Leçon
p. 19-48
Texte intégral
1Je dois dire que j’étais un peu inquiet avant de venir ici… J’ai beaucoup réfléchi et je me suis dit que je pourrais essayer de ne pas dire ici les choses que je répète année après année dans les conférences de presse, et essayer de m’obliger à traiter un sujet un peu original. J’ai donc décidé de parler avec vous, puisqu’on est dans une université, de celui qui a été mon professeur. Je parle, évidemment, du cheval… J’ai eu envie de faire un tour d’horizon de tout ce que m’ont apporté les chevaux dans la vie, non seulement dans l’art mais aussi dans les rapports humains. Donc je laisserai de côté le rapport du théâtre pour le théâtre, du théâtre à Avignon, de l’épopée du théâtre Zingaro, on pourrait faire des romans, mais je pense que ce n’est pas vraiment le sujet pour aujourd’hui.
2Si je remonte aux origines, je dirais que le cheval m’a appris à vaincre ma peur. J’ai toujours dit que j’étais passionné par les chevaux (je ne connais pas l’origine exacte de cette fascination, il faudrait voir un psychanalyste) et mes parents m’ont toujours dit que j’étais fasciné par l’animal lui-même. Mais cette fascination à quatre-cinq ans, elle est aussi liée à la peur, quand on est face à un animal qui pèse huit cents kilos. Je n’ai pas honte de le dire, au début j’ai eu très peur des chevaux. Et donc il m’a fallu, pour arriver à aborder cet animal, pour arriver à assouvir cette passion, d’abord vaincre cette peur et cette appréhension. Les premières années où j’ai côtoyé les chevaux, où je les ai approchés pour la première fois, j’avais sept-huit ans, et le souvenir qui m’en reste, c’est d’abord la peur. Je pense que c’est quelque chose d’important parce que dominer cette peur, ça m’a appris aussi dans la vie à faire le premier pas. Je sais que je dois être une personnalité qui impressionne beaucoup et souvent, les gens n’osent pas me parler. Pour moi c’est déjà un critère, on doit savoir vaincre sa peur et aborder les gens, tout simplement. C’est quelque chose qui a beaucoup compté pour moi dans la vie.
3Ensuite, j’allais dire que les chevaux m’ont tout appris… il faut bien comprendre que le cheval est à l’origine de toute la création du théâtre Zingaro. C’est-à-dire que tout ce qui fait l’originalité de ce théâtre dans son fonctionnement en tant que compagnie, dans son existence même, dans son rythme de vie même, a été dicté par les chevaux. Ce qui paraît maintenant très construit, à l’origine ce n’est pas moi qui l’ai décidé, ce sont les chevaux qui l’ont décidé pour moi. Par exemple, réaliser une création tous les trois ans (ce qui peut paraître très lent dans le monde d’aujourd’hui : aux débuts de Zingaro, j’entendais « une nouvelle création tous les trois ans… mais qu’est-ce qu’il fait ? Comment se fait-il qu’il n’ait pas deux films, trois défilés de mode et quatre créations par an ? ») cela correspond au temps qu’il faut pour qu’un homme et un cheval s’apprennent réciproquement, et cela a imposé le rythme de création, qui a imposé le rythme au public. Une des clés, je pense, de l’histoire du théâtre Zingaro avec son public, c’est justement le fait que le théâtre Zingaro propose une nouvelle création tous les deux ans et demi - trois ans. C’est un rythme qui pour moi est presque biologique, c’est le temps d’être impressionné par un spectacle, de le digérer et d’avoir envie d’un autre, aussi bien pour nous que pour le spectateur. Pour moi en tant qu’auteur c’est le temps de me régénérer, de vivre des choses qui font que je vais proposer quelque chose de nouveau à chaque étape, et pour le spectateur le temps d’être marqué par un spectacle, de le digérer et donc d’avoir plaisir tout simplement à se retrouver. Pour moi, le théâtre c’est une relation d’un auteur, d’une équipe de créateurs, avec un public tout au long d’une vie. Ce rapport-là est très important parce que je pense - je l’ai souvent dit - que si j’avais été capable, techniquement, de faire une création chaque année, au bout d’un certain moment j’aurais fini par lasser mon public. Même si tu as le métier et le talent, entre guillemets, de faire des choses élégantes, professionnelles, au bout d’un moment on dit « il se répète un peu, c’est la même chose ». Pour moi c’est quelque chose de très important. Encore une fois, je n’ai pas décidé de ce rythme. Ce qui est étonnant c’est que ce sont les chevaux qui ont décidé pour moi.
