De la conscience fière au stigmate social : le virilisme ouvrier à l’épreuve des années 1968
p. 343-357
Texte intégral
1La masculinité ouvrière, en tant que caractère(s) du masculin, ressortit, on le sait, au virilisme : l’exhibition du corps fort liée à la dureté du travail, une manière d’exacerbation de la masculinité, relèvent de la culture ouvrière. Dès lors, le virilisme désignerait en première approche une forme d’ostentation de la virilité, qui en vient à faire système : non pas seulement l’exaltation de vertus masculines supposées – force, courage, endurance, etc., mais aussi réflexion, sagacité, etc. – et leur exhibition dans des épreuves, mais leur subsomption dans une manière et un devoir d’être supposés fondamentalement masculins. Il s’en faut, toutefois, que cette caractéristique épuise le sujet. Car, le risque est alors de verser dans un essentialisme des classes populaires, et plus précisément de la classe ouvrière, et de la soustraire ainsi à l’histoire, d’autant que la société française des années 1960 et 1970 connaît de profonds bouleversements, qui affectent aussi le monde ouvrier et malmènent ces soubassements : composition de la classe, mode de reproduction, rapport au travail, rapport à ses organisations, etc., tout, ou presque, est en recomposition.
2L’analyse des masculinités ouvrières dans ces années 1968 suppose dès lors de croiser plusieurs questions. La masculinité se lit évidemment dans des pratiques, des « performances », tantôt quotidiennes, tantôt sous le feu de l’événement qui les réagencent. Mais elle se construit également sous l’effet de prescriptions, implicites ou explicites, qui dictent la manière dont un homme doit ou devrait se comporter. Par là, il s’agit de convoquer des textes et des images d’usine – tracts, autobiographies ouvrières, films militants, etc. – qui permettent à la fois de repérer de telles prescriptions mais également ces pratiques masculines. Alors même que nous nous en tiendrons essentiellement au domaine public, on voit immédiatement comment les masculinités ouvrières supposent en creux de prendre en considération le féminin ouvrier1. À ce premier couple masculin/féminin, s’en ajoutent au moins trois autres : ouvrier/non-ouvrier (paysan, employé, bourgeois, patron, étudiant) tout d’abord, dans la mesure où les masculinités ouvrières se construisent aussi dans l’écart par rapport à d’autres groupes sociaux ; jeune/vieux ensuite, puisque le mode de socialisation des générations ouvrières se transforme profondément en ces années ; français/étranger enfin, car le monde ouvrier voit l’arrivée croissante de travailleurs immigrés en son sein, depuis les années 1950.
3Notre propos, dès lors, vise à questionner la persistance de ce virilisme ouvrier dans les années 1968. Contre un essentialisme culturaliste, il s’agit d’envisager les reconfigurations des masculinités ouvrières. Pour ce faire, l’examen des soubassements du virilisme ouvrier est un préalable. Mais il faut presque aussitôt envisager comment les transformations sociales en profondeur d’une part, le soule de l’événement d’autre part, questionnent ces identités sociales sexuées et, dans le même temps, les réactions des ouvriers masculins à ces transformations, c’est-à-dire les opérations de réajustement face à ces déstabilisations.
La persistance d’un virilisme ouvrier
Les trois pôles du virilisme ouvrier
4Il nous paraît d’abord que le virilisme ouvrier ne se limite pas à la possession, voire à l’étalage, de ressources physiques, quand bien même celles-ci constitueraient son soubassement essentiel. Le virilisme ouvrier ne se résume pas à l’ostentation identificatoire de capacités physiques. Dans une analogie revendiquée avec les trois ordres du féodalisme, Gérard Mauger propose d’inscrire les espaces de vie conformes des classes populaires autour de trois capitaux : capital culturel, capital corporel et capital économique, déterminant chacun trois pôles : pôle de l’intellectualisation, pôle viril autour des ouvriers de force, pôle de l’embourgeoisement2. Ce schéma, particulièrement stimulant pour saisir à la fois les propriétés sociales des classes populaires mais également les forces centrifuges qui les fragilisent, nous semble toutefois devoir être aménagé pour les ouvriers. Il minimise en particulier le rapport au travail, qui est central dans la constitution et le maintien de l’identité ouvrière. Olivier Schwartz rappelle ainsi que « le travail constitue […] un fondement essentiel des légitimités masculines. Il est terrain d’accès à une forme de reconnaissance sociale ». Il favorise alors une « légitimité professionnelle, fondée sur les compétences et la qualification ». Par conséquent, nous proposons plutôt d’ordonner le virilisme ouvrier autour de trois pôles : le travail, le combat et l’autodidaxie, qu’il convient d’expliciter à chaque fois selon la bipartition proposée par Richard Hoggart entre « eux » et « nous », dans son analyse de la culture ouvrière britannique3.
5Le travail, Olivier Schwartz l’a rappelé, est constitutif de l’identité ouvrière. Fondé sur un apprentissage certifié par un diplôme, un savoir-faire ou une compétence, voire une résistance physique particulière, le travail range les ouvriers dans le camp de la production, et les oppose à la fois aux fainéants et aux incompétents. Les premiers – qui littéralement ne font rien – constituent les adversaires traditionnels des ouvriers, et en particulier les forces de l’ordre : ainsi lors de la grève du Joint français à Saint-Brieuc en 1972, les CRS sont traités de « feignants »4. Les incompétents relèvent davantage de la maîtrise, à laquelle les ouvriers dénient traditionnellement tout savoir-faire notamment pendant les grèves.
