III – Le Ventoux, terre d’accueil des artistes
p. 69-117
Texte intégral
1– Le Ventoux vu par les peintres
1Le Ventoux est un sujet privilégié pour les peintres, soit à titre principal, soit comme arrière-fond, pour mettre en valeur un village ou la végétation, éventuellement un groupe de personnages. L’intérêt du Ventoux tient à la diversité des profils qu’il présente. Cette montagne change tout au long de la journée, au fil des saisons, au gré des années. Elle change en restant ! Dans la journée, il n’est pas rare de lever les yeux vers elle et de dire : « Tiens ! Tu as vu cette couleur ! Cette lumière ! Cette densité ! ». Lointain et paisible, le Ventoux est là pour vous rappeler qu’il y a toujours quelque chose de plus haut et de plus large, qui vient directement du centre de la terre. La représentation artistique du Ventoux aide ainsi à nous affranchir d’une vie pratique et étriquée pour trouver un nouvel éclairage à la vie, redéfinir les objectifs et susciter de nouvelles joies.
2En réalité, à force d’observation des différentes peintures du Ventoux, j’en suis venu à la conclusion suivante : peindre le Ventoux comme sujet principal ou comme accessoire à un autre paysage ne change pas grand- chose. Même en arrière-fond, le Ventoux domine. De toute façon, les paysages avoisinant le Ventoux lui restent très proches, car ils se sont construits autour du Ventoux, dont la beauté distante leur donne une raison d’être. Autour du Ventoux, tout est orienté vers le Ventoux : les constructions, les gens, la végétation, les animaux. Cette montagne offre une présence amie, que l’on ne peut atteindre, mais que l’on sait toute proche et bienfaitrice. Elle structure le paysage en lui imposant un sens, une vertu et une teneur.
3On peut aussi, en tant que peintre, aborder le Ventoux de l’intérieur, comme l’ont fait les frères Grivolas au XIXe siècle. Les collines et les chemins de cette belle montagne ne déçoivent jamais et se rappellent à vous sous forme de souvenirs joyeux. Une pensée sombre disparaît toujours à l’évocation du Ventoux et de ses trésors intérieurs ! Trésors : le mot est jeté. Le Ventoux requiert l’artiste comme un aimant attire le fer.
4À l’image de la plante ou de la fleur qui se tourne vers le soleil, l’artiste qui croise le Ventoux s’y rendra et en conservera une trace. Certes, on se demande toujours, avant de partir, si la promenade dans ses vallats et dans ses cols vous apportera quelque chose. En réalité, on éprouve à chaque fois une satisfaction profonde à parcourir ses chemins, malgré l’effort physique plus ou moins dur. Il y a du renouvellement indéfini dans tout ce qui habite cette montagne.
5D’aucuns diront qu’il est facile de s’attacher à une montagne, toujours là, qui ne déçoit jamais, qui ne fait jamais faux bond. Ce n’est pas tout à fait exact. En l’abordant, c’est à chaque fois un renouveau, une nouvelle occasion de prendre contact avec soi, la vie, notre mère la terre, de se laisser prendre entre ses bras et dans sa grâce. Toutes les cartes sont redistribuées.
6Tout est forme sur le Ventoux. De loin, il dresse son profil stable et imposant, en accent circonflexe, avec une fierté qui se retrouvent chez les comtadins. Mais de près, il offre une diversité d’aspérités qui sont le résultat de ruissellements, d’effondrements, d’éboulis et de tempêtes. Le Ventoux, comme la vie, est parsemé de cicatrices, d’accidents (géologiques) et de failles plus profondes (que l’on dénomme avens). Il suffit de parcourir la combe de Curnier pour s’en persuader : on imagine aisément entre les murs des falaises courbées, creusées à la base, l’eau dévalant furieusement la montagne comme dans un torrent. Même par un été caniculaire, cet étroit passage conserve de l’eau entre les cailloux jonchant le sol.
7Tout est mouvement sur le Ventoux. Le propre de la technique artistique est justement de traduire ce mouvement à travers une représentation inerte. Allons plus loin : l’art est non pas une représentation d’une belle chose, mais la belle représentation d’une chose. Or, tout est action sur cette montagne, par l’effet du temps qu’il fait, du temps qui passe, de l’eau qui l’inonde et le traverse de toutes parts – même au cœur – pour alimenter les résurgences, du vent qui le balaie, des progressions végétales et des activités animales. L’arbre paisible peut voir en quelques minutes son feuillage tourmenté par les éléments naturels. Il faut toujours s’enquérir de la météorologie lorsqu’on veut se promener sur le Ventoux, surtout si l’on monte au sommet. Nombreux sont ceux qui ont dû rebrousser chemin à la suite d’un brouillard soudain, d’une pluie torrentielle, d’une neige abondante, d’un mistral violent ?
8Tout est couleur dans le Ventoux ! La palette des verts, des bruns, des jaunes, des blancs est d’une richesse luxueuse. Il y aussi les oranges et les roses des couchers du soleil, qui, d’un côté, embrasent l’horizon et de l’autre, habillent la montagne de teintes inouïes ; qui n’a pas vu un jour les flancs du Ventoux, habituellement verts, devenir bleus sous l’effet d’une lumière rasante ? Les peintres Bonaventure Laurens, Seyssaud, Gras, Chabaud, Delpuech en ont laissé une représentation moderne et éclatante dans des tableaux radieux, où le lien essentiel est clairement établi entre la montagne et le ciel. Qui n’a pas surpris un jour le Ventoux tressaillir de ses plissements, qui traduisent dans la lumière ou la pénombre la présence de ses combes ? Ce questionnement du Ventoux qui reste en changeant, qui change en restant est au cœur d’un grand nombre d’œuvres. Qui ne s’est pas arrêté pour admirer le feu des érables, la couleur fauve des vignes, le doré des hêtres, le rouge des cerisiers en automne ? Le peintre Jean-Henri Turquin l’a bien compris, en embrasant certaines de ses toiles de ces couleurs chaudes si représentatives du Ventoux.
9Venons-en ! Tout est lumière sur le Ventoux, surtout au sommet. Pour reprendre l’expression de Jacqueline de Romilly lorsqu’elle gravissait la Sainte Victoire, « on ne décrit pas la lumière, on est dedans, doré par elle, porté par elle ». Rien n’est plus beau que le Ventoux illuminé sous le soleil écrasant de l’été ou sous la neige ! Même cette photo prise par Firmin Meyer dans la pénombre matinale, du profil de skieurs – notamment Pierre de Champeville – assis sur les éléments de l’observatoire par temps de neige est lumineuse ! Le Ventoux, paré de lumière, prend une dimension quasi-divine, à moins de dire que la lumière elle-même, maîtresse, dominante, imposante, divinise la montagne.
10Le Ventoux est aussi le lieu des choix. Quand on l’aborde, il faut choisir l’endroit où l’on plante son chevalet, où l’on pose son trépied de photographe, où l’on commence son chemin. Il est un apprentissage de la vie, qui impose un pays, un amour, un travail. On ne peut courir plusieurs lièvres en même temps. Le choix impose de renoncer à d’autres belles choses.
11Le Ventoux est enfin un lieu d’histoire, à travers les différents évènements qui l’ont traversé (je pense notamment aux heures tragiques de la destruction en 1794 de Bédoin et aux heures héroïques du maquis du Ventoux), à travers les différentes constructions qui l’habitent ou l’ont habité – glacières, fontaines maçonnées, chapelle, jas, routes, observatoire, cabanes de charbonniers, baraques lors du reboisement, maisons cantonnières, restaurants et hôtels, chalets, stations de ski,… Les différentes plaques commémoratives qui ont été scellées de part et d’autre (Pétrarque, Tichadou, Leenhardt, Provane, Daladier, Paul Pamard, Berthier, Pélissier, Maurice Trintignant,…) rappellent cette dimension historique.
« Parce qu’en ce lieu, plus que nulle part ailleurs, on laisse la végétation s’épanouir à sa guise, pourquoi pas les hommes aussi ? »
12Le Ventoux dégage enfin une atmosphère de liberté. Pour les travailleurs qui viennent s’échapper pendant leur temps de repos de leur bureau ou de leur atelier ; pour les citadins, qui y retrouvent l’espace ravi par les constructions de la ville ; pour les sportifs qui choisissent librement leur activité et le chemin de leur déambulation. Laissons Jacqueline de Romilly s’exprimer à ce sujet à propos de la même liberté que lui donnait la Sainte Victoire, autre montagne provençale mythique :
Dans un grand édifice moderne, on ne peut vivre que comme les autres ou contre eux ; la moindre originalité y devient désordre, refus ; Ici, au contraire, on vit loin des métiers et de leurs rancunes, loin de la bousculade et de la compétition, loin de l’énervement. Quand j’arrive ici venant de Paris, toute tendue de mille petits problèmes, ils me semblent tout à coup quelque peu comiques ; qui croirait à leur importance, comparée à la hauteur des pins et au silence des sentiers ? Et puis parce qu’en ce lieu, plus que nulle part ailleurs, on laisse la végétation s’épanouir à sa guise, pourquoi pas les hommes aussi ? (Sur les chemins de la Saint Victoire, Julliard, 1987)
Les premières représentations picturales
13Les premiers peintres qui ont laissé des représentations du Ventoux en tant que sujet principal sont, à la fin du XVIIIe siècle et au XIXe siècle, Jacob Philipp Hackert, Joseph Bidault, les frères Laurens et les frères Grivolas.
14Le peintre allemand Jacob Philipp Hackert est le premier à avoir abordé le massif du Ventoux comme thème central dans son tableau Vue du mont Ventoux depuis les environs de Carpentras (1778). Le Ventoux structure le tableau : hommes, femmes, enfants, animaux, constructions, végétation, nuages et ciel ont une place qui est dictée par la majesté du cône de pierre et orientée en fonction.
15Joseph Bidault (1758-1846), peintre, a ensuite laissé une très belle huile champêtre, remplie de douceur de vivre et d’harmonie, dans le cadre d’un contraste saisissant ; le Ventoux est là pour faire la rencontre de la riche campagne carpentrassienne avec la pureté d’un ciel bleu. Cette toile intitulée Le Ventoux et l’aqueduc de Carpentras (Musée Duplessis, Carpentras), a été reproduite dans l’ouvrage de Jean-Paul Chabaud.
16Le peintre Bonaventure Laurens (1801-1890) a peint une très belle aquarelle, actuellement entre les mains du musée Duplessis, à Carpentras : Le Mont Ventoux, vue de Saint Didier, qui est aussi reproduite dans l’ouvrage de Jean-Paul Chabaud. C’est le premier tableau – précurseur ! -qui représente le Ventoux en bleu, comme une étape de transition avec le ciel. Son frère, le peintre Jules Laurens (1825-1901), a laissé, pour sa part, deux très beaux tableaux ayant pour sujet le Ventoux : Vue de l’Auzon, de l’aqueduc de Carpentras et du Mont Ventoux (Musée Duplessis, Carpentras) ; Le Mont Ventoux (effet du matin) vu de la route de Carpentras à Bédoin au-dessus de Saint Pierre-de-Vassols (Musée Duplessis, Carpentras). Ce qui est remarquable dans ces deux œuvres, c’est le contraste voulu entre la luxuriance du paysage champêtre et l’immobilisme nu du Ventoux, qui est presque montré comme un volcan éteint. Le premier tableau inscrit même l’aqueduc dans une logique de césure. Le dépouillement, un peu inquiétant, du Ventoux retient l’attention.
17S’ensuit une nouvelle phase, avec l’idée de représenter le Ventoux autre part que depuis Carpentras. Le peintre Pierre Grivolas (1823-1906) va représenter le Ventoux sous ses différentes faces. On lui doit par exemple : Paysage dans le Ventoux ; Le Mont Ventoux. Le pinceau se libère un peu plus, la palette des couleurs également, l’idée étant de peindre le Ventoux dans son intérieur, dans son intimité et dans son mouvement. L’avignonnais s’est installé avec son frère Antoine Grivolas (1843- 1902), également peintre, au cœur du Mont Ventoux dans la Bergerie du Rat puis à la Combe de Clare. Les deux artistes, reconnus comme les peintres majeurs du Ventoux, y menèrent la même vie que les bergers, couchant sur la paille et se nourrissant de tranches de lard et de laitage. Ayant fait le plein d’esquisses, de croquis et de toiles, ils déménagèrent pour se fixer à Monieux.
Les peintres du Ventoux de la fin du XIXe siècle au début du XXe siècle
18Formé par Jules Laurens, le peintre et dessinateur carpentrassien Joseph Esseyric (1860-1932) a laissé plusieurs œuvres (peinture à l’huile, dessin) ayant pour sujet le Ventoux ; on lui doit par exemple : Vue du Mont Ventoux, huile sur toile (reproduite dans l’ouvrage de Jean-Paul Chabaud) ; Situation de l’Observatoire au 30 novembre 1884 (dessin) ; Le Mont Ventoux – La route du Col des Tempêtes (dessin). Il réalisa une série de dessins à l’encre sur le Ventoux pour servir d’illustrations au livre de Marius Bouvier sur l’Observatoire, qui fut présenté à l’Exposition Universelle de Paris en 1890. Chez Eysseric, qui s’est fait remarquer par ses nombreux voyages et ses qualités de géographe, on remarque cette volonté de traduire une réalité physique dans son évolution et ses changements. Le dessinateur devient spectateur.
19Le peintre Eugène Martel (1869-1947) a laissé un tableau intitulé La Porte du mistral où le plateau d’Albion y est présenté en fin d’après- midi, sous un ciel immense tandis que l’horizon est fermé par le massif du Ventoux.
20Le célèbre peintre vauclusien René Seyssaud (1867-1952), qui a longtemps habité au pied du Ventoux à Villes-sur-Auzon, a parfois mis le Ventoux en couleur1. Avec son inspiration nettement impressionniste, il a laissé des œuvres majestueuses, faites de chevauchements mouvementés de teintes joyeuses : Paysages aux peupliers, Ventoux, 1903 ; Trois paysages du Ventoux, 1914. Toute son œuvre est dictée par la nature et l’exaltation de ses couleurs. En 1902, il monte sur le Ventoux pour faire une visite à François Vendran, l’hôtelier de la cime. Dans le livre d’or de l’auberge Vendran, il dessina Plantin, l’homme à tout faire du refuge Vendran.
Les peintres du Ventoux du XXe siècle
21Comme peintres ayant souvent pris le Ventoux comme thème de leurs œuvres picturales, on citera Pierre Ambriogiani, Gilbert Blanc, Auguste Chabaud et Pierre de Champeville.
22Pierre Ambrogiani (1907-1985), peintre marseillais, aimait peindre les paysages du Ventoux, en traduisant sa pureté et sa gaité. Ses toiles traduisent une forte influence du fauvisme. On lui doit par exemple : Coq faisan au pied du Ventoux (1960), Avril au Ventoux, Paysage du Ventoux, Village près du Ventoux, Scène champêtre près du Ventoux. On peut considérer cet artiste comme un peintre majeur de la Provence.
23Gilbert Blanc (1906-1993) était un peintre habitant à Bédoin dont le thème privilégié a été de peindre le Mont Ventoux de sa propriété en tout temps et en toute saison. Son périmètre d’action s’est surtout limité au territoire de Bédoin.
