Mise en page des calendriers réformés (mi-XVIe - fin-XVIIe siècle)
p. 27-60
Texte intégral
1Eugénie Droz, dans deux articles importants, a rappelé après Lucien Febvre que le calendrier genevois fut au XVIe siècle un agent de propagande à part entière1, un livre hérétique produit à très grande échelle, dont certains tirages dépassèrent dix mille exemplaires2. Davantage intéressée par des questions bibliographiques et artistiques (les vignettes qui ornent ces livrets) que de contenu, l’érudite éditrice n’a cependant pas cherché à percer les raisons du choix d’événements « passablement hétéroclites » en regard des quantièmes3 et ne s’est pas inquiétée de l’origine des modifications fondamentales de l’almanach catholique romain. Critiquant la fondatrice de la Librairie Droz, vous avez déjà compris que c’est ce qui m’a intéressé et m’intéresse toujours, ayant formé le projet d’écrire un livre sur la conception et l’organisation temporelle du monde protestant réformé au XVIe siècle, décrivant et définissant une spiritualité plus temporelle que spatiale de ce monde4.
2Aujourd’hui la question touche davantage la mise en page, et l'amateur des idées et des sources se mue en historien du livre. Il me faut toutefois avouer que je n’ai pas toujours su ou pas voulu distinguer forme et sens dans cette histoire, la forme du sens ne coïncidant pas nécessairement avec le sens de la forme.
3Les calendriers genevois sont des entités bibliographiques en soi, petits livrets d’un cahier de quatre, six ou huit feuillets in-8°, in-12 ou in-16, une fois même de deux cahiers de huit feuillets in-16, et on en trouve quelques-uns reliés de façon indépendante5 (ill. 1 et 2). Jamais néanmoins, à ma connaissance, contrairement au calendrier imprimé dans les bibles de la traduction française de Lefèvre d’Etaples depuis 1530 à Anvers, on ne trouve de calendrier genevois ou huguenot français in-4° ou in-folio.
4Les calendriers genevois sont bien évidemment postdatés6, pour être vendus aux foires de la fin de l’été et de l’automne. François Estienne, dans la préface de son calendrier de 1563, explique le fonctionnement du nombre d’or en l’illustrant d’un « Exemple : la Lune a esté nouvelle le premier jour de ce mois (assavoir de juillet 1562), et le Nombre d’or estoit sur le cinquieme »7. Confirmation que c’est bien en été qu’est imprimé le calendrier de l’année suivante8.
5La majorité de ces calendriers sont reliés au XVIe siècle déjà avec des Bibles, de simples Nouveaux Testaments ou les Psaumes de Marot et Bèze, en tête ou en queue9. Cette dernière particularité fera même avancer par d’aucuns que le calendrier est celui de Marot, tel le jésuite Jean Adam en 1650, peu au fait de la chronologie des héros protestants10, puisque s’indignant de cette façon :

1. Calendrier historial, Genève, 1569 [avec la coquille nistorial] (Genève, Musée historique de la Réformation)

2. Calendrier historial, Genève, 1569, f° [*vii] r° (Genève, Musée historique de la Réformation)
6Et sa mort [celle de Luther] est marquée dans le Calendrier dressé par Marot comme celle d’un Sainct en ces termes : « Le vray serviteur de Dieu M., c’est-à-dire Monsieur ou Martin Luther mourut »11.
7Richelieu avait porté la même condamnation quelques années auparavant contre ces saints protestants qu’il ne saurait voir, dans son Traitté qui contient la méthode la plus facile et la plus asseurée pour convertir ceux qui se sont séparez de l’Eglise12. Au XVIe comme au XVIIe siècle, associer des noms à des dates de mort dans un calendrier était perçu comme un geste religieux, d’autant plus que ces calendriers étaient quasi toujours reliés à une bible ou un psautier. Si la qualification liturgique d’un calendrier présent dans les livres d’Heures et les bréviaires de bon nombre de fidèles allait de soi dans le monde catholique, dans le monde huguenot elle était hors de propos.
8Les confusions du Père Adam ou de Richelieu sont d’autant plus intéressantes qu’elles confirment l’aspect religieux et hérétique qu’avaient ces calendriers réformés genevois (lyonnais, rochelais ou plus tard sedanais et charentonnais), remplaçant les saints catholiques romains, entre autres, par les grandes figures des réformes protestantes, marquant le jour de leur mort dans le cours de l’an : Luther, dès l’origine, Martin Bucer, Edouard VI, Calvin à partir de 1565, Gaspard de Coligny après la Saint-Barthélemy, Théodore de Bèze (23 octobre 1605), Henri IV (14 mai 1610), le duc de Rohan (mai 1638) et d’autres encore.
9Pour saisir la spécificité du calendrier réformé calviniste, et de sa mise en page, il est nécessaire d’en comparer l’évolution avec celle du calendrier catholique romain d’un côté, de l’autre avec les calendriers protestants apparaissant à la même époque, autour de 1550.
10Le calendrier réformé se distingue donc du calendrier catholique que l’on trouve dans presque tous les livres d’Heures depuis le XIVe siècle13. Je me limite ici au calendrier qui ouvre les Hore intemerate beate Marie virginis secundum usum Romanum, Paris, Thielman Kerver, 1505, inoctavo (ill. 3). Le calendrier est en latin, sans titre, encre noire, avec des quatrains mnémotechniques en français. Dans la colonne tout à gauche on trouve le nombre d’or (pour connaître le jour de chaque nouvelle lune tout au long de l’année). La colonne suivante recueille la lettre dominicale (sept lettres, bien sûr, de « a » à « g »), avant une troisième colonne donnant les fêtes principales. La seconde partie du mois reprend ces trois colonnes. Les encadrements, traditionnellement, représentent des scènes champêtres et des scènes mythologiques, des « travaux des mois », les signes du zodiaque, mais encore des hybrides et des gryles sortis des marges à drôlerie.
11Ce type de calendrier s’inscrit lui également dans une tradition, dans laquelle l’illustration tient une place non négligeable14. La mise en page est plus ou moins aérée, à chaque jour ne correspond pas toujours un saint, alors que les saints locaux disent des particularités essentielles. Ces calendriers enregistrent déjà le nombre d’or et la lettre dominicale, mais rien de plus, si ce n’est dans des entreprises de grand prestige comme les Tresriches Heures du duc de Berry.
12Le calendrier réformé, genevois et français, est donc constamment en évolution, en réécriture, mis à jour ; la particularité est à mémoriser. L’histoire de France récente prend d’ailleurs de plus en plus de place dans les événements consignés, surtout au début du XVIIe siècle, avec des édits, des batailles, des morts, des naissances (celle des dauphins, le futur Louis XIII, le 27 septembre 1601 ; le futur Louis XIV, le1 er septembre 1638) et même cédant à un certain « parisianocentrisme », un calendrier de 1652 rappelle l’inondation de Paris du 15 janvier 1649 : « de memoire d’homme n’en a esté veuë ni ouï parler d’une semblable ». Marquer le jour de naissance est d’ailleurs un geste nouveau dans les calendriers qui, hagiographiques, relevaient essentiellement les jours de mort corporelle, jours de naissance spirituelle15.

3. Hore intemerate beate Marie virginis secundum usum Romanum, Paris, Thielman Kerver, 1505, f° [a6] r° (Collection privée)

Ephemeris historica, Genève, Jean Crespin, 1551 [avec le millésime 1552] (Paris, Bibliothèque Mazarine : Rés. N 23908) 4. page de titre

Ephemeris historica, Genève, Jean Crespin, 1551 [avec le millésime 1552] (Paris, Bibliothèque Mazarine : Rés. N 23908) 5. f° [aiii] v°

Ephemeris historica, Genève, Jean Crespin, 1551 [avec le millésime 1552] (Paris, Bibliothèque Mazarine : Rés. N 23908) 6. f° [aiiii] r°
13C’est au cours de la seconde moitié du XVIIe siècle que disparaît peu à peu ce calendrier, en France sous les coups des mesures contre les imprimeurs huguenots. Grâce à la bibliographie du Psautier huguenot que préparent Jean-Michel Noailly, Jean-Daniel Candaux et Bettye Thomas Chambers, il semble que le dernier calendrier huguenot paraisse dans un psautier de Charenton en 168016, un seul lustre avant la révocation de l’édit de Nantes. A Genève, le déclin s’est amorcé depuis les années 1620, mais on trouve encore un psautier avec un calendrier 1681-1700 en 1686 chez Jean-Antoine Chouet17. Pourtant, la Révocation semble ici également avoir sonné le glas de ces fascicules si particuliers. Avant de revenir à cette fin, s’impose aujourd’hui l’histoire formelle d’un siècle et demi de mises en page de calendriers réformés en français.
