur conduite. Les soldats lui ont demandé alors pardon et l’ont prié d’éprouver leur force morale (animus). Il leur a annoncé qu’il l’éprouverait dès le lendemain, parce qu’alors ils auraient à combattre. Et il n’a pas hésité à punir les cohortes qui avaient perdu leur enseigne ainsi que les centurions des manipules qui les avaient aussi perdues51. Loin de passer la nuit dans le découragement le plus complet, les hommes se sont préparés au combat et se sont présentés équipés et armés, comme ils en avaient reçu l’ordre52. La version de Plutarque est la même : le discours que Marcellus a adressé aux soldats est certes plus court que celui qui se trouve dans l’œuvre livienne, mais on trouve la même réaction des soldats, la même annonce de Marcellus à propos du combat du lendemain et la même mention d’une punition contre les soldats fautifs. Plutarque mentionne rapidement l’état physique des hommes, en indiquant que certains sont dans un état critique ou très mal en point, mais c’est pour souligner que la souffrance morale causée par les paroles de Marcellus a été plus grande pour ces hommes que la souffrance physique53. Il ne s’intéresse donc à l’état des soldats après la défaite que par rapport à l’effet produit par le discours de Marcellus.
12En réalité, l’épisode de 209 ramasse en trois jours une succession d’événements qui d’ordinaire nécessitent un laps de temps plus long : il y a eu défaite, les soldats sont découragés, et ce n’est qu’avec le temps que le commandant en chef arrive à lutter contre ce découragement, si bien que les soldats demandent ensuite eux-mêmes d’aller au combat, afin de réparer la honte de la défaite.
13Si le camp est un refuge, un moyen de reprendre ses esprits, une étape dans le combat en quelque sorte, il peut aussi se révéler dangereux pour les soldats, en cas de défaite, parce que l’ennemi victorieux peut arriver à tout moment et le prendre facilement d’assaut, tuant les soldats qui s’y sont réfugiés. Abandonner le camp, c’est alors reconnaître sa peur et sa défaite. En 423, un combat entre les troupes du consul C. Sempronius Atratinus et les Volsques s’est terminé au soir sans vaincus et vainqueurs ; cette incertitude a répandu l’épouvante (pauor) dans les deux armées, qui ont pensé être toutes les deux vaincues et qui ont quitté leur camp, abandonnant blessés et bagages pour se réfugier dans les montagnes voisines54. En 208, après la mort de Marcellus lors d’une embuscade et sa propre blessure, le consul, T. Quinctius Crispinus, a quitté le camp avec l’armée la nuit suivante et en a établi un autre dans les montagnes, sur un point élevé et protégé55. Tite-Live note qu’il a été effrayé par la mort de Marcellus et sa blessure ; s’il venait à mourir, en effet, l’armée romaine serait en position de faiblesse, et il fallait lui assurer une position solide. C’est ce qu’ont craint en 185 les préteurs C. Calpurnius Piso et L. Quinctius Crispinus, défaits lors d’une rencontre dans la péninsule Ibérique : par crainte d’être assiégés le lendemain de la bataille dans leurs retranchements, ils ont profité de la nuit pour quitter le camp56. En 171, lors d’un combat contre Persée, les Romains et leurs alliés ont été vaincus. Ils se sont réfugiés dans leur camp, mais avaient peur d’y être attaqués ; c’est pourquoi le consul P. Licinus Crassus se résolut finalement à suivre le conseil d’Eumène : abandonner le camp, alors qu’il considérait cela comme honteux, parce que c’était avouer sa peur (et sa défaite), passer le Pénée et établir sur cette autre rive un autre camp ; l’abandon du camp a eu lieu de nuit57. Un camp vide, c’est le signe d’une défaite. Du reste, c’est précisément ce qu’a pensé en 423 le décurion de cavalerie Sex. Tempanius, qui s’est conduit de façon exemplaire pendant la bataille et est resté bloqué sur une éminence pendant une partie de la nuit. Quand il a appris au lever du jour que les Volsques avaient abandonné leur camp, il a pensé logiquement et avec joie qu’ils avaient été vaincus. Son premier mouvement a donc été de rejoindre le camp romain : les Romains victorieux ne pouvaient que s’y trouver. Comme cela n’a pas été le cas, il a décidé, ne sachant pas où se trouvait le consul, de revenir à Rome avec ses cavaliers, pour y chercher refuge58. C’est cet abandon du camp qui a été reproché au consul lors d’un procès, un an plus tard, et il a été condamné en 420 à payer une amende59. Les soldats de C. Ampius, préfet des alliés en 201, ont également abandonné de nuit le camp où ils s’étaient réfugiés après avoir subi une défaite et avoir perdu leur commandant. C’était certes une façon de reconnaître leur défaite, mais surtout, dans la mesure où ils n’avaient plus de commandant, c’était la seule chose qu’ils pouvaient faire : quitter le camp pour rejoindre le consul, le commandant en chef60. Même si Tite-Live ne l’écrit pas toujours explicitement, quitter le camp après une défaite traduit donc, sauf s’il s’agit d’une manœuvre mûrement réfléchie, le découragement et la peur qui se sont emparés aussi bien des soldats que des officiers.