24Le peintre et sculpteur Auguste Chabaud (1882-1955) a laissé plusieurs tableaux, ayant pour sujet le Ventoux, en insistant davantage – à mon avis – sur sa profondeur et partant sur sa minéralité. Ses tableaux sont remplis de sentiments intérieurs, avec des couleurs, certaines sombres, exprimant la solitude du Ventoux et la contemplation ; il adore l’association du gris et du bleu (Vue sur le Ventoux, 1925 ; La montée du pont de l’Arche et le Mont Ventoux ; Mas près du Mont Ventoux). Son tableau Champ au pied du Ventoux, 1935, lui a permis de montrer une ouverture dans le champ de la palette.
25Pierre de Champeville (1885-1950), peintre et professeur de dessin, a été le promoteur remarqué du ski sur le Ventoux2. Il a aussi réalisé les plans de la chapelle de la Sainte Croix et a participé à la restauration du chalet Reynard. Une plaque commémorative en fonte, avec son effigie, a été inaugurée en son honneur devant la station de ski du chalet Reynard. Deux ouvrages rassemblent ses œuvres picturales (surtout des aquarelles), avec un texte de Michel Favier : Au pied du Mont Ventoux – L’évocation de l’âme comtadine, tomes 1 et 2 (Autoédition). Partant toujours d’un dessin d’une grande justesse, Pierre de Champeville remplissait ensuite ses œuvres de précisions, de légèreté et de luminosité. Il laisse des tableaux d’une grande gaité, comme un spectateur qui s’émerveille devant la beauté du Comtat-Venaissin, son pays d’adoption. S’il fallait citer une de ses œuvres ayant pour sujet le Ventoux, on peut évoquer : Oliviers et Ventoux, aquarelle, 1930.
26Comme autres peintres ayant occasionnellement peint le Ventoux, on citera Roland Chavenon, Georges Delpuech, Victor Ferreri, Jean-Pierre Gras et Paul Surtel.
27Roland Chavenon (1895-1967), qui aimait représenter les paysages de Provence, a laissé une toile intitulée : Avignon, Vue sur le Ventoux. Cette toile pleine de lumière laisse apparent au loin le ventoux, qui reste un repère et une référence pour les Avignonnais. Gérard Delpuech, peintre vaisonnais décédé en 2005, aimait représenter le Ventoux, soit au fusain, soit avec des coloris verts, bleus et blancs, qui lui donnaient une dimension quelque peu surnaturelle3. Victor Ferreri (1915-2009), dont on sait peu de choses, a réalisé un tableau intitulé : Bedoin et le Ventoux, 1970. Jean- Pierre Gras (1879-1964), sculpteur et peintre, prenait souvent comme thème la campagne entourant le Ventoux. On lui doit par exemple, avec une inspiration impressionniste évidente : L’amandier en fleurs, 1943, qui laisse apparaître sur le fond un Ventoux bleu, en osmose avec le ciel. Héritier lui aussi de l’impressionnisme, Paul Surtel (1893-1985), que l’on peut qualifier de paysagiste, a laissé deux très belles peintures à l’huile du Ventoux : Le Mont Ventoux, Vaucluse, environs de Carpentras ; Le Ventoux dans les rousseurs d’hiver (1962). Dans ces deux tableaux – très différents dans leur luminosité –, le Ventoux apparaît comme un lien, une étape vers le ciel.
28On ne peut certes classer Pablo Picasso (1881-1973) comme un peintre du Ventoux. Il a toutefois esquissé le profil du Géant de Provence dans une linogravure intitulée Bacchanale (1959) et une autre intitulée Bacchanale au taureau noir (1959).
29Enfin, l e p eintre a lsacien S imon L évy (1886-1973), d’inspiration impressionniste, a réalisé en 1941 une très belle huile sur toile figurant une Vue sur le mont Ventoux (38x55). Le peintre et sculpteur Werner Lichtner-Aix (1939-1987), dont le musée de Sérignan porte le nom, a aussi réalisé plusieurs représentations sous forme d’aquarelles du Mont Ventoux (1972, 1983).
Entre le XXe et XXIe siècle : Jean-Eric Turquin, souvent présenté comme le peintre du Ventoux
30Jean-Eric Turquin est né le 7 mars 1950. Peintre définitivement installé à Carpentras, il a souvent trouvé son inspiration dans la vue, les couleurs, la proximité et la végétation du Ventoux. Il est présenté sur son site et par la population comme le « peintre du Ventoux ». Cet artiste a réalisé par exemple, avec le Ventoux comme sujet principal ou secondaire : Coquelicot devant les oliviers ; Mont-Ventoux Rasteau Vignes… (80 x 80) ; Oliviers Ventoux Dentelles (27 x 22) ; Mont Ventoux coquelicots et boutons d’or (55 x 46) ; Mont-Ventoux Vignes et Genêts (41 x 33) ; Ventoux Cyprés et Coquelicots (27 x 22) ; Mont Ventoux Vignes et coquelicots (65 x 54) ; L’or de Provence, (32 x 26) ; Un matin d’automne dans les vignes, à Sablet devant Séguret. Adepte de la peinture sur toile, Jean-Eric Turquin aime mettre en contraste des couleurs froides (le bleu du ciel ou du Ventoux, le vert des cyprès…) et des couleurs flamboyantes (coquelicots, blés, vignes en automne, etc.). Ses peintures, qui peuvent être de grande dimension, sont comme inondées de couleur. Certains tableaux, véritables brasiers du Ventoux, traduisent parfaitement l’impression de chaleur qui se dégage de cette montagne, quand tout brûle, a brûlé sous le soleil et étouffe. Plusieurs de ses tableaux, les plus récents, mettent en mouvement des skieurs ou des cyclistes sur le Ventoux.
Les 36 vues du Ventoux originel de Florie Boissy
31Il y a dans le Ventoux une dimension céleste que Florie Boissy se plaît à représenter. Cette jeune artiste a suivi des cours de dessin et peinture dans un atelier privé à Montpellier. Elle dessine depuis qu’elle est enfant et, après des études d’histoire de l’art et d’archéologie, elle s’est consacrée à son art pictural.
32Florie Boissy trouve ses sources d’inspiration dans l’histoire – surtout les contes et légendes – et la nature vierge, notamment dans le monde animal présent sur le Mont Ventoux (elle a fait une série d’animaux : héron, faisan, buse, écureuil, mouton, chamois, biche, cerf, lynx …). Elle travaille à l’encre de Chine et à la peinture à l’huile. Les paysages où se mêlent parfois des villages, tels que Brantes et Bédoin, sont réalisés le plus souvent à l’encre. Son style s’inspire de l’estampe japonaise et de l’enluminure. Elle peint un univers sauvage, onirique et même fantastique.
33Florie Boissy a notamment laissé une série de 36 vues ayant pour objet la vie naturelle – on pourrait dire « originelle » – du Ventoux. Il n’y a jamais de foule dans ses tableaux. La présence humaine y est seulement suggérée par un ou plusieurs bâtiments souvent stylisés. Il arrive qu’un personnage ou une silhouette rappelle à la nature l’emprise humaine (Moine et chapelle dans la neige, Femme et Ventoux dans les brumes, Femme au cimetière, …). Elle adore les jeux de lumière – surtout les contrastes nés de l’alternance de couleurs chaudes et froides – ainsi que les détails très minutieux. Son univers devient feutré, intimiste et nostalgique. Elle a fait de nombreuses expositions (salon du Puy-en- Velay, salon de Bruges, Grand Palais à Paris…). Elle a également illustré un panneau explicatif sur le Ventoux dans le musée entomologique de Sérignan-du-Comtat.
Les aquarelles lumineuses de Gottfried Riekert
34Gottlieb Riekert, dit Godo, est né à Tübingen en Allemagne. Après un doctorat de physique, il a étudié les arts picturaux en Allemagne, en France et aux États-Unis. Attiré par la luminosité de la Provence, il s’y est installé comme aquarelliste. Sa technique lui permet de représenter les couleurs à la fois intenses et douces du ciel, des champs d’oliviers et de la lavande. Ses œuvres traduisent le calme, la paix et le folklore. Il peint les paysages en usant de couleurs contrastées (Bleu lavande – Jaune paille, 12 x 18), souvent ceux du Ventoux (Rêves de printemps, 30 x 40 ; Lavandes à Sault, 15 x 15 ; Amandiers et cabanon, 13 x 17 ; Bories près de Ferrassières, 2014) avec ses villages (Bédoin et le Ventoux, 30 x 40 ; Oliviers à Crillon le Brave, 2014 ; Mas aux lavandes, Sault, 19 x 13), ses maisons (Mormoiron – Rue portail de la Nation, 17 x 23) et ses acteurs – par exemple des cyclistes, des comtadines, des producteurs d’asperges. Il affectionne les scènes de la vie quotidienne, les portraits et les paysages enneigés du Ventoux (Neige au Ventoux). Il aime peindre les animaux (taureaux, chevaux, corbeaux, …), les fleurs (tournesol, tulipe, mimosa, coquelicot, …) et, partant, les natures mortes (Ail fané de Provence). C’est à lui que la ville de Mormoiron à demander d’illustrer l’affiche de la fête de l’asperge (de 2010 à 2015). Il a déjà exposé, par exemple à la Cave Terranova de Mormoiron en 2014, et participe à l’animation de cours d’aquarelles.
XXIe siècle : Les peintres fascinés par le Ventoux
35Outre Jean-Henri Turquin, Florie Boissy et Gottfried Riekert, qui sont des artistes « récurrents » du Ventoux, il y a d’autres peintres contemporains qui ont montré un intérêt renouvelé pour la représentation du Géant de Provence et de ses alentours : Arno, peintre et plasticien, donne de la puissance chromatique à ses peintures à l’huile et au couteau. Il a réalisé plusieurs œuvres avec comme arrière-fond le Ventoux, notamment : Lavandes à Ferrassières (30 x 30) ; Lavandes à Ferrassières, n° 2.
36Jean-Claude Besson-Girard, artiste peintre né en 1938, a vécu et travaillé dans le Vaucluse de 1994 à 2011. Il a représenté en 2004 le Mont Ventoux (92 x 73) sur un grand tableau respirant la paix et la douceur de vivre, à travers une atmosphère de suspension du temps. Il a peint également les alentours du Ventoux (vallée du Toulourenc, falaise de Beaumont du Ventoux, cultures en terrasse à Beaumont du Ventoux, Séguret).
37Bien qu’installé près de Marseille, Jérôme Desanti a cédé aux sirènes du Ventoux ; il a exposé ses toiles du Ventoux dans le Vaucluse en 2013 à Beaumes de Venise (la cave à vin « Nuances du sud ») et à Carpentras (« la Cave du Comtat »). On lui doit notamment : Mont Ventoux en hiver (55 x 65) ; Mont Ventoux, Soleil couchant d’hiver ; Oliviers près du Ventoux ; Mont Ventoux en automne, route de Saint Hyppolite de Graveron (65 x 81) ; Mont Ventoux à l’aube en hiver (38 x 55) ; Cyprès sur la route de Saint Hyppolite de Graveron au pied des Dentelles (33 x 41).
38Philippe Janin, qui aime l’association des couleurs froides et chaudes, a réalisé deux œuvres remarquées portant sur le Ventoux : Village d’Aurel (100 x 81) ; Bédoin et le Ventoux (46 x 55).
39Pierre Marcel, peintre et plasticien, habite en Normandie, mais affectionne particulièrement le sud de la France, notamment les villes de Bédoin, la Ciotat et Bandol. Il a réalisé plusieurs tableaux figuratifs ayant pour cadre le Ventoux, avec un grand soin du trait et du détail : Brantes, 2005 (38 x 46) ; « Pylones » Bédoin, 2006, (33 x 24) ; Bédoin, Allée de pin, sur la route de Mazan – Saint Pierre de Vassols, 2007 ; Bédoin, 2009 ; Bédoin, Mont Ventoux, 2010 ; Le Mont Ventoux, Bédoin, Caves du Ventoux AOC (38 x 46) ; Mont Ventoux vignoble Bédoin, grande version 1, 2009-2010 ; Mont Ventoux vignoble Bédoin, petite version 2, 2009-2010.
40Robert Mestelan est aquarelliste à Velleron. Il a laissé plusieurs œuvres remarquables sur le Ventoux, qui rappellent les expressions du fauvisme. Il y a dans ses tableaux une grande fermeté dans le trait. L’auteur y affiche une palette diversifiée et contrastée de couleurs. On lui doit par exemple : Mont Ventoux à l’automne (31 x 41) ; Saint Marc à l’entrée de Sault (46 x 61) ; Velleron et Mont Ventoux (31 x 41) ; on trouve aussi ses œuvres sous la signature de Lou Barri : Cerisiers en fleurs (46 x 61) ; La Nesque et le Mont Ventoux (46 x 61).
41Anne Rivière s’est plusieurs fois intéressée au Ventoux « bleu », en puisant dans l’intensité des couleurs et de la lumière. On lui doit : Lavande au Mont Ventoux (40 x 30) ; Le Mont Ventoux, le Géant de Provence, 2009 ; Cabanon au mont Ventoux dans les coquelicots, 2012 (33 x 24) ; Cabanon au Mont Ventoux, 2015.
42Serge San Juan est né en 1949. Formé à l’École des Arts Appliqués de Paris, il est passé par la bande dessinée et la publicité. Avec ses aquarelles ayant pour objet des paysages ou la végétation du Ventoux, notamment les pins à crochets, il a renoué avec ses premières amours, celles de la couleur et de la peinture ; on sent chez lui l’envie de transformer en signes visibles le ressenti, au besoin par déclinaison.
43Denis Vairié a réalisé deux peintures sur le Ventoux : Amandiers en fleurs au pied du Ventoux (30 x 60) ; Mont Ventoux (55 x 46). Dorothée Wierez a fait ses études aux Beaux-Arts d’Avignon. Elle a laissé une série de toiles figuratives sur les paysages provençaux, parmi lesquels : Sérénité sur les Dentelles de Montmirail (61 x 38) ; Vue sur Saint Didier (130 x 97).
1– Le Ventoux sous l’œil des photographes
44Plusieurs photographes se sont fait remarquer pour leurs œuvres consacrées au Ventoux, à sa faune et à sa flore : Alain Christof, Steffen Lipp, Firmin Meyer, Nicolas Ughetto.
Alain Christof : la chasse aux images lumineuses et fugitives
45Après s’être adonné à la photographie animalière, Alain Christof a parcouru la Provence en quête d’images où le cadrage et les lumières sont soigneusement harmonisés. À travers ses nombreux albums, il dévoile un Vaucluse intimiste, où se succèdent au fil des saisons des images surprenantes, baignées de lumières fugitives. Il a réalisé les ouvrages suivants : « Le Guêpier d’Europe », Éd. du Point vétérinaire, 1990 ; « Le rollier d’Europe », Éd. du Point vétérinaire, 1991 ; « Fontaines du Comtat-Venaissin » (avec Michel Vidal), Édisud, 1996 ; « Mémoires de la lavande » (avec Gilbert Fabiano), Équinoxe, 2000 ; « Les pays du Ventoux. Albion, Baronnies, Dentelles, Monts de Vaucluse » (avec Jacques Galas), Édisud, 1996 ; « L’olivier » (avec Serge Bec, Camille Moirenc), Équinoxe, 1997 ; « Avignon » (avec Sylvestre Clap, Équinoxe, 2000 ; « Le mas des Alpilles » (avec Maurice Pezet), Équinoxe, 2002 ; « Les mémoires des santons de Provence » (avec Françoise Delesty), Équinoxe, 2010 ; « Agenda provençal 2013, petit et grand format », Équinoxe, 2012 ; « Le Vaucluse », Équinoxe, 2015.
