Les radicaux anglais lecteurs de Beccaria (1767-1795)
Texte intégral
1Comme l’attestent les expressions telles que « the celebrated Marquis de Beccaria », courantes dans la presse londonienne1, la gloire de Beccaria avait atteint l’Angleterre dès avant la publication de la première traduction anglaise des Délits et des peines2, qui date de 1767. L’ouvrage, on le sait, a modelé les débats britanniques sur les questions judiciaires et pénales et a exercé une influence importante sur des penseurs aussi divers que William Blackstone, William Paley, Jeremy Bentham ou William Eden3. S’il a nourri la réflexion juridique et philosophique pendant plusieurs décennies, l’ouvrage a également connu une certaine fortune parmi les pamphlétaires que, selon l’acception traditionnelle de l’historiographie britannique, on qualifiera de « radicaux », parce qu’ils prônaient des réformes « radicales » des institutions et en particulier de la représentation parlementaire4. Ces pamphlétaires réclamaient l’extension du suffrage à de nouvelles catégories de la population, certains prônant même le suffrage universel, dès les années 1770. Si ces polémistes s’inspirent essentiellement de sources anglaises, américaines et françaises, l’ouvrage de Beccaria vient à point nommé pour eux. La première édition anglaise, en effet, précède d’un an les élections de 1768, au cours desquelles les démêlés de John Wilkes avec le gouvernement et la justice royale jetèrent le discrédit sur le système politique et entraînèrent de vastes mouvements de protestation populaire ralliés autour du slogan « Wilkes and Liberty ». Il n’est pas anodin que le premier libraire à publier l’ouvrage, John Almon, ait été également l’éditeur de Wilkes et de nombre de ses alliés. L’intérêt porté par le public britannique et américain ne s’est pas démenti au cours des trois décennies suivantes5. Si l’actualité de la question pénale en Angleterre peut expliquer ce succès, c’est aussi probablement parce que Beccaria défendait les libertés et posait les limites du gouvernement légitime que son ouvrage a rencontré un tel écho en Angleterre. On montrera ici que divers polémistes ont utilisé le nom et les écrits de Beccaria à l’appui de leur critique de l’ordre établi et comme caution de réformes libérales en matière de politique et de religion.
2La première vague de contestation se forme dans le sillage de l’affaire Wilkes6 et prend de l’ampleur à mesure que s’envenime le conflit avec les colonies américaines. Des hommes issus pour la plupart des couches moyennes de la société se regroupent en 1780 dans la Société d’information constitutionnelle (SCI) alors que l’idéologie des révolutionnaires américains et la guerre d’indépendance remettent en cause les fondements du régime politique britannique. Les radicaux reprennent à leur compte la devise des Américains : « Pas d’impôt sans représentation », et en tirent argument pour réclamer une réforme des institutions politiques britanniques, en particulier une extension du droit de vote. Certains d’entre eux, comme John Cartwright et John Jebb, puisent chez Beccaria une critique d’un système judiciaire inefficace et oppressif. Pendant la décennie de la Révolution française, le nom de Beccaria devient associé aux « jacobins » réels ou supposés. Le nom de Beccaria, dans ces milieux, faisait autorité et Des délits et des peines était assez régulièrement cité sans que l’ouvrage, cependant, fasse l’objet de lectures en profondeur. À l’exception notable du philosophe William Godwin, les auteurs présentés ici sont en effet des pamphlétaires et des activistes politiques qui cherchent chez Beccaria non une philosophie, une méthode ou un système, mais des arguments localisés, voire des formules ou des citations polémiques. C’est le cas en particulier des dissidents religieux, ou non-conformistes, du réformateur John Cartwright et, enfin, de la génération suivante, qui écrivait pendant la Révolution française, tels certains disciples de Godwin.
Les non-conformistes et Beccaria
3Par quelles voies les radicaux ont-ils eu accès à l’œuvre de Beccaria ? Nombre d’entre eux étaient certainement mus par l’intérêt qu’ils prenaient aux questions pénales. C’est surtout à partir des années 1780, sous l’influence de divers facteurs, dont les violentes émeutes londoniennes de 1780 (Gordon Riots) et les travaux de John Howard sur les prisons, que les débats sur la réforme pénale prirent de l’ampleur, donnant un regain d’actualité à l’ouvrage de Beccaria7. La Société d’information constitutionnelle comptait parmi ses membres plusieurs réformateurs, dont Samuel Romilly, et les radicaux pensaient la réforme pénale en rapport avec le besoin plus large de transformation des institutions politiques. Le contexte de l’indépendance américaine importe beaucoup ici, parce que les nouvelles républiques se sont alors dotées d’une nouvelle législation pénale, certaines, comme la Pennsylvanie, abolissant la peine capitale. Les pères fondateurs, Jefferson en particulier, connaissaient Beccaria et ont cherché à appliquer ses principes8. Outre Jefferson, le défenseur le plus influent des idées de Beccaria auprès des radicaux fut probablement Benjamin Rush qui, en 1787, dénonçait la peine de mort et saluait son abolition en Toscane et en Pennsylvanie9.
