Chapitre 4
Circulation et hybridation de modèles urbains
p. 155-196
Texte intégral
1L’émergence de nouveaux acteurs prenant part à la fabrique urbaine mène à des conséquences spatiales et matérielles du label CEC. Un des projets phare de l’année culturelle – le réaménagement de la place de la Visitazione (place de la gare) – témoigne de cette internationalisation de la production urbaine. Le projet montre également que les transformations architecturales et urbaines contribuent à construire une image internationale de la ville à diffuser à l’échelle nationale et européenne.
2La place de la Visitazione est une importante porte d’entrée de la ville. Elle constitue la limite entre le centre historique et les quartiers modernes construits dans les années 1950. L’observation de ce site engage une lecture diachronique de sa mutation puisque la place a fait l’objet de nombreuses tentatives de requalification laissées en suspens depuis plusieurs décennies. Sa transformation dans le cadre de la CEC est à mettre en regard avec les projets précédents, dans une dynamique de filiation ou au contraire de rupture avec cet héritage conceptuel. Dessinée aujourd’hui par Stefano Boeri, la place a fait l’objet d’un premier concours en 1993 gagné par Carlo Aymonino et Raffaele Panella, puis d’une consultation internationale1 remportée par l’architecte espagnol José Maria Tomas Llavador en 2008.
3L’examen de ce projet emblématique de la CEC permet de mieux comprendre les systèmes de gouvernance, de gestion et de conception dans un contexte de labellisation. Dans cette réflexion sur les transformations urbaines de Matera, la notion de temporalité est appréhendée sur ces trois moments de l’intervention – gouvernance, gestion, conception – dans un processus décrit par certains acteurs comme « une course contre la montre »2 ou encore une « urgence »3 à transformer la ville.
Controverses autour d’un lieu charnière : place de la Visitazione
Une frontière historique entre ville et campagne
4La place de la Visitazione, fait l’objet d’une requalification gérée directement par un organisme national appelé Invitalia4, en partenariat avec le groupe ferroviaire régional des FAL (Ferrovie Appulo Lucane5). En effet, le site est intimement lié à l’histoire du réseau de transport qui relie Matera à Bari et au reste de la Basilicate depuis le début du xxe siècle6. La première gare prend place sur le site en 1898 avec une voie ferroviaire visant à faciliter l’accès à la région des Pouilles en passant par la cité d’Altamura (fig. 55).
Fig. 55. Carte topographique pour le tracé ferroviaire à Matera en 1898

© Archivio di Stato
5En périphérie de la ville, le tracé démarre à proximité du château de Tramontano pour se prolonger au nord dans le quartier de Piccianello, longer la rivière de la Gravina, puis se développer en parallèle de la route nationale (Strada Statale 99). Par son implantation, l’infrastructure ferroviaire devient une nouvelle limite de la ville entre le plateau urbain et la campagne environnante. Depuis l’est et le parc de la Murgia, les transitions brutales se succèdent : des falaises rocheuses aux Sassi, des quartiers troglodytes à la ville bourgeoise du Piano et, enfin, des palais baroques aux collines verdoyantes d’où émerge la petite gare. Au centre de la place, la gare est entourée par deux bâtiments, l’un faisant office de dortoir (dormitorio), l’autre servant d’entrepôt pour les marchandises (fabbricato merci) (fig. 56 et 57).
Fig. 56. Reproduction d’une photographie de la gare de Matera en 1925

© Franco Di Pede et Giuseppe Buonsanti, I luoghi della memoria, Matera, BMG, 1988, p. 68
Fig. 57. Photographie de la gare au cours des années 1920

© Luigi Acito, Matera. Architetture del Novecento. 1900-1970, Matera, Edizioni La Stamperia, 2017, p. 27
Encadré 10
Reprenant une typologie semblable aux autres gares menant à Bari (Borgo Venusio, Marinella), le bâtiment d’un étage présente une toiture légèrement inclinée avec une façade principale rigoureusement tramée par cinq portes donnant directement sur la voie. La simplicité du volume se conjugue avec de nombreux détails décoratifs : linteaux sculptés, angles en pierre de taille, corniche en saillie du premier niveau et couronnement continu sous la couverture. Sur le parvis, on distingue la zone de stockage, équipée d’une plateforme de chargement latérale non couverte, la remise à locomotives ainsi que le dortoir adjacent pour le personnel des wagons. Absent des photographies, un ouvrage mentionne pourtant la présence d’un auvent en fonte installé sur la façade du bâtiment des voyageurs. En porte-à-faux avec des poutres réticulaires, il repose sur la maçonnerie de l’édifice et sur une rangée de six piliers en forme de colonne classique, avec base, fût et chapiteaux décorés.
6Par son statut de première ligne ferroviaire vers le sud de la Basilicate, la gare revêt à cette époque une dimension symbolique de modernité. La visite du roi Victor-Emmanuel III en 1926 porte une attention majeure à Matera, qu’accroît son statut de capitale de province décrété par Benito Mussolini la même année7. Cette ambition prend la forme d’un programme intitulé « Pour une plus grande Matera » (Per la più grande Matera) qui prévoit la construction de nouveaux bâtiments : hôpital civil, immeubles administratifs, casernes, chambre de commerce et écoles. Au cœur de cette stratégie, le Piano demeure un quartier aristocratique et bourgeois qui concentre le centre du pouvoir politique et économique. Deux mondes semblent alors se faire face :
Dans les Sassi, les maisons sont les unes au-dessus des autres, entremêlées dans la roche et sous les rues, dans une indifférente promiscuité au sein d’un même environnement : parents, enfants, chiens, ânes, mules, poulets, où le grognement de certains porcs n’est pas rare. Mais au-dessus, sur le Piano, la vie et la civilisation s’activent avec la petite gare des chemins de fer Calabro-Lucano, et ses belles rues régulières. (Brettagna 1928)
7Poursuivant un discours empreint d’ordre et de rigueur – caractéristique de la période fasciste – la gare devient l’image du progrès et d’une expansion de la ville au-delà de ses limites originelles.
8C’est dans cette perspective qu’est élaboré en 1935 le premier plan régulateur de Matera par Vincenzo Corazza, ingénieur en chef du bureau technique de la mairie (fig. 58).
Fig. 58. Plan régulateur général de Vincenzo Corazza en 1935

© Archivio di Stato
9Resté à l’état de projet, le plan distingue clairement la zone des Sassi et la partie supérieure du Piano, modifiée par l’éventrement d’une partie de son tissu historique8. Délimité par l’infrastructure ferroviaire à l’ouest, le plan envisage une extension de la ville jusqu’à ce périmètre pour progresser plus largement au nord. Bordée d’îlots aux contours réguliers, la gare constitue une frontière au-delà de laquelle la conception reste schématique. La place s’étire ainsi au nord avec de nouvelles constructions organisées autour de jardins privés, tandis qu’au sud elle longe les immeubles existants, où subsistent les zones commerciales et industrielles. La non-réalisation du plan de Corazza laisse néanmoins la gare dans sa situation d’origine, c’est-à-dire un édifice isolé vers lequel convergent les rues du centre historique. Le plan de 1937 témoigne de cette orientation privilégiée vers le centre historique et d’une absence de projection à l’arrière du faisceau ferré où perdure un paysage naturel (fig. 59).
Fig. 59. Plan d’expropriation des immeubles à proximité de la gare en 1937

