La Pommière, une institution tributaire des politiques de protection de l’enfance
p. 55-88
Texte intégral
1Je vais à présent aborder la manière dont La Pommière a été affectée par l’évolution des politiques de protection de l’enfance et l’intervention croissante de l’État, en analysant les répercussions des nouvelles politiques de placement sur cette institution, sur les professionnel.les (membres du comité, éducateurs.trices) et sur les adolescentes placées. Je vais également m’intéresser à l’éventuelle marge de manœuvre dont les acteurs et actrices précité.es ont pu disposer.
Bref historique de La Pommière (1821‑1960)
2En 1821, le projet d’ouvrir une institution pour des fillettes, dont « les mères, veuves, encore jeunes, vicieuses et dans la misère […] voudraient une existence différente pour leur enfant » (Ruchat, 1993, p. 41) se concrétise grâce à la création de l’association de l’institution de La Pommière (Ruchat, 1991). Cet établissement, géré par des dames philanthropes, fonctionne selon le modèle d’une école agricole et, dès 1823, est installée dans une ferme de la campagne genevoise. Cette distance entre l’institution et la ville permet de limiter les relations entre les mères et les fillettes placées et de préserver celles-ci de l’influence maternelle jugée néfaste (Ruchat, 1993). Dans les années 1840‑1850, la soixantaine de fillettes et adolescentes placées à La Pommière est initiée aux travaux de la campagne afin de se former pour leur vie d’adulte, sous la responsabilité du directeur1. En 1898, le directeur de La Pommière est remplacé par une femme, les travaux agricoles sont abandonnés2, l’école rurale fait place à l’asile de La Pommière3. Enseignement ménager, instruction scolaire et religieuse sont désormais les bases de l’éducation prodiguée aux élèves : « les promotrices de la Pommière considèrent comme leur mission de former de ‘bonnes et utiles domestiques’ » (Heiniger, 2017, p. 92). Dès 1908, les trente pensionnaires sont scolarisées à l’école publique, l’institution « devient plus maison d’éducation qu’asile, et davantage substitut de la famille qu’école » (Mützenberg, 1984, p. 12). Jusqu’en 1960, La Pommière continue de fonctionner comme « un foyer pour ‘cas sociaux’ »4 accueillant entre trente et cinquante enfants et adolescentes de 6 à 16 ans5 « privées de surveillance, ou de leurs parents, ou encore exposées à des influences dangereuses » (p. 13).
Changement de mandat en 1960
3En 1960, « à la suite de l’évolution des conceptions dans l’éducation, les services placeurs genevois [demandent à l’] association de se spécialiser dans l’accueil des adolescentes de 13 à 16 ans, présentant des troubles du caractère »6. Les quinze jeunes filles, considérées comme caractérielles, sont encadrées par deux sœurs Diaconesses, l’une éducatrice, l’autre institutrice7. L’enseignement scolaire, complété par des cours ménagers, s’effectue en effet à nouveau au sein de La Pommière8 et un psychiatre est chargé d’assurer le suivi médicopsychologique des jeunes filles9. Le changement d’orientation de La Pommière a un impact considérable sur le fonctionnement de l’institution : le comité se trouve confronté à des adolescentes difficiles dont l’éducation exige un personnel plus nombreux, plus spécialisé10 et difficile à recruter11, sans compter les exigences de l’administration fédérale qui ne subventionne La Pommière « qu’à la condition que les jeunes filles soient assurées […] d’un traitement psychothérapeutique adéquat »12.
4Par ailleurs, l’intervention de la pédopsychiatrie, de même que l’exigence d’avoir un personnel éducatif spécialisé et le passage d’un placement “garderie” à un placement “soin”, indiquent qu’il ne s’agit plus seulement de fournir un lieu d’accueil aux jeunes filles inadaptées, mais également de leur offrir l’encadrement thérapeutique préconisé par les nouvelles politiques de protection de l’enfance. Le comité est contraint de « s’adapter aux méthodes d’éducation modernes [pour] répondre aux besoins de la collectivité genevoise et aux exigences des services de placement »13.
5En une dizaine d’années, le comité de La Pommière est passé de la gestion d’une institution accueillant des orphelines ou des enfants démunies à celle d’une institution de placement officiel accueillant des jeunes filles très difficiles, perturbées, présentant des troubles du comportement. L’action du comité, à caractère philanthropique et charitable, ne suffit plus. L’association de La Pommière, dans le contexte de Mai 68, subit « les assauts de la contestation de l’autorité et de l’ordre établi, de la libéralisation des mœurs et de la remise en question des valeurs qui lui avaient permis de vivre, somme toute, assez paisiblement son premier centenaire »14. Les préceptes issus de la philanthropie, qui sont à l’origine de la création de l’institution et ont dirigé l’action éducative de La Pommière durant près de 150 ans (pour exemple la conviction que « le travail ménager fait partie intégrante de l’éducation des adolescentes »15), ne correspondent plus aux conceptions pédagogiques des années soixante. Une institution aussi stable que La Pommière peine à se transformer car changer signifie « devoir investir à nouveau, […] reprendre les processus d’apprentissage, rester coordonné avec les autres institutions, […] être capable de prévoir les nouveaux comportements adaptés » (Palier, 2010, p. 412). Cette résistance aux changements (pédagogiques, sociaux, politiques, etc.), en partie liée au comportement des individus, peut être définie par le phénomène de la path dependence ou « dépendance au sentier emprunté » (Palier, 2010). Les processus à l’origine de ce phénomène sont des « mécanismes qui rendent un choix historiquement de plus en plus contraignant à mesure qu’il s’inscrit dans la durée » (p. 412). Or, la rééducation des jeunes filles en difficulté, si elle s’est pendant longtemps résumée à une « action morale, pratiquée en milieu fermé protecteur, assortie d’activités essentiellement ménagères »16, exige désormais « la mise en œuvre de moyens fort différents ».