4Surtout, nombre de ces « radicaux » anglais qui se réclamaient de Beccaria faisait partie de la minorité des Dissenters, ces protestants qui, comme leurs ancêtres, les puritains du siècle précédent, refusaient de se conformer aux trente-neuf articles de l’Église d’Angleterre et étaient soumis pour cette raison à des lois discriminatoires, dans un régime de tolérance relative et fluctuante qu’ils n’avaient de cesse de dénoncer10. Ils étaient à la fois minoritaires, marginaux, exclus de nombreuses institutions (dont le Parlement et les deux universités anglaises), très influents et bénéficiant de nombreux contacts avec le monde politique. L’un des réseaux qui a pu leur faire connaître Beccaria et son œuvre est le « cercle de Bowood », souvent présenté comme un précurseur des think tanks modernes. Shelburne, en effet, longtemps isolé au sein des whigs et dans l’opposition au gouvernement North pendant la guerre d’Indépendance américaine, avait su s’entourer d’esprits brillants pour préparer son arrivée aux affaires (qui eut lieu en 1782, alors que la défaite ne faisait plus de doute et qu’un nouveau Premier ministre devait négocier la paix). Il a rencontré Beccaria et l’abbé Morellet lors de son voyage à Paris et en Italie, en 1771. L’année suivante, il a invité ce dernier à Bowood où séjournaient régulièrement, à l’époque, Joseph Priestley et Jeremy Bentham, qui tous deux avaient déjà lu Beccaria11. Si l’on manque de précisions sur la teneur des débats, leur haute tenue intellectuelle ne fait guère de doute.
5Par ailleurs, Des délits et des peines figurait dans le cursus des académies fondées par les non-conformistes pour pallier leur exclusion des universités12. En 1778, le baptiste Robert Robinson n’hésite pas à écrire que « le non-conformisme nous amène tout naturellement à étudier le gouvernement. Sidney, Locke, Montesquieu et Beccaria enseignent les notions que nous reconnaissons en matière de gouvernement »13. L’argument est logique, le non-conformisme étant un statut juridique défini par la législation. Mais il faut nuancer. Beccaria était certainement discuté et souvent approuvé, sans pour autant être un maître à penser. Les opinions de Robinson étaient trop libérales pour les tenants de l’orthodoxie baptiste et envenimèrent ses relations avec sa congrégation14. Dans les académies non-conformistes, les étudiants étaient invités à des lectures critiques, et l’inclusion des Délits et des peines dans des programmes d’enseignement n’implique nullement de la part des enseignants une adhésion inconditionnelle aux principes de Beccaria. Ainsi, l’ouvrage et le commentaire de Voltaire sont cités dans les conférences de l’influent Philip Doddridge, qui défend la peine de mort (à appliquer tout de même avec parcimonie, selon lui)15. Pourtant, Beccaria n’est que très rarement invoqué dans les campagnes pour l’abrogation des lois discriminatoires frappant les dissidents. Quand c’est le cas, comme chez George Dyer en 1792, c’est pour défendre la nécessité d’adapter la législation à l’évolution des croyances et pour limiter la part d’interprétation du juge afin d’éviter tout pouvoir discrétionnaire ou arbitraire : « Il n’est rien de plus dangereux que l’axiome commun selon lequel il faut consulter l’esprit de la loi. »16 Cette quasi-absence de référence à Beccaria s’explique par le caractère technique du débat, qui s’inscrit dans la tradition juridique anglaise ; les arguments tirés du droit naturel, lorsqu’ils sont invoqués, viennent de Locke.
6C’est chez Joseph Priestley qu’on trouve l’affinité la plus marquée avec Beccaria. On sait que Bentham a déclaré ne plus se souvenir s’il avait trouvé chez lui ou chez Beccaria la formule du « plus grand bonheur du plus grand nombre »17. Bien que la formule magique n’y apparaisse pas, L’Essai sur le gouvernement civil de Priestley, publié en 1768, un an à peine après la traduction anglaise des Délits et des peines, rappelle plusieurs principes énoncés par Beccaria (qui est cité une fois dans l’ouvrage)18. Selon Priestley, les hommes abandonnent la plus petite partie possible de leur liberté naturelle au gouvernement : aussi ce dernier ne doit-il empiéter qu’en cas d’absolue nécessité sur la « liberté civile » (entendue comme la portion de liberté naturelle que gardent les hommes dans l’état civil). La fin du gouvernement civil est le bonheur des hommes, la question essentielle que doit se poser le législateur étant celle du « bien de la communauté ». On trouve chez Priestley comme chez Beccaria une tension entre l’utilitarisme et le droit naturel. Cependant, la doctrine politique de Priestley s’appuie sur son système métaphysique et théologique, qui est étranger à la pensée de Beccaria19.
