Les marqueurs de masculinité entre Antiquité et Moyen Âge en Occident (IVe-VIIe siècle)
p. 95-108
Texte intégral
Genre et identité ethnique
1La période qui s’est écoulée en occident entre le IVe et le VIIe siècle apparaît toujours dans l’imaginaire collectif comme celle des « grandes invasions ». Les manuels du second degré ont continué jusqu’à cette année (la période a depuis disparu des programmes scolaires), à expliquer la disparition de l’empire romain d’occident par l’invasion de tribus venues des confins du monde connu et sans contact avec les populations environnantes. Ils ont contribué à relayer l’idée d’un déplacement massif d’une population endogamique sur des milliers de kilomètres1. Depuis la Seconde Guerre mondiale, la plupart des spécialistes ont pourtant récusé cette interprétation, en fonction de laquelle s’étaient construits les discours nationalistes et racistes des XIXe et XXe siècles, et ils ont mis en avant la flexibilité de l’identité ethnique2.
2Dans la perspective dite de l’« ethnogenèse »3, la représentation des groupes ethniques comme lignée endogamique n’est qu’une fiction politique au service du pouvoir royal. Loin de correspondre à des groupes génétiquement distincts, les peuples barbares seraient principalement fondés sur le sentiment d’appartenance de leurs membres, cristallisé autour de traditions anciennes. Ainsi, les peuples du haut Moyen Âge, considérés comme des communautés de tradition, se seraient constitués en plusieurs étapes, à partir de petits groupes prestigieux porteurs d’un noyau de traditions ethniques. La formation d’un grand peuple se serait faite par la diffusion de ces traditions et du sentiment d’appartenance que ces dernières engendrent4.
3Du Ve au VIIe siècle, les bouleversements ne proviendraient donc pas de la submersion de la romanité par des cultures barbares, mais d’une recomposition politique, le pouvoir se justifiant non plus comme une partie du pouvoir impérial, mais comme un pouvoir hérité au sein d’une identité ethnique particulière. Ce discours a permis de légitimer l’existence de royaumes séparés sur les anciens territoires de l’Empire romain d’Occident. Pour prendre l’exemple de la Gaule franque au VIIe siècle, l’immense majorité de la population était constituée de descendants de Gallo-romains qui ont progressivement adopté une identité franque. Ainsi, l’identité ethnique ne serait qu’une des composantes de l’identité sociale de chaque individu, et comme telle, l’objet de constructions à la fois individuelles et collectives. La question de l’identité ethnique rejoint alors celle du genre, dans la mesure où les sources présentent comme une évidence génétique – on serait franc, alaman ou goth de naissance – ce qui relève d’une construction au gré des circonstances. De même, la différence des sexes présente comme une évidence naturelle une distinction construite par la société et l’individu.
4Une fois rejetée l’hypothèse de la séparation biologique, l’identité ethnique, tout comme le corps sexué, apparaît comme l’objet malléable de discours de pouvoir et d’interprétations concurrentes5. Du IVe au VIIe siècle, les sources textuelles, pour le genre comme pour l’identité ethnique, peuvent être complétées par les fouilles archéologiques, car de nombreuses tombes comportaient un important mobilier funéraire. La plupart des discours, comme l’interprétation traditionnelle des archéologues6, insistent sur les frontières culturelles et la hiérarchie des sexes, alors que de profondes transformations affectent la culture comme le genre, les pratiques se révélant bien plus ambiguës que les affirmations théoriques7. La réorganisation politique en royaumes séparés nécessitait, en effet, la refondation de la société chrétienne et l’élaboration de nouveaux modèles culturels. Pourtant, le modèle de masculinité des élites, le seul dont témoignent nos sources8, changea fort peu. Romains et Barbares partageaient la même vision de l’homme de pouvoir. Les signes de virilité évoluèrent, certes, durant la période envisagée, mais non le modèle masculin de référence, ce qui a contribué à la rapide fusion des élites9.
Le discours ethnographique romain
5Le discours romain sur les Barbares est celui de la différence infranchissable. L’homme romain idéal incarne les vertus militaires et politiques10. Il est de naissance libre et se consacre à l’État. Durant la période impériale, il est toujours représenté vêtu d’une toge qui l’inscrit dans une tradition remontant à la fondation de Rome. En effet, suivant Virgile, les Romains sont « les maîtres du monde, une nation en toge »11. Se faire représenter en toge, appartenir à la gens togata, c’est marquer son appartenance à une élite masculine, appelée à dominer le monde et se perpétuer par ses fils12. Les autres hommes se répartissent en palliati, ceux qui portent le pallium, un manteau court caractérisant les Romains ordinaires et les Grecs, et en bracati, ceux qui portent les braies, c’est-à-dire les Barbares appelés à reconnaître l’autorité de Rome13. Pour un homme romain, il est profondément insultant d’être assimilé aux Barbares. Ainsi, au tournant du IIe siècle de notre ère, Juvénal, s’en prenant à Catilina et Céthégus, les accuse de s’être comportés, malgré leurs familles prestigieuses, en « fils des porteurs de braies, en descendants des Sénones »14, et ce contre la romanité incarnée par un homme nouveau, Cicéron.
