Chapitre 3
Les expositions universelles : la mise en scène des systèmes scolaires
Texte intégral
1À partir du milieu du xixe siècle, de nombreuses expositions universelles se tiennent en Europe et aux États-Unis1. L’« universalité » de ces événements résulte de la volonté de mettre en scène l’ensemble des activités humaines et de familiariser un public international avec les derniers progrès accomplis dans tous les secteurs de production2. Présenter les réalisations innovantes dans le domaine économique et industriel – la vapeur, l’électricité, l’automobile – est en effet l’objectif principal des expositions universelles. Organisées en pavillons nationaux depuis 1867, elles représentent de ce fait la vitrine industrielle et technologique des pays participants. Leur fonction est non seulement de rassembler les innovations les plus récentes mais aussi de fournir un effort didactique, voire éducatif, pour informer les visiteurs. L’idéal du progrès, la vision positiviste et linéaire de l’évolution des sociétés y occupent une place centrale. Ainsi, selon Volker Barth, « les Expositions pouvaient prétendre être universelles puisqu’elles mettaient en scène des cultures certes nationales, mais visiblement à la poursuite d’un même et unique but : l’amélioration et la progression constante dans l’ensemble des activités humaines »3.
2L’éducation et l’instruction publique sont partie intégrante du programme des expositions universelles de la seconde moitié du xixe siècle. Elles offrent aux contemporains un terrain d’étude privilégié pour évaluer et comparer les progrès d’un système national. En outre, elles sont des lieux de rencontre et de sociabilité, facilitant les échanges de matériel et de documents – les musées pédagogiques se développent dans ce contexte4 – ainsi que l’organisation des congrès internationaux. Or, l’implication des réformateurs français dans ces événements se module selon plusieurs cas de figure qu’il est possible de cerner à travers une rapide incursion dans les principales expositions universelles qui jalonnent la fin du xixe siècle5.
3Une telle étude présente deux problèmes majeurs. D’une part, le nombre très élevé d’expositions rend difficile l’évaluation du rôle singulier joué par chaque événement. Certains sont investis d’une importance symbolique centrale par rapport à d’autres, qui passent relativement inaperçus6. D’autre part, il s’agit d’un sujet relativement peu exploré par l’historiographie, ce qui limite les possibilités de comparaison du cas français avec d’autres pays7. Malgré ces écueils, les expositions illustrent deux dynamiques de fond. Tout d’abord, elles permettent aux réformateurs de valoriser les réussites scolaires de leur propre pays, et le cas échéant de la Troisième République. Elles ont donc pour but de montrer, statistiques et documents à l’appui, les succès des politiques scolaires entreprises à partir des années 1880. Les sections françaises constituent bel et bien un instrument de légitimation des projets républicains, qui bénéficient d’une reconnaissance internationale. Ensuite, les expositions sont aussi une source de renseignements sur l’évolution de l’instruction publique dans le monde8. Composées de spécialistes, les délégations visitent et expertisent les différentes sections et les écoles du pays organisateur, permettant ainsi de situer l’évolution française dans le contexte international et d’en évaluer les atouts ou les retards.
French School on Tour : l’école française aux expositions universelles
4Si la première exposition universelle date de 18519, l’éducation devient un sujet d’intérêt plus tardivement. Une section distincte de l’Exposition de Londres en 1862 est consacrée aux matériaux relatifs à l’enseignement industriel et secondaire, réunis à partir de 1856 dans le Musée pédagogique de South Kensington10. L’Exposition de Paris de 1867 présente aussi une section scolaire11, mais c’est essentiellement dans les années 1870 (à Vienne en 1873 et à Philadelphie en 1876) que l’éducation devient un véritable objet d’exposition, évalué par un jury d’experts internationaux. Dès le début des années 1880, toute exposition universelle ou internationale présente des sections consacrées aux différents degrés de l’enseignement. Il s’agit de salles et de pavillons spécifiques dans lesquels chaque pays participant peut exposer les documents et les objets les plus variés pour rendre compte de l’état et de l’évolution de l’éducation au sein de son territoire.
5Dans les trois dernières décennies du xixe siècle, la question de la représentation du système scolaire français lors des expositions universelles se manifeste avec une certaine importance. Le ministère de l’Instruction publique saisit très vite leur intérêt pour étendre l’influence culturelle française à travers le monde d’une part et pour acquérir des informations sur l’organisation scolaire des pays étrangers d’autre part. Elles offrent notamment la possibilité d’évaluer mais surtout de montrer aux autres pays les progrès accomplis dans ce domaine. C’est pour cela qu’elles mobilisent les experts des questions éducatives. Les chefs de division du ministère, les inspecteurs généraux de l’enseignement, les professeurs universitaires ou des membres du Conseil supérieur de l’Instruction publique sont chargés d’organiser la section française, d’examiner les sections étrangères et, le cas échéant, de visiter les écoles du pays organisateur. Si les expositions permettent de saisir l’évolution des systèmes scolaires modernes, la question de la représentation du système national demeure toujours centrale. De ce fait, la tension entre les mises en scène de la puissance nationale et l’ambition universaliste des expositions se cristallise pleinement lors de ces événements. Fuchs souligne en effet que le but fondamental des sections scolaires est de mettre en avant les atouts et les réalisations les plus récentes d’un pays en matière d’éducation12. Benjamin Buisson le signale clairement en 1884, lors de la Health International Exhibition de Londres :
L’Angleterre avait surpris beaucoup de continentaux par les progrès accomplis chez elle dans les divers arts industriels, grâce à l’influence de ses écoles d’art et de son célèbre Musée de South Kensington ; elle avait aussi prouvé lumineusement que, depuis l’adoption du système des School boards et du régime de l’obligation, elle a regagné beaucoup de temps perdu en matière d’enseignement primaire.13
6Le ministère de l’Instruction publique français organise des sections scolaires particulièrement importantes à partir du début des années 1880. Leur finalité est très claire : exposer les réussites de la Troisième République. À cet égard, le domaine scolaire s’inscrit dans une politique plus large dont le but est de montrer que la nouvelle République prend soin de ses citoyens, de leur travail comme de leur éducation14. Cette volonté se retrouve également dans les événements organisés à l’étranger et notamment aux États-Unis. Ainsi, selon son responsable Benjamin Buisson, la présence française à La Nouvelle-Orléans en 1884 (neuf salles) a pour objectif de « faire juger au Nouveau Monde combien énergétique depuis 1871 est la volonté de la France de se relever par l’instruction et le travail »15. De même, l’Exposition de Chicago en 1893 doit permettre, comme le souligne le directeur du Musée pédagogique Jules Steeg, de « rappeler les efforts faits par la France pour présenter dignement à l’appréciation des peuples étrangers notre enseignement public sous toutes ses faces »16. Les expositions universelles à Paris constituent des exemples paradigmatiques de cette ambition de présenter les succès scolaires de la Troisième République. Par exemple, le projet entamé par Ferdinand Buisson en 1876 et qui débouche sur la rédaction du fameux Dictionnaire de pédagogie, « bible » de l’enseignement primaire français17 et selon Pierre Nora véritable « lieu de mémoire »18, est explicitement conçu en vue de l’Exposition de 187819. Au moment de l’Exposition de Paris en 1889, il est nécessaire de présenter les nouvelles institutions scolaires mises en place dans les années 1880 au public national et international. Le Musée pédagogique prépare à cet effet un recueil de soixante monographies thématiques, subdivisées en six volumes, présentant tous les aspects de l’enseignement primaire français20. Les publications sont pensées comme étant une première autoévaluation officielle de l’école républicaine. Cet important déploiement de matériel fait d’ailleurs dire à Benjamin Buisson que « la section scolaire française atteste d’une manière définitive que la cause de l’enseignement populaire est gagnée »21. Cet investissement s’explique par le fait que Buisson est convaincu de la nécessité d’éradiquer les préjugés sur l’éducation française entretenus à l’étranger et de persuader les observateurs des autres pays de ses progrès et de son efficacité.