6Le comité de l’institution, vulnérabilisé par cette situation, affronte de plus de graves difficultés financières qui le contraignent à devoir trouver rapidement des fonds : « depuis longtemps les pensions versées pour les jeunes filles, ainsi que les subventions fédérales et cantonales, ne couvrent plus les frais »17. Pour pouvoir poursuivre son activité mais aussi procéder aux travaux de rénovation nécessaires de ses bâtiments de Conches, le comité décide de vendre une partie de son terrain à l’État en 1971.
7La Pommière n’est pas la seule institution à avoir rencontré de nombreuses difficultés face à l’obligation de se réorienter en tant qu’institution spécialisée. Au Home “Chez nous” (VD) aussi, « la figure de l’orphelin s’efface devant celle de l’enfant difficile et caractériel » (Coquoz, 1998, p. 127) et des éducateurs.trices spécialisé.es remplacent les dames qui s’occupaient jusque-là des enfants. Fondé à l’initiative de philanthropes vaudois, l’Asile d’Echichens rencontre les mêmes difficultés lors de sa réorientation comme institution spécialisée. Ces trois institutions – créées initialement pour des orphelin.es ou enfants abandonné.es moralement et ayant de longues années de pratiques avec ce mandat – sont toutes passées de l’accueil d’enfants délaissé.es à celui d’enfants perturbé.es « parce que la demande sociale s’est déplacée » (Coquoz, 1998, p. 46), et du fait de l’intervention de la pédopsychiatrie dans le domaine de la protection de l’enfance. Suite à leur réorientation, ces institutions perdent leur stabilité et entrent dans une période de doutes et d’incohérence (Coquoz, 1998), d’autant plus qu’« il s’agit bien moins de nouvelles institutions que de transformations d’anciennes dans un nouvel agencement » (Avvanzino, 1993, p. 168). Afin d’éviter des coûts élevés, « il semble toujours préférable d’adapter les institutions existantes plutôt que de les remplacer par des nouvelles » (Palier, 2010, p. 414). Dès lors où les établissements s’inscrivent dans la durée, la configuration institutionnelle les rend difficiles à changer, en particulier « dans le domaine de la protection sociale [qui rend] principalement compte de la permanence des arrangements institutionnels élaborés à la fin du XIXe siècle et dans l’après-guerre » (Pierson, 1994, cité par Palier, 2010, p. 416).
8Le changement de mandat de La Pommière provoque une crise interne au sein de l’institution dès la fin des années soixante. Comme d’autres institutions, notamment la Maison d’éducation de Vennes (VD), La Pommière n’a pas été épargnée « par les remous dans le milieu de l’éducation sociale. […] écartelée comme jamais encore par la diversité et le nombre des acteurs » (Heller, 2012, p. 144). Le comité finit par prendre conscience de la nécessité de remanier ses conceptions et son fonctionnement et « laisse lentement tomber [son] attitude paternaliste »18, mais le changement de mandat imposé par les services placeurs et les autorités publiques a totalement déstabilisé l’institution. De nombreux conflits à propos de l’organisation et des méthodes pédagogiques utilisées à La Pommière éclatent entre le comité et la direction de l’institution, de même qu’entre la direction et l’équipe éducative. Ces divergences et tensions engendrent un turn-over aussi bien au niveau des directeurs.trices qu’au niveau des éducateurs.trices. Ainsi, ce ne sont pas moins de trois directeurs.trices qui se succèderont à La Pommière en moins de sept ans, alors que les deux anciennes directrices avaient auparavant occupé leur poste durant plus de vingt ans chacune19.
Crise interne de La Pommière
9Dès 1966, la direction de La Pommière est assurée par un couple, mais celui-ci est « considéré comme insuffisant du point de vue de la pédagogie spécialisée »20 pour assumer la prise en charge des pensionnaires, surtout avec la multiplication des cas très difficiles et part en mauvais terme avec le comité en 196921. Laura Sidell22, une américaine, divorcée et mère de deux filles (ce qui va à l’encontre des principes philanthropiques du comité de La Pommière), reprend la direction de La Pommière après avoir travaillé pour l’Astural, aux foyers pour garçons de Vernier et du Lignon. Licenciée en psychologie, psychothérapeute avec une spécialisation en rééducation, elle est recommandée par le psychiatre de La Pommière23. Les qualifications de la nouvelle directrice sont représentatives du tournant médico-psychologique qui s’opère dans les institutions dévolues à l’enfance inadaptée, mais ne correspondent peut-être pas aux conceptions du comité, plutôt issu de l’ancienne génération.