7Sans surprise, c’est surtout en matière de politique pénale, qui est le sujet d’une de ses conférences prononcées à l’académie non-conformiste de Warrington, que Priestley s’appuie sur Beccaria20. Pour lui, la peine doit être exécutée promptement après le crime21 ; la sévérité des peines est contre-productive, car les criminels s’enhardissent et, pour échapper à la punition d’un crime, en commettent un second22. Il concède que les travaux forcés puissent être préférables à la peine de mort, parce qu’ils inspirent plus de terreur à la plupart des hommes et seraient utiles à la communauté. Cependant, il défend la peine capitale parce que les avantages des travaux forcés sont annulés par la facilité qu’ont les prisonniers à s’évader ; et, somme toute, le nombre d’exécutions capitales est bien moindre que celui des morts à la guerre. Quant à la torture, bien qu’elle ait l’inconvénient de faire avouer n’importe quel crime à un innocent, elle serait appropriée pour punir les crimes car la terreur qu’elle inspire aurait alors une fonction dissuasive. Priestley reprend, sinon les préconisations de Beccaria, du moins son critère utilitariste et la méthode du calcul probabiliste.
John Cartwright : de l’injustice pénale à la critique du système politique britannique
8Comme Priestley, plusieurs membres de la Société d’information constitutionnelle acceptaient la critique beccarienne de l’économie de la peine spectaculaire et le principe de proportion entre les délits et les peines ; certains, comme John Cartwright, John Jebb et David Williams23, s’opposaient à la peine de mort ; tous voyaient dans l’injustice des peines le résultat d’un mode de gouvernement oppressif et illégitime. On s’attachera ici à Cartwright, unanimement reconnu comme le chef de file de la SCI.
9Officier de marine autodidacte, il découvre Beccaria avant 1772, sans doute pendant les quatre ans qu’il passe à Terre-Neuve (1766-1770) et qui lui laissent le loisir de se constituer une culture philosophique24. En 1772, il rédige un mémoire sur l’approvisionnement en bois de construction de la marine. Parmi ses nombreuses propositions figure l’abrogation de toutes les lois régissant les domaines forestiers royaux (forest laws) et leur remplacement par un système de sanctions proportionnelles à la gravité des délits25. Cartwright est d’ores et déjà acquis au principe beccarien de proportionnalité entre les délits et les peines. On lit en creux dans ce projet une critique du « code sanglant » (bloody code) qui punissait de mort un nombre élevé et croissant de crimes dont beaucoup étaient liés à la chasse et au braconnage26.
10Plus tard, il arrive à Cartwright de faire référence à la législation sur la chasse (game laws) pour prouver que les lois votées par les riches oppriment les pauvres, ce dont il tire argument pour défendre le suffrage universel. En 1776, il cite un passage du chapitre de Beccaria sur la peine capitale, la prosopopée du voleur justifiant le crime et la désobéissance à des lois injustes votées par des députés qu’il n’élit pas27. La citation et la prosopopée permettent à Cartwright d’opérer un double déplacement de l’énonciation, et donc de se distancier d’une argumentation antisociale et immorale qu’il ne peut pas prendre à son compte. Dans le même ouvrage, il fait un usage stratégique d’une phrase de Beccaria tirée de son contexte : « Le commerce et la propriété des biens ne sont pas une fin du pacte social […]. »28 Généralisée comme une maxime, la citation de Beccaria sert à dénoncer le suffrage censitaire : les Communes doivent être élues au suffrage universel (masculin), puisqu’elles ont vocation à représenter les personnes et non les biens. Beccaria est invoqué comme autorité sur le droit naturel, au même titre que Locke, cité à de multiples reprises.
11Le projet de 1772 suggère cependant que les attaques contre le droit pénal anglais ne sont pas purement rhétoriques et que Cartwright envisageait une régulation des rapports sociaux rompant avec le paternalisme et la dissuasion par la peine de mort, qu’il jugeait inefficace et répugnante29.
12De façon générale, Cartwright et les autres radicaux savaient gré à Beccaria d’avoir posé des principes rationnels, dignes d’un siècle éclairé, en lieu et place du fatras des coutumes « barbares ». Ses attaques contre le droit romain et médiéval ne pouvaient que les conforter dans leur rejet des précédents iniques dans le droit coutumier anglais. Comme Beccaria, ils refusaient de déférer à l’autorité sclérosante de la coutume. Outre le principe de proportion des peines, les radicaux anglais retiennent des Délits et des peines la nécessité de lois claires, écrites dans une langue compréhensible à tous et laissant la moindre part possible à l’interprétation et à la discrétion du juge. C’est au législateur d’écrire des lois claires, non au juge d’interpréter à sa guise l’esprit de la loi : on voit ici le lien étroit entre réforme du droit pénal et réforme parlementaire (restauration du peuple comme source de la législation).