Steffen Lipp : faire la vérité sur une terre secrète
46Steffen Lipp est un photographe qui a consacré la majorité de ses oeuvres au Mont Ventoux, au Comtat Venaissin et à la Drôme provençale. Les photographies de Steffen Lipp invitent à un voyage à travers une Provence mal connue, celle des montagnes et des plateaux, une Provence où l’on a, à chaque pas, l’impression d’assister à la genèse du monde. Du Ventoux à la Sainte Victoire, des Baronnies aux Alpes du Sud, l’artiste a su découvrir et dévoiler tout ce qui fait la vérité d’une terre secrète. On lui doit notamment : « Ventoux » (avec une préface de Jean-Paul Clébert), Édisud, 1990 ; « Le Mont-Ventoux » (texte de Bernard Mondon), Équinoxe, 1998 ; « La Drome provençale. Une Provence secrète » (texte de Bernard Mondon), Équinoxe, 2001 ; « Petite Anthologie du mistral » (texte de Bernard Mondon), Équinoxe, 2004 ; « Secrets de Provence, cabanons et bastidons » (avec une préface de Serge Bec), Équinoxe, 2004.
Firmin Meyer : la rencontre de la grâce et des cimes
47Firmin Meyer (1899-1976) est un photographe qui s’est passionné pour le Ventoux et qu’il évoquera dans de nombreux clichés remarquables. Il a ouvert en 1927 un studio d’art à Carpentras. Dévoilant à ses clients son attrait pour le Ventoux, il ne tarda pas à rencontrer Pierre de Champeville, avec qui il va parcourir leur chère montagne. Les deux hommes, tous deux chasseurs d’images, se ressemblent. Les articles qu’a écrits Pierre de Champeville dans des revues nationales et régionales : « Les tablettes d’Avignon », « La revue du Touring-club de France », « La Montagne » sont accompagnés des photographies de Firmin Meyer. Laissons parler Pierre de Champeville au sujet du duo qu’il formait avec Firmin Meyer4 :
Sac à dos, chargés d’encombrants matériels photographiques 13x18, accablés par une chaleur tout à fait exagérée pour la saison, nous montons lentement et péniblement… Une petite arête est franchie et apparaît la féérie blanche des plateaux du Contrat, balcon splendide accroché bien haut sur les flancs du géant. Les molles ondulations neigeuses, tantôt semées de vieux pins tordus et grimaçant, se redressent peu à peu en pentes raides que couronnent les puissantes corniches de la grande arête du Ventoux. Aussi loin que s’étend le regard, la neige est vierge et nos skis sont les premiers à imprimer leurs traces sur ce tapis immaculé. Pour les yeux, ce sont les splendeurs et cependant l’air est doux ! Dans les vieux pins, les oiseaux chantent avec ardeur leur hymne au printemps, sans lequel tout ne serait que lumière et silence… Pendant que mon ami Meyer exécute ses beaux clichés, je me livre aux joies de la glissade, des virages et des arrêts. La neige est excellente, douce et régulière à point (…).
48Après avoir participé à la création du ski-club de Carpentras, avec l’aide de leurs amis Pierre Julian, Pierre Rey, Génas, Paul Conil, Blatix, Cardaire, Kahn…, ils oeuvrèrent tous les deux pour le développement du Syndicat d’initiative de Carpentras, dont Firmin Meyer devint le Président (de même qu’il sera vice-président de la chambre départementale de tourisme). L’essor attendu du tourisme a toujours été un de ses objectifs prioritaires. Plus tard, le photographe créera l’Association comtadine pour l’expansion du tourisme alpin, qui fut en charge de la construction, à côté du chalet Reynard, du premier remonte-pente du versant sud.
49Firmin Meyer a également édité de très belles cartes postales qui ont fait le tour du monde ; il a eu la chance d’être choisi par de grands auteurs (Jean Cocteau, Fernand Benoît, Pierre Erkens, Marie Mauron, Maurice Pezet) pour illustrer leurs oeuvres. Le comité touristique régional lui a confié la décoration du pavillon de la Provence lors de l’Exposition Universelle de Paris en 1937. Il fut aussi le photographe attitré du Muséon Arlaten et de la préfecture de Vaucluse.
Nicolas Ughetto, le photographe qui tutoie les animaux
50Nicolas Ughetto réside à Sault dans le Vaucluse. Il a pour passion la photographie animalière et de nature dans le Mont Ventoux, qui est son principal moyen d’expression. Il n’est ni spectateur, ni voyeur. Se présentant comme un témoin, il indique ressentir une attirance à observer l’intimité de la nature :
Certes, je photographie ce que je vois mais je m’applique aussi à photographier ce que je ressens, c’est là pour moi maintenant l’essentiel de mon approche. Je me laisse toucher par l’invisible. Je me laisse pénétrer par l’interdépendance des sons, des couleurs, des odeurs, des vibrations, même si, et surtout si, les conditions météo sont difficiles. Je dis oui à tout, je m’oublie, je me fonds, je rejoins parfois mes rêves afin d’être en harmonie avec le milieu, d’y être englouti, d’y faire corps et d’y être accepté comme un de ses banals sujets. J’aime alors à me connecter à la Nature. J’ai appris qu’elle ne se donne que lorsqu’elle le décide et sans doute seulement à qui le mérite ! J’ai appris aussi à apprécier ce qu’elle vous offre sans forcément lui imposer vos désirs.
51Nicolas Ughetto a publié trois recueils de photographie. En 2012, son ouvrage intitulé Le Ventoux des Silences se voulait être le reflet de la passion d’un amoureux du Ventoux qui, au fil de ses rencontres animalières, fait comprendre l’impérieuse nécessité de la préservation de cette majestueuse montagne encore authentique et sauvage : « Au fil des saisons, depuis les paysages des champs de lavande de Sault en Provence jusqu’à son sommet, le Ventoux impose ses humeurs, ses caprices, ses caresses, ses mystères et ses conditions extrêmes à la faune ».
52En 2013 sortait son deuxième livre de photographies, intitulé Duos du Ventoux : il y présentait des duos de couleurs, d’ambiances, de sujets, de compositions, de graphismes, de lieux et de moments ; on y trouve aussi des « duos de la musique du paysage avec celle de son intimité profonde, secrète et cachée… de la couleur et de la vie sauvage posées sur des silences ».
53Nicolas Ughetto prépare actuellement son 3ème recueil qu’il va dénommer Ventoux, d’aurores en crépuscules.
54Dans le magazine télévisé « Des racines et des ailes » consacré le 9 avril 2014 au Vaucluse (France 3), Nicolas Ughetto était présenté en pleine action sur la partie sommitale du Mont Ventoux en train de guetter des chamois, qu’il affectionne particulièrement. Il a exposé au festival international de la photo animalière et de nature de Montier en Der. Depuis 5 ans, il a participé et organisé le festival de photo animalière et de nature au pied du Ventoux « Les Silences du Ventoux ». Un dossier reportage sur son approche photo est enfin paru dans la revue nationale « Nat Images ».
3-Le Ventoux sous la plume des écrivains et des poètes
55François Pétrarque (1303-1374) a été le premier écrivain à laisser un récit de son ascension sur le Ventoux. Fasciné par cette montagne qu’il admirait depuis Avignon, il décida, après une déception amoureuse, de la gravir. Son écrit est autant le récit d’une ascension qu’une réflexion contemplative sur le sens de la vie et sur le cheminement intellectuel. On présente parfois Pétrarque comme le précurseur de « l’alpinisme littéraire ».
56Félix Achard, archiviste de formation, a laissé de son ascension du Ventoux (24 août 1874) un beau texte paru dans Le républicain de Vaucluse de 1874. Il y décrit avec force détails la végétation, la vie des charbonniers et des bergers, le danger du loup et de la vipère… Le juriste Eugène Barrême it quatre ans plus tard (20 août 1878) une autre ascension qu’il a traduite sous forme d’un récit insolite et détaillé, dans lequel il faisait une description minutieuse de la chapelle de la Sainte Croix et d’un mémorable orage sur la cime. L’écrivain d’expression provençale Joseph Roumanille (1818-1891) a décrit sous forme de lettres pour sa sœur Toinette une ascension qu’il a effectuée en 1851 lors d’un pèlerinage. Avec l’écrit de François Seguin, il s’agit à notre connaissance du texte le plus complet sur les festivités chrétiennes du Ventoux, avec un témoignage fidèle de la ferveur populaire.
57Frédéric Mistral (1830-1914) a relaté en 1906 son ascension du mont Ventoux dans Mes origines, mémoires et récits (Moun espelido, Memòri e Raconte). Il participa à cette expédition pittoresque, en date du 11 septembre 1857, en compagnie de Théodore Aubanel et du peintre Pierre Grivolas5. De son côté, Théodore Aubanel (1829-1886) laissa aussi un très beau poème sur le Ventoux – intitulé Lou Ventour –, qu’il dédicaça au docteur Alfred Pamard. En voici la version intégrale en français :
Ventoux effrayant, nid d’aigles bruns et d’aigles blancs, Ton front nu, au midi, est blanc sous la neige ;
Au nord, la forêt te fait une noire chevelure ;
Les loups hantent tes sentiers où l’homme s’essouffle,
Et des villes naines là-bas le troupeau
S’éparpille : vivantes, elles ont le silence des tombes. Le mistral te soufflette et le soleil te baise ;
Toi, tu te dresses haut et fier vers le tonnerre qui te déchire.
Mais la plaine s’assombrit, le soir vient ; Les nuages pourpres obstruent les gouffres,
Toute la lumière du jour remonte à tes flancs roses ;
Un dernier jaillissement d’or pénètre les grands bois, L’ombre augmente. Attendant la nuit sur tes rochers, Tu contemples muet la mer et les deux Rhônes.
58Théodore Aubanel laissa aussi de son ascension du Ventoux de juillet 1882, en compagnie du Docteur Alfred Pamard et de Marius Bouvier, ingénieur des Ponts et chaussées, un court récit sous forme d’une lettre élégante à Sophie de Lenz (lettre à Mignon).
59Dans son ouvrage célèbre intitulé « Le Marquis des Saffras », qui conte l’histoire d’un village au pied du Mont Ventoux, Jules de la Madelène (1820-1859) insistait sur l’état d’allégresse d’un de ses personnages, Marcel, lorsqu’il grimpait sur le Géant de Provence, comme frappé par la divinité :
(…) Il courait dans le vent tête et poitrine nues ; cet air pur l’enivrait ; il arrachait à poignées les herbes de montagne, et la senteur sauvage lui montait au cœur comme l’odeur même du terroir et je ne sais quoi de plus intime encore. Sous ces âcres parfums, il retrouvait par mille analogies secrètes l’accent des choses de Provence, toute la nature, le génie même du pays dans sa grâce et dans son âpreté.
60On trouve dans ce bel ouvrage de Jules de la Madelène un grand nombre de scènes et d’aventures ayant pour situation géographique les flancs du Ventoux, avec une description très poétique de sa végétation, de ses chemins, de ses combes et de ses éboulis.
61Henry de la Madelène (1825-1887), frère du précédent, a raconté, dans son roman Jean des Baumes (Contes comtadins, 1874), la mort de Félise, la femme d’un homme solitaire et rebelle à la société, qui habitait dans le Mont Ventoux. En accompagnant son époux contrebandier pendant sa uite, elle allait finir par mourir d’épuisement et de roid. Il la trouva à demi-morte de froid et de terreur dans le « Jas de la Sainte Croix », grelottant la fièvre et répétant des mots décousus, vides de sens. Il lui donna de la neige fondue comme breuvage. Malgré le froid et la neige, Jean des Baumes décida d’emmener sa compagne mourante dans la vallée, en la chargeant sur ses épaules ; mais aux violences de la fièvre et du délire, avait succédé une torpeur profonde. Il ne put la ranimer. Finalement, il creusa sur place la tombe de Félise avec des difficultés infinies, la roche étant présente partout. Bien plus tard, Jean des Baumes prit l’habitude de prier près du tombeau improvisé de Félise et de jeter pieusement une pierre sur le tumulus grossier qui, bientôt, augmenté de la pierre de tous les passants, s’appela le « Clapier de la femme morte ».
62Le poète René Char (1907-1988), habitant à l’Isle-sur-la-Sorgue, aimait le Ventoux, qu’il comparait à l’Olympe ou qu’il présentait comme un « miroir aux aigles », dans son poème consacré au Thor :
Dans le sentier aux herbes engourdies où nous nous étonnions, enfants, que la nuit se risquât à passer, les guêpes n’allaient plus aux ronces et les oiseaux aux branches. L’air ouvrait aux hôtes de la matinée sa turbulente immensité. Ce n’étaient que filaments d’ailes, tentation de crier, voltige entre lumière et transparence. Le Thor s’exaltait sur la lyre de ses pierres. Le mont Ventoux, miroir des aigles, était en vue. Dans le sentier aux herbes engourdies, la chimère d’un âge perdu souriait à nos jeunes larmes »6.
63Le romancier et poète André de Richaud (1907-1968) a souvent choisi le Comtat-Venaissin et, plus spécifiquement, le Ventoux comme cadre de son œuvre romanesque, en particulier dans La barette rouge, qui est à la fois le titre du roman et une demeure hantée au pied du Mont Ventoux, inspirée de la propriété mystérieuse dite du Pré Fantasti.
64L’écrivain Jean Proal (1904-1969) a découvert le Ventoux lorsqu’il était en poste à Malaucène dans l’administration de l’enregistrement. Il se rendait souvent au Mont-Serein, où il avait acquis avec des amis un chalet. Bagarres est son roman le plus célèbre, ayant pour cadre le Ventoux qu’il aimait à célébrer. Voilà ce que Jean Proal écrivit sur son ouvrage en décembre 1946, dans la rubrique « Nos Auteurs » du Courrier Denoël :
Mon dernier bouquin ! Bagarres : une histoire de la solitude et de la fatalité.
J’ai hanté dix ans le Ventoux. En long, en large et en hauteur. En profondeur aussi, car je crois avoir entendu battre son cœur secret. Cette montagne qui m’a paru d’abord dérisoire a pris peu à peu pour moi son sens et sa vertu de montagne car, les “touristes” partis, elle me restait intacte. Intacte : accessible à l’amour seul. Aussi fermée, aussi secrète, aussi hautaine que les grandes cimes. Vivante aussi : chargée de plantes et de bêtes, baignée de ciel vivant, changeante au gré des heures et des saisons. J’ai placé une femme dans cette montagne. Comme elle secrète. Pure comme elle. Intacte : de cœur et de corps. Et démunie. Libre. Disponible. Puis j’ai laissé faire la vie. C’est-à-dire les hommes, puisqu’on n’est jamais si seul que cette solitude ne heurte une autre solitude. L’aventure qui déclenche le drame, je l’ai voulue vulgaire, sordide même. Une histoire de couchage entre un vieux riche et sa bonne. Un couchage pour de gros sous. Une pauvre aventure humaine.