10Assez rapidement, des tensions apparaissent entre Sidell et le comité, qui n’apprécie guère ses méthodes avant-gardistes (une trop grande liberté accordée aux filles, un manque de structure dans le programme basé sur des théories psychologiques et non éducatives notamment)24 ainsi qu’un certain laisser-aller dans la tenue de la maison selon le comité (désordre, manque de propreté)25. En dépit du fait que la directrice souligne qu’« une maison d’adolescentes caractérielles ne peut être comparée à une maison d’orphelines »26, les dames du comité déplorent l’état de la maison et regrettent l’ordre qui régnait auparavant. Ici encore, la difficulté du changement de mandat se fait ressentir et met l’accent « sur les difficultés de collaboration [qui en découlent] et sur l’opposition entre [des] conceptions conservatrices ou progressistes du travail social » (Heller, 2012, p. 137).
11Des désaccords sont également relevés entre Sidell et l’équipe éducative, qui lui reproche d’être uniquement centrée sur les problématiques psychothérapeutiques (au détriment des activités sportives, des loisirs ou des weekends)27. Un manque général de collaboration est souligné : il se traduit d’une part par un monopole décisionnel de la directrice et d’autre part par l’absence de consultation de l’équipe éducative quant à l’admission des futures pensionnaires ainsi que la rétention d’informations importantes les concernant, tels des rapports de psychiatres28.
12Les services placeurs, enfin, alertent le comité sur divers cas inquiétants, que ce soit le SMP par rapport à une fille de treize ans non scolarisée et une autre dont la fugue n’a pas été déclarée à la police29, ou le Service du tuteur général (ci-après STG) par rapport à une jeune fille qui aurait été ignorée par Sidell. Elle aurait eu à l’égard de celle-ci plusieurs comportements inadéquats : privation d’argent de poche injustifiée, fugue non déclarée, enfermement dans la chambre, dépôt de la jeune fille dans les locaux du STG et proposition d’emprisonner l’adolescente à la prison de Saint-Antoine30. Ces services précisent également avoir eu beaucoup de difficultés à pouvoir discuter de ces cas avec la directrice « qui les accueillit avec la plus mauvaise grâce […] anéantissant du même coup les minces possibilités qui existaient encore de rétablir à travers un dialogue authentique une situation devenue inadmissible »31.
13Il semble néanmoins que les services placeurs ne soient pas unanimes quant à leur opinion sur Sidell. Du côté du Tuteur général, Turian émet des réserves à son sujet et relève son incapacité professionnelle. Il souligne qu’un « très petit nombre de ces jeunes filles sont placées par [son] service. De ce fait, [sa] collaboration avec la directrice de La Pommière est fort limitée »32.
14Cependant, du côté de la Protection de la Jeunesse, on tend à prendre sa défense. Selon Robert, « les conflits actuels, qui sont connus de tous et opposent le comité de La Pommière à [Sidell] ressortent beaucoup plus à une incompatibilité d’humeur inhérente à la différence d’âge des personnes en cause ». Pour lui, l’institution est victime de certains principes éducatifs qu’il se refuse à qualifier. Il estime que Daniel Mulock Houwer33, un expert hollandais mandaté par le responsable des Etablissements d’Education du Département fédéral de justice et police au printemps 1971 pour expertise La Pommière, n’est pas resté assez longtemps dans l’institution pour que son analyse rendre compte du travail qui y est effectué.
15Selon lui, la directrice applique
des principes psycho-éducatifs auxquels ne sont pas habitués certains organismes qui, par tradition, s’occupent d’éducation, [que] l’inorganisation et [le] désordre qui peut régner [à La Pommière] semble[nt] avoir bien peu d’importance par rapport au travail individuel et de groupe qui s’y fait34.
16Or, si Turian est tuteur général, il est également membre du comité de La Pommière. On peut se demander si la méfiance qu’il affiche envers Sidell est le résultat d’une mauvaise expérience en tant que tuteur général ou de sa solidarité avec le comité dont il est membre.
17Dès octobre 1971, les procès-verbaux du comité sont plus alarmants et relèvent, entre autres, l’apparition de drogue dans le foyer35. Le psychiatre de La Pommière s’étonne de la recrudescence des cas psychiatriques parmi les pensionnaires, auxquelles la maison « ne voue pas la surveillance nécessaire »36, et, rejoignant l’avis du comité, déclare que « le côté éducatif est tout à fait ignoré à LA POMMIERE »37. Cependant, le psychiatre relève également la capacité de Sidell à limiter les tensions qui surgissent entre les filles placées dans l’institution38, et s’étonne que « le Comité n’ait pas donné des structures très précises à la Direction sur l’organisation de la Maison [car c’est à lui] de contrôler cette organisation »39. Mais le comité commence à remettre en question la formation et l’expérience de Sidell40 et envisage de la remplacer, l’estimant « dépassée par les tâches actuelles de LA POMMIERE, pour lesquelles elle n’a pas les capacités professionnelles suffisantes »41. Les déboires de l’institution sont imputés à la directrice : on lui reproche notamment de ne pas avoir de ligne éducative. Sidell est finalement renvoyée par le comité en juin 197242, parallèlement à la décision prise par le comité de fermer l’institution de La Pommière. En effet, suite à la modification de ses statuts et de son programme43, l’Association de La Pommière a décidé d’entreprendre d’importants travaux de réaménagements des bâtiments de Conches. En effet, ceux-ci ne répondent plus aux exigences de sécurité et d’hygiène, et ne correspondent pas aux normes d’accueil exigées par la Confédération en vue de la transformation du mandat de l’institution.
