« Penser comme un homme » ? Expressions et répressions de la masculinité dans les milieux universitaires médiévaux
p. 231-244
Texte intégral
1Au milieu du XIXe siècle, dans ses Aphorismes sur la sagesse de la vie, Arthur Schopenhauer consacrait quelques pages à ce qu’il nomma l’honneur sexuel1. Pour le philosophe, il existait un honneur féminin clairement défini, consistant pour une fille à la virginité et pour une femme mariée à ne s’être donnée qu’à un seul homme ; quant à l’honneur sexuel masculin, il ne serait que « provoqué par celui des femmes, à titre d’esprit de corps opposé ». Nous sommes finalement, à travers les propos de Shopenhauer, face à une caractéristique fondamentale de la construction intellectuelle des sexes, et qui rejaillit sur la notion d’honneur, celle d’une impossibilité à penser le masculin autrement que dans son opposition au féminin, et finalement à ne pas penser la composante proprement masculine de l’honneur des hommes. Pour nombre d’anthropologues et d’historiens, l’honneur est cependant un concept social « genré »2. À la fin moyen Âge, il s’agit d’une notion vaste dont les modalités d’expression engagent à la fois les mots et les gestes des groupes et des individus, ainsi que les liens sociaux qu’ils contractent. Si cette notion repose sur des facteurs sociaux évidents et véritables, elle n’est pas pour autant une notion pleinement objective. Chacun aspire à un honneur qu’il considère justifié par la propre image qu’il se fait de lui-même, image que la société lui renvoie ou qu’il tente d’imposer à la société dans un rapport dialectique identitaire3. L’historien qui s’intéresse à la construction médiévale des catégories sociales – ce que les médiévaux eux-mêmes auraient nommé leur honneur – ne peut donc faire l’économie d’une approche « genrée » de ces imaginaires.
2Toutefois, et comme l’ont souligné plusieurs historiens, le féminisme des premières études sur le genre a paradoxalement fait de l’« homme » une catégorie générique, universelle, anhistorique, et finalement démasculinisée4. L’historiographie des universités n’échappe pas à ce constat : comme l’a constaté Ruth Mazo Karras, les universités médiévales étant constituées uniquement d’hommes, elles ont jusqu’ici peu intéressé les historiennes et les historiens du genre5 ; ajoutons également que les universitaires au moyen Âge étant pour l’essentiel des clercs, les historiens eurent certainement tendance à considérer que ces populations s’inscrivaient dans un monde clérical largement asexué. Notre propos sera donc d’essayer de soutenir le contraire et de proposer quelques réflexions étayant l’idée d’une préoccupation constante des institutions universitaires médiévales vis-à-vis de l’expression de la masculinité de leurs membres et de la sexualité d’une population composée majoritairement d’hommes jeunes. Dans des milieux universitaires oscillant entre contrainte et permissivité, entre expression et répression de cette masculinité, « penser comme un homme » était un enjeu.
Pensée et sexualité : retour sur le paradigme Abélardien
3Tous les universitaires n’étaient pas égaux face à la sexualité. Si les universités du sud de l’Europe furent largement et précocement laïcisées, dans les universités du nord de l’Europe (Paris, Orléans, Oxford), les écoliers et les maîtres étaient des clercs portant la tonsure. Pour eux, le célibat apparaissait donc comme une exigence6. La question de l’expression de leur masculinité se posait donc avec d’autant plus de complexité. Force est toutefois de constater, avec Vern Bullough, que les universitaires comme les autres clercs, ne répondaient théoriquement pas aux critères immédiats de la masculinité médiévale : féconder une femme, protéger des dépendants et jouer le rôle nourricier de sa propre famille7. Pour Robert Swanson, le clergé d’après la réforme grégorienne apparaît au contraire comme démasculinisé, renonçant à son identité sexuée, et formant un troisième genre, habité par une tension constante entre l’ambition d’atteindre par la chasteté la perfection des anges et le désir pulsionnel d’être également des mâles. En fin de compte, on peut sans risque avancer que la question de la masculinité des universitaires est posée avant même la naissance institutionnelle des universités – aux XIIe-XIIIe siècles –, dès la réforme grégorienne et la tentative d’imposition du célibat clérical8. Comme le souligne Jacques Verger, « les clercs, surtout ceux qui, n’ayant que les ordres mineurs, n’étaient pas définitivement voués au célibat, acceptaient mal la chasteté qu’on voulait leur imposer »9 et ceci à plus forte raison dans le monde de l’école qui rassemblait des jeunes hommes, dont la masculinité se construisait en même temps que leur carrière intellectuelle.
4 L’Historia calamitatum d’Abélard témoigne de cette tension propre à la période de la réforme grégorienne qui, dans sa tentative de contrôle des mœurs et de la sexualité par l’église, voit la promotion de l’idéal du célibat intellectuel10. En ce sens, le personnage d’Abélard (1079-1142) – réel ou littéraire – a une valeur paradigmatique pour comprendre les liens entre pensée et sexualité dans la constitution d’un imaginaire scolaire médiéval11. Cet imaginaire reposait sur deux conceptions distinctes mais convergentes. La première était l’idée d’une supériorité intellectuelle naturelle de l’homme sur la femme, probablement héritée des Grecs12, et selon laquelle l’homme incarnerait davantage la part rationnelle du corps, celle de l’esprit, quand la femme en serait la part matérielle, à l’esprit passif. On retrouve cette partition entre domaine idéel – celui des hommes – et domaine matériel – celui des femmes – dans les propos d’Héloïse exhortant Abélard à ne pas corrompre son esprit dans une vie conjugale et familiale ingrate :
Quel rapport peut-il exister entre les élèves et les nourrices, les écritoires (scriptoriorum) et les berceaux, les livres (librorum) ou les tablettes et les quenouilles, les stylets (stilorum) ou les calames et les fuseaux ? Quel homme voué à la méditation philosophique ou théologique pourrait supporter les cris des nourrissons, les berceuses chantées par leurs nourrices pour les calmer, ou encore cette foule turbulente des domestiques, tant valets que servantes ?13
5L’autre fondement sur lequel s’appuyait ce principe du célibat intellectuel était l’idée que les relations charnelles causaient un affaiblissement de l’esprit rationnel : Abélard ne dit pas autre chose quand il écrit que l’énergie de son esprit avait été « amollie par les plaisirs de la chair » auquel il s’adonnait avec Héloïse14. Il établissait ainsi une impossible dialectique entre volupté (voluptas) et philosophie, la première l’empêchant d’exercer correctement ses activités d’enseignement, dont il disait qu’elles ne lui procuraient qu’ennui, et auxquelles il s’adonnait sans enthousiasme, au point de se répéter15. Cette idée trouve un écho dans les conceptions physiologiques et médicales selon lesquelles le sperme serait le support de la virtus masculine qui, provenant du cerveau, aurait une vertu de fécondité intellectuelle16. Les théologiens Albert le Grand et Gilles de Rome soutenaient, dans la seconde moitié du XIIIe siècle, que l’émission de sperme affaiblissait considérablement l’organisme et que le coït vidait ainsi le cerveau de cette virtus masculine support de la raison17.