6Faisant pendant à la légitimité professionnelle, « émerge une légitimité de type agonistique, construite sur le courage, la virilité, l’affrontement », écrit Olivier Schwartz5. C’est évidemment à l’occasion des grèves, et notamment des conflits violents, que se déploie le plus ce capital agonistique. Les dialogues rapportés par Louis Oury lors des grèves de Saint-Nazaire magnifient cette opposition entre le courage viril des ouvriers et la pleutrerie de la direction : alors que les premiers ont « des couilles au cul », les second sont « tous des châtrés »6. Il faut cependant noter que ce capital agonistique magnifié lors des grèves n’est que l’expression d’une virilité ouvrière première, essentielle, laquelle se manifeste dans les ateliers, les vestiaires, ou les foyers, bref dans les lieux de l’entre-soi ouvrier, par des parades ou des hâbleries.
7Le troisième pôle, constitué par l’intellectualisation, peut davantage étonner. Même si son importance est moindre, on doit cependant le prendre en considération, pour deux raisons principales. D’une part, la compétence professionnelle, à mesure qu’elle croît, suppose nécessairement un rapport au savoir, qui relève de la technique. D’autre part, le mouvement ouvrier a constamment valorisé l’autodidaxie des militants, afin qu’ils acquièrent une certaine forme de culture savante. Cette valorisation est d’abord passée par une valorisation des lectures, romanesques certes, mais plus encore des théoriciens et des historiens du mouvement ouvrier7.
Devenir et être ouvrier : initiations et marqueurs
8Le virilisme ouvrier, défini ainsi dans ses triples composantes, suppose la construction d’un corps qui le signifie. Cette construction passe d’abord par des initiations, qui relèvent d’une forme de bizutage. Louis Oury rappelle ainsi ses années « d’arpète » au début de la décennie 1950, pendant lesquelles il subit toute une série d’épreuves et de brimades de la part de ses camarades plus âgés. De manière analogue, on retrouve dans plusieurs témoignages des pratiques de bizutage à caractère sexuel que certaines ouvrières exercent sur de jeunes ouvriers, comme si l’entrée à l’usine faisait advenir la virilité.
9Une fois ce corps construit, et par là sa virilité attestée, une vêture propre, une hexis corporelle particulière et des consommations entendent constituer autant de marqueurs de l’identité ouvrière. Il s’agit en quelque sorte d’un retournement de stigmates en emblèmes du virilisme ouvrier. Les films militants des années 1968 donnent ainsi à voir la permanence des ports de la casquette, des moustaches et/ou des favoris chez les ouvriers, qui grillent force cigarettes au cours des réunions et des assemblées générales8. De même, la consommation d’alcool, stigmate de l’alcoolisme ouvrier depuis le milieu du XIXe siècle, atteste d’une capacité à tenir, à supporter, y compris et surtout sur le lieu de travail, contre les règlements qui le proscrivent et la maîtrise censée les faire respecter9. Attestée dans l’automobile et la sidérurgie, comme dans les chantiers navals ou la pétrochimie10, la consommation d’alcool, qui signifie la virilité ouvrière, constitue d’abord une réponse à la pénibilité du travail (froid ou chaleur, fatigue, etc.), en même temps qu’elle témoigne d’une sociabilité ouvrière : l’alcool doit se consommer à plusieurs11, notamment lors des grandes fêtes, ainsi lors de la Saint-Éloi, le 1er décembre, qui donne lieu à de fort abondantes libations parmi les forgerons de Billancourt dans les années 196012.
10Par là, le corps ouvrier, stigmate de la pénibilité, est aussi l’emblème d’une fierté virile. Il constitue la preuve d’une capacité à supporter les conditions de travail et à braver les dangers. Ce faisant, il favorise l’émergence d’une conscience fière : pas seulement celle du producteur, mais aussi celle de l’homme fort.
L’affrontement comme déclinaison du virilisme
11Le monde usinier nourrit de multiples affrontements, qui donnent l’occasion au virilisme de se manifester. Le registre le plus courant est celui de la blague, caractéristique de la culture d’atelier, avec son lot de plaisanteries à caractère sexuel plus ou moins explicite13. Un seuil est franchi quand la rivalité dans la maîtrise d’un capital technique donne lieu à un affrontement plus ou moins feutré, notamment entre ouvriers professionnels. L’enjeu en termes de virilité en est clairement exposé par l’adage d’explicitation qu’en donne Louis Oury : « C’est le premier qui bande qui encule l’autre. »14 Le propos souligne avec une extraordinaire crudité combien la solidarité ouvrière doit dépasser ces rivalités masculines.