MISE EN PAGE
14Aucun des premiers calendriers réformés genevois en français des années 1550 ne nous est parvenu, mais grâce à Jean-François Gilmont on connaît l’existence du calendrier latin imprimé par Jean Crespin à Genève en 1551 (avec le millésime 1552) : Ephemeris historica, petit in-16 de 16 feuillets (ill. 4, 5, 6). Dans sa bibliographie des éditions de Jean Crespin, Jean-François Gilmont donne une description et un commentaire succinct mais précis de ce premier calendrier genevois, qui est resté inconnu d’Eugénie Droz, et plus récemment de Francesco Maiello18.
15On remarque tout d’abord que ce calendrier possède une page de titre : Ephemeris historica seu calendarium pura et illustri brevitate complectens capita et summas rerum, observata smgulorum dierum ratione... Libello meditationum ac precationum Christianarum adjunximus, candide lector..., le titre se terminant en adresse au lecteur, comme il arrive encore souvent à cette époque. Cette page de titre distingue immédiatement ce calendrier des calendriers ouvrant les livres d’Heures qui, eux, n’en ont pas. Surtout, ce calendrier précède un recueil de prières.
16Il est évidemment anonyme, mais Jean-François Gilmont, auquel je faisais part en 1998 de mon intérêt pour les calendriers genevois, en particulier pour celui de 1551-1552, m’en envoya une photocopie et m’informa qu’on trouvait également un calendrier dans les Opera de Gilbert Cousin (Cognatus) de 1562, sans qu’il connût le moindre rapport entre celui-ci et celui-là. En effet, on trouve au tome 2 des œuvres de Cousin non seulement un calendrier19, mais encore la petite adresse au lecteur « Libello meditationum ac precationum nostrarum [Christianarum en 1552] adjunximus... »
17L’identité des préfaces est pourtant un trompe-l’œil, car les prières qui suivent l’Ephemeris de 1552 ne sont pas celles de Cousin, mais l’explication du Notre Père de Calvin, d’autres textes de Mélanchthon, Capiton, etc. En revanche, en 1562, les prières sont bien celles de Cousin, reproduisant une édition plus modeste qui avait paru à Bâle en 1543 chez Robert Winter20. Dans le calendrier de 1562, on découvre quelques modifications, dont la plus attachante est certainement l’ajout d’une date de naissance en face du 21 janvier : « Natalis Gilberti Cognati Nozereni, anno 1506 » (p. 251). Il ne fait pourtant aucun doute que nous avons affaire à une reprise de l’Ephemeris historica publiée par Crespin en 1551, signant ainsi l’œuvre originale.
18Mais revenons à la mise en page de ce calendrier, pour relever sa simplicité : le quantième sur la gauche, suivi ou non d’un texte bref, d’une ou plusieurs lignes, c’est tout. L’impression est monochrome, non illustrée, alors que les mois ne recommencent pas en belle page, ni même sur une nouvelle page, mais s’enchaînent. Une absence remarquable est suffisamment rare pour être soulignée : celle des signes du zodiaque. Le calendrier mêle des données chrétiennes (les grandes fêtes), bibliques (Noé et Jésus-Christ occupent des places de choix), historiques (l’histoire et les fêtes romaines sont omniprésentes) et même mythologiques, puisque la naissance de Minerve ou les fêtes en l’honneur de Neptune sont soigneusement marquées. Pourtant, ces différentes commémorations sont distinguées par l’emploi de caractères typographiques différents, le caractère romain, la capitale ou l’italique. Les références bibliques sont composées en romain, les fêtes christologiques (Circoncision le1 er janvier ; Epiphanie le 6 ; la Résurrection le 27 mars ; Noël) et quelques autres fêtes chrétiennes importantes sont en capitales romaines (Simon et Judas le 28 octobre ; Élisabeth le 19 novembre ; les saints Innocents le 28 décembre), tout comme le nom hébreu des mois et les mentions des calendes, des nones et des ides romaines (question de visibilité), alors que le reste de l’ouvrage est composé en italique. Cette distinction du sacré et du profane par l’emploi de caractères différents balisera la postérité des calendriers genevois et huguenots français jusqu’à leur disparition dans les années 1680-1690, l’italique étant parfois dévolu à l’un, parfois à l’autre. L’italique distingue, mais elle ne hiérarchise pas.
19A l’exception donc de cet Ephemeris, aucun Kalendrier historial genevois des années 1550 ne nous est parvenu. Grâce à un privilège demandé par Conrad Badius en 1554, nous savons toutefois que ce dernier publia des calendriers « desquelz sont ostés les superfluités », sous-entendues papistes, obtenant même un premier privilège de cinq ans21. Contrairement au livret austère publié par Crespin, ces calendriers français étaient rubriqués, mais, sans illustration, ils ne rencontrèrent néanmoins aucun succès auprès de la population genevoise. En 1560, Badius souhaita arrêter de les imprimer en noir et rouge, pour les vendre moins cher. Après son départ pour Orléans, Olivier Fordrin est autorisé à publier le calendrier « à condition qu’il y mette du rouge22 ». Le Conseil de Genève voulait absolument voir en rouge ces calendriers. La grande partie de la production genevoise sera donc rubriquée23, bichromie présente de manière tout aussi marquante dans les calendriers des livres d’Heures catholiques contemporains. Le calendrier imprimé par François Estienne en 1563 est cependant monochrome24 (ill. 7) et sans illustration, portant également une page de titre. Une page est maintenant dévolue à chaque mois, dont le nom est également donné en hébreu, comme chez Cousin, puis la division des heures diurnes et nocturnes : en janvier « le jour 9 heures, la nuict 15 », etc. On tient manifestement ici la copie actualisée des calendriers de Badius.

7. Kalendrier historial, Genève, François Estienne, 1563, f° [*viii] r° (Genève, Bibliothèque publique et universitaire : Rés. Ga 1681)
20L’italique ne distingue plus histoire sacrée et histoire profane, tout juste est-elle utilisée pour donner les références bibliques et extra-bibliques, comme la chute de Jérusalem le 9 septembre en l’an 73 (sic) de notre ère, lue chez Flavius Josèphe (« au septieme livre, chapitre 26 », évidemment de la Guerre des Juifs). L’italique sert encore à marquer le début de chaque nouveau signe du zodiaque, et l’on relève que les douze signes restent et resteront en latin jusqu’à la fin du XVIIe siècle. Enfin, elle marque « le lieu du Bissexte », le 24 février de l’année bissextile.
21Les premiers jours du mois selon les Romains et les saisons bénéficient toujours de capitales.
22Quatre colonnes précèdent les mentions bibliques et historiques, telle la mort de Charlemagne le 26 janvier 814 suivant la conversion de saint Paul, le 25, et la mort de Caligula, le 24. On trouve la lettre d’or en chiffres arabes, le quantième en chiffres romains, la lettre dominicale, puis les jours selon le calendrier romain. Ces mentions inaugurent ce qu’on peut qualifier de technicité des calendriers genevois, technicité expliquée.