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10Contredisant les programmes élaborés sous le régime fasciste, la lisière franche entre ville et campagne persiste. À l’aube de la Seconde Guerre mondiale, la station ferroviaire s’apparente à une « gare de village »9, dont les aménagements sont dénoncés comme insuffisants.
11Cette situation persiste après la guerre avec une rupture nette entre un paysage agricole et une ville qui se densifie. Les larges parcelles consacrées à l’agriculture font face à la multiplication d’espaces bâtis, tandis que les cheminements de terre à l’arrière de la gare contrastent avec les larges avenues qui se développent depuis le centre-ville. Une vaste bande de terre s’affirme alors comme un no man’s land au statut indéterminé qui fait office de transition entre urbanité et ruralité (fig. 60).
Fig. 60. Extrait de la planimétrie de la section 19 de Matera (1950)

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12Couplée à la topographie en pente, l’épaisseur du faisceau de rails renforce une fragmentation sociale entre la ville haute, bénéficiant des équipements liés à l’expansion urbaine et une ville basse éloignée de ces commodités. Cette coupure liée à l’infrastructure ferroviaire écarte les collines ouest de l’urbanisation et entraine un développement linéaire le long de la Gravina, en direction des Pouilles (fig. 61).
Fig. 61. Maquette de la ville de Matera réalisée en 1949 par F. Viti, F. Montemurro et E. Scarano

© Franco Di Pede et Giuseppe Buonsanti, I luoghi della memoria, Matera, BMG, 1988, p. 7
La tentative de reconnexion entre centre historique et quartiers modernes
13Cette orientation est néanmoins bouleversée au tournant des années 1950, face au besoin urgent de relogement des habitants des Sassi. Dès lors, de nouveaux quartiers sont créés au-delà de cette frontière marquée par l’infrastructure ferroviaire. Sur les hauteurs verdoyantes de la ville au sommet de la colline Santa Venerdi dont il prend le nom, le quartier de Serra Venerdi est le premier à être construit en 1954 (Doria 2010, p. 44). Le quartier de Lanera situé dans la pinède à l’arrière du château est également édifié à la même période, suivi de Spine Bianche au nord de Matera.
14Approuvé en 1956, le plan régulateur de Luigi Piccinato intègre ces nouvelles composantes et dresse les contours d’une ville moderne qui s’étend au-delà du périmètre historique (fig. 62).
Fig. 62. Les trois nouveaux quartiers identifiés sur le PRG de 1956

© Luigi Acito, Matera. Architetture del Novecento. 1900-1970, Matera, Edizioni La Stamperia, 2017, p. 192
Encadré 11
La nouvelle voie ferrée est implantée du nord au sud, après un premier tunnel et avant une deuxième galerie souterraine permettant de ressortir de l’autre côté de la colline. La fin de la Calabro-Lucana est – et nous l’espérons tous – une question clé du plan directeur. Toutes les infrastructures qui occupent aujourd’hui cet espace ont un poids considérable, elles sont très étendues et ne sont pas nécessaires à cet endroit. Pour le moment, nous pourrions laisser au moins un service de la Calabro-Lucana, c’est-à-dire une seule ligne, mais déplacer les entrepôts des locomotives et le terminal de fret en dehors de la ville. De cette manière, la Calabro-Lucana entrerait à Matera sur une voie unique avec la possibilité de transformer ce service, aujourd’hui lent et inefficace, en une sorte de métro, un grand tramway qui permettrait de relier les centres plus proches de Matera et non les plus éloignés.
Extrait du rapport de Luigi Piccinato sur le PRG de 1956 (traduction de l’auteure)
15La place de la gare se trouve au cœur du nouveau schéma d’aménagement, à la jonction entre la ville historique et la ville moderne. Introduisant les principes du zoning10, Piccinato prévoit une nouvelle centralité urbaine entre la gare et la colline de Macamarda, jusqu’alors préservée de l’urbanisation11. En suivant les prévisions de Vincenzo Corazza et de Emanuele Plasmati12, Piccinato indique une zone à destination tertiaire administrative13 qui dessine les contours réguliers de la nouvelle place. Autour de cet espace politique et économique, il envisage la construction de plusieurs bâtiments, parmi lesquels le palais de justice et des collèges, pour en faire un véritable centre névralgique (fig. 63).
Fig. 63. Extrait du PRG de Luigi Piccinato sur le secteur de la gare (1956)

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16Dans cette optique, l’urbaniste indique la destruction des anciens bâtiments liés à l’activité ferroviaire et propose de déplacer les entrepôts de marchandises au nord de la ville14. Il imagine également le transfert de la gare à l’ouest de Matera, parallèlement à la nouvelle artère routière créée, et non loin du quartier de Serra Venerdi. Dans cette planification urbaine aux accents modernistes, il distingue deux types de transport : un réseau ferroviaire à l’échelle nationale écarté du centre-ville et un réseau à l’échelle urbaine qu’il qualifie de « métro [metropolitana] ».
17Dans ce contexte, la place est pensée comme le cœur de la ville, vers où convergent les axes principaux du centre historique et des quartiers modernes. Elle symbolise une union possible entre deux mondes jusqu’alors éloignés. Utilisant les espaces verts comme le lien entre les fragments d’une ville qu’il considère comme un « organisme vivant », Piccinato propose une place centrale minérale, pour signaler le rôle spécifique qui lui est attribué. La proposition de Luigi Piccinato est partiellement suivie avec un premier concours pour le centre administratif en 196215, la réalisation de la voie de contournement à l’ouest de Matera, mais le maintien des infrastructures ferroviaires. La présence du chemin de fer continue de diviser la ville, avec plusieurs passages à niveau qui marquent le paysage (fig. 64).
Fig. 64. Photographie de Rosario Genovese en 1972

© Rosario Genovese / Michele Mastrodonato, 2015, Un treno per Matera, Bari, Edizioni dal Sud, 2015, p. 114
18Malgré une nouvelle variante du PRG rédigée par l’urbaniste à cette même période16, le secteur associé à la colline Macamarda se transforme de manière fragmentaire. Le palais de justice est le premier élément qui annonce son urbanisation. Par son échelle, sa composition radicale et sa structure en béton aux accents brutalistes, il rompt avec le reste du tissu urbain environnant. Conçue par le même groupe d’architectes, la mairie prend place aux côtés du tribunal, en reprenant les éléments du langage fonctionnaliste (fig. 65 et 66).
Fig. 65. Le palais de justice de Matera

© Luigi Acito, Matera. Architetture del Novecento. 1900-1970, Matera, Edizioni La Stamperia, 2017, p. 240
Fig. 66. La mairie de Matera