12C’est d’ailleurs l’intérêt des grèves que de suspendre ces rivalités le temps d’une coalition (terme ancien pour désigner la grève) contre le patronat, et d’y manifester un puissant virilisme ouvrier. Celui-ci se décline selon trois modalités principales. La grève et l’occupation, notamment en 1968, réactivent d’abord une répartition sexuée des rôles et des espaces. D’ailleurs, si l’occupation diurne pour les femmes, et notamment pour les ouvrières, est tolérée, elle est en revanche rigoureusement proscrite la nuit pour des raisons de moralité. Mieux, la participation à la grève elle-même atteste de la virilité : être en grève, c’est la preuve qu’on refuse de « baisser son pantalon » ou son « froc » devant le patron. La récurrence du syntagme15 témoigne de la vivacité de l’équivalence symbolique. Par là, le gréviste atteste d’une identité virile. Cette équivalence implique, a contrario, une déficience virile des jaunes, voire une passivité. Ainsi en octobre 1972, des grévistes de la Commurhex à Malvesi près de Narbonne, dressent un saisissant portrait du renard dans le tract suivant : « Sens figuré : Homme vil, pleutre, mouchard et pas tellement “gonflé”. Dans certaines espèces ont [sic] trouve des individus même très bêtes, qui occupent par des moyens plus ou moins légaux des places très bien rémunérées, et qui, bien entendu, ne se montrent au grand jour que pour des manifestations organisées par leurs employeurs. Certains zoologistes sont perplexes sur la continuité de la race, car une grande majorité de ces individus paraissent atrophiés des organes sexuels (petites noix, ou raisins secs). »16
13De fait, la grève offre l’occasion d’un face-à-face entre ouvriers et direction d’usine, qui est aussi un corps à corps, dont le film Citroën-Nanterre en mai-juin 68 témoigne. Alors que le temps du travail ordinaire impose une distance, marquée par une séparation entre les bureaux et les ateliers, le conflit oblige à la direction à descendre au milieu des ouvriers, à les côtoyer, et par là impose une proximité physique et un face-à-face17. Toutefois, l’affrontement dans la grève ne relève jamais du duel entre deux hommes, qui risquerait d’aboutir à une reproduction de la domination, mais met au prise un collectif ouvrier face à un patron. On en veut pour preuve une scène saisissante à l’usine de Lip à Besançon en 1973 : lors de la venue du repreneur pressenti, Giraud, qui se présente à l’assemblée générale, Charles Piaget, délégué syndical CFDT, lui porte la contradiction. Mais, alors que Giraud est à la tribune, Piaget a l’intelligence tactique de rétorquer depuis les bancs ouvriers, au milieu de ses camarades18. Dès lors, les duels entre patron et délégué sont toujours biaisés, car ce dernier, archétype du virilisme ouvrier on le rappelle, n’est jamais que le porte-parole d’un collectif qui l’entoure et le protège.
14L’acmé des affrontements dans les années 1968 est constituée par les mises à sac de bureaux et les séquestrations. L’intérêt de prendre en compte ce répertoire d’actions se trouve dans une manifestation du virilisme ouvrier à la fois contre les patrons mais aussi contre les employées féminines. Ainsi, à l’usine Rhodiaceta de Lyon-Vaise se déroule une mise à sac le 14 décembre 1967. Les ouvriers sont accusés de sabotage, d’avoir brûlé des documents, saccagé du matériel et commis un viol. La section cédétiste répond à ces accusations ainsi : « Les documents brûlés ? Ils provenaient de la corbeille à papier. Quelques centimètres cubes de cendres. Les chariots renversés ? non, posés en signe de barricade. Le viol ? quelques mots malheureux. La mise à sac de l’usine ? du bruit, beaucoup de bruit. Des blessés ?… pourquoi pas des morts !… »19 La CFDT minimise les faits rapportés afin de disculper les licenciés, mais ne les nie pas tous. C’est pourquoi, il convient de lire ce tract dans son implicite : des ouvriers ont au moins incendié le contenu de poubelles, obstrué la circulation dans l’usine en déplaçant des chariots et menacé de viol une ou plusieurs femmes.
15Par là, on saisit combien le virilisme ouvrier, qui perdure dans les années 1968, en même temps qu’il est censé souder un collectif masculin, clive aussi à l’intérieur du personnel salarié dans les usines. Ce faisant, on peut le lire comme une des modalités de réactions d’ouvriers masculins face à des remises en cause structurelles qui concernent le monde ouvrier de la période, et notamment sa composante mâle.
Un virilisme malmené par des remises en cause structurelles
Les recompositions de la main-d’œuvre
16Les décennies 1960 et 1970 prolongent l’industrialisation du pays et entraînent, dès lors, une croissance de la main-d’œuvre industrielle20. Cette croissance du monde ouvrier va de pair avec son élargissement. Elle suppose en effet le recrutement de nouveaux ouvriers, femmes, immigrés et anciens paysans, qui prennent le chemin de l’usine21. Dès lors, ces recompositions complexes de la main-d’œuvre font subir des formes multiples de concurrence aux ouvriers masculins et français. Mais cette concurrence, clairement perçue par le mouvement syndical, constitue une remise en cause plus profonde du virilisme : en termes de capitaux technique, car ces nouveaux ouvriers sont fréquemment dépourvus de formation et sont le plus souvent classés OS, agonistique en ce qu’ils ignorent la culture industrielle de l’affrontement22, militant enfin dans la mesure où les immigrés, notamment ceux originaires du Portugal, du Maghreb, ou d’Afrique subsaharienne sont parfois analphabètes. Bien évidemment, nous simplifions outrancièrement des situations personnelles parfois infiniment plus complexes, mais le virilisme ouvrier, dans sa triple fondation, est malmené par ces recompositions de la main-d’œuvre.