14Que se réfugier dans le camp après une défaite ne soit pas utile, c’est ce que montrent les événements qui se produisirent après la bataille de Cannes, en 216. Un certain nombre de soldats ont trouvé refuge qui dans le petit camp, qui dans le grand camp. Il y a manifestement beaucoup de blessés parmi eux, et tous sont épuisés par les efforts fournis lors de la bataille. Mais à ces faiblesses physiques s’ajoutent un découragement, un abattement moral importants. Du reste, quand des soldats du grand camp ont envoyé des émissaires dans le petit camp pour proposer aux soldats de les rejoindre, de façon à partir ensemble pour Canusium, certains ont refusé, en parant leur refus de raisons spécieuses. D’autres aimeraient bien, mais ils manquent de courage, de force morale61. Tite-Live fait aussi la différence, à propos de ceux du grand camp qui ont fini par se rendre, entre les blessés et les lâches. Ceux qui ont quitté le grand camp avant, 4 000 fantassins environ et 200 cavaliers, c’étaient ceux qui avaient assez de forces physiques et morales62. La faiblesse physique peut empêcher certains soldats de quitter le camp, le manque de forces entraînant le manque de courage ou de force morale, cet animus qui permet au soldat d’aller au combat et de vaincre. Tite-Live semble faire la différence entre ceux qui étaient blessés et ceux qui ont manqué de courage, les premiers n’ayant pas la capacité physique de quitter le grand camp, à la différence des seconds. Ils ont eu cependant la possibilité de mourir au combat, ils avaient encore la possibilité de se tuer plutôt que de tomber entre les mains de l’ennemi. Tite-Live ne mentionne pas à ce moment de son ouvrage le sentiment de terreur qu’il décrit à l’occasion d’autres défaites. Les soldats de Cannes étaient du reste sans doute au-delà de la terreur, compte tenu de l’ampleur de la défaite. À propos de la bataille d’Herdonéa, en 212, une défaite également très lourde (elle est qualifiée de clades, comme la bataille de Cannes)63, l’historien évoque cependant la peur et le désespoir qu’ont connus les soldats de Cannes, sentiments qui les ont poussés à se rendre à l’ennemi64. Le désespoir traduit bien l’abattement qui a dû être celui de ces hommes. Du reste, pour justifier leur projet d’abandonner l’Italie, les membres de l’élite ont avancé que la situation de la République était désespérée, digne de lamentations65. Leur réaction, déserter, quitter l’Italie et se réfugier chez un roi, est unique. C’est l’occasion pour Tite-Live de mettre en valeur Scipion, le futur Africain, « chef prédestiné de cette guerre » (fatalis dux huiusce belli) : la rapidité de son action a permis d’étouffer le projet dans l’œuf. C’est aussi pour l’historien l’occasion d’insister sur le caractère absolument monstrueux de cet événement66. Cela contribue à faire de Cannes un unicum.
15Après une défaite, l’armée vaincue ne parvenait enfin pas toujours à trouver refuge dans son camp, ne serait-ce que parce que l’ennemi s’en était emparé. Dans ce cas, elle se réfugiait dans une ville voisine qui acceptait, à quelques exceptions près (les rescapés des armées des Scipions vaincues par Hasdrubal ont été tués par les habitants, et Scipion le futur Africain a pris la ville et a tué tous les habitants plus tard67), de l’accueillir. Les habitants pouvaient se contenter d’accueillir les soldats, sans plus, comme les habitants de Canusium pour les soldats de Cannes, ou leur fournir des vivres, des vêtements et de l’argent pour la route, comme une femme de Canusium nommée Busa68. Mais les soldats n’arrivaient pas tous au même moment au même endroit. Après la bataille de Cannes par exemple, Varron s’est réfugié à Vénouse avec 50 cavaliers. D’autres soldats, 10 000, se sont réfugiés dans le grand camp, d’autres, 7 000, dans le petit, d’autres enfin, 2 000, à Cannes. Ces derniers ont tout de suite été capturés par l’ennemi, parce qu’il n’y avait pas de fortifications. Une partie des hommes du grand camp, rejoints par un petit nombre des hommes du petit camp, ont réussi à gagner Canusium, en groupes ou dispersés69. C’était donc une obligation que de réunir ainsi les débris d’une armée vaincue et de les placer sous l’autorité d’un chef. Après la bataille d’Herdonéa, en 212, au cours de laquelle le commandant en chef, le préteur Cn. Fulvius Flaccus, a pris la fuite, suivi de 200 cavaliers environ70, le Sénat a chargé les consuls de recueillir les débris des deux armées, pour éviter qu’ils ne se rendent à l’ennemi71. Les soldats livrés à eux-mêmes ne savent en effet pas où aller et pourraient avoir la tentation de déserter ou de se rendre à l’ennemi. En 211, après le désastre subi par l’armée de Cn. Cornelius Scipion et la mort de ce dernier, ce fut un chevalier romain, L. Marcius, qui recueillit les débris de l’armée72. Ce fut du reste lui que les soldats choisirent ensuite comme commandant en chef73. Pour montrer combien le légat Ap. Claudius Centho était un mauvais commandant en chef et un lâche, lui qui, aveuglé par la cupidité, n’a pris aucune précaution en 170 lors de sa tentative pour reprendre Uscana, Tite-Live note qu’il ne s’est pas arrêté dans sa fuite pour recueillir et sauver ses soldats dispersés çà et là et qu’il a été à l’origine d’un désastre (clades)74.