Lectures anglaises de Beccaria pendant la Révolution française
13La Révolution française relance les revendications de réforme, provoquant la politisation de couches sociales plus basses. Thomas Paine joue un rôle capital dans ce processus en raison du succès éclatant de ses Droits de l’homme (publiés en deux parties, en 1791 et 1792). Ce qui importe ici, c’est que Paine a su exploiter la charge subversive de la critique des institutions judiciaires pour nourrir sa dénonciation virulente de la monarchie britannique, de la tradition juridique anglaise et des injustices sociales. En effet, il établit un lien étroit entre l’iniquité du système judiciaire et l’injustice politique, le bloody code anglais devenant un équivalent de la Bastille et des horreurs de l’Ancien Régime français30. Selon Paine, le spectacle fréquent des châtiments sanguinaires avant 1789 avait endurci la populace et, au lieu de la détourner des crimes violents, la corrompait et lui inspirait le désir d’une revanche violente31. Sans citation explicite, il utilise l’argument beccarien de l’effet contre-productif de la terreur judiciaire afin de dédouaner les révolutionnaires français. Beccaria, sans être cité, se voyait enrôlé dans une défense de la violence révolutionnaire.
14Cette justification, à mots à peine couverts, se fait aussi par la citation de la prosopopée du pauvre qui refuse de se plier aux lois édictées par les riches, puisée directement dans l’ouvrage de Beccaria ou chez Cartwright. On la trouve en particulier dans The Patriot, un périodique radical publié à Sheffield et destiné à un public d’artisans32. D’autres éditeurs de périodiques et d’autres libraires s’emploient à diffuser Des délits et des peines, in extenso ou sous forme d’extraits33. Aux côtés du Dictionnaire philosophique de Voltaire, des Ruines de Volney et de divers écrits des radicaux anglais, l’ouvrage figure dans le catalogue des libraires considérés comme « jacobins » et harcelés en conséquence34.
15L’œuvre de Beccaria fit également impression sur Godwin et ses disciples. Dans son Enquête sur la justice politique, celui-ci se livre à une critique anarchiste du gouvernement et de l’économie des peines35. La souffrance physique ne peut ni réparer l’offense, ni bénéficier au criminel ; elle n’a aucune valeur d’exemplarité, car seule la raison peut convaincre autrui : or, « le châtiment se substitue à l’argumentation, au raisonnement, à la conviction » – de là « l’iniquité du châtiment en général »36. Godwin salue au passage la lucidité de Beccaria qui, « sensible à l’impossibilité de scruter les intentions, [a déclaré] que nous ne devions être attentifs qu’aux préjudices subis ». Mais Godwin va plus loin car, selon lui, le préjudice subi ainsi que la probabilité de récidive ou d’imitation par d’autres sont également impossibles à évaluer. Il conclut à « l’absurdité d’adapter la peine au délit »37. Si Godwin a emprunté beaucoup à Beccaria, il va beaucoup plus loin que lui et récuse son projet, qui lui sert essentiellement d’outil critique contre les arguments traditionnels en faveur de la sévérité des peines.
16Sans surprise, Beccaria est un nom révéré par les disciples de Godwin, de jeunes hommes issus des classes moyennes, enthousiasmés par la Révolution française. Entre 1792 et 1794, lorsque Wordsworth songe à fonder un mensuel, il pense écrire une série de biographies des hommes « illustres pour leurs efforts pour la cause de la liberté » : Beccaria est bien sûr du nombre38. Les références à Beccaria et à son cercle sont beaucoup plus importantes dans un périodique édité en 1794-1795 par un petit groupe de réformateurs issus de la bourgeoisie non-conformiste de Norwich39. Le premier numéro s’ouvre sur une épigraphe tirée des Délits et des peines : « I should have everything to fear, were tyrants to read my book ; but tyrants never read » (« J’aurais tout à craindre, si des tyrans venaient à lire mon livre ; mais les tyrans ne lisent pas »)40. Le rapprochement satirique entre les « tyrans de Milan », qui ne lisent rien, et ceux de Londres, qui ne lisent que les listes de proscrits politiques, permet aux rédacteurs de fustiger la politique de Pitt (thème récurrent du périodique) et de se poser en héritiers du combat des Lumières en faveur de la liberté de la presse et du progrès41. Le périodique a publié la traduction de trois essais tirés du Caffè : le « Discours sur le bonheur des Romains », « Le temple de l’ignorance » et les « Observations sur la question de savoir si le commerce corrompt les mœurs et la morale »42. Le traducteur, sous le pseudonyme d’Alcanor, est un certain William Youngman, dont on ne sait pas grand-chose sinon qu’il était négociant en vin et qu’il mourut en 183643. La traduction reprend l’intégralité des trois essais : il serait intéressant de l’analyser pour y trouver d’éventuelles modifications.