7La mise en scène de l’école républicaine constitue une caractéristique de toutes les expositions françaises de la fin du xixe siècle. La propagande concernant les efforts accomplis en matière d’instruction publique par les réformateurs républicains semble dès lors avoir un effet positif. En effet, de nombreux observateurs étrangers reprennent les discours des réformateurs français et reconnaissent les importants progrès accomplis, notamment après la défaite de Sedan. Cela montre que les républicains réussissent à se démarquer des politiques précédentes et que l’écho des débats nationaux français s’étend au-delà des frontières nationales. Ainsi, le rapport du jury international de l’Exposition internationale de Melbourne en 1888 fait état de la réception particulièrement positive de la section française :
Le système éducatif, en particulier l'enseignement primaire, est considéré comme l'un des plus grands triomphes de la République. […] La République a appris de nombreuses leçons de Sedan et a pris apparemment au sérieux le dicton selon lequel c’est l’éducation des sergents allemands qui gagna les batailles. Elle a toutes les raisons d’être satisfaite des progrès qui ont été réalisés, ainsi que de son imposante, intéressante et instructive présentation de tous les matériaux éducatifs.22
8Il ne faut pas oublier que la concurrence entre les pays est très importante. Si comme le remarque Charles-Victor Langlois, les expositions montrent que « toutes les nations sont en marche vers les mêmes buts, par des chemins divers »23, la démarche scientifique qui vise à exploiter ces événements pour étudier et expertiser les systèmes scolaires étrangers est aussi systématiquement ramenée à un classement des nations, dans lequel la France doit figurer au premier rang. Ce souci est d’autant plus marqué après la défaite contre les Prussiens en 1870, quand il s’agit de retrouver le prestige d’antan24. Benjamin Buisson illustre clairement cette préoccupation permanente :
[L’Exposition] offre au public les moyens de se faire une idée des procédés d’enseignements, de comparer les principales méthodes, d’en constater les résultats, d’apprécier les effets, ici de l’indifférence, là du dévouement général de l’école publique : de sorte que chaque visiteur, pour peu qu’il sût observer et juger, pouvait conclure aisément de cet examen s’il avait lieu d’être fier ou humilié du rang de son État ou de sa commune dans l’échelle de l’instruction et de l’éducation.25
9Les enjeux sont donc de taille. Afin d’assurer leur qualité, les sections scolaires françaises sont préparées à l’avance par un comité d’experts qui sélectionne les objets et les matériaux qui doivent être mis à l’honneur dans la section française26. Celui-ci inclut notamment des inspecteurs de l’enseignement, des directeurs d’école et des membres du Parlement. Les délégations qui se rendent sur place sont composées par les experts en éducation qui s’illustrent également dans d’autres domaines touchant à l’international, à l’instar des missions d’étude ou du Musée pédagogique. Des figures comme Ferdinand Buisson, Émile Levasseur, Jules Steeg, Benjamin Buisson, Charles-Victor Langlois, Gabriel Compayré et bien d’autres sont les auteurs d’un grand nombre de rapports et de comptes rendus. Les expositions universelles contribuent donc à développer et à améliorer leur expertise. Si, par exemple, Benjamin Buisson écrit la plupart des articles sur les pays anglo-saxons dans la Revue pédagogique, c’est parce qu’il dispose d’une connaissance sans égale du sujet dans la mesure où il participe aux expositions de La Nouvelle-Orléans, de Melbourne, de Chicago et de Saint-Louis ou les dirige.
10L’ensemble des informations et des observations sont restituées dans deux types de rapports. Tout d’abord, des comptes rendus « classiques » répertorient le contenu des différentes sections et en présentent l’organisation, sans formuler de commentaires ou d’analyses particulières. Ensuite, des comptes rendus plus analytiques commentent les informations et les données fournies par les documents réunis dans les différentes sections et les inscrivent dans le contexte plus vaste de l’évolution des systèmes scolaires modernes dans les pays occidentaux. En ce qui concerne les aspects matériels, certaines caractéristiques permanentes peuvent être dégagées. Les différentes commissions qui préparent les expositions tâchent de fournir la représentation la plus complète du système national. Pour ce faire, elles n’hésitent pas à solliciter les sociétés de l’enseignement, les associations promouvant l’enseignement populaire et technique, les chambres de commerce et syndicales, les maisons d’édition ainsi que les associations et les écoles de l’enseignement libre27. Louis Bouquet, directeur de l’enseignement technique au ministère du Commerce, s’adresse par exemple aux futurs exposants de l’Exposition de Saint-Louis en 1904 en soulignant que « le concours de tous est indispensable » afin de « réunir un nombre d’exposants suffisants pour montrer les résultats obtenus soit par l’État, les départements ou les communes, soit par l’initiative privée »28. Ainsi, la lutte entre les partisans et les adversaires de la laïcité scolaire s’estomperait face à la volonté de représenter l’ensemble des efforts éducatifs de la France. Ensuite, les sections scolaires sont toujours divisées par « classes » en fonction des différents ordres d’enseignement : les écoles maternelles, l’enseignement primaire, secondaire, supérieur et professionnel ainsi que les maisons d’édition et les orphelinats y figurent. Dans chacune y sont présentés des tableaux statistiques, des programmes d’études des différentes filières, des travaux d’élèves, des manuels scolaires, des dessins ainsi que des plans architecturaux des salles et des écoles. S’y ajoutent les publications du Musée pédagogique, dont la Revue pédagogique, et des ouvrages sur l’histoire de l’éducation en France. Les villes et les municipalités peuvent aussi y présenter leurs écoles. Les supports sont donc multipliés en vue d’embrasser l’ensemble du dispositif éducatif d’un pays29. De ce fait, les expositions permettent de saisir ce que Martin Lawn et Ian Grosnevor dénomment la « matérialité de l’éducation »30.
11Du fait de la diversité et de la technicité du matériel qui compose les expositions, ces sections s’adressent à un public de spécialistes. Les documents techniques et législatifs ne sont en effet intelligibles que pour les initiés. Henry Lemonnier, professeur à la faculté des lettres de Paris et auteur du rapport sur l’enseignement secondaire de l’Exposition de 1900, rappelle qu’il faut avoir une bonne préparation personnelle « pour apprécier la valeur représentative d’une copie d’élève ou la somme d’observation, de réflexion, d’expérience, que renferme une brochure pédagogique »31. De plus, les documents des différentes sections sont rédigés dans la langue du pays exposant. Une maîtrise des langues étrangères est donc souvent indispensable pour en apprécier le contenu.
12Par ailleurs, la participation des États diffère substantiellement selon les expositions, tant du point de vue quantitatif que qualitatif. L’universalité de ces événements peut donc être considérablement relativisée en raison de la participation d’un nombre très variable de pays étrangers. En 1878, par exemple, la France et les États-Unis représentent la majorité des exposants, alors que l’Allemagne, pour ne citer qu’un modèle scolaire très sollicité en France à la même période, est absente.