18L’institution est donc provisoirement déplacée au foyer des Délices, loué momentanément par la FOJ à l’association de La Pommière. Ebrard, licencié en psychologie et ancien directeur du pavillon d’observation du foyer des Ormeaux (FOJ)44, est nommé directeur de La Pommière lors de la réouverture le 1er octobre 197245. Cependant, l’installation aux Délices ne s’effectue pas sans heurts. L’exigüité des locaux, d’une part, oblige La Pommière à diminuer le nombre de ses places d’accueil. D’autre part, le directeur souligne que la plupart des jeunes filles placées dans l’institution sont « des cas sociaux et ils s’aggravent très vite »46, des jeunes filles qui s’avèrent de plus en plus difficiles, parfois « dépressives, voire suicidaires et le sens du travail est fortement remis en question »47.
19Ces différents facteurs finissent par créer « de graves perturbations au sein du personnel qualifié […] amenant une mutation rapide des cadres et du personnel rendant pratiquement impossible le maintien en activité de La Pommière dans les locaux des Délices »48. Une éducatrice reproche au comité d’être « un comité fantôme qui ne se soucie que de la finance et de la bonne morale, la psychologie c’est du ressort des psychiatres et des éducateurs »49. Elle témoigne :
J’ai vu défiler une quantité innombrable de gens : licenciés, déçus et déprimés. […], j’ai vu un homme déprimé ployé sous son monceau de responsabilités. Le pouvoir entre ses mains, il fallait que la roue tourne coûte que coûte, pourvu que la face soit sauvée. […] Un carnaval d’hypocrisie où l’on essaie de sauver le peu qui reste, où l’on promet des merveilles en sachant par avance que personne ne pourra tenir ses engagements. […] Quand est-ce que le comité va arrêter, [et] cesser de traiter les filles et leurs éducateurs comme des marionnettes ambulantes […] Jusqu’à présent vous ne leur avez pas rendu la tâche facile…50.
20L’attitude de cette éducatrice illustre ce que Foucault appelle les deux images du ou de la travailleur.euse social.e : il ou elle est un “juge de normalité” qui participe à l’application des normes en vigueur mais est aussi celui ou celle « qui peut rendre publiques les situations-limites » (Gutknecht, 2016, p. 54) auxquelles il ou elle est confronté.e. Des divergences apparaissent au sein de l’équipe éducative : il y a deux modes de pensées et de fonctionnement, chacun représenté par une partie des éducateurs.trices. Cette dissension est notamment relevée par le psychiatre de La Pommière. Il reproche à une partie de l’équipe de militer pour l’anti-psychiatrie, de « chercher plutôt à se débarrasser [du] directeur, que de collaborer avec lui »51 et ce faisant, de mettre en péril le programme éducatif de La Pommière. On observe ici une conception non unifiée du champ du travail social, et de son identité. Confronté.es à une diversité d’opinions au sein de la société, parfois contradictoires voire conflictuelles, les professionnel.les du travail social n’ont plus une vision commune de leur profession et de leurs objectifs. Cette fêlure d’identité professionnelle du travail social est de plus alimentée par l’apparition de la nouvelle gestion publique, l’exigence de reddition de compte, « la remise en question de l’autonomie décisionnelle du travailleur social et de ses compétences, l’émergence d’enjeux autour de nouvelles visions professionnelles et normes d’action ainsi que par la constitution de nouvelles professions sociales » (Gutknecht, 2016, pp. 164‑165).
21La situation instable de l’institution conduit peu à peu les services placeurs à limiter les placements à La Pommière. Le manque de coordination et de communication entre les différents organes (comité, direction, équipe éducative) impacte directement sur les conditions de placements des jeunes filles. Plusieurs faits d’ingérence voire de négligence sont relevés, notamment par un avocat représentant une des jeunes filles, qui reproche à l’équipe éducative une surveillance insuffisante52. Le directeur est surchargé par la gestion des problèmes administratifs, logistiques et financiers53 que le comité lui délègue, aussi par volonté de ne plus être comme précédemment, « paternaliste et se mêl[ant] de tout, ce qui, souvent, court-circuitait la direction »54. Face à cet échec, le comité s’engage devant le Grand Conseil « à repartir de zéro, repenser complétement ses structures, son organisation et son comité, pour faire face à la situation nouvelle et le rendre compétent »55.