Et l’amour qui intervient, pour tout gâcher : l’amour pour un homme ou une femme – ce malentendu… Mais l’amour aussi qui sauve tout : l’amour pour nous, tous les hommes - l’amitié humaine.
65Lorsqu’on évoque la littérature célébrant le Ventoux, on ne peut oublier sauf à commettre un sacrilège ! – de citer le très bel ouvrage de Marie Mauron (1896-1986) intitulé « Le Dieu-Ventoux », avec des illustrations du peintre Antoine Serra (1908-1995). Les chemins du Ventoux étaient pour cet auteur une invitation à se purifier comme par la prière.
66L’ont enfin évoqué avec beaucoup de poésie dans leurs écrits : René Barjavel (1911-1985) ; René Bazin (1853-1932) ; Pierre de Champeville (1885-1950), de Carpentras ; Jean-Paul Clébert (1926-2011), d’Oppède ; Jean Giono (1895-1970), de Manosque ; Jacques Réda, né en 1929 ; Robert Sabatier (1923-2012), qui a résidé à Saint Didier7.
4-Le Ventoux dans l’objectif de la caméra
67Les films sur le Ventoux ou ayant pour cadre le Ventoux commencent à s’imposer sur les écrans de télévision et au cinéma. Ils appartiennent à la catégorie des films documentaires, des comédies dramatiques et des drames. Peu nombreux dans la 2ème partie du XXe siècle, ils se font plus fréquents au début du XXIe siècle, avec des réalisateurs français ou venant de l’étranger – Belgique, Hollande –, là où le Ventoux est élevé au rang de mythe pour les cyclistes.
68Sorti en 1948, Bagarres est un des premiers films tournés sur les flancs du Ventoux (95 minutes). Ce drame est l’œuvre d’Henri Calef, assisté de Jacques de Casembroot, et inspiré du roman éponyme de Jean Proal. La distribution fut prestigieuse : dans le rôle principal de Carmelle, Maria Casarès (1922-1996) s’imposa, aux côtés de Roger Pigaut (1919-1889) – jouant Antoine – et de Jean Murat (1888-1968) – jouant Baptiste. Jean Vilar (1912-1971) obtint même un rôle avec celui de l’innocent.
69L’intrigue porte sur les mœurs d’un couple à trois : Carmelle, une ravissante servante de ferme, s’est entichée d’un garçon désargenté qui lui conseille de jeter son dévolu sur Rabasse, un riche fermier d’âge avancé. L’idée est d’entretenir une relation amoureuse avec son élu de cœur, tout en vivant matériellement à l’abri avec un propriétaire destiné à mourir. Carmelle parvient à devenir légatrice universelle du sénior crédule, en devenant son épouse. Mais elle est finalement trahie par son amant…
70En 1976, André Ughetto réalisa un film i ntitulé La Mémoire du feu en hommage à la poésie de René Char (26 minutes). Jean Fléchet est à l’origine du film Le Mont Ventoux, sorti en 1978.
71Guy Remolin réalise en 1978 pour l’INRA (service du film de recherche) un film de 28 minutes sur le comportement des guêpes et des frelons du Ventoux : Vespini sociaux du Mont Ventoux – Hyménoptères Vespidae.
72En 1991, Philippe d’Hennezel obtient le prix de la recherche au festival Vert de Meaux pour son reportage intitulé Des Lamas en Ventoux ; ce film d évoile e n 1 3 m inutes l ’activité d es l amas d ébroussailleurs d ans le Ventoux ; il a été produit dans le cadre de l’émission animalière de TLM, « Rue des bêtes ».
73On doit au réalisateur Waldeck Weisz deux films documentaires : Un peu de Bédoin, d’une durée de 30 minutes réalisé en 2001 ; Paysages du Ventoux de 32 minutes réalisé en 2004 ; dans ce second film, apparaît une succession de paysages du Ventoux – souvent colorés et mouvementés – et des visages expressifs en gros plan, qui s’animent pour raconter leur expérience.
74En 2001, Eric Erastothène a réalisé un documentaire de 26 minutes intitulé Lo Gigant (AMDA production).
75Sorti également en 2001, Le Vélo de Ghislain Lambert est un film franco- belge réalisé par Philippe Harel (1 heure 59 minutes) ; cette comédie dramatique a fait l’objet d’une distribution prestigieuse : le rôle principal de Ghislain Lambert, le cycliste, a été donné à Benoît Poelvoorde, qui a persuadé sa propre mère de jouer dans le film le rôle de sa mère ; ont également été sollicités : José Garcia, Daniel Ceccaldi, Antoine de Caunes, François Berland… Cette comédie est évidemment à rattacher au monde du cyclisme : au début des années 1970, Ghislain Lambert est un coureur cycliste belge né le même jour qu’Eddy Merckx, dont l’ambition est de devenir un champion. Il intègre au départ une équipe de cycliste… mais comme porteur d’eau. Ghislain Lambert espère devenir un jour un cycliste reconnu, au besoin avec l’aide du dopage…
76En 2003, Richard Olivier a réalisé un film de 18 minutes intitulé Le solitaire du Ventoux en lien là encore avec le cyclisme. En voici l’histoire : ancien cascadeur de cinéma, grand lecteur d’ouvrages philosophiques, Jean, 63 ans, quitte Paris pour s’installer avec son épouse dans le Vaucluse. Depuis plus de vingt ans, cinq fois par semaine du 1er mai au 15 octobre, il effectue à vélo l’ascension du Mont Ventoux en 1 heure 12 minutes. Il met dix minutes de plus que Charlie Gaul, qui s’était illustré au tour de France comme un héros à 24 ans…
77Guy Seligmann et Marcel Rodriguez ont réalisé en 2005 un film- documentaire de 42 minutes intitulé L’Ascension du Mont Ventoux.
78Un autre documentaire historique intitulé Le roi du Mont Ventoux a été consacré par Fons Feyaerts aux gagnants de l’étape du Ventoux lors de plusieurs Tours de France (film franco-néerlandais : 72 min). Ce film mêle des prises actuelles avec des images d’archives. Il raconte l’histoire de victoires sportives qui ont permis à des cyclistes alors inconnus du grand public de se faire un nom dans le monde du sport. Mais aucun d’entre eux n’a jamais réussi à renouveler son exploit.
79En 2013 a été projeté à Pernes-lesFontaines le film Mont Ventoux Scala Paradisi, qui raconte l’histoire du Ventoux avec une approche philosophique. Ce film a été réalisé par Ariane Greep. Y ont participé des comédiens de la Compagnie pernoise L’Albatros, le maire de Bédoin Luc Reynard, la veuve de Tom Simpson, Greg Lemon, Lance Amstrong et deux habitants de Bédoin, notamment Gérard Damian.
80B. Wilmart et L. Borde ont réalisé en 2014 un documentaire de 16 minutes, intitulé C’est là que je suis bien (Production : BAKA Films) ; ce film raconte l’histoire de Jacques, un homme qui a fait le choix de ne pas adhérer à la société et de vivre au plus proche de la nature, au cœur du Mont Ventoux, dans une cabane en bois.
81On a vu apparaître aussi sur les écrans de télévision en 2014 un téléfilm de Thierry Peythieu, intitulé Meurtre au Mont Ventoux, qui avait pour premier rôle l’actrice Ingrid Chauvin. Le film est à rattacher au thème du Ventoux mystérieux et à ses contes et légendes : Alexia Méjean revient dans son village natal après la mort de son oncle sur le Ventoux. Apprenant que ce décès n’est pas naturel, la belle Alex décide de s’installer sur place. Elle apprend que d’autres morts restent suspectes, avec l’intervention commune du Drac, un dragon maléfique qui se cacherait dans les eaux d’une source voisine ! Alexia Méjean découvre peu à peu la vérité sur ceux qu’elle a toujours connus et qui cachaient leur jeu...
82Un dernier film vient de s’imposer sur les écrans de cinéma en 2015. Il s’agit de Ventoux, une adaptation néerlandaise du livre éponyme de Bert Wagendorp, réalisée par Nicole Van Kilsdonk (104 minutes). Classée selon l’expression familière « film de potes », cette histoire raconte l’amitié ancienne et renouvelée de quatre hommes, qui reprennent leur vélo sur la route du Mont Ventoux, comme ils le faisaient 30 ans auparavant. Ils retrouvent au festival d’Avignon la belle Laura dont un des compères, Bart, était amoureux...
5-Une famille de sculpteurs implantés dans les pays du Ventoux : Les Bernus
83Même si le lien avec le Ventoux est moins perceptible, on se doit de rappeler la dynastie des Bernus comme une famille de sculpteurs et de menuisiers ayant marqué les pays du Ventoux8. Leurs œuvres se trouvent dans la presque totalité des communes qui entourent le Ventoux. Elles forment même, par leur localisation, un cercle circonscrit autour du Géant de Provence. Plus que les autres, celles de Jacques Bernus sont une invitation à l’élévation de l’esprit, à l’image de ce qu’offre le Ventoux, à l’image du récit de l’ascension du Ventoux par Pétrarque. On n’est guère surpris que l’écrivain Jules de la Madelène (1820-1859), remarqué pour son évocation littéraire du Ventoux dans « Le marquis des Saffras », ait choisi comme première publication de faire une biographie de Jacques Bernus, le plus connu des sculpteurs comtadins.
84Jacques Bernus (1650-1728) appartient à une dynastie d’une quinzaine de sculpteurs et menuisiers-sculpteurs comtadins dont on trouve présence en Provence dès le XVème siècle. Né en 1646, il sera le plus célèbre des sculpteurs issus de sa famille. Son arrière-grand-père s’appelait Jean Bernus et était installé en 1573 comme charpentier à Châteauneuf-du- Pape. Marié à Romane Hurquin, cet aïeul laissa quatre filles et deux fils, Clément et Jean. Si Clément, l’aîné, s’installa à Roquemaure, Jean Bernus – qui allait devenir le grand-père de Jacques Bernus – préféra se fixer à Mazan autour de 1600. Menuisier de son état, Jean Bernus mourut à Mazan le 24 juillet 1659, laissant une fille Catherine, ainsi que deux fils, Noël – le futur père de Jacques Bernus –, né et décédé à Mazan (12 octobre 1616 – 22 septembre 1702) et Nicolas, baptisé le 21 février 1623. Noël Bernus se plaisait à Mazan, où il était déjà considéré comme un notable ; il épousa, le 13 mars 1646, Marie Rey, originaire de Bédoin ; dans le registre des délibérations du Conseil de la communauté, il est cité comme « consul du second rang » en 1662. Il jouissait déjà d’une réputation méritée ; les commandes étaient nombreuses, au point qu’il dut s’associer la compétence d’autres sculpteurs ; ceux de ses travaux qui ont résisté à la destruction révolutionnaire – un retable et un autel à Mormoiron, un tabernacle et un autel à Saint Didier – indiquent, selon Henri Requin (1851-1917), « un vrai sens de la décoration religieuse, des connaissances architecturales peu communes et une réelle habileté dans la pratique de son art »9.
85Le sculpteur Jacques Bernus fut le quatrième fils de Noël Bernus et de Marie Rey ; après lui vinrent 5 autres enfants, mais peu survécurent. Il ne resta bientôt, avec sa sœur Anne, mariée au sculpteur de Modène, Genest Villon, que Jacques et deux de ses frères puînés qui, seuls, laissèrent une postérité : il s’agit de Jean-Paul Bernus, qui deviendra Maître-menuisier à Mazan (né le 15 janvier 1653) et de Joseph Bernus, sculpteur à Mazan (né le 25 juillet 1666).
L’apprentissage de la sculpture par Jacques Bernus
86Noël Bernus, menuisier et sculpteur, parfois présenté dans les actes comme « architecte » souhaita que son fils Jacques quitte Mazan pour approfondir les techniques qu’il lui avait transmises dans son atelier. Jules de la Madelène (1820-1859) laisse une version des circonstances de ce départ dans des termes qui sont apparus romantiques, romancés, voire fantaisistes. Jacques Bernus serait parti à 13 ans de Mazan :
Il se sentait mal à l’aise dans ce village où personne ne le comprenait, où pour tout conseil il trouvait d’amères railleries. Travaillé par ce besoin de l’inconnu auquel nul ne peut résister, obéissant à cette voix mystérieuse qui l’appelait, il prend un jour une brusque et courageuse détermination qui révèle toute l’énergie de son caractère. Il quitte son village, sans dire adieu à sa mère, à ses joyeux compagnons, et le voilà qui part à pied, avec cette belle confiance de l’enfance, portant tout son avoir au bout de son bâton. Il chemine tout droit devant lui, au hasard, au risque de tomber, comme Jacques Callot, au milieu d’une bande de bohémiens. À vrai dire, il ne sait pas bien où il va, mais il sait qu’au bout des routes il y a de grandes villes, où l’on voit de belles églises, inondées de lumière et de parfums, toutes parées de tableaux, toutes pleines de belles statues en marbre et en argent ; il sait qu’il y a là-bas de savants tailleurs de pierres, qui font toutes ces admirables choses, et tôt ou tard, il veut être leur élève, dût-il commencer par être leur manœuvre.
Le hasard lui donna pour compagnons de route, non pas des Gitanos, mais bien de braves ouvriers qui le prirent avec eux et le menèrent jusqu’à Toulon, où ils l’installèrent chez leur mère. À peine remis des fatigues du voyage, Bernus se mit à courir dans toute la ville, de la porte de France à la porte de l’Arsenal, au port, dans les églises, les couvents, partout où il y a quelque choses à apprendre et à admirer (…)10.
L’élève devenu ami de la famille Péru
87Jules de la Madelène raconte ensuite les circonstances qui ont conduit Jacques Bernus à entrer en apprentissage dans l’atelier de l’arsenal de Toulon, sur la proposition de Nicolas Levray (1665-1732). Mais Henri Requin, qui avait retrouvé dans les archives notariales le contrat d’apprentissage de Jacques Bernus, a montré qu’il s’agissait d’une erreur ; sans démentir l’existence de ce voyage à Toulon, il a pu apporter la preuve que l’apprentissage du jeune artiste s’était fait en Avignon auprès de Michel Péru (1615-1670), sculpteur, où il fréquenta Jean De Dieu (1646-1727), engagé en même temps que lui (contrat d’apprentissage signé en 1664), et les fils de Michel Péru, Pierre et Jean Péru (1650- 1723). Michel Péru eut également comme apprenti Jean-Baptiste Carcasse (contrat d’apprentissage signé en 1649), Pierre Magnel (contrat de 1659), Étienne Jourdan (contrat de 1661) et Joseph Ripert, d’Eyrague (contrat signé en 1665)11. Jacques Bernus signa son contrat le 10 janvier 1665, à l’âge de 15 ans, alors qu’il était déjà en fonction chez Michel Péru depuis septembre 1664 et devint, avec l’Arlésien Jean De Dieu, ses sculpteurs les plus talentueux et célèbres.
88Jacques Bernus restera tout au long de sa vie proche de son maître ; il travailla notamment avec lui dans l’église de Monteux pour orner la niche destinée à recueillir la statue de Saint Joseph exécutée par Michel Péru : il reste actuellement de ce travail deux pans entiers de boiseries ; c’est tout naturellement que Jacques Bernus fut sollicité comme témoin lorsque Michel Péru, tombé malade, est amené à rédiger un testament. Étaient également présents, à côté du notaire Saladin et du médecin Jean de Sudre, Pierre-Joseph de Asbrone et Jean Grève, d’Avignon, les sculpteurs Antoine Chavagniac, Jacques Martinet, de Grenoble, ainsi que Étienne Jourdan, de Tarascon12.