© Luigi Acito, Matera. Architetture del Novecento. 1900-1970, 2017, Matera, Edizioni La Stamperia, p. 238
19Troisième repère bâti, le lycée scientifique intègre les codes du rationalisme dans une décomposition des volumes reliés par des blocs de circulation et de massives passerelles avec une alternance de corps cylindriques et de parallélépipèdes17. Parallèlement, l’enfouissement de la voie ferrée – pourtant acté depuis 197418 – advient tardivement, et donne sa morphologie actuelle à la place en 1986 avec l’inauguration de la nouvelle gare souterraine19. Libérée de l’emprise ferroviaire, la vaste esplanade fait alors l’objet de maintes tentatives de reconversion pour reconnecter le centre ancien et la ville moderne.
Rupture ou continuité
La reconnexion fantasmée de 1993
20À la suite de l’approbation du plan de lotissement du centre administratif20 (Piano di lotizzazione del Centro direzionale), le premier concours national pour la place de la gare est lancé en 1993. Celui-ci s’inscrit dans un contexte particulier marqué, d’une part, par la réflexion sur le nouveau PRG de la ville21 et, d’autre part, par l’inscription des Sassi sur la liste du patrimoine mondial de l’Unesco. La reconnaissance patrimoniale incite en effet les acteurs politiques à réfléchir plus globalement à l’image de Matera afin de conforter sa dimension internationale. L’assesseur à l’urbanisme considère alors le projet de requalification de la place comme emblématique pour le « futur de la ville » (De Giacomo 1993, p. 7). Quarante ans après la création des quartiers modernes par les plus grands architectes de l’époque, il s’agit pour la mairie d’affirmer le statut de laboratoire urbain de Matera. Oubliée durant des années, la place de la Visitazione devient le lieu où éprouver les différentes théories urbaines pour reconnecter la ville moderne à son centre historique en mutation.
21Dès lors, plusieurs écoles de pensée s’affrontent autour de l’héritage ferroviaire, avec des positions qui divergent autant sur la valeur représentative de la place que sur le rapport à la ville historique. Prenant en compte les contraintes topographiques du lieu, trois scénarios d’aménagement se font face : le premier assumant une totale rupture ; le deuxième reposant sur une continuité historique et, enfin, le dernier privilégiant une articulation hybride avec les institutions existantes. L’équipe menée par Raffaele Panella et Carlo Aymonino privilégie cette dernière option ; elle gagne le concours, secondée par le studio Architetti Associati et ses jeunes architectes locaux22. Tous deux poursuivent les préconisations du premier PRG de Luigi Piccinato en considérant la place comme le nouveau centre civique de la ville. La méthode pour y parvenir est néanmoins différente avec, d’un côté, l’adhésion à un modèle fonctionnaliste radical chez Panella23 et, de l’autre, la proposition organique, voire sculpturale, du groupe classé deuxième.
22Le projet de Panella et d’Aymonino propose l’articulation des institutions existantes par un urbanisme de dalle qui relie les nouvelles fonctions à la mairie. Poursuivant cette idée d’hybridation, ils prolongent la trame urbaine existante à l’est par la création de trois bâtiments de logement. La constitution de ce nouveau front bâti permet d’encadrer la place centrale sur laquelle se succèdent trois volumes distincts orientés selon l’axe nord-sud. Dans cette recomposition extrêmement linéaire, les équipements se développent le long de la voie ferrée souterraine pour se greffer au tribunal et à la mairie existante (fig. 67 et 68).
Fig. 67. Plan masse du projet de Raffaele Panella et Carlo Aymonino

© Archives de Piergiorgio Corazza
Fig. 68. Perspectives du projet de Raffaele Panella et Carlo Aymonino

© Archives de Piergiorgio Corazza
23Les architectes imaginent un socle majestueux, comme élément fondateur de leur projet. Celui-ci permet d’accéder à la gare et à la « place civique [piazza civica] ». Un parking souterrain est créé sous le socle, tandis qu’en surface viennent s’implanter les bureaux, un centre culturel, les services municipaux et la salle du conseil municipal en continuité de la mairie. Les fonctions administratives sont réunies en hauteur à partir de la vaste esplanade qui devient le cœur du projet. Une radicalité architecturale s’affirme avec les trois éléments du programme : la salle du conseil, les bureaux publics et les services municipaux. Tel un temple au centre de l’acropole, la salle du conseil s’ouvre vers la place, tandis que la galerie qui accueille les bureaux municipaux permet d’y accéder par deux importants escaliers. En s’élevant par rapport à la structure viaire existante, le projet se détache du tissu historique pour attirer l’attention sur cette nouvelle polarité urbaine. Seul témoignage de l’histoire du site, l’ancienne place Matteotti est partiellement préservée, non pas comme trace mémorielle de son utilisation passée mais comme porte d’entrée vers le complexe administratif24.
24Cette articulation par la dalle est également visible dans le projet de Carlo Pozzi25 qui reprend la métaphore de l’acropole pour décrire la place monumentale au cœur de sa proposition (fig. 69).
Fig. 69. Axonométrie du projet de Carlo Pozzi

© Carlo Pozzi / Pasquale Di Giacomo, Progetti italiani per Matera, Concorso nazionale di idee per Piazza Matteotti, Matera, Edizioni Gangemi, 1993, p. 43
25Celle-ci s’élève sur un imposant soubassement, créé en prolongement de la colline Macamarda. En prenant appui sur les contraintes topographiques du site et en réinterprétant l’architecture troglodyte de Matera, les architectes développent une infrastructure semi-enterrée sur laquelle s’implantent les éléments du programme. L’échelle monumentale de la place est également manifeste dans la proposition du groupe de Cesare Porroni26, qui décline un vide central, bordé par quatre imposants bâtiments (fig. 70).
Fig. 70. Axonométrie du projet de Cesare Porroni

© Cesare Porroni / Di Giacomo Pasquale, Progetti italiani per Matera, Concorso nazionale di idee per Piazza Matteotti, Matera, Edizioni Gangemi, 1993, p. 58
26Orientés selon un axe est-ouest, les édifices encadrent les institutions existantes pour les mettre en valeur, tandis qu’un front bâti plus bas tisse un lien avec les logements de la ville historique.
La rupture par le mur d’enceinte : la place comme barricade
27Le principe de dalle est utilisé par d’autres architectes qui, à leur tour, développent une image monumentale de la place, tout en assumant la rupture entre les deux parties de la ville. Par l’ajout d’un nouvel élément formel, ils accentuent l’idée de frontière et créent des limites bâties face à la ville historique. C’est le cas de l’architecte Maurizio Pascucci27 qui emploie le terme de « mur » pour présenter son projet (Pastucci et al. 1993, p. 27). Il implante les nouveaux bâtiments sur une plateforme qui connecte l’ensemble du programme mais se détache des édifices existants et du niveau de la rue. Grâce à un édifice monumental situé parallèlement à la voie ferrée, il divise clairement le centre juridique et administratif de la ville baroque du Piano. Avec cette enceinte, il entend préserver la colline et confirmer le statut liminaire de la place (fig. 71).
Fig. 71. Plan du projet de Maurizio Pascucci

© Maurizio Pascucci / Pasquale Di Giacomo, Progetti italiani per Matera, Concorso nazionale di idee per Piazza Matteotti, Matera, Edizioni Gangemi, 1993, p. 27
28De nombreux architectes adoptent cette position et incarnent formellement la limite par une fortification nouvelle. Le projet de Claudio Del Maro28 en est un exemple avec la création d’une galerie, longue d’un kilomètre, qui distingue la ville dense de la ville diffuse (fig. 72), mais aussi la proposition d’un front bâti courbe reconfigurant profondément les axes de circulation et l’échelle urbaine chez Nicola Pagliara29 (fig. 73).
Fig. 72. Plan du projet de Claudio Del Maro

© Claudio Del Maro / Pasquale Di Giacomo, Progetti italiani per Matera, Concorso nazionale di idee per Piazza Matteotti, Matera, Edizioni Gangemi, 1993, p. 41
Fig. 73. Axonométrie du projet de Nicola Pagliara