4Ensuite, je dirais que les chevaux m’ont appris l’humilité. Quand on parle d’art équestre, on parle de travailler un instrument qui est un être vivant, c’est le paradoxe, et qui oblige à une remise en question totale dans son rapport à autrui. Le fait qu’on travaille avec un animal, un animal qui n’a pas le langage, qui n’a pas la parole, vous oblige non seulement à écouter - j’y reviendrai tout à l’heure parce que c’est fondamental - mais à prêter une grande attention au rapport à autrui. Pourquoi ? Vous pouvez vous engueuler avec quelqu’un, tenir des propos qui dépassent votre pensée, et vous excuser le lendemain. Avec un cheval, allez lui expliquer que vous vous êtes mal comporté et que maintenant ça va être différent. Lui, il a retenu votre comportement, et il n’est pas prêt de l’oublier, je peux vous le dire. Ça oblige à une grande maîtrise de soi. On dit souvent que le rapport au cheval c’est l’école de la prévoyance, parce qu’il faut prévoir à sa place tout ce qui peut arriver. Ne serait-ce que la manière de l’attacher. Quand on fait un noeud pour attacher un cheval, on fait un noeud spécial qui peut se défaire très vite parce que si le cheval prend peur et se met à « tirer au renard », c’est-à-dire en arrière, il peut se briser la nuque. Ce rapport à autrui, c’est quelque chose qui a été pour moi essentiel.
5Le cheval c’est aussi l’instinct : le cheval m’a appris à respecter mon instinct - c’est fondamental. On peut dire que l’homme et le cheval c’est l’assemblage de l’intellect et de l’instinct, et l’un apprend à l’autre. En un sens, j’ai appris à mes chevaux à réfléchir et eux m’ont appris à respecter mon instinct. Et ça, encore une fois, appliqué à la vie de la compagnie, c’est quelque chose de fondamental. Toute l’histoire de Zingaro a été dirigée par l’instinct. Il n’y a aucun calcul. Il y a vingt ans, je n’aurais jamais pensé que le Théâtre Zingaro serait ce qu’il est aujourd’hui. Quand on est partis dans une aventure avec cinq ou six personnes sur la route, on ne savait pas ce que ça allait devenir.
6L’important était déjà de respecter les chevaux ; on travaille avec des animaux, ils n’ont pas choisi de travailler avec nous, et on leur doit donc d’autant plus de respect. Il faut respecter le cheval dans son intégrité physique et psychologique. Ça paraît évident, mais dans les faits, ça veut dire que quand on a commencé Zingaro, les premiers logés, pour qui on passait toute la nuit à monter les écuries, c’était les chevaux, nous on dormait après. Les chevaux avaient l’eau courante, pas nous. Les premières personnes qui ont fait venir Zingaro se marrent aujourd’hui parce que la première chose qu’on demandait au théâtre, c’était « où sont les douches et les toilettes ? ».
7Au départ, ça nous a beaucoup coûté de travailler avec des chevaux : c’est un animal coûteux à entretenir, qui demande de l’espace, qui engendre des contraintes techniques, c’est un véritable choix, une véritable contrainte.
8Et là j’en viens à un point primordial : travailler avec des chevaux, c’est d’abord des contraintes. Et la contrainte, c’est ce qui fait la qualité du travail artistique. Plus il y a de contraintes, plus on voit la grandeur de l’art. Par exemple, le cinéma le plus intéressant est souvent le cinéma qui est lié à une époque, dans des pays où il y a des contraintes, des censures politiques ou économiques. Le cinéma russe n’a jamais été aussi intéressant qu’à l’époque soviétique. Le cinéma iranien d’aujourd’hui est très intéressant parce qu’il y a des contraintes, des censures, soit économiques, soit politiques, soit religieuses, qui obligent l’artiste à trouver le moyen de dire ce qu’il veut, souvent en utilisant un langage poétique, une parabole, pour arriver à s’exprimer malgré la contrainte. La contrainte peut être aussi la contrainte du cadre pour un tableau. Quand j’ai travaillé sur Géricault, j’ai découvert les contraintes, que je ne connaissais pas, de la peinture à l’huile de l’époque. C’est affolant ; un peintre était obligé d’attendre vingt-quatre heures avant de pouvoir faire une retouche. Les contraintes techniques étaient énormes. Et pourtant, l’oeuvre est là. Plus la contrainte est forte, plus l’oeuvre a de valeur. Des idées, c’est facile d’en avoir, ce qui est intéressant c’est d’arriver à les dire quels que soient les moyens. On peut faire du théâtre avec n’importe quel moyen, avec un bout de ficelle, l’important c’est son propos.