22Le décès subit d’Ebrard, le directeur en fonction56, aboutit à la fermeture de La Pommière le 30 juin 1976. Tout en étant « conscient que sa décision [est] inopportune »57 et que le replacement des six jeunes filles encore pensionnaires de l’institution pose problème, le comité estime ne plus pouvoir assurer des conditions adéquates de placement et refuse d’« engager sa responsabilité envers les parents et les services placeurs en acceptant d’accueillir des adolescentes sans pouvoir assumer les garanties nécessaires »58. Cette décision, considérée comme arbitraire59, provoque de vives réactions parmi l’équipe éducative qui reproche au comité l’absence de dialogue dans le processus de prise de décision ; une décision qui selon elle « qui ne tient pas compte des besoins réels des filles qui […] ont été confiées [à l’institution de La Pommière] »60. Ces propos illustrent le malaise des éducateurs.trices qui se sentent incompris.es et peu (voire pas du tout) soutenu.es par le comité. Un comité – certainement dépassé par la situation – qui peine à élaborer une solution et à trouver sa place dans un paysage social en profonde mutation. Un comité qui, malgré ses bonnes intentions, semble parfois s’empêtrer dans ses principes conservateurs au détriment des relations avec ses employé.es, ou les services placeurs.
23Du côté des autres organes de placement, des protestations s’élèvent également. La porte-parole du groupe des responsables de foyers éducatifs pour adolescents et adolescentes s’inquiète de l’avenir des filles de La Pommière suite au décès du directeur et à la décision de fermeture de l’institution. Elle demande une rencontre avec le comité en mai 197661 pour lui présenter les propositions élaborées par ce groupe et l’équipe éducative de La Pommière afin de remédier à la situation. Mais celles-ci sont refusées par le comité, engendrant « le placement rapide, parfois inadéquat des jeunes filles de La Pommière » et provoquant l’insatisfaction du groupe des responsables de foyers éducatifs pour adolescents et adolescentes qui pensait que « la situation aurait pu évoluer différemment »62. Pour la plupart placées à cause des dysfonctionnements au sein de leur famille, les filles de La Pommière retrouvent dans l’institution un climat tout aussi délétère que celui du milieu familial qui avait motivé leur placement. Disputes, incohérences éducatives et manque de cadre semblent être le lot quotidien de La Pommière. Comme le relève Droux (2018), « le remède se révèle pire que le mal : non seulement l’institution ne soigne pas, mais du fait des tensions qui s’y déploient, peut ‘devenir pathogène’ » (p. 17) pour les individus qu’elle accueille.
24L’incapacité pour le comité de trouver une manière adéquate de gérer les transformations qui se sont opérées au sein de l’institution après le changement de mandat peut être attribuée au fait qu’il n’est pas constitué de professionnel.les et ne dispose pas des outils nécessaires pour pouvoir s’adapter à une telle évolution (de mandat, public, dispositions pédagogiques). L’attitude du comité envers les directeurs.trices et l’équipe éducative provient peut-être de sa difficulté à céder son monopole de gestion à des professionnel.les. Le comité, qui auparavant prescrivait les normes, les conduites à adopter et l’organisation du quotidien, se confronte aux nouveaux savoirs des professionnel.les, qui prennent des initiatives allant à l’encontre des principes ayant dirigé les actions du comité durant de nombreuses années. Cependant, on ne peut pas nier la réelle implication du comité et sa volonté de faire au mieux pour les jeunes filles placées à La Pommière. Face aux différentes crises traversées par l’institution, le comité a tenté de trouver diverses solutions pour remédier à la situation.
Combat de l’association pour sauver son institution
25Malgré le changement de mandat “imposé”, le comité de La Pommière n’a pas été toujours été un simple agent de la puissance publique. Si au début des années soixante, il s’est “contenté” d’essayer d’appliquer les nouvelles prescriptions de l’État, le comité décide, dès le début des années septante, d’élaborer des stratégies autonomes pour se sortir de l’impasse dans laquelle il se trouve. Même si elles sont présentées de manière successive, les trois stratégies développées ci-après ont été adoptées quasi simultanément par le comité.
S’ouvrir aux professionnel.les de la protection de l’enfance
26La première stratégie concerne la structure du comité car certain.es pensent que « l’association donne l’impression de vivre un peu trop en vase clos, d’affirmer à tout prix son caractère privé et d’éviter le contact avec les représentants du secteur officiel »63. De plus, les membres du comité ne sont pas des spécialistes de la prise en charge de l’enfance « hors normes », manquent d’expérience professionnelle dans ce domaine et ne disposent pas du réseau nécessaire à la bonne marche de l’institution. Afin de « jeter les bases d’une collaboration plus étroite avec les services responsables des adolescentes »64, le comité décide alors d’incorporer en son sein des professionnel.les issu.es des services officiels de protection de l’enfance : SPJ, STG, Office de la jeunesse (ci-après OJ), Service médico-pédagogique (ci‑après SMP), Tribunal de la jeunesse (ci‑après TJ).
27Alors qu’en 1970, seul.es deux membres du comité sur quinze proviennent de ces services65, ils et elles sont sept en 197466. Cependant, si elle présente certains avantages, la présence de ces représentant.es comporte aussi son lot d’inconvénients. En effet, si cette représentation permet au comité d’être davantage au fait des décisions politiques, ou des besoins et exigences émanant des services placeurs, elle met également les représentant.es de ces services dans une position délicate puisqu’ils et elles appartiennent à deux instances qui ne poursuivent pas toujours les mêmes buts et peuvent parfois être en conflit67.