6Les éléments du costume masculin, impliquant une hiérarchie entre les hommes15, se retrouvent dans les descriptions romaines des Barbares : chaque groupe ethnique se voit attribuer des habits spécifiques, qui soulignent son éloignement du Romain. Cette tradition ethnographique, classant les peuples suivant leurs costumes, est ainsi résumée par Isidore de Séville au début du VIIe siècle dans un chapitre qui s’intitule « des modes de vie de chaque peuple » :
Tous les peuples possèdent leur propre costume, comme les parthes leurs pantalons, les Gaulois leurs linnae, les Germains leurs casques de fourrure, les Hispaniques leurs tringes, les Sardes leurs vêtements de peau.16
7Outre leur vêtement, les Barbares sont supposés se distinguer par un traitement particulier de la pilosité17. Ainsi, suivant Ammien Marcellin, les Alamans que combattent les armées romaines au milieu du IVe siècle ont les cheveux longs, teintés en rouge18. Une telle description avait probablement une base réelle, mais il faut aussi souligner sa fonction littéraire, car elle permet de mettre en scène la terrifiante sauvagerie du Barbare et l’héroïsme des soldats romains qui lui résistent :
Les Germains se précipitèrent avec plus de hâte que de prudence ; brandissant leurs armes de la main droite, ils fondirent sur nos escadrons de cavalerie, grinçant des dents affreusement. Leurs cheveux flottants se hérissaient avec plus de fureur que d’habitude, et de leurs yeux rayonnait une sorte de rage.19
8L’étrangeté repoussante du Barbare, illustrée par ses pratiques capillaires, est aussi un des thèmes récurrents de l’œuvre de Sidoine Apollinaire20. Il détaille ainsi la coiffure de ces Saxons qui multiplient les incursions dans les provinces gauloises au milieu du Ve siècle :
La ligne de ses cheveux est reportée très haut par le tranchant des ciseaux, insatisfaits de retenir leurs morsures aux limites extrêmes du cuir chevelu, et les cheveux étant ainsi coupés au ras de la peau, le crâne en est réduit et le visage allongé.21
9Une telle coiffure n’était pourtant pas générale, puisque suivant Grégoire de tours, les Saxons pouvaient jurer de ne couper ni leur barbe ni leurs cheveux avant de s’être vengé22. Il semble donc que les Barbares devaient arborer une coiffure signalant leur appartenance ethnique, mais que ce signe de distinction corporelle pouvait faire défaut sans remettre en cause leur identité. La distinction par la coiffure pourrait donc être plus un a priori théorique que réel.
10Cette différence d’apparence des hommes barbares signale tout ce qui les éloigne de la seule civilisation reconnue, celle du monde romain. Ainsi, la description des Alains que fait Ammien Marcellin vise d’abord à les opposer physiquement aux Romains, mais c’est pour mieux signaler leur ignorance de l’agriculture (ils se livrent au brigandage et à la chasse) et surtout leur amour de la guerre :
Si les hommes tranquilles et pacifiques se plaisent au repos, eux, en revanche, n’aiment que les périls et les guerres. Là, on tient pour heureux celui qui a rendu l’âme au combat, car ceux qui atteignent la vieillesse et ceux qui ont quitté le monde par une mort accidentelle passent pour des lâches et des dégénérés que l’on accable d’injures atroces. Et rien ne les enorgueillit davantage que d’avoir tué un homme, quel qu’il soit, d’avoir, à titre de dépouilles glorieuse, décapité ceux qu’ils ont tués, et de leur arracher la peau pour en faire des phalères qu’ils accrochent à leurs montures de combat.23
11Les Alain sont donc discrédités non pas par leur manque de capacité guerrière, mais par leur incapacité à construire la paix. Les peaux humaines qu’ils sont censés exhiber montrent leur éloignement de la communauté civilisée. Ce discours romain reconnaît au Barbare des capacités de combat mais lui dénie toute capacité politique, ce qui en fait un ennemi, mais non un rival. Le Barbare possède certaines des qualités des hommes d’élite, mais celles-ci restent incomplètes, car il est incapable de maîtriser ses pulsions guerrières. Cette présentation classique de l’opposition entre le Romain civilisé, qui soumet son ardeur guerrière à un idéal politique, et le Barbare sauvage, incapable de se maîtriser, a néanmoins évolué bien avant la disparition de l’Empire romain d’Occident tout comme a évolué l’apparence des hommes de pouvoir.
Les hommes de pouvoir sous le Bas-Empire
12Au IVe siècle, l’élite masculine romaine continue à être assimilée aux porteurs de toge, comme le montrent les représentations publiques civiques sur la colonne de Théodose24. Mais le costume des empereurs devient l’objet de tensions, ainsi que le révèle l’Histoire Auguste. Ce texte, composé dans la dernière décennie du IVe siècle, est d’un usage délicat, car ses descriptions des empereurs sont essentiellement ironiques. Toutefois, les mauvais empereurs se signalent systématiquement par des habits inappropriés25. Ainsi, le port en public de la dalmatique, une longue tunique ample, fait partie des extravagances reprochées à Commode26. L’insistance de l’auteur sur les habits impériaux montre l’existence d’un débat politique sur ce point qui révèle à la fois un changement et les résistances à celui-ci.