89C’est probablement après ce séjour en Avignon que Jacques Bernus se résolut à parcourir la Provence pour parfaire et diversifier sa formation. C’est à la fin des années 1660 que Nicolas Levray l’aurait reçu dans son atelier de l’arsenal de Toulon. C’est là aussi que Jacques Bernus aurait fait connaissance de Pierre Puget (1620-1694), ainsi que de Charles Veyrier (1637-1689). En 1668, après plusieurs mois de formation, le maître aurait proposé à son élève Jacques Bernus de prendre sa suite pour tenir l’atelier de sculpture de l’arsenal de Toulon. Mais souhaitant revenir dans son terroir, pour retrouver sa mère qu’il savait malade et, dit-on, une jeune femme qui l’attendait, Jacques Bernus refusa la proposition. C’est pourquoi Pierre Puget fut préféré pour prendre la direction de l’atelier de l’arsenal de Toulon.
Les premières commandes de Jacques Bernus
90Après son « tour de Provence », Jacques Bernus revint à Mazan pour s’y établir au côté de son père dans la Grand’rue13. Reprenant ce qu’Henri Requin avait écrit, Pierre Fayot et Camille Tiran indiquent qu’il y a créé sa première œuvre qu’on a encore la chance de pouvoir admirer au-dessus de la porte de la sacristie de l’église de l’Observance à Carpentras : une Gloire avec le Père éternel. Cette œuvre de Jacques Bernus, qui a été classée comme objet des Monuments Historiques le 26 février 1923, est constituée d’un amas de nuages d’où se détachent en bas-relief des têtes d’anges, en ronde-bosse – au sommet – le Père éternel, au milieu la Colombe du Saint Esprit et en bas, de chaque côté, un ange.
91Sans qu’on connaisse exactement la date de sa réalisation, on trouve à l’Observance une autre œuvre importante de Jacques Bernus, un très beau groupe sculpté en pierre, composée d’une Vierge à l’Enfant, de Saint Bruno et de Saint Maurice, qui a également été classé comme objet des Monuments historiques le 5 décembre 1908.
Une idylle mort-née
92À 34 ans, la famille de Jacques Bernus songea à le marier ; Jules de la Madelène a écrit à ce sujet que son retour sur Mazan était justifié par le vœu de retrouver une jeune femme à qui il avait promis de revenir, auréolé de gloire : « Il avait hâte d’arriver à Mazan, où l’attendait celle pour laquelle il avait souhaité la gloire. Elle était mourante ; il arriva à temps pour recevoir ses adieux ».
93Henri Requin présente de cet épisode une version moins romancée, qui s’appuie sur des éléments plus objectifs : originaire de Malemort où Jacques Bernus commençait déjà à être connu, une demoiselle Anne- Marie Roussette déclencha chez lui une attirance particulière, à tel point qu’un mariage fut envisagé. Mais 10 jours avant la cérémonie, la promise était enlevée dans une mort brutale. Ce drame provoqua une forte impression sur l’artiste, qui prit le parti, autant par fidélité pour la défunte que par piété filiale envers son père paralysé, de rester célibataire pour mieux se mettre au service de sa famille et de son art. Il put ainsi s’adonner complètement à sa passion artistique, à la manière d’un moine voué à la contemplation.
94Là encore, Jules de la Madelène a montré de ces événements une version différente, qui, en soi, ne mérite pas, cette fois-ci, d’être nécessairement rejetée :
Cette douleur, qui venait le frapper dans sa jeunesse, laissa sur toute sa vie une empreinte religieuse qui s’est reflétée sur tous ses ouvrages. Plus tard, il en aima une autre, et comme aiment les poètes, en livrant toute son âme. Mais son amour fut rejeté. Qu’avait-elle à faire, la coquette, de cet ouvrier aux mains calleuses et gercées, toujours triste et rêveur, et qui ne savait que l’aimer ? Elle lui préféra sans doute quelque chevau-léger, bien gai, bien insolent, qui planta là cet amour, quand il en a pris ce qu’il en voulait. Et ce fut peut-être un bonheur pour Bernus. Qui pourrait dire tous les génies qu’ont étouffés les bras des courtisanes, toutes les belles intelligences que le plaisir a matérialisées ? Les joies de la terre lui étaient refusées. Forcé de s’isoler du monde des sensations, il dut diriger toutes les forces de son âme vers un seul point et se réfugier dans cette seconde vie que nous font les beaux-arts.
95Du point de vue du caractère, on sait peu de choses sur Jacques Bernus. Mais si l’on se fie aux tournures de ses statues, on y voit de la tranquillité contemplative ; pour Henri Requin, il était à l’image de son Comtat et de ses attributs : « De la Sorgue, il a le calme et la fraîche limpidité ; il en a aussi l’admirable fécondité (…). La vie de Bernus fut donc calme et tranquille, occupée, ennoblie par le travail et se résumant pour nous presque en entier dans ses œuvres »14.
96Les œuvres de Jacques Bernus étant une invitation permanente à l’élévation de l’esprit, on ajoutera qu’elles sont à l’image du Ventoux, stables, solides et transcendantes.
Jacques Bernus, notable à Mazan
97Jacques Bernus s’intéressait aussi aux affaires de sa ville, où il jouissait déjà d’une forte considération. Dans le registre des délibérations du Conseil de la communauté, il est cité comme conseiller du premier rang en 1701, premier visiteur des rues en 1702, premier recteur de l’Hôpital de Mazan (ancien hôtel-dieu) en 1704, cette place ayant été laissée vacante par le Marquis de Causans15. Il reçut ensuite l’Évêque en visite pastorale et lui rendit compte16. Jacques Bernus se faisait aider dans son atelier par ses frères Jean-Paul (1653-1725) et Joseph Bernus (1666- 1741) qui laissèrent, tous les deux, une descendance.
98Signe de notabilité, la tombe de la famille Bernus se trouvait alors dans l’église paroissiale devant le transept actuel17. Sur un plan de 1736, on aperçoit en effet parmi les noms des familles qui ont le droit d’ensevelir leurs membres sous la nef de l’église paroissiale celui des Bernus18.
La reprise de l’atelier familial
99Voyant ses forces un peu plus faiblir, Noël Bernus songea à installer un successeur dans ses affaires. En 1694, c’est vers Jacques Bernus, l’aîné des trois frères, que Noël se tourna pour qu’il prenne la direction de son atelier. C’est aussi à cette époque que Jacques Bernus consolida son amitié avec Monseigneur Buty, qui allait devenir, par ailleurs, un de ses plus grands commanditaires.
100Jacques Bernus a pu également s’honorer de l’amitié de Michel Péru et de ses fils, du peintre Pierre Parrocel (1670-1739) et de la protection bienveillante de Monseigneur Jean-Baptiste de Sade. D’après Henri Requin, il était aussi un familier du sculpteur avignonnais Pierre Mignard (1640-1725), fils du célèbre peintre Nicolas Mignard (1606-1668). Enfin, Jules de la Madelène prétend que Jacques Bernus a côtoyé Christophe Veyrier (1637-1689)19 lors de son Séjour à Toulon.
101Lorsqu’il reprit l’atelier de son père, ce dernier avait acquis une forte renommée dans le Comtat, qui n’allait pas cesser de se consolider et de s’étendre. Contrairement à ce qu’affirmait Hyacinthe Chobaut (1889-1950), Jacques Bernus a également accueilli dans son atelier des compagnons qui, à leur tour, sont devenus des menuisiers-sculpteurs : par exemple, Roux à Aulan ou Lagarde dans le Haut-Vaucluse. Resté célibataire, il est très possible que Jacques Bernus ait lui-même formé ses neveux, dont cinq d’entre eux ont choisi son métier, notamment Jacques Bernus de Carpentras, à qui l’on doit l’Ange de la fontaine du même nom.
102Les commandes d’œuvres d’art n’ont pas cessé d’affluer de tout le Comtat-Venaissin, même au-delà (Aulan, Gap, Joyeuse, Lambesc, Montbrun-Les-Bains, Saint Maximin, Salon de Provence). Autour du Ventoux, il n’y avait pas un village ou une ville qui n’ait eu des statues, en bois ou en pierre, des retables, des autels, des chaires, des baptistères, des tombeaux et des mausolées, des portes, des gypseries exécutés par Jacques Bernus. Sa carrière de sculpteur prit un tournant décisif avec la rencontre de trois hommes d’église. Ce fut d’abord sa rencontre avec l’Évêque de Carpentras, Mgr Laurent Buty (1691-1710), qui, en fin connaisseur des arts religieux, notamment d’origine italienne, le fit travailler dans la Cathédrale Saint Siffrein. Ce fut ensuite le soutien que lui apporta un autre Évêque, Jean-Baptiste de Sade, en poste à Cavaillon, mais originaire de Mazan par son père, également dénommé Jean-Baptiste, qui en était le coseigneur.
103L’évêque de Gap lui commanda enfin deux anges en bois fruitier naturel de taille importante que l’on trouve encore dans cathédrale de Gap, de part et d’autre du chœur.
Monseigneur Laurent Buty, ami de Jacques Bernus
104La première commande que fit M gr B uty à J acques B ernus f ut un maître-autel (aujourd’hui remisé), que l’artiste réalisa en 1692. On l’avait remplacé en 1845 dans la cathédrale par un autel néo-gothique en marbre blanc, toujours en place20. Quoi qu’il en soit, cette première réalisation fut une très belle réussite pour le sculpteur, qui fut à l’origine non pas seulement d’une confiance partagée dans l’expertise de l’artiste, mais également d’un lien d’amitié réciproque auquel, seule, la mort de Mgr Buty mit fin.
105Laurent Buty multiplia les commandes à Jacques Bernus, dont les principales réalisations trouvèrent leur place dans le chœur de la cathédrale de Carpentras. On ne saurait tromper en disant, comme MM. les abbés Reyne et Bréhier, que les œuvres de Jacques Bernus sont « disposées çà et là dans le chœur, qui est comme le réceptacle des travaux du grand maître comtadin ».
Les anges adorateurs, chefs-d’œuvre de Jacques Bernus
106Ce décor se caractérise d’abord par les anges adorateurs posés sur le maître-autel – qui peuvent être regardés à juste titre comme des chefs- d’œuvre de Jacques Bernus : « La grâce, la finesse, le naturel de ces sculptures les classent parmi les plus belles sculptures du XVIIe siècle »21, précisent MM. les abbés Reyne et Bréhier. « Le mouvement, les draperies, la pose, expression suave des figures font de ces deux sculptures un objet d’admiration », écrivait J. Liabastre22. Jules de la Madelène, également, ne tarit pas d’éloges à leur égard : « La parole est impuissante à rendre tout ce qu’il y a de foi et de mystique effusion dans ces deux Anges agenouillés devant le tabernacle, dans une muette adoration ; leurs ailes, frissonnantes d’amour, semblent vouloir les enlever de la terre. Les détails de la chevelure sont peut-être d’une coquetterie un peu vulgaire, les draperies sont peut-être trop fouillées, trop savamment arrangées ; mais il y a là un sentiment si exquis de grasse et de mollesse rêveuse, qu’on ne se sent pas la force d’une critique ». La commande de ces anges adorateurs, qui ont été classés comme objets des Monuments Historiques le 5 décembre 1908, fut passée par Mgr Buty à Jacques Bernus le 24 novembre 1694. Ils ont été les premiers d’une longue série, déclinés de toute taille.
Une Gloire monumentale, à l’image de celle de Saint Pierre de Rome
107Dans ce même ensemble situé dans le chœur, on doit aussi à Jacques Bernus la Gloire de taille monumentale, qui est une réplique de celle du Bernin (1598-1680) de Saint Pierre de Rome. Jacques Bernus l’exécuta sans jamais avoir vu l’original, sur la base d’une gravure rapportée de Rome par Monseigneur Buty et à sa demande. À son sujet, Jules de la Madelène indiquait :
Nulle part le génie de Bernus n’a montré plus de puissance que dans la grande Gloire placée au fond du chœur, au-dessus du tableau de Trévisan. Quand, aux jours des grandes fêtes chrétiennes, la vieille Cathédrale s’illumine, comme cette Gloire rayonne admirablement sous la lumière qui l’inonde ! Au milieu de ce magnifique pêle-mêle d’anges et de chérubins jetés sur les nuages, perdus dans des nimbes d’or, ressortent deux figures colossales d’un effet étrange et grandiose, une surtout, celle de l’Archange, est d’un grand style ; ses grandes ailes déployées semblent porter tout ce monde ; il roidit son corps avec une vigueur si mâle et si belle, qu’on le dirait du vieux Buonarotti. Tout cela est conçu, exécuté avec une exubérance, une fougue, une impétuosité qui rappellent les grandes compositions de Michel-Ange et de Jean Cousin. Richesses de détail, harmonie d’ensemble, savantes études anatomiques, saintes et chrétiennes idéalisations, il y a tout cela dans ce gigantesque entassement.
108Quant aux cadres des tableaux du polyptyque (aujourd’hui déplacés), aux angelots (au nombre de 16) et aux quatre statues des « vertus théologales »-dont le classement en tant qu’immeubles des Monuments historiques a été acquis en 1840 –, ils furent également commandés à Jacques Bernus et sculptés par lui entre 1694 et 1702. C’est l’évêque Laurent Buty qui finança une grande partie de ces travaux, les chanoines Massan et Florent ayant aussi contribué à régler cette dépense. C’est pourquoi ces deux derniers ecclésiastiques obtinrent que leurs armes soient apposées sur l’autel et sur les cadres du polyptyque, dont certains éléments se trouvent maintenant au-dessus de la porte principale23.
109À gauche et à droite de la Gloire, deux statues représentent la Foi et l’Espérance, et plus près du maître autel, la Charité et la Religion. Quant aux angelots situés au-dessus des stalles, ils supportent, pour certains, les attributs épiscopaux – crosse, mitre, étole, manipule –, pour les autres les armes de Mgr Buty : « D’azur à la fasce d’or chargée de trois roses de gueules, accompagnées en chef d’une comète d’argent et en pointe de deux burelles ondées de même ». On y trouve aussi les armes de Mgr Abbati, recteur du Comtat Venaissin, qui succéda à Mgr Buty, sur le siège épiscopal de Carpentras : « D’azur à une église d’argent, posée sur une montagne de trois copeaux de même, cantonnée en chef dextre d’une comète, le tout d’argent ».