© Nicola Pagliara / Pasquale Di Giacomo, Progetti italiani per Matera, Concorso nazionale di idee per Piazza Matteotti, Matera, Edizioni Gangemi, 1993, p. 53
29Dans cette variante, la place est scindée en deux parties, l’une appartenant à la ville historique avec l’ancienne place Matteotti, et l’autre structurée autour d’une agora en terrasses. Élément récurrent dans les trois cas, la tour apparaît comme un signal visuel qui symbolise la transition entre ces deux mondes. Pour Maurizio Pastucci et Claudio Del Maro, elle se dresse en continuité du tracé viaire existant et indique le début de la nouvelle ville, tandis qu’elle prend des allures de tour médiévale dans la forteresse proposée par Nicola Pagliara. Figure centrale de la place, la tour est un élément que l’on retrouve dans d’autres projets qui tentent d’inscrire la place de la Visitazione dans la continuité de la trame urbaine historique.
Une continuité historique par fragments : la place creusée
30Le studio Architetti Associati30 développe une réflexion en lien avec la morphologie des Sassi, en choisissant d’inscrire leur intervention sur un périmètre qui s’étend jusqu’à la cathédrale. Contrairement aux propositions précédentes, la place de la Visitazione n’est pas circonscrite de manière régulière, mais rayonne jusqu’au centre historique par des cheminements piétons et des continuités paysagères (fig. 74).
Fig. 74. Carte et coupe du projet du studio Architetti Associati

© Studio Architetti Associati / Pasquale Di Giacomo, Progetti italiani per Matera, Concorso nazionale di idee per Piazza Matteotti, Matera, Edizioni Gangemi, 1993, p. 22
31Ce parti pris, visible sur la coupe qu’ils présentent, inscrit leur proposition en référence à l’architecture creusée des Sassi. La métaphore de l’oiseau – présent sur toutes les planches – est un rappel à l’histoire de la ville et à sa morphologie comparée à celle de l’animal par Eustachio Verricelli au xvie siècle (Verricelli et al. 1987).
32En s’attachant à retranscrire le passé ferroviaire du site, les architectes valorisent l’ancienne gare qui devient le théâtre de la ville. Porte d’entrée sur la nouvelle place, le bâtiment à l’architecture hybride symbolise la jonction entre passé et futur. La façade de la gare est ainsi conservée, tandis qu’à l’arrière s’articulent deux volumes massifs sculptés dans le béton (fig. 75).
Fig. 75. Vue du théâtre depuis la rue Roma

© Studio Architetti Associati / Pasquale Di Giacomo, Progetti italiani per Matera, Concorso nazionale di idee per Piazza Matteotti, Matera, Edizioni Gangemi, 1993, p. 25
33Suivant une composition aux lignes courbes et organiques, le groupe propose un nouveau langage architectural qui distingue leur proposition des bâtiments existants et fait du mobilier urbain une œuvre artistique. Ils implantent sur le front sud la majorité du programme avec les bureaux, le terminal de bus et les services administratifs qui créent une nouvelle avenue. Celle-ci s’achève avec la création d’un édifice monumental – siège de la préfecture imaginée – rappelant l’arche de la Défense, inaugurée quelques années auparavant (fig. 76).
Fig. 76. Vue du bâtiment public depuis le terminal de bus

© Studio Architetti Associati / Pasquale Di Giacomo, Progetti italiani per Matera, Concorso nazionale di idee per Piazza Matteotti, Matera, Edizioni Gangemi, 1993, p. 25
34À l’inverse, ils décident au nord de privilégier les espaces naturels en créant une succession de terrasses qui permettent d’accéder à la colline et au cimetière (fig. 77).
Fig. 77. Axonométrie du projet du studio Architetti Associati

© Studio Architetti Associati / Pasquale Di Giacomo, Progetti italiani per Matera, Concorso nazionale di idee per Piazza Matteotti, Matera, Edizioni Gangemi, 1993, p. 23
35Enfin, le cœur du projet est constitué de la place de la gare qui réinterprète la topographie irrégulière des Sassi en s’ouvrant sur la voie ferrée en contrebas et en créant un imposant parking souterrain. La mobilité urbaine est renforcée par des connexions routières, ferroviaires et piétonnes révélées par une architecture en creux. Nouveau repère dans le paysage, la tour de l’horloge domine l’espace public et signale la dualité entre ville souterraine et ville en surface (fig. 78).
Fig. 78. Vue de la place centrale de la gare

© Studio Architetti Associati / Pasquale Di Giacomo, Progetti italiani per Matera, Concorso nazionale di idee per Piazza Matteotti, Matera, Edizioni Gangemi, 1993, p. 25
36Le pôle multimodal est mis en valeur, tout comme les institutions municipales avec la nouvelle salle du conseil, ouverte au public et traversée par une passerelle reliée à l’hôtel de ville (fig. 79).
Fig. 79. Vue sur la salle du conseil de la mairie

© Studio Architetti Associati / Pasquale Di Giacomo, Progetti italiani per Matera, Concorso nazionale di idee per Piazza Matteotti, Matera, Edizioni Gangemi, 1993, p. 25
37En inscrivant leur projet dans l’héritage des Sassi et dans la filiation de la ville historique, les architectes proposent une alternative à la construction d’un nouveau fragment urbain et tentent d’atténuer la rupture établie par la voie ferrée.
De place civique à place culturelle
Le concours international de 2008
38Quelques années plus tard, alors que germe l’idée d’une candidature de Matera en tant que Capitale européenne de la culture, le maire Emilio Nicola Buccico décide de lancer un nouveau concours pour la requalification de la place en 200831. À cette occasion, il invite plusieurs architectes internationaux à repenser cet espace, devenu un parking à ciel ouvert, chaotique et accueillant un terminal de bus provisoire autour de la gare souterraine. Le concours restreint à des architectes de renommée mondiale témoigne de la volonté de repenser l’image internationale de la ville à destination des touristes qui affluent depuis l’inscription des Sassi sur la liste du patrimoine mondial de l’Unesco en 1993. La place est considérée comme un « symbole architectural de la ville »32 ; Dominique Perrault, Mario Botta, Manuel Salgado, Emilio Ambasz et Josè Maria Tomàs Llavador sont ainsi invités à porter sur elle un regard nouveau. Le maire insiste sur le statut charnière du lieu, aux confins de la ville historique et point de départ de l’expansion urbaine depuis 1950. Soulignant l’absence de qualité spatiale du site, Buccico explique vouloir construire une ville « plus belle, projetée dans une dimension européenne, prête à postuler pour la capitale de la culture »33. Contrairement au concours de 1993, la création d’un nouveau centre administratif apparaît au second plan, la priorité étant donnée à la dimension esthétique du lieu. Dans cette optique, le programme met l’accent sur l’héritage patrimonial des Sassi, en invitant les architectes à réinterpréter l’architecture souterraine du quartier troglodyte pour donner une « nouvelle identité »34 à la place. Écartant les transformations liées à la construction des quartiers modernes, le discours vise à promouvoir la dimension patrimoniale véhiculée par la reconnaissance Unesco, en y ajoutant une dimension culturelle en vue d’une nouvelle labellisation. Le théâtre constitue dès lors le cœur du programme, avec la préservation d’éléments historiques tels que l’ancienne gare et le tracé ferroviaire enterré. Il est complété par la réalisation de nouveaux espaces pour les institutions – dont la salle du conseil communal – et de parkings souterrains. À l’échelle urbaine, il s’agit de repenser le système viaire attenant à la place et de porter une attention particulière aux espaces verts, indiqués comme des éléments essentiels du projet.
39La morphologie des Sassi inspire les cinq architectes qui isolent certains fragments et les traduisent dans le projet de réaménagement de la place. Les grabiglioni*, anciens canaux structurant le Sasso Barisano et le Sasso Caveoso, apparaissent dans les propositions de Llavador et d’Ambasz, qui imaginent un cours d’eau artificiel autour duquel s’articulent les nouveaux équipements. Évoquant la rivière de la Gravina, Llavador et Ambasz créent une faille centrale prolongée dans le projet de l’architecte argentin, par une succession de bassins naturels, de citernes et de petits canyons qui mènent à la place Vittorio Veneto (fig. 80 à 82).
Fig. 80. Plan masse du projet de Josè Maria Tomàs Llavador