13En effet, de nouvelles représentations des hommes de l’élite romaine apparaissent à la fin du IVe siècle27. Ainsi, le vicaire de la Ville de Rome, Rufius Probianus, se fait représenter de deux manières sur un diptyque composé vers 400. Les deux tablettes en ivoire sculpté représentent le magistrat dans l’exercice de ses fonctions judiciaires, assis sur un siège élevé. D’un côté, son fils et lui-même sont représentés en toge. De l’autre, ils portent une longue tunique étroite, des bottes et un lourd manteau, la chlamyde. Ce manteau qui va jusqu’à la cheville était porté par les officiers de haut rang. Au début du IVe siècle de notre ère, de tels éléments du costume étaient réservés au cadre militaire et étaient inacceptables dans un cadre civil. Une constitution impériale publiée en 382 interdit ainsi la chlamyde aux sénateurs dans l’enceinte de Constantinople28. Au contraire, la complémentarité des deux représentations du diptyque de Probianus montre son adoption par les hommes de l’administration civile, la militia inermis29. Le costume des fonctionnaires civils reste néanmoins en partie différent de celui des officiers, comme le montre le diptyque du général d’origine barbare Stilichon, régent d’occident entre 395 et 408, composé à la même époque que le précédent. Une tablette d’ivoire représente Stilichon lui-même : un homme barbu, revêtu d’une longue chlamyde brodée qui laisse paraître, en dessous, une tunique également brodée, à manches longues et étroites. Sa tunique s’arrête au genou, ce qui montre son statut militaire. Sur l’autre tablette, sont représentés la femme et le fils de Stilichon. Probianus et Stilichon portent tous deux une tunique à manches longues alors que ces dernières étaient condamnées comme un signe de faiblesse féminine à l’époque classique. Aulu-Gelle affirmait ainsi au milieu du IIe siècle : « Qu’un homme use de tuniques longues descendant au-delà des bras sur la naissance des mains presque jusqu’aux doigts, était déshonorant à Rome et dans tout le Latium », et il rappelait que Scipion l’Africain, comme Virgile, condamnaient les tuniques de cette sorte comme efféminées et infamantes30.
14Ces sources nous montrent que l’habit militaire romain a absorbé des éléments du répertoire barbare et que, de plus, les officiers civils ont adopté ce costume, désormais considéré comme caractéristique des militaires romains. Ainsi, une disposition du code Théodosien, promulguée sous l’autorité de Stilichon, interdit, sous peine d’exil perpétuel, le port à Rome de bottes montant jusqu’au genou, les tzangae, et des braies31. Il ne s’agit pas de réaffirmer une frontière entre le costume des hommes romains et des Barbares, mais de refuser l’ostentation de l’habit militaire dans la ville qui symbolisait le pouvoir du Sénat32. Néanmoins, porter un caleçon long visible, comme Stilichon sur son diptyque, paraissait réservé aux militaires au début du Ve siècle. En revanche, cent cinquante ans plus tard, l’empereur byzantin Justinien lui-même, sur la fresque de Ravenne, est représenté avec la chlamyde, une tunique courte et un caleçon long noir, ce qui montre l’adoption complète du costume militaire au sein de l’élite impériale, même dans un contexte civil et religieux.
15L’opposition entre les anciens territoires romains occidentaux et orientaux sur les signes de virilité ne s’organise donc pas autour du costume masculin. Elle apparaît, en revanche, à propos des eunuques. Claudien s’emporte ainsi contre Eutrope :
Si les eunuques doivent établir les jugements et déterminer les lois, que les hommes cardent la laine et vivent comme les amazones, que la confusion et la licence détruisent l’ordre naturel.33
16À ses yeux, les eunuques ne sauraient rivaliser avec les hommes pour l’exercice du rôle des hommes, établir les lois et les jugements. Pourtant, des responsabilités importantes pouvaient être confiées par l’empereur à des eunuques qui lui devaient leur position sociale. Ainsi, c’est un eunuque, le général Narsès, qui remporta en Italie pour l’empereur Justinien la victoire décisive de Busta Gallorum en 552 contre les Goths, mais il connut ensuite la disgrâce. Deux sources occidentales du VIIe siècle, la Chronique d’Isidore de Séville34 et celle de Frédégaire, considèrent qu’il livra alors l’Italie aux Lombards par crainte de l’impératrice :
Peu après, le patrice Narsès craignait les menaces de l’auguste Sophie, femme de l’empereur Justin, car celle-ci lui avait envoyé une préparation à partir d’or, afin qu’il file comme une femme, puisqu’il était eunuque, et qu’il dirige les fileuses, non le peuple.35
17Malgré ses succès militaires, l’eunuque était désormais refusé en Occident comme membre de l’élite masculine et renvoyé aux travaux domestiques féminins.
Signes de masculinité romains et barbares
18Du IVe au VIe siècle, les hommes de pouvoir dans l’Empire romain se définissent toujours par le service de l’État. Mais la place des capacités militaires est reconnue comme déterminante dans l’arène civique et les signes extérieurs de masculinité intègrent désormais des éléments nouveaux, initialement issus des régions périphériques de l’Empire. Manches longues et caleçon long ne caractérisent plus le Barbare ou le Romain efféminé, mais l’élite masculine au pouvoir.
19Dans ce contexte, où les capacités militaires prennent de plus en plus d’importance pour définir les hommes, la différence entre les combattants romains et barbares s’estompe. Au début du VIe siècle, Ennode de Pavie évoque ainsi un certain Jovinien qui portait une barbe gothique et un manteau (une lacerna) de type romain, ce qui lui permettait de jouer sur son appartenance aux deux groupes et ce qui reflétait finalement la dualité du royaume fondé en 493 par Théodoric en Italie : dirigé par des rois Goths mais s’appuyant sur le Sénat et des membres de l’aristocratie romaine, comme Cassiodore36.
20Ce sont les fouilles qui, au-delà des stéréotypes, nous permettent le mieux d’appréhender l’apparence des chefs barbares. À sa mort en 481 ou 482, Childéric est roi des Francs, mais c’est aussi un allié militaire de Rome et un agent du pouvoir romain qui administre la province de Belgique Seconde37. Son sceau nous le montre avec une cuirasse et un manteau militaire romain, qui mettent en valeur son intégration dans le système politique et militaire impérial, de même que l’existence de cet anneau sigillaire. En revanche, ses nattes et son titre de roi rappellent une autre source de légitimité de son pouvoir. Par de telles représentations, ces hommes se posent en rivaux de l’élite masculine romaine. Leur apparence n’en diffère qu’en partie mais souligne l’existence d’une source de légitimité extérieure à Rome. Toutefois, ces barbares revendiquent le même monopole de la violence guerrière pour l’établissement de la paix et du droit écrit, ce que montre Childéric qui possède un sceau pour sceller des documents officiels.