28Ainsi, la commission ad hoc chargée d’examiner la demande de subvention pour les travaux de La Pommière relève
l’ambiguïté que représente la présence de responsables des services placeurs dans le comité de l’établissement dont ils sont « les clients » et qu’ils doivent parfois contrôler. La séparation des attributions est la règle admise pour assurer partout un bon fonctionnement68.
29Certains responsables cumulent jusqu’à trois casquettes (le Pr. Bernheim, en 1972, est à la fois directeur de l’Institut de médecine légale [ci-après IML], membre de la commission d’étude consultative et membre du comité de La Pommière) et l’on peut se demander comment ils et elles parviennent à jongler entre ces différents rôles qui parfois s’opposent, et à maintenir une certaine objectivité. Ainsi, lorsque Paillard écrit au Dr. Kurt (le responsable des Établissements d’Éducation au département fédéral de Justice et Police) pour remettre en question sa définition d’une maison de thérapie, affirmer que La Pommière correspond aux attentes de la Confédération et que la maison de thérapie de Gorgier ne suffit pas pour la Suisse romande69, le fait-il en sa qualité de membre de la FOJ ou en tant que membre du comité de La Pommière ? De même, lors d’une conférence des directeurs des services de l’Office de la jeunesse (ci-après OJ), Turian revendique l’utilité de La Pommière à tel point qu’il suggère, face aux contraintes budgétaires, de privilégier cette institution au détriment des Verchères70, puis s’insurge quelques jours plus tard contre l’État, dont il constate la démission71. On décèle ici le conflit de loyauté qui peut surgir entre son rôle privé (membre du comité) et public (directeur du STG, un service de l’État).
30Quelques personnes d’ailleurs, sollicitées par le comité pour en devenir membre, n’hésitent pas à décliner la proposition, soit en raison de leur appartenance aux services officiels72, soit à cause de l’impossibilité à tenir deux rôles parfois contradictoires. Ainsi, le conseiller-psychiatre de l’équipe éducative de La Pommière souligne
l’incompatibilité entre le mandat de conseiller pour l’équipe et la participation, en tant que responsable à part entière, à un organe de contrôle. […] La position d’un psychiatre devient de plus en plus compliquée si une tension s’établit entre l’employeur et l’employé, comme cela a été le cas durant cette dernière année73.
31Le psychiatre fait ici allusion aux différents désaccords qui ont émaillé les rapports entre l’équipe éducative, Ebrard et le comité. Le psychiatre pense « qu’à l’avenir le directeur de l’institution devra avoir son propre consultant, qui ne fera partie ni du comité, ni d’une institution, c’est-à-dire qu’il ne représentera pas le propriétaire ou l’organe de contrôle de la fondation »74.
32Par ailleurs, l’inclusion de professionnel.les des services de protection de l’enfance dans le comité ne paraît pas avoir l’effet escompté, à savoir une meilleure connaissance de la situation actuelle des placements et une communication facilitée avec les services placeurs. En ce qui concerne les placements, le comité se plaint notamment que plusieurs demandes de placement ne lui parviennent pas car elles sont filtrées par le service des placements du SPJ, en dépit du fait que cet organisme connaît les besoins et les possibilités d’accueil de La Pommière75.
Tenter de réorienter l’institution
33La deuxième stratégie élaborée par le comité consiste à reconvertir La Pommière en maison de thérapie et obtenir ce label auprès de la Confédération. Cette décision est en partie justifiée par le fait que les pensionnaires « relèvent de plus en plus de la psychiatrie »76 et que le changement de mandat a de toute façon modifié l’orientation initiale de La Pommière. En effet, alors que les statuts de l’association de 1961 précisaient que le but de celle-ci est de « recevoir des jeunes filles protestantes principalement du Canton de Genève, exposées à des influences dangereuses pour leur moralité, et de leur donner une éducation morale et religieuse »77, les nouveaux statuts de juin 1972 spécifient le rôle de l’institution : assurer « le placement d’adolescentes nécessitant un traitement psycho-éducatif, sans distinction de confession et d’origine »78. Les termes utilisés montrent les transformations qui se sont opérées en une dizaine d’années : les jeunes filles ne sont plus atteintes moralement, mais mentalement, et le traitement envisagé n’est plus religieux mais médical. Un glissement s’est produit entre un contrôle par la foi et la religion (propre à une institution à caractère religieux, ou philanthropique comme l’était initialement La Pommière) à un contrôle par le corps médical (correspondant à une institution spécialisée de type médico-psychologique).
34La volonté de convertir La Pommière en maison de thérapie est également motivée par le fait que l’association de La Pommière se trouve dans une situation financière extrêmement déficitaire et a besoin d’obtenir des subventions de l’État, non seulement pour assurer la continuité de son action éducative, mais aussi pour rénover son bâtiment de Conches. Or les maisons de thérapie pour adolescent.es particulièrement difficiles sont subventionnées par la Confédération à hauteur de 70 % pour les frais de construction, contrairement aux « simples » maisons de traitement pour adolescents difficiles qui ne bénéficient que d’une subvention de 50 %79.
