Une source inédite pour l’étude des rapports franco-russes à la Belle Époque
Le carnet de voyage en Russie d’Henri Vever
Дневник путешествия в Россию Генриха Вевер
p. 245-260
Résumés
Ce texte a pour but de présenter et d’analyser le carnet de voyage inédit rédigé par Henri Vever (1854-1942) lors de son voyage en Russie en été 1891. Maître joaillier militant dans les combats en faveur de l’Art Nouveau, Vever occupa une place décisive dans le monde artistique du tournant du XXe siècle. C’est donc en tant que figure de proue de la bijouterie française que Vever part en Russie, afin de représenter les intérêts commerciaux et culturels français lors de l’Exposition de Moscou. Cette exposition, témoignant du climat du rapprochement franco-russe qui avait abouti à la ratification de l’alliance entre ces deux pays, avait comme but de faire connaître l’expertise industrielle et artisanale française au marché russe. Une fois ses activités professionnelles acquittées, Vever entreprend son propre voyage en Russie, qu’il raconte en détail dans un journal manuscrit d’environ quatre-vingt pages dactylographiées. Il reviendra de ce voyage, qui le mène de Moscou jusqu’à Samarkand, en passant par Bakou et Tiflis, ébloui par la diversité des cultures rencontrées, et ce fait aura des retombées importantes sur ses activités jumelées de bijoutier et de collectionneur. Assurément, ses remarques font parfois écho à celles des autres voyageurs français, mais ce récit reste un témoignage privilégié d’une période charnière dans l’évolution des rapports franco-russes.
Целью данной статьи является анализ ранее неопубликованных путевых заметок, составленных Генрихом Вевер (1854-1942) во время его путешествия в Россию летом 1891 г. Крупный ювелир, Вевер стоял на позициях борца за стиль «модерн» и играл решающую роль в переменчивой художественной среде начала XX в. Будучи ведущим французским ювелиром, он отправляется в Россию представлять интересы Франции в области коммерции и культуры на выставке в Москве. Проведение выставки имело целью демонстрацию российскому рынку французских достижений в промышленности и ремесленном производстве и свидетельствовало о сближении во франкорусских отношениях, завершившимся, в конечном счете, ратификацией альянса двух стран. Исполнив профессиональные обязательства, Вевер предпринимает свою собственную поездку в Россию. Она детально описана в его дневнике, представляющем собой около 80 печатных страниц. Из этой путешествия, которое проведет его от Москвы до Самарканда, через Баку и Тифлис, Вевер вернется восхищенный разнообразием повстречавшихся ему культур, что окажет важное влияние на его деятельность как ювелира, так и коллекционера. Несомненно, в его путевых записках порой находят отражение заметки других французских путешественников, но, тем не менее, его рассказ остается наиболее важным свидетельством переходного периода в развитии франко-русских отношений.
Note de l’éditeur
H.V.: Smithsonian Institution, Freer Gallery of Art et Arthur M. Sackler Gallery Archives, Henri Vever Papers.
Remerciements
Les auteurs tiennent à remercier MM. Philippe Lacarrière, Patrick Vever, et David Hogge, chef des archives aux Freer Gallery of Art and Arthur M. Sackler Gallery Archives, Smithsonian Institution, de leur aide et encouragement.
Texte intégral
1En descendant la Volga sur le bateau vapeur Tolstoï pendant les premières semaines d’août 1891, Henri Vever, en route vers Astrakhan, nous livre ses réflexions sur les autres passagers à bord, dans son admirable carnet de voyage1 :
Il y en a plusieurs qui parlent français et qui sont très aimables, le temps passe ainsi très agréablement – on parle de Paris, des théâtres, de la littérature française, etc. En général, toutes ces personnes connaissent la France à fond, son histoire, etc., tandis que nous connaissons peu la Russie2.
2Ce serait une lapalissade de dire que cette courte observation de la part de Vever révèle le grand décalage qui existait à l’époque entre les connaissances que les Français et les Russes avaient les uns sur les autres. Cependant on voit dans ce carnet, ainsi que dans la multiplication des récits de voyage de Français publiés à partir de la guerre de Crimée, un fort désir de la part de Français, tels que Vever, d’explorer cet empire des tsars, allié politique et militaire de la France dans une nouvelle Europe.
3Afin d’affirmer ces nouveaux liens politiques, militaires et commerciaux, une commission privée française, confortée par le succès de l’Exposition universelle de 1889, organisa l’Exposition française à Moscou avec la bienveillance du gouvernement russe. Le but principal du voyage de Vever était de participer, en tant que maître bijoutier-joailler et patron d’un commerce parisien très réputé, à l’Exposition de Moscou, qui ouvrit ses portes en mai 1891. Il raconte, dans son carnet de voyage, ses impressions sur l’Exposition et, ce qui est d’un grand intérêt, l’exploration du territoire russe qu’il mena par la suite, allant de Moscou à Bakou, et ailleurs.