© Josè Maria Tomàs Llavador
Fig. 81. Perspective du projet de Josè Maria Tomàs Llavador – Vue sur le théâtre

© Josè Maria Tomàs Llavador
Fig. 82. Projet d’Emilio Ambasz pour la requalification de la place

© Emilio Ambasz
40L’eau n’est pas le seul élément qui rappelle la particularité du site inscrit à l’Unesco pour son système de filtration et de récupération des eaux pluviales. La topographie par strates échelonnées dans la pente se retrouve également dans la composition du parc par les deux architectes avec, pour l’un, des amphithéâtres naturels et, pour l’autre, des jardins en terrasses. À l’échelle architecturale, le relief escarpé des Sassi est réinvesti par Dominique Perrault dans un théâtre aux formes courbes et aux façades abruptes, tel une colline factice sur la place. En écho aux églises rupestres, en particulier à celle de la Madonna dell’Idris, le bâtiment domine le paysage bâti et devient le point d’observation de la ville ancienne à partir d’une série de belvédères (fig. 83).
Fig. 83. Réaménagement de la place de la Visitazione, Matera, axonométrie du projet

© Dominique Perrault Architecte / ADAGP, image de concours, 2008
41La dimension sculpturale du théâtre est appréhendée par Llavador de manière moins littérale, mais demeure une métaphore des volumes sculptés dans la roche. Afin de s’en rapprocher, la pierre calcaire caractéristique des Sassi et la brique constituent les matériaux de référence des nouveaux édifices. Dans une approche similaire, Manuel Salgado décline le vocabulaire monolithique des carrières de tuf dans les deux auditoriums qui apparaissent à la surface de la place (fig. 84 et 85).
Fig. 84. Perspective du projet de Manuel Salgado

© Manuel Salgado
Fig. 85. Coupe du projet de Manuel Salgado

© Manuel Salgado
42Enfin, l’architecture en négatif propre aux habitations troglodytiques est commune à l’ensemble des projets, qui concentrent la plupart des fonctions sous terre. Alors que les architectes espagnol et portugais laissent émerger plusieurs volumes construits35, leurs homologues privilégient la création de services souterrains, organisés autour de puits de lumière. Perrault y implante des bars, restaurants, discothèques et centres de bien-être, tandis que Mario Botta et Emilio Ambasz en font un vaste espace commercial. Ce parti pris n’est pas sans rappeler l’urbanisme de dalle promu par certains participants du précédent concours, dont le projet de Carlo Pozzi était l’emblème. Ainsi s’élèvent sur une vaste esplanade transformée en parc urbain les projets des cinq architectes internationaux, dont le théâtre concentre l’attention. La Piazza della Visitazione devient le socle, voire le piédestal, de l’œuvre architecturale. L’agora politique et citoyenne pensée en 1993 disparaît au profit d’une scène spectaculaire organisée à partir d’un nouveau repère visuel du paysage urbain.
Quel(s) lien(s) avec la ville historique ?
43La rupture avec la ville historique est incontestable dans la proposition d’Emilio Ambasz, lequel dispose, au centre du site, une construction qui masque la mairie par sa hauteur, étant orientée selon un axe opposé aux institutions existantes (fig. 82). Telle une ruine, l’ancienne gare disparaît sous une pergola végétale qui la préserve en tant que vestige d’un temps révolu, pour faire de l’amphithéâtre naturel le cœur du projet. Assumant un langage en contraste avec le contexte environnant, l’architecte isole la place du reste de la ville en conservant les voies routières existantes, surplombées à l’ouest par deux passerelles piétonnes. Conçu telle une œuvre d’art, le décor artificiel d’Ambasz s’inspire du paysage des Sassi, mais il se limite à la dimension esthétique du quartier où s’entremêlent l’architecture et la nature.
44Dans un rationalisme plus classique, l’architecte suisse Mario Botta dissocie également la place de son contexte. Celle-ci est bordée par les infrastructures qui créent une séparation vis-à-vis des institutions et une distance avec la ville historique. La proposition rappelle le projet de Claudio Del Maro en 1993 qui opérait une séparation franche entre la ville moderne et la ville baroque par une imposante galerie longeant le tracé de la voie ferrée. Similaire aux suggestions de murs, remparts et autres fortifications pensées à l’époque, l’infrastructure de Botta engage une rupture entre la ville moderne et la ville historique. Nouveau repère de la place, le volume vertical est l’unique édifice qui émerge de l’esplanade avec l’ancienne gare. Connectée en sous-sol avec la tour, la gare historique est transformée en foyer pour le théâtre, tandis que la scène se développe au pied du cylindre bâti (fig. 86 et 87).
Fig. 86. Plan du projet de Mario Botta