TECHNICITÉ DES CALENDRIERS GENEVOIS
23Puisqu’un calendrier historial protestant francophone doit avoir au minimum sept pages (titre et deux mois par page), une seule page reste disponible pour une préface. La plupart du temps, un calendrier compte cependant seize pages : treize pour le titre et les douze mois, trois pages pouvant être dévolues à des pièces annexes. La quasi totalité des imprimeurs ont donc ajouté une ou des préfaces dans les pages liminaires. Uniques, elles expliquent le calcul et l'utilisation du nombre d’or, ainsi dans le Kalendrier historial et almanach perpetuel de Saint-Lo25, mais elles peuvent être développées, comme chez François Estienne en 1567 : « Au lecteur » ; « Du nombre d’or26 » ; « Moyen pour trouver l’Epacte en tous les ans, et savoir par icelle quand se fait la Lune en chacun mois » ; « De l’Indiction Romaine et reigle perpetuelle pour la trouver en tous les ans27 » ; « Du Cycle solaire, pourquoy il a esté ordonné, et reigle perpétuelle pour le trouver tous les ans, avec la lettre Dominicale, et les ans Bissextils28 » ; « Des Éclypses du Soleil et de la Lune, calculées aux ans qui viendront jusques à l’an 1570 »29.
24Cette technicité se comprend avec le développement de la chronologie biblique, ces calendriers ajoutant in fine une « Supputation des années depuis la Création du monde jusqu’à l’an 1566 [1567, 1569, etc.], selon le calcul de M. Luther », signant ainsi dans le monde protestant la valeur du calcul, dans le monde catholique, son caractère hérétique. Les calendriers catholiques qui reprendront ce calcul se garderont bien de signaler le nom de son auteur.
25Il faut pourtant remarquer que ces explications sont encadrées par des versets bibliques. Au début, trois versets vétéro-testamentaires : une « Pronostication generale » citant Jérémie 10, 2 : « Ne craignez point les signes du ciel comme les Gentils, car les ordonnances des peuples sont vaines », avant deux passages du chapitre 26 du Lévitique (versets 3 ; puis un compendium des versets 14-39) sur les bénédictions naturelles (pluies bénéfiques, moissons, vendanges) attachées à l’obéissance aux commandements divins, sur les malédictions naturelles (peste, famine et guerre) sanctionnant la désobéissance. Après toutes les « explications scientifiques », une mise en garde tirée de la première Épître de Paul à Timothée (4, 1-3) : « L’Esprit dit notamment qu’és derniers temps, aucuns defaudront de la foy, s’amusant aux esprits abuseurs et aux doctrines des diables, enseignans mensonge en hypocrisie, ayans leur conscience cauterizée, defendans soy marier, commandans de s’abstenir des viandes que Dieu a creées pour en user avec action de graces aux fideles et à ceux qui ont cognu la verité », seul passage que l’on peut interpréter contre les pratiques catholiques romaines.
26Passant au calendrier proprement dit, chaque page contient deux mois, limitant la possibilité des notations après les quatre colonnes sur la gauche. Ici, comme dans le premier exemple de 1569 donné en ouverture, on trouve encore une gravure pour le travail du mois et une autre pour l’entrée dans le nouveau signe astrologique.
27Pour bien saisir les spécificités de ce calendrier huguenot, il faut consulter les autres calendriers « protestants ».
LES AUTRES CALENDRIERS « PROTESTANTS ».
1. Lefèvre d’Etaples
28Cette qualification de Lefèvre d’Etaples comme « protestant » est un raccourci commode, non dogmatique ; il ne s’apparente pas à la pratique de Théodore de Bèze dans les Icones de 1580, incorporant Lefèvre, Erasme ou Vatable au camp réformé (ill. 8). Ce qui frappe au premier abord en abordant ce calendrier, c’est son format. Il se trouve en effet aux pages liminaires d’un volume in-folio, La saincte Bible en françoys, Anvers, Martin Lempereur, 153030, aux f° [a2]r° — [a3]v°. Le mot « Kalendrier » est présent en titre courant, mais il n’y a pas de page de titre particulière ni mention du « kalendrier » sur la page de titre de la Bible.

8. « Kalendrier » dans La saincte Bible en françoys, Anvers, Martin Lempereur, 1530, f° [a3] r° (Genève, Musée historique de la Réformation : Oe 530)
29Déjà le Nouveau Testament anversois de 1529 possédait un « kalendrier », et il s’agissait du premier exemple dans une bible en français, et certainement dans une bible latine, à ma connaissance. Je ne connais pas davantage d’exemple dans des bibles allemandes ou italiennes contemporaines, mais la localisation anversoise m’a conduit à consulter la production en néerlandais. En effet, dès 1525, on trouve des calendriers dans des Nouveaux Testaments et des Bibles publiés à Anvers, mais également à Deventer et à Leyde31. La page de titre de ce premier Nouveau Testament de 1525 muni d’un calendrier mentionne d’ailleurs « Met een Kalengier ». Cette mention est rare, mais on la retrouve en 1530 chez Michiel Hillen van Hoochstraten32 (« Item noch is hier by ghedruct eenen seer profitelijchen Kalengier ende Almanack ») ou en 1532 chez la veuve de Dirk van Borne33. Plus de la moitié des éditions de la Bible, complète ou partielle, en néerlandais, entre 1525 et 1545, possède un calendrier34.
30Le calendrier de la bible de Lefèvre d’Etaples est rubriqué, utilisant l’encre rouge pour les fêtes principales touchant Jésus-Christ, les Apôtres et Paul : « La circoncision de Christ », « L’apparition des roix » (l’épiphanie), « La conversion de Paul » pour le mois de janvier, etc. Les fêtes à références bibliques en somme. En outre, le changement de signe est également rubriqué « Sol en aquarius », puis « Sol en pisces », etc.
31La première colonne à gauche donne le nombre d’or (de un à dix-neuf), la seconde la lettre dominicale, la troisième le nom du saint ou de la sainte (le ou la qualifiant de martyr ou de confesseur, voire d’ermite ou de vierge), enfin la quatrième colonne donne le quantième du mois. On relève que saint Louis n’est pas dit roi, simplement « Lois confesseur » le 25 août, de même Bernard de Clairvaux est simplement dit « Bernard confesseur » le 20 août. Seul Grégoire le Grand est dit « pape confesseur » le 12 mars. Ce faisant, ce calendrier apparaît déjà comme un calendrier « réformé », mais en aucune façon une source possible du calendrier genevois.
2. Le Calendarium historicum de Paul Eber
32Le Calendarium historicum de Paul Eber est l’une des sources du calendrier de Gilbert Cousin, partant du calendrier genevois. Le professeur wittenbergeois Paul Eber publia son Calendarium historicum en 1550 à Wittenberg, immédiatement réédité à Bâle35. Ainsi, pour le 24 janvier, la mort de Caligula et celle de Philippe de Macédoine sont mentionnées, comme chez Cousin. Le succès de Paul Eber fut fulgurant, son entreprise fut immédiatement copiée, et Gilbert Cousin vient donc rejoindre la cohorte des imitateurs. Eber lui-même développera son calendrier en augmentant considérablement les données historiques communiquées en 1550 (passage de 329 à 806 notices historiques entre 1550 et 1556). Ce ne sont cependant pas ces aspects que je développerai aujourd’hui, mais bien la question de la mise en pages, pour relever le caractère remarquable de celle du calendrier luthérien qui n’a néanmoins pas influencé les imprimeurs genevois, pas davantage que les indications à caractère astrologique36
33Les saints ont évidemment disparu des pages luthériennes, mais la spécificité principale du calendrier de Paul Eber consiste en l’égalité un jour = une page in-octavo, page qui est loin d’être toujours entièrement imprimée, offrant donc des espaces blancs (ill. 9). On peut d’autant plus facilement imaginer que des lecteurs ont utilisé cet espace, qu’Eber les invitait, eux et leurs enfants surtout, à noter les événements les plus importants de leur vie, afin de s’en souvenir précisément37. Un exemplaire de l’édition de 1556 est ainsi quasi « saturé » de données manuscrites portées par au moins deux mains du XVIe siècle38. Un bel exemplaire de l’édition bâloise de 1550 dans une collection privée contient quelques remarques. Le premier possesseur n’a porté que trois informations complémentaires à la plume, dont l’annonce de la mort de Paul III le 9 novembre 1549, sur la page faisant face à la mention de la naissance de Paul Eber. D’une certaine manière, avec Paul Eber, on passe du calendrier à l’agenda, mais non agenda annuel, agenda perpétuel39.