05. Exposants de la Classe 6 à l’Exposition universelle de 1878

Source : Benjamin Buisson, Ministère du Commerce, de l’industrie et des colonies. Exposition universelle internationale de 1889 à Paris. Rapports du jury international. Classe 6. Éducation de l’enfant, enseignement primaire, enseignement des adultes, Paris, Imprimerie nationale, 1891, p. 6.
13La même situation se présente d’ailleurs en 1889 et en 1900, car l’Allemagne n’organise pas de section scolaire, alors qu’elle est bien représentée dans d’autres domaines32. Au demeurant, l’Exposition célébrant le centenaire de la Révolution française est boycottée par les pays monarchistes. Ce problème est bien remarqué par les observateurs, qui se plaignent souvent du nombre réduit d’exposants étrangers, même si selon Benjamin Buisson « l’insuffisance des sections étrangères a été compensée par la richesse, la variété, la surabondance, on peut le dire, de la section française »33. Plus généralement, il convient de rappeler que l’Allemagne participe uniquement aux expositions de Vienne (1873), de Chicago (1893) et de Saint-Louis (1904)34. Les États-Unis, en revanche, présentent des sections scolaires à toutes les occasions, tandis que la France renonce seulement à exposer à Philadelphie en 1876, même si une délégation est envoyée sur place35. À l’inconstance et l’asymétrie de la participation des différents pays aux sections scolaires, s’ajoute le problème de la qualité même de ces sections. Celles-ci sont souvent décrites comme incomplètes ou très partielles, ce qui montre que les questions éducatives sont souvent subordonnées aux aspects industriels. À Vienne, par exemple, aucune entente n’est élaborée entre les États participants avant l’Exposition, aucune base commune discutée, au grand regret de Ferdinand Buisson. Dans ces conditions, il est difficile de procéder à des examens parallèles pointus, à des comparaisons réellement fructueuses36. Cette organisation « abandonnée à l’initiative personnelle » constitue selon Buisson le « vice capital » de l’Exposition viennoise37. En 1889, son frère Benjamin remarque que même les pays « présentant une constitution analogue à la nôtre », comme la Suisse, les États-Unis ou les républiques d’Amérique du Sud, « préoccupés surtout de frapper l’imagination de la vieille Europe par la perspective de leurs destinées commerciales ou industrielles […] n’ont généralement pas représenté l’instruction publique avec tout le développement qu’elle méritait »38. Ce constat est également valable pour les sections françaises qui, à l’étranger, ne sont pas en mesure de proposer des expositions aussi imposantes que celles présentées à Paris, surtout à cause des coûts importants engendrés par l’acheminement du matériel. Pour cette même raison, les documents sont rarement rapatriés et ainsi légués aux musées pédagogiques des pays hôtes.
Perceptions étrangères de l’école républicaine
14La question de la représentation du système scolaire français lors des expositions universelles soulève également celle de sa perception. De nombreux observateurs étrangers attestent les avancées scolaires de la France et confortent ainsi les républicains dans leur volonté de présenter les progrès accomplis dans les trois dernières décennies du xixe siècle. Cela est d’ailleurs confirmé par les résultats de nombreuses missions pédagogiques, surtout anglaises et américaines, qui certifient aux yeux des contemporains les réussites de la Troisième République. Les experts qui visitent les écoles françaises notent que la défaite de 1870-1871 semble avoir profondément secoué les réformateurs français et contribué à enclencher un mouvement de réforme39. Dans son étude sur le système secondaire français de 1910, Frederic E. Farrington, professeur d’éducation à l’université de Californie, remarque un regain d’intérêt pour la France parmi les pédagogues de son pays. Elle pourrait même concurrencer le modèle allemand, une référence historiquement bien établie aux États-Unis et en Angleterre :
Pendant plus de soixante-quinze ans, l’Allemagne a été fréquentée par des savants américains afin d’obtenir un nouvel éclairage sur la solution de certains des problèmes éducatifs les plus épineux auxquels nous avons été confrontés. La question est encore ouverte de savoir si la France avait quoi que ce soit de digne d’intérêt dans son système éducatif pour compenser les ennuis de la réalisation d’une étude approfondie des conditions dans ce pays. Depuis la guerre franco-prussienne, toutefois, elle est allée de l’avant tranquillement et sans ostentation, au point qu’aujourd’hui elle est parmi les leaders.40
15Les expositions universelles constituent donc des occasions précieuses pour consolider les impressions des chargés de mission qui se rendent en France à la fin du xixe siècle. L’engagement du ministère de l’Instruction publique, des responsables et des rapporteurs des différentes expositions témoigne de leur volonté de montrer, surtout à travers des statistiques, les améliorations accomplies en termes de taux de scolarisation et d’accroissement du nombre d’écoles. Le vaste appareil législatif et administratif mis en place à partir de l’arrivée au pouvoir des républicains est aussi valorisé. La création d’écoles normales (1879), l’établissement de l’obligation, de la gratuité et de la laïcité scolaire (1881-1882) ainsi que la laïcisation du personnel (1886) tout comme les différentes lois améliorant le traitement des instituteurs (1889) sont présentées comme les points forts de l’œuvre scolaire républicaine41. En 1916, French Scott, professeur d’histoire à l’université du Michigan, remarque à nouveau le rôle pivot de la défaite de Sedan ; à ses yeux, elle a rendu évidente la nécessité de l’instruction obligatoire et gratuite et la volonté de se « débarrasser » de l’Église afin de faire un full use de l’école en tant qu’instrument de régénération nationale :
La foi dans l’éducation comme un moyen de régénérer la vie nationale émergea après les désastres de la guerre de 1870. Gambetta, en préconisant le service militaire obligatoire et une application plus rigoureuse de la souveraineté nationale, plaça au-dessus de tout une éducation pleinement nationale, c’est-à-dire une éducation imposée à tous. […] Cette leçon fut apprise en grande partie de leurs vainqueurs.42
16Les expositions doivent alors montrer et diffuser au mieux les résultats de cet intense travail. La participation aux expositions de La Nouvelle-Orléans, de Melbourne et de Chicago donne toujours lieu à des commentaires positifs qui semblent être le fruit d’une politique de propagande réussie. Chargé par la National Education Association du rapport sur les sections scolaires étrangères à La Nouvelle-Orléans en 1884, William T. Harris, responsable des écoles municipales de Saint-Louis et futur commissaire général pour l’éducation aux États-Unis, apprécie l’effort entrepris à cette occasion par les Français :
Ce fut la France, cependant, qui contribua aux merveilles des collections éducatives de l’exposition de La Nouvelle-Orléans. Le dispositif éducatif français valait le voyage jusqu’à La Nouvelle-Orléans depuis n’importe quelle partie des États-Unis – au moins, il le valait tout à fait pour les enseignants.43
17Quelques années plus tard, en 1888, la section scolaire française fait bonne figure également à Melbourne, au point que Sir Robert Stout, ministre de l’Éducation de la Nouvelle-Zélande, demande à pouvoir la reconduire dans son pays, dans la salle du Parlement à Wellington. Son commentaire est éloquent :
Cette Exposition particulière révèle un état de supériorité incontestable et surprenante, si on la compare avec les éléments de même ordre dans les sections allemandes, anglaises et autres. Les maîtres français me semblent avoir atteint la perfection en matière pédagogique. Voilà un fait important et que tous devraient mettre en évidence en tout lieu et en toute occasion.44
18La section française reçoit également à plusieurs reprises de nombreux prix. Cela n’atteste en rien une réelle supériorité ou avance par rapport aux autres pays dans la mesure où les diplômes et les mentions d’honneur distribués se comptent par centaines. Néanmoins, les récompenses attribuées au ministère de l’Instruction publique, à différentes écoles-modèles ou aux sociétés d’enseignement prouvent aux réformateurs français « combien les progrès accomplis récemment [en France], du point de vue de la construction, du mobilier et du matériel des écoles, aussi bien que pour les méthodes et les résultats de l’instruction et de l’éducation ont été compris et appréciés »45. S’il reste très difficile d’évaluer l’impact de cette diplomatie scolaire, par exemple dans l’attrait d’étudiants étrangers ou dans le rayonnement culturel de la France, les effets de la politique de représentation du système scolaire français lors des expositions universelles sont d’autant plus remarquables qu’un pays pédagogiquement renommé comme l’Allemagne ne s’engage pas toujours dans ces événements.