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17Deux ans après que les jeunes godwiniens de Norwich eurent publié le dernier numéro du Cabinet, le polémiste conservateur Richard Dinmore publiait dans la même ville un pamphlet visant à démasquer les « jacobins anglais ». Il affirmait qu’aux yeux de ces dangereux conspirateurs, Beccaria avait droit au rang de grand-prêtre, en tant que défenseur des terroristes et des criminels de toute espèce44. Ce genre d’attaque est l’un des nombreux signes de crispation des contre-révolutionnaires, prompts à détecter des germes de sédition dans toute velléité de réforme. Les textes de Paine, de Priestley, de Godwin, la diffusion des Délits et des peines par divers publicistes radicaux, avaient de quoi inquiéter un antijacobin autoproclamé comme Richard Dinmore. Le jugement de Dinmore contient pourtant une part de vérité, reflétant une perception lucide des clivages idéologiques tels qu’ils se sont exacerbés au milieu des années 1790. Aucun auteur conservateur45 ne semble s’être réclamé de Beccaria dans l’Angleterre des années 1790. Ce sont les radicaux, jacobins autoproclamés ou soi-disant réformateurs, qui se sont emparés des Délits et des peines, n’hésitant pas à en tirer des extraits soigneusement choisis ou des sentences décontextualisées. Au-delà de ces usages polémiques (dont ils n’ont bien sûr pas le monopole), ils ont retenu de Beccaria son attitude critique vis-à-vis de la tradition juridique, sa dénonciation des peines cruelles, son projet de rationaliser le droit et son principe de proportionnalité. Loin de lire Des délits et les peines comme un traité de technique juridique, ils ont vu en Beccaria un esprit libéral et éclairé qui est venu, sinon leur enseigner des principes, du moins conforter ceux qu’ils ont trouvés chez Locke et qui peuvent se résumer ainsi : le gouvernement par la terreur et la coutume doit céder la place aux droits de l’homme et à la raison ; le pouvoir s’exerce pour le bien du peuple et il existe des principes de justice et d’humanité qui lui assignent des limites.
Notes de bas de page
1 Voir par exemple Lloyd’s Evening Post, 15 février 1767. Deux ans plus tard, on retrouve la même expression dans les annonces de publication de A Discourse on Public Oeconomy and Commerce (The Gazetteer and New Daily Advertiser, 2 juin 1769).
2 C. Beccaria, An Essay on Crimes and Punishments, Translated from the Italian ; with a Commentary, Attributed to Mons. de Voltaire, Londres, J. Almon, 1767.
3 Voir H. L. A. Hart, « Bentham and Beccaria », dans Essays on Bentham. Studies in Jurisprudence and Political Theory, Oxford, Clarendon Press, 1982, p. 40-52 ; C. Blamires, « Beccaria et l’Angleterre », dans Beccaria et la culture juridique des Lumières, M. Porret (éd.), Genève, Droz, 1997, p. 69-81 ; H. Dunthorne, « Beccaria and Britain », dans Crime, Protest and Police in Modern British Society. Essays in Memory of David J. V. Jones, D. W. Howell, K. O. Morgan (éd.), Cardiff, University of Wales Press, 1999, p. 73-96 ; A. J. Draper, « Cesare Beccaria’s Influence on English Discussions of Punishment, 1764-1789 », History of European Ideas, 26, 2000, p. 177-199 ; S. Stern, « Blackstone’s Criminal Law : Common-Law Harmonization and Legislative Reform », dans Foundational Texts in Modern Criminal Law, M. Dubber (éd.), Oxford, Oxford University Press, 2014, p. 61-78.
4 Le « radicalisme » dont il est ici question ne se confond pas avec les « Lumières radicales » chères à Jonathan Israel (voir Democratic Enlightenment : Philosophy, Revolution, and Human Rights 1750-1790, Oxford-New York, Oxford University Press, 2011). Cependant, Israel classe comme « radicaux » certains des auteurs mentionnés dans cet article, ainsi que d’autres qui leur sont proches, en raison de leurs opinions politiques et de leur hétérodoxie religieuse : en effet, certains sont sociniens comme Joseph Priestley ou John Jebb, déistes comme Thomas Paine ou athées comme William Godwin à partir de 1792.
5 L’ouvrage connut au moins six éditions à Londres (1767, 1769, 1770, 1776, 1782, 1785) et fut publié à Dublin (1767, 1777), à Glasgow (1770), puis à Édimbourg (1778, 1788) et dans les colonies américaines, alors en pleine révolution (à Charleston en Caroline du Sud dès 1777, à Philadelphie l’année suivante, puis de nouveau en 1793). Les détails bibliographiques de ces éditions sont disponibles dans le catalogue English Short Title Catalogue, en ligne : [http://estc.bl.uk].
6 Parmi une bibliographie importante, voir E. C. Black, The Association. British Extraparliamentary Political Organization, 1769-1793, Cambridge, Harvard University Press, 1963 ; A. Goodwin, The Friends of Liberty. The English Democratic Movement in the Age of the French Revolution, Londres, Hutchinson, 1979. Sur l’idéologie des radicaux des années 1770-1780, puis sur la période de la Révolution française, voir H. T. Dickinson, Liberty and Property. Political Ideology in Eighteenth-Century Britain, Londres, Weidenfeld and Nicolson, 1977, chap. 6-7.
7 Voir L. Radzinowicz, A History of English Criminal Law and Its Administration from 1750, Londres, Stevens, vol. 3, 1948.
8 Voir J. Bessler, « Revisiting Beccaria’s Vision : The Enlightenment, America’s Death Penalty, and the Abolition Movement », Northwestern Journal of Law & Social Policy, 4, 2009, p. 195-328 ; S. H. Jupiter, « Constitution Notwithstanding : The Political Illegitimacy of the Death Penalty in American Democracy », Fordham Urban Law Journal, 23-2, 1995, p. 437-481.