9Les contraintes du travail avec les chevaux concernent directement la manière de travailler. La première approche est très difficile parce que vous travaillez avec un animal qui ne sait pas pourquoi il travaille. Le musicien ou le danseur sait pourquoi il fait ça. Donc il est prêt à accepter une certaine souffrance, en tout cas, un effort. Le cheval, non. Le cheval ne sait pas pourquoi. C’est un animal, et vous voulez, comme un danseur, le préparer à une chorégraphie. C’est pourquoi vous devez vous substituer à lui en permanence, en tant que chorégraphe, vous mettre dans sa tête pour prévoir pour lui, pour l’amener au point Y en passant par des X’, X’’, X’’’. On dit toujours qu’à un cheval on propose, on n’impose pas. Et c’est lui qui dispose, en fin de compte. C’est quelque chose qui m’a beaucoup aidé dans mon rapport aux autres : comment amener les gens à un objectif, sans l’imposer, c’est-à-dire en gardant toute la qualité humaine de la personne que vous voulez amener à participer. Participer, c’est amener beaucoup de soi. Et savoir se servir de cet instrument qui est un être vivant, c’est l’éduquer, mais en lui permettant de garder sa personnalité. Le cheval va exécuter ce que vous lui demandez, mais en ajoutant au geste sa personnalité. Et je pense que c’est le sens de tout enseignement.
10Un point important, c’est le respect de la générosité du cheval. Le cheval est un animal excessivement généreux. Il peut se tuer pour vous, il ne calcule pas son don. Et ça c’est très important, car l’aventure théâtrale est l’une des dernières aventures humaines, qui doit permettre une générosité totale. Quand on se lance dans cette aventure, il n’y a pas de calcul. Or le cheval lui non plus ne calcule jamais. Au point que de temps en temps, on est obligé de le restreindre dans son don parce qu’il pourrait être trop généreux. On est obligé de l’économiser pour lui-même parce qu’il peut aller jusqu’à la souffrance, jusqu’à s’abîmer physiquement pour vous. C’est très important d’avoir conscience de ça, se rendre compte de ce que veut dire la véritable générosité.
11Chaque cheval est un cas particulier, on n’a jamais fini d’apprendre - ça c’est aussi une des leçons que vous apprennent les chevaux, l’humilité ! Tous les matins le travail est à recommencer, tout ce qui est acquis n’est jamais acquis pour toujours. Rentrent en compte des critères psychologiques et physiques. Le cheval n’est pas une mobylette ! Quand vous le sortez du box, il peut être dans un certain état, comme vous. Vous pouvez avoir passé une mauvaise nuit, vous pouvez avoir un problème psychologique, physique, on n’est pas des machines, les chevaux non plus. Arriver à comprendre ça, c’est arriver à respecter autrui. Un exemple : quand on est jeune, on se lève le matin, on est déjà capable de faire un saut périlleux ; quand on est un peu plus âgé on se rend compte qu’il faut un certain temps avant que le corps ne se mette au diapason de l’envie, qu’il faut du temps pour se « remettre en route » chaque matin. Les chevaux c’est un peu pareil. Quand un cheval sort du box le matin, il a aussi besoin d’un temps d’acclimatation, et il faut savoir l’observer, savoir où il en est, et avoir cette écoute, toujours cette écoute, pour savoir ce que l’animal veut vous dire.
12Pour moi, la notion d’écoute est très importante. Si je devais ne garder qu’une chose que m’ont apprise les chevaux, ce serait l’écoute. Ils m’ont appris à écouter. Écouter, ça ne veut pas dire être complaisant. Et là je vais assez loin. Quand vous travaillez avec des chevaux, vous travaillez avec des animaux qui n’ont pas la parole, et j’ai été amené à penser, avec le temps, que souvent, la parole peut être l’ennemi de la communication. Moi par exemple, je peux être quelqu’un de très muet, ou de très bavard. Quand je suis très bavard, souvent c’est pour me protéger. Je parle pour ne rien dire. J’ai appris avec le temps, en côtoyant les chevaux, à écouter les gens : pas forcément à écouter ce qu’ils sont en train de me dire ; souvent quand quelqu’un veut vous expliquer quelque chose, il veut dire le contraire de ce qu’il est en train de dire. Il se sert des mots pour se protéger. La véritable écoute, c’est essayer de comprendre pourquoi quelqu’un dit ça, ce qu’il veut vraiment dire, et ce qu’il n’a pas dit, et là on comprend ce qu’il veut vraiment dire. Je ne sais pas si je suis bien clair… Pour moi c’est une notion très importante. Être à l’écoute du signe, du signe du corps. Souvent le corps parle plus que la parole. La manière dont quelqu’un va se tenir, la manière dont il va s’exprimer, avec ses mains, avec son regard, où il va regarder en parlant, etc., souvent veut dire plus que les mots. Et ce n’est pas pour rien que mon théâtre n’est pas un théâtre de texte. Il est un théâtre de son - à une époque on s’était inventé un langage (le skovatch), je pense qu’on avait besoin de sortir des sons, pour moi ce n’est pas un théâtre de corps muets, mais la parole a souvent été pour moi un problème, dans le sens où elle restreignait déjà mon propos.