© Mario Botta
Fig. 87. Coupe du projet de Mario Botta

© Mario Botta
45S’attachant à assurer la continuité avec le centre historique, les trois autres concurrents font de la piétonnisation et de la réduction du trafic routier un des enjeux principaux de la requalification du site. Manuel Salgado introduit deux ronds-points sur l’avenue Aldo Moro afin de réduire la vitesse de circulation et propose un boulevard urbain bordé d’arbres. Les volumes discrets qu’il conçoit instaurent des cadrages sur les institutions existantes à travers des failles et des percées visuelles. Moins nuancés, Perrault et Llavador suppriment l’axe routier pour créer une place piétonne et donner un accès direct à la mairie. Le projet gagnant de l’architecte espagnol signale cette nouvelle entrée par un auvent et un parvis (place de la Comune) vers lequel convergent les différentes fonctions du site. Une série de places se succèdent, chacune se rattachant à un édifice bien précis : l’ancienne gare avec la « place qui accueille » (place che Accoglie) et le théâtre avec la place hypogée (place Ipogea). Pensé comme un monolithe sculptural, le bâtiment culturel contraste avec les lignes régulières de l’hôtel de ville ; il s’y rattache par la création de jardins et de passerelles en direction de l’institution. Dans cette vision fragmentaire de la place, Llavador renoue avec la proposition du studio Architetti Associati dont les édifices étaient positionnés comme des sculptures, assumant une hétérogénéité du bâti et des atmosphères plurielles. Il reprend également l’idée d’un front nord largement végétalisé par des jardins en terrasses et attribue à la place Matteotti le statut de porte d’entrée du site avec l’ancienne gare. Ce n’est plus une agora citoyenne qui constitue le cœur du projet mais un véritable parc urbain qui fait office de transition entre deux aires urbaines distinctes.
46Le programme de centre civique (centro civico) évolue donc vers la construction d’une représentation artistique et culturelle de la place, où le geste architectural l’emporte sur la vocation originelle du PRG de 1956. Les complexes administratifs et politiques disparaissent au profit de bâtiments iconiques dont l’objectif est de conférer une nouvelle attractivité à la ville (Jencks 2006, p. 7). Des points de convergence apparaissent néanmoins entre les concours, qui visent tous deux à fabriquer une nouvelle image urbaine : l’une correspondant au récit de ville en tant que laboratoire urbain, l’autre s’appuyant sur le récit patrimonial des Sassi pour réinterpréter l’architecture souterraine. Dans les deux cas, les prises de position sont contrastées, avec l’idée d’une autonomie de la place ou, au contraire, de son insertion dans le maillage historique. Mais, à l’instar du premier concours, la deuxième tentative n’aboutit pas ; elle demeure à l’état d’esquisse dans une ébauche conceptuelle de mutation du site. Il faut attendre l’obtention du label CEC en 2014 pour replacer au centre des débats la projection de cette porte d’entrée urbaine.
En quête d’une vitrine pour 2019
La question ferroviaire au centre des débats
47Dans ce contexte de nouvelle labellisation, la place de la Visitazione a un rôle de vitrine à l’échelle internationale. Pour les acteurs politiques, il s’agit non seulement de créer une « belle carte de visite »36 à destination des touristes qui découvrent Matera mais également de repenser la gestion des flux qui se concentrent à cet endroit de la ville. Dès lors, le statut de la gare est réinterrogé pour en faire la pièce maîtresse du système de transport public, à la jonction du réseau routier, cyclable et piéton. Une première option défend l’idée d’un transport urbain similaire à un métro, avec différents arrêts situés le long d’un axe nord-sud se prolongeant à l’échelle métropolitaine jusqu’à Bari (Rota 2016, p. 20). La ville est ainsi pensée dans son rôle charnière entre la Basilicate et les Pouilles avec un développement en direction de la côte adriatique. À la même période, une seconde option émerge avec la création d’une association locale sous le nom de « Matera Ferrovia Nazionale »37. Convaincus du rôle pivot de Matera pour les aires internes de la Basilicate, les membres de l’association développent l’idée d’un maillage à l’échelle nationale, structuré par une connexion est-ouest, vers Bari et Salerne38. La place de la Visitazione devient le lieu stratégique pour symboliser l’action du gouvernement et le développement d’infrastructures dans une région historiquement isolée. Le programme de la place mute ainsi en fonction des enjeux politiques – agora citoyenne en 1993 et centre culturel en 2008 – pour aboutir à la construction d’un bâtiment qui valorise la fonction ferroviaire d’origine. Sans continuité programmatique, une nouvelle rupture s’établit dans un projet qui s’éloigne des préconisations issues du PRG et s’écarte des propositions des deux précédents concours.
48Une deuxième rupture est d’ordre institutionnel ; elle voit l’acteur politique local – à savoir la municipalité – éloigné du processus de gestion et de conception du projet pour 2019. À la différence des compétitions qu’elle organise en 1993 et 2008, la mairie n’est plus seule pour affronter la requalification de la place, elle est encadrée par l’État qui intègre le projet dans le contrat national du CIS39. Le contrat prévoit une série d’interventions – dont la place de la Visitazione – à réaliser avant 2019 avec l’aide de l’agence nationale Invitalia pour accélérer le processus40. Chargé des missions relatives à la conception des projets, l’organisme étatique gère les procédures d’appels d’offres, la coordination technique et administrative, ainsi que la supervision des travaux. La municipalité est placée au second plan, avec un rôle de conseiller. Cette attitude en retrait est également amplifiée par la présence d’un acteur supplémentaire : la société des Ferrovie Appulo Lucane (FAL). Absente des deux précédents concours, la société ferroviaire est missionnée pour la construction de la nouvelle gare, grâce à l’obtention de financements régionaux. Au découpage institutionnel s’ajoute une rupture méthodologique, le projet étant découpé en deux parties avec la gare d’un côté et la place de l’autre. Par les financements qui lui sont alloués et le calendrier imposé, l’édifice architectural prime sur la place, qui devient secondaire41. À l’inverse des débats suscités en 1993 et 2008 pour la mutation de ce lieu charnière de la ville, le projet architectural reste longuement secret ; il est présenté en huis clos42. Objet de controverses, il suscite de vives polémiques auprès de la population avant même d’en connaître les caractéristiques formelles. À mesure que la nouvelle gare se dévoile, la contestation citoyenne s’accroît vis-à-vis d’un projet qui rompt symboliquement et formellement avec la ville.
Une rupture symbolique et formelle
49Qualifié de « landmark urbain »43 par son concepteur, point de repère dans le paysage de la ville, l’édifice se distingue par sa large couverture qui forme un auvent protecteur à la station ferroviaire (fig. 88).
Fig. 88. Axonométrie du projet de Stefano Boeri

© Studio Boeri
50À l’image d’une pergola, la toiture est soutenue par douze colonnes métalliques qui s’ancrent au niveau des quais souterrains et s’élèvent à douze mètres de haut. Au niveau de la place, un volume bas regroupe les différents services (billetterie, salle d’attente) et se connecte à la voie ferroviaire six mètres plus bas. À ciel ouvert mais protégés par l’ombrière, les quais bénéficient de lumière et de ventilation naturelle grâce à une grande ouverture mettant en relation directe les deux parties du projet : la partie publique en surface et la partie souterraine (fig. 89).
Fig. 89. Photographie des quais souterrains

© Paolo Rosselli
51Le bâtiment se dresse au milieu de la place de la Visitazione, bordée par les voies routières et transformée en parc urbain (fig. 90).
Fig. 90. Photographie de la nouvelle gare

© Guoyin Jiang
52Dans cette reconfiguration urbaine et paysagère, les bâtiments existants peinent à s’intégrer ; ils dialoguent difficilement avec l’échelle monumentale de la nouvelle construction. L’ancienne gare et l’édifice commercial le long de la rue Matteotti semblent être uniquement destinés à orienter le regard sur le projet de Stefano Boeri et à matérialiser une continuité illusoire avec la ville historique (fig. 91).
Fig. 91. Vue aérienne de la place de la Visitazione

© Giovanni Nardi
53Du côté de la ville moderne, la fracture est sans équivoque, avec la conservation de l’avenue Aldo Moro, mais surtout le masquage d’une partie de l’hôtel de ville provoqué par la hauteur de la pergola. Seul un passage piéton marque de manière dérisoire un trait d’union avec la mairie donnant sur une façade aveugle et sur les dispositifs techniques de la toiture de la gare en contrebas. Pourtant à l’origine des premières réflexions sur la place et du concours de 1993, le lien avec les institutions politiques disparaît définitivement (fig. 92).
Fig. 92. La nouvelle gare des Ferrovie Appulo Lucane