I. — Henri Vever, 1854-1942
4Les « notes journalières »3 rédigées par Henri Vever témoignent d’une vie et d’une carrière remarquables, ainsi que d’une énergie et d’une curiosité pour les cultures étrangères qui sont manifestes tout au long de son voyage en Russie (voir fig. 1). Bijoutier-joailler de troisième génération, Henri Vever reprend en 1881, avec son frère Paul, le commerce de la rue de la Paix établi vers 1871 par leur père, Jean-Jacques Ernest. Les frères Vever commencent à se constituer une clientèle bourgeoise et aristocratique, française et étrangère, qui comprenait des membres de la cour impériale russe, ce qui fera de la Maison Vever, avec celle de Boucheron et Cartier, l’une des principales maisons parisiennes de bijouterie. En même temps, Henri Vever suit des cours à la fois à l’École des beaux-arts, où il est admis afin d’étudier dans les studios de Gérôme et Millet, et à l’École des arts décoratifs. Avec une double formation de peintre et d’artisan de luxe – formations qu’il estimait poreuses – Henri Vever milite en faveur du renouveau des « arts industriels », un mouvement qui connaîtra sa pleine éclosion lors de l’Exposition universelle de 1900 sous la bannière de l’Art nouveau. Grand Prix de cette exposition, comme elle le fut de celle de 1889, la maison Vever soutenait le souhait de la IIIe République, en partie à travers l’établissement en 1882 de l’Union centrale des arts décoratifs (dont Vever fut, à partir de 1899, membre du conseil administratif), de promouvoir l’Art nouveau en tant qu’art officiel de prestige. Le régime républicain renouvelait et prolongeait ainsi une tradition du patronage par l’État d’un artisanat de luxe. Cette tentative rappelait, stylistiquement et politiquement, le patronage par Louis XV de l’art rococo et les échanges d’objets d’art de luxe entre la France et la Russie un siècle avant que Vever ne voyage en Russie. Maître bijoutier-joailler, commerçant, et aussi historien de la bijouterie4, Henri Vever assura également, avec ses collègues René Lalique et Frédéric Boucheron, d’importantes fonctions au sein de diverses associations professionnelles de bijoutiers, le rapprochant des milieux gouvernementaux. Il joua un rôle moteur dans la participation des bijoutiers-joaillers et orfèvres français à l’Exposition universelle de 1900, comme il l’avait fait lors de la World’s Columbian Exposition de 1893 à Chicago et de nombreuses autres expositions internationales.

Figure 1 : Henri Vever, ca. 1895 (photo Léon Colson). Freer Gallery of Art and Arthur M. Sackler Gallery Archives, Henri Vever Papers.
5Henri Vever est également connu comme collectionneur d’art de première importance. Une amélioration sensible de sa situation financière à la suite de son mariage en 1881 avec Jeanne Monthiers lui permit de constituer ses premières collections, ainsi que de devenir propriétaire du château de Noyers (Eure), village de Haute-Normandie dont Vever sera maire de 1896 à 1904. Amateur et patron des arts, il passe une partie de ses journées en visite chez les marchands d’art célèbres tels que Siegfried Bing (dont la galerie se situa dans le même immeuble, rue de la Paix, que la Maison Vever), Georges Petit et Paul Durand-Ruel, dans les expositions et dans les ventes à l’Hôtel Drouot. Vever est à l’aise dans des milieux artistiques variés ; il y côtoie régulièrement d’autres créateurs d’objets d’art haut de gamme (Paul Christofle), des artistes qu’il emploie comme dessinateurs (Eugène Grasset), et d’autres collectionneurs. Figure influente dans le monde de l’art au tournant du XXe siècle, Vever constitua une très importante collection d’art européen, où figurent une vingtaine de gravures de Rembrandt et de Dürer, des tableaux de l’École de Barbizon et des Impressionnistes, dont de nombreux Millet, Corot, Rousseau, Sisley, Jongkind, Monet et Renoir – et des sculptures de Rodin.
6La vente de cette première collection en 18975 permit à Vever de se tourner vers l’Asie, ce qui témoigne de la vogue du japonisme parmi les amateurs français à la fin du XIXe siècle. Sa collection de milliers d’estampes japonaises, dont une trentaine furent données au Louvre en 18946, et d’objets d’art d’Asie (laques, netsuke, écrans, bronzes, gardes de sabres), dont la décoration inspira profondément sa propre création artistique, est parmi les plus complètes du monde7. En même temps, il fréquente des japonisants fervents tels que Gaston Migeon, conservateur au Louvre, et Louis Gonse, rédacteur en chef de la Gazette des beaux-arts. En compagnie de ses amis Siegfried Bing, le marchand d’art Tadamasa Hayashi et l’imprimeur Charles Gillot, il assiste aux dîners mensuels des Amis de l’art japonais.
7Après les objets d’art japonais, ce sont les arts décoratifs du monde islamique qui commencent à séduire Vever, ainsi que d’autres collectionneurs de l’art chinois et japonais, vers le tournant du XXe siècle. Vever s’intéresse en particulier aux arts du livre tels que les manuscrits calligraphiés, les reliures et les miniatures persanes du XIVe au XVIIIe siècle qu’il acheta dans les galeries et ventes aux enchères à Paris8. En 1912, il rédige avec un collègue le catalogue de l’exposition des arts persans et indiens du livre qui eut lieu au musée des Arts décoratifs9. Vever appréciait tout particulièrement les compositions ornées à base de lignes serpentines, les couleurs brillantes, les techniques d’enluminure et les textures variées de ces objets, qui lui semblaient offrir des analogies pour ses propres recherches au sein du mouvement de l’Art nouveau.