35Le comité entame de nombreuses démarches pour convaincre les services placeurs genevois et la Confédération de reconnaître La Pommière en tant que maison de thérapie (analyses et expertises institutionnelles). En janvier 1972, il décide de nommer une commission interne, laquelle a notamment pour mandat de « fixer la structure exacte de LA POMMIERE, soit au point de vue construction, du personnel et de sa forme d’exploitation »80, afin d’« éviter de mettre sur pied une maison de thérapie qui n’en aurait que le nom et qui le moment venu n’aurait pas le droit à la subvention de 70 % »81. Le Dr. Kurt conseille au comité de solliciter la supervision médicale d’un service universitaire (la demande est faite au Pr. Bernheim82). Le comité charge également cette commission d’établir un contact avec le comité des Verchères de manière à pouvoir mettre en place « une collaboration étroite des programmes »83 de ces deux institutions car les différents organes concernés par la problématique de la prise en charge des jeunes filles inadaptées commencent à s’impatienter. En effet, entre fin 1971 et début 1972, les responsables de l’Astural, de l’AGOEER ou encore de l’ARTES relancent chacun à leur tour Berger, le directeur de l’OJ, pour « y voir clair et cesser ce jeu de cache-cache »84, pour savoir quels sont les futurs projets de La Pommière et ainsi, organiser et anticiper la gestion des institutions pour jeunes filles inadaptées.
36Berger organise une séance consacrée aux institutions pour jeunes filles en mars 1972, à laquelle assistent des représentant.es de la plupart des organes concernés par cette problématique, dont le comité de La Pommière. Durant cette séance, il est précisé qu’une institution doit être fermée pour obtenir la qualification de maison de thérapie selon les critères établis par la Confédération, car sinon elle ne sera considérée que comme une maison de rééducation et de fait bénéficiera de subventions fédérales moins élevées. Les fortes restrictions budgétaires prévues par l’État et le fait qu’il existe déjà une maison de thérapie à Gorgier (NE) sont également des éléments dont il faut tenir compte. Concernant l’orientation des institutions, les Verchères cibleraient les jeunes filles de 15 à 20 ans, tandis que La Pommière prendrait en charge les adolescentes très difficiles de 14 à 16 ans. La formule mixte envisagée de prime abord (internat et semi-internat) est remise en question, au vu des conditions fixées par la Confédération en matière de maison de thérapie, malgré les doutes de certain.es quant au bien-fondé d’une maison fermée85. Enfin, proposition est faite de déplacer La Pommière au foyer des Délices durant la rénovation des bâtiments de Conches, afin que le comité de La Pommière puisse continuer sa mission en assurant des possibilités de placement pour les jeunes filles très difficiles mais également « créer une équipe éducative et médicale, avec le Professeur Bernheim, qui [pourrait y] faire ses armes »86 en attendant la réalisation du complexe Verchères‑Pommière.
37En avril 1972, le Pr. Bernheim accepte de prendre la responsabilité de la supervision médicale de l’institution pour autant que cela soit approuvé par les autorités universitaires et administratives cantonales. Il en profite pour préciser à quel point il lui semble « important que les autorités fédérales puissent reconnaître La Pommière comme une maison de thérapie avec les bases matérielles et le personnel spécialisé approprié »87. Malgré sa volonté d’assurer la continuité de l’institution, confronté à la nécessité de devoir reformer toute l’équipe éducative, le comité se résout à fermer provisoirement La Pommière en juin 1972, jusqu’à sa réouverture dans les locaux des Délices prévue en novembre 1972. À cette même époque, en septembre 1972, la Confédération décide de ne pas reconnaître La Pommière en tant que maison de thérapie car elle a déjà donné son autorisation pour la maison de thérapie de Gorgier (NE)88, prévue pour les adolescentes très difficiles de 13 à 22 ans, nécessitant un traitement thérapeutique intensif, placées pénalement (art. 93ter, al. 1 du Code pénal suisse) ou civilement (placement à des fins d’assistance).
38La division fédérale de la justice souligne de plus qu’elle ne compte pas « poursuivre sous une autre direction, après le renvoi de Sidell, l’essai dont cette personne avait pris la responsabilité et qui consistait à diriger La Pommière comme une maison de thérapie expérimentale ». Malgré son désir de bien faire, le comité de La Pommière semble avoir pris des décisions hâtives qui desservent sa cause au lieu de la servir. Il a sollicité l’aide de la Confédération et fait des demandes de subventionnement tout en voulant garder le contrôle de l’institution (difficulté à transmettre les pièces justificatives exigées par la Confédération, décision de fermer l’institution et de renvoyer le personnel éducatif etc.). Le renvoi de la directrice, alors qu’elle était psychologue, et ce au moment où le comité demande la transformation de La Pommière en maison de thérapie, décrédibilise également le comité. Quoiqu’il en soit, la situation est à présent claire : si le comité décide de poursuivre dans la voie de transformer La Pommière en maison de thérapie, cela devra se faire sans la reconnaissance et le soutien financier de la Confédération. En ce qui concerne le subventionnement fédéral d’une partie des travaux de rénovation, la possibilité reste ouverte à la condition que le comité soumette une demande accompagnée de nombreux documents justificatifs au Service administratif et financier du DIP qui sert d’agent de liaison entre la Confédération et les institutions89. Le comité évoque son incompréhension face à cette décision puisqu’elle émane du même service qui avait suggéré de transformer La Pommière en maison de thérapie90, mais il relève un aspect positif : la non-reconnaissance par la Confédération laissera au comité une plus grande indépendance décisionnelle. Cependant, Paillard, le membre du comité chargé de l’analyse interne de La Pommière à la fin des années septante, « estime que cette remarque du service fédéral ne correspond pas au Code pénal suisse et il s’engage à titre personnel de procéder à une enquête à ce sujet »91.