13Les images proposées par mon travail avec les chevaux sont des images que je qualifie d’universelles ; ma compagnie n’a jamais été considérée comme française, mon inspiration n’est pas spécialement française, et si je voulais utiliser un langage parlé il faudrait que je choisisse une langue, cela me poserait un problème. Pourquoi les gens devraient s’exprimer en français, plutôt qu’en anglais, en chinois, en japonais ? Souvent la parole se rapproche de la poésie, comme la musique des mots, mais pas comme un son intelligible. C’est quelque chose que j’ai du mal à analyser, mais qui, je pense, est très important dans mon travail, et a dicté beaucoup de mes comportements.
14Dresser un cheval, c’est construire un langage avec l’animal. Vous êtes face à un animal, qui donc ne parle pas, et avec qui il faut construire un vocabulaire commun pour pouvoir commencer à balbutier. Ensuite il va falloir faire une grammaire commune, et ensuite on va arriver à faire des phrases ensemble (ce qui s’appelle des airs d’école), on va construire un lien qui passe, comme on est assis sur le cheval, par un rapport physique. Cela part de choses simples, de mouvements en avant, à gauche, à droite, puis on affine jusqu’à trois grammes sur une fesse, un léger poids du corps dans un sens ou dans l’autre qui fait que le cheval va répondre à vos sollicitations. Mais ça, ce n’est pas acquis, ce n’est pas inné, c’est quelque chose que l’on construit avec lui. C’est un champ d’investigation infini. Et c’est ça qui m’intéresse dans mon rapport au cheval : ce n’est pas tellement le cheval en lui-même (qui bien sûr me fascine, mais je ne fais pas des spectacles pour montrer des chevaux, vous pouvez les voir aussi bien dans les prés, sur les champs de course ou autre), ce qui m’intéresse, c’est de montrer le rapport de l’homme et de l’animal. C’est un langage. Avec un cheval, vous pouvez avoir un rapport primitif et barbare, le cheval vous renverra une image soumise ou apeurée, voire révoltée. Avec le même cheval vous pouvez avoir un rapport qui est basé sur l’écoute, l’amour, la finesse, la sensibilité et le cheval vous le rendra, vous le renverra. C’est un champ d’investigation infini. Construire un dialogue peut prendre jusqu’à six ou sept ans, entre le moment où vous l’abordez pour la première fois et le moment où vous pouvez considérer le cheval comme à peu près dressé, c’est-à-dire à un niveau de relation qui fait que physiquement il est arrivé à son niveau de développement maximum. Votre rapport à deux atteint une certaine complicité, sur six à dix ans. A ce moment là on arrive à la notion de centaure qui pour moi est très concrète. C’est quelque chose d’assez grisant parce que le cheval devient vraiment une partie de vous-même. Quand vous marchez vous ne pensez pas « j’avance le pied droit, j’avance le pied gauche », vous marchez. A cheval, je pense un mouvement et le cheval l’exécute. Pourquoi ? Parce qu’on a construit ensemble un code et instinctivement, si je pense par exemple à un départ au galop sur le pied gauche, mon corps va se placer d’une certaine manière, mon poids va se mettre sur la fesse gauche… je vais ne serait-ce que penser au mouvement, le cheval va le ressentir et l’exécuter.
15J’ai beaucoup parlé - parce que ça me fascine aussi - du rapport du soliste avec son instrument. Effectivement certains musiciens m’ont dit que leur instrument était un être vivant. J’ai été impressionné, il y a maintenant une dizaine d’années, par le récit d’un grand soliste, qui s’était fait voler son violon dans le train, et qui disait « je vais être obligé de faire une pause pour retrouver une complicité avec un autre instrument ». Il ne suffit pas de prendre un instrument et de dire « demain je peux assurer le concert, je vais prendre un autre violon ». Non, il faut réapprendre avec un autre violon. Ça m’avait beaucoup marqué, parce que je me suis dit qu’eux aussi avaient ce problème-là, l’instrument n’est pas qu’un bout de bois, c’est quelque chose qui vibre, qui renvoie, et effectivement selon ce qu’ils vont apporter à l’instrument, l’instrument va le leur rendre. On peut prendre un Stradivarius et en jouer comme un cochon, et on peut faire pleurer avec. C’est pareil avec un cheval. Mais la grande différence par rapport à l’instrument, c’est qu’on est vraiment face à un animal qui vit, qui respire, qui a une durée et une évolution de vie comme vous (en général une vie plus courte que la vôtre - d’où cette notion de construction et d’éphémère ressentie de manière très violente parfois). Le cheval est vraiment votre partenaire. A l’époque, dans Éclipse, j’avais invité dans la compagnie deux danseurs, Julio Arozarena, qui était un danseur de chez Béjart, et Quincella Swyningam, une danseuse de chez Pina Bausch, qui n’avaient jamais touché de chevaux de leur vie. L’expérience m’intéressait parce qu’à l’intérieur de la compagnie ils amenaient un son nouveau, une certaine rigueur, il y avait un échange avec les cavaliers. Julio, qui était un danseur cubain de formation classique et qui avait passé sept ans chez Béjart, avait vu que chaque cavalier préparait son cheval, ce qui pour nous est naturel, on brosse son cheval, on le tresse, on le prépare avant le spectacle. Et lui, voyant ça, disait « c’est incroyable, c’est comme si j’étais en train de peigner ma partenaire, de la tresser et de la préparer pour le spectacle ». Pour nous qui côtoyons les chevaux tous les jours, c’est tellement évident, et de temps en temps le regard de gens qui ne sont pas spécialement liés aux chevaux amène des choses très intéressantes. C’est vrai que le cheval est véritablement un partenaire. On a construit quelque chose ensemble et il vous répond. C’est une sensation qui est très grisante. Un acteur peut se retrouver sur un nuage, c’est exactement ce qui se passe à cheval.