8Si les expositions universelles, ainsi que des expositions spécialisées à Paris en 1893 et en 1903, commencèrent à familiariser le public français avec les arts décoratifs du monde islamique, le voyage en Russie entrepris par Henri Vever en 1891 fut en grande partie à l’origine de sa propre découverte de cette production artistique. À Samarkand, il est ébloui par le « revêtement émaillé » de la mosquée10 ; à Bakou, c’est le palais des Khans, « ancienne construction persane bien conservée avec grande porte en pierre ciselée d’arabesques » qui attire son attention11. Il trouve vêtements et étoffes également impressionnants : dans le bateau qui emmène Vever et sa femme sur la Volga, c’est le « turban vert et cafetan rayé » d’un mollah à bord qui retient son attention12 ; dans les quartiers musulmans de Samarkand, ce sont les « costumes multicolores », des « ravissants bonnets du pays un peu pointus d’une forme peu commune, brodés avec étoffe multicolore », des « chemises de soie bariolée spéciale au pays », des « étoffes de soie » et un « superbe khalat brodé » qui le fascinent13. Dans les bazars des quartiers musulmans de Tiflis, Bakou et Boukhara, Vever note avec intérêt des poignards, des « courges aux formes bizarres (très bizarres même) et qui servent à contenir une sorte de tabac en poudre dont ils mettent fréquemment une pincée dans la bouche », et des « selles couvertes d’ornements »14. Il en rapporte textiles, tapis, céramiques et sacs brodés, dont il prêta certains par la suite à l’Exposition de l’art islamique de 1893, au palais de l’Industrie à Paris15.
II. — L’Exposition de Moscou
9L’Exposition de Moscou (dite aussi Exposition franco-russe) de 1891 est organisée à la fois dans le sillage du succès commercial de l’Exposition universelle de 1889 et dans le climat d’optimisme entourant les préparatifs de la ratification de l’alliance franco-russe à partir de 1891. Comme de nombreux Français, Vever se montra particulièrement enthousiaste au sujet du rapprochement franco-russe, qui sortait la France de son isolement diplomatique vingt ans après la signature du traité de Francfort, et fortifiait le sentiment revanchard en France. Ce désir de la Revanche fut ressenti de façon particulièrement vivace chez Vever en raison de ses origines lorraines. Né à Metz en 1854, il avait seize ans lorsqu’il vit les troupes prussiennes assiéger sa ville, que son père aidait à défendre en tant que capitaine de la garde mobile. La famille Vever dut s’enfuir de Metz, passant par le Luxembourg afin d’atteindre Paris et de s’y établir. Se remémorant tristement la capitulation de Metz lors du trentième anniversaire de cette date, Vever confia la pensée suivante à son journal :
Je n’oublie pas que c’est aujourd’hui l’anniversaire de la capitulation de Metz ! ! trente ans, déjà ! est-ce possible, et ma chère ville est-elle donc irrémédiablement perdue ?… Je voudrais vivre jusqu’au jour de la Délivrance !…16.
10Considérant donc le rapprochement franco-russe sous l’optique de cette « délivrance » tant espérée, Vever, lors de son propre voyage en Russie, s’enthousiasma de la visite de la flotte française à Cronstadt, aux abords de Saint-Pétersbourg, du 23 juillet au 7 août 1891. L’accueil chaleureux réservé aux marins français, en l’honneur desquels on joue « La Marseillaise », bannie pendant longtemps en Russie à la suite de 1812, fut longuement commenté dans la presse des deux pays. Cocardier, Vever note avec fierté dans son journal le passage de l’escadre française à Moscou après son escale à Cronstadt :
Les marins de l’escadre française sont attendus, les murs sont pavoisés, beaucoup de drapeaux français mêlés aux drapeaux russes, l’hôtel est plein de fleurs, le perron est enguirlandé et dès le matin la foule stationne pour voir arriver nos officiers – on les acclame, on les fête. Ils ont 8 ou 10 superbes landaus avec attelage à la russe à 4 chevaux de front tout pomponnés et enrubannés aux couleurs nationales, cocher en blouse rouge le chapeau garni tout autour de plumes de paon – c’est très chic17.
11Autorisée par l’oukase impérial du 20 avril/2 mai 1890, l’Exposition de Moscou fut ouverte officiellement par le tsar Alexandre III au début de mai 1891 et close le quinze août de la même année18. Cette autorisation impériale, refusée antérieurement à la Belgique et à l’Allemagne, fut interprétée comme une nouvelle marque de la sympathie du tsar à l’égard de la France, constituant ainsi un patronage officieux sinon officiel19. Le calendrier de l’exposition fut établi en fonction de celui de la fameuse foire annuelle de Nijni-Novgorod, près de Moscou, dans l’espoir d’attirer à l’exposition moscovite une partie de l’intense activité commerciale dont la foire de Nijni se vantait. Selon Ernest Watbled, consul honoraire de la France, écrivant à Jules Roche, ministre du Commerce, de l’Industrie et des Colonies, l’exposition devait témoigner, à l’instar de celle de 1889 mais à une échelle plus réduite20, de « la grandeur légendaire de la France, de sa vitalité commerciale et industrielle, de ses progrès incessants »21.
12Concédés par oukase impérial et aménagés aux frais des exposants français, les locaux de l’exposition étaient une propriété personnelle du tsar. Dominant un plateau surélevé, le champ de Hodynskij, cette propriété impériale se situait près du parc Petrovskij, un lieu chic de Moscou. Les locaux de 35 000 mètres carrés comprenaient une série de huit pavillons en fer, disposés en forme octogonale et reliés par des galeries consacrées, par exemple, aux beaux-arts et aux machines (voir fig. 2). Au centre de ces pavillons se trouvait un jardin de 20 000 mètres carrés qui devint le site, lors de l’exposition, de panoramas, concerts, montagnes russes, fontaines lumineuses et autres divertissements. Des pavillons furent réservés aux cafés et aux restaurants, aux théâtres et aux concerts.