6Dès lors, la chasteté intellectuelle n’était plus uniquement un principe clérical, mais, comme l’écrit Abélard, un principe lié à la « dignité du philosophe » construite depuis les antiques, les prophètes et pères de l’église18 :
En effet, plus j’avançais dans l’étude des Saintes écritures et de la philosophie, plus je m’éloignais de l’exemple des philosophes et des théologiens par les turpitudes auxquelles je me livrais. Car il est clair que philosophes et théologiens – c’est-à-dire ceux qui se vouent à l’étude des Saintes écritures – ont toujours brillé par l’éclat d’une vie sans tache.19
7Pour autant, le philosophe n’en restait pas moins un homme entier : si Abélard affirma vivre sa castration comme bienheureuse, car le détournant ainsi définitivement des tentations de la chair, il s’agissait là d’une consolation raisonnée qui n’estompait pas un fort sentiment de honte20. Lui-même se dit, aussitôt après sa mutilation, « plus sensible à la honte qu’à la douleur »21. La marque d’infamie qui lui était imposée constituait, en effet, à la fois une menace pour son Salut et un déshonneur au regard d’autrui. Pour ses détracteurs, à l’image de son ancien maître Roscelin, l’identité sexuelle d’Abélard ainsi remise en cause frappait la crédibilité intellectuelle d’un homme qui avait « usurpé la fonction de maître en enseignant des mensonges »22. Abélard répond à Roscelin en invoquant les modèles de saint Jérôme et d’Origène qui, bien que s’étant infligés eux-mêmes l’émasculation, devinrent des figures chrétiennes de l’enseignement, contredisant ainsi cette image d’incapacité et d’immoralité de l’homme castré23. Certains historiens ont ainsi pu voir dans l’œuvre philosophique d’Abélard une tentative de « remasculinisation » de son identité, où ses productions intellectuelles seraient autant de joutes agonistiques destinées à prouver sa virilité24. Il y a en effet chez Abélard une volonté de situer sa vocation intellectuelle au cœur du modèle de masculinité socialement dominante, celui de la chevalerie et de l’acquisition de la virilité par l’apprentissage des armes25 :
Et comme je préférais les armes de la logique et de la raison à toutes les autres disciplines philosophiques, j’ai renoncé aux trophées de la guerre pour vaincre dans les disputes plutôt que sur les champs de bataille.26
8Outre Abélard, Otton de Freising dans la première moitié du XIIe siècle, Jean de Meun, à la fin du XIIIe siècle, ou encore François Villon, au milieu du XVe siècle, ont tous associé les dimensions intellectuelle et sexuelle dans l’élaboration littéraire de cette figure « du premier maître des écoles de Paris » (M. Clanchy)27.
Genre et institutions : quelle masculinité universitaire ?
9Il découle de l’analyse du paradigme abélardien que la question de la masculinité était largement constitutive d’une identité scolaire dont le caractère propre s’affirma au sein des premières écoles du XIIe siècle. Avec l’apparition de l’Université au XIIIe siècle, le caractère sexué de la communauté des maîtres et étudiants fut renforcé par un effort constant d’exclusion des femmes des institutions universitaires : William J. Courtenay a ainsi pu qualifier l’université de paris au XIVe siècle d’« all-male institution before the modern era »28. Cette exclusion des femmes d’un système de promotion sociale fondé sur le principe méritocratique et l’acquisition des savoirs contribuait de fait à assurer une domination masculine durable dans la société médiévale29. Ceci est particulièrement net à l’université de paris qui veilla tout au long des XIVe et XVe siècles à ce que la discipline médicale, qui était la seule activité universitaire rencontrant une concurrence dans le monde laïc, ne puisse être exercée hors du contrôle de l’Université et notamment par des femmes, frappées selon elle d’une infirmité qui les empêchait d’être tout autant avocate que médecin30. Mais cette proscription ne se limitait pas aux aspects strictement scolaires ou professionnels : toute l’organisation sociale de la vie universitaire reposait sur un système d’exclusion du monde féminin. La plupart des statuts de collèges interdisaient aux femmes l’accès à la domus et veillaient, pour des questions de salubrité, à la rareté des contacts avec elles31.