© Marina Rotolo
Encadré 12
À partir du moment où j’implante ce bâtiment, je tue complètement le rôle symbolique de la mairie. Je ne vois plus la mairie. Non, je ne la vois tout simplement plus. Ici il fallait mettre en valeur le rôle symbolique de gouvernement de la ville. Maintenant, ce n’est plus qu’un bâtiment ordinaire dans ce quartier. C’est la dernière fracture, définitive […]. Non seulement cela, mais avec l’éclairage nocturne tel qu’ils l’ont présenté, la mairie disparaîtra complètement. La lumière exclut ce qui se trouve derrière, de sorte que cette zone-là deviendra immédiatement périphérique. OFF. Au mieux, la ville du xxe siècle s’arrêtera ici, mais elle s’arrêtera ici [il tape du poing sur la table].
Extrait d’un entretien avec un architecte de Matera en septembre 2018 (traduction de l’auteure)
54L’image véhiculée à travers la réalisation de la nouvelle gare prime sur la valeur représentative de la place citoyenne et sur son rôle fonctionnel. Le choix du célèbre architecte Stefano Boeri vient renforcer la volonté des acteurs politiques locaux d’accroître la dimension internationale de Matera et de créer un « spectacle architectural » (Gravari-Barbas et Renard-Delautre 2015, p. 64). Dans ce contexte, l’enjeu dépasse la requalification de la place de la Visitazione ; il vise à construire un bâtiment pour « faire événement »44 et médiatiser sa réalisation. Lors de l’inauguration, l’édifice est décrit comme un « joyau » par le président des FAL qui souligne le « talent d’une grande personnalité de l’architecture internationale » (Sannino 2019). À son tour, le maire Raffaello De Ruggieri valorise le geste architectural en évoquant la gare comme la « marque d’un talent italien envié par le monde entier » (ibid.). Le bâtiment acquiert sa valeur en tant que signe distinctif de la ville, assurée par l’expérience internationale de l’architecte et par une signature reconnaissable à l’échelle mondiale. Boeri lui-même insiste sur la valeur symbolique du bâtiment en tant que nouvelle porte d’entrée touristique de Matera. Il inscrit la ville italienne dans l’héritage des Capitales européennes de la culture en comparant sa transformation à celle de Marseille, évoquée par le biais de l’édifice qu’il y projette en 201345. Ainsi, la nouvelle gare rejoint la dynamique de création de bâtiments emblématiques construits dans le cadre des CEC passées.
55La nouvelle image urbaine associée à la gare doit néanmoins correspondre à la représentation internationale de la ville, à savoir une cité hors du temps caractérisée par le paysage des Sassi et inscrite sur la liste du patrimoine mondial de l’Unesco. Afin de se conformer à cette représentation idéalisée de Matera, l’architecte développe un récit qui prend appui sur la singularité des quartiers troglodytes. Il réinterprète la typologie des habitations creusées dans la roche en proposant un bâtiment qu’il définit comme un « hypogée à ciel ouvert » (Di Giacomo 2018) où dialoguent les pleins et les vides au niveau de la place couverte. Boeri y voit également un écho aux contrastes particulièrement saisissants des Sassi avec des jeux de lumière qui font voyager le visiteur de l’ombre à la lumière depuis les quais souterrains46. Enfin, il réutilise la pierre calcaire pour les façades de l’édifice d’accueil afin d’établir une correspondance avec les parois rocheuses de la Gravina47. Les choix se concentrent essentiellement sur les aspects morphologiques des Sassi, ainsi que sur la perception extérieure d’une architecture qui marque profondément l’œil du visiteur. En faisant de cette architecture un événement mis en scène, l’édifice devient atemporel et se réduit à des questions typologiques destinées à faire mémoire. La réflexion sur la place de la Visitazione aboutit à l’édification d’un bâtiment qui ne reflète plus la planification globale d’un site charnière de la ville, mais se limite à doter la ville d’un objet iconique faisant abstraction de la pertinence du programme48. Pure performance communicative, l’édifice est ici utilisé comme un produit architectural qui correspond à « la société du spectacle » (Debord 1967) et aux enjeux de visibilité liés à la labellisation.
Notes de bas de page
1 Cinq architectes participent à cette consultation : Josè Maria Tomas Llavador, le Français Dominique Perrault, l’Argentin Emilio Ambasz, les Portugais Manuel et Tomas Salgado et le Suisse Mario Botta. Le concours prône une ouverture européenne et s’inscrit d’ores et déjà dans la candidature au titre de CEC.
2 Entretien avec Tonio Acito réalisé le 24 septembre 2018.
3 Entretien avec Paolo Verri réalisé le 11 novembre 2018.
4 Il s’agit d’une structure nationale rattachée au ministère de l’Économie qui fournit un soutien technique et opérationnel à l’administration publique, et met en œuvre les accords de programme pour les projets financés par l’Union européenne. Depuis 2014, elle s’occupe également de la construction et de la relance des zones industrielles en crise, parfois par la reprise ou l’acquisition d’entreprises en difficulté.
5 Fondée en 2001, la société est rattachée au ministère italien des infrastructures et des transports. Elle est chargée de la gestion des lignes à voie étroite – soit 0,95 m – (scartamento ridotto) entre les Pouilles et la Basilicate, opérant en tant que gestionnaire de l’infrastructure et en tant que compagnie ferroviaire.
6 Le tracé, intitulé « Bari – Montalbano Jonico », vise à relier les côtes adriatiques et ioniennes (vote du 23 juillet 1878). Plus globalement, l’objectif était de rejoindre – depuis la vallée du Basento – la ligne existante de Métaponte à Eboli. Le 9 août 1915, la ligne qui relie Bari à Matera est inaugurée sur une distance de 75,80 km. Elle se poursuit jusqu’à Miglionico (1924) et s’achève avec le dernier tronçon jusqu’à Montalbano Jonico en 1932 (Mastrodonato 2015, p. 66).
7 Le 13 mai 1926, le roi vient inaugurer le monument aux morts de la première guerre mondiale ainsi que le nouvel hôpital dans l’ancien couvent San Rocco (Caserta 2000).
8 La réalisation d’un parcours au tracé régulier entre la place Vittorio Veneto et l’ancienne mairie prévoyait la destruction de plusieurs ilots d’habitation.
9 Consiglio e Ufficio provinciale delle corporazioni, « Problemi ferroviari materani », Il Giornale d’Italia, 31 décembre 1938, p. 4.
10 Division d’un territoire en différentes zones auxquelles sont attribuées des fonctions spécifiques : résidentielles, commerciales, industrielles, etc.
11 Piccinato explique que la voie ferrée a été une chance pour la préservation des collines à l’ouest de la ville : « la présence de la ligne ferroviaire de la Calabro-Lucana […] a permis d’épargner cette magnifique partie de la ville, qui jusqu’à aujourd’hui, n’avait jamais été prise au sérieux pour le développement de Matera » (Piccinato 1956, p. 11).
12 L’architecte Emanuele Plasmati rédige un nouveau PRG en 1940, lequel ne sera jamais approuvé par la mairie mais influencera le dessin de Luigi Piccinato.
13 La proposition s’appuie à l’époque sur la volonté de doter Matera d’un nouveau modèle économique fondé, non plus sur l’agriculture, mais sur l’industrie à la suite de la découverte du méthane en Basilicate (Acito 2017, p. 203).
14 Jusqu’en 1970, la gare est utilisée pour le fret de marchandises avec des trains qui transportent la pierre calcaire des carrières jusqu’à la commune de Modugno, où se trouve la société Italcementi. Le site indiqué par Piccinato pour déplacer les entrepôts est aujourd’hui devenu le centre de dépôt de la compagnie ferroviaire des FAL (Piccinato 1956).