Figure 2 : plan général de l’Exposition française de Moscou en 1891. Bulletin de la Société des ingénieurs civils, octobre 1890.
13À la différence de l’Exposition universelle de 1889, placée sous l’égide du ministère du Commerce, de l’Industrie et des Colonies, l’Exposition de Moscou prit naissance entièrement grâce à l’initiative privée d’un groupe de commerçants et industriels. Ces commerçants voulaient promouvoir le commerce franco-russe, jusqu’alors largement devancé à la fois par les commerces anglo-russe et germano-russe et aussi combattre l’introduction frauduleuse en Russie de produits de contrefaçon – vins, soieries et lainages – supposés être de provenance française. Les organisateurs de l’Exposition franco-russe voulaient également chercher de nouveaux débouchés pour les produits français – « plus sûrs, moins coûteux »22 – en dehors de l’Empire colonial français, non seulement dans le vaste territoire de la Russie mais aussi dans une partie de l’Asie centrale. Ayant pour site Moscou, « ce trait d’union commercial entre l’Orient et l’Occident »23, l’exposition devait donc être, selon son règlement général, « commerciale, industrielle, agricole, et artistique ». Et patriotique et diplomatique aussi, l’un des buts de l’exposition étant de « répondre au courant de sympathies qui unit les deux peuples et les manifester hautement et en toute sincérité »24.
14Parmi les deux cent industriels français participant à l’Exposition figuraient des exposants de marque, producteurs d’objets de luxe tels que Vever, mais aussi Christofle, Boucheron, Guerlain et Cliquot, qui visaient tout particulièrement une clientèle impériale, aristocratique mais aussi bourgeoise, friande du goût français25. Ces industriels espéraient en outre compenser par les ventes sur place à Moscou les frais du transport des produits (par mer de Dunkerque à Libau et ensuite par chemin de fer jusqu’à Moscou), les lourds frais douaniers, et d’autres charges qu’ils devaient assumer lors de leur voyage et séjour en Russie. Des crédits importants prêtés par les banquiers parisiens Jouanno et Cie aidèrent à faire face aux frais des exposants26. En fait, l’exposition occasionna de nombreuses commandes par la famille impériale et par l’aristocratie russe auprès des bijoutiers français tels que Louis Aucoc fils, Théodore Bourdier, Louis Coulon et Cie, et Jacta fils. À Vever – dont la vitrine brille avec une collection de parures ornées de perles, saphirs et émeraudes et qui expose également « de ravissantes statuettes en argent, un coffret orné de camées anciens, une veilleuse de style oriental, un grand cadre en argent fondu […] d’une composition ingénieuse et du plus beau caractère »27, des flacons, éventails et bonbonnières – le tsar commanda un objet d’art en émail. Bénéficiant d’une clientèle russe importante ainsi que des investissements dans le marché russe, Boucheron ouvrit une succursale à Moscou en 189728.
15Toutefois, malgré ces succès symboliques, l’exposition, qui devait affirmer « la force industrielle de la France, son génie national, et un progrès toujours croissant »29 se termina « en un fiasco presque complet »30 en grande partie à cause d’une famine qui atteignit la plupart des campagnes russes durant l’année 189131. Située à Moscou, ville des tsars et du Kremlin et berceau du sentiment panslaviste, l’exposition ne put bénéficier du climat hautement francophile et cosmopolite de Saint-Pétersbourg, site de la majeure partie des expositions scientifiques et industrielles en Russie. De plus, l’oukase impérial du 27 mars 1891, ordonnant le déplacement des artisans et commerçants moscovites juifs de Moscou jusqu’à la zone de résidence au moment où les pogroms se déchaînaient sur l’empire russe, compliqua la venue dans cette ville des exposants français juifs, qui furent contraints d’obtenir une autorisation spéciale de Saint-Pétersbourg afin de pouvoir pénétrer dans le territoire russe32. Enfin cette exposition, dont les attractions, selon La nouvelle revue, étaient « tout à fait insuffisantes »33 n’accueillit que 800 000 visiteurs sur les deux millions attendus34.
III. — Le voyage en Russie (juillet-septembre 1891)
16De l’exposition peu réussie, Vever parle très peu, concentrant plutôt son attention sur un voyage qui le mena, avec sa femme Jeanne, de Saint-Pétersbourg à Nijni-Novgorod, de Nijni-Novgorod au sud à Bakou et à Tiflis, pour enfin arriver à Samarkand, ville clé sur la route de la soie (voir fig. 3). Le 1er juillet 1891, Vever quitta Paris, passa par l’Allemagne, monta vers le nord à Copenhague pour ensuite atteindre Stockholm et la Finlande avant de traverser la frontière avec la Russie. Il alla tout de suite à Saint-Pétersbourg et y resta cinq jours (du 17 au 22 juillet 1891) avant d’aller à Moscou. Là il prit part à l’exposition et aux cérémonies officielles qui célébrèrent l’Alliance pendant environ deux semaines (du 22 juillet au 5 août). L’exposition terminée, Vever prolongea son séjour en Russie et entreprit un voyage au cours duquel il descendit la Volga de Nijni-Novgorod (du 5 au 7 août) à son delta près d’Astrakhan (du 7 au 12 août). Vever et sa femme traversèrent la mer Caspienne pour arriver à la ville pétrolière de Bakou le 15 août. De là, ils firent un tour à Tiflis et dans ses environs où Vever semble, étant donné la quantité de ratures dans son carnet, vouloir changer d’itinéraire. Au lieu de continuer vers Constantinople pour rentrer en France, il traversa la mer Caspienne de nouveau, cette fois-ci à l’est, afin de visiter Boukhara et Samarkand fin août, début septembre. Ensuite, il revint à Bakou et Tiflis, passa par Yalta, Sébastopol et Constantinople. À la fin de son voyage, il se reposa pendant une semaine à Corfou avant de rentrer en France.