10Il est toutefois remarquable de noter que si cette population uniquement masculine cherchait à se maintenir comme telle, la communauté universitaire se pensait, elle, comme symboliquement féminine. Le genre féminin de cette organisation sociale et politique apparaît dans le vocabulaire latin de la communauté universitaire32 : universitas, qui renvoie dès le début du XIIIe siècle à la communauté la plus large des maîtres et étudiants, facultas, qui désigne une communauté établie sur un critère de capacité, de discipline étudiée ou enseignée, ou enfin nacio, qui privilégie le critère d’origine géographique33. À cette première remarque d’ordre linguistique, il faut ajouter que les universitaires médiévaux avaient eux-mêmes une forte conscience de la symbolique féminine de leur communauté. On voit ainsi, dès le XIIIe siècle, se mettre en place dans le cadre universitaire parisien un vocabulaire de la parenté symbolique strictement féminin : l’Université, la Faculté ou la nation sont pour les universitaires mater nostra, puis à partir de 1385, l’alma mater34. La métaphore maternelle renvoie directement aux fonctions que les universitaires attribuent à cette institution communautaire : leur mère est ainsi protectrice envers les maîtres et écoliers35, nourricière de vérité et d’équité36, mais aussi autoritaire et capable de « vilipender » ou de « corriger » ses fils égarés37. La métaphore de la parenté symbolique établit ainsi une hiérarchie où les maîtres et écoliers sont les fils d’une nation et d’une Faculté, elles-mêmes filles de l’Université, mère de tous38. Au milieu du XIVe siècle, se développe également la métaphore de l’Université « fille du roi » et du pape39. On voit donc se mettre en place dans le discours universitaire une architecture complexe de la parenté symbolique qui tend à conférer le monopole de la féminité aux seules institutions communautaires : à la fois fille et mère, celles-ci concentrent les différentes figures de la féminité40.
11Quelle pouvait donc être la place réservée, au sein de cette institution symboliquement féminine, à l’expression de la masculinité de ses membres ? La question de l’apparence vestimentaire se posait notamment à une époque où s’affirmait ce qu’Odile Blanc a nommé le « corps de mode », c’est-à-dire une mode vestimentaire qui met en valeur le corps sexué41. Le paraître universitaire était de fait un enjeu et le port de vêtements adoptant la mode laïque du moment un véritable problème. Les prescriptions statutaires durant les XIIIe-XVe siècles montrent une volonté d’imposer une image « désexuée » du corps vêtu de l’universitaire qui, à l’image de celui de tout clerc, porte des chapes longues et amples. Parallèlement, chaussures à la poulaine, surcots fendus sur le côté ou vêtements courts et serrés sont proscrits afin que l’universitaire se montre religieux, humble et honnête, s’abstenant d’arborer des « parures laïques indécentes »42. Selon la même logique, les statuts universitaires tendent également à limiter, voire à interdire, le port d’armes par les étudiants et les maîtres, notamment à l’extérieur de leurs habitations, les dépossédant ainsi de ce qui constituait probablement l’un des marqueurs les plus forts de leur masculinité43.
12En veillant ainsi sur l’apparence de ses membres, l’institution universitaire contribuait activement à leur exclusion des stratégies d’affirmation traditionnelle de leur identité sexuelle, alors même qu’une grande majorité de la population universitaire appartenait à la tranche d’âge des 14-30 ans, c’est-à-dire celle de la « jeunesse »44. La question se posait donc pour les jeunes maîtres et écoliers des moyens d’acquisition de cette masculinité qui restait la condition d’accès à cette communauté symboliquement féminine. Ruth Mazzo Karras a souligné que si les universitaires délaissaient certains des aspects de la masculinité accessibles aux autres hommes – comme le mariage et la paternité ou encore l’exercice des pouvoirs militaires et politiques – les jeunes hommes qui allaient à l’Université étaient initiés à une forme alternative de culture masculine basée davantage sur des idéaux de rationalité et de modération45. Ainsi, les méthodes et les exercices scolaires auxquels ils étaient initiés, telle la disputatio qui consistait en une confrontation logique, leur permettaient par leurs aspects proprement agonistiques, d’intégrer des schémas intellectuels rationnels spécifiquement masculins. Cette acquisition d’une rationalité masculine passait aussi par des rites initiatiques – au sujet desquels les institutions universitaires ont oscillé entre permissivité et répression – durant lesquels les aînés purgeaient symboliquement le jeune écolier de sa bestialité, ce qui permet à Ruth Karras d’avancer que la masculinité universitaire se construisait par la séparation rituelle du monde de l’animalité46. Enfin, soulignons que nombre des activités universitaires se concluaient très licitement par la fréquentation des tavernes où les écoliers pouvaient s’adonner à une forme de compagnonnage viril alimentant un système de compétition qui visait aussi à prouver aux autres sa masculinité.
Sexe et reproduction : la révolte des clercs ?
13Pour autant, dans une société médiévale où la qualité masculine se mesurait aussi à la performance sexuelle, les clercs de l’Université ne furent probablement jamais parfaitement exclus de cette économie de la virilité. En témoigne notamment les multiples attestations, d’Abélard à François Villon, d’une certaine promiscuité entre le monde des écoles et celui de la prostitution. Comme l’a bien souligné Jacques Rossiaud, le recours à la prostitution pour des jeunes hommes du monde urbain de la fin du moyen Âge constituait « une preuve sociale et physiologique de normalité » et participait à l’acquisition du « privilège de masculinité »47. Dans son Historia Occidentalis, rédigée vers 1220, Jacques de Vitry décrivait ainsi le Paris de sa jeunesse :
Dans une même maison, il y a : au premier, les écoles ; au rez-de-chaussée, les lupanars. À l’étage supérieur, les maîtres donnent leurs leçons ; à l’étage inférieur, les putains exercent leur honteux métier. D’un côté, les prostituées qui se querellent entre elles ou avec leur souteneur ; de l’autre, les savants qui hurlent, discutent et disputent.48
14Le cœur du Paris universitaire resta durant tout le moyen Âge le théâtre des activités des meretrices, des souteneurs et des entremetteuses49. En mai 1358, le dauphin Charles décida même de faire fermer l’accès de nuit à la rue du Fouarre, cœur du quartier universitaire parisien, car les étudiants s’y ébattaient régulièrement avec des prostituées50. Le texte n’est pas avare en description de ceux qui s’adonnent à ce commerce nocturne « vil et honteux », dans les salles qui servent aux leçons, sur les bancs où les étudiants devaient s’asseoir le lendemain, jusque sur la chaire du maître. Les autorités universitaires tentèrent d’éradiquer cette présence endémique des prostituées que l’on retrouvait jusque dans les murs des collèges, interdisant également à leurs boursiers de fréquenter les lupanars51.