110Jacques Bernus travailla plus de 18 ans – de 1692 à 1710 – pour Mgr Buty. C’est tout naturellement vers lui qu’on se tourna pour la réalisation de son mausolée dans la Cathédrale. Le tombeau de Mgr Buty, qui se trouve à gauche de l’entrée du choeur, a fait l’objet d’un classement en tant qu’immeuble des Monuments Historiques en 1840. L’évêque est représenté à genoux les mains jointes, dans la posture du priant. Devant lui, un ange tient un livre ouvert. Datant des premières années du XVIIIe siècle, ce tombeau est surmonté de la figure du temps, qui essaie, en vain, de recouvrir l’évêque du manteau de l’oubli. Ce qui reste de ce monument, abîmé en 1793, témoigne encore aujourd’hui de la finesse du travail de Jacques Bernus24. Les avis sont unanimes pour saluer la beauté de cette œuvre, un peu noircie par le temps ; Jules de la Madelène l’évoqua en ces termes :
À part cet enfant contourné, dont rien ne justifie la pose malheureuse, ce monument est d’une grande beauté de détails ; les draperies en sont riches et délicates ; une surtout est d’un grand effet, celle qui supporte cette figure d’un caractère sombre et sépulcral.
Monseigneur Jean-Baptiste de Sade, commanditaire de Jacques Bernus
111Jacques Bernus est intervenu à la demande de Mgr Jean-Baptiste de Sade, évêque de Cavaillon, entre 1703 et 1706 pour décorer la chapelle Saint Véran de la Cathédrale de Cavaillon. On lui doit, dans cette très belle chapelle, la décoration de la voûte, des lambris et des portes du reliquaire qui contient les restes de saint Véran. Jacques Bernus a également exécuté les deux statues, grandeur nature, de saint Jacques le Majeur et de saint Vérane Évêque.
Le bilan d’une vie féconde : un grand talent sincère et honnête
112Laissant derrière lui une œuvre féconde et reconnue dans toute la Provence, Jacques Bernus meurt le 25 mars 1728 dans sa ville natale de Mazan, après avoir pris le temps de rédiger un testament et sur lequel figure son sceau. La sculpture de Jacques Bernus se caractérise par la grande légèreté des draperies qui habillent ses personnages et de leurs ailes, quand il s’agissait d’anges ; il a laissé en majorité des œuvres en bois et de nature religieuse ; situées en majorité dans les églises, ses œuvres ont été protégées de l’usure du climat ; en revanche, un grand nombre d’entre elles n’ont pas résisté aux destructions volontaires des révolutionnaires25 ; sa période la plus fructueuse se situe à la jonction du XVIIe et du XVIIIe siècles (entre 1692 et 1710). Il est parvenu, grâce à un travail préalable de modélisation soignée – comme en témoignent les nombreux dessins et maquettes qu’il a laissés26 –, à transmettre à ses sujets, qu’ils soient bustes, statues ou anges, à la fois une grande pureté et une grande vitalité. Pour Jules de la Madelène, « Bernus fut le plus grand et le dernier des sculpteurs sur bois. Il clôt admirablement cette phase de l’art, à laquelle le moyen-âge avait apporté tant de patience et d’étude, la renaissance, tant de grâce ; seul il sut lui donner un caractère monumental. Placé sur la limite du XVIIe et du XVIIIe siècle, il y a chez lui toute la force et la vérité de la grande école de Puget, mêlées à cette vénusté et à cette délicatesse que les Boucher et les Vanloo n’avaient pas encore changée en afféterie ». Pour Henri Requin, Jacques Bernus « ne cesse d’être un véritable artiste d’un incontestable mérite, d’un talent plus qu’ordinaire, une des illustrations les plus remarquables de notre Comtat »27. Hyacinthe Chobaut reste également élogieux, mais replace les œuvres de Jacques Bernus, comme l’avait fait Henri Requin, dans un contexte régional28 : « L’aile du génie ne l’avait sans doute pas effleuré et on ne peut lui donner une place parmi les grands créateurs. Mais ses sculptures présentent une sorte de grâce naïve, une exécution facile, qui est la marque d’une belle conscience d’artiste et d’un talent probe et simple. Bernus est un produit pur de notre terre comtadine ; il n’a vu ni Rome, ni Paris ; il reste bien en- dessous du génie tourmenté d’un Puget, mais il se contente d’être lui- même, âme droite, encore un peu paysanne, sans excès de recherche, sans ambition démesurée : un grand talent sincère et honnête ».
L’atelier Bernus : une floraison d’artistes et d’œuvres
113Comme cela s’observe très souvent en matière artistique (musique, peinture, art lyrique et cinématographique, etc.), il est rare qu’une vocation de créateur naisse ex nihilo, sans qu’il n’existe avant, autour et au-delà d’un artiste majeur un terreau favorable à l’expression artistique. Ce fut particulièrement vrai pour Jacques Bernus, qui se forma d’abord dans l’atelier de son père : son environnement familial le porta dans le monde des sculpteurs. Par la suite, il devint lui-même un modèle familial, qui suscita chez ses neveux et nièces, et leurs descendants, d’autres vocations de sculpteurs, de menuisiers ou de doreurs. Mais cette floraison d’artistes n’a jamais été favorable à l’identification précise des œuvres sorties de l’atelier Bernus.
114Il sera ici question ici de recenser l’ensemble des œuvres qui sont attribuées à Jacques Bernus et, partant, de les différencier de celles de ses proches. C’était déjà la démarche de Hyacinthe Chobaut qui, dans son article consacré à « Une famille d’artistes comtadins : les Bernus » (1934), a montré la continuité d’une génération à l’autre. On s’est aidé dans cette démarche, en plus des recherches faites à la bibliothèque Inguembertine et aux archives municipales d’Avignon, des écrits de Barjavel29 (1841), de Jules de la Madeleine (1853)30, d’Henri Requin31 (1885), de MM. André Reyne et Daniel Bréhier32 (1975 et 1983), ainsi que des monographies locales.
115Les commandes d’œuvres d’art ont afflué de tous les pays du Ventoux, même au-delà : il n’y a pas un village ou une ville qui n’ait eu des statues, en bois ou en pierre, des retables, des autels, des chaires, des baptistères, des tombeaux et des mausolées, des portes, des gypseries exécutés par Jacques Bernus ou son entourage. On prendra soin, à chaque fois, de bien différencier l’œuvre personnelle de Jacques Bernus de celles de ses proches.
Apt
La salle de cinéma Le César, située dans l’ancienne chapelle de la confrérie des Pénitents Blancs, dissimule derrière le mur de scène, une fresque ainsi que des panneaux de bois qui sont attribués à Jacques Bernus.
Aubignan
Dans l’église paroissiale d’Aubignan de style mi-roman mi-gothique, on trouve deux angelots de Jacques Bernus, qui auraient servi de modèle pour réaliser les angelots de la cathédrale Saint Siffrein à Carpentras (à moins que ce ne soit l’inverse).
Avignon
Dans la cathédrale Notre-Dame des Doms, les deux statues (grandeur nature) de Saint Thomas et de Sainte Marie-Madeleine ont été attribuées à Jacques Bernus au moment de leur protection comme Monuments Historiques.
Dans l’église Saint Symphorien (ancien couvent des carmes), la statue de la Vierge à l’Enfant, en bois argenté, est l’œuvre de Jacques Bernus. Elle a été classée en tant que telle comme objet des Monuments Historiques depuis le 28 février 1907. On retrouve effectivement dans cette statue la même moue et le même regard, tourné vers le ciel, que ceux des statues de Marie de l’église de Mazan (Notre Dame des sept douleurs) et de l’église de Saint Didier.
Enfin, dans l’Église Saint Pierre à Avignon, la Vierge à l’enfant qui se situe entre les portes en bois sculpté de l’entrée de l’église est classiquement attribuée à Jacques Bernus.
Bédarrides
La façade classique de l’église saint Étienne était ornée d’une Vierge sculptée en 1720 par Jacques Bernus33. C’est sans doute elle qui fut commandée par Gaspard Fortia, Marquis de Montréal, pour l’église de Bédarrides.
Dans l’église, la balustrade est l’œuvre, en 1719, de Jacques Bernus, de même que deux bénitiers, exécutés en 1725. N. Marmottan le confirme dans son ouvrage consacré à Bedarrides : « Dans un registre des comptes municipaux figure une somme de 100 livres, payée en 1719, à Bernus comme acompte du prix de la balustrade de l’église34 ; un autre acompte a été versé à Bernus, en 1725, pour deux bénitiers placés dans l’église35 ». D’après Henri Requin, une autre Vierge, aujourd’hui œuvre perdue, avait été commandée à Jacques Bernus. Les statues de saint Laurent et de saint Étienne, de l’église de Bédarrides, pourraient être aussi de Jacques Bernus.
Bédoin
Le 8 janvier 1730, le conseil de Bédoin décide par délibération de s’en référer à l’avis et à l’évaluation de Monsieur Guigue, sculpteur d’Avignon pour payer au sieur Bernus ce qui peut lui être dû au sujet des plans et dessins pour le décor de la nouvelle église.
Henri Requin attribuait sans réserve le tabernacle de Bédoin, en bois d’aube, à Jacques Bernus (œuvre qui serait perdue, d’après Henri Requin).
Beaumes-de-Venise
Dans l’église Saint Pierre, le prévôt du Chapitre paya, avec l’argent des quêtes, « le devant du maître-autel fait, en 1724, par Joseph Bernus de Mazan »36. Cette œuvre a été détruite.
Caromb
En avril 1878, dans la Chapelle Saint Maurice, Noël Bernus – désigné comme « architecte à Mazan » – et ses compagnons ont réalisé le retable (exécution et pose)37. H. Requin attribue aussi la statue – détruite à la Révolution – de Saint Maurice de l’église paroissiale de Caromb à Jacques Bernus.
Carpentras
La Cathédrale Saint Siffrein n’a pas été le seul réceptacle des œuvres de l’atelier Bernus38. Il existe aussi, dans l’Église de l’Observance, différentes sculptures dont l’attribution à Jacques Bernus n’est contestée par personne. On citera en premier lieu la Gloire située à droite de l’autel, au-dessus de la porte de la sacristie ; classée comme objet des Monuments Historiques depuis le 26 février 1923, cette oeuvre est constituée d’un amas de nuages d’où se détachent en bas-relief des têtes d’anges, en ronde-bosse – au sommet – le Père éternel, au milieu la Colombe du Saint Esprit et en bas, de chaque côté, un ange. Classé comme objet des Monuments Historiques le 5 décembre 1908, le groupe sculpté en pierre, composé d’une Vierge à l’Enfant, de Saint Bruno et de Saint Maurice est également attribué à Jacques Bernus.
Au début du XVIIIe siècle, de nouveaux équipements pour l’alimentation en eau de la ville (réalisation de l’ingénieur de Clapies et de l’architecte d’Allemand) permirent un vaste programme de restauration et de construction de fontaines publiques. En 1730, le consul Esberard ordonna la reconstruction de la fontaine située devant le beffroi, sur l’actuelle place de l’Horloge. La commande en fut passée à Jean-Paul Guigue qui donna le plan et réalisa les sculptures, à l’exception de l’ange du couronnement, dont l’exécution fut confiée à Jacques Bernus de Carpentras, le neveu du célèbre sculpteur Jacques Bernus de Mazan. Dès 1731, la fontaine entra en fonction. Mutilée en 1792, elle fut restaurée en 1823 : on procéda à la réalisation d’un nouvel écusson orné du saint clou et entouré de branches de laurier en remplacement du blason aux armes de la ville que présentait l’ange avant la Révolution ; on fit remplacer le bassin hexagonal par un bassin octogonal plus vaste. En 1904, la municipalité décida de remplacer l’ensemble des fontaines par des bornes-fontaines : de la fontaine de l’ange, alors détruite, il ne reste aujourd’hui que l’élégante statue de Jacques Bernus, qui est à présent mis à l’abri dans le jardin du musée de Carpentras39. La fontaine se composait d’un bassin hexagonal, d’un champignon d’eau supportant un vase sculpté ; une armature métallique reliait la pile à la margelle. Un couronnement venait coiffer un socle sculpté en ronde bosse. Le vase de la fontaine était sculpté de huit mascarons, alternativement grands et petits. Le socle du couronnement comportait des cartouches entre des acanthes et un putto ailé déroulant un phylactère portant la devise de Carpentras : UNITAS FORTITUDO DISSENTIO FRAGILITAS ; à ses pieds, figurait un écusson portant les armoiries de Carpentras et un faisceau.
Dans l’hôtel particulier servant actuellement d’immeuble à logements (107, rue Galonne, à Carpentras), le décor de la cheminée en plâtre est également attribué à Jacques Bernus : l’âtre est accompagné de bordures moulurées et surmonté d’un trumeau bordé en bas par un appui mouluré. Il s’agit d’un cadre rectangulaire entouré d’une abondante sculpture en relief et en haut relief, en léger ressaut sur les côtés et surmonté d’une corniche cintrée à ressauts ; il est doté d’un petit entablement au-dessus. La hotte de la cheminée est moulurée et décorée (tore avec une feuille d’acanthe enroulée au centre et aux angles, surmonté d’un décor de canaux à chute végétale et feuilles d’acanthe au centre et aux angles. Au-dessus, appui sur rang de denticules). Le décor du trumeau est constitué de deux putto- atlantes à queue de serpent et ceinturés de feuilles d’acanthe, qui tiennent un cadre fait d’une frise de feuille ; on y a placé un cartouche à agrafes dessous et un autre cartouche dessus surmonté par un aigle sur un globe. De part et d’autre, sont sculptées des chutes de fleurs (roses, marguerites) et de fruits variés partant d’une rosace. Au-dessus du cadre, apparaissent une branche d’olivier à droite et une palme à gauche40.
On trouve aussi dans les collections municipales (ancien musée lapidaire) les restes du premier autel en bois de la cathédrale de Saint Siffrein, ainsi qu’une Vierge grandeur nature en bois non doré, « silhouette un peu tourmentée, mais très noble d’allure, où l’on sent passer, comme dans la plupart des œuvres de Bernus, un reflet de l’art du Bernin et du génie de Pierre Puget »41. Dans la chapelle de la Visitation (détruite à la Révolution), le tombeau, aujourd’hui disparu, du chanoine Paul d’Andrée était attribué à Jacques Bernus (H. Requin). Dans la chapelle de la congrégation des Messieurs, Jacques Bernus avait réalisé le retable (œuvre perdue, d’après H . Requin).
Enfin, H. Requin attribue à J. Bernus plusieurs cheminées (Chez M. Richard, 64, rue Vernet ; une autre au musée de Carpentras, Psyché et l’amour), un aigle en plâtre (musée de Carpentras) et un bas-relief (musée de Carpentras). Sans aucune certitude, Henri Requin attribue une Vierge de la maison Boudou, rue d’Olonne, et un chien de la maison Fougasse (16, rue du coq), à Jacques Bernus.
Causans (Église de)
Les deux anges adorateurs de cette église seraient de Jacques Bernus (H. Requin).
Crillon-le-Brave
Dans l’Église paroissiale saint Romain, le retable est attribué à Jacques Bernus.
Henri Requin n’émet aucun doute sur l’attribution de la statue de la Vierge, de celle de saint Joseph et du buste de Saint Romain à Jacques Bernus (œuvres désignées comme perdues). Il en va de même des statues de Saint Pierre et de Saint Paul (destinées au retable du maître-autel), ainsi que du tabernacle du maître-autel (œuvres présentées comme perdues par H. Requin).
Flassan
Jacques Bernus avait exécuté les deux statues qui étaient adossées de part et d’autre de l’autel (Saint Pierre et Saint Paul). Elles ont disparu. La chaire avait aussi été son œuvre. En témoignait une quittance consignée aux archives municipales en date du 10 mars 1697 ; toutefois, le registre qui en faisait foi a lui-même disparu42.