Figure 3 : Itinéraire du voyage d’Henri Vever en Russie (1891), extrait de son carnet. Freer Gallery of Art and Arthur M. Sackler Gallery Archives, Henri Vever Papers.
17Le voyage entrepris par Vever, comme Claude de Grève le constate, n’était pas facile à réaliser avant le milieu du siècle : « Le temps et l’argent à dépenser pour pareille expédition, le mystère qui enveloppait le pays n’incitèrent pas au “grand tour” avant longtemps… »35. Mais après le marquis de Custine et sa Russie en 1839, visiter l’empire des tsars était de plus en plus à la mode, surtout avec la création du bateau à vapeur et avec le développement des chemins de fer en France et en Russie pendant la deuxième moitié du XIXe siècle. Parmi les voyageurs en Russie de cette période, on compte, pour ne citer que les plus connus, Alexandre Dumas père qui y va en 1858, ainsi que Théophile Gautier qui y voyage à peu près en même temps. Indice de la russophilie croissante menant vers l’Alliance ainsi que de nouveaux moyens de transport, ce voyage en Russie devient plus fréquent et prosaïque pendant la deuxième moitié du XIXe siècle – expéditions scientifiques et anthropologiques, rencontres diplomatiques et commerciales, séjours touristiques. De cette tendance, Vever est pleinement représentatif.
18Comme beaucoup d’autres voyageurs français, il visita les villes « incontournables » : la Saint-Pétersbourg de Pierre le Grand et de l’Ermitage, le musée devant lequel il s’extasie en disant « rien que ce nom me fait battre le cœur »36 ; le Moscou de Napoléon (les canons de la Grande Armée près de l’Arsenal du Kremlin, la « Colline des Moineaux » où « Napoléon et ses soldats aperçurent Moscou pour la première fois »37), le Moscou de la cathédrale de Saint Basile (« très orientale », « architecture bizarre spéciale »38) ; et, enfin, la Nijni-Novgorod et sa grande foire aux carrefours de l’Europe et de l’Asie (où « il y a peu de chose à acheter, mais c’est extrêmement curieux comme population »39).
19Dans cette Russie – celle qui est plus impériale, plus occidentale, bref plus « civilisée » selon Vever – il y a une étrangeté familière qui l’attire. Il y les églises orthodoxes avec des chants « splendides », « pas d’orgue, pas d’accompagnement, des voix seules, des voix d’enfants et d’hommes d’un timbre et d’une douceur inconnus, c’est merveilleux, c’est céleste et ma foi très émouvant »40 mais où « il n’y a ni chaises ni bancs »41, où les « marques extérieures de religion [sont] très exagérées. Signes de croix, prosternements, baisements des images »42, et où l’on boit, chose choquante (il y revient à deux reprises), de l’eau bénite43. Les musées l’impressionnent, pourvu qu’ils ne soient pas trop « russes ». Après avoir visité la salle de l’École flamande à l’Ermitage, il remarque, « [j]e suis sur le point de me trouver mal tellement c’est épatant quand une salle de l’École Russe me rappelle que je ne suis pas dans un autre monde, hélas »44. À la galerie Tret’âkov à Moscou, il n’y a que le peintre militaire Vasilij Vereŝagin qui l’intéresse, mais « les autres [sont] assez nuls »45. Enfin, il note qu’aux activités du « tout Moscou », la « foule n’[a] aucun respect ni pour le monde chic ni pour les gendarmes – les gens du peuple poussent, bousculent, se faufilent avec une opiniâtreté extraordinaire, ils se collent à vous et ils ont chaud ! Il faut le voir pour le croire, sans compter les parfums »46. Comme Dumas et Gautier, Vever semble parfois être ébloui par cette Russie, un mélange du familier et de l’extraordinaire.
20Comme d’autres voyageurs français en Russie, plus il s’éloigne des capitales d’une Russie « occidentale », plus il découvre une Russie étonnante, orientale, voire « barbare », à ses yeux. Déjà, à Nijni-Novgorod, il est très étonné de découvrir la foire, mélange d’ethnies, de vêtements, de produits et – il n’en est pas ravi – d’odeurs (« [s]auvons-nous car tous ces gens sont horriblement sales et sentent très mauvais ») et de puces47. Ensuite, en descendant la Volga sur son « superbe bateau », il est à la fois fasciné et dégoûté par cette même diversité : « [l]’étage inférieur est réservé aux 3e classes et il faut voir quelle population bizarre et variée on y rencontre – Persans, Tartars, Russes de toutes catégories –, c’est une vraie tour de Babel […] Il y a des gens à bonnets, à toques, à turbans, ce serait très intéressant si c’est moins sale et moins rempli de vermine ». Il continue : « heureusement que l’accès du 1er étage leur est interdit »48.
21Dans ce tohu-bohu de cultures, il commence à noter la forte présence de l’islam, décrivant ainsi la fidélité de ses pratiquants :
Le soir, pendant que nous admirons le coucher du soleil, plusieurs de nos passagers de 3e cl[asse] qui sont musulmans se placent à l’avant du navire, et, se tournant vers la Mecque font leur prière […]. Cette prière en plein air sur le bateau, au milieu de ce paysage, faite avec conviction et sans s’occuper des voisins ne manquait pas de grandeur je vous assure49.