15Les autorités religieuses trouvèrent un relais moral auprès des ordres mendiants, et notamment des Dominicains, qui, dès le milieu du XIIIe siècle, usèrent de cette « pastorale de la peur » véhiculée par les exempla pour dénoncer les mœurs des universitaires et annoncer la damnation future de ceux qui ne renonceraient pas à leur vice. Maîtres et étudiants y sont présentés dans toutes les configurations que permet la casuistique pénitentielle de la luxure : fréquentant des prostituées, commettant l’adultère en entretenant une relation avec une femme mariée, vivant purement et simplement en concubinage ou encore renonçant à l’engagement du célibat pour se marier52. À l’inverse, la canonisation en 1323 du dominicain Thomas d’Aquin, dont André Vauchez a souligné qu’il était le premier exemple de sainteté intellectuelle et universitaire, offre un contre-modèle et fait de la chasteté et de la résistance à la tentation du désir charnel d’une jeune prostituée, l’un des attributs essentiels de la sainteté53.
16Le discours moral de condamnation du maintien d’une sexualité universitaire semble ainsi atteindre son apogée dans la période 1250-1325, non sans provoquer une tentative de révolte de ces intellectuels. Parmi les 219 thèses circulant à l’université de paris et condamnées par l’évêque Étienne Tempier le 7 mars 1277 – condamnations souvent présentées comme un véritable tour de vis philosophique des autorités ecclésiastiques contre une tendance des maîtres de l’université de paris – six posaient ainsi ostensiblement la question de la sexualité dans les milieux universitaires :
166. Pour contraire qu’il soit à la nature de l’espèce, le péché contre nature, autrement dit le mauvais usage du coït, n’est pas contraire à la nature de l’individu.
168. La continence n’est pas essentiellement une vertu.
169. La complète abstinence de tout acte de chair détruit à la fois la vertu et l’espèce.
172. Le plaisir pris dans les activités sexuelles n’empêche pas l’activité ou l’usage de la pensée.
181. La chasteté n’est pas un bien supérieur à la complète abstinence.
183. La fornication pure et simple, celle d’un célibataire avec une célibataire, n’est pas un péché.54
17Comme le souligne Alain de libera, l’énonciation, pour les condamner, de ces thèses révélait un véritable « système du sexe », au sein duquel les universitaires parisiens usaient des outils scolastiques pour poser sur le terrain de la démonstration logique la question de leur sexualité55. Mais, conséquence d’une contrainte sociale et d’un discours répressif, les aspirations universitaires en matière d’économie de la sexualité furent cantonnées au domaine de la marginalité, s’exprimant de fait dans une certaine violence. Les sources universitaires ne manquent pas de descriptions des vagabondages nocturnes d’écoliers armés, pénétrant par effraction dans des maisons, commettant des rapts de femmes et des viols de jeunes vierges56. De ce point de vue, il semble que les jeunes écoliers ne différaient guère des jeunes laïcs dont la quête d’identité précédant leur installation dans l’âge adulte mêlait l’errance, la violence et la séduction des femmes57. Jacques Rossiaud a qualifié d’« éphèbes noirs de la cité médiévale » ces jeunes hommes qui faisaient ensemble l’apprentissage de la masculinité par l’oppression qu’ils infligeaient aux femmes et le climat nocturne de terreur qu’ils imposaient dans la ville58. Les jeunes universitaires étaient d’autant moins loin de ce modèle laïc qu’ils participaient eux aussi à cette « juridiction sur les célibataires et les mariés » qu’incarnaient les abbayes de jeunesse du Sud-est de la France59. Ainsi, les statuts de la première moitié du XVe siècle des universités de Montpellier et d’Aix-en-Provence offrent une réglementation détaillée du déroulement des charivaris pratiqués au sein même de ces institutions60. L’Université et les étudiants se faisaient donc institution médiatrice d’une difficile exclusion de l’économie matrimoniale.
18Il est cependant indéniable qu’en avançant dans le XIVe siècle, on observe un certain assouplissement de l’arsenal répressif, y compris dans les universités du nord, comme à paris ou Orléans61. Alors que l’accès aux grades universitaires et fonctions enseignantes était à Paris théoriquement conditionné à la condition de célibataire62, la papauté accordait parfois des dispenses pour des docteurs en médecine mariés désirant accéder à la régence, affirmant que « l’honneur magistral » au sein de la faculté de médecine pouvait s’accommoder d’une union « à une unique et vierge femme »63. Cette autorisation fut définitivement établie par la « réformation » générale de l’université de paris du cardinal d’Estouteville en 1452 : les statuts qui imposaient que l’homme marié soit « réputé impie et irrationnel » furent abrogés et les maîtres mariés reçurent l’autorisation d’être régent en médecine à partir du moment où ils étaient suffisamment savants et honnêtes dans leurs mœurs64. Cette décision entérinait une tendance à la décléricalisation du milieu médical en France, mais en limitait la portée à cette seule profession se distinguant par son caractère pratique65.
19Loin d’être démasculinisée, la population universitaire semble finalement avoir construit une bonne part de son identité sociale et de son honneur, dans son rapport troublé à la masculinité. Si le vieil idéal du célibat intellectuel fut mobilisé comme moyen de détourner des hommes jeunes de la sexualité, si les institutions universitaires ont tenté de s’arroger le monopole symbolique de la féminité, les universitaires médiévaux ne furent probablement jamais des « anges incarnés », asexués. Ils participaient des mêmes logiques de domination masculine que la plupart des hommes de la société médiévale66. L’institution universitaire, pour laquelle il s’agissait d’être plus que de paraître comme un homme, s’avéra relativement permissive pour ceux qui aichaient trop ostensiblement leur identité masculine. Et pour cause, en ne recrutant que des hommes, l’institution universitaire elle-même assurait une continuité sociale et intellectuelle de la domination masculine dans la société médiévale.