9 Voir B. Rush, An Enquiry into the Effects of Public Punishments upon Criminals, and upon Society. Read in the Society for Promoting Political Enquiries […] March 9th, 1787, Philadelphie, s. n., réimpression Londres, Ch. Dilly, 1787, p. 30. Des extraits de l’ouvrage paraissent également dans la presse : voir « Extracts from an Enquiry into the Effects of Public Punishments upon Criminals and Upon Society. By Benjamin Rush, M. D. Professor of Chemistry in the University of Pennsylvania », Whitehall Evening Post, 4 août 1787. Sur les discussions autour de Beccaria à Yale et l’influence de cet auteur sur Jefferson, voir L. P. Masur, Rites of Execution. Capital Punishment and the Transformation of American Culture, 1776-1865, New York / Oxford, Oxford University Press, 1989, p. 51-54. De façon plus générale, sur l’influence de Beccaria sur les pères fondateurs, voir G. S. Wood, The Radicalism of the American Revolution, New York, Vintage, 1993, p. 193.
10 Le lien entre hétérodoxie religieuse et radicalisme politique est avéré et largement reconnu, mais fait l’objet d’interprétations divergentes chez des historiens comme Jonathan Charles Douglas Clark ou Jonathan Israel. Sur cette question complexe et sur les non-conformistes anglais de la fin du xviiie siècle, voir Enlightenment and Religion. Rational Dissent in Eighteenth-Century Britain, K. Haakonssen (éd.), Cambridge / New York, Cambridge University Press, 1996.
11 F. O’Gorman, « Shelburne : A Chathamite in Opposition and in Government 1760-82 ? », dans An Enlightenment Statesman in Whig Britain. Lord Shelburne in Context, 1737-1805, N. Aston, C. Campbell Orr (éd.), Woodbridge, Boydell, 2011, p. 128 ; J. M. Norris, Shelburne and Reform, Londres / New York, St Martin’s Press, 1963, p. 82-83.
12 C’est peut-être au cours de ses études à Hoxton que Godwin a lu l’ouvrage. Beccaria était lu à l’université également : c’est à Cambridge que John Jebb a découvert Des délits et des peines, au début des années 1770 : voir A. Page, John Jebb and the Enlightenment Origins of British Radicalism, Westport, Praeger, 2003, p. 227.
13 R. Robinson, A Plan of Lectures on the Principles of Nonconformity. For the Instruction of Catechumens, Cambridge, F. Hodson, 1778.
14 Robinson, membre de la Société d’information constitutionnelle de Cambridge qui, comme celle de Londres, avait pour objet de distribuer de la propagande en faveur de la réforme parlementaire, critiqua la guerre d’Indépendance américaine : voir J. Stephens, « Robinson, Robert (1735–1790) », Oxford Dictionary of National Biography, Oxford, Oxford University Press, 2004, en ligne : [www.oxforddnb.com/view/article/23868].
15 Voir P. Doddridge, A Course of Lectures on the Principal Subjects in Pneumatology, Ethics, and Divinity : With References to the Most Considerable Authors on Each Subject [1763], 3e édition, Londres, S. Crowder et al., 1794, p. 269. Doddridge cite aussi Pufendorf, Hutcheson, Eden, Paley et Godwin.
16 G. Dyer, An Inquiry into the Nature of Subscription to the Thirty-Nine Articles […], Londres, J. Johnson, 1792, p. 108. La citation est tirée des Délits et des peines (Audegean, 2009), § iv, p. 153. Plus loin, Dyer affirme, en se référant à Beccaria, que « les serments contraires aux sentiments naturels de l’humanité ne nous lient jamais ». C’est une interprétation très libre du chapitre xviii de Beccaria sur les serments. Le Toleration Act de 1790, sans abroger les lois discriminatoires votées dans les années 1660 et 1670, en limitait du moins l’impact tout en laissant certains non-conformistes à la merci de la discrétion, voire de l’arbitraire, de juges locaux interprétant le droit à leur gré.
17 Voir R. Shackleton, « The Greatest Happiness of the Greatest Number : The History of Bentham’s Phrase », dans Essays on Montesquieu and on the Enlightenment, Oxford, Voltaire Foundation, 1988, p. 377.
18 Voir J. Priestley, Political Writings, Cambridge / New York, Cambridge University Press, 1993, p. 38, qui cite C. Beccaria, Essay on Crimes and Punishments, op. cit., p. 165-166 : le passage correspondant se trouve dans Des délits et des peines (Audegean, 2009), § xli, p. 285.
19 Voir M. Fitzpatrick, « Joseph Priestley, Political Philosopher », dans Joseph Priestley, Scientist, Philosopher, and Theologian, I. Rivers, D. L. Wykes (éd.), Oxford, Oxford University Press, 2008, p. 113-143.
20 Voir J. Priestley, Lectures on History, and General Policy ; To Which Is Prefixed, An Essay on a Course of Liberal Education for Civil and Active Life, Londres, J. Johnson, 1793, p. 159-179.