17Au quotidien, dans le travail et après, ce virilisme conduit à des réactions qui reproduisent la domination de la figure ouvrière masculine nationale. En premier lieu, la vieille hostilité – longtemps confortée par le mouvement ouvrier – au travail féminin perdure. Au cœur des années 1960, de jeunes ouvriers envisagent encore sereinement l’exclusion des femmes du monde du travail, et ce refus est réitéré dans le nord au début des années 198023. De même, en mai-juin 1968, les hommes français se félicitent toujours de l’entrée en lute des femmes et des immigrés, comme si ces deux catégories avaient une réticence ou une difficulté particulières à se mobiliser et que pesait sur elles la vieille suspicion d’être des jaunes. Dans les relations quotidiennes de travail, ces réticences avivent des pratiques de harcèlement sexuel – un terme alors anachronique. De même, des réactions proprement xénophobes surviennent, comme à l’usine Berliet de Vénissieux où un ouvrier dénonce la docilité de la main-d’œuvre étrangère : « on cherche de plus en plus à embaucher, comme on dit chez nous, le “melon imbécile”, c’est-à-dire l’algérien qui ne sait ni lire ni écrire le français, mais qui sait très bien travailler, qui travaille sans comprendre […]. Ça va très bien, remarquez, pour la maîtrise et puis pour le patron, c’est impeccable un type comme ça ; ils le payent à coup de lance-pierre ! C’est un bon chien idèle qui vient quand ils veulent. Quand on lui tire un coup de trique, il va dans son coin, il va manger son foin en douceur sans qu’il dise rien du tout »24. La dénonciation des pratiques patronales débouche sur un propos explicitement raciste qui se focalise sur l’Algérien, injurié et ravalé ensuite au statut de chien et de bête de somme particulièrement docile, qu’on peut frapper à sa guise… Cette xénophobie ouverte, attestée ailleurs, a sans doute aussi pour origine une forme de concurrence sexuelle, dans la mesure où ces étrangers peuvent aussi séduire des Françaises25, et conduit à des bagarres entre jeunes mâles dans la région de Flins au début des années 197026. De manière symétrique, les ouvriers bretons ont l’impression d’être traités comme des « bougnoules » (à la CSF à Brest), ou de ne pouvoir protéger leurs femmes traitées de « poules » par Pierre Doux, patron d’origine pied-noir, désireux de surcroît d’embaucher des harkis. La dénonciation de la colonisation de la Bretagne et plus tard la thématique régionaliste pourraient donc également être lues comme l’expression d’une virilité ouvrière bretonne meurtrie27.
18Ainsi, de même que la mixité à l’école bouleverse progressivement la construction des masculinités (sauf dans l’enseignement technique où les filières restent clivées par le genre et sont le lieu d’apprentissage de la masculinité virile), il semble que la mixité croissante, tant sexuée que nationale, de la main-d’œuvre ouvrière entraine une crispation virile et/ou régionaliste ou chauvine, d’autant qu’elle s’accompagne d’une crise de la reproduction interne au groupe ouvrier.
Crise de la reproduction et du sécessionnisme ouvrier
19Une seconde série de phénomènes bouleverse en effet les équilibres internes au monde ouvrier et ses modes d’identification. Le premier a trait à la démocratisation progressive du système scolaire, à partir des années 1950 et plus encore des années 1960, qui entraîne une ouverture des possibles. Quelles que soient les limites de cette démocratisation, elle semble autoriser les enfants d’ouvriers à entrevoir une carrière différente de celle de leurs parents, et notamment de leur père28. Par là, l’espoir, plus ou moins illusoire, d’échapper à l’usine et/ou de la quitter, traditionnelle dans le monde ouvrier29, en est avivé. En découle une crise de la reproduction qui est aussi celle d’une certaine fierté ouvrière : alors qu’ouvrier signifiait un destin sublimé en fierté, il prend progressivement le sens d’un échec. D’où la hantise de certains ouvriers de voir leurs enfants le demeurer.
20Dans les usines, cette évolution malmène d’abord les ouvriers qualifiés, c’est-à-dire le cœur de la classe. Le développement de l’enseignement professionnel, qui s’accélère sensiblement sous la IVe République, provoque l’entrée progressive de jeunes ouvriers qualifiés, lesquels concurrencent les anciens, dont la compétence reposait d’abord sur l’exercice du métier. La part des ouvriers de moins de 25 ans titulaires d’un CAP double, en effet, entre 1962 et 1975. Toutefois, la part de ces ouvriers occupés à des emplois non-qualifiés progresse dans le même temps de 30 % en 1962 à 41 % en 197530. Dès lors, un nombre croissant de jeunes ouvriers qualifiés commencent comme OS, et parfois le demeurent. Une telle situation explique d’ailleurs « la hantise du déclassement professionnel », repérable chez les jeunes ouvriers dès les années 196031. Dans le même temps, la seconde rationalisation du travail entamée dans l’après-guerre précipite la croissance du nombre de techniciens, qui organisent le travail et resserrent la marge d’autonomie dont bénéficiaient les ouvriers professionnels32. Par là également, l’essor de cette « nouvelle classe ouvrière », repérée par Serge Mallet et Pierre Belleville dès la fin des années 195033, précipite la fuite d’un petit nombre d’ouvriers qualifiés mais fragilise surtout la position et le statut de la grande majorité des autres.