16Un élément a en effet aussi une grande influence sur les réactions des soldats après une défaite : la présence ou non d’un chef. Ce dernier pouvait les faire agir, secouer l’abattement général. Il était le plus à même de prendre des décisions pour les soldats. Tite-Live note à propos des soldats survivants de la bataille de Cannes qui se trouvaient dans les deux camps qu’une foule de soldats à moitié armés se trouvait sans chef75. Cela n’a pas empêché un certain nombre des soldats du grand camp de prendre une décision : rejoindre Canusium, mais s’ils pouvaient proposer cette solution à ceux du petit camp, ils ne pouvaient pas la leur imposer : ils n’avaient pas l’autorité nécessaire. Après une très lourde défaite, le commandant en chef ou les officiers supérieurs n’étaient toutefois pas toujours obéis par leurs hommes : le tribun militaire P. Sempronius Tuditanus, qui se trouvait dans le petit camp, n’est arrivé à persuader que 600 hommes de se joindre à lui76. Tite-Live écrit que les soldats vaincus ont agi en obéissant aux sentiments que leur inspiraient soit leur caractère soit le hasard plutôt qu’à la réflexion personnelle ou aux ordres de quelqu’un77, ce qui veut dire que la défaite et l’abattement qu’elle a suscité ont effacé la cohésion et l’esprit de corps qui existaient entre les soldats ; c’est désormais le règne du chacun pour soi, la réflexion, l’obéissance et la discipline ont disparu78.
17Il arrive cependant que des soldats dont le chef a été tué lors du combat parviennent à s’entendre et à prendre une décision, qui n’est toutefois pas toujours la meilleure : en 107, les hommes du consul L. Cassius Longinus, tué lors d’un combat contre les Gaulois Tigurins, ont négocié avec l’ennemi et obtenu la vie sauve en échange d’otages et de la moitié de ce qu’ils possédaient79.
18En l’absence de chef, les soldats pouvaient aussi décider de rejoindre le camp le plus proche. En 402, lors d’une bataille contre les Falisques, les Capénates et les habitants de Véies, les soldats de M’. Sergius Fidenas ont été vaincus ; une petite partie s’est réfugiée dans le camp de L. Verginius, un autre tribun militaire à pouvoir consulaire participant aussi au siège de Véies ; les autres ont suivi M’. Sergius et fui jusqu’à Rome80. En 211, dans la péninsule Ibérique, après la mort de P. Cornelius Scipio et la lourde défaite qu’ils venaient de subir, les survivants, qui avaient d’abord trouvé refuge dans la forêt, ont regagné le camp d’où ils étaient partis, camp que P. Cornelius Scipio avait laissé à la garde du légat Ti. Fonteius avec des soldats81. Le refuge pouvait aussi ne pas être leur camp : après la défaite d’Herdonéa en 210 et la mort de leur commandant en chef, le proconsul Cn. Fulvius Centumalus Maximus, les soldats qui ont échappé au désastre (clades), ne pouvant regagner leur camp, car Hannibal s’en était emparé, se sont réfugiés à moitié armés auprès du consul Marcellus, dans le Samnium. Cela n’a pas été une manœuvre collective, puisqu’ils y sont arrivés par des chemins opposés82. Même réflexe de la part des soldats de C. Ampius en 201 : après la mort de leur commandant, ils ont rejoint le commandant en chef, c’est-à-dire le consul, P. Aelius Paetus. Ils ont manifestement pris cette décision après concertation entre eux83.
19De façon peu étonnante, l’une des réactions des soldats après une défaite est donc la peur et le découragement, l’abattement. Ce dernier sentiment peut être engendré par la tristesse que provoque chez les soldats le sentiment de leur échec : c’est ce qu’éprouvent les soldats du consul P. Licinius Crassus, battus en 171 par les soldats de Persée84.