21 Voir ibid., p. 205 ; Des délits et des peines (Audegean, 2009), § xix, p. 205.
22 Voir J. Priestley, Lectures on History, and General Policy, op. cit., p. 168 ; Des délits et des peines (Audegean, 2009), § xxvii, p. 225.
23 Voir D. Williams, Lectures on Political Principles ; the Subjects of Eighteen Books, in Montesquieu’s Spirit of Laws : Read to Students under the Author’s Direction, Londres, J. Bell, 1789, p. 80-81. Sur Jebb, voir A. Page, John Jebb, op. cit., p. 227-235.
24 Voir J. W. Osborne, John Cartwright, Cambridge, Cambridge University Press, 1972, p. 3-4.
25 Ceux qui font intrusion dans les enclos renfermant de jeunes chênes seraient condamnés à payer dix fois le montant des dommages causés et trois fois le montant des frais de justice. En cas de bris d’enclos, l’amende serait majorée de dix livres, le montant augmentant à proportion de la longueur d’enclos endommagée : voir J. Cartwright, A Letter to the Duke of Newcastle […], Londres, J. S. Jordan, 1792, p. 172, 179.
26 Voir les analyses d’E. P. Thompson, La Guerre des forêts : luttes sociales dans l’Angleterre du xviiie siècle, C. Jaquet (trad.), Paris, La Découverte, 2014. Thompson retrace la genèse du Waltham Black Act (9 George I, c. 22). Cette loi, votée en mai 1723, ajoute au code pénal une cinquantaine de crimes passibles de la peine de mort. Thompson présente les campagnes anglaises comme un lieu d’affrontement de classes (médiatisé par les lois sur la chasse) entre les paysans et l’oligarchie des propriétaires fonciers. Même si les analyses marxistes de Thompson ont été très contestées, il n’en reste pas moins que les lois sur la chasse constituent le volant répressif de la domination paternaliste exercée par l’aristocratie et la gentry sur le monde rural. Pour des analyses plus techniques et systématiques, voir J. M. Beattie, Crime and the Courts in England, 1660-1800, Oxford, Clarendon Press, 1986. On peut également rappeler que Beccaria critique les peines disproportionnées prononcées à l’encontre des braconniers chassant dans les domaines aristocratiques en dénonçant les conséquences morales de lois prévoyant « la même peine de mort pour qui tue un faisan et pour qui assassine un homme ou falsifie un document important » (Des délits et des peines (Audegean, 2009), § xxxiii, p. 263).
27 Voir J. Cartwright, Take Your Choice ! Representation and Respect : Imposition and Contempt. Annual Parliaments and Liberty : Long Parliaments and Slavery, Londres, J. Almon, 1776, p. 25-26 : il s’agit d’un extrait des Délits et des peines (Audegean, 2009), § xxviii, p. 235.
28 J. Cartwright, Take Your Choice !, op. cit., p. 23. Voir C. Beccaria, Essay on Crimes and Punishments, op. cit., p. 145 ; Des délits et des peines (Audegean, 2009), § xxxiv, p. 267, note a. Cartwright reprend cette phrase, qu’il attribue à Beccaria, sous la forme d’une maxime abrégée et déformée dans The People’s Barrier […], Londres, J. Almon, 1780, maxime n° 80 : « Liberty is the end of the social compact, property is only the means. »
29 D’après sa nièce, Cartwright aurait un jour renvoyé un domestique pour avoir assisté à une exécution : voir F. D. Cartwright, The Life and Correspondence of Major Cartwright, Londres, H. Colburn, vol. 1, 1828, p. 162-163.
30 L’influence de Beccaria est prépondérante dans la critique de l’oppression judiciaire, qui s’inscrit dans une critique politique, religieuse, économique et sociale plus large, comme en témoigne le titre complet de l’ouvrage : G. Dyer, The Complaints of the Poor People of England : Containing Remarks I. On Government. II. On the Defects in the English Government, as to Representation. III. On the Ignorance of the Poor, and the Imperfection of the Laws. IV. On Capital Punishments. V. On the Royal Household, and Public Expenditure. VI. On the Church. VII. On the Law-Courts. VIII. On the Army. IX. On the Navy. X. On Schools. XI. On Poor-Rates, and Poor-Houses. XII. On Public Hospitals. XIII. On Prisons. XIV. On Feudal and Seignoral Rights, Labourers, and Manufacturers. XV. Address to the Friends of Reform. XVI. Balance of Opinions, Londres, s. n., 1793. Les sections énumérées sur la page de titre ne correspondent pas aux chapitres. Beccaria est cité dans les chapitres 5 (« Disproportion between Crimes and Punishment ») et 6 (« On Capital Punishments »), p. 59, 70, 84.
31 Voir T. Paine, The Thomas Paine Reader, M. Foot, I. Kramnick (éd.), Harmondsworth, Penguin, 1987, p. 213 ; Les Droits de l’homme, B. Vincent (trad.), Nancy, Presses universitaires de Nancy / Ligue des droits de l’homme, 1991, p. 90.