21La démocratisation scolaire relative et la poussée rationalisatrice concourent donc à affaiblir et/ou à dévaloriser le capital technique des ouvriers, notamment qualifiés, pivot de leur virilisme. Dans le même temps, le sécessionnisme ouvrier se trouve malmené par l’intégration croissante des ouvriers à la société française. À mesure en effet que les vieux quartiers ouvriers se désintègrent, leurs habitants s’en vont peupler les grands ensembles et plus encore des logements pavillonnaires dont ils deviennent d’autant plus facilement propriétaires que leur salaire est mensualisé34. Parallèlement, tous les indicateurs témoignent que les ouvriers accèdent progressivement à la société de consommation. Si cet accès demeure différé et subordonné pour les classes populaires (acquisition plus tardive d’un véhicule ou des appareils électroménagers par exemple35), il n’en demeure pas moins que cet accès élargi rend le clivage entre eux et nous plus poreux, et par là fragilise le sécessionnisme ouvrier.
Chômage et déstabilisation
22En dépit du discours enchanté sur les Trente Glorieuses, les décennies 1960 et plus encore 1970, sont marquées par une invasion progressive d’un chômage qui frappe d’abord des pans entiers des vieilles branches extractives et industrielles : mines, sidérurgie, construction navale, textile, etc. Les jeunes ont d’ailleurs une claire conscience d’une telle menace, notamment ceux originaires des anciennes régions industrielles du Nord et plus encore de la Lorraine36. De ce fait, un nombre croissant d’ouvriers est amené à connaître l’épreuve du chômage, et avec lui, la déstabilisation du virilisme. Ce dernier a comme soubassement essentiel, on s’en souvient, l’exercice d’un métier, et par là, la détention d’un capital technique. Or, la privation du travail entraîne une délégitimation à la fois sur le plan social et familial37. En effet, c’est tout le partage traditionnel des temps et des espaces du travail et du loisir entre hommes et femmes qui se trouve bouleversé. Ainsi, un ouvrier stéphanois frappé par un licenciement en 1964 explique : « Le travail, c’est sacré. Sa bonne femme : il faut qu’il aille au boulot. Elle ne le conçoit que comme ça et pas autrement, sa femme. »38 C’est en allant au boulot, et donc en quittant le domicile conjugal pour travailler, que l’ouvrier conquiert une légitimité à la fois sociale et sexuée. Par là, on comprend en quoi le chômage ruine un mode d’identification. C’est pourquoi, les licenciements favorisent l’expression de violences qui traduisent à la fois une colère ouvrière mais également un virilisme meurtri. Dans les mises à sac à Rhodiaceta Vaise en 1967, les séquestrations, attaques du commissariat, affrontements avec les forces de l’ordre qui émaillent les révoltes de Denain et Longwy en 197939, la violence qui se déchaine, l’exhibition de la force qu’elle suppose constituent autant de modes de réappropriation d’une identité virile meurtrie. C’est aussi pour cette raison que les femmes sont soigneusement exclues des « opérations coup de poing » à Longwy pendant cette lutte40. Le virilisme ouvrier apparaît donc à la fois comme mode d’affirmation, mais également de réaction ou de défense face à des recompositions à l’œuvre. Ce virilisme comme identité blessée est d’autant plus fort qu’il est également déstabilisé par l’événement 68 et ses conséquences.
Quand la contestation malmène le virilisme
23Sans prétendre décrire l’ensemble des contestations qui jalonnent les années 1968, trois phénomènes concourent à déstabiliser le virilisme traditionnel.
L’insubordination féminine face au monde ouvrier
24L’insubordination féminine sape progressivement, sans pour autant la détruire, une domination masculine que les ouvriers mâles ratifiaient largement. Elle se déploie à la faveur de grèves dans des établissements où la main-d’œuvre est largement voire exclusivement féminine, à compter de 1971-1972 notamment41, en même temps qu’une prise de parole s’opère, entre autres, à travers la publication de plusieurs autobiographies. L’intérêt de ces grèves est de convoquer à chaque fois des figures ouvrières masculines. Ainsi, dans l’habillement et la confection, les ouvrières grévistes mènent l’action sans et bien souvent contre les ouvriers, coupeurs ou régleurs, qui bénéficient d’une considération et, par là, de salaires supérieurs. Ainsi ces grèves féminines avivent une opposition féminin/masculin, qui recoupe souvent l’opposition OS/OP à l’intérieur du groupe ouvrier de l’entreprise considérée.
25À une première posture d’hostilité, s’oppose celle de la ratification et de la légitimation : ainsi, pendant la grève d’un atelier de Coframaille à Schirmeck en 1973, les maris des grévistes publient un communiqué qui légitime la grève et permet aussi d’évoquer des grévistes responsables, mariées et soucieuses de l’équilibre de leur couple42.
26Toutefois, cette ratification d’un engagement féminin heurte le partage traditionnel qui réserve aux hommes l’espace public et confine les femmes dans la sphère domestique. Les propos de Claude Zedet, ouvrier à Besançon en 1967 sont ici particulièrement éclairants en ce qu’ils entremêlent réticence et déni : « Son envie [de sa femme] maintenant, c’est vraiment de militer et je vois que je lui en empêche [sic]… Je lui en empêche pas… Je suis presque obligé de lui en empêcher parce que la vie serait infernale après, tu comprends… Elle assiste bien à quelques réunions, on assiste bien à quelques réunions en somme, mais, il y a des moments où elle peut pas venir. »43 Mais, alors que Suzanne Zedet se tait en 1967, au moins face à la caméra, et qu’elle accepte cette division sexuée des rôles, les ouvrières de Lip à compter de 1973, réunies dans une commission « femmes », contestent ouvertement cette domination masculine, quelle que soit la bonne volonté des salariés masculins progressistes44. On en veut pour preuve l’extraordinaire discours que développe Monique Pitton en 1975 : pour stigmatiser le patriarcat jusque dans les mobilisations ouvrières et syndicales, elle décrit par le menu le quotidien de la lutte mais remplace systématiquement les mots « hommes » par « Français » et « femmes » par « Arabes »45. L’efficacité saisissante du procédé malmène le monopole masculin, sans qu’on connaisse la réaction des hommes mis ici en accusation.