Notes de bas de page
1 A. Schopenhauer, Aphorismes sur la sagesse de la vie, Paris, PUF, 1998, p. 52 et suivantes.
2 Voir les vifs débats entre Julian Pitt-Rivers et Frank H. Stewart : J. Pitt-Rivers et J. G. Peristiany dir., Honor and Grace in Anthropology, Cambridge, Cambridge University Press, 1992 ; F. H. Stewart, Honor, Chicago, The University of Chicago Press, 1994, notamment p. 107-110, ainsi que le compte-rendu de J. Pitt-Rivers de cet ouvrage dans L’Homme, no 143, 1997, p. 215-217, et la réponse de F. H. Stewart, « De l’honneur », L’Homme, no 147, 1998, p. 237-246. Sur le point de vue des médiévistes, voir C. Gauvard, « Honneur de femmes et femme d’honneur en France à la fin du Moyen Âge », Francia, no 28, 2001, p. 151-191 ; J. C. Parsons, « “Loved Him – Hated Her”. Honor and Shame at the medieval Court », Conflicted Identities and Multiple Masculinities. Men in the Medieval West, J. Murray dir., New York, Garland, 1999, p. 279-298.
3 Outre les ouvrages cités dans la note précédente, nous renvoyons à pierre Bourdieu, « le sens de l’honneur », dans Esquisse d’une théorie de la pratique, précédé de Trois études d’ethnologie kabyle, Paris, Droz, 1972, réédition Seuil, 2000, p. 19-60 ; J. Pitt-Rivers, Anthropologie de l’honneur. La mésaventure de Sichem, Paris, Hachette, 1997 ; C. Gauvard, « Honneur », dans Dictionnaire du Moyen Âge, C. Gauvard, A. de Libera et M. Zink dir., Paris, PUF, 2002, p. 687-689 ; T. Fenster et D. Lord Smail dir., Fama. The Politics of Talk and Reputation in Medieval Europe, Ithaca/Londres, Cornwell University Press, 2003, p. 4-5.
4 Voir le constat de Thelma Fenster, « Why Men ? », Medieval Masculinities. Regarding Men in the Middle Ages, C. A. Lees, T. Fenster et J. A. McNamara dir., Minneapolis, University of Minnesota Press, 1994, p. ix-xiii; D. M. Haddley, « Introduction: medieval masculinities », D. M. Haddley, Masculinity in Medieval Europe, New York, Longman, 1999, p. 1-18.
5 R. M. Karras, « Sharing wine, women, and song. Masculine identity formation in the medieval european universities », Becoming Male in the Middle Age, J. J. Cohen et B. G. Wheeler dir., New York, Garland, 1997, p. 187-202; R. M. Karras, From Boys to Men. Formations of Masculinity in late Medieval Europe, Philadelphie, University of Pennsylvania Press, 2003, particulièrement chapitre 3.
6 H. Rashdall, The Universities of Europe in the Middle Ages, 3 vol., Oxford, Oxford University Press, 1936, vol. 3, p. 395-397.
7 V. L. Bullough, « On being a male in the Middle Ages », Medieval Masculinities, ouvr. cité, p. 31-45, particulièrement p. 34; R. N. Swanson, « Angels incarnate: clergy and masculinity from Gregorian Reform to Reformation », Masculinity in Medieval Europe, ouvr. cité, New York, Longman, 1999, p. 160-177.
8 J. A. Brundage, Law, Sex and Christian Society in Medieval Europe, Chicago, University of Chicago Press, 1987, p. 214-223.
9 J. Verger, L’amour castré. L’histoire d’Héloïse et d’Abélard, Paris, Hermann, 1996, p. 40.
10 M. Clanchy, Abélard, Paris, Flammarion, 2000, p. 67-75.
11 Le volume dirigé par J. J. Cohen et B. G. Wheeler (ouvr. cité) ne contient pas moins de trois articles consacrés à la castration d’Abélard : M. Irvine, « Abelard and (re)writing the male body. Castrastion, identity and remasculinization », p. 87-106; B. G. Wheeler, « Origenary fantasies. Abelard’s castration and confession », p. 107-128; Y. Ferroul, « Abelard’s blissful castration », p. 129-149.
12 R. A. Baer Jr., Philo’s Use of the Categories Male and Female, Leyde, Brill, 1970, p. 46-51.
13 Lettres d’Abélard et Héloïse, É. Hicks et T. Moreau, éd. et trad., Paris, Lettres Gothiques, 2007, p. 68-69, l. 453-458 (dorénavant abrégé LAH).
14 LAH, p. 54-55, l. 245-246. Voir sur ce point, Y. Ferroul, « Bienheureuse castration. Sexualité et vie intellectuelle à l’époque d’Abélard », Bien Dire et Bien Aprandre, no 4, 1986, p. 1-28, particulièrement p. 17-21.
15 LAH, p. 60-61, l. 336-344.
16 D. Jacquart et C. Thomasset, Sexualité et savoir médical au Moyen Âge, Paris, PUF, 1985, p. 73-84.
17 Albert le Grand, Quaestiones super de animalibus, Lib. XV, Q. 14-16, Alberti Magni Opera Omnia, E. Filthaut éd., t. XII, Münster, Aschendorff, 1955, p. 268-269 ; D. Jacquart et C. Thomasset, ouvr. cité, p. 81.
18 LAH, p. 66-73 ; LHA, p. 72-73, l. 515-517 : « Qui si clerici prerogativam non curas, philosophi saltem defendere dignitatem. »
19 LAH, p. 56-57, l. 249-253.
20 J. Murray, « Mystical castration. Some reflections on Peter Abelard, Hugh of Lincoln and sexual control », Conflicted Identities and Multiple Masculinities. Men in the Medieval West, J. Murray dir., New York, Garland, 1999, p. 73-91.