22Et pourtant ces comportements religieux austères ne correspondent pas forcément à des mœurs rigoureuses. Plus loin, ayant évité les puces des Tartars et des Kalmouks à Simbirsk, il n’échappe pas aux jeunes femmes se baignant dans la Volga « sans costume », ce qui lui fait apercevoir que « la pudeur ne suit pas les mêmes règles dans tous les pays »50. Pour lui, la Volga – pas très loin de l’Oural – est le point de rencontre des mondes inconnus et des cultures étrangères.
23Déjà dépaysé, Vever note encore des bizarreries autour de la mer Caspienne. Près de Derbent, il remarque d’abord la solitude des rives de la Volga : « la côte est absolument dépourvue de végétation, seule […] sa ligne de poteaux télégraphiques qui s’enfonce droit dans la steppe rappelle qu’il y a par là des êtres vivants »51. Ensuite, c’est le pétrole, le « naphte » de la « ville asiatique » de Bakou où il fait une sorte de pétro-tourisme52 ; il y voit « la mer qui brûle » (qui rappelle, à coup sûr, Michel Strogoff), des usines, des raffineries53. Là, au sud, son récit est peuplé de signes de l’Orient : chaleur, chameaux, « femmes voilées », lépreux, marchés à denrées inconnues, mosquées, prières musulmanes. À proximité de Bakou, la différence religieuse le bouleverse encore une fois, à la vue d’une cérémonie singulière :
[a]u premier moment, nous croyons à des sacrifices humains, ou à une exécution capitale, nous voulons fuir, mais un persan très aimable nous rassure, c’est la plus grande fête religieuse des persans et les fanatiques se donnent sur la tête des coups de sabre, le sang coule abondamment et ruisselle sur leurs vêtements blancs […]. [I]ls se frappent la tête avec leur main en chantant – certains se trouvent mal des suites de l’hémorragie, on les soutient tout pantelant, ils vont mourir dans un coin – la plupart s’en remettent paraît-il. Nous quittons ce lieu d’horreur tout oppressé, c’est un spectacle que nous n’oublierons de la vie54.
24Cette Russie ne cesse pas de le sidérer. À Samarkand, il exprime ce dépaysement qu’il ressent depuis longtemps : « Samarkand ! 15 000 kil[omètres] de Paris. Pays des mille et une nuits »55.
25Pour Vever, qui fait écho, certes, aux autres voyageurs français en Russie, ce voyage, c’est la recherche des lieux où se croisent les chemins d’Asie et d’Europe, le « civilisé » et le « barbare ». Parfois cette juxtaposition culturelle est frappante, comme le montre cette scène à Samarkand avec Vever, sa femme et un groupe de jeunes femmes :
[l]a plupart prennent la fuite dès qu’elles nous voient, surtout dès qu’elles aperçoivent le petit appareil à photographier que je tiens à la main et qui leur fait une peur bleue. Le premier moment de sauvagerie passe et grâce au « perevodschik » [traducteur], elles s’apprivoisent un peu. Curieuses comme toutes les filles d’Ève, elles m’examinent et surtout la toilette de madame ; elles touchent, palpent, et deviennent farouches56.
26La « sauvagerie » de ces « farouches » « fille d’Ève » fait contraste pour Vever avec la beauté exotique d’une autre femme rencontrée en route. En effet, Vever trouve celle-là « particulièrement jolie – on la dit juive du Caucase »57. Malgré une certaine difficulté d’adaptation, avec l’aide d’un traducteur (qui sait d’ailleurs cuisiner !) ces Français continuent – non sans difficultés – à sonder, approcher, explorer les terres lointaines et les cultures exotiques qui font partie de cet empire, ce nouvel allié.
27Le récit de Vever, émaillé de détails pittoresques et captivants, et dont le style est parfois télégraphique, montre le choc ressenti face à la nouveauté et à l’étrangeté de ce pays inconnu. Il est évident qu’il se sent étranger. Quelle belle surprise, donc, quand Vever se trouve face-à-face, dans ces mêmes territoires, à un autre Français ! En Géorgie – le pays actuel –, il croise, à deux reprises, le chemin du capitaine Paul Lancrenon, « un [F]rançais venu de Paris à Pétersb[our]g en vélocipède, puis descendu la Volga en périssoire, et qui maintenant traverse le Caucase à pied »58. Son jugement sur cet aventurier français ? « [R]entrer en France depuis Vladikavkas à cheval tout cela seul, sans guide, avec son bagage sous le bras et un appareil à photo – et on dira que les Français ne sont pas entreprenants »59. En fait, Vever emprunte l’appareil photo de Lancrenon pour prendre une photo d’un Géorgien croisé sur leur chemin (voir fig. 4)60. Conservée par la médiathèque de l’architecture et du patrimoine, cette photo est une trace visuelle de cette rencontre fortuite dans le Caucase, que Lancrenon, lui aussi, mentionne dans son récit de voyage, Trois mille lieues à la pagaie, publié en 189861.

Figure 4 : Sur la route de Géorgie, photographie prise par M. Vever. Portrait en pied d’un homme.
