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La Parole de Dieu et les textes des hommes
p. 9-10
Texte intégral
1Les hommes du Moyen Âge considéraient la Bible comme un livre saint – ou plus exactement, comme le livre saint. Il s’agissait là d’un des fondements de leur conception du monde. La forme même de ce livre et ce qui l’entourait en étaient autant de manifestations évidentes. Il suffit de penser aux précieuses reliures ou à l’encensement de l’évangéliaire qui précédait la lecture de l’évangile. Certains manuscrits de l’évangile de saint Jean avaient une fonction apotropaïque – de protection quasi magique - s’apparentant à celle des reliques. Le caractère sacré qui était attribué à la Sainte Écriture ne se manifeste cependant pas seulement à travers ces représentations symboliques, il s’exprime également dans les attitudes adoptées vis-à-vis de la teneur du texte. Or, si cette teneur permettait de rencontrer le divin, elle était néanmoins transmise par la main de l’homme. On attribuait certes les textes bibliques, sans exception, à l’Esprit Saint ; cependant, c’étaient des hommes qui participaient à leur transcription et à leur rédaction. Si la relation entre l’auteur divin et les légataires humains lors de l’élaboration de la Sainte Écriture a occupé les penseurs chrétiens de toutes les époques, c’est seulement au cœur du Moyen Âge qu’on s’est penché plus avant sur le rôle joué par les hommes dans ce processus.
2Dans la partie occidentale de l’Empire romain et dans l’Europe médiévale, le caractère indirect et seulement intermédiaire de la Parole reçue se manifesta d’une autre manière encore, à savoir par le biais de la traduction des textes en latin. S’il était aisé de percevoir que les traductions, y compris celle de tels textes sacrés, étaient le fait de la main de l’homme, il était parfois difficile de l’admettre. En outre, dans l’Empire occidental et l’Europe médiévale, le latin était la grande langue universelle de culture qui prévalait pour toutes sortes de propos intellectuels, et surtout c’était la langue de l’église. Or on pouvait ressentir comme un affront que ce soient justement les textes les plus importants qui soient traduits d’autres langues, découlent d’autres textes et représentent pour ainsi dire une instance de second ordre. Nous aborderons ultérieurement les quelques tentatives qui ont été effectuées afin de faire oublier le fait d’être pénalisé en matière linguistique.
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