Rankings et performances scolaires : la France face à la comparaison internationale
19Dans un contexte de profondes transformations du système scolaire national, les expositions universelles constituent enfin pour les réformateurs français des lieux d’évaluation des politiques scolaires des autres pays. Par un effet de miroir, elles permettent de porter un autre regard sur ses propres institutions et ses propres politiques éducatives. C’est pour cela qu’outre l’organisation de la section scolaire, les délégués français sont souvent chargés de mener des enquêtes. Ce travail s’inscrit dans le cadre des missions pédagogiques et ambitionne d’étudier d’un point de vue scientifique les réalisations et les expériences scolaires à l’étranger. Les volumineux comptes rendus qui s’ensuivent sont riches d’analyses comparées qui, en mettant en relief les retards de la France, ouvrent la voie à une possibilité d’emprunts.
20Dans les années 1870, l’expertise des sections scolaires des expositions universelles est confiée à une figure bien connue du champ réformateur français. Ferdinand Buisson dirige en effet les délégations françaises aux expositions de Vienne en 1873 et de Philadelphie en 1876, les premières à offrir un espace important à l’éducation et notamment à l’enseignement primaire. C’est en 1873 que Buisson, alors inspecteur de l’enseignement primaire de la Seine, est chargé d’une mission de cinq mois pour étudier l’enseignement primaire à l’Exposition de Vienne46. Il fait partie d’une délégation qui comprend entres autres Émile Levasseur, membre de la Commission supérieure des expositions internationales, et Octave Gréard, alors inspecteur général de l’enseignement et directeur de l’enseignement primaire de la Seine. L’Exposition de Vienne est essentiellement austro-allemande, des pays comme l’Angleterre, l’Italie, la Belgique et les États-Unis y étant faiblement représentés. L’intention de Buisson est de récolter une somme d’informations pouvant se révéler utile à la France :
[Le but est de] signaler aux hommes qui chez nous s’occupent spécialement de l’instruction du peuple un certain nombre de faits remarquables, qui s’étant produits récemment, loin de nous et dans l’humble domaine de l’école primaire, ont pu échapper à leur attention.47
21Au cours de ces années l’objet principal du débat, en France comme dans d’autres pays, est celui de l’obligation scolaire. Un autre membre de la délégation, Levasseur, reprend précisément cette question sur la base de ses observations et des documents récoltés lors de son séjour à Vienne. Le but est d’étudier l’enseignement primaire dans les pays dits civilisés et, dans ce cas aussi, de faciliter cette étude « par le rapprochement, des comparaisons, dont les pédagogues et les législateurs pourront tirer profit »48. Poursuivant un travail de récolte de statistiques scolaires, déjà entamé par le congrès international de statistique, fondé en 1853 par le Belge Adolphe Quetelet49, Levasseur parvient ainsi à rassembler un matériel fort important et à établir un véritable classement des pays selon leurs performances scolaires. Le tableau suivant constitue la synthèse de son imposant compte rendu, écrit une année et demie après l’Exposition et faisant suite à celui de Ferdinand Buisson. Structuré en deux parties, il présente tout d’abord sur environ 150 pages plusieurs chapitres consacrés à l’histoire scolaire et à l’organisation législative et administrative des pays. Ces notices sont plus ou moins longues – on notera sans grande surprise l’étendue des fiches sur l’Allemagne ou les États-Unis – et sont suivies par une deuxième partie plus analytique (une vingtaine de pages) dans laquelle Levasseur livre une fresque impressionnante de l’évolution de l’instruction dans le monde au xixe siècle50. Conscient des nombreux biais des données dont il dispose, il procède néanmoins à une analyse fine, fourmillant d’exemples et de contre-exemples, où les affirmations péremptoires sont rares. Plus que la pertinence des procédés statistiques de récolte des données, leur traitement ou leur exactitude, il est intéressant de mettre en valeur une démarche intellectuelle qui voit désormais dans les chiffres une possibilité de mesurer l’efficacité de l’éducation et des politiques mises en place par l’administration publique51. Ceci à un moment où, comme le rappelle Levasseur, « les nations, quelles que soient les différences qui les séparent, ont toutes un trait commun : la sollicitude que leur inspire aujourd’hui l’instruction populaire et les efforts qu’elles font pour l’étendre » (p. 512).
06. L’état de l’instruction primaire dans les « pays civilisés » en 1873 selon Émile Levasseur.

Source : Émile Levasseur, « Instruction primaire et secondaire », Exposition universelle de Vienne en 1873, Rapports, t. IV, Paris, Imprimerie nationale, 1875, p. 507.
22Le classement, présenté ici dans sa version originale, est établi d’après les statistiques disponibles à l’époque sur le nombre d’élèves par rapport à la population totale (nombre d’élèves pour 100 habitants ; p. 463-464). Les variables explicatives sont nombreuses, structurées autour d’une quinzaine de points, et peuvent prendre en compte tant les mentalités associées à une population ou à une « race » que le climat, la religion, le régime politique ou encore les mesures législatives mises en place par tel ou tel pays. Levasseur remarque l’état d’infériorité de la France par rapport à ses voisins, dont l’Allemagne, la Suisse mais aussi les États-Unis. Il souligne la supériorité des pays protestants dans les efforts entrepris pour l’éducation du peuple, attribuée au fait que « les protestants ont absolument besoin que les fidèles sachent lire et écrire » (p. 509). Par ailleurs, ce sont justement les « particularités mentales », idée chère à Max Weber, qui font que les populations européennes des colonies (Algérie, colonies néerlandaises) occupent le premier rang du classement. Composées de « colons, marchands, laboureurs ou artisans », celles-ci auraient plus à cœur les vertus de l’instruction et voudraient ainsi « en assurer le bénéfice à [leurs] enfants » (p. 511). Le rôle croissant de l’autorité publique (État, communes) dans le contrôle de l’éducation est aussi évoqué dans son rapport, même s’il n’est pas directement mis en lien avec le degré d’instruction (le cas de l’Angleterre est à cet égard mentionné comme contre-exemple). Levasseur souligne également l’importance des ressources financières (les États-Unis dépenseraient pour l’instruction primaire quatre fois les ressources de la Saxe, du Wurtemberg et de la Suisse, p. 516) et du traitement des instituteurs pour les progrès de la scolarisation. Il n’hésite pas à juger l’effort financier de la France largement insatisfaisant, car les dépenses publiques « ne sont pas encore au taux auquel il serait utile de les porter » (p. 517).