27Ainsi, l’insubordination ouvrière des années 1968 a contribué à malmener le monopole masculin de la contestation, et par là à faire jaillir dans le monde ouvrier une tension homme/femme inédite.
Un gauchisme homosexuel ?
28En outre, au milieu des années 1960 se développent des organisations d’extrême-gauche qui critiquent avec virulence la modération supposée du Parti communiste et de la CGT. Implantés d’abord dans le monde étudiant, ces groupes scrutent avec attention les pulsations du monde usinier, et l’UJCML prétend s’y implanter à compter de 1967. Une telle attention favorise les rencontres improbables entre étudiants et ouvriers qui s’opèrent notamment à la faveur des grèves de mai-juin 1968 et ensuite46.
29Face à cette contestation essentiellement politique, des militants de la CGT dénoncent sans relâche la nocivité du « gauchisme », et puisent parfois dans le virilisme traditionnel pour tenter de faire pièce face à ce danger. En effet, selon certaines publications de la CGT, le gauchisme appartient à un univers décadent et amoral, voire pervers. Ainsi, la deuxième partie du Frein, film de la CGT qui dénonce l’extrême gauche, est consacrée à la visite de la faculté de Vincennes par une délégation conduite par Henri Krasucki. Scandalisés, ces hommes et ces femmes découvrent des locaux presque neufs mais déjà saccagés, recouverts de graffitis tandis qu’une inscription à la craie sur un tableau apparaît clairement à l’écran : « Prolétaires de tous les pays, enculez-vous. » Le propos filmique transparaît qui vise à associer étudiants, gauchisme et homosexualité dans une même flétrissure, chacune des caractéristiques renforçant la disqualification des autres. Or, dans un tract de la CGT de Flins daté du 4 mai 1972, on lit : « N’a-t-on pas vu le 1er Mai, au matin, ces mêmes gauchistes tant aimés du pouvoir, défiler au côté des homo-sexuels etc… [sic] et souiller une fois de plus, ce 1er Mai, qui est celui des travailleurs. »47 La collusion gauchisme – homosexualité, suggérée dans le film, est ici clairement dénoncée et vise à disqualifier les organisations révolutionnaires auprès des ouvriers. Elle est également stigmatisée dans un bulletin syndical de la CGT chez Michelin à Clermont, qui parle des organisations gauchistes en ces termes : « On y appelle à l’homosexualité, on y vante la drogue,… on rencontre des visages hagards, des yeux exorbités,… certains s’exhibent paraît-il dans les water,… les travailleurs n’ont rien à voir avec cette boue, ce marais… »48 Ainsi, pour faire face à une contestation politique, la CGT la travestit en contamination ou en dégénérescence. Elle tente de réactiver le clivage princeps entre eux et nous, en inventant un gauchisme étudiant et intrinsèquement homosexuel contre une classe ouvrière, et d’abord sa composante mâle, fondamentalement hétérosexuelle. Mais par là, le virilisme ouvrier revendiqué est une fois encore réactif et défensif.
Une crise du rapport au travail ?
30L’insubordination des années 1968 a nourri et légitimé une critique sévère des usines, ravalées au rang de bagne industriel. À bien lire les témoignages, le temps passé à l’usine relève d’un temps mortifère, et le travail, loin d’être le vecteur et le moment d’une réalisation de soi, est souvent considéré comme uniquement aliénant et usant. Ce discours critique, presque traditionnel, a ceci de particulier qu’il est surtout tenu par les jeunes ouvriers les plus rétifs à l’ordre usinier. Répercuté par les organisations d’extrême gauche, les organisations syndicales ou les sociologues, il présente cependant une certaine ambivalence : s’il contribue à imposer une transformation des conditions de travail ou un aménagement de l’organisation scientifique du travail, il légitime aussi un refus de certains jeunes ouvriers de demeurer à l’usine leur vie durant.
31Or, un tel rejet, essentiellement partagé par des jeunes ouvriers, nous semble malmener le virilisme traditionnel en ce qu’il conteste deux de ses trois fondements. D’une part, en effet, l’usine n’est plus le lieu de déploiement d’un capital technique, mais celui d’une pure infériorisation : celui où l’on doit mal s’habiller, où l’on doit subir, où l’on soufre49. D’autre part, le capital agonistique des anciens se trouve dévalorisé : « Non, je n’ai pas envie de devenir comme ces vieux militants : croire, croire ! Depuis 36, ils croient. Je ne crois plus en rien », écrit un ouvrier de Romans âgé de 27 ans50. Au lieu d’incarner un modèle de libération, les grèves du Front populaire deviennent sous la plume de Boyadjian l’alibi d’un renoncement. Suivant encore Gérard Mauger, on tendra ainsi à considérer que ces jeunes ne sont plus ouvriers, mais « font » les ouvriers : « au détachement discursif de l’agent et du poste, correspond une auto-définition hors travail de l’identité sociale »51.