16Dans ma recherche personnelle, c’est pour ça que j’en suis amené à faire ce que j’ai appelé des Levers de soleil. Même par le travail, le cheval est à soixante-dix pour cent de son potentiel en spectacle, et le moment de grâce, où tout d’un coup on est vraiment sur un nuage, on l’obtient rarement, et surtout assez rarement en public. J’en ai beaucoup parlé avec des chanteurs ou des musiciens qui disent que le moment de grâce où tout d’un coup la voix s’élève, on a l’impression que tout va sur un nuage, ça peut être dans une séance de travail le matin, et même c’est plus souvent dans cette séance-là que face à un public. C’est ce qui m’a amené à essayer de montrer que ce qui est beau dans la relation de l’homme et du cheval, c’est l’écoute. Travailler un cheval c’est savoir l’écouter. Dresser un cheval, c’est savoir quand demander plus et quand récompenser. C’est quelque chose qu’on peut, je pense, appliquer à tout, mais avec les chevaux c’est d’autant plus important dans la mesure où le cheval n’est pas capable d’analyse ni de réflexion.
17La recherche de la beauté dans l’art, c’est la recherche de l’intention du geste - je comparerais la danse en cela à l’art équestre : qu’est-ce qui fait qu’un geste va provoquer une émotion, qu’est-ce qui fait qu’un danseur qui va lever le bras va vous faire pleurer, ou qu’un enchaînement de mouvements va vous faire pleurer ? Ce n’est pas seulement une chorégraphie, parce qu’un même enchaînement de mouvements peut vous faire pleurer ou non, selon qu’il aura été interprété par Nijinski ou par un danseur moins bon. Pourquoi ? Ils auront fait les mêmes gestes.
18C’est le sens de ma recherche avec les chevaux : qu’est-ce qui fait qu’un mouvement est beau ? Qu’est-ce qui fait qu’il provoque une émotion ? Est-ce que c’est son degré technique - le fait de dire voilà, un cheval au piaffer, il doit avoir une cadence, les diagonaux doivent s’élever symétriquement, le genou doit être à la hauteur du jarret, etc., le port de tête, la nuque doit être le point le plus haut, je pourrais vous en sortir des tonnes comme ça - une fois que vous avez dit tout ça, on dit « et alors ? ». Si la démarche n’a pas été juste, le résultat ne pourra pas être bon. Ça, je l’ai appliqué à toute l’histoire du Théâtre Zingaro, je dis souvent que le spectacle c’est comme un iceberg, ce que voit le spectateur c’est la petite partie qui est au dessus de l’eau, et la grosse partie intéressante c’est tout ce qui est enfoui sous l’eau et qui soutient cette petite partie. Si cette partie en dessous a été trichée, si la démarche n’a pas été juste, si la manière d’aborder les choses n’a pas été bonne et intéressante, le résultat ne pourra pas être intéressant, ce sera un résultat falsifié. On peut plus ou moins truquer, selon que l’on a de la technique, du métier, etc., mais vraiment, si humainement la démarche n’a pas été juste le résultat ne pourra pas être touchant. Appliqué à des chevaux, ça veut dire que si dès le départ votre démarche n’a pas été profondément honnête vis-à-vis de l’animal, si la démarche n’a pas été pleine de générosité, d’écoute et d’amour, le résultat ne pourra pas être bon. Quelle que soit la performance technique exécutée. Et en cela il n’y a pas d’échelle de valeur. Peuvent émouvoir autant les mouvements d’un danseur avec un cheval ou un âne, qu’un cheval qui galope en arrière. Peu importe. L’un comme l’autre est intéressant, et ne provoquera une émotion chez l’être humain qui le regarde que s’il y a une démarche humaine derrière.