23Surtout, le relatif retard de la France se manifesterait dans les dispositifs législatifs qui régulent l’instruction publique, et tout particulièrement l’obligation et la gratuité scolaire. L’introduction de la scolarité obligatoire est vue comme une condition du progrès de l’éducation et de la prospérité de la nation. Selon lui, « il est certain que la plupart des États qui occupent les premiers rangs dans le tableau ont décrété l’obligation, et que, par conséquent, cette mesure légale coïncide souvent avec un grand développement de l’instruction » (p. 514). Certes, pour Levasseur, l’universalisation de l’enseignement primaire pourrait également être poursuivie avec l’amélioration de la formation des maîtres et une augmentation conséquente du nombre d’écoles et des dépenses publiques. Toutefois, force est de constater que la question de l’obligation et de la gratuité scolaire est à l’ordre du jour dans la plupart des pays occidentaux, et qu’elle a été le plus souvent résolue avec son adoption. Les leçons à tirer sont claires :
Si nous voulons rester dans les premiers rangs des peuples civilisés, il faut que nous nous pliions à toutes les exigences de la civilisation moderne ; une des premières est de posséder et d’améliorer sans cesse une forte instruction supérieure, une large instruction secondaire et une instruction primaire universelle. (p. 464)
24Avec ce travail statistique, Levasseur entame un travail d’enquête qui durera vingt ans52, ce qui montre que l’éducation participe bel et bien à l’« internationalisme statistique » de la seconde moitié du xixe siècle53. En effet, il publie en 1897 un recueil de statistiques intitulé L’enseignement primaire dans les pays civilisés54, fruit d’un travail de récolte de données commencé à Vienne, poursuivi dans le cadre de l’Institut international de statistique fondé en 1885 et même primé lors de l’Exposition universelle de Saint-Louis en 190455.
L’émergence du modèle américain
25Signe annonciateur d’une compétition internationale fondée sur les performances scolaires, la participation française aux sections scolaires des expositions universelles fait aussi émerger les contours d’un américanisme assez marqué, voire d’une véritable américanophilie. Dans son ouvrage La République des universitaires, Christophe Charle identifie le tournant du siècle comme le moment où s’affirme en France la référence au modèle universitaire américain. En ce qui concerne les degrés inférieurs du système éducatif, en revanche, l’intérêt pour les faits scolaires d’outre-Atlantique se manifeste plus précocement. Il est particulièrement frappant de noter que cette sympathie militante pour l’œuvre scolaire de la « république sœur » se développe au moment même où certaines recherches récentes, fondées sur des témoignages littéraires et journalistiques, laissent penser que prévalait dans l’opinion française une image plutôt négative des États-Unis56.
26Sans vouloir nécessairement remettre en question les résultats de ces travaux, il convient tout d’abord de signaler le grand investissement des États-Unis dans l’organisation des expositions et des congrès, qui peut expliquer le retentissement de la pédagogie américaine dans l’Hexagone. Tout comme pour les Français, c’est une occasion de montrer aux observateurs étrangers les progrès accomplis dans ce domaine : à Philadelphie, les Américains sont conscients que « l’épreuve sera sévère »57, selon les termes de James P. Wickersham, responsable de l’instruction publique pour l’État de Pennsylvanie entre 1866 et 1881. Sévère, certes, mais réussie. Du côté français, l’enseignement primaire américain est l’objet d’une très grande attention. La délégation qui se rend à Philadelphie lui consacre un impressionnant compte rendu. Elle est composée de Ferdinand Buisson, Bonaventure Berger (inspecteur primaire de la Seine et futur directeur du Musée pédagogique), d’un inspecteur primaire (Laporte) et de trois instituteurs désignés par la Société d’instituteurs et des institutrices de la Seine (Olagnier, Rauber et Valens). Lors de leur arrivée le 18 juillet 1873, ils entament un séjour de cinq semaines consacré à une étude complète du système scolaire. Celui-ci comprend la visite des différents pavillons nationaux de l’Exposition universelle ainsi qu’une série de visites dans les écoles de plusieurs États américains et des provinces canadiennes de l’Ontario et du Québec. L’enquête s’intéresse à tous les aspects du système primaire américain. Buisson reste impressionné par le free school system, qu’il explique par la nécessité d’initier les nouveaux immigrants à l’exercice de la démocratie, par l’enseignement de l’histoire (profondément lié à l’instruction civique) ainsi que par le recrutement sur une base sociale large des high schools. En revanche, il se montre plus sceptique sur la coéducation des sexes dans tous les degrés de l’enseignement, excepté pour l’enseignement primaire, car elle permettrait une meilleure évaluation des élèves. Il faut remarquer que la posture des délégués se veut, sans grande surprise, scientifique et non partisane. Dans ce cas aussi, l’enquête produit un faisceau de renseignements et de documentations qu’il s’agit de mettre à disposition de « ceux qui veulent que l’instruction primaire en France, sans se modeler sur autrui, s’inspire assez de ce que produisent de meilleur tous les autres pays pour n’avoir à redouter la comparaison avec aucun d’eux »58. Un volume recueillant les devoirs d’écoliers américains est également édité en 187759. Le journal Le Temps publie en mars 1878 un article élogieux sur la publication dirigée par Buisson en soulignant que « la commission scolaire de Philadelphie a rempli son mandat de la façon la plus honorable pour [le] pays et la plus utile à la cause de [l’]instruction publique »60. Toutefois, le degré d’« imitation » acceptable n’est jamais vraiment explicité. La volonté de faire ressortir la spécificité nationale française est en revanche constamment présente. Ferdinand Buisson, proche de certaines grandes figures de la pédagogie américaine, n’hésite d’ailleurs pas à l’admettre :
L’école est une institution sociale, inséparable de la société elle-même, impossible à transporter toute faite d’un pays à l’autre ou d’un régime à l’autre. Eussions-nous vu en Amérique, la perfection du système scolaire, il n’en serait pas moins chimérique de notre part de conclure à l’importation de ce système.61
27Cette fascination pour l’école américaine se manifeste également les années suivantes, une fois les principales lois scolaires établies. En 1884, lors de la World’s Industrial and Cotton Centennial Exposition de La Nouvelle-Orléans la participation des pays étrangers est relativement réduite. La Belgique et l’Angleterre, par exemple, ne participent pas officiellement alors que le Japon organise une exposition importante. La section française est dirigée par un véritable expert des questions scolaires anglo-saxonnes : Benjamin Buisson, fin connaisseur des systèmes scolaires anglais et américains62. Lors de l’Exposition, son but est de faire état des nouveautés du mouvement scolaire américain en prenant comme point de comparaison le compte rendu rédigé par son frère huit ans auparavant. Il s’agit également de mettre à jour les informations et les analyses formulées par deux chargés de mission (Paul Passy et Marie Ladreyt) qui, en 1883, ont étudié le système américain63. Les considérations de Buisson prolongent celles de ses prédécesseurs. Selon lui, dans le système américain, l’instruction est considérée comme un intérêt public. Le fort taux de scolarisation, l’accroissement du nombre d’écoles et du personnel enseignant constitueraient les atouts principaux de ce système. Le lien entre la scolarisation du peuple et les principes politiques démocratiques de la république américaine est mis en avant :
Généraliser les connaissances usuelles, multiplier les centres d’instruction secondaire, supérieure et professionnelle, c’est fortifier l’unité américaine, sauvegarder la république, rehausser le prestige national et augmenter pour le pays comme pour les individus les chances de victoire dans la lutte pour l’existence.64
28La prétendue proximité des structures politiques et des idéaux démocratiques entre les deux pays favorise ce regard privilégié sur les questions de la scolarisation du peuple. Ferdinand Buisson, mais surtout son frère Benjamin expliquent comment le caractère démocratique de l’école américaine, qui se manifeste dans l’accès de masse à l’instruction primaire et dans le large éventail social de l’enseignement secondaire, résulterait même des principes inspirés par la Révolution française :
Il est bien naturel que nos législateurs cherchant des inspirations au moment de remodeler notre système scolaire, aient reporté leurs regards vers celui de cette Amérique qui est demeurée plus fidèle que la France à l’esprit de la Révolution française.65
29Ce consensus sur des idéaux politiques fait des États-Unis un modèle de référence pour les questions relatives à l’enseignement primaire66. Or, si les atouts du système sont reconnus, et donc susceptibles d’être importés en France, les limites du modèle sont également bien identifiées. Le régime fédéral qui laisse l’organisation du système scolaire aux États, voire aux municipalités et aux communes, s’oppose radicalement à la conception centralisatrice du modèle républicain français. L’insuffisance de l’inspection scolaire, l’instabilité de la position des instituteurs, la modicité de leurs traitements et, enfin, l’absence de sanctions contre l’absentéisme scolaire dans certains États atténuent l’enthousiasme sur la possibilité d’emprunts au système américain67.