32Il nous apparaît, au terme de ces analyses, que les années 1968 constituent les prémices d’un lent basculement pour le virilisme ouvrier. Constitué autour du triplet travail – combat – autodidaxie, celui-ci continue d’ordonner les représentations et les comportements de larges segments du monde ouvrier pendant la période. Toutefois, il se trouve sapé par les puissantes transformations qui affectent la classe ouvrière : dans sa composition comme dans sa reproduction ou son rapport au travail. Par là, ses formes de sociabilité et de reconnaissance sont chamboulées. De même, les contestations qui symbolisent les années 1968 malmènent ses porte-parole traditionnels, qui incarnaient le virilisme. De ce fait, les parades viriles, la capacité à supporter l’effort, les gauloiseries, bref, le monde de la force, d’une certaine virilité tranquille, sont très progressivement dévalorisés52. Mode fier d’identification, le virilisme devient très progressivement réactif, meurtri et comme le signe d’un malheur. De conscience fière, il se mue insensiblement en stigmate d’une classe vouée à l’archaïsme. Par là aussi sans doute, l’étude des masculinités rejoint l’histoire générale.
Notes de bas de page
1 Sur la question des masculinités ouvrières dans le domaine privé, pour une période un peu plus tardive, O. Schwartz, Le monde privé des ouvriers. Hommes et femmes du Nord, Paris, PUF, 1990.
2 G. Mauger, Les bandes, le milieu et la bohême populaire. Étude de sociologie de la déviance des jeunes des classes populaires (1975-2005), Paris, Belin, 2006, p. 159.
3 R. Hoggart, La culture du pauvre, Paris, Minuit, 1970, chapitre 3.
4 10 mars – 8 mai 1972, Saint Brieuc la greve du joint francais, Petite bibliothèque prolétarienne, 32 p., supplément à La Cause du Peuple, no 24. On trouve une injure similaire lors des grèves des chantiers navals de Saint-Nazaire en 1955 : L. Oury, Les prolos, Nantes, Éditions du Temps, 2005 [1973], p. 164 et 188. L’exactitude des dialogues, censée rappeler des événements antérieurs, est évidemment sujette à caution, mais le livre, rédigé en 1971-1972 (p. 7), est un témoignage extrêmement précieux pour accéder à la culture ouvrière des années 1950-1970.
5 O. Schwartz, Le monde privé des ouvriers, ouvr. cité, p. 293.
6 L. Oury, Les prolos, ouvr. cité, p. 148 et 125.
7 N. Ponsard, Lectures ouvrières à Saint-Étienne du Rouvray, des années trente aux années quatre-vingt-dix, Paris, L’Harmattan, 2007.
8 Les ouvriers n’ont toutefois pas le monopole de tels comportements. Ils demeurent en revanche proscrits pour les femmes et sont à ce titre caractéristiques des masculinités.
9 M. Pialoux, « Alcool et politique dans l’atelier. Une usine de carrosserie dans les années 1980 », Genèses no 7, mars 1992, p. 94-128.
10 M. Durand, Grain de sable sous le capot, Marseille, Agone, 2006 (2e edition augmentée) ; M. Donati, Cœur d’acier. Souvenirs d’un sidérurgiste de Lorraine, Payot, 1994, p. 178-179 ; L. Oury, Les prolos, ouvr. cité ; J.-P. Levaray, Putain d’usine, Montreuil, L’insomniaque, 2002.
11 M. Pigenet, « À propos des représentations des rapports sociaux sexués : identité professionnelle et masculinité chez les dockers français (XIXe-XXe siècle) », Le Mouvement social, no 198, janvier-mars 2002, p. 60.
12 Voir le beau livre de M. Sonnet, Atelier 62, Cognac, Le temps qu’il fait, 2008, p. 181-182.
13 P. Willis, « L’école des ouvriers », Actes de la recherche en sciences sociales, no 24, 1978, p. 50-61.
14 L. Oury, Les prolos, ouvr. cité, p. 113.
15 M. Pigenet, art. cité, p. 58 ; L. Oury, Les prolos, ouvr. cité, p. 123, 140, 146 ; et le témoignage d’un ouvrier de Flins : « Mai et juin 68 vus de l’usine », Les Temps Modernes, février 1972, no 207, p. 1291.
16 La Cause du Peuple – J’accuse, no 31, 11 novembre 1972.
17 Citroën-Nanterre en mai-juin 1968, collectif Arc, 1968. Voir également le film de Jean-Pierre Thorn sur la grève chez Alsthom à Saint-Ouen en 1979, Le dos au mur, 1980.
18 Voir le film de Dominique Dubosc, Le conflit Lip 1973-1974, 1974.
19 Tract CFDT : « Opération vérité : des otages à Rhodia », 26 décembre 1967. Archives Hacuitex-CDFT, conflit Rhodiaceta.
20 Entre les recensements de 1954 et 1975, le nombre d’ouvrier progresse de 6 435 000 à 8 169 000. Voir M. Verret, Le travail ouvrier, Paris, Armand Colin, 1982, tableau 7, p. 175.
21 On compte 350 000 nouvelles ouvrières entre 1962 et 1975, notamment dans les industries électriques et électroniques, la chimie, etc. Dans l’industrie, le taux d’ouvriers étrangers entre 1968 et 1975 progresse de 14,9 % à 19,06 %. Voir L. Thévenot, « Les catégories sociales en 1975 : l’extension du salariat », Économie et statistiques, no 91, juillet-août 1977, p. 3-31.