21Le modèle de masculinité dominant n’a donc que très peu changé, en glissant seulement vers des références à une autre histoire que celle de l’Empire romain. Mais la violence guerrière est toujours exaltée dès lors qu’elle est utilisée dans la construction d’une autorité politique. Quant à la référence à une origine sacrée du pouvoir royal, ce que l’on a appelé Sakralkönigtum, elle semble désormais une construction historiographique datée qui n’est pas étayée par les sources38.
22Les tombes masculines des espaces barbares confirment cette image des hommes d’élite. La présence très courante des armes y révèle la structuration des groupes barbares autour d’une élite masculine guerrière. La théorie de l’ethnogenèse s’interroge quant à la diffusion du sentiment d’appartenance ethnique en dehors de ce petit groupe privilégié. La question de l’appartenance ethnique de ces guerriers a donc été interprétée avec beaucoup plus de prudence que pour les tombes féminines, car les femmes sont le plus souvent présentées comme les icônes passives de l’identité ethnique39. De très nombreux objets accompagnent les armes, qui permettent de déduire le genre, mais aussi le statut, le rang, la fonction d’un individu… la possibilité de distinguer les différents éléments de l’identité sociale grâce aux objets a suscité depuis 2004 un intense débat parmi les archéologues du haut Moyen Âge40.
23Prenons pour exemple l’une des trois tombes récemment découvertes à Saint-Dizier, en Haute-Marne, en 2002. Il s’agit de trois sépultures privilégiées du second tiers du VIe siècle. Deux hommes et une jeune femme ont bénéficié d’un apprêt funéraire complexe, dont les formes sont sans rapport avec les usages locaux, qui restent encore très inspirés par les coutumes gallo-romaines. La différence de genre est marquée par la panoplie guerrière de la haute élite barbare (scramasaxe et bouclier, mais surtout angon et francisque) présente dans les deux tombes masculines, alors que la femme est parée d’un ensemble de bijoux et d’une aumônière. En outre, un cheval est enterré à proximité immédiate de la tombe du plus jeune des chefs. La masculinité représentée dans ces deux tombes passe donc tout d’abord par les capacités militaires, symbolisées par de nouvelles armes, et par la cavalerie. La construction des capacités guerrières se faisait dès le plus jeune âge, puisque le jeune garçon d’environ six ans enterré vers 540 près de la cathédrale de Cologne possédait un casque, un bouclier et un scramasaxe adaptés à sa taille41.
24À Saint-Dizier, de fines runes germaniques sont gravées au dos de l’épée du jeune homme. Elles forment le mot alu qui peut signifier « puissant », « protection » ou bien « bière »42. Les trois individus sont probablement chrétiens, vu la datation des tombes, et la bague en forme de croix que porte la femme. Mais l’hypothèse d’un lien magique, ou mystique, entre le guerrier et son arme reste possible, d’autant que les runes étaient gravées sur la face cachée de l’épée. La façon dont de très nombreuses épées du Haut Moyen Âge ont été plusieurs fois ré-assemblées montre qu’il s’agissait d’objets à la charge symbolique suffisamment forte pour que chacune ait sa propre histoire, en partie connue de son détenteur43. Néanmoins, le mot alu peut aussi signifier « bière ». Or, cette tombe rassemble aussi un chaudron et des coupes en érable destinées à cette boisson. La virilité du défunt pourrait alors être exaltée en rappelant l’existence d’une fraternité d’hommes, soudée dans les boissons alcoolisées44. Cependant, la présence de fine vaisselle romaine rappelle aussi qu’il peut s’agir d’un signe de richesse, et pas nécessairement d’une marque du genre ou de l’appartenance ethnique. Dans la tombe du jeune homme de Saint-Dizier, l’élément le plus prestigieux est l’anneau de dignité scellé sur le pommeau de l’épée, qui indique que son détenteur faisait sans doute partie de la garde personnelle du souverain. Pour les Romains comme pour les Barbares, l’élément distinctif de l’élite masculine était toujours son service du pouvoir central.
Hommes et femmes
25Un élément nouveau apparaît avec la présence de la femme et du fils de Stilichon sur son diptyque alors que Probianus ne représentait que ses fils. Cela tient à la situation particulière de Stilichon : alors qu’il était d’origine vandale, il avait épousé la nièce de l’empereur Théodose, avant de devenir le beau-père de l’empereur Honorius. Sa femme marquait donc son intégration dans l’élite romaine et lui apportait le prestige qui manquait à sa propre famille. Mais le système cognatique des grandes familles barbares faisait également de l’épouse non seulement la garantie de la filiation par ses mœurs honorables, mais aussi le symbole de l’insertion dans un réseau aristocratique particulier45. Dans ce contexte, la noble extraction de sa femme devenait pour Stilichon un nouveau signe de virilité et la condition d’appartenance à l’élite masculine. Le comportement sexuel des rois mérovingiens, qui pratiquaient la « monogamie sérielle » et s’unissaient même à des esclaves, prouve néanmoins la possible transgression de ce modèle. De telles pratiques, systématiquement condamnées dans les écrits de l’époque, auraient souligné le statut particulier des descendants de Clovis, illustré aussi par le port de cheveux longs. Mais il correspondait peut-être aussi à la nécessité d’un autre signe de virilité : avoir des fils46.