9. Calendarium historicum, Bâle, 1550 (Collection privée)
3. The Booke of common prayer
34Toujours autour de 1550, où décidément il se passe quelque chose de fondamental, et même de révolutionnaire, j’ose ce mot trop souvent galvaudé, dans l’Europe protestante, paraît à Londres, en 1549, la première édition du Booke of common prayer. The Booke of the common prayer and the administration of the Sacramentes, and other rites and ceremonies of the Churche, after the use of the Churche of England, paraît à Londres, chez Edward Whitchurche, en 1549, dans un format in-folio40 (ill. 10).
35On trouve, au f° Aiiir°, « The table and Kalender, expressing the ordre of the Psalmes and Lessons to be sayed at Matyns and Evensong, throughout the yeare, excepte certayne proper feastes, as the Rules folowing more plainlye declare ». Au verso: « The Ordre how the Psalter is appoynted to bee redde ». Cette table permet de lire le psautier en entier une fois par mois41. On retrouve ici une dimension liturgique du calendrier que nous avions perdue de vue.
36Au verso, on lit « The Ordre howe the rest of the holy Scripture (beside the Psalter) is appoynted to bee redde ». Il y a deux « lessons » par service, une lecture de l’Ancien Testament et une lecture du Nouveau Testament. Le 1er janvier, on lit ainsi Genèse 17 et Romains 2 le matin, Deutéronome 10 et Colossiens 2 le soir. C’est le 29 avril que l’on lit 2 Samuel 11, le matin, et 12, le soir, l’histoire de David et Bethsabée ; en même temps qu’Actes 26, le matin, et 1 Jean 5, le soir. On ne lit pas le Cantique des cantiques (ce que j’ignorais en écrivant ma thèse), et juste Apocalypse 1 le matin du 27 décembre, Apocalypse 22, le soir. On lit ainsi quasi toute la Bible pendant l’année.

10. The Booke of common prayer, Londres, Edward Whitchurche, f° Av r° 1549 (Bloomington, Lilly Library)
37Peu de noms des jours du calendrier liturgique catholique sont restés dans l’édition de 1549. Ainsi pour janvier, la circoncision de Jésus le 1er janvier, l’Epiphanie le 6, la conversion de Paul le 25. Les éditions suivantes ajouteront le nom de quelques saints. Une édition de 1599 enregistre ainsi pour janvier : « Ludan » le 8 ; « Sol in Aqua. » le 12 ; « Hilarie » le 13 ; « Prisca » le 18 ; « Fabian » le 20 ; « Agnes » le 21 ; et « Vincent » le 2242. On remarque encore la mention astrologique de l’entrée du soleil dans chaque signe, le 11 février, « Sol in Piscib. » ; le 13 mars, « Sol in Aries » ; le 11 avril, « Sol in Tauro » ; etc. Il n’y a pas d’influence directe du calendrier liturgique anglican sur le calendrier genevois, mais son émergence devait être signalée.
4. Le calendrier historicisé de certains livres d’Heures
38Dernier point de ma comparaison, l’apparition dans des livres d’Heures parisiens dès 1550, de calendriers mentionnant les saints, certes, mais également de nombreux événements historiques. Le premier exemple que je connaisse de ce type de calendrier sort des Heures de Nostre Dame à l’usaige de Romme, publié à Paris en 1550, par Magdaleine Boursette43. Ce calendrier est également en évolution permanente et centré sur la France, mais également Paris.
39L’imprimeur, dans sa préface datée de 1556 imprimée dans des Heures à l’usage de Paris, Paris [Jean Le Blanc pour Julien Duval ?], 1566, in-1644 divulgue une sensibilité humaniste (il cite Cicéron) mais également un catholicisme romain solide45. S’il mentionne bon nombre d’événements royaux (la mort de Louis XII le 1er janvier ou le début du concile de Trente le 6 janvier 1546), la mention du 29 janvier laisse bien peu de doute sur son camp religieux :
40Ce jour fut faicte à Paris la solennelle et générale procession pour l’extirpation des heresies à laquelle assista le roy François premier de ce nom avec tous les princes et officiers de sa court, 1534 [a.s.].
41C’est l’affaire des Placards qui est ainsi évoquée avec la procession de janvier 1535. Ce calendrier qui n’abandonne aucun saint, mentionné pour tous les jours de l’année, a ajouté bon nombre de références à l’histoire de France récente, naissance des fils d’Henri II, défaite de Pavie, le 24 février 1524, jusqu’à certaines entrées royales, comme celle de François Ier à Poitiers un 5 janvier. L’intérêt parisien et humaniste est constant, dans la mention des morts de François Vatable et Jacques Toussain le 13 mars 1547, mais la naissance et la mort d’Erasme (28 octobre 1467 - 11 juillet 1536) ou celles de Politien (14 juillet 1454 - 24 septembre 1501, jour de la naissance de Cardan) disent un réel humanisme européen, nourri à la source antique, puisque la naissance de Cicéron, « pere d’eloquence latine, 105 ans devant l’advenement de nostre Seigneur Jesuchrist » le 5 août, ou son envoi en exil, le 4 août accompagne le nom des saints catholiques romains.
42Noé mettant « derechef la columbe hors de l’arche, laquelle apporta en son bec un rameau d’olivier », le 18 février, est presque anecdotique dans cette histoire de France au XVIe siècle, écrite par un clerc certainement parisien, notant qu’un 17 septembre :
43Ce jour deceda l’excellent docteur en theologie maistre François Picart, natif de la ville de Paris, doyen de Saint-Germain de l’Auxarrois, en son vivant homme de bonne vie et grand extirpateur des heresies, la perle des predicateurs du royaume de France et de saine doctrine, sans flechir à dire la verité, l’an 1556.
5. Génébrard, 1592
44Mais le calendrier catholique romain existe indépendamment des livres d’Heures, et l’exemple que je vous montre est tiré d’un commentaire sur les Psaumes, qui a adopté à la fin du XVIe siècle les quatre colonnes techniques (nombre d’or, lettre dominicale, le décompte romain et le quantième chrétien), a conservé le nom des saints sans ajouter aucun événement historique ni biblique, a repris la bichromie, tout en ajoutant un tableau valable dès 158246, la date n’est pas aléatoire, pour trente-trois ans, jusqu’en 1614 (ill. 11).
RETOUR AUX CALENDRIERS HUGUENOTS DU XVIIe SIÈCLE
45Tout au long du XVIIe siècle, de nombreux ensembles liturgiques huguenots, composés des psaumes de Marot et Bèze, des prières ecclésiastiques, du catéchisme et de la confession de foi dite de La Rochelle, parurent en étant précédés d’un calendrier historique. Si ce calendrier n’avait plus la fonction du calendrier des saints de l’Église catholique romaine, il avait conservé la place que celui-ci avait toujours d’un livre d’Heures ou d’un bréviaire romain : en tête.
1. Les Pseaumes de David mis en rime françoise, Sedan, Jean Janon, 1620
46La page de titre indépendante a disparu. Le dernier calendrier portant une page de titre parut à Genève en 1580, chez Jacob Stoer47, mais on trouvera encore un ultime psautier avec un calendrier et sa page de titre, ainsi que des figures à Charenton, en 166448. Il faudra toutefois attendre le travail de Jean-Michel Noailly et alii pour résoudre le délicat problème bibliographique que présente cet ouvrage (ill. 12). Sans avoir fait aucune recherche, je suis à peu près certain que les douze vignettes de « travaux des mois » — et également « plaisirs » avec le beau mois de mai — se retrouvent dans quelque livre d’Heures parisien contemporain.

11. « Calendarius latinus » dans Gilbert Génébrard, Psalmi Davidis vulgata editione, Anvers, Gilles Beys, 1592 (Collection privée)

12. « Calendrier historial » dans Les Pseaumes de David mis en rime françoise, Charenton, Louis Vendosme, 1664 (Genève, Bibliothèque publique et universitaire)
47Le calendrier sedanais de 1620 distingue toujours histoire sacrée et histoire profane avec des italiques dévolues à la première (ill. 13). Pour les mois de mai et juin, douze événements bibliques sont ainsi marqués : dénombrement du peuple hébreu par Moïse et Aaron le 5 mai ou entrée de Noé dans l’Arche le 17 mai. Si les figures des « travaux des mois » ont disparu, restent encore les symboles des signes du zodiaque, figurés et horoscopiques.