21 LAH, p. 56-57, l. 253-257 et p. 76-77, l. 577-606. Sur le rôle symbolique des testicules dans l’expression de l’honneur masculin, voir J. Pitt-Rivers, ouvr. cité, particulièrement p. 49 et 61.
22 Roscelin, Epistola XV, Ad Petrum Abaelardum, dans PL, 178, 370D. Pour Martin Irvine, cette remise en cause de sa moralité et de celle de son enseignement en lien avec celle de son identité sexuelle serait également sous-jacente dans les attaques virulentes de Bernard de Clairvaux : voir M. Irvine, art. cité, p. 94.
23 LAH, p. 80-81, l. 654 et p. 212-213, l. 383-413 (Origène) ; p. 100-103 et p. 118-119, l. 1308-1321 (Jérôme) ; voir également J. Murray, art. cité, p. 74-75.
24 Outre l’article déjà cité de Martin Irvine, voir également B. G. Wheeler, « Origenary fantasies. Abelard’s castration and confession », art. cité, p. 107-128.
25 R. M. Karras, From Boys to Men, ouvr. cité, 2003, p. 20 et suivantes.
26 LAH, p. 42-45, l. 26-28.
27 Otton de Freising, Gesta Frederici, F. J. Schmale éd., Berlin, Wissenschaftliche Buchgeselleschaft, 1965, p. 224-226 ; Guillaume de Lorris et Jean de Meun, Le Roman de la Rose, v. 8763-8836, Armand Strubel éd. et trad., Paris, Lettres gothiques, 1992, p. 476-479 ; François Villon, « Ballade des dames du temps jadis », Testament, v. 337-340, Œuvres, André Lanly éd. et trad., Paris, Honoré Champion, 1992, p. 106-107.
28 W. J. Courtenay, Parisian Scholars in the Early Fourteenth Century. A Social Portrait, Cambridge, Cambridge University Press, 1999, p. 53. Il convient néanmoins de souligner que des femmes exerçaient le métier de libraire ou d’enlumineur jurés de l’université de Paris et profitaient à ce titre de certains privilèges universitaires au même titre que leurs homologues masculins. Voir K. Fianu, « Les femmes dans les métiers du livre à Paris (XIIIe-XVe siècle) », La collaboration dans la production de l’écrit médiéval. Actes duXIIIe colloque du Comité international de paléographie latine, Herrad Spelling dir., Paris, École des chartes, 2003, p. 459-481.
29 J. A. McNamara, « The Herrenrage: the restructuring of the gender system, 1050-1150 », art. cité, p. 19. Sur les mécanismes et les critères de la promotion sociale au sein des universités médiévales, nous nous permettons de renvoyer à Antoine Destemberg, « Un système rituel ? Rites d’intégration et passages de grades dans le système universitaire médiéval (XIIIe-XVe siècle) », Cahiers de Recherches Médiévales, no 18, 2009, p. 113-132.
30 On relève ainsi plusieurs sanctions ou procès intentés par l’université de Paris devant le Parlement contre des femmes coupables d’exercice illégal de la médecine : c’est le cas de Claire de Rouen en 1312, de Jacqueline Felicie en 1322, de Perette la Petonne en 1410 ou encore Jeanne la Poqueline en 1428. Sur ces cas, voir P. Kibre, « The Faculty of Medicine at Paris, charlatanism and unlicenced medical practice in the later Middle Ages », Bulletin of the History of Medicine, no 27, 1953, p. 1-20, et L. Guarrigues, « Les professions médicales à Paris au début du XVe siècle. Praticiens en procès au Parlement », Bibliothèque de l’École des chartes, no 156, 1998, p. 317-367. Pour une réflexion sur la masculinisation de la profession médicale au Moyen Âge, voir J. F. Benton, « Trotula, women’s problems and the professionalization of medicine in the Middle Ages », Bulletin of the History of Medicine, no 59, 1985, p. 30-53.
31 Voir les statuts du collège de Laon 11 mai 1327, C. Fabris, Étudier et vivre à Paris au Moyen Âge. Le collège de Laon (XIVe-XVe siècles), Paris, École des chartes, 2005, p. 56-57 et 314. Mêmes précautions en juin 1484 au collège de Sorbonne : R. Marichal dir., Le Livre des prieurs de la Sorbonne (1431-1485), Paris, Aux Amateurs de Livres, 1987, no 1032, p. 270-271.
32 Sur l’usage de la catégorie du genre appliquée aux organisations sociales ou politiques, voir F. Thébaud, « Genre et histoire en France. Les usages d’un terme et d’une catégorie d’analyse », Hypothèses 2004. Travaux de l’École doctorale d’histoire de l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, Paris, Publications de la Sorbonne, 2005, p. 272-273.
33 O. Weijers, Terminologie des universités au XIIIe siècle, Rome, ED del’Ateneao, 1987, p. 15-34 et 52-62.
34 Chartularium Universitatis Parisiensis, H. Denifle et É. Châtelain éd., 4 vol., Paris, 1888-1897 (dorénavant abrégé CUP), III, no 1520, p. 404 ; CUP III, no 1572, p. 518 ; CUP III, no 1557, p. 488.
35 CUP II, no 732, p. 188 ; CUP II, no 1179, p. 657.
36 CUP III, no 1619.
37 CUP II, no 899, p. 333 et p. 336.
38 CUP I, no 515, p. 618.
39 Pour l’Université « fille du roi », voir S. Lusignan, « Vérité garde le roy ». La construction d’une identité universitaire en France (XIIIe-XVe siècle), Paris, Publications de la Sorbonne, 1999, p. 267-270 et 277-281 ; le premier emploi de cette expression à été avancée en juillet 1353 par T. Kouamé, Le Collège de Dormans-Beauvais à la fin du Moyen Âge. Stratégies politiques et parcours individuels à l’Université de Paris (1370-1458), Leyde/Boston, Brill, 2005, p. 36-37. Pour l’expression de l’Université « fille du pape », voir CUP II, no 1164 (21 janvier 1349), p. 629 et CUP III, no 1519 (1385), p. 399.