Gigondas
Dans l’église, les statues en bois doré de Saint Cosme et de Saint Damien, patrons de la paroisse, sont traditionnellement attribuées à Jacques Bernus.
Goult
La chaise du célébrant, de l’église paroissiale de Goult, pourrait être de Jacques Bernus (H. Requin).
Isle-sur-sorgue
Joseph Bernus (1666-1741) – le dernier fils de Noël Bernus – participa aussi à la réalisation, avec son neveu Philippe Bernus (1689-1760) – le premier fils de Jean-Paul Bernus –, des boiseries de la chapelle de la confrérie de Notre Dame du Salut, dans l’église collégiale de Notre- Dame des Anges de l’Isle-sur-Sorgue43.
Le couronnement de la Vierge, en ronde-bosse (bois doré), sur la porte occidentale de l’église paroissiale de l’Isle, pourrait être de Jacques Bernus, d’après Henri Requin.
Le retable de l’ancienne église des Ursulines, ainsi que les statues de Sainte Ursule et de Saint Augustin sont de Joseph Bernus, d’après Henri Requin, sans que l’on sache s’il s’agit du frère ou du neveu de Jacques Bernus.
La Roque-sur-Pernes
Un buste à l’effigie de Saint Antoine, patron du village, est exposé dans l’église paroissiale. Il a été réalisé au XVIIe siècle par Jacques Bernus.
Le Beaucet
Pierre Bernus (1648-1714), sculpteur à Mazan, a réalisé en 1696 le reliquaire en bois doré contenant les ossements vénérés de Saint Gens ; initialement exposé dans l’église du Beaucet, ce reliquaire a été placé en 1972 dans la chapelle de l’ermitage. Il comporte une statue du saint, tenant une aiguillon et reposant sur un socle de rocher, avec une vache et un loup. Ce reliquaire se trouve dans la travée de gauche, protégée par une grille. Tout autour, on aperçoit des tableaux d’ex-voto.
Le Thor
Dans l’église paroissiale, la Vierge à l’Enfant dite Notre-Dame du Rosaire (XVIIe siècle), en bois peint et doré, est attribuée à Jacques Bernus. Classée au titre d’objet des Monuments historiques le 5 décembre 1908, cette statue a été volée le 4 mars 1994.
Malemort-du-Comtat
L’autel, le retable et les 4 statues de sainte Élisabeth, sainte Anne, saint Zacharie et saint Joachim sont l’œuvre de Jacques Bernus. Ils ont été classés en tant qu’objets des Monuments Historiques le 3 mai 1933. Cet ensemble provient de l’ancienne chapelle de Sainte Garde. Primitivement, l’autel était plaqué contre le retable.
Deux autres statues, représentant la Vierge et saint Joseph, sont l’œuvre de Jacques Bernus (1er quart du XVIIIe siècle). Elles ont été classées au titre d’objets des Monuments historiques le 3 mai 1933.
Il existe une notice historique détaillée de l’intérieur de l’église de Malemort, du Curé Joseph Denove (dans les années 1920-1930), rééditée en 2010, qui décrit et explique avec précision l’historique des œuvres de Jacques Bernus dans cette église (pp. 31 et 32) :
Un groupe de six statues, reconnues du célèbre sculpteur Mazanais Jacques Bernus ornent l’église paroissiale de Malemort du Comtat (Classement aux Monuments Historiques en 1933) : Sainte Élisabeth tenant l’enfant Jésus entre ses bras ; Saint Zacharie : en costume de grand prêtre, l’encensoir d’une main, gesticulant avec animation ; Anne la Prophétesse : belle tête de femme âgée très caractéristique ; statue de la Vierge : mains appuyées sur la poitrine ; statue de saint Joseph : cheveux jetés au vent, qui ont été noircis par un barbouilleur ; statue de la Vierge : statue jolie, mais un léger gonflement de la lèvre lui donne un air disgracieux (…). Nous l’avons dit plus haut primitivement, tel qu’il est sorti du célèbre atelier mazanais pour l’ancienne Chapelle de Sainte Garde, son tabernacle ne supportait qu’un simple socle où reposait la croix. Il est facile de comprendre que, vu son enchâssement dans le retable au-dessous du grand tableau primitif dont il a été parlé, toute autre décoration aurait été pour lors superflue. Une fois placé chez nous, en avant de son retable avec pour fond supérieur un tableau de plus petite dimension, on explique non moins facilement qu’on ait songé par la suite à le pourvoir de quelque supplément décoratif. Nous voyons dans le premier registre des délibérations de l’ancien Conseil de fabrique (p. 64) qu’il fut question le 13 janvier 1812 du règlement de l’exposition qui se trouve sur le maître-autel, faite par Bernus de Mazan au cours de 1811. À n’en pas douter, il s’agit de notre groupe artistique formé par le lion de Saint Marc, le taureau de Saint Luc, l’homme de saint Mathieu, à tort métamorphosé en ange et aigle de Saint Jean. Ce groupe constituait la base de la nouvelle exposition en bois sculpté et doré dont un baldaquin avec draperies et fanges pendantes formait le sommet.
Ainsi la voyons-nous encore aujourd’hui, mais les vrais artistiques s’en rendent compte, elle est d’une facture moins archaïque, moins fouillée aussi que le restant de l’autel, quoique l’accompagnant très bien.
Elle sort du reste à ce qu’il paraît des mêmes ateliers avec 65 ans de retard, exécutée vraisemblablement par quelque petit neveu du célèbre Bernus et peut-être d’après ses propres dessins (…).
Malaucène
Dans l’église de Malaucène, la tribune qui porte les orgues, établie en 1753 au revers de la façade occidentale de l’église, a été exécutée par Philippe Bernus44.
Mazan
Dans l’église, le buste de Notre-Dame des Sept Douleurs, en bois doré, est l’oeuvre de Jacques Bernus. Il a été classé au titre d’objet des Monuments Historiques le 24 décembre 1924. Son socle, en bois, repose sur un socle plâtre XIXe polychrome avec un ange en atlante. Son authenticité n’est pas mise en doute, le buste étant signé sur le côté droit BERNUS ST (sculpsit)45.
La grande porte extérieure de l’église de Mazan a été faite ou dessinée par Jacques Bernus ; sur la tranche de la serrure est gravée : J.B. 169386.46 La porte de la chapelle des Pénitents blancs (actuellement musée de Mazan) a également été dessinée par Jacques Bernus vers 1692, mais réalisée par son frère Jean-Paul47. Dans ce musée, sont aussi exposés deux panneaux de bois attribués à Jacques Bernus, représentant l’Annonce faite à Marie et la Visitation.
En 1687, la Confrérie des Pénitents Noirs de la Miséricorde, de Mazan, a demandé à Jacques Bernus, sculpteur, la réalisation d’un Christ, qui a disparu pendant la Révolution. Le sculpteur aurait également exécuté pour la même confrérie une statue en bois de l’Enfant Jésus, « Sauveur des hommes », qui se trouve actuellement dans la collection Beurier d’Aix-en-Provence48. Dans la Chapelle Notre Dame de Pareloup, sur une niche extérieure, il y avait une statue de la Vierge en pierre, attribuée à Jacques Bernus, cassée en 1793 par les révolutionnaires, puis égarée49. La statue de Saint Roch en pierre, qui se trouve dans une niche de la chapelle Saint Roch, est l’œuvre d’un Bernus. L’Abbé Granger, dans son Histoire du diocèse d’Avignon, l’attribue au maître sculpteur Jacques Bernus ; mais il est probable qu’elle soit l’œuvre de son père, Noël Bernus. Elle date de 1666, à un moment où Jacques Bernus n’était âgé que de 16 ans50. Pour P. Fayot et C. Tiran, cette statue révèle une « technique bien achevée pour être l’œuvre d’un enfant (…) ; il est plus naturel que l’auteur en soit son père, sculpteur comme lui sur pierre et sur bois ».
Il existe dans la sacristie un meuble qui est depuis longtemps attribué à Jacques Bernus et dont le classement comme objet des Monuments Historiques est acquis en tant que tel depuis le 6 septembre 1938 ; mais, là encore, un doute a été exprimé – par P. Fayot, C. Tiran et H . Requin – quant à l’origine certaine de ce meuble. Il se compose d’une partie principale à deux corps, chacun à quatre vantaux et à deux tiroirs. Le corps du haut est en retrait. Deux parties en retrait avec prie-Dieu complètent le meuble principal. L’ensemble est surmonté d’une petite balustrade et d’un édicule en forme de retable, lequel, encadré de colonnes et d’ailerons, est couronné d’un fronton curviligne.
On attribue sans aucune certitude51 le gisant retrouvé sous l’autel de la chapelle Sainte Marie-Madeleine (aujourd’hui détruite) à Jacques Bernus.
MM. Fayot et Tiran exprimèrent aussi des doutes quant à la paternité de la cheminée en plâtre Persée délivrant Andromède de l’ancien château des Causans, que certains ont voulu attribuer à Jacques Bernus.
En 1714, Jacques Bernus donna à sa commune un ostensoir, aujourd’hui disparu, pour la chapelle du Saint Rosaire. Un Bernus, très certainement, Philippe, participa en 1772 à la construction du petit théâtre dans le château neuf de la famille Sade, là où le Marquis de Sade, écrivain, organisa des représentations théâtrales avec une troupe de Marseille52.
Méthamis
On attribue de manière très sûre à Jacques Bernus le buste-reliquaire de Saint Denis, en bois doré, qui se trouve dans l’église. Il a été classé en tant que tel au titre d’objet des Monuments Historiques le 3 mai 1933 et sont également de Jacques Bernus le retable et la chaire.
En revanche, on doit à Joseph et Philippe Bernus la statue représentant une Vierge à l’Enfant et son baldaquin, en bois taillé et doré. La statue et son baldaquin ont été classés en tant que tels comme objets des Monuments Historiques le 3 mai 1933.
Modène
Les liens avec Modène étaient étroits, le beau-frère de Jacques Bernus étant le sculpteur Genest Villon, originaire de Modène. Hyacinthe Chobaut évoque l’existence d’une commande faite en 1725 par la Confrérie de Notre-Dame du Rosaire de Modène à Jacques Bernus pour la réalisation d’une statue de la Vierge avec l’Enfant53. Mais cette œuvre a été perdue. Henri Requin évoque pour sa part, dans l’église de Modène, une Vierge avec baldaquin qu’il attribuerait plutôt à Joseph ou Philippe Bernus.
Henri Requin attribue enfin à J acques B ernus u n b as-relief e n pierre de Saint Didier (Enfant Jésus, la Vierge et une autre femme tenant une corbeille de fruits), qui se trouve dans un oratoire au nord-ouest de Modène, sur la route de Caromb.
Mollans-sur-Ouvèze
Dans la Chapelle du cimetière, la Gloire est attribuée à Jacques Bernus.
Monteux
En 1655, d’importantes réparations furent faites dans l’église de Monteux. Michel Péru, le maître de Jacques Bernus, fit une statue de Saint Joseph, commandée par la Confrérie Saint Joseph ou des agonisants ; cette statue fut posée dans la chapelle Saint-Étienne, en une niche décorée par Jacques Bernus et Grangeon, sculpteurs de Mazan54. Il ne reste de ces boiseries que deux pans de panneaux, finement sculptés.
Henri Requin attribue aussi, mais sans certitude, le buste de Sainte Barbe, de l’église paroissiale, à Jacques Bernus.
La Vierge de l’hôpital de Monteux, en pierre de Saint Didier, pourrait être de Jacques Bernus (H. Requin)
Mormoiron
Dans l’église paroissiale Saint Laurent, les fonts baptismaux sont l’œuvre de Jacques Bernus. D’après Guy Gérard Durand, le bas-relief est taillé dans la pierre de Saint Didier. Il représente le Saint Esprit en forme de colombe planant sur des nuages d’où s’échappent des rayons. Le tout est entouré de deux palmes liées par un ruban, avec, au-dessus, le cartouche d’un blason sans armoiries. Ce travail peut raisonnablement être attribué à Jacques Bernus en raison « du fini des détails, de la pureté des lignes et de l’harmonie de l’ensemble ». Toutefois, les archives communales restent imprécises sur le prénom du sculpteur : entre 1761 et 1789, les comptes des trésoriers de la commune mentionnent un mandat de 5 livres pour la pose des fonts baptismaux et le registre des délibérations de la même époque fait état d’un vote pour la sculpture par M. Bernus55. Pour le Ministère des Affaires culturelles, l’œuvre est de 1728, date de la mort de Jacques Bernus et doit être attribuée à Jean-Paul Bernus, son frère, également sculpteur. Elle est classée, au même titre que le maître-autel, depuis le 6 septembre 1938.
Classée le 18 avril 1942, la chaire à prêcher a été réalisée par l’atelier de Bernus entre 1690 et 170056. Elle est en bois sculpté et les panneaux représentent les quatre évangélistes et leurs symboles : Jean et l’aigle, Marc et le lion, Mathieu et l’ange, Luc et le taureau. Les quatre figures empruntées aux visions du prophète hébreu Ezéchiel sont une manière de symboliser la création tout entière. Le Christ est évidemment au centre, et terrasse la bête de l’Apocalypse aux sept têtes.
Notons au passage, le mandat de 21 florins émis par la commune, vers 1640, pour la pose de la chaire57. Cette somme payée, au justificatif disparu, accorderait-elle la paternité de l’œuvre à Noël Bernus, père (1616-1702) ? La question reste en suspens.
Le retable du maître-autel est composé de deux colonnes corinthiennes cannelées en bois doré (sauf la partie inférieure décorée de pampres), supportant un fronton triangulaire avec tympan et entre lesquelles on a encadré un tableau représentant Saint Laurent, patron de l’église. Il a été exécuté vers 1658 par Noël Bernus58 et classé, avec le tableau de Saint Laurent, depuis le 6 septembre 1938.
Parmi les œuvres disparues, inventoriées par l’Abbé Requin, comme œuvre de Bernus, il est à noter la statue de la Sainte Famille, en pierre de Saint Didier. La Sainte Vierge et saint Joseph avaient « trois pans et quart et le petit Jésus à proportion », mentionne un acte de Maître Mégy, de 171359. Elle serait une œuvre authentique de Jacques Bernus, de même que la statue de Saint Marc, dont la comptabilité de la Confrérie60 fait état, pour son achat au prix de 36 livres, au XVIIIe siècle61.
Les portes de l’hôtel de ville de Mormoiron sont, d’après Henri Requin, l’œuvre de Philippe Bernus.
Pernes-les-Fontaines
La fontaine du pélican pourrait être attribuée à un Bernus (Henri Requin), le même motif ayant été repris par Maurice-Thadée Bernus à Pélissanne.
Reilhannette
D’après Henri Requin, un retable de Reilhannette était sorti de l’atelier de Jacques Bernus62. Monique Joubert, auteur d’un livre d’histoire sur Reilhanette, le confirme : « Il reste encore au-dessus du tabernacle un petit entablement décoré de deux têtes d’anges et de roses. À chaque extrémité, il y avait deux anges magnifiques, agenouillés, priant, les ailes dressées et se faisant face. Ils étaient moins grands que ceux qui sont à la cathédrale de Carpentras, mais étaient pareillement l’œuvre de Bernus, ils se ressemblaient. Ces anges ont été volés, il y a fort longtemps, vers les années 1960 à 1970. La porte d’entrée de l’église n’a pas été fracturée, les voleurs sont entrés et sortis par l’oculus situé au-dessus de la tribune. On s’est rendu compte de la disparition plusieurs jours ou peut-être plusieurs semaines après. Par chance, nous possédons une photo en noir et blanc prises avant le vol, qui donne une petite idée de la beauté et de l’originalité de cet autel »63.