48On se dirige lentement vers un calendrier historique profane qui est atteint quelques décennies plus tard.
2. Les Pseaumes de David mis en rime françoise, Charenton, Pierre Des-Hayes, 1652
49Les symboles figurés des signes du zodiaque ont maintenant disparu, ne restent que les symboles horoscopiques. La densité d’informations a augmenté, mais l’histoire biblique a été quasi complètement éliminée. Ainsi, pas un seul élément biblique pour les mois de mars et avril, l’italique ne marquant que l’entrée dans les signes du zodiaque et le partage des heures du jour et de la nuit pendant le mois. Ce ne sont pas tant des événements récents qui sont ajoutés que le passé qui est complété. Ainsi les mois de mars et d’avril de ce calendrier de 1652 proposent des événements compris entre la mort de saint Louis le 5 mai 1120 et la « reduction des villes de Rouen, Havre... » à Henri IV, le 27 avril 1594. En 1620, nous avions noté douze événements bibliques en mai et juin, trente ans plus tard, il n’en reste que trois, l’Ascension le 14 mai, le don de la Loi au Sinaï le 1er juin et la naissance de Jean-Baptiste le 24 juin. La mort de Louis XIII, le même jour que son père, le 14 mai, 1643, ou la victoire de Rocroi du 18 côtoyent la mort de Calvin, le 27 mai 1564, le martyre des cinq écoliers lyonnais le 16 mai 1553, ou la mention de la « mercuriale tenue aux Augustins à Paris, en la présence du roi Henri II, pour exterminer ceux de la Religion ». Nous sommes bien dans un calendrier huguenot, mais les informations bibliques ont quitté ses colonnes. Un élément mérite toute notre attention, l’histoire qui est là contée n’est quasi que l’histoire huguenote du royaume de France à la fin du XVIe siècle. Les grands événements du XVIIe siècle sont absents. Cela a sa raison.
50Au cours du vingt-huitième synode national de Charenton, tenu du 26 décembre 1644 au 26 janvier 1645, le Commissaire du roi au synode, Monsieur Du Caumont, Seigneur de Boisgrellier, fit remarquer que dans un psautier de Genève de 1635, comprenant un calendrier évidemment, une remarque ne plaisait pas à Anne d’Autriche et à Mazarin :

13. « Calendrier » dans Les Pseaumes de David mis en rime françoise, Sedan, Jean Jannon, 1620 (Genève, Musée historique de la Réformation)
51J’ai aussi ordre de vous informer que Leurs Majestés sont très-mal satisfaites, que contre cet article de l’Édit qui a tant été recommandé, par lequel on mettoit en oubli tous les sujets de ressentimens, on a inseré dans le Pseautier imprimé à Genève en 1635 ces paroles : « On assembla le detestable concile de Trente le quinziême jour de mars 1545 ». Il y aussi dans le même Pseautier plusieurs autres choses fort choquantes. Et dans le vingt-quatrième article de vôtre Confession de foi, « la religion catholique, apostolique et romaine » est appelée « un abus et une fourbe[rie] » de Satan, et le purgatoire « une pure tromperie, et la boutique d’où sont sortis les vœux des moines »49...
52Je n’ai pas encore retrouvé ce psautier de 1635 et son calendrier, mais la réponse sur ce point du Modérateur, Antoine Garissoles, pleine d’humour, de revendication huguenote, mais de lucidité, mérite d’être rapportée :
53En quatrième lieu, pour ce qui regarde l’imprimeur de Geneve, les synodes nationaux de ce roiaume n’ont aucune autorité sur lui, et il n’a reçû aucuns ordres de nôtre part, ni ses maîtres ne lui ont pas commandé de se servir des termes qu’il a emploiés, et nous souhaiterions de tout nôtre cœur qu’il s’en fût abstenu. Quoique, cependant, il n’imprime rien que ce qui est generalement reçû par tous les protestans de l’Europe, qui ont tous, depuis le premier jusqu’au dernier, d’un consentement unanime, combatu le Concile de Trente, en ce qui regarde la forme de sa convocation, ses procedures et les decrets qu’on y a faits, et les anathemes qu’on y a prononcés ; ce que plusieurs princes catholiques ont fait aussi, lesquels ont protesté solemnellement par leurs ambassadeurs contre ledit concile. L’empereur Charles Quint, de qui nôtre illustre monarque, est descendu du côté maternel, s’y est oposé par le seigneur Mendoza. Henri second... Charles neuvième l’a fait aussi par Monsieur Ferrier, lequel decrivant cette fameuse assemblée la compare à un scorpion qui picque l’Eglise gallicane ; et le même Monsieur Ferrier se sert par tout d’expressions aussi emphatiques que celles de l’imprimeur de Geneve, dont la liberté deplait neanmoins si fort à leurs majestés50.
54... liberté dont use élégamment Garissoles. La subtilité du modérateur est parfaite, puisque, en effet, les Églises de France n’ont aucun pouvoir sur les imprimeurs genevois, mais surtout Garissoles répond en faisant vibrer les cordes gallicanes et ancestrales. On peut cependant comprendre l’absence de réelles mises à jour du calendrier huguenot français, tant genevois que charentonais, dans les années 1650-1680, comme une réponse à ces critiques royales et cardinales. Garissoles, professeur de théologie à Montauban, avait de l’esprit, certes, mais aussi une raison. Cela ne servait à rien de déplaire gratuitement à l’autorité suprême.
55Il serait bénéfique de consulter des synodes provinciaux pour savoir si le calendrier et ses notices historiques furent jamais à l’ordre du jour. Sans me lancer dans cet immense travail, on peut toutefois relever que déjà en 1626, lors du vingt-cinquième synode national tenu à Castres, au chapitre des « matieres generales », il fut recommandé que
56Les Églises qui ont des imprimeries qui leur appartiennent avertiront nos imprimeurs de prendre garde de ne pas insérer dans les calendriers des remarques historiques, attendu qu’elles irriteroient peut-être nos aversaires, et leur donneraient occasion de faire tout le mal qu’ils pourraient à nos Églises51.
57Vingt ans plus tard, l’intervention du commissaire du roi au synode de Charenton donna raison aux délégués synodaux de Castres.
3. Les Pseaumes de David mis en rime françoise, Charenton, Antoine Cellier, 1680
58Nous sommes cinq ans avant la révocation. Plus rien ne bouge vraiment52 (ill. 14). L’identité huguenote du calendrier n’est en rien gommée, mais l’histoire s’est arrêtée au XVIe siècle, siècle glorieux pour les protestants français.
CONCLUSION
59Pour construire son calendrier, Gilbert Cousin s’est servi du livre de Paul Eber. Il a introduit la mort de Caligula ou celle de Philippe de Macédoine, mention que les calendriers des années 1560 reprendront. La spécificité de l’éphéméride historique genevois est d’introduire maintes références au peuple de l’Ancien Testament. Ce faisant, le petit peuple réformé francophone s’identifie d’autant mieux au peuple d’Israël, au « petit reste ». Pendant les années de l’occupation de l’espace français par les réformés (les « églises dressées » entre 1555-1565), le calendrier et son développement participent à l’occupation du temps, à une appropriation nouvelle du temps civil et religieux.