15 Le 8 novembre 1962, l’administration communale délibère en faveur de la construction d’un centre administratif sur l’aire de Macamarda (16 ha). Un concours ouvert aux ingénieurs et aux architectes est lancé et définit les édifices publics dans un plan détaillé (Piano particolareggiato) qui spécifie les volumétries propres à chaque bâtiment. Le projet sélectionné (Vincenzo Baldoni, Piergiorgio Corazza) est approuvé comme premier plan détaillé du centre administratif (Piano particolareggiato del Centre direzionale) mais restera inachevé. Outre la réalisation du tribunal et de la mairie, la construction de plusieurs autres bâtiments était prévue : le palais du gouvernement, le siège de l’INAM (Istituto nazionale par l’assicurazione contro le malattie), soit la sécurité sociale, les archives de l’État, la poste, d’autres édifices publics et résidentiels sur la colline de Macamarda.
16 En 1973, Piccinato développe une variante du PRG sur l’ensemble des secteurs de la ville. En 1977, il présente un plan détaillé (Piano particolareggiato) non seulement de la place mais aussi de la colline Macamarda conçue comme centre administratif. Le plan, qui n’a pas été adopté, prévoyait une série de bâtiments résidentiels autour de la colline et sur la place de la gare avec différents services publics, en prenant exemple sur les projets de centres administratifs italiens, dont celui de Tarente.
17 Vincenzo Baldoni et Piergiorgio Corazza gagnent le concours pour la réalisation du lycée en 1965 (Acito 2017, p. 237).
18 Le plan de modernisation des Ferrovie Calabro-Lucane approuvé en 1969 annonce la fermeture de la ligne Matera – Montalbano Jonico et la substitution du réseau ferroviaire par le réseau routier, géré par la même compagnie. La fermeture advient en deux temps : le tronçon Pisticci Scalo – Montalbano Jonico ferme le 15 janvier 1972, tandis que le tronçon Pisticci Scalo – Matera ferme le 29 septembre 1974. Cette date signale le début des travaux pour l’enfouissement de la voie ferrée. La gare de la place Matteotti est alors condamnée, faisant de la station de Matera-Villa Longo le terminal de la ligne (Mastrodonato 2015, p. 124).
19 À cette occasion 4 nouvelles stations voient le jour : Matera Sud (quartier Lanera), Matera Campo Sud (une station qui n’a jamais été mise en service), Matera Villa Longo (quartier Villa Longo) et Matera Serra Rifusa (à proximité du dépôt ferroviaire).
20 Le projet prévoit la réalisation d’édifices tertiaires et résidentiels disposés autour de grandes places pavées. L’idée initiale d’un centre administratif fondé sur des secteurs spécialisés est abandonnée au profit d’une mixité de fonctions complémentaires (résidence, commerce, production). Galeries, portiques et parcours piétons surélevés viennent relier les espaces publics avec la colline mais délaissent totalement l’aménagement de la place de la gare et la thématique ferroviaire (Padula 2009).
21 Le nouveau plan régulateur général est rédigé par Nigro en 1999.
22 27 équipes répondent au concours. Le 30 juin 1993, après le vote unanime qui désigne un groupement gagnant, le jury décide de classer un second et troisième groupement, mais aussi 3 projets dignes d’être mentionnés pour leur note d’intention. Aucun de ces projets ne sera réalisé par la suite.
23 Raffaele Panella est le chef du groupement constitué de Carlo Aymonino, Orazio Carpenzano, Piergiorgio Corazza, Giuseppe Indovina, Efisio Pitzalis, avec la collaboration d’Andrea Bruschi et Vincenzo Corazza (histoire urbaine), Franco Panzini (espaces verts), Pietro Valentino (économiste), M. Lisa Tugnoli (design urbain), Geneviève Hansenn et Laura Ierma.
24 L’ancienne gare du début du siècle disparaît pour faire place à une fontaine sur la nouvelle place.
25 Le groupe se compose de Carlo Pozzi, Luigi Coccia, Antonio Conte, Antonio Di Giulio, avec Rocco Antezza, Daniela Catalano, Stefano Bidetti, Franco Defilippis, Luca Abate et Domenico Patricelli.
26 Groupement composé de Cesare Porroni, Giancarlo Gaudio, Anna Giovanelli, Marco Negroni, Mario Seccia et Graziano Valenti.
27 Le groupement est classé troisième. Il est composé de Maurizio Pascucci, Loredana Grandinetti, Nabi Habib, Claudio Rocca, Giorgio Tamburini, Paola Tamburini, avec Bruno Cussino, Franco Tamburini, Vittorio Mosco, Giorgio Murato, Valerio Mosco et Claudio Locaro.
28 Il s’agit du groupement composé de Claudio Del Maro, Michele Frese, Enrico Fulfaro, Maria Gabriella Lombardi, Michele Molè et Francesca Rosa.
29 Nicola Pagliara, Michele Lamacchia, Gennaro Larocca, Gaetano Linguito et Rocco Tosti.
30 Luigi Acito, Sergio Lamacchia et Lorenzo Rota.
31 Lors de sa campagne électorale en 2006, Emilio Nicola Buccico annonce vouloir faire de Matera une « capitale de la culture ». Il suggère l’idée à Francesco Salvatore qui crée en janvier 2009 l’association Matera 2019.
32 Extrait du discours d’Emilio Nicola Buccico lors de la conférence de présentation du Concours international le 18 avril 2008.
33 Ibid.
34 L’expression est utilisée par Angelo Lucchini, professeur à l’École polytechnique de Milan et consultant de l’administration communale pour le concours.
35 Llavador crée un parking souterrain de 600 places sous la partie du parc à l’ouest, tandis que Salgado imagine sous la place 2 auditoriums et des places de stationnement.
36 Expression utilisée par le président de la région Marcello Pittella dans son communiqué de presse (La rédaction, « Stanziati dalla regione più di 16 milioni di euro per Matera », Materalife, publié le 2 novembre 2017). Cette même expression est employée par Francesca Cangelli, assesseure à l’urbanisme sous le mandat de Raffaello De Ruggieri (entretien réalisé le 4 avril 2017).
37 Créée le 6 octobre 2016 et présidée par l’artiste Nicola Pavese, l’association comprend parmi ses 27 membres 3 anciens maires de Matera (Francesco Di Caro, Mario Manfredi et Michele Porcari), ainsi que des entrepreneurs, des professionnels et des représentants de la culture.
38 L’axe comprendrait Bari-Gioia del Colle-Matera-Ferrandina-Potenza-Salerno pour ensuite rejoindre rapidement les villes de Naples et de Rome (« Le richieste dell’associazione Matera Ferrovia Nazionale per migliorare i collegamenti con la città dei Sassi », Sassilive, communiqué de presse publié le 14 novembre 2017).
39 Voir chapitre 3.
40 À la suite de la signature du CIS, un communiqué de presse indique que « les contrats sous la responsabilité du coordinateur Nastasi seront gérés par Invitalia à Rome, pour permettre une forte accélération des projets afin d’être prêt pour 2019 » (La rédaction, « Entro gennaio 2018, appaltati i 7 interventi previsti dal Contratto Istituzionale di Sviluppo », Materalife, communiqué de presse publié le 11 octobre 2017).
41 En janvier 2018, la municipalité de Matera doit encore définir précisément la nature de l’intervention prévue dans le CIS pour la place de la Visitazione (procès-verbal de la première réunion institutionnelle, 17 janvier 2018, Palazzo Chigi à Rome).
42 Le projet est présenté le 22 mai dans l’auditorium de Casa Cava avec un accès sur invitation.
43 La rédaction, « Presentato il progetto della nuova stazione di Matera », Askanews, publié le 22 mai 2018.
44 L’expression est entendue telle que la définit Loïse Lenne, à savoir « faire événement dans le temps et dans l’espace avec des outils architecturaux » (Lenne 2015, p. 19).
45 Il s’agit de la Villa Méditerranée construite sur le front de mer. Stefano Boeri compare la ville marseillaise et Matera dans une interview : « Grâce aux interventions effectuées en 2013 Marseille est devenue une grande capitale internationale ; le nombre de touristes a quadruplé. C’est dans cette perspective que j’ai imaginé la nouvelle gare des FAL, afin d’accompagner la ville dans cette occasion extraordinaire » (Di Giacomo 2018, p. 8).
46 Studio Boeri, 2019, La nuova stazione FAL di Matera centrale. Documentaire sur le projet, extrait de l’interview de Stefano Boeri. En ligne : [https://www.youtube.com/watch?time_continue=149&v=aOpu3iDAQSI&feature=emb_logo].
47 Une architecte du Studio Boeri explique le choix des matériaux : « nous avons choisi la pierre locale pour rappeler la ville historique, les Sassi de Matera et l’acier pour rappeler la ville moderne » (ibid.).
48 En 2018, une quinzaine de trains circulent par jour de la gare de Bari-Centrale à Matera avec un trajet qui dure en moyenne 1 h 30 pour une distance de 65 km.
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