26Si l’origine de la femme devient plus prestigieuse au début du Moyen Âge, la répartition des rôles de genre au sein de l’élite dominante varia peu entre antiquité et Moyen Âge. J’en veux pour exemple l’Origo gentis Langobardorum, cet extraordinaire récit des origines, aux éléments païens, écrit pour les Lombards entre 661 et 688. Dans une île nordique de Scadanan, Winiles et Vandales s’affrontent sous les yeux du dieu Godan et de sa femme Frea :
Alors Ambri et Assi, ducs des Vandales, prièrent Godan, qu’il leur donnât la victoire sur les Winniles. Godan leur répondit : « Ceux que je verrai les premiers au lever du soleil, à ceux-là je donnerai la victoire. » Au même moment, Gambara et ses deux fils, Ybor et Agio, qui étaient princes des Winniles, prièrent Frea, l’épouse de Godan, qu’elle fût propice aux Winniles. Alors Frea leur donna ce conseil : au lever du soleil, les Winniles devaient s’avancer et leurs femmes, cheveux défaits devant le visage, à la manière d’une barbe, devaient venir avec leurs maris. Et alors, quand se leva le soleil brillant, Frea, l’épouse de Godan, tourna le lit où reposait son époux et mit son visage vers l’orient et le fit se lever. Et lui, regardant, vit les Winniles et leurs femmes qui avaient leurs cheveux défaits devant le visage et il dit : « Qui sont ces longues barbes ? » et Frea dit à Godan : « Tu leur as donné un nom, donne-leur aussi la victoire ! » Et il leur donna la victoire, pour qu’ils eussent la vengeance qu’ils voulaient et la victoire. Et depuis ce temps-là, les Winniles se nomment « Lombards ».47
27Les Winiles sont dirigés par une femme Gambara, et ses deux fils. La victoire des Winniles vient d’une conspiration féminine : Gambara participe à la prière de ses ils, contrairement aux ducs vandales qui agissent seuls cependant que Frea suggère d’augmenter le nombre des guerriers winniles, peu nombreux, grâce à leurs femmes, dont les longs cheveux imiteront des barbes et qui s’arrange ensuite pour que Godan voie les Winniles en premier et leur donne la victoire. L’origine des Lombards paraît ainsi marquée par un pouvoir féminin, humain et divin. Le rôle distinct de chaque sexe est pourtant rappelé. Frea n’a aucun pouvoir en elle-même, à part la maîtrise du cadre domestique, qui lui permet de tourner le lit de son mari. Les femmes imitent les guerriers mais ne se battent pas. Gambara cède tout le pouvoir à ses fils, l’un d’eux étant ensuite présenté comme le père du premier roi des Lombards. La transgression est donc ici limitée et restreinte aux temps originels. La femme est d’abord responsable de la maison du maître. Elle éduque ses fils et soutient son honneur par sa conduite. Elle ne joue un rôle politique qu’à travers les alliances prestigieuses et la transmission familiale du pouvoir. Peu avant 796, Paul Diacre nourrit le récit de l’Origo en ajoutant les batailles du roi Lamissio contre les Amazones48. Ces femmes combattantes étaient aussi associées aux Goths des origines49. Elles n’apparaissent néanmoins que pour être vaincues. La reine des Amazones est ainsi battue en combat singulier par le roi Lamissio, faisant de lui l’égal d’Achille, Héraclès, Thésée ou Alexandre le Grand… la défaite des femmes guerrières marque une nouvelle étape dans l’éloignement de la sauvagerie et l’entrée des Lombards dans la civilisation.
28Entre Antiquité et Moyen Âge, les signes de masculinité des hommes d’élite évoluent. Les discours romains disqualifiaient le Barbare en reconnaissant ses capacités militaires, liées à sa sauvagerie, mais en lui niant toute capacité de contrôle de soi. Pourtant, à partir du IVe siècle, le costume masculin de l’élite romaine s’est adapté au poids croissant des militaires et des régions périphériques dans le destin politique de l’empire. L’homme dominant se caractérise avant tout par l’exercice de la violence au service de l’empereur, et moins par son inscription dans le destin spécifique de Rome. Les hommes de l’élite barbare se distinguent donc peu de leurs contemporains romains. Eux aussi mettent en avant leurs capacités guerrières, mais aussi leur participation à la chose publique, à travers le service du roi, et leur capacité à organiser une paix fondée sur le droit écrit. Seuls quelques éléments viennent rappeler la légitimité externe de leur pouvoir, comme peut-être une coiffure particulière ou l’usage des runes. L’homme idéal est toujours celui qui se bat pour établir la paix, tout en maintenant sa femme à la maison, où elle éduque ses fils et successeurs.
Notes de bas de page
1 Par exemple, Histoire-Géographie-Éducation civique 6e, Paris, Hachette, 2000, fiche professeur 13, p. 29. L’absence de cohérence montre le flou des connaissances, comme dans la série des Aides à la mise en œuvre des programmes, G. Hugonie dir., CRDP, Versailles, 1998 et 1999. Le volume Histoire-Géographie-Éducation civique 6e, Paris, Hachette, p. 69, enjoint de distinguer incursion et migration, tandis que le volume Histoire-Géographie-Éducation civique 5e, p. 53, met en avant la distinction entre migration et invasion.
2 Les attendus nationalistes du modèle des « grandes invasions » sont exposés par P. Geary, Quand les nations refont l’histoire : l’invention des origines médiévales de l’Europe, Paris, Aubier, 2004. W. Pohl, « Rome and the barbarians in the fifth century », Antiquité tardive, no 16, 2008, p. 93 à 101, dresse un tableau historiographique des débats contemporains.
3 L’ouvrage fondateur est celui de R. Wenskus, Stammesbildung und Verfassung. Das Werden der frühmittelalterlichen Gentes, Cologne, 1961, bien que le terme d’ethnogenèse ait été forgé plus tard.