20La peur peut être déjà présente sur le champ de bataille et pousser les âmes un peu faibles, écrit Sénèque, à perdre l’esprit85. Cette peur n’est pas toujours ressentie uniquement par des soldats qui ont été vaincus. Ainsi en 396, deux des tribuns militaires à pouvoir consulaire, chargés de lutter contre les Capénates et les Falisques, ont été pris dans une embuscade à Capena. L’un d’eux, Gn. Genucius Augurinus, est mort pendant le combat, le second, L. Titinius Pansa Saccus, a rallié les soldats effrayés et les a rangés en bataille86. Il y a eu incontestablement défaite, marquée par la mort d’un des commandants en chef, et effroi des soldats87, mais le second commandant en chef est parvenu à rétablir la situation, et l’effroi des soldats n’a été finalement qu’un épisode de l’engagement. En revanche, l’événement a provoqué chez les soldats qui étaient en train d’assiéger Véies (ainsi qu’à Rome) de la terreur88. Cette terreur a été causée par des bruits affirmant que l’armée avait été taillée en pièces et que les ennemis arrivaient. Elle a été assez forte pour pousser un certain nombre de soldats à déserter (Camille sévit contre eux après sa nomination comme dictateur). Ce qui n’était pas un désastre (clades) a ainsi failli le devenir89.
21C’étaient cependant majoritairement les soldats qui avaient été vaincus qui ressentaient cette peur : en 199 contre les Insubres, les hommes du préteur Cn. Baebius Tamphilus sont tremblants90. Cette peur les prive de leur animus, de la force morale nécessaire pour aller au combat et en revenir victorieux, et c’est un mot que l’on retrouve souvent quand il s’agit de décrire l’état d’esprit des soldats après une défaite : en 196, les hommes du consul M. Claudius Marcellus ont été surpris par des Boïens alors qu’ils construisaient leur camp après une journée de marche ; ils se sont certes défendus, ont pu continuer et finir la construction du camp, mais les pertes ont été lourdes ; le consul juge donc nécessaire de laisser en repos les soldats, de façon à ce qu’ils retrouvent leur courage perdu sous l’effet de la terreur91 ; en 185, les propréteurs C. Calpurnius Piso et L. Quinctius Crispinus se sont efforcés de rendre leur force morale à leurs soldats92.
22Par quoi cette terreur qui paralyse ainsi le soldat est-elle causée ? Par le fait même d’avoir été vaincus : le sentiment de leur supériorité, entretenu par les commandants en chef, fait que les soldats ont peur d’un ennemi qui a été capable de les vaincre ; par le souvenir de ce qu’ils ont vécu sans doute et en particulier de la peur éprouvée sur le champ de bataille : cette peur est occultée par le sentiment que procure la victoire, mais elle ne disparaît pas en cas de défaite ; par le sentiment qu’ils auraient pu mourir ; enfin par l’insécurité dans laquelle ils se sentent, même s’ils ont pu trouver refuge dans leur camp : il peut à tout moment être assiégé par l’ennemi ; une fois le camp abandonné pour une position plus sûre, la peur s’éloigne93. À plus long terme, quand les impressions ressenties sur le champ de bataille s’effacent, quand la peur se dissipe, c’est la honte qui domine, qui ranime l’animus et qui pousse les soldats à vouloir se battre contre le même ennemi, pour effacer la honte de la défaite par une victoire : ils demandent alors eux-mêmes le combat au commandant en chef94.
23Par-delà les différences, les lendemains de bataille chez Tite-Live se ressemblent finalement beaucoup. Ils sont difficiles à vivre pour le soldat romain, tout romain qu’il soit ou peut-être parce qu’il est romain. Un épisode résume finalement à lui seul son comportement alors, bien qu’il s’agisse d’un épisode où il n’y a pas eu à proprement parler de bataille : l’épisode des fourches Caudines95. Les soldats romains ont en effet été attirés dans un défilé par les Samnites et ils ont été bloqués : ils ne pouvaient ni avancer ni faire marche arrière. Leur animus a alors été touché, ils ont ressenti à la fois torpeur et engourdissement, et ils ne pouvaient plus bouger ; par la force de l’habitude, quelques-uns ont commencé cependant à monter les tentes des consuls, et tous ont fini, sans qu’il fût besoin de leur en donner l’ordre et tout en ayant conscience que c’était parfaitement inutile, par construire un camp retranché, pour ne pas ajouter les torts au malheur, écrit Tite-Live. Quelle que soit sa situation, un soldat romain se doit de construire un camp pour y passer la nuit. De même, bien que ce fût tout aussi inutile, puisque l’armée ne pouvait rien faire, les légats et les tribuns sont allés trouver les consuls : dans une telle situation, il était d’usage de convoquer un conseil. Les soldats ne se sont pas reposés pendant la nuit. Ce n’étaient pas le soin des blessés ou les cris des mourants qui les empêchaient de dormir, mais les interrogations et les différentes solutions que chacun envisageait selon son caractère.