30Un certain intérêt, bien que plus marginal et tardif, se manifeste également pour l’enseignement professionnel et technique, notamment lors de l’Exposition universelle de Chicago en 1893. À cette occasion, le directeur de l’enseignement industriel et commercial au sein du ministère du Commerce est chargé d’une mission afin d’étudier ces questions. Son but est de procéder à un « examen approfondi de l’organisation de cet enseignement, des méthodes employées, des résultats obtenus », un travail en somme « qui pouvait se faire uniquement lors de la World’s Fair »68. Parmi les membres de la délégation qui se chargent de la rédaction des rapports et des comptes rendus, on trouve à nouveau Benjamin Buisson (pour l’enseignement primaire), Eugène Martin, inspecteur général de l’enseignement primaire à Montargis et directeur de l’école primaire supérieure de Hirson (pour l’enseignement manuel), Gabriel Compayré69 et Jules Steeg, directeur du Musée pédagogique qui se charge du rapport général. La visite des écoles du pays constitue toujours une étape obligée. Martin se concentre par exemple sur les écoles professionnelles. Il souligne comment « l’accueil engageant qu’il a trouvé dans toutes les parties des États-Unis […] auprès des spécialistes de l’instruction manuelle » lui a prouvé « avec quelle gratitude ses collègues d’Amérique avaient recueilli ses informations compétentes sur les côtés techniques de notre enseignement primaire »70. Après son arrivée à New York, la première école qu’il visite est la Workingman’s School fondée par Félix Adler. Les jours suivants il se rend au Pratt’s Institute, au Drexel Institute de Philadelphie ainsi qu’à la Chicago Manual Training School71. Martin a aussi plusieurs conversations avec Calvin Woodward, le pionnier de l’enseignement manuel aux États-Unis72.
31En raison des visites dans les établissements scolaires, des nombreuses rencontres et discussions, les expositions universelles constituent des moments où se construit une sociabilité entre les réformateurs. Ces contacts, en plus d’enrichir les réflexions des délégués français, débouchent également sur la mise en place d’intenses correspondances. Un réseau transatlantique se développe, exploité notamment par la Revue pédagogique, qui reçoit donc des informations et des documents. C’est avec ces mots que Compayré promet le maintien des contacts et la diffusion des informations récoltées sur le Nouveau Continent en France :
Nous nous sommes séparés qu’à regret des amis qui nous ont témoigné là-bas une si cordiale bienveillance. Nous espérons les revoir en France, en 1900, où je me suis permis dans une dernière allocution de leur donner rendez-vous. En attendant, la correspondance entretiendra les relations, les liaisons nouées dans les congrès de Chicago ; la lecture et la méditation des documents de toute espèce qu’on a mis si généreusement à disposition achèveront de nous faire connaître tout ce qu’il y a de bon, d’excellent, dans les méthodes américaines.73
32En définitive, cette fascination pour le modèle américain doit être mise en relation avec le fait que de nombreuses expositions universelles sont organisées dans ce pays. Cela a évidemment un impact sur le nombre de missions pédagogiques françaises. En outre, la présence inconstante et la pauvreté des sections scolaires de pays comme l’Allemagne, la Suisse et l’Angleterre amènent les visiteurs à se pencher avec plus d’attention sur les écoles américaines. Ces événements ne donnent pas aux réformateurs français l’occasion de découvrir le système scolaire de ces pays et, de ce fait, l’importance du modèle américain risque d’être surévaluée. Si l’étude des sections scolaires des expositions peut éclairer les relations transatlantiques entre réformateurs français et américains, elle ne permet pas, comme le souligne très justement Klaus Dittrich, de saisir l’importance et l’intensité des contacts entre les réformateurs français et allemands74. Analyser l’ensemble des supports régissant la circulation internationale des idées pédagogiques est donc indispensable, dans la mesure où l’examen des missions et des revues mené dans la première partie de ce travail montre que le modèle allemand, en cette fin de siècle, est une référence omniprésente.
Notes de bas de page
1 Sur les expositions universelles, voir Brigitte Schoraeder-Gudehus, Anne Rasmussen, Les fastes du progrès. Le guide des expositions universelles, 1851-1992, Paris, Flammarion, 1992 ; Paul Greenhalgh, Ephemeral Vistas. The Expositions Universelles, Great Exhibitions and World’s Fairs, 1851-1939, Manchester, Manchester University Press, 1988.
2 Au xixe siècle, la terminologie est encore vague et il n’existe pas de réglementation internationale concernant les expositions. Une convention est signée entre seize États à Berlin en 1912. Elle fixe la fréquence des expositions universelles et précise certaines règles d’organisation (administration des expositions, attribution des récompenses, etc.). Il faudra attendre l’année 1928 pour voir la création du Bureau international des expositions. Pour un historique du cadre juridique des expositions, voir Marcel Galopin, Les expositions internationales au xxe siècle et le Bureau international des expositions, Paris, L’Harmattan, 1997.
3 Volker Barth, « Presentation », Innovation and Education at International Exhibitions, V. Barth éd., Paris, Bureau international des Expositions, 2007, p. 10.
4 Richard Waterman, « Educational exhibits at world’s fairs since 1851 », Educational Review, vol. 5, no 2, 1893, p. 123.
5 Entre 1850 et 1914 se tiennent environ une trentaine d’expositions plus ou moins importantes. On s’intéressera ici aux plus significatives en ce qui concerne le champ éducatif, à savoir les expositions de Vienne (1873), de Philadelphie (1876), de La Nouvelle-Orléans (1884), de Melbourne (1888), de Paris (1889 et 1900) et enfin de Chicago (1893).
6 B. Schoraeder-Gudehus, A. Rasmussen, Les fastes du progrès, ouvr. cité, p. 3.
7 Une récente thèse de doctorat soutenue à l’université de Portsmouth en janvier 2011, dont il faut espérer la publication, comble à cet égard une lacune : Klaus Dittrich, Experts Going Transnational. Education at World Exhibitions during the Second Half of the Nineteenth Century, thèse de doctorat, Université de Portsmouth, 2010. Pour le cas suisse, voir Philipp Gonon, « Les Expositions universelles, stimulant des réformes scolaires au xixe siècle », Une école pour la démocratie, R. Hofstetter, C. Magnin, L. Criblez, C. Jenzer éd., ouvr. cité, p. 301‑322.