4 W. Pohl, « Aux origines d’une Europe ethnique. Transformations d’identité entre Antiquité et Moyen Âge », Annales. Histoire et sociétés, no 1, 2005, p. 183-208. Le débat est lancé dans On Barbarian Identity. Critical Approaches to Ethnicity in the Early Middle Ages, A. Gillet dir., Turnhout, Brepols, 2002.
5 Le bilan historiographique est dressé par J. M. H. Smith, « Introduction: gendering the early medieval world », Gender in the Early Medieval World, East and West, 300-900, L. Brubaker et J. M. H. Smith dir., Cambridge, Cambridge University Press, 2004, p. 1-19. Voir W. Pohl, « Gender and ethnicity in the early Middle Ages », ibid., p. 23-43, ainsi que le plaidoyer de J. M. H. Smith, « Did women have a transformation of the roman world? », Gendering the Middle Ages, P. Staford et A. B. Mulder-Bakker dir., Oxford, Oxford University Press, 2001 (reprise du numéro spécial de Gender and History, vol. 12, no 2, 2000).
6 Ph. von Rummel, Habitus barbarus. Kleidung und Repräsentation spätantiker Eliten im 4. und 5. Jahrhundert, E-RGA 55, Berlin/New York, de Gruyter, 2007, p. 18-64, détaille les étapes chronologiques de la formation de cette interprétation et de sa remise en cause.
7 W. Pohl, « Telling the difference: signs of ethnic identity », Strategies of distinction: The Construction of Ethnic Communities 300-800, W. Pohl et H. Reimitz dir., Leyde/Boston/Cologne, Brill, 1998, p. 17-69.
8 À la suite de R. W. Connell, Masculinities, Cambridge, Cambridge University Press, 1995, p. 77 et suivantes, il est légitime de s’interroger sur d’autres modèles de masculinité coexistants, mais les sources ne nous permettent pas, il me semble, d’y répondre.
9 Dans le même sens, voir S. Joye, « Y a-t-il une “évolution” des mœurs ? Historiographie et anthropologie de la famille et du mariage », Labyrinthe, atelier disciplinaire, no 30, 2008, p. 115-130. Je ne parlerai volontairement pas du discours chrétien sur la masculinité, qui est à l’évidence un élément partagé par les Romains et les Barbares, en grande majorité chrétiens dès le IVe siècle. À ce sujet, voir V. Neri, « Vestito e corpo nel pensiero dei Padri tardontichi », Antiquité tardive, no 12, 2004, p. 223-230 et R. Martorelli, « Influenze religiose sulla scelta dell’abito nei primi secoli cristiani », ibid., p. 231-248.
10 Isidore de Séville le résume ainsi au début du VIIe siècle : « L’homme (vir) est nommé ainsi parce qu’il possède une force (vis) plus grande que les femmes, d’où vient aussi le mot vertu (virtus), ou bien parce qu’il agit avec force à l’égard des femmes » (« Vir nuncupatus, quia maior in eo vis est quam in feminis : unde et virtus nomen accepit ; sive quod vi agat feminam »), Étymologies, XI, 2, 17, W. M. Lindsay éd., Oxford, Oxford University Press 1911. La répartition des rôles de genre chez Isidore de Séville est commentée par J. M. H. Smith, « Gender and ideology in the early middle ages », Gender and Christian Religion. Papers read at the 1996 Summer Meeting and the 1997 Summer Meeting of the Ecclesiastical History Society, R. N. Swanson dir., Woodbridge, 1998, p. 51 à 73.
11 Virgile, Énéide, J. Perret éd. et trad., Paris, les Belles Lettres, 1977, t. 1, v. 281-282 : « [Junon] amendera ses intentions ; avec moi [Jupiter] elle chérira les Romains, maîtres du monde, nation en toge » (« consilia in melius referet, mecumque fouebit/Romanos, rerum dominos gentemque togatam »).
12 Sur la signification symbolique de la toge, voir C. Vout, « The myth of the Toga : understanding the history of roman dress », Greece and Rome, Secondes séries, vol. 43, no 2, 1996, p. 204-220. R. Delmaire rappelle, p. 195, la législation réservant, mais aussi imposant, la toge aux citoyens romains : voir R. Delmaire, « le vêtement dans les sources juridiques du Bas-empire », Antiquité tardive, no 12, 2004, p. 195-202.
13 Ainsi, selon Pline, Histoires naturelles, III, 31, la province de Narbonnaise était appelée Gallia bracata, avant de ressembler davantage à l’Italie qu’une province, et perdre ce surnom.
14 « Ut bracatorum pueri Senonumque minores », Juvénal, Satires, VIII, 234, P. de Labriolle et F. Villeneuve éd. et trad., Paris, les Belles Lettres, 1962.
15 Voir R. Delmaire, « Le vêtement, symbole de richesse et de pouvoir, d’après les textes patristiques et hagiographiques du Bas-Empire », Costume et société dans l’Antiquité et le haut Moyen Âge, F. Chausson et H. Inglebert dir., Paris, Picard, 2003.
16 « De proprio quarundum gentium habitu. Quibusdam autem nationibus sua cuique propria vestis est, ut Parthis sarabarae, Gallis linnae, Germanis renones, Hispanis stringes, Sardis mastrucae », Isidore de Séville, Étymologies, livre XIX, 23.
17 Voir M. Coumert, « La pilosité barbare dans les premiers siècles du Moyen Âge occidental », Anthropologies, mythologies et histoire de la chevelure et de la pilosité. Le sens du poil, B. Lançon et M.-H. Delavaud-Roux dir., Paris, l’Harmattan, 2011, et Ph. von Rummel, ouvr. cité, p. 161-163 et p. 167-181.