14. « Calendrier » dans Les Pseaumes de David mis en rime françoise, Charenton, Antoine Cellier, 1680 (Genève, Bibliothèque publique et universitaire)
60Pourtant la Réforme protestante ne s’impose pas, c’est un échec, dans l’espace et dans le temps. Le calendrier huguenot ne disparaît pas avant les années 1680 en France, quelques années plus tard en Suisse. J’y vois quelques raisons. Evidemment, les événements relatés dans le calendrier permettent l’identification du peuple réformé au peuple hébreu, mais quelle est l’importance de savoir que le corbeau a été envoyé par Noé le 8 février ou que Jésus fut averti de la maladie de Lazare le 10 mars53 ! Le calendrier genevois a choisi des mentions bibliques particulières, mais non les plus pertinentes pour la foi réformée. Il a, en fait, distribué des bribes du récit biblique, dont le dénominateur commun est de porter une indication temporelle précise : ce dénominateur est trop petit, et le découpage ne pouvait s’imposer. Les Français l’ont d’ailleurs compris en transformant le calendrier biblico-historique en un calendrier de l’histoire réformée française inscrite dans le royaume de France ; après 1650 cependant, les réformés français n’osent plus ajouter d’élément contemporain, la prudence s’impose, Mazarin s’est exprimé en 1645, par l’intermédiaire du Commissaire du roi au synode. En outre, après les années 1570, les controverses autour de la chronologie biblique ont bien plus d’intérêt et d’enjeu que les succinctes mentions du calendrier. Enfin, nous avons remarqué que l’espace de la page du calendrier réformé est fermé, restreignant les ajouts personnels manuscrits. Cela tient évidemment à son format et à son impression sur un cahier. Il est pourtant en « accord » avec l’espace de plus en plus fermé des bibles genevoises à la philologie. Le chrétien réformé a peu de latitude pour s’exprimer dogmatiquement, il doit suivre la lecture biblique et l’usage du calendrier qu’on lui impose.
Notes de bas de page
1 Eugénie Droz, « Le calendrier genevois agent de la propagande », dans Les Chemins de l’hérésie, Genève, 1970-1976, t. 2, 1971, p. 433-456, ici p. 433 ; id., « Le calendrier lyonnais », t. 3, 1974, p. 1-29, ici p. 26. Cf. aussi les pages stimulantes de Natalie Zemon Davis, « Printing and the People », dans Society and Culture in Early Modem France. Eight Essays, Stanford, 1975, p. 189-226 et notes p. 326-336, ici p. 203-205 et n. 39, p. 330.
2 Par contrat daté du 24 mars 1567, François Estienne s’engage à vendre à Laurent de Normandie 12 000 Psaultiers avec des calendriers rubriqués. Cf Robert Kingdon, « The business activities of printers Henri and François Estienne », dans Aspects de la propagande religieuse (Travaux d’Humanisme et Renaissance 28), Genève, 1957, p. 267 et n. 3 ; déjà cité par E. Droz, « Le calendrier genevois », art. cit., p. 442.
3 L’expression est de Paul Chaix, Recherches sur l’imprimerie à Genève de 1550 à 1564. Étude bibliographique, économique et littéraire, Genève, 1954, p. 122. P. Chaix consacre trois pages aux « Almanachs et “palettes” », p. 120-122. E. Droz fait juste le constat que « la Réforme a introduit des notions historiques (d’où le nom de Calendrier historial) », dans son second article, « Le Calendrier lyonnais », dans Les Chemins de l'hérésie, t. 3, 1974, p. 1-29, ici p. 26. La remarque pertinente sur l’origine du nom aurait pu conduire l’érudite demoiselle à distinguer almanach et calendrier.
4 Cf. L’Ordre du temps : l’invention de la ponctualité au XVIe siècle, à paraître en 2004, et en attendant « Organisation du temps et discipline horaire chez Calvin et à Genève au XVIe siècle. Vers une spiritualité temporelle », Bibliothèque de l’Ecole des chartes 157, 1999, p. 345-367.
5 Le C.D.M. ne relève qu’un premier exemple en 1562 (Paul Chaix, Alain Dufour et Gustave Moeckli, Les Livres imprimés à Genève de 1550 à 1600, nouvelle édition, revue et augmentée par G’M’, Genève, 1966, p. 54 ; le Kalendrier de 1556, p. 29, est une erreur pour 1561 reprise de Van Eys, comme l’a déjà relevé E. Droz, dans « Le calendrier genevois... », art. cit., p. 435) ; Hannelore Jahr qu’en 1563 ; mais E. Droz en 1561. On ne trouve étonnamment aucun calendrier indépendant dans l’inventaire de Laurent de Normandie (cf. Heidi-Lucie Schlaepfer, « Laurent de Normandie », dans Aspects de la propagande religieuse (Travaux d’Humanisme et Renaissance 28), Genève, 1957, p. 176-230).
6 Comme le relevait pertinemment E. Droz dans « Le Calendrier genevois », op. rit., p. 434.
7 Kalendrier ou almanach historial, in-octavo, Genève, François Estienne, 1563, f° [*i]v°.
8 E. Droz, de manière judicieuse, affirmait la pratique, sans l’étayer.
9 Ainsi le Kalendrier ou Almanach historial de François Jaquy, Genève, 1563, conservé à la Bibliothèque municipale de Lyon (318.154) est relié entre le Nouveau Testament... avec annotations reveuës et augmentées par M. Augustin Marlorat, du même Jaquy (318.153) et Les Pseaumes mis en rime françoise (318.155), éditions de 1563, la reliure à la fanfare et les tranches guillochées étant tout à fait contemporaines. Hannelore Jahr donne à la fin de son étude sur la transmission de la Confession de foi de 1559 une bibliographie d’éditions de la Confession avec différents autres textes. Elle avait repéré et bibliographie treize calendriers publiés entre 1562 et 1580 et reliés avec la Bible (ou le Nouveau Testament ou/et les Psaumes), le Catéchisme, la Forme des prières ecclésiastiques et la Confession de foi. Cf. Studien zur Uberlieferungsgeschichte der Confession de foi von 1559 .(Beitrage zur Geschichte und Lehre der Reformierten Kirche 16), Neukirchen-Vluyn, 1964, n° 207-219, p. 148-154. E. Droz citait déjà cet ouvrage et celui de P. Chaix.
10 Clément Marot est mort en 1544, deux ans avant Martin Luther.
11 Cf. Calvin deffait par soy-mesme et par les armes de S. Augustin, Paris, Gaspar Methuras, 1650, p. 145. La critique se poursuit avec Calvin, mais ne concerne plus le calendrier : « Pour le regard de jean Calvin, tous les livres de ces disciples sont remplis de ses eloges. C’est “le Docteur, l’incomparable, le Prophete, l’irreprochable serviteur de Dieu et l’organe tres-choisy du Seigneur”. Ils pouvoient ajouter, avec la mesme verité, “Le troisiéme Helie, le cinquiéme Évangeliste et le huictiéme Sage”. » C’est le 18 février 1546 que Luther mourut.
12 Cf. Armand-Jean du Plessis, cardinal de Richelieu, chez S. et G. Cramoisy, Paris, 1651. Je n’ai pas réussi à retrouver le passage exact, que le lecteur me pardonne.
13 Cf. Bridget Ann Henisch, The Medieval Calendar Year, University Park (Pennsylvania), 1999, ch. 1, « In Due Season », p. 1-28, avec plusieurs exemples du XIVe siècle, Roger S. Wieck, Time sanctified. The Book of Hours in Medieval Art and Life, New York, 1988, ch. IV, « Calendar », p. 45-54.
14 Exemples de calendriers dans des livres d’Heures, avec mention de saints pour tous les jours, ou avec des blancs (Tours ? et Bruges ?, ca 1490-1500), dans Roger S. Wieck, Time sanctified, p. 53 et n° 65, p. 201, et n° 104, p. 218 ; avec des illustrations « les travaux des mois » et des signes astrologiques (Flandres, début XVIe siècle), ibid., p. 48s et n° 105, p. 218 ; sans parler du superbe calendrier des Tresriches Heures du duc de Berry (Chantilly, Musée Condé) ; etc.
15 Cf. Emmanuel Poulie, « Temps des naissances », dans Le Temps, sa mesure et sa perception au Moyen Age, Actes du colloque d’Orléans 12-13 avril 1991, sous la direction de Bernard Ribémont, Caen, 1992, p. 205-213.
16 Les Pseaumes de David, mis en rime françoise par Clement Marot et Theodore de Beze, Charenton, Antoine Cellier (Genève, B.P.U. : Bb 2150). La table initiale donne les années 1680 à 1695 (f° ã ii r°).