24Le Romain ne montre-t-il jamais le moindre signe de faiblesse après une défaite ? Bien que les notations de Tite-Live en ce domaine ne soient pas très nombreuses, elles n’en existent pas moins, ce qui n’est pas le cas des autres auteurs décrivant les mêmes batailles. Tite-Live est très attentif aux questions d’état d’esprit et de courage, en particulier au moment des batailles96. Juste avant de discuter du résultat d’une confrontation entre Alexandre et les Romains, l’historien écrit : « Ce qui semble avoir le plus d’importance dans la guerre, ce sont le nombre et la valeur des soldats, le talent des généraux et la fortune qui a une grande influence sur toutes les choses humaines et surtout dans les opérations militaires97. » Et cette importance accordée à la force morale se retrouve dans ses descriptions des lendemains de défaite. En laissant de côté tout ce qui concerne les réactions des civils et des autorités romaines, puisque c’est un sujet qui n’a pas été abordé, l’évocation des lendemains de bataille que l’on trouve chez Tite-Live montre que le soldat romain peut connaître des moments de faiblesse qui, s’ils ne sont que passagers, n’en sont pas moins importants et traumatisants pour lui. Quand le commandant en chef ou des officiers ne sont pas là dans ces moments ou ne font pas leur devoir, le soldat peut aller jusqu’à se rendre à l’ennemi. Quand le commandant en chef est là, quand sa présence rassure et qu’il peut instaurer le retour de la discipline, de la routine, comme la construction d’un camp, ces moments, s’ils laissent des souvenirs au soldat, prêtent moins à conséquence.
Notes de bas de page
1 N. Rosenstein, Imperatores victi. Miltary Defeat and Aristocratic Competition in the Middle Late Republic, Berkeley, University of California Press, 1990.
2 Voir aussi N. Rosenstein, « “Imperatores Victi”: The Case of C. Hostilius Mancinus », Classical Antiquity, 5, 2, 1986, p. 230-252 ; et Id., « War, Failure, and Aristocratic Competition », Classical Philology, 85/4, 1990, p. 255-265.
3 J. H. Clark, Triumph in Defeat. Military Loss and the Roman Republic, Oxford/New York, OUP, 2014, va même plus loin que N. Rosenstein : elle pense que la défaite a parfois représenté un avantage électoral pour certains imperatores uicti.
4 Par exemple W. J. Tatum, American Journal of Philology, 113/4, 1992, p. 637-641 ou K.-J. Hölkeskamp, Gnomon, 66, 4, 1994, p. 332-341.
5 M. Waller, « Victory, Defeat and Electoral Success at Rome, 343-91 B.C. »., Latomus, 70, 2011, p. 18-38, ici p. 20.
6 Ibid., p. 27.
7 J. Rich, « Roman Attitudes to Defeat in Battle Under the Republic », dans F. Marco Simón, F. Pina Polo et J. Remesal Rodríguez (éd.), Vae victis ! Perdedores en el mundo antiguo, Barcelone, Universitat de Barcelona 2012, p. 83-111.
8 Ibid., p. 88 et p. 110.
9 Rosenstein, « Imperatores victi… », art. cité., p. 258.
10 Rich, « Roman Attitudes to Defeat… », art. cité, p. 94-100, pour une critique.
11 W. Will, « Imperatores victi. Zum Bild besiegter römischer Consuln bei Livius », Historia, 32, 1983, p. 173-182 ; B. Mineo, « L’interprétation livienne de l’histoire : le récit des défaites romaines de la Trébie à Cannes », REL, 75, 1997, p. 113-128 ; Rich, « Roman Attitudes to Defeat… », art. cité, p. 91-93.
12 Rich, « Roman Attitudes to Defeat… », art. cité., p. 89-94, pour une critique.
13 H. W. Benario (éd.), « Roman Military Disasters and their Consequences », CW, 96, 4, 2003, p. 363-406 ; G. K. Golden, Crisis Management during the Roman Republic. The Role of Political Institutions in Emergencies, Cambridge, CUP, 2013 ; I. Östenberg, « War and Remembrance: Memories of Defeat in Ancient Rome », dans B. Alroth et C. Scheffer (éd.), Attitudes towards the Past in Antiquity. Creating Identities, Proceedings of an Intenational Conference Held at Stockholm University 15-17 May 2009, Stockholm, Stockholm University, 2014, p. 255-265.
14 J. Toner, Roman Disasters, Cambridge/Malden, Polity, 2013, p. 151.
15 D. S. Levene, Livy on the Hannibalic War, Oxford, OUP, 2010, p. 263-269 et p. 274 ; Toner, Roman Disasters, op. cit., p. 177 et p. 179.