18 Ammien Marcellin, Histoires, XXVII, 2, 2 : « Il voyait les uns se laver, certains se teindre la chevelure en rouge selon leur coutume, quelques-uns boire » « uidebat [Barbaros] lauantes alios, quosdam rutilantes ex more potantesque nonnullos », G. Sabbah éd. et trad., Paris, les Belles Lettres, 1968-1999. Sur les descriptions de Barbares par cet auteur, voir Ph. von Rummel, ouvr. cité, p. 67-68 et p. 109 à 116.
19 « Properantes concito quam considerato cursu Germani, telaque dexteris explicantes, inuolauere nostrorum equitum turmas, frendentes immania, eorumque ultra solitum saeuitium comae fluentes horrebant, et elucebat quidam ex oculis furor », Ammien Marcellin, Histoires, XVI, 12, 36.
20 Voir dans Ph. von Rummel, ouvr. cité, p. 77 et p. 167-181, l’analyse de ses descriptions des Wisigoths et des Francs.
21 « [Saxona] cuius uerticis extimas per oras/non contenta suos tenere morsus/altat lammina marginem comarum,/et sic crinibus ad cutem recisis/decrescit caput additurque uultus », Sidoine Apollinaire, Lettres, VIII, 9, 5, A. Loyen éd. et trad., Paris, Les Belles Lettres, 1970.
22 Grégoire de Tours, Histoires, V, 15.
23 « Utque hominibus quietis et placidis otium est voluptabile, ita illos pericula iuuant et bella. Iudicatur ibi beatus qui in proelio profuderit animam, senescentes enim et fortuitis mortibus mundo digressos, ut degeneres et ignauos, conuiciis atrocibus insectantur, nec quicquam est quod elatius iactent quam, homine quolibet occiso, proque exuuiis gloriosis interfectorum auulsis capitibus, detractas pelles pro phaleris iumentis accommmodant bellatoriis », Ammien Marcellin, Histoires, XXXI, 2, 22, G. Sabbah éd. et trad., Paris, les Belles Lettres, 1999.
24 Voir F. Baratte, « Le vêtement dans l’Antiquité tardive : rupture ou continuité ? », Antiquité tardive, no 12, 2004, p. 121-135, particulièrement p. 127.
25 Voir A. Molinier-Arbo, « Imperium in virtute esse non in decore. Le discours sur le costume dans l’Histoire Auguste », Costume et société dans l’Antiquité et le haut Moyen Âge, F. Chausson et H. Inglebert dir., Paris, Picard, 2003, p. 67-84, et J.-P. Callu, « L’habit et l’ordre social : le témoignage de l’Histoire Auguste », Antiquité tardive, no 12, 2004, p. 187-194.
26 Histoire Auguste, Commode, VIII, 8.
27 Voir M. Harlow, « Clothes make the man: power dressing and elite masculinity in the later Roman world », Gender in the Early Medieval World. East-West 300-900, L. Brubaker et J. M. H. Smith dir., Cambridge, Cambridge University Press, 2004, et Ph. von Rummel, ouvr. cité, p. 386-394.
28 Code Théodosien, XIV, 10, 1. Voir R. Delmaire, « Le vêtement dans les sources juridiques du Bas-Empire », Antiquité tardive, no 12, 2004, p. 195 à 202. Sur les buts politiques de la législation publiée sous Stilichon, qui glorifie le passé romain, notamment républicain, pour gagner le soutien et la collaboration politiques du Sénat, voir T. Janssen, Stilicho. Das weströmische Reich vom Tode des Theodosius bis zur Ermordung Stilichos (395-408), Marbourg, Tectum, 2004, p. 107-111.
29 Sur la complémentarité entre la toge et la chlamyde, voir F. Barate, ouvr. cité. Sur les fonctionnaires du Bas Empire, voir K. F. Werner, Naissance de la noblesse. L’essor des élites politiques en Europe, Paris, Fayard, 1998, p. 188 et suivantes.
30 « Tunici uti virum prolixis ultra brahia et usque in primores manu sac prope in digitos, Romae atque in omni Latio indecorum fuit […] Verilius quoque tunicas huiuscemodi quasi feminea, probosas criminatur », Aulu-Gelle, Nuits attiques, VI, 12 : R. Marche éd. et trad., Paris, Les Belles Lettres, 1967. Aulu-Gelle cite ensuite Virgile, Énéide, 9, 331.
31 « Qu’il ne soit permis à personne d’utiliser des tzangae et des braies dans la Ville éternelle. Si quelqu’un tente d’aller contre cette décision, nous ordonnons qu’il soit privé de tous ses biens et livré à un exil perpétuel par la sentence de l’illustre préfet de la Ville. Et cetera. Donné et affiché à Rome au forum du divin Trajan sous le consulat de Caesarius et Atticus » (« Usum Tzangarum adque Bracarum intra urbem venerabilem nemini liceat usurpare. Si quis autem contra hanc sanctionem venire temptaverit, sententia viri illustris praefecti spoliatum eum omnibus facultatibus tradi in perpetuum exilium praecipimus. Et cetera. Dat. Proposita Romae in foro divi Traiani Caesario et Attico conss »), Code théodosien XIV, 10, 2, à Rome, le 7 avril 397, Th. Mommsen dir., R. Delmaire trad.
32 Voir Ph. von Rummel, ouvr. cité, p. 156-160. Sur les buts politiques de la législation publiée sous Stilichon, qui glorifie le passé romain, notamment républicain, pour gagner le soutien et la collaboration politiques du Sénat, voir t. Janssen, STILICHO, ouvr. cité p. 107-111.