17 Cf Jean-Michel Noailly, Jean-Daniel Candaux et Bettye Thomas Chambers, Bibliographie des psautiers français en vers (1525-1900), à paraître, Genève, 2004. A Niort, à cette époque, la famille Bureau propose toujours des calendriers avec ses psautiers. Je remercie Jean-Michel Noailly qui m’a communiqué cette information.
18 Cf. Bibliographie des éditions de Jean Crespin 1550-1572, t. 1, Verviers, 1981, n° 52/14, p. 28. J.-F. Gilmont énonce comme probable le fait que cette édition soit le fruit d’une collaboration entre Crespin et Badius (p. 29).
19 Cf. Gilberti Cognati Nozereni opera multifarii argumenti... in tres tomos digesta, Bâle, Henri Petri, 1562, t. 2, p. 250-260, ici p. 250. Seule modification : Christianarum en 1552 est remplacé par nostrarum dans la qualification des méditations et prières de 1562.
20 Cf. In Georgii Trapezuntii, in locum illum Evangelii..., p. 115-149.
21 Cf. Eugénie Droz, « Le calendrier genevois... », art. cit., p. 434 ; Jean-François Gilmont, Jean Calvin et le livre imprimé, Genève, 1997, p. 325s.
22 Ibid.
23 Cf. Eugénie Droz, « Le calendrier genevois... », art. cit., p. 434 (Conrad Badius, 1554-1561) ; p. 440 (Thomas Courteau, 1566) ; p. 442-446 (François Estienne, 1567, 1568 et 1569) ; p. 451 (Jean Gregoire, 1570), (Abel Rivery, 1576) ; etc.
24 Cf. Eugénie Droz, « Le calendrier genevois », art. cit., p. 439 (Genève, B.P.U. : Rés. Ga 1681). On peut rapprocher utilement ce calendrier du Kalendrier ou Almanach historial portant également la date de 1563, mais le nom de François Jaquy (Lyon, B.M. : 318.154), puisqu’ils sont identiques : même préface au lecteur, même contenu et, surtout, même composition. Il s’agit d’une édition partagée.
25 1565, Thomas Bouchard et Jaques Le Bas, f° °.ii. r°. On trouve une telle page dans les livres d’Heures, ainsi chez Kerver en 1505.
26 Il est expliqué comme suit par François Estienne en 1567 : « DU NOMBRE D’OR, Pourquoy il a esté inventé, comme on le peut trouver chacun an et de son usage perpetuel. Le nombre d’or est ainsi appelé, pource qu’il estoit escrit aux Calendriers en lettres d’or, à l’endroit du jour auquel se faisoit la nouvelle lune ; et est l’espace de 19 ans ausquels la lune retourne au mesme jour de l’an du soleil. Dont par ceci s’appelle encores le Cycle lunaire, auquel espace et temps les Solstices et les Equinocts retournent au mesme poinct du Zodiaque. Et fut trouvé par Methon Athenien, pour avoir le temps certain des saisons et mutations des temps de l’an, et de leurs sacrifices et Olympiades, dernierement receu du Concile Nicene ( !) l’an 323, estant desja deserit et commencé l’an devant, pour avoir le temps certain de la celebration de la Pasque et des autres festes mobiles de l’an, et pour savoir en quel jour se faisoit la lune. Car les Romains escrivoyent en leurs Calendriers en lettre d’or le nombre d’or qui couroit en chacun an, à l’endroit du jour de chacun mois, auquel se faisoit la nouvelle lune, ainsi qu’aujourd’huy l’on escrit en autres sortes de lettres en tous les Calendriers. Et ainsi, par ce moyen, encore se peut savoir en tous les mois en quel jour se fait la nouvelle lune, sachant le nombre d’or qui court en chascun an. Et pour le vouloir trouver tous les ans, faut adjouster tousjours un an aux ans de Christ, pource que Christ nasquiit estant desja passé un an des 19. Divisant le tout par 19, ce qui restera sera le nombre d’or de l’an que tu cercheras ; et s’il ne demeure rien, sera 19. Comme par exemple adjouste à cest an 1567 1 et pars le tout par 19, restera 11, qui sera le nombre d’or de l’an 1568. Mais pour plus facilement le trouver, nous avons fait une petite table durable à tousjours, avec le millesime et le nombre d’or qui courra en chacun an, commençant depuis 1 jusques à 19, et retournant à 1. Quand sera passé l’an 1576, auquel le nombre d’or est 19, l’an suivant 1677 ( !), le nombre d’or sera 1, et ainsi suivant successivement ceste table servira tousjours. » Calendrier historial, Genève, François Estienne, f° *ii v°.
27 « L’indiction romaine est l’espace de quinze ans, ordonné des antiques Romains pour recevoir les tributs des estrangers, ou vrayement, selon Beda, pour eviter l’erreur des temps, qui paraventure pouvoit survenir. Comme par exemple, que le dernier an de quelque prince mort et le mesme premier du Prince succedant, mis deux fois, ne destourbast l’ordre des temps. Et pour vouloir trouver en chacun an le nombre de ceste indiction, laquelle aujourd’huy encores on met aux contracts en beaucoup de pays, il faut tousjours adjouster trois ans entiers aux ans de Christ que tu as. Car il nasquit en la quatriesme indiction, assavoir au quatrieme an de la premiere indiction, et diviser le tout par quinze, et ce qui reste sera l’indiction de fan que tu cerches, et s’il ne demeure rien, sera 15. Comme par exemple adjouste 3 à l’an 1562, et divise le tout par 15, reste 5, qui est l’indiction de l’an 1563 (sic). Mais pour plus facilement la trouver, nous avons mis dessous une petite table avec le nombre de ladicte indiction, depuis un jusques à 15. » Calendrier historial, Genève, François Estienne, 1567, f° *iii r°-v°. Pour une explication plus scientifique de l’indiction, cf. A. Capelli, Cronologia, Cronografía e Calendario Perpetuo [début du titre rubriqué !] Dal principio dell’Era Cristiana ai giomi nostri, Milan, 1960 (1re éd. 1930), p. 6s.
28 Cela correspond au chiffre romain de I à XXVIII que l’on trouve le plus à gauche dans le calendrier de François Estienne de 1569. Ce dernier l’explique ainsi : « Le Cycle solaire est l’espace de 28 ans du Soleil retrouvé pour accommoder la variable mutation de la lettre et jour dominical, pour cause du jour qui croist tous les quatre ans, ausquels est le bissexte, et qui se trouve de plus sur les 52 semaines, car l’an du soleil contient 365 jours et un quart... Et pour le corriger [cet accroissement], a esté trouvé le cycle solaire, lequel contient sept ans bissextils, qui font, multipliant 4 par 7, 28, dans lesquels la lettre dominicale, qui se change tous les ans, pour cause du jour de plus qui se trouve sur les 52 semaines, et deux en l’an de bissexte, retourne en son propre lieu. » Calendrier historial, in-octavo, Genève, François Estienne, 1567, f° *iii v°.
29 Calendrier historial, in-octavo, Genève, François Estienne, f° *ii r°-*iiii r°.
30 Cf. Chambers, Bibliography of French Bibles. Fifteenth-and Sixteenth Century French-Language Editions of the Scripture (T.H.R. 192), Genève, 1983, n° 51, p. 70-72. En 1534, le « kalendrier » est toujours présent (n° 62, p. 83-85), tout comme en 1541 (n° 85, p. 114-115) ; de même dans le Nouveau Testament in-octavo imprimé par la veuve de Martin Lempereur, Françoise La Rouge, la même année (n° 91, p. 118 ; et n° 92, p. 119s). Ce calendrier était déjà présent dans les Nouveaux Testaments imprimés par Martin Lempereur (Keyser) en 1529 (in-octavo, n° 48, p. 66s), 1531 (in-octavo, n° 57, p. 78s) et 1532 (in-16°, n° 59, p. 81), mais non dans l’Ancien Testament in-octavo de 1528 (n° 43, p. 60-62). On le retrouve, toujours à Anvers, dans des Nouveaux Testaments en 1543 (n°°102-104, p. 130-132), 1544 (n° 111, p. 140s), puis dans la grande Bible de Jean Loe en 1548 (n°°136, p. 161s), dans le Nouveau Testament de 1553 (Marie Ancxt, n°°178, p. 202s), etc., toutes des éditions anversoises et uniquement anversoises.