16 Tite-Live, Histoire romaine, V, 38, 5-10. Sur les raisons avancées par les sources concernant la défaite lors de cette bataille, J. Rich, « Roman Attitudes to Defeat… », art. cité, p. 98. Pour la défaite et le dies Alliensis, V. Rosenberger, « The Gallic Disaster », dans H. W. Benario (éd.), Roman Military Disasters and their Consequences, CW, 96, 4, 2003, p. 365-373 ; Östenberg, « War and Remembrance », art cité, p. 259-261. Sauf précision contraire, toutes les dates s’entendent avant J.‑C.
17 Tite-Live, XXI, 56, 4-8. G. Daly, Cannae: the Experience of Battle in Second Punic War, Londres, Routledge, 2002, p. 14-15.
18 T. J. Luce, Livy. The Composition of His History, Princeton, Princeton University Press, 1977, p. 263-264 : c’est un exemple de la perte de la discipline militaire et du commandement, thème qui correspond à l’idée de déclin moral qui domine dans les livres 38 et 39 et que l’on trouve également dans les deux livres suivants.
19 Tite-Live, XLI, 2, 5-8 ; 3, 1-4. Florus, Abrégé de l’histoire romaine, II, 10 [I, 26] évoque seulement la prise du camp par les Istriens. H. Bruckmann, Die römischen Niederlagen im Geschichtswerk des T. Livius, Bochum-Langendreer, 1936, p. 113-115.
20 Tite-Live, X, 26, 7-14. Pour cette défaite et le nombre de soldats tués, Hölkeskamp, « Gnomon », art. cité, p. 334.
21 Tite-Live, XLI, 2, 9-10.
22 Tite-Live, II, 17, 4.
23 Tite-Live, XXXIII, 36, 7.
24 Tite-Live, X, 35.
25 Tite-Live, XXII, 6, 11 : extrema fames.
26 Tite-Live, XXII, 6, 11 : cetera.
27 Tite-Live, XXII, 52, 2 : labore, uigiliis, uolneribus etiam fessis.
28 Tite-Live, XXII, 52, 2 : ab sauciis timidisque.
29 Tite-Live, XXII, 59, 4 : fessi labore ac uolneribus.
30 Tite-Live, XXII, 59, 5.
31 Silius Italicus, Pun., X, 390-414.
32 Pour le choc qu’a pu représenter la bataille, Daly, Cannae : the Experience of Battle, op. cit., p. 167-172.
33 Tite-Live, XLIII, 21, 1. Voir ci-dessous.
34 Tite-Live, XXIX, 36, 6.
35 Tite-Live, XXXV, 1, 1-3.
36 Tite-Live, XXXVII, 57, 1-2. Pour Orose, Histoires contre les païens, IV, 20, 24, tous les soldats sont morts lors de la bataille, ce qui explique que ce soient les Marseillais qui annoncent la nouvelle à Rome. Bruckmann, Die römischen Niederlagen…, op. cit., p. 121.
37 Tite-Live, XXXIII, 25, 8-9. H. Bruckmann, Die römischen Niederlagen…, op. cit., p. 121 ; J. Briscoe, A Commentary on Livy, Books XXXI-XXXIII, Oxford, OUP, 1973, p. 298.
38 Tite-Live, XXXVIII, 41, 1-2. Appien, Syr., 43, insiste sur toutes les fautes commises par le consul à cette occasion.
39 Tite-Live, XXXVIII, 46, 8 ; Clark, Triumph in Defeat, op. cit., p. 123-125.
40 Tite-Live, XXI, 25, 8-10.
41 Tite-Live, XXI, 25, 11-13.
42 Polybe, Histoire, III, 40, 11-13.
43 Tite-Live, III, 4, 7-8 et 5, 6-8 : nec spe nec uiribus pares (III, 5, 8). Pour l’analyse de cet épisode, J. Bartolomé Gómez, Los relatos bélicos en la obra de Tito Livio. Estudio de la primera década de « Ab urbe condita », Bilbao, Servicio editorial, Universidad del pais Vasco, 1995, p. 264-271.
44 Tite-Live, X, 35. Voir aussi Zonaras, Épitomé des Histoires, VIII, 1 ; Bruckmann, Die römischen Niederlagen…, op. cit., p. 47-49 ; Bartolomé Gómez, Los relatos bélicos en la obra de Tito Livio, op. cit., p. 132-133 ; S. P. Oakley, A Commentary on Livy Books VI-X, t. IV : Book X, Oxford, OUP, 2005, p. 362-366.
45 Tite-Live, X, 35, 2 : terror ; 3 : sollicita nox ; 7 : pauor.
46 Tite-Live, X, 35, 6 : militum iacere animos.
47 J. E. Lendon, « The Rhetoric of Combat: Greek Military Theory and Roman Culture in Julius Caesar’s Battle Descriptions », Classical Antiquity, 18/ 2, 1999, p. 296-300.
48 Tite-Live, X, 35, 6 et 11.
49 Tite-Live, X, 35, 17-36. Frontin, Str, II, 8, 11 et IV, 1, 29, pour la réaction du consul devant la fuite de ses hommes.