8 Sur le rôle des expositions universelles dans la diffusion des savoirs scientifiques, voir Eckhardt Fuchs, « Popularisierung, Standardisierung und Politisierung : Wissenschaft auf den Weltausstellungen des 19. Jahrhunderts », Die Weltausstellung von 1851 und ihre Folgen - The Great Exhibition and Its Legacy, F. Bosbach, J. R. Davis, S. Bennett, T. Brockmann, W. Filmer-Sankey éd., Munich, K. G. Saur, 2002, p. 205-221.
9 Paul Young, Globalization and the Great Exhibition. The Victorian New World Order, Basingstoke, Palgrave Macmillan, 2009.
10 Sur le musée londonien voir le rapport de Benjamin Buisson, Le Musée pédagogique de Paris et celui de South-Kensington, à Londres, Paris, P. Dupont, 1879.
11 Charles Defodon, Promenade à l’Exposition scolaire de 1867. Souvenir de la visite des instituteurs, Paris, Hachette, 1868.
12 E. Fuchs, « Educational sciences, morality and politics », art. cité, p. 759.
13 B. Buisson, Rapport sur l’instruction publique à l’Exposition universelle de La Nouvelle-Orléans, ouvr. cité, p. 10.
14 Florence Pinot de Villechenon, Les expositions universelles, Paris, PUF, 1992, p. 17.
15 B. Buisson, Rapport sur l’instruction publique à l’Exposition universelle de La Nouvelle-Orléans, ouvr. cité, p. 7.
16 Jules Steeg, « Enseignement », Exposition internationale de Chicago en 1893. Ministère du commerce, de l’industrie des postes et des télégraphes. Rapports publiés sous la direction de M. Camille Krantz. Comité 33. Éducation et enseignement, L. G. Favette, J. Steeg, Paris, Imprimerie nationale, 1894, p. 93. Voir aussi ses articles parus dans la Revue pédagogique : « L’Exposition de Chicago (Notes d’un visiteur français) », Revue pédagogique, vol. 23, no 7, 1893, p. 26-35 ; « Notes sur les expositions scolaires des pays d’Europe à Chicago », Revue pédagogique, vol. 23, no 10, 1893, p. 316-322.
17 Patrick Dubois, « Le Dictionnaire de Ferdinand Buisson et ses auteurs (1878-1887) », Histoire de l’éducation, no 85, 2000, p. 25.
18 La première édition date de 1887, la deuxième de 1911. Voir Pierre Nora, « Le Dictionnaire de pédagogie de Ferdinand Buisson, cathédrale de l’école primaire », Les lieux de mémoire, t. I, La République, P. Nora éd., Paris, 1984, p. 353-378.
19 Sur ce dictionnaire, voir les ouvrages dirigés par Daniel Denis et Pierre Kahn : L’école de la Troisième République en questions. Débats et controverses dans le « Dictionnaire de pédagogie » de Ferdinand Buisson, Berne, P. Lang, 2006 ; L’école républicaine et la question des savoirs. Enquête au cœur du « Dictionnaire de pédagogie » de Ferdinand Buisson, Paris, CNRS, 2003.
20 Ministère de l’Instruction publique et des Beaux-Arts, Recueil des monographies pédagogiques publiées à l’occasion de l’Exposition universelle de 1889, Paris, Imprimerie nationale, 1889, 6 volumes.
21 Benjamin Buisson, « L’enseignement primaire à l’Exposition universelle de 1889. Résumé général », Revue pédagogique, vol. 16, no 2, 1889, p. 101.
22 « The system of education, especially of primary education, is regarded as one of the greatest triumphs of the Republic. […] The Republic has learnt many lessons from Sedan, and has apparently laid to heart the saying that it was the education of the German sergeants which won battles. It has every reason to be gratified with the progress that has been made, and with the imposing, interesting, and instructive display of all materials of education » (AN, F17 2759. Melbourne Centennial Exhibitions. The Argus Supplement, 25 septembre 1888).
23 Louis Liard, Charles-Victor Langlois, « Instruction publique. Avant-propos », Exposition universelle internationale de 1900 à Paris, ouvr. cité (page non indiquée).
24 Jean Ozenne, Eugène Du Sommerard, Exposition universelle de Vienne. France - Commission supérieure. Rapport adressé à S. E. le Ministre de l’agriculture et du commerce, Paris, Imprimerie nationale, 1874, p. xlvi.
25 B. Buisson, Rapport sur l’instruction publique à l’Exposition universelle de La Nouvelle-Orléans, ouvr. cité, p. 9.
26 Pour l’Exposition de 1900, la commission était composée de cinquante membres. Voir René Leblanc, Exposition universelle internationale de 1900 à Paris. Rapports du jury international. Classe 1 : éducation de l’enfant, enseignement primaire, enseignement des adultes, Paris, Imprimerie nationale, 1901, p. 17-18.
27 AN, F 12 4474. Exposition universelle de Saint-Louis, 1904.
28 AN, F 12 4475. Exposition universelle de Saint-Louis, 1904. Enseignement technique. Lettre de Bocquet aux exposants, 25 mars 1903.
29 AN, F17 2759. Centennial International Exhibition, Report of Jury-section 3, Melbourne, 1888.
30 Martin Lawn éd., Modelling the Future. Exhibitions and the Materiality of Education, Oxford, Symposium Books, 2009 ; Martin Lawn, Ian Grosvenor éd., Materialities of Schooling. Design, Technology, Objects, Routines, Oxford, Symposium Books, 2005.
31 Henry Lemonnier, « Enseignement secondaire », Exposition universelle internationale de 1900 à Paris. Rapports du jury international. Groupe I. Éducation et enseignement. Classe 2 à 4, Paris, Imprimerie nationale, 1902, p. 5.
32 Sur cette question voir Eckhardt Fuchs, « Das Deutsche Reich auf den Weltausstellungen vor dem Ersten Weltkrieg », Comparativ, vol. 9, no 5-6, 1999, p. 61-88.
33 Benjamin Buisson, « L’enseignement primaire à l’Exposition universelle de 1889 », Revue pédagogique, vol. 16, no 2, p. 100.
34 Klaus Dittrich, « “Germania facile princeps” ? Das deutsche Bildungswesen und die Weltausstellungen des 19. und früher 20. Jahrhunderts », Dogil yeongu / Korean Journal of German Studies, no 23, 2012, p. 103-131.
35 K. Dittrich, Experts Going Transnational, ouvr. cité, p. 117.
36 F. Buisson, Rapport sur l’instruction primaire à l’Exposition universelle de Vienne en 1873, ouvr. cité, p. 7.
37 Ibid., p. 12.
38 R. Leblanc, Exposition universelle internationale de 1900 à Paris, ouvr. cité, p. 977.
39 On trouve des témoignages dans Jonathan F. Scott, Patriots in the Making. What America Can Learn from France and Germany, New York - Londres, D. Appleton and Company, 1916, p. 24‑62 ; Levi Seeley, The Common-school System of Germany and Its Lessons to America, New York - Chicago, E. L. Kellog & Co., 1896, p. 9-10 ; William B. Hazen, The School and the Army in Germany and France, New York, Harper & Brothers Publishers, 1872.
40 « For more than seventy-five years Germany has been frequented by American scholars in the effort to gain new light toward the solution of some of the vexing educational problems that have confronted us. It is an open question whether or not in the early days France had anything worth while in her educational system to repay the trouble of making an extended study of the conditions in that country. Since the Franco-Prussian war, however, she has been quietly and unostentatiously forging to the fore, so that today she is fairly among the very leaders » (Frederic E. Farrington, French Secondary Schools. An Account of the Origin, Development and Present Organization of Secondary Education in France, Londres-Bombay-Calcutta, Longmans, Green and Co., 1910, p. xvii). Farrington s’est aussi intéressé à l’enseignement primaire : The Public Primary School System of France, New York, Teachers College, 1906.