19C’est pour ça que le public du Théâtre Zingaro n’est pas constitué uniquement de « gens de chevaux » : c’est au-delà de la technique. La technique doit être digérée et mise au service d’une émotion. Cette émotion correspond à une démarche humaine au départ. C’est pour ça que je dis que côtoyer les chevaux rend l’humain meilleur. Parce que ça vous oblige, vous, à avoir face à un cheval un vrai comportement, avec les points que j’ai énumérés tout à l’heure, basés sur le respect, sur l’écoute, sur la véritable générosité. Quand j’ai entendu le Dalaï Lama me parler de la générosité, j’avais l’impression d’entendre quelqu’un qui travaille avec des chevaux. Quand il disait : donner à autrui, c’est en fait quelque chose d’assez égoïste, parce que plus on donne plus on vous rend, donc en fait être généreux, c’est être égoïste. C’est pour se faire du bien qu’on est généreux. Quand on travaille avec les chevaux, on le comprend parce que plus on est généreux avec eux plus ils vous le rendent - j’allais dire ce n’est pas toujours le cas des êtres humains…
20Ensuite, on dit souvent que le dressage c’est la rondeur. Les chevaux m’ont appris la rondeur. Je ne vous expliquerai pas techniquement parce que ce serait un peu compliqué, mais la rondeur veut dire le mouvement ; comme vous avez pu vous en apercevoir, à Zingaro on travaille souvent dans le rond, ça fait vingt ans qu’on tourne en rond, quoi, mais ça va beaucoup plus loin. C’est aussi une attitude, une façon d’être toujours en mouvement. Être dans le cercle, c’est être toujours en mouvement. Quand on est dans la rondeur, l’énergie circule, tout le temps, et ça c’est aussi quelque chose de très important pour moi. L’énergie doit toujours circuler, circuler entre les gens, circuler dans la compagnie, circuler avec le public, circuler dans la vie. Et là encore, des discussions avec des grands maîtres du violon m’ont appris ça aussi. Je m’aperçois qu’on se retrouve sur beaucoup de points. C’est Yehudi Menuhin qui à la fin de sa vie ne parlait plus que de rondeur et de mouvement, alors que le violon est une technique très cassante physiquement, parce que les positions sont anti-naturelles pour tenir le violon. Et ça, à cheval, c’est quelque chose de fondamental. L’énergie doit pouvoir circuler. Quand on travaille un cheval, on passe son temps à faire sauter des blocages. Assouplir un cheval, c’est repérer les blocages physiques et psychologiques et les faire sauter les uns après les autres pour que l’énergie circule. Ce sont des choses qui m’ont aussi beaucoup servi dans la vie.
21Travailler avec les chevaux, c’est aussi comprendre ce qu’est l’homme. Je ne fais pas d’anthropomorphisme, mais on se rend compte en les côtoyant quelles sont les vraies valeurs de l’homme. Je dirai que chez l’animal, il n’y a pas de compassion. Seul l’homme peut avoir de la compassion. C’est intéressant parce que le rapport avec l’animal atteint cette limite : le cheval n’est pas capable d’éprouver de la compassion pour l’autre, l’autre être qui n’est pas forcément de sa race, et même pour ceux de sa race. Dans le rapport animal, il n’y a pas de compassion.
22Ensuite, l’intelligence, la différence fondamentale entre l’homme et l’animal, c’est à mon sens la conscience et la représentation de la vie, de la mort et de la douleur. Seul l’homme durant toute sa vie sait qu’un jour il va mourir, et donc il n’est qu’une poussière dans l’univers, et qu’il n’est là que pour un temps, etc. L’animal n’a pas la conscience de ça. Certains animaux peuvent avoir l’instinct de la mort, il y a des exemples comme les éléphants, qui au moment de mourir se dirigent vers un endroit etc. Mais on ne peut pas parler de conscience, on ne peut pas dire que l’animal toute sa vie a la conscience de la vie et de la mort. Il a l’instinct peut-être du moment final, mais il n’a pas sa représentation. Or l’être humain, on sait qu’à partir de l’âge de trois ou quatre ans, un enfant commence à prendre conscience qu’un jour il va mourir, et plus il avance en âge plus cette conscience se précise et l’obsède. J’aurais tendance à dire qu’être intelligent n’est pas forcément un avantage. Parce qu’avoir cette conscience-là, c’est quand même la source de tous nos problèmes. C’est pour ça qu’on fait de l’art, c’est pour ça qu’il y a des religions, parce qu’il fallait répondre à ce besoin, à ce questionnement, à cette angoisse que l’on a toute sa vie. L’animal, lui, vit le moment, il vit l’instant, il est toujours dans le moment présent. C’est pour ça qu’on dit souvent que les animaux sont des comédiens redoutables : un animal ne peut pas être mauvais comédien parce qu’il est toujours dans l’instant présent donc quand il est en train de faire quelque chose, il est forcément juste. C’est pour ça que les comédiens ont souvent un peu peur de jouer avec des enfants et des animaux.