40 Un mécanisme similaire a été souligné pour l’institution ecclésiale dès le XIIe siècle par J. Baschet, Le Sein du père. Abraham et la paternité dans l’Occident médiéval, Paris, Gallimard, 2000, p. 52-62. Comme pour de nombreuses communautés ecclésiastiques, la figure tutélaire de la Vierge apparaît sur les sceaux communautaires universitaires, et notamment celui de l’université de Paris de 1292.
41 O. Blanc, Parades et parures. L’invention du corps de mode à la fin du Moyen Âge, Paris, Gallimard, 1997.
42 Nous nous permettons de renvoyer à A. Destemberg, « Le paraître universitaire médiéval, une question d’honneur (XIIIe-XVe siècles) », Paraître et apparences en Europe occidentale du Moyen Âge à nos jours, I. Paresys dir., Villeneuve d’Ascq, Presses Universitaires du Septentrion, 2008, p. 134-149.
43 La première interdiction de ce type destinée aux étudiants Parisiens émane du pape Honorius III et date du 31 mai 1222 : CUP I, no 45, p. 103. Celle-ci est par la suite relayée dans les collèges, ainsi celui de Cluny dès 1343 (CUP II, p. 525-526, n.), ou encore le collège de Marmoutier, dont les statuts de 1390 associent la nécessité du port de vêtements décents et la prohibition des armes ; voir M. Félibien et G. A. Lobineau, Histoire de la ville de Paris, 5 vol., Paris, 1725, t. 3, p. 396, art. vi. ailleurs, citons à titre d’exemples et de façon non exhaustive, la décision de l’évêque de Maguelone du 2 avril 1320 interdisant aux étudiants de Montpellier de porter des armes, relayée le 20 juillet 1339 par l’article vii des statuts de l’université de droit de Montpellier : voir marcel Fournier, Les statuts et privilèges des universités françaises depuis leur fondation jusqu’en 1789, 4 vol., Paris, 1890-1894 (dorénavant abrégé Fournier), t. 2, no 923 et 947, art. vii) ; les statuts de l’université d’Orléans du 28 mai 1323 et du 24 mars 1337 (Fournier, t. 1, no 80 et 121).
44 G. Levi et J.-C. Schmitt dir., Histoire des jeunes en Occident, t. 1 : De l’Antiquité à l’époque moderne, Paris, Seuil, 1996, p. 256-258.
45 Voir note 5.
46 Voir également, R. M. Karras, « Separating the men from the goats. Masculinity, civilization and identity formation in the medieval university », Conflicted Identities and Multiple Masculinities, ouvr. cité, p. 189-213.
47 J. Rossiaud, La prostitution médiévale, Paris, Flammarion, 1988, p. 33-36.
48 Jacques de Vitry, Histoire occidentale, G. Duchet-Suchaux, J. Longère éd. et trad., Paris, Cerf, 1997, p. 85.
49 B. Geremek, Les Marginaux Parisiens auxXIVe etXVe siècles, Paris, Flammarion, 1976 (réédition 1991, p. 255-290) ; J. Favier, Paris auXVe siècle, Paris, nouvelle Histoire de Paris, 1997, p. 81.
50 CUP III, no 1238, p. 53-54.
51 La présence de prostituées au sein du collège de Sorbonne est à plusieurs reprises attestée à la fin du XVe siècle : voir R. Marichal, Le Livre, ouvr. cité, no 281, 368, 865 et 1032. Pour des exemples de mesures répressives contre ce phénomène, voir les statuts de 1315 du collège de Bayeux (M. Félibien et G. a. Lobineau, Histoire de la ville de Paris, ouvr. cité, t. 5, p. 627, art. 26), ceux de 1427 du collège de Séez (ibid., p. 693, art. xxii), ceux de 1327 du collège de Laon (C. Fabris, Étudier, ouvr. cité, p. 313-314, art. 2) ou encore du collège de Skara, en 1404 (Auctarium chartularii Universitatis Parisiensis, 6 vol., Paris, 1893-1964, t. 2, p.xi-xii).
52 Jean Gobi, La Scala Coeli de Jean Gobi, M.-A. Polo de Beaulieu éd., Paris, IRHT/CNRS, 1991, no 689a ; Étienne de Bourbon, De septem donis : anecdotes historiques, légendes et apologues tirés du recueil inédit d’Etienne de Bourbon, Albert Lecoy de la Marche éd., Paris, 1877, no 94, 467, 472 ; H. Platelle, Les Exemples du « Livre des abeilles » : une vision médiévale, Turnhout, Brepols, 1997, no 154, p. 199-200 ; M. M. Banks, An Alphabet of Tales. An English 15th Century Translation of the Alphabetum narrationum of Etienne de Besançon, Londres, 1904-1905, no 257 et 562 ; Le rire du prédicateur. Récits facétieux du Moyen Âge, Albert Lecoy de la Marche éd. et trad., réédition Jacques Berlioz, Turnhout, Brepols, 1992, no 145.
53 A. Vauchez, La sainteté en Occident aux derniers siècles du Moyen Âge, d’après les procès de canonisation et les documents hagiographiques, Rome, École française de Rome, 1981, p. 400-402 et 466-468. Cet épisode de la vie de Thomas d’Aquin est raconté par son hagiographe, Guillaume de Tocco, L’Histoire de saint Thomas d’Aquin, trad. C. le Brun-Gouanovic, Paris, Cerf, 2005, p. 37-39.
54 CUP I, no 473, p. 553. Voir R. Hissete, Enquête sur les 219 articles condamnés à Paris le 7 mars 1277, Paris, Vrin, 1977, et plus récemment D. Piché, La Condamnation Parisienne de 1277, Paris, Vrin, 1999.