41 Une histoire institutionnelle des débuts de l’école républicaine dans Maurice Gontard, L’œuvre scolaire de la Troisième République. L’enseignement primaire en France de 1876 à 1914, Toulouse, CRDP, 1976.
42 « Confidence in education as a mean of regenerating the national life followed hard upon the heels of the disasters of the war of 1870. Gambetta, advocating compulsory military service and a more rigorous application of the national sovereignty, placed above these an education truly national, that is to say, an education imposed on all. […] It was largely from their conquerors that this lesson was learned » (J. F. Scott, Patriots in the Making, ouvr. cité, p. 29-30).
43 « It was France, however, that contributed the wonder of educational collections to the New Orleans Exposition. It was worth a journey from any part of the United States to New Orleans, to see the French educational display – at least it was worth so much for teachers » (William T. Harris, « Report on the foreign educational exhibits », Education, vol. 6, no 3, 1886, p. 283).
44 AN, F17 2759. Exposition de Melbourne. Lettre du vice-consul de France à Wellington à M. le Ministre des Affaires étrangères à Paris, 14 novembre 1888.
45 B. Buisson, Rapport sur l’instruction publique à l’Exposition universelle de La Nouvelle-Orléans, ouvr. cité, p. 6.
46 AN, F17 2943 C. Ferdinand Buisson, inspecteur primaire. Mission à l’Exposition universelle de Vienne, 1873.
47 F. Buisson, Rapport sur l’instruction primaire à l’Exposition universelle de Vienne en 1873, ouvr. cité, p. vi.
48 Émile Levasseur, « Instruction primaire et secondaire », Exposition universelle de Vienne en 1873. Rapports, t. IV, Paris, Imprimerie nationale, 1875, p. 351.
49 Nico Randeraad, « The international statistical congress (1853-1876) : knowledge transfers and their limits », European History Quarterly, vol. 41, no 1, 2011, p. 50-65.
50 Levasseur propose également un autre tableau, moins riche en informations, concernant l’enseignement secondaire.
51 Sur les usages du « quantitatif » et du chiffre comme indicateurs et comme « outils de preuve », voir Alain Desrosières, L’argument statistique, t. I, Pour une sociologie historique de la quantification, t. II, Gouverner par les nombres, Paris, Presses de l’École des mines, 2008. Sur l’histoire des statistiques voir Nico Randeraad, States and Statistics in the Nineteenth Century. Europe by Numbers, Manchester, Manchester University Press, 2010.
52 Sur ce tableau et l’internationalisme statistique dans le domaine éducatif à la fin du xixe siècle, voir Damiano Matasci, « Aux origines des rankings : le système scolaire français face à la comparaison internationale (1870-1914) », Histoire & Mesure, vol. XXIX, 2014, p. 91-118.
53 Éric Brian, « Statistique administrative et internationalisme statistique pendant la seconde moitié du xixe siècle », Histoire & Mesure, vol. 4, no 3-4, 1989, p. 201-224 ; Marc André Gagnon, « Les réseaux de l’internationalisme statistique (1885-1914) », L’ère du chiffre. Systèmes statistiques et traditions nationales / The Age of Numbers. Statistical Systems and National Traditions, J.-P. Beaud, J.-G. Prévost éd., Sainte-Foy, Presses de l’Université du Québec, 2000, p. 189-220.
54 Émile Levasseur, L’enseignement primaire dans les pays civilisés, Paris-Nancy, Berger-Levrault et Cie, 1897.
55 Benjamin Buisson, Exposition internationale de Saint-Louis, 1904. Section française. Rapport du groupe 1 (instruction primaire), Paris, Comité français des expositions à l’étranger, 1908, p. 18-19.
56 Philippe Roger, L’ennemi américain, généalogie de l’antiaméricanisme français, Paris, Seuil, 2002 ; Jacques Portes, Une fascination réticente. Les États-Unis dans l’opinion française, Nancy, Presses universitaires de Nancy, 1990.
57 George Hodgins, Special Report to the Honorable the Minister of Education on the Ontario Educational Exhibit and the Educational Features of the International Exhibition at Philadelphia, 1876, Toronto, Hunter, Rose & Co, 1877, p. 9.
58 F. Buisson, Rapport sur l’instruction primaire à l’Exposition universelle de Vienne en 1873, ouvr. cité, p. 677.
59 Ferdinand Buisson, Devoirs d’écoliers américains, recueillis à l’Exposition de Philadelphie (1876) et traduits par A. Legrand, Paris, Hachette, 1877.
60 Institut français d’éducation (ancien INRP), Buisson RF 119, Le Temps, 23 mai 1878. Cité par K. Dittrich, Experts Going Transnational, ouvr. cité, p. 183.
61 F. Buisson, Rapport sur l’instruction primaire à l’Exposition universelle de Philadelphie en 1876, ouvr. cité, p. 669.
62 Son collègue Gabriel Compayré note que Benjamin Buisson « n’est pas un inconnu en Amérique, où le nom de son frère est populaire parmi les pédagogues et où lui-même s’est créé de nombreuses relations lors de l’Exposition de La Nouvelle Orléans ». Voir Gabriel Compayré, « Les congrès scolaires de Chicago », Revue pédagogique, vol. 23, no 11, 1893, p. 408.
63 Voir les deux comptes rendus de ces missions : Paul Passy, L’instruction primaire aux États-Unis. Rapport présenté au ministre de l’Instruction publique, Paris, C. Delagrave, 1885, et Marie-Casimir Ladreyt, L’instruction publique en France et les écoles américaines, Paris, J. Hetzel, 1883.
64 B. Buisson, Rapport sur l’instruction publique à l’Exposition universelle de La Nouvelle-Orléans, ouvr. cité, p. 254.
65 Ibid., p. 254-255.
66 Klaus Dittrich, « Die amerikanische Referenz der republikanischen Grundschule Frankreichs : Kulturtransfer auf Weltausstellungen im 19. Jahrhundert », Transkulturalität. Gender- und bildungshistorische Perspektiven, W. Gippert, P. Götte, E. Kleinau éd., ouvr. cité, p. 161-180.
67 B. Buisson, Rapport sur l’instruction publique à l’Exposition universelle de La Nouvelle-Orléans, ouvr. cité, p. 254-255.
68 Louis Gaston Favette, « Enseignement industriel et commercial », Exposition internationale de Chicago en 1893, L. G. Favette, J. Steeg, ouvr. cité, p. 3.
69 Il est l’auteur de deux rapports : Rapports de la délégation envoyée à l’Exposition colombienne de Chicago par le ministère de l’Instruction publique. 1893. Enseignement secondaire, Paris, Hachette et Cie, 1896 ; Rapports de la délégation envoyée à l’Exposition colombienne de Chicago par le ministère de l’Instruction publique. 1893. Enseignement supérieur, Paris, Hachette et Cie, 1896.
70 G. Compayré, « Les congrès scolaires de Chicago », art. cité, p. 410.
71 Sur ces visites, voir K. Dittrich, Experts Going Transnational, ouvr. cité, p. 228.
72 Calvin Woodward, The Manual Training School, Comprising a Full Statement of its Aims, Methods, and Results, with Figured Drawings of Shop Exercises in Woods and Metals, Boston, D. C. Heath & Co., 1887.
73 G. Compayré, « Les congrès scolaires de Chicago », art. cité, p. 410-411.
74 K. Dittrich, Experts Going Transnational, ouvr. cité, p. 341.
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