23Que pense un cheval ? Je ne sais pas, je ne suis pas dans sa tête. Tout ce que je peux dire, c’est qu’on prépare l’animal à faire son travail de professionnel du spectacle - comme nous - et l’animal perçoit des énergies. J’ai beaucoup parlé d’énergie tout à l’heure, et, sans tomber dans l’anecdotique, c’est quelque chose que j’ai vraiment ressenti. Je ne parle pas du cheval en général, mais de l’animal avec qui on a créé un rapport, avec qui on a mis en place une énergie, une énergie amoureuse, quelque chose qui est palpable (je crois beaucoup à ça : sur terre, on produit une énergie vers autrui qui est utile à la survie, on est des lampes électriques). L’animal perçoit les énergies, or un animal que l’on côtoie tous les jours (c’est mon cas puisque je travaille tous les jours mes chevaux, même les jours où je suis très perturbé) va percevoir que vous êtes différent, même si vous pensez que vous l’abordez comme tous les autres jours, que vous faites les mêmes gestes, que vous montez pareil, que vous menez votre séance de travail comme d’habitude : chaque cheval avec son caractère et donc sa réaction, le ressent, je peux vous l’assurer. Le cheval un peu flemmard va en profiter, le cheval dissipé va chercher à se soustraire au travail ou va être moins concentré ; or quand vous rencontrez des êtres humains, vous les saluez normalement et vous ne remarquez pas que, certains jours, ils ne vont pas bien. Il s’agit bien de circulation des énergies.
24Ce que pense le cheval en entrant en piste, je n’en sais rien. Je peux vous dire qu’il ressent les énergies du public et que ça a été un de mes grands travaux depuis vingt ans, alors que l’on parle beaucoup du trac des comédiens qui les stimule, ce même trac est dramatique pour nous : tout mon travail avec la compagnie, ce n’est que ça. D’ailleurs, pour en juger, et c’est peut-être plus intéressant que le spectacle, il suffit d’être à l’extérieur du chapiteau. Beaucoup de gens sont très impressionnés : au grand galop, vous lâchez les rênes, le cheval sort calmement et, de même, entre calmement. C’est tout un travail, arriver à entrer, rênes longues, le cheval concentré, sachant ce qu’il va faire et qu’il n’y aura pas de souffrance, préparé à l’effort de telle sorte qu’il ne va pas le devancer ou l’appréhender en manifestant de la nervosité, ou sortir calmement du chapiteau sans excitation, avec des gens calmes, posés, à qui j’apprends à ne pas avoir le trac. Pourquoi ? Si, un jour de première ou de générale, vous avez envie de trop donner - c’est souvent le cas - vous allez vous apercevoir que vous êtes particulièrement mauvais. Si, le jour où vous êtes fatigués, dans votre loge, ou vous en avez un peu marre, vous vous rendrez compte que c’est ce jour-là que vous êtes le meilleur parce que, tout d’un coup, vous êtes dans l’instant présent, vous êtes relâché, donc concentré sur le moment précis, vous ne cherchez pas à donner trop d’énergie, à être bon, ou meilleur, ce qui vous ferait passer à côté de la plaque, parce que vous n’êtes pas là dans le moment précis. A cheval cela ne pardonne pas. Le cheval est comme un buvard, il absorbe votre trop-plein d’énergie. Plus vous affinez un discours avec un cheval, plus vous l’éduquez, comme on éduque un musicien à un toucher de note, plus vous le rendez sensible et donc la moindre chose qui sort de l’ordinaire va faire que le cheval est perdu. Les chevaux perçoivent cette tension dans le public et, même, j’irai plus loin : ils savent très bien quand c’est la répétition ou la représentation. Cela m’est arrivé souvent avec mon frison Zingaro, avec qui, travaillant en liberté sur des jeux d’improvisation depuis dix-sept ans, je ne répétais plus, nous nous donnions rendez-vous le soir pour le spectacle : quand vous vous produisez en duo avec un partenaire depuis dix-sept ans, vous ne répétez pas, vous vous connaissez tellement que vous improvisez sur scène ; pour les trucs qu’il ne voulait pas faire, comme marcher sur les postérieurs, je jouais sur le rapport dominant/dominé, je le provoquais, il m’attaquait, ce qui est assez difficile à faire car il fallait le faire passer de son instinct de dominant à l’obéissance. Il savait que, sur les numéros dont il ne faisait que la moitié, j’allais enchaîner, et je savais que le soir, en costume, en lumière, avec cinquante copains dans les gradins, il le faisait impeccable, conscient que s’il ne le faisait pas maintenant, il devrait recommencer. Ils font très bien la différence. C’est tout un travail, le travail de la mémoire des chevaux.
25Les chevaux ont aussi une mémoire auditive. La question classique est : entendent-ils la musique ? Dansent-ils en musique ? La réponse est non ! En tout cas je ne le pense pas. Tout ce que je sais, c’est qu’on leur apprend un travail sur une musique, et qu’après, ils ont une grande mémoire auditive, ils savent, à la note près, ce qu’ils doivent faire. Cela peut être un défaut : c’est pourquoi tout le travail de Zingaro est de faire faire le matin un travail opposé, un travail de décontraction, surtout pas les mouvements du spectacle dans le cadre du spectacle car le but, surtout si l’on travaille sur trois ans, est d’amener le cheval à un état d’envie et de fraîcheur par rapport au spectacle (comme un musicien qui a besoin de travailler d’autres morceaux pour s’enrichir et ainsi aborder les mêmes morceaux d’une autre manière). Il en va de même avec les chevaux : il va falloir enrichir le cheval par un travail complémentaire, un cheval de voltige va faire du dressage, un cheval de dressage va travailler à la longe, partir en balade, histoire de lui changer les idées.