50 Par exemple Tite-Live, VIII, 36, 5-8, à propos de L. Papirius Cursor en 325 ; Oakley, A Commentary on Livy Books, op. cit., p. 749-750.
51 Tite-Live, XXVII, 13, 1-9.
52 Tite-Live, XXVII, 13, 10. Sur la défaite et la victoire le jour suivant, qui doit relever de l’exagération ou de la fabrication Rosenstein, « Imperatores Victi… », art. cité, p. 237-238.
53 Plutarque, Marc., XXV, 6-10 ; XXVI, 1.
54 Tite-Live, IV, 39, 6.
55 Tite-Live, XXVII, 28, 2. Pour la mort de Marcellus, M. Caltabiano, « La morte del console Marcello nella tradizione storiografica », dans M. Sordi (éd.), Storiografia e propaganda, Milan, Vita e Pensiero, 1975, p. 65-81 ; E. M. Carawan, « The Tragic History of Marcellus and Livy’s Characterization », CJ, 80, 1985, p. 140-141 ; Levene, Livy on the Hannibalic War, op. cit., p. 206-207.
56 Tite-Live, XXXIX, 30, 4. Pour cette bataille, F. Cadiou, Hibera in terra miles. Les armées romaines et la conquête de l’Hispanie sous la République (218-45 av. J.‑C.), Madrid, casa de Velàsquez, 2008, p. 104-105.
57 Tite-Live, XLII, 60, 3-4.
58 Tite-Live, IV, 39, 8-9.
59 Tite-Live, IV, 40, 1 et 5 ; 44, 10. Pour ce procès, Rich, « Roman attitudes to defeat… », art. cité, p. 101-102.
60 Tite-Live, XXXI, 2, 5-11.
61 Tite-Live, XXII, 50, 6 : animus deesse.
62 Tite-Live, XXII, 52, 4 : quibus satis uirium et animi fuit.
63 Sur cette bataille et sa réalité historique, F. Münzer, s.v, Fulvius nos 43 et 54 in RE, VII, 1, 1910, col. 235-236 et 238-239 ; A. J. Toynbee, Hannibal’s Legacy: the Hannibalic war’s effects on Roman life, t. II : Rome and her neighbours after Hannibal’s exit, Londres/New York, OUP, 1965, p. 48 ; P. Marchetti, Histoire économique et monétaire de la 2e guerre punique, Bruxelles, Palais des Académies, 1978, p. 64-65 ; Rosenstein, Imperatores victi. Miltary Defeat and Aristocratic Competition, op. cit., p. 207-208 ; B. Mineo, Tite-Live et l’histoire de Rome, Paris, Klincksieck, 2006, p. 282 ; Rich, « Roman attitudes to defeat… », art. cité., p. 103-104.
64 Tite-Live, XXV, 22, 2-3.
65 Tite-Live, XXII, 53, 4 : desperatam comploratamque rem esse publicam.
66 Tite-Live, XXII, 53, 6 : malum, praeterquam atrox, super tot clades etiam nouum ; Valère Maxime, V, 6, 7 ; Silius Italicus, Pun., X, 415-448 ; Dion Cassius, Histoire romaine¸57, 28 ; Zonaras, IX, 2. Clark, Triumph in Defeat, op. cit., p. 65.
67 Tite-Live, XXVIII, 19-20 ; Appien, Iber., 32 ; Zonaras, IX, 10. Pour l’identification de cette ville, Ilourgéia, D. Hoyos, « Generals and Annalists: geographic and chronological obscurities in the Scipios’ campaigns in Spain, 218-211 B.C. », Klio, 83, 2001, p. 79 et 87-88.
68 Tite-Live, XXII, 52, 7.
69 Tite-Live, XXII, 49-50 et 52, 4 et 7. Voir aussi Polybe, III, 117, 2-3 et 12 ; Appien, Han., 24 et 26 ; Silius Italicus, Pun., X, 387-390.
70 Tite-Live, XXV, 21, 9 ; 22, 2-3 ; Orose, IV, 16, 17.
71 Tite-Live, XXV, 22, 2-3. J. D. Chaplin, Livy’s Exemplary History, Oxford, OUP, 2000, p. 62-64, qui note à ce propos que Cannes est un exemplum.
72 Tite-Live, XXV, 37, 4 ; Valère Maxime, Des faits et des paroles mémorables, II, 7, 15 ; Bruckmann, Die römischen Niederlagen…, op. cit., p. 106 ; Hoyos, « Generals and Annalists… », art. cité, p. 89 ; Cadiou, Les armées romaines et la conquête de l’Hispanie, op. cit., p. 93 et p. 436-437.
