Préface
p. 13-14
Texte intégral
1Ce fut un grand honneur et un grand plaisir pour le Département d’Italien de l’Université d’Avignon et des Pays de Vaucluse d’accueillir, le mercredi 28 avril 2010, Rosetta Loy qui était accompagnée de sa traductrice, Françoise Brun. La romancière dont l’œuvre, traduite dans différents pays, a été récompensée par de nombreux prix, s’est affirmée comme l’un des écrivains les plus appréciés en Italie. L’entretien - spontané, informel, généreux - a permis d’aborder la littérature, le travail d’écriture mais aussi la traduction et ses enjeux. Nous sommes ainsi entrés dans un univers où, comme le dit Françoise Brun, « chaque livre est une intonation différente d’une même voix ».
2En nous proposant, de façon mutine, de « partir des mains pour arriver aux cœurs brisés » la romancière nous invitait à la suivre dans les labyrinthes de la vie. Cette vie, comme il est dit dans Les Routes de poussière, qui « fait parfois d’étranges détours pour arriver là où il lui était si facile d’arriver ». Si facile d’arriver mais aussi de se perdre. Car, si les mains se prennent et s’essaient à s’accorder pour jouer une partition harmonieuse, elles peuvent aussi se perdre et jouer alors une partition solitaire. Il reste la nostalgie de la première main, « la plus belle ». Car tout est toujours déplacé, décalé, prêt à renaître dans un monde où tout ce qui commence est déjà fini et où il importe de fixer l’éphémère. Si la vie peut être cruelle, elle sait aussi être généreuse et le bonheur - ou l’illusion du bonheur - est ce qui reste, qui ne meurt pas. Fragment insignifiant peut-être mais fixé à jamais dans son éternité. Grâce à l’écriture. Une écriture éminemment littéraire qui s’accomplit en termes visuels, voire plastiques.
3Mais pour Rosetta Loy l’écriture doit aussi combattre l’oubli et garantir la mémoire, mémoire de l’Holocauste, mémoire des épisodes les plus sanglants de la seconde Guerre mondiale, le massacre des Fosses Ardéatines ou celui de Sant’Anna di Stazzema. C’est ainsi que le temps cyclique de l’enfance, des saisons, des amours se conjugue avec le temps linéaire de l’Histoire. Les glissements progressifs des sentiments, du plaisir, de la vie viennent se heurter aux cassures qui séparent irrémédiablement l’avant de l’après, telles la déclaration de guerre ou les rafles qui ont abouti à l’extermination des juifs. L’œuvre de Rosetta Loy garde les yeux ouverts sur le monde. Comme en témoigne le long entretien qu’elle nous a accordé.
Auteur
Le texte seul est utilisable sous licence Licence OpenEdition Books. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.