22 Cette absence apparaissait d’ailleurs comme un des attraits de la décentralisation aux yeux du patronat, qui délaissait ainsi la banlieue rouge pour des provinces réputées plus conservatrices.
23 A.-M. Sohn, Âge tendre et tête de bois. Histoire des jeunes des années 1960, Paris, Hachette, 2001, p. 224 et suivantes. Voir également O. Schwartz, Le monde privé des ouvriers, ouvr. cité, p. 221-224, 354.
24 Brochure CFDT : « Berliet. 14 juin 1971. Ils racontent la grève des moteurs », juin 1971, 23 p. Citation p. 20-21. Archives de la fédération CFDT de la métallurgie 1 B 264.
25 C. Etcherelli, Élise ou la vraie vie, Paris, Denoël, 1967.
26 H. Bleskine, L’espoir gravé, Paris, Maspero, 1975, p. 13 où l’auteur évoque des rixes « ethniques ».
27 V. Porhel, Ouvriers bretons. Conflits d’usines, conflits identitaires en Bretagne dans les années 1968, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2008, p. 69 et 196 pour les références aux deux usines.
28 Voir A. Prost, Éducation, société et politiques. Une histoire de l’enseignement de 1945 à nos jours, Paris, Seuil (Points), 1997 ; J.-P. Terrail, « Familles ouvrières, école, destin social (1880-1980 », Revue française de sociologie, no 3, 1984, p. 421-436.
29 « “Abandonner ses bleus”, voilà l’objectif à atteindre pour beaucoup d’ouvriers. », L. Oury, ouvr. cité, p. 238
30 G. Mauger, Les bandes, ouvr. cité, p. 133
31 A.-M. Sohn,, Âge tendre, ouvr. cité, p. 179 et suivante.
32 Pour Peugeot, voir l’étude magistrale de N. Hatzfeld, Les gens d’usine. 50 ans d’histoire à Peugeot-Sochaux, Paris, L’Atelier, 2002, p. 319 et suivante.
33 J.-M. Chapoulie, O. Kourchid, J.-L. Robert, A.-M. Sohn, Sociologues et sociologies. La France des années 60, Paris, L’Harmattan, 2005, 3e partie.
34 G. Groux et C. Lévy, La possession ouvrière. Du taudis à la propriété (XIXe-XXe siècle), Paris, L’Atelier, 1993, p. 135-136, 149.
35 G. Vincent, Les Français, chronologie et structures d’une société, Paris, Masson, 1977, p. 283-284.
36 A.-M. Sohn, Âge tendre, ouvr. cité, p. 174-177.
37 O. Schwartz, Le monde privé des ouvriers, ouvr. cité, p. 314.
38 Centre d’ethnologie sociale et de psycho-sociologie : Les effets traumatisants d’un licenciement collectif, rapport au CORDES, 1973, p. 72.
39 X. Vigna, « Les ouvriers de Denain et Longwy face aux licenciements : 1978-1979 », Vingtième Siècle, no 84, octobre-décembre 2004, p. 129-137.
40 Les témoignages de militants dans le film de R. Boarts, Longwy produit par le syndicat CFDT, 1981 (?).
41 Quelques exemples pour l’année 1972 : chez Philips à Flers dans l’Orne, à la SCPC (chimie) à Cournon dans le Puy-de-Dôme, à la SPLI (lingerie) à Fougères, aux Compteurs Jaeger à Caen, etc. Voir X. Vigna, L’insubordination ouvrière dans les années 68, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2007, p. 116 et suivantes, 162-170, 331-344 ; V. Porhel, Ouvriers bretons, ouvr. cité.
42 Communiqué non daté, « Coframaille (Schirmeck) : les ouvrières en grève pour un salaire libéré du rendement », publié par les Comités Libération de Schirmeck et Strasbourg, 4 p. BDIC, fonds Gauche prolétarienne F ∆ Rés. 576/4/3/1.
43 Classe de lutte, ouvr. cité.
44 Lip au féminin, Paris, Syros, 1977, p. 89-118
45 Le film de Carole Roussopoulos, Monique et Christiane, Lip III, 1976.
46 X. Vigna et M. Zancarini-Fournel, « Les rencontres improbables dans les années 68 », Vingtième siècle, n 101, janvier-mars 2009, p. 163-177.
47 Tract intitulé « Mai, mois de la jeunesse avec la CGT », BDIC, F ∆ Rés. 612/7.
48 Cité sans référence dans une brochure de la Ligue communiste, SCPC : Une grève étranglée, Ligue communiste, supplément à Rouge, no 172, non paginée.
49 Voir les témoignages rassemblés par G. Mauger, Les bandes, ouvr. cité, p. 140-142.
50 C. Boyadjian, La nuit des machines, Paris, Les Presses d’aujourd’hui, 1978, p. 104.
51 G. Mauger, Les bandes, ouvr. cité, p. 159.
52 A. Rauch, Histoire du premier sexe, Paris, Hachette, 2006, p. 417 et 496.
Auteur
Maître de conférences à l’université de Bourgogne, est un spécialiste du monde ouvrier. Il a publié, entre autres, L’insubordination ouvrière dans les années 1968. Histoire politique des usines, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2007 ; Histoire des ouvriers en France au XXe siècle, Paris, Perrin, 2012.
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