73 Tite-Live, XXV, 37, 5-6 ; Valère Maxime, II, 7, 15.
74 Tite-Live, XLIII, 10, 8. Ce n’est pas Ap. Claudius Centho qui a ainsi tenté de reprendre Uscana, mais L. Coelius (Tite-Live, XLIII, 21, 1). MRR, I, 422. Voir ci-dessus.
75 Tite-Live, XXII, 50, 3 : sine ducibus.
76 Tite-Live, XXII, 60, 9-10 : T. Manlius Torquatus a souligné les efforts du tribun, pour mettre en valeur la lâcheté de ceux qui ont refusé de le suivre.
77 Tite-Live, XXII, 50, 12 : Haec apud uictos magis impetu animorum, quos ingenium suum cuique aut fors dabat, quam ex consilio ipsorum aut imperio cuiusquam agebatur.
78 Chaplin, Livy’s Exemplary History…, op. cit., p. 61.
79 Tite-Live, Per., LXV ; César, BG, I, 7, 4 ; 12, 5-7 ; 14, 7.
80 Tite-Live, V, 9, 12. Pour le procès concernant les deux hommes, Rich, « Roman attitudes to defeat », art. cité., p. 101-102.
81 Tite-Live, XXV, 36, 12 ; Hoyos, « Generals and Annalists… », art. cité, p. 89.
82 Tite-Live, XXVII, 1, 15 : diuersis itineribus. Pour Appien, Hann., 48, les soldats survivants se sont réfugiés à l’intérieur d’une fortification devant leur camp et ont empêché Hannibal de prendre leur camp.
83 Tite-Live, XXXI, 2, 5-11.
84 Tite-Live, XLII, 60, 3 : maestitia tantum ex male gesta re. Pour l’épisode, Plutarque, Aem., IX, 2 ; Apophth. rois et commandants, 197f ; Orose, IV, 20, 37 ; Eutrope, Abrégé de l’histoire romaine, IV, 6 ; Justin, Abrégé des histoires philippiques, XXXIII, 1, 4 ; Zonaras, IX, 22.
85 Sénèque, Nat., VI, 29, 1-3 : lors des grandes catastrophes, pour lutter contre la peur et la douleur ou parce que leur peur et leur douleur sont insupportables, certaines personnes peuvent perdre l’esprit.
86 Tite-Live, V, 18, 7-8.
87 Tite-Live, V, 18, 8 : ex multa trepidatione militibus collectis.
88 Tite-Live, V, 18, 9 : terror ; 19, 4 : pauor. Bartolomé Gómez, Los relatos bélicos en la obra de Tito Livio, op. cit., p. 114.
89 Tite-Live, V, 18, 9.
90 Tite-Live, XXXII, 7, 5-6 : trepido exercitu.
91 Tite-Live, XXXIII, 36, 7 : a tanto terrore animos militum reficeret ; Orose, IV, 20, 11 pour la campagne de Marcellus contre les Boïens. La situation était la même en 171 (Tite-Live, XLII, 60, 3) : il fallait laisser aux soldats le temps de reprendre leurs esprits (perculsi milites animos colligerent) ; Lendon, « The Rhetoric of Combat… », art. cité, p. 295-303, pour l’importance de l’animus de ses troupes chez César. Clark, Triumph in Defeat, op. cit., p. 4-7 et p. 111, pour les campagnes de Marcellus.
92 Tite-Live, XXXIX, 30, 7 : et reficiendis ab terrore aduersae pugnae militum animis consumpserunt.
93 Tite-Live, XLII, 59, 7.
94 Tite-Live, XXXIX, 30, 8 ; 31, 2. La défaite est considérée comme un déshonneur, ignominia (Tite-Live, V, 18, 9 ; XLII, 60, 7 ; XLIII, 11, 2) ; Clark, Triumph in Defeat, op. cit., p. 125-127.
95 Tite-Live, IX, 2, 10-15 ; 3, 1-4. Voir aussi Cicéron, Sen., 41 ; Off., 3, 109 ; Valère Maxime, VII, 2, ext. 17 ; Florus, I, 16, 9-11 ; Appien, Samn., 4, 2 ; Aulu-Gelle, NA, XVII, 21, 36 ; Dion Cassius, fr. 36, 9-14 ; Orose, III, 15, 2-6 ; Zonaras, VII, 26. Pour cet épisode, N. Horsfall, « The Caudine Forks: Topography and Illusion », PBSR, 50, 1982, p. 45-52 ; C. Berrendonner, « Les prisonniers de guerre romains durant le conflit samnite », dans E. Caire, S. Pittia (éd.), Guerre et diplomatie romaines (ive-iiie siècles). Pour un réexamen des sources, Aix-en-Provence, Publications de l’université de Provence, 2006, p. 157-173.
96 Levene, Livy on the Hannibalic War, op. cit., p. 282-284.
97 Tite-Live, IX, 17, 3 : Plurimum in bello pollere uidentur militum copia et uirtus, ingenia imperatorum, fortuna per omnia humana maxime in res bellicas potens.
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