28En fin de compte, il s’avère que ce carnet de voyage a un charme insolite. On y rencontre, évidemment, de l’attendu : phrases utiles en russe, dépenses, achats, connaissances faites lors du voyage. Il est souvent difficile à lire en raison de son petit format de carnet de poche. Cependant, dès que l’on arrive à le déchiffrer, on s’étonne parfois des détails que l’on y trouve. Le lecteur devient témoin non seulement de l’Exposition de Moscou et du voyage de Vever à travers la Russie, mais aussi, grâce à la richesse du récit, on découvre une Belle Époque des voyageurs français (bicyclettes, appareils photos, tramways, bateaux à vapeur) et une Russie en expansion (l’Exposition, le Transsibérien, l’industrie pétrolière). Le tout est vu à travers les yeux d’un individu qui appartient à la fois au monde de l’art, de la politique, de la diplomatie et du commerce. Doté d’une curiosité insatiable à l’égard du monde qui l’entourait, Vever se souvint pendant longtemps, ainsi à l’occasion d’une visite à l’église russe de Paris en mars 1899, de « notre beau voyage en Russie »62. Bref, c’est un récit singulier et révélateur d’une période charnière entre les deux pays et qui se prête à de multiples lectures et usages.
Notes de bas de page
1 Ce carnet fait partie des Henri Vever Papers (Série 1, « Diaries, 1878-1901 »), fonds détenu depuis 1988 par les Freer Gallery of Art and Arthur M. Sackler Gallery Archives, Smithsonian Institution, grâce au don de François Mautin, petit-fils d’Henri Vever. Pour une description détaillée de ce fonds, voir « Henri Vever : a finding aid to his papers at the Freer Gallery of Art and Arthur M. Sackler Gallery Archives », en ligne à l’adresse suivante : http://www.asia.si.edu/archives/finding_aids/vever.html.
2 H. V., carnet de voyage manuscrit (juillet-septembre 1891), annoté par François Mautin (F. M.), 8-12 août 1891.
3 H. V., 4, 6 novembre 1899. Outre le carnet de voyage de 1891 et un carnet rédigé par Henri Vever en 1878, les quatre carnets principaux (H. V., 1-4) constituant les Henri Vever Papers furent rédigés entre le 1er janvier 1898 et le 11 mars 1901.
4 Henri Vever, La bijouterie française au XIXe siècle (1800-1900), 3 t., Paris, 1906-1908.
5 Voir Collection H. V. (Henri Vever) : catalogue de tableaux modernes de premier ordre, pastels, aquarelles, dessins, sculptures dont la vente aura lieu Galerie Georges Petit, Paris, 1er et 2 février 1897.
6 Voir Évelyne Possémé et Geneviève Aitken, « Les estampes japonaises données au Louvre par Henri Vever », dans La revue du Louvre et des musées de France, t. 38/2, 1988, p. 138-147.
7 Voir Jack Hillier, Japanese Prints and Drawings from the Vever Collection, 3 t., London, 1976. Sur le point de vue d’Henri Vever à l’égard de l’influence de l’art japonais sur l’Art nouveau, voir Henri Vever, « L’influence de l’art japonais sur l’art décoratif moderne », dans Bulletin de la Société franco-japonaise de Paris, juin 1911, p. 109-119.
8 Voir A Jeweler’s Eye: Islamic Arts of the Book from the Vever Collection, éd. Glenn D. Lowry et Susan Nemazee, Washington (DC)/Seattle (WA), 1988. Sur la disparition et la redécouverte de la collection des arts islamiques d’Henri Vever, voir Aileen Vincent-Barwood, « The lost treasures of Henri Vever », dans Saudi Aramco World, janv.-fév. 1989, p. 12-17.
9 Georges Marteau et Henri Vever, Miniatures persanes exposées au musée des Arts décoratifs, Paris, 1913.
10 H. V., carnet de voyage, 30 août - 3 septembre 1891.
11 Ibid., 13-15 août 1891.
12 Ibid., 8-12 août 1891.
13 Ibid., 30 août - 3 septembre 1891.
14 Ibid.
15 Ibid.
16 H. V., 4, 28 octobre 1900.
17 H. V., carnet de voyage, 5 août 1891. Sur la visite de la flotte française à Cronstadt, voir Jacques Kayser, De Kronstadt à Khrouchtchev : voyages franco-russes. 1891-1960, Paris, 1962, p. 13-28.
18 Sur l’Exposition de Moscou, voir AN, F/12/4987, Exposition de Moscou, 1891 ; E. F., « L’Exposition française de Moscou », dans L’illustration, 17 janv. 1891, p. 64 ; « L’Exposition française de Moscou de 1891 », dans La nouvelle revue, 1er avril 1891, p. 449-460 et 1er août 1891, p. 604-618 ; Auguste Moreau, Société des ingénieurs civils… L’Exposition française à Moscou en 1891, Paris, 1891 ; Georges Petit, « L’Exposition française à Moscou », dans La revue scientifique, 25 avril 1891, p. 529-531 ; Léon Plarr, La France à Moscou. Exposition de 1891, Paris, 1891 ; Anne Kraatz, Le commerce franco-russe : concurrence et contrefaçons de Colbert à 1900, Paris, 2006, p. 324-330.
19 G. Petit, « L’Exposition française… », p. 529.
20 Respectant le même système de classement général des produits que celui des Expositions universelles de 1878 et de 1889, l’Exposition franco-russe offrait neuf groupes et trente-sept classes de produits. Les objets d’art produits par la Maison Vever faisaient partie du Groupe IV (« Tissus, vêtements et accessoires ») et de la Classe XVIII (« Orfèvrerie et bijouterie »).