31 Cf. A. A. Den Hollander, De nederlandse Bijbelvertalingen 1522-1545, Niewkoop, 1997, n° 16, p. 304-306, Deventer, Albert Pafraet.
32 Ibid., n° 35, p. 364-366.
33 Ibid., n° 43, p. 387-389.
34 Décompte fait grâce à la bibliographie détaillée d’A. A. Den Hollander, relevant quatre-vingts éditions plus quelques éditions partagées.
35 J’ai consulté l’édition bâloise, Calendarium historicum conscriptum a Paulo Ebero Kitthingensi, Bâle, s.n., 1550. Sur ce calendrier, cf. F. Maiello, op. cit., p. 159-161.
36 Sous l’égide de Camerarius (qui signe un poème grec au verso de la page de titre), la précision des indications de naissance (heure et minute) permet de dresser un thème astral.
37 Cf. Calendarium historicum..., op. cit., « Praefatio », p. 1-42, en part. p. 12-22.
38 La Bibliothèque nationale de France, après avoir accepté ma commande, a néanmoins refusé de m’envoyer une reproduction. J’ai trouvé depuis d’autres calendriers de la fin du XVIe siècle et du XVIIe qui furent utilisés comme de véritables agendas, d’autant plus quand l’espace de la page, voire une page blanche en regard permettaient ces inscriptions personnelles.
39 Des calendriers n’abandonnant que peu d’espace blanc n’ont pas empêché leur propriétaire d’y porter quelques remarques personnelles, familiales ou générales, mais avec des pattes de mouche. Cf. le livre d’Heures des Chemitte (Bibliothèque Mazarine), dont la page du mois de décembre est reproduite dans De temps en temps. Histoire de calendriers, Paris, 2001, p. 102.
40 Exemplaire de Bloomington, Lilly-Library : BX 5145. A4 1549 (ancien exemplaire d’A. Gifford (1700-1784), assistant Librarían au British Museum de 1759 à 1784 ; passé au Baptist College de Bristol, comme la copie des sermons sur la Genèse de Calvin, maintenant à Lambeth Palace, vendue certainement à la fin des années 1950 ou au début des années 1960).
41 « The Psalter shal be red through once every Moneth, and because that some Monethes be longer then some other be, it is thought good, to make then even by this meanes. » [Tous les mois sont donc ramenés à trente jours, et chaque jour partagé en « matins » et « evensong ». On lit un ou plusieurs psaumes par service, le long psaume 119 étant lu le soir du 24e jour et les deux services des 25e et 26e jour]. Table de cette répartition, f° Aiiiir°.
42 Cf. The Booke of Common-prayer, with the Psalter or Psalm of David, Londres, Christopher Barker, 1599, f° A2r°.
43 Cf. Natalie Zemon Davis, « Printing and the People », dans Society and Culture in Early Modem France. Eight Essays, Stanford, 1975, p. 189-226, et notes p. 326-336, ici n. 39, p. 330. Malgré la localisation donnée dans les papiers Renouard déposés à la Bibliothèque nationale de France, un exemplaire ne se trouvait pas à la Bibliothèque municipale de Saint-Omer en novembre 2001.
44 Paris, BnF : Rés. B-8981. L’impression est en gothique batarde.
45 Il vaut la peine de citer la préface in extenso : « Au lecteur, salut. En considerant l’utilité qui vient de la lecture des histoires tant sacrées que prophanes, lesquelles, comme dict Ciceron, sont le tesmoignage des temps, la lumiere de verité, la vie de la memoire, la messagere de l’Antiquité, je me suis mis par forme de calendrier à vous en faire extraict qui vous pourra servir tant que vivrez au monde, car il vous reduira en memoire maintz troubles et changemens qui adviennent icy bas. Entre lesquelz mesme le monde s’esbahist comme l’Église de Dieu peut subsister, veu qu’on luy court sus de tout temps. Pourtant un chascun fidele doib avoir en compte tout ce qui advient et est adevenu par le passé, affin de ne perdre courage au temps d’adversité, sachant que Dieu gouverne tout à son honneur et au profit de son Église, et pour le remercier de la faveur et l’extreme amour qu’il leur monstre en les conservant contre les assaults du monde et de Satan. A Dieu. MDLVI. Unus dies apud Deum perinde est ut mille anni et mille anni ut dies unus. 2. P. 3. »
46 Je n’aborde pas ici la question de l’instauration du calendrier grégorien en 1582, sinon pour dire que la date de Pâques étant différente entre Paris et Genève (qui n’adoptera la réforme qu’en 1700), des calendriers genevois, copiant une production française, ou des calendriers de Charenton, Niort, voire Sedan, s’inspirant des livrets genevois, peuvent se tromper en affichant la date de Pâques.
47 Calendrier historial et lunaire (cf. Genève, B.P.U. : Bb 2309 Rés. H. Jahr, Studien..., op. cit., n° 218, p. 154 ; confirmé par Chaix, Dufour, Moeckli).
48 Les Pseaumes de David, mis en rime françoise par Clement Marot et Theodore de Beze. Avec un Calendrier historial et figures en tailles douces, Charenton, Louis Vendosme, 1664, in-12° (Genève, B.P.U. : Bb 2156). Ce livre présente cependant un intéressant problème bibliographique, puisque cette première page de titre est suivie d’une seconde, Les Pseaumes de David mis en rime françoise par Clement Marot et Theodore de Beze, Charenton, Estienne Lucas, 1674. Le calendrier court sur les folios signés [4]v°, ã 1-6, è 1-6, et est suivi de l’Épître de Theodore de Bèze « A l’Église de nostre Seigneur », f° ì 1-3, puis d’un indice « pour trouver les pseaumes », f° [ì4]r°-v°. Précédent ce calendrier, le fi [4]r° donne « La description de la Religion ». Le verso de la seconde page de titre et le feuillet suivant donnent les Dix commandements et le Sommaire de la Loi. La réclame, au bas du fi [3]v° est « LES », correspondant exactement, avec le même caractère capital, au début de « LES PSEAUMES... » en page 1. En outre, le calendrier est donné pour les années 1662-1681, donnant un terminus a quo plus proche de 1664 que de 1674 (1674 pouvant cependant être une coquille pour 1664).
49 Cf. Tous les synodes nationaux des Eglises reformées de France auxquels on a joint des mandemens roiaux et plusieurs lettres politiques, par Monsieur Aymon, La Haye, 1710, tome second, p. 633.
50 Ibid., tome second, p. 638. Garissoles est également appelé Garrisses par Aymon.
51 Ibid., tome second, p. 374s.
52 Ainsi la mercuriale du 10 juin 1559 « tenue aux Augustins à Paris en la presence du roi Henri II pour exterminer ceux de la religion » mettant en cause le pouvoir royal dans sa volonté exterminatrice de « l’hérésie » est toujours présente cinq années seulement avant la Révocation.
53 La présence de Noé est exagérée dans les calendriers genevois, mais déjà chez Cousin et Eber. C’est ce dernier qui nous en donne la raison dans la longue préface de son calendrier. Noé est le premier qui a mentionné les mois et les jours dans le récit de Moïse. C’est donc sous son égide que le calendrier est élaboré. Ce n’est pas tant l’événement en soi (l’envoi du corbeau !) que sa double inscription dans le temps et dans la Bible qui fait sa valeur.
La vie de Jésus est également très présente, telle qu’elle est relatée dans l’Évangile de Jean, le seul qui fasse se dérouler le ministère terrestre de Jésus sur trois Pâques, tout en offrant des indications temporelles précises, ainsi au sujet de Lazare.
Le troisième faisceau d’occurrences bibliques concerne le peuple de l’Ancien Testament, le passage du Jourdain, la construction du Temple, etc.
Auteur
Librairie Droz.
Institut d’Histoire de la Réformation de l’Université de Genève.
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