32 Voir The Patriot, vol. 2, 2 octobre 1792, p. 27. Le passage est également cité au cours d’un développement sur le suffrage universel et le nécessaire consentement de tous à la loi dans The Trial of Henry Yorke, for a Conspiracy, &c. before the Hon. Mr. Justice Rooke, at the Assizes, Held for the County of York, on Saturday, July 10, 1795. Published by the Defendant, from Mr. Ramsay’s Short-Hand Notes, York / Sheffield / Londres, E. et R. Peck, Miss Gales, D. I. Eaton, Mr. Burks, Ridgeway et Jordan, 1795, p. xxiv, 124. Yorke précise que la longue citation n’a pas été lue à l’audience.
33 Par exemple, l’essentiel du chapitre sur la peine de mort est publié dans The Manual of Liberty ; or, Testimonies in Behalf of the Rights of Mankind ; Selected from the Best Authorities in Prose and Verse, and Methodically Arranged, Londres, H. D. Symonds, 1795, p. 145-148. L’ouvrage compile des extraits d’auteurs tels que Locke, Rousseau, Helvétius, Godwin, mais aussi Burke.
34 C’est le cas en particulier d’Alexander Leslie à Édimbourg : voir B. Harris, Scotland in the Age of the French Revolution, Édimbourg, John Donald, 2005, p. 177.
35 Voir W. Godwin, An Enquiry Concerning Political Justice, Oxford, Oxford University Press, 2013, VII, « On Crimes and Punishments », p. 362-413. Selon l’éditeur du texte, Mark Philp, Godwin aurait travaillé à partir du texte italien (voir p. 492).
36 W. Godwin, Enquête sur la justice politique et son influence sur la morale et le bonheur d’aujourd’hui, D. Berthaud, A. Thévenet (trad.), Lyon, Atelier de création libertaire, 2005, p. 496-497.
37 Ibid., p. 499-502.
38 W. Wordsworth, lettre à W. Mathews, 8 juin 1794, dans The Letters of William and Dorothy Wordsworth, E. De Selincourt, Ch. L. Shaver (éd.), Oxford, Clarendon Press, 1967, p. 125-126. Sur ce projet de Wordsworth, voir A. Bewell, Wordsworth and the Enlightenment. Nature, Man, and Society in the Experimental Poetry, New Haven, Yale University Press, 1989, p. 8.
39 Norwich était surnommée « the Jacobin city » en raison de l’influence des révolutionnaires qui était censée y régner. Les rédacteurs du Cabinet faisaient partie d’un milieu intellectuel restreint mais très dynamique issu de la bourgeoisie non-conformiste de la ville. Voir à ce sujet D. Chandler, « “The Athens of England” : Norwich as a Literary Center in the Late Eighteenth Century », Eighteenth-Century Studies, 43, 2009, p. 171-192, disponible en ligne : [http://0-dx-doi-org.catalogue.libraries.london.ac.uk/10.1353/ecs.0.0115].
40 Voir Des délits et des peines (Audegean, 2009), § iv, p. 157 : « Je devrais tout craindre, si l’esprit de tyrannie était conciliable avec l’esprit de lecture. »
41 Voir The Cabinet. By a Society of Gentlemen, vol. 1, n° 1, 11 octobre 1794, p. 1. Une autre citation en épigraphe, « saeva et infesta virtutibus tempora », tirée de la Vie d’Agricola de Tacite, remplit une fonction analogue, l’éloge de la vertu d’Agricola servant, par contraste, à critiquer les turpitudes de Domitien.
42 Voir « The Happiness of the Romans », The Cabinet, vol. 2, 1795, p. 273-286 ; « Observations on Commerce », ibid., p. 246-257 ; « The Temple of Ignorance », ibid., vol. 3, 1795, p. 195-197.
43 Sur l’identification des pseudonymes, voir P. J. Corfield, « Appendix », dans W. Pattisson, Youth and Revolution in the 1790s. Letters of William Pattisson, Thomas Amyot, and Henry Crabb Robinson, Far Thrupp, Stroud, Gloucestershire, A. Sutton, 1996, p. 187-195.
44 Voir R. Dinmore, An Exposition of the Principles of the English Jacobins [1796], 3e édition, Norwich, J. March, 1797, p. 13-14.
45 Cela ne signifie pas qu’ils étaient insensibles à sa critique des peines infamantes et spectaculaires. Edmund Burke qualifia la peine capitale de « boucherie » et s’éleva contre la cruauté de certains châtiments, défendant avec courage la mémoire d’un homme condamné pour sodomie et tué par la foule alors qu’il était attaché au pilori. Ces prises de position datent d’avant la Révolution française, mais rien n’indique que cette dernière le fit changer d’avis. Voir en particulier E. Burke, « Notes on Speech on Capital Punishment », dans The Writings and Speeches of Edmund Burke, III. Party, Parliament, and the American War, 1774-1780, Oxford, Clarendon Press, 1996 ; P. Langford, « Burke, Edmund », dans Oxford Dictionary of National Biography, op. cit.
Auteur
Université Bordeaux-Montaigne
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