21 AN, F/12/4987 : « Note sur un projet d’exposition française en Russie en 1891 ».
22 E. F., « L’Exposition française de Moscou de 1891… », p. 451.
23 G. Petit, « L’Exposition française… », p. 529.
24 E. F., « L’Exposition française de Moscou de 1891… », p. 459.
25 Sur le « triomphe » de la bijouterie française lors de l’Exposition de Moscou, voir Wilfried Zeisler, « Moscow, a “Far East” for the French art industries », dans Moscow : Splendours of the Romanovs, Monaco, 2009, p. 175-191.
26 Peu après l’ouverture de l’exposition, M. Jouanno a fait faillite, laissant sa place à un nouvel administrateur envoyé de Paris et ainsi augmentant le désarroi général entourant les débuts de l’exposition. Voir A. Kraatz, Le commerce franco-russe…, p. 326.
27 « Vever », dans L. Plarr, La France à Moscou…, p. 284-285.
28 Voir W. Zeisler, « Moscow, a “Far East”… », p. 176-182.
29 E. F., « L’Exposition française de Moscou de 1891… », p. 604.
30 A. Kraatz, Le commerce franco-russe…, p. 324.
31 Voir Léon Dru et E. Levasseur, La récolte de 1891 en Russie et l’Exposition française de Moscou, Paris, 1891.
32 Voir George F. Kennan, The Fateful Alliance : France, Russia and the Coming of the First World War, New York, 1984, p. 73-74 et aussi la lettre du ministère des Affaires étrangères à Jules Roche du 22 avril 1891 (AN, F/12/4987).
33 E. F., « L’Exposition française de Moscou de 1891… », p. 617.
34 A. Kraatz, Le commerce franco-russe…, p. 239.
35 Claude de Grève, Le voyage en Russie. Anthologie des voyageurs français aux XVIIIe et XIXe siècles, Paris, 1990, p. i-ii.
36 H.V., carnet de voyage, 20 juillet 1891.
37 Ibid., 28 juillet 1891.
38 Ibid., 26 juillet 1891.
39 Ibid., 6 août 1891.
40 Ibid., 19 juillet 1891.
41 Ibid., 2 août 1891.
42 Ibid., 27 juillet 1891.
43 Ibid., 19 juillet 1891, 20 juillet 1891.
44 Ibid., 20 juillet 1891.
45 Ibid., 28 juillet 1891.
46 Ibid., 30 juillet 1891.
47 Ibid., 6 août 1891. Vever remarque : « La population de Nijni qui est de 60 mille âmes […] en temps ordinaire atteint jusqu’à 300 mille pendant la foire – on y voit des gens de tous les pays – Persiens […], Chinois, Turcomanes, etc. – ceux qui nous frappaient le plus sont des espèces de Tartars moitié russes, moitié chinois comme tête et comme costume, il y en a des quantités – beaucoup de bonnets fourrés, beaucoup de gros bonnets sortes de turbans capitonnés – les bottes de tout modèle et de toutes couleurs en cuir, en peau, en fourrure même, et surtout en feutre ».
48 Ibid., 12 août 1891.
49 Ibid., 8-12 août 1891.
50 Ibid.
51 Ibid., 13-15 août 1891.
52 Ibid., 8-12 août 1891, 13-15 août 1891.
53 Ibid., 13-15 août 1891. La description de Bakou par le diplomate et critique littéraire russophile Eugène-Melchior de Vogüé fait écho à celle de Vever dans son carnet. Voir Eugène-Melchior de Vogüé, « La ville de feu », dans L. Plarr, La France à Moscou…, p. 75-83.
54 Ibid., 16-17 août 1891.
55 Ibid., 30 août - 3 septembre 1891.
56 Ibid.
57 Ibid., 13-15 août 1891.
58 Ibid., 19 août 1891.
59 Ibid.
60 Voir le site web de la médiathèque de l’architecture et du patrimoine consacré à « Paul Lancrenon (1857-1922) : militaire de carrière et photographe amateur » à l’adresse suivante : http://www.mediatheque-patrimoine.culture.gouv.fr/fr/archives_photo/visites_guidees/lancrenon.html. Ce fonds photographique conserve de nombreuses photographies prises par Lancrenon lors de son voyage. À plusieurs reprises dans son carnet, Vever, lui aussi, parle des photos qu’il prend lors du voyage. Ces photos n’ont malheureusement pas été conservées et il se peut qu’au moins certaines d’entre elles ne furent pas réussies, comme Vever le note : « j’en fais des photos mais ô terreur je vois que dans ma précipitation j’ai oublié d’ouvrir le volet de l’appareil – cinq plaques de perdues ! !… hélas ! hélas ! » (H.V., carnet de voyage, 13-15 août 1891).
61 Voir Paul Lancrenon, Trois milles lieues à la pagaie : de la Seine à la Volga, Paris, 1898, p. 255. Le 19 août, Lancrenon décrit sa nouvelle connaissance : « Un Parisien, M. V…, joaillier de la rue de la Paix, que j’avais vu à Tiflis, vient à passer avec sa femme dans une voiture et s’arrête pour m’offrir une place à côté de lui. Je le remercie ; il a pris part à l’exposition de Moscou et voyage maintenant à grande vitesse, avec sept ou huit relais préparés d’avance ; mais tout en se traînant sur la route, la tortue franchira le Caucase, tandis qu’arrivé à Kasbek le lièvre devra rebrousser chemin ».
62 H.V., 3, 13 mars 1899.
Auteurs
Central Michigan University
The Pennsylvania State University
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