33 Claudien, In Eutropium, I, v. 497-499, v. 404.
34 Isidore de Séville, Chronique, v. 402.
35 « Nec multo post tempore Narsis patricius minas Iustini impr. eiusque agustae Sopiae perterritus, eo quod agusta ei adparatum ex auro facto muliebri, eo quod eonucus erat, cum quo filaret, direxit ; et pensilariis regerit non populo », Frédégaire, Chronique, III, 65, B. Krusch éd., MGH, SRM II, Hanovre, 1888.
36 Ennode, Carmen, 2, 57 (opus 182), F. Vogel éd., MGH AA 7, Berlin, 1885, p. 157.
37 S. Lebecq, « The two faces of king Childeric. History, archeology, historiography », Integration und Herrschaft. Ethnische Identitäten und soziale Organisation im Frühmittelalter, W. Pohl et M. Diesenberger dir., Vienne, 2002, p. 119 à 132.
38 Par exemple à propos des Francs, M. Diensenberger, « Hair, sacrality and symbolic capital in the frankish kingdom », The Constructions of Communities in the Early Middle Ages. Texts, Resources and Artefacts, R. Corradini, M. Diesenberger et H. Reimitz dir., TRW 12, Leyde/Boston, Brill, 2003, p. 173-212 et A. C. Murray, « Post vocantur Merohingii: Fredegar, Merovech and “sacral kinship” », After Rome’s Fall. Narrators and Sources of Early Medieval History. Essays presented to Walter Goffart, A. C. Murray dir., Toronto, Poirion, 1998.
39 B. Effros, « Dressing conservatively: women’s brooches as markers of ethnic identity? », Gender in the Early Medieval World. East-West 300-900, L. Brubaker et J. M. H. Smith dir., Cambridge, 2004.
40 S. Brather, Ethnische Interpretationen in der Frühgeschichtlichen Archäologie. Geschichte, Grundlagen und Alternativen, E-RGA 42, Berlin/New York, 2004, p. 2 et suivantes, auquel répondent V. Bierbauer, « Archäologie der Langobarden in Italien: ethnische Interpretation und Stand der Forschung », Die Langobarden. Herrschaft und Identität, W. Pohl et P. Erhart dir., Vienne, Forschungen zur Geschichte des Mittelalters 9, 2005, p. 21-66, ainsi que F. Curta, « Some remarks on ethnicity in medieval archaeology », Early Medieval Europe, 2007, p. 159-185.
41 P. Périn, L.-C. Feffer, Les Francs, Paris, A. Colin, 1987, p. 202 et suivantes.
42 S. Fischer, S. Croix et J. Soulat, « Les pommeaux avec inscriptions runiques à l’époque mérovingienne », Nos ancêtres les Barbares. Voyage autour de trois tombes de chefs francs, Paris, Somogy, 2008, p. 70-77.
43 F. Theuws et M. Alkemade, « A kind of mirror for men: sword depositions in late antique northern Gaul », Rituals of Power from Late Antiquity in the Early Middle Ages, F. Theuws et J. Nelson dir., TRW 8, Leyde, 2000, p. 401 à 476.
44 Dans le contexte britannique, voir A. Gautier, Le Festin dans l’Angleterre anglo-saxonne (Ve-XIe siècle), Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2006.
45 Voir R. Le Jan, Famille et pouvoir dans le monde franc : VIIe-Xe siècle. Essai d’anthropologie sociale, Paris, Publications de la Sorbonne, 1995.
46 Hypothèse défendue par N. Pancer, Sans peur et sans vergogne : de l’honneur et des femmes aux premiers temps mérovingiens (VIe-VIIe siècles), Paris, Albin Michel, 2001.
47 « Tunc Ambri et Assi, hoc est duces Wandalorum, rogauerunt Godan, ut daret eis super Winnilis uictoriam. Respondit Godan dicens: “Quos sol surgente antea uidero, ipsis dabo uictoriam”. Eo tempore Gambara cum duobus filiis suis, id est Ybor et Agio, qui principes erant super Winnilis, rogauerunt Fream, uxorem Godan, ut ad Winnilis esset propitia. Tunc Frea dedit consilium, ut sol surgente uenirent Winnilis et mulieres eorum crines solute circa faciem in similitudinem barbe et cum uiris suis uenirent. Tunc luciscente sol dum surgeret, girauit Frea, uxor Godan, lectum ubi recumbebat uir eius, et fecit faciem eius contra orientem, et excitauit eum. Et ille aspiciens uidit Winniles et mulieres ipsorum crines solutas circa faciem; et ait: “Qui sunt isti longibarbae?” Et dixit Frea ad Godan: “Sicut dedisti nomen, da illis et uictoriam”. Et dedit eis uictoriam, ut ubi uisi essent uindicarent se et uictoriam haberent. Ab illo tempore Winnilis Langobardi uocati sunt», Origo Gentis langobardorum, A. Braccioti éd., Rome, Bibliotheca di Cultura Romanobarbarica, 1998.
48 P. Diacre, Histoire des Lombards, I, 15.
49 Histoire Auguste, Aurélien 33-4 ; Jordanès, Histoire des Goths, 44. Voir M. Coumert, Origines des peuples. Les récits du Haut Moyen Âge occidental (550-850), Paris, Brepols, 2007 et W. Pohl, « Gender and ethnicity », art. cité.
Auteur
Maîtresse de conférences en histoire médiévale à l’université de Bretagne occidentale, est spécialiste du Haut Moyen Âge et a publié, entre autres, Origines des peuples. Les récits du haut Moyen Âge occidental, Paris, coll. des Études Augustiniennes, 2007.
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