26Le cheval improvise-t-il ? Pas vraiment car mes spectacles sont précis et assez écrits, même s’il y a toujours la petite marge, le petit plus. Par exemple, pour Les Levers de soleil, ma ligne de conduite est de faire ce dont le cheval a besoin, pas ce dont le public a besoin. Je travaille mon cheval, je l’amène à échauffement, je tiens compte des problèmes s’il y en a qui apparaissent, je montre ce que c’est que d’écouter un cheval. Cela ne veut pas dire que ce n’est pas spectaculaire : comme un musicien, le cheval va faire ses gammes, mais je ne cherche pas une construction écrite (par exemple, dans les dix dernières minutes, on fera ceci ou cela), je laisse faire et, croyez moi, c’est difficile... C’est ça tout le problème avec les chevaux, arriver à se concentrer, rentrer dans l’animal sans s’occuper du public. En cela - et j’y reviens toujours - la démarche est assez proche de celle du musicien.
27Souvent les jeunes qui arrivent à Zingaro me demandent : est-ce qu’on doit sourire ? Quelle tête doit-on avoir ? Qu’est-ce qu’on est en train de jouer ? Je réponds toujours qu’on ne joue pas, on se joue soi-même. On ne joue pas un rôle à Zingaro, les gens qui travaillent avec moi depuis plus de quinze ans le savent : ils se jouent eux-mêmes, c’est leur personnalité qui est mise en spectacle - et c’est ça qui m’intéresse dans le travail de compagnie - j’appelle ça « voir fleurir les gens ». Le parcours le plus fréquent étant celui du jeune doué qui veut en faire des tonnes mais qui ne fait rien passer, et qui avec le temps commence à avoir un peu mal par-ci par-là, il devient moins bon techniquement, mais il devient cent fois meilleur parce qu’il touche le spectateur en étant présent dans le moment, en étant simplement là, présent. Cela ne s’apprend pas, il faut du temps, un an, deux ans, pour d’autres trois ans ou cinq ans et, spectacle après spectacle, vous voyez la personnalité. Par quoi cela passe-t-il ? Sans vous sortir tous les poncifs du théâtre, je dirai que pour les hommes, cela consiste à trouver la part féminine qu’ils ont en eux. Au début, on veut trop montrer, puis cela vient petit à petit, et pour cela le cheval est un énorme révélateur : pourquoi ? Parce que le rapport au cheval n’est pas basé sur la force. Et ceci m’a aussi aidé à comprendre comment, à Zingaro, utiliser les comédiens et les comédiennes. Si je voulais être provocateur, je dirais qu’à Zingaro, il n’y a pas de différence entre hommes et femmes parce qu’un cavalier sur un cheval, ce n’est plus un homme ou une femme, c’est un tout avec le cheval. L’homme et la femme sont à égalité physique dans la relation au cheval, d’ailleurs le sport équestre est le seul sport olympique où les hommes et les femmes concourent ensemble, sans différence, et n’oublions pas que le véritable athlète, c’est le cheval. J’ai beaucoup réfléchi à cela, j’ai fait un travail personnel là-dessus et cela s’exprime par des symboliques faciles : nous avons inventé un costume, qui est une caractéristique de Zingaro, une espèce de jupe qui dissimule les jambes, qui est assez féminin et que l’on fait porter à des hommes. C’est aussi une manière de montrer que lorsqu’on travaille avec l’imaginaire du cavalier sur un cheval, on travaille avec un imaginaire qui nous dépasse. Le cheval est encore très présent dans l’inconscient collectif (tout le monde a des images d’enfance, de livres d’école, et pour chaque personne ici le cavalier à cheval est quelque chose de différent : pour l’un, cela va être la symbole de la liberté, pour l’autre celui de l’oppression, ou de la violence ou du pouvoir.) Ce sont des images qui sont la plupart du temps liées au côté dominateur et à l’image de seigneur. C’est souvent le contraire de ce que je souhaite dire : à mes yeux, c’est le cheval qui dirige. C’est le cheval qui a dirigé toute ma vie et qui continue à la diriger et qui m’impose ma ligne de conduite, c’est lui qui me guide. C’est aussi pourquoi j’ai tendance à dire que l’image de la femme à cheval est beaucoup plus intéressante que l’image de l’homme à cheval en ce sens que, pour être un bon cavalier, il faut savoir découvrir la partie féminine que l’on a en soi. La réciproque n’est pas obligatoire.
28Merci à vous.
Auteur
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