55 A. De Libera, Penser au Moyen Âge, Paris, Seuil, 1991, p. 181-245 : ces thèses prenaient appui sur l’ouvrage d’André le Chapelain, le De amore, écrit vers 1181-1186 et très répandu dans le Paris intellectuel des années 1270.
56 Voir pour Paris, le sermon de Philippe le Chancelier, prononcé en 1227-1231 (J. B. Schneyer, Die Sittenkritik in den Predigten Phillips des Kanzlers, Münster, Aschendorff, 1963, p. 90-91), la Vie de Guillaume de Seigneulay, évêque de Paris en 1220-1223 (Historia episcoporum Autissiodorensium, Cap. LIX, De Guillelmo episcopo, Recueil des Historiens des Gaule et de la France, t. XVIII, 1879, p. 740-741), ou encore l’excommunication prononcée par l’official de Paris le 11 janvier 1269 (CUP I, no 426, p. 481-482) ; même constat à Orléans, en juin 1307 (Fournier, t. 1, no 23, p. 22) ou encore dans un mandement de Charles V du 6 octobre 1378 (Jacques Soyer, « Un mandement de Charles V concernant les désordres causés par les étudiants de l’université d’Orléans », Bulletin de la Société archéologique et historique de l’Orléanais, no 23, 1936-1939, p. 280-282).
57 C. Gauvard, « De grace especial ». Crime, État et société en France à la fin du Moyen Âge, 2 vol., Paris, Publications de la Sorbonne, 1991, t. 1, p. 360-367.
58 J. Rossiaud, La prostitution médiévale, ouvr. cité, p. 36-40.
59 J. Rossiaud, « Fraternité de jeunesse et niveaux de culture dans les villes du Sud-est à la fin du Moyen Âge », Cahiers d’histoire, no 21, 1976, p. 67-102. Il existait une cour abbatiale à l’université d’Avignon au XVe siècle : voir Fournier, t. 2, no 1343.
60 À Montpellier, les statuts de l’université de droit du 9 octobre 1429 (Fournier, t. 2, no 1108, p. 198-199) usent du terme de larvaria pour désigner le Charivari ; pour Aix-en-Provence, voir le statut détaillé de 1420-1440 (Fournier, t. 3, no 1582, § 36). Sur les charivaris, voir H. Rey-Flaud, Le Charivari. Les rituels fondamentaux de la sexualité, Paris, Payot, 1985 ; J. Le Goff et J.-C. Schmitt dir., Le Charivari, Actes de la Table ronde organisée à Paris (25-27 avril 1977) par l’EHESS et le CNRS, Paris/New York/La Haye, Mouton, 1981 ; C. Gauvard et A. Gokalp, « Les conduites du bruit et leur signification à la fin du moyen Âge : le charivari », Annales ESC, 1974, p. 693-704 ; N. Z. Davis, « The reason for a misrule, youth groups as Charivari in 16th century France », Past and Present, février 1971, p. 41-75.
61 À Orléans, un privilège fiscal du 28 janvier 1384 introduit clairement la distinction entre écoliers mariés ou non : Fournier, t. 1, no 199.
62 Au milieu du XIVe siècle, les candidats au baccalauréat ès arts à Sainte-Geneviève devaient également prêter serment de ne pas être marié : CUP II, no 1185, p. 678. Une lettre de l’official de Paris datée du 24 avril 1290, atteste du divorce d’un écolier Parisien et régent à la faculté des arts, Jean dit Florie, et que ce dernier reconnaissait le droit d’être privé de sa régence s’il revenait sur ce divorce : CUP II, no 565, p. 39.
63 CUP II, no 909, p. 341 : dispense de Jean XXII pour Maynino de Maneriis, le 5 avril 1331 ; CUP III, no 1403, p. 222-223 : dispense de Grégoire XI pour Guillaume le Bourreau, le 24 mai 1375.
64 CUP IV, no 2690, p. 723.
65 D. Jacquart, Le milieu médical en France duXIIe auXVe siècle, Paris, Droz, 1981.
66 R. Mazo Karras, Sexuality in Medieval Europe. Doing unto others, New York, Routledge, 2005.
Auteur
ORCID : 0000-0002-3411-5119
Maître de conférences à l’université d’Artois. Il a soutenu une thèse qui vient d’être publiée sous le titre L’honneur des universitaires, Paris, PUF, 2013. Il a également publié, entre autres, « Le paraître universitaire médiéval, une question d’honneur (XIIIe-XVe siècle) », I. Paresys dir., Paraître et apparences en Europe occidentale du Moyen Âge à nos jours, Villeneuve d’Asq, Presses du Septentrion, 2008 ; « Morts violentes et lieux de mémoire : les réparations faites à l’Université de Paris à la fin du Moyen Âge », Traverse. Zeitschrift für Geschichte, no 2, 2008 ; « Un système rituel ? Rites d’intégration et passages de grades dans le système universitaire médiéval (XIIIe-XVe siècle) », Cahiers de recherche médiévale, no 18, 2009.
Le texte seul est utilisable sous licence Licence OpenEdition Books. Les autres éléments (illustrations, fichiers annexes importés) sont « Tous droits réservés », sauf mention contraire.
Acteurs et territoires du Sahel
Rôle des mises en relation dans la recomposition des territoires
Abdoul Hameth Ba
2007
Les arabisants et la France coloniale. 1780-1930
Savants, conseillers, médiateurs
Alain Messaoudi
2015
L'école républicaine et l'étranger
Une histoire internationale des réformes scolaires en France. 1870-1914
Damiano Matasci
2015
Le sexe de l'enquête
Approches sociologiques et anthropologiques
Anne Monjaret et Catherine Pugeault (dir.)
2014
Réinventer les campagnes en Allemagne
Paysage, patrimoine et développement rural
Guillaume Lacquement, Karl Martin Born et Béatrice von Hirschhausen (dir.)
2013