Saint Didier
Le 27 juin 1712, ont été inaugurés le maître-autel et son retable, dont l’exécution est revenue à Jacques Bernus pour 400 livres. Sur ce maître- autel se trouve un remarquable tabernacle, entouré de fines colonnettes, qui reposent sur des anges et soutiennent un dôme évoquant la Sainte Trinité64. Mais il existait déjà dans l’église un tabernacle et un autel exécuté par le père de Jacques Bernus, Noël Bernus (chapelle Saint Joseph). Les deux reliquaires sont également de la maison Bernus, de même que la chaire65, très élégante et richement décorée de motifs sculptés ; La statue de la Vierge, qui s’est trouvée au Presbytère pendant longtemps, est attribuée par H. Requin à Jacques Bernus.
Enfin, une cheminée en plâtre du château de Saint Didier (Jupiter sur un aigle, armé de sa foudre et regardant un géant étendu sur un bûcher, alors qu’une déesse intercède pour lui) et un médaillon en plâtre (Mutius Scëvola) sont attribués à Jacques Bernus.
Sarrians
Jacques Bernus a exécuté pour Sarrians une Vierge en pierre de Saint Didier (œuvre perdue, d’après Henri Requin).
Vaison-la-Romaine
Le tabernacle de l’église paroissiale de Vaison est attribué par H. Requin à Jacques Bernus. Les statues en bois doré de Saint Jérôme et de Sainte Madeleine, situées par H. Requin dans la cathédrale, pourraient être de Jacques Bernus.
Vénasque
Le retable de la première chapelle à droite de l’église paroissiale de Venasque a été fait d’après un dessin de J. Bernus (Henri Requin).
Viens
D’après Henri Requin, un retable à Viens serait sorti de l’atelier de Jacques Bernus66.
Au-delà du Comtat-Venaissin
Aulan
La petite église romane en pierres de taille qui se tient aux pieds du château recèle un autel baroque en bois doré sculpté en 1740, œuvre de Roux, élève de Jacques Bernus.
Chartreuse de Bonpas
Les statues en bois de saint Hugues et de saint Bruno pourraient être de Jacques Bernus (H. Requin).
Cucuron
Dans l’église paroissiale Notre-Dame de Beaulieu, on trouve une statue en plâtre de Saint Gens (début 19ème siècle) qui, selon S. Gagniere, est une représentation inspirée de la châsse commandée en 1696 au sculpteur Pierre Bernus conservée dans la chapelle du Beaucet. Saint Gens s’agenouille derrière la vache et le loup qui tirent sa charrue après que le loup eut dévoré le boeuf de son attelage.
Fréjus
D’après Henri Requin, un Enfant Jésus se trouvant à Fréjus chez Mgr Terris serait sorti de l’atelier de Jacques Bernus67.
Gap
Dans l’église Saint Arnaud, Jacques Bernus a exécuté deux statues en bois fruitier – grandeur nature – représentant des anges en adoration. Ils ont été classés en tant qu’objets des Monuments Historiques le 20 juin 1907.
Joyeuse
Dans l’église paroissiale, le tabernacle galbé à fronton cintré et les gradins latéraux sont attribués à Jacques Bernus (noyer et tilleul). Ils ont été classés en tant que tels comme objets des Monuments Historiques le 10 août 1967.
Lambesc
Dans l’Église Notre Dame de l’Assomption, la chapelle Saint Michel (ou Saint Crépin) est dotée d’une statue d’archange en bois doré de Bernus.
Montbrun-Les-Bains
La réalisation de l’autel et du retable de l’Église Notre Dame de Montbrun- les-Bains est attribuée de manière certaine à Jacques Bernus (le tableau est attribué à P. Parrocel). Hyacinthe Chobaut fait état d’une trace de l’origine de cette réalisation en 1683 dans les archives paroissiales de Montbrun.
Mornas
Dans l’Eglise de Mornas, les colonnes du XVIIe siècle placés derrière l’autel sont l’oeuvre de Lagarde, élève de Bernus de Mazan.
Musée du Louvre (Paris)
Vers 1920, on signale parmi les nouvelles acquisitions du Louvre « une esquisse en terre cuite représentant une Charité assise sur un angle de corniche qui paraît appartenir à la même série que les terres cuites du Musée Calvet d’Avignon provenant de l’atelier de Jacques Bernus (1650- 1728). Cette figurine est d’une exécution brillante qui rappelle, avec une recherche de grâce plus accusée, les créations célèbres du Bernin ; ce pourrait être un projet destiné soit à la décoration du tombeau de Mgr de Lascaris de Vintimille, évêque de Carpentras, qui fut commandé à l’artiste en 1686, soit à la décoration du chœur de Saint Siffrein de Carpentras, exécutée de 1694 à 1704 ; dans l’un comme dans l’autre cas, l’artiste avait eu à traiter le thème des vertus théologales. Une figure de la Foi, qui est au musée Calvet depuis 1872, est tout à fait comparable à la statuette du Louvre pour le type du visage et le traitement des draperies »68.
Pélissanne
On doit au sculpteur Maurice-Thadée Bernus la sculpture de la fontaine du pélican, classé Monuments Historiques en 1942. Son bassin en forme de trèfle entoure une colonne surmontée d’une sculpture représentant les armes de la ville : un pélican et ses petits dans son nid.
Saint Maximin (église de)
Les boiseries de l’église de Saint Maximin pourraient être l’œuvre de Jacques Bernus (Henri Requin).
Salon-de-Provence
Dans l’église Saint Michel, le retable du maître-autel (fin XVIIe siècle) est attribué à Jacques Bernus. On doit au sculpteur Maurice-Thadée Bernus la fontaine moussue située place Bousillat, de même que le plafond et les boiseries de la salle de mariage, classés Monuments Historiques, de l’hôtel de ville de Salon-de-Provence.
Versailles
A été vendu à l’hôtel Drouot au début des années 2000, pour 23 000 euros, un projet en terre cuite de Jacques Bernus de Carpentras (1650-1728) pour un tympan destiné au fronton de la porte du couvent des Récollets à Versailles (30 x 53 cm). Il montre deux anges relevant les pans d’un dais surmonté du saint sacrement. Il porte au dos une mention « Ancienne collection Louis Cartier ».
Notes de bas de page
1 Boyac (Odette), « Seyssaud à Villes », Les Carnets du Ventoux, Nov. 1999, p. 113.
2 V. le numéro des Carnets du Ventoux consacré à Pierre de Champeville, oct. 2006, par Roger Colozzi, Bernard Mondon et Nicolas Palluau.
3 Ta-Van-Minh (Luc), « Gérard Delpuech, combattant de la lumière », Les Carnets du Ventoux, 4e trimestre 2004, p. 10.
4 Mondon (Bernard), « Le photographe Firmin Meyer (1899-1976) - Le Ventoux pour objectif », Les Carnets du Ventoux, 4e trimestre 1995, p. 106.
5 Mondon (Bernard), « La cuisine du Ventoux dans la littérature », Les Carnets du Ven- toux, 4e trimestre 2005, p. 62.
6 Les loyaux adversaires (1945), in Fureur et mystère.
7 Julian (Pierre), « Le Pélerinage littéraire du Mont-Ventoux », Carpentras, Éd. du Mont Ventoux, 1937 ; v. notamment « L’ascension du Mont Ventoux », traduction du texte latin de François Pétrarque, suivi d’un essai de reconstitution de l’itinéraire du poète par Pierre de Champeville ; Mondon (Bernard), Voyage au Mont Ventoux, Florilège littéraire, Avignon, Éd. J. Barthélémy, 2003.
8 Ces développements sont inspirés de deux de mes articles publiés aux Études Comtadines d’octobre 2013 (« Jacques Bernus, sculpteur provençal ») et d’avril 2014 (« L’atelier Bernus : une floraison d’artiste et d’œuvres »). Nous remercions M. Jean-Paul Chabaud de les avoir accueillis dans la revue qu’il dirige.
9 Abbé Requin (Henri), « Jacques Bernus. Sa vie, son oeuvre. 1650 - 1728 », Mémoires de l’Académie de Vaucluse, Avignon, Seguin Frères, 1885, p. 10.
10 De la Madelène (J.), « Jacques Bernus », Revue méridionale, 1853, p. 124.
11 Marrel (A.), « Les Péru, sculpteurs et architectes d’Avignon », Mémoires de l’Académie de Vaucluse, 1929, p. 15.
12 A. Marrel, ouv. préc., p. 19.
13 Fayot (P.) et Tiran (C.), Histoire et vie quotidienne d’un village comtadin à travers les siècles, Graveson, Le Nombre d’or, 1978, p. 429.
14 H. Requin, art. préc. p. 4.
15 P. Fayot P. et C. Tiran, préc., p. 429.
16 Barruol (J.), 2000 ans de religion dans un village du Comtat Venaissin, Mazan, Ed. de l’Oratoire, 2007, p. 192.
17 J. Barruol préc., p. 41.
18 J. Barruol, préc., p. 205.
19 Christophe Veyrier, né à Trets le 25 juin 1637, décédé à Toulon le 10 juin 1689, est un sculpteur baroque français. On lui doit en particulier, en Provence, le retable de la Cathé- drale Notre-Dame-de-la-Seds de Toulon et une grande partie du décor de l’église de Trests.
20 Dubled (H.), Carpentras, capitale du Comtat-Venaissin, Marseille, Éd. Jeanne Laffitte, 1975, p. 124.
21 A. Reyne et D. Bréhier, ouv. préc.
22 Histoire de Carpentras, capitale du Comtat-Venaissin, Chantemerle éditeur, 1973, p. 167.
23 Reyne (A.) et Bréhier (D.), Cathédrale Saint Siffrein de Carpentras, Lyon, Lescuyer, 1975.
24 A. Reyne et D. Bréhier, ouv. préc.
25 Certains habitants de Mazan ont voulu faire obstacle à l’inventaire des biens de l’église en 1905, pour éviter qu’ils ne passent à l’État : une famille va mettre dans une boite hermé- tique la statue en bois de Notre Dame des 7 douleurs, de Jacques Bernus, et la cacher sous terre dans son jardin ! V. J. Barruol préc., p. 61.
26 H. Requin, art. préc.
27 H. Requin, art. préc., p. 3.
28 H. Chobaut, art. préc., p. 41.
29 Barjavel (Casimir-François-Henri), Dictionnaire historique, biographique et bibliogra- phique du Vaucluse, 2 tomes, Carpentras, Imprimerie de L. Devillario, 1841.
30 De la Madelène (J.), « Jacques Bernus », Revue méridionale, 1853, p. 124.
31 Abbé Requin (Henri), « Jacques Bernus. Sa vie, son oeuvre. 1650 - 1728 », Mémoires de l’Académie de Vaucluse, Editeur Seguin Frères, 1885.
32 Reyne (A.) et Bréhier (D.), Cathédrale Saint-Siffrein de Carpentras, Lyon, Lescuyer, 1975 ; Saint-Siffrein, Evêque et patron de Carpentras, Avignon, Éd. Aubanel, 1983.
33 N. Marmottan, (Bédarrides, Notes historiques, republié en 1999) : « Cette Vierge fut sculptée vers 1700 et érigée sur un socle où se trouve actuellement la bascule publique. Plus tard, elle fut transportée à l’église et recouverte par un barbouilleur maladroit d’une couche de peinture grise (…) ».
34 N. Marmottan, préc., qui cite la référence : Arch. Comm. Dossier CC 297.
35 N. Marmottan, préc., qui cite la référence : Arch. Comm. Dossier CC 307.
36 A. Allègre, Monographie de Beaumes-de-Venise, Beaumes-de-Venise, Chartres, Léonce Laget, réédition en 1981, p. 44.
37 Carlier (Patricia), Histoire de Caromb, Caromb d’hier, Plein-cintre Editions, 1989, p. 89.
38 Petit (Franck), « Les Bernus, une famille d’artistes de Mazan. 1e partie : Jacques bernus (1650-1728) sculpteur provençal », Études comtadines, folio n° 19, oct. 2013, p. 55.
39 V. l’historique fait par Marie-Odile Giraud et Florence Marciano, disponible sur internet.
40 Inventaire topographique fait par Marie-Odile Giraud et Florence Marciano.
41 M. Caillet, Le Musée Lapidaire de Carpentras, disponible sur internet, p. 8.
42 P. 466, Fayot.
43 H. Chobaut, p. 43.
44 [Sous la dir.] Barruol (G.), Le Mont Ventoux, encyclopédie d’une montagne provençale, Folcalquier, Éd. Alpes de Lumière, 2007, p. 262.
45 J. Barruol préc., p. 82.
46 J. Barruol préc., p. 79 ; v. aussi l’évocation qu’en font P. Fayot P. et C. Tiran, ouv. préc., p. 430.
47 J. Barruol préc., p. 152 et 213.
48 J. Barruol préc., p. 209.
49 J. Barruol préc., p. 87.
50 J. Barruol préc., p. 124.
51 J. Barruol préc., p. 137.
52 J. Barruol préc., p. 196.
53 V. H. Chobaut, art. préc., p. 41, qui fait état d’une trace comptable de cette commande dans les archives de la confrérie concernée.
54 Marrel (A.), « Les Péru, sculpteurs et architectes d’Avignon », Mémoires de l’Académie de Vaucluse, 1929, p. 19.
55 Arch. comm. BB 30.
56 Arch. comm. BB 24, BB 22.
57 Arch. comm. CC 22.
58 Arch. comm. BB 20.
59 F° 350, Etude Peyron à Mazan.
60 Arch. comm. GG 20.
61 Durand (Guy Gérard), Un village comtadin, Mormoiron, Ed. A. Bathelemy, 1984, p. 299. ; Fayot (Pierre), Le Village de Flassan, Ed. A. Barthelemy, 1984, p. 300.
62 Art. préc. p. 71.
63 Joubert (Monique), Reilhanette autrefois, Brantes, Ed. du Toulourenc, 2012, p. 153.
64 V. aussi dans l’article d’Henri Requin (p. 10), la liste des créations de Noël Bernus qui ont été détruites en 1793 : un retable pour l’église paroissiale de Mazan ; un retable pour la confrérie du Rosaire, à Carpentras ; un retable pour la confrérie Saint Joseph-agonisant, à Mazan ; un retable pour la confrérie de Saint Maurice, à Caromb.
65 Brotte (J.), Saint-Didier, sur le chemin des oratoires et des cerisiers, Salon de Pro- vence, Éd. de l’Accent, 2006, p. 21.
66 Art. préc. p. 71.
67 Art. préc. p. 71.
68 Communication de M. Paul Vitry, « Notes sur quelques sculptures du XVIIIe siècle du Musée du Louvre », Bulletin de la Société de l’Histoire de l’art Français, 1920, p. 212.
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Rome : éduquer et combattre
Un florilège en forme d'hommages
Catherine Wolff Bernadette Cabouret et Guido Castelnuovo (éd.)
2022