39La tentative d’une éventuelle reconnaissance fédérale de La Pommière en tant que maison de thérapie se clôt ici. Le comité de La Pommière reste donc dans l’incertitude, que ce soit par rapport à l’orientation à donner à la nouvelle institution lorsque les travaux des bâtiments de Conches seront terminés ou en ce qui concerne le possible octroi de subventions fédérales et cantonales. C’est dans ce climat peu serein que la réouverture de La Pommière s’effectue provisoirement dans les locaux du foyer des Délices, sous la direction d’Ebrard et avec une équipe éducative nouvellement constituée, en novembre 1972.
S’appuyer sur des expertises internes et externes
40La troisième stratégie du comité vise à montrer que La Pommière est une institution indispensable pour les services placeurs, notamment par rapport au manque de structures pour les jeunes filles “difficiles”, et pour ce faire, décide d’effectuer deux expertises de l’institution. Pour la première, le comité mise sur le statut professionnel d’un de ses membres, Paillard, et le charge de rédiger une analyse du contexte de placement à Genève, en mettant en avant l’utilité de La Pommière. Cependant, là encore, le manque de collaboration et de relations constructives avec les organes officiels de placement se fait ressentir.
41En 1970, Paillard effectue un premier rapport sur les besoins de placement des fillettes et adolescentes du canton de Genève, lequel est ensuite discuté au cours d’une entrevue entre lui-même et des représentant.es de l’Astural et de l’Hospice général. Suite à cet entretien, un courrier est rédigé à l’attention de Paillard afin de repréciser l’orientation des Verchères voulues par ses promoteurs, relever « les erreurs quant à la capacité et à la destination de certaines institutions que contenait le rapport »92 de Paillard, et souligner que son projet de demander une expertise sur la situation de Genève s’avère être une bonne idée pour autant que cela ne remette pas en cause le projet des Verchères qui « a le soutien des autorités ». Ce courrier rappelle aussi à Paillard que différents groupes de travail ont déjà été créés afin de mener une réflexion approfondie sur les besoins de Genève en matière d’institutions très spécialisées pour jeunes filles et que remettre en discussion les problèmes que ces groupes ont déjà réglés serait « une perte de temps inadmissible devant l’urgence des besoins ».
42En juillet 1971, une nouvelle circulaire de Paillard à l’intention de plusieurs responsables du placement des mineur.es à Genève, accompagnée d’un rapport recensant notamment le nombre de places en institution pour les fillettes et jeunes filles, critique l’absence de politique en la matière. Un courrier qui, selon certaines personnalités du SPJ, comporte des données erronées, « sous-estime le rôle constructif du groupe PFI du service de protection de la jeunesse »93 et ne prend pas en compte le « sérieux effort de coordination dans le domaine de placement de mineurs »94 initié à Genève. Degoumois, la directrice du service en question, réagit fortement à ce rapport et signifie à Paillard qu’avant de se lancer dans des projets de nouvelles institutions, il serait plus judicieux de partir de celles qui existent déjà en les améliorant95. Elle lui demande aussi s’il agit en tant que membre du comité de La Pommière ou au nom de la FOJ et souligne son rôle équivoque qui, « loin de clarifier la situation auprès des autorités fédérales, [l’a] singulièrement compromise »96. Elle rappelle enfin que « les nouvelles méthodes de rééducation n’envisagent plus le système d’internat que pour des cas très exceptionnels. […] Lorsqu’il s’agit de placer un adolescent en institution, on préfère résolument le système de semi-liberté »97, comme le prévoit le projet des Verchères (mené conjointement par l’Astural et l’Hospice général). Paillard prétend ne pas connaître ce projet alors que le directeur de l’OJ lui a parlé des Verchères quelques mois avant leur entretien98, ce que Degoumois n’ignore pas. Cet échange le place dans une situation délicate avec le SPJ. Il a aussi créé – à coups de critiques et de contestations – un rapport conflictuel aussi bien avec l’Hospice général et l’Astural qu’avec les PFI. De plus, son rôle est ambigu puisque, selon ce qui l’arrange, soit il met en avant sa qualité de membre du comité de La Pommière99, soit au contraire la conteste : « je précise que je ne représente pas l’institution de La Pommière et que jusqu’ici mes vues et propositions sont personnelles »100. Paillard rédige encore un mémorandum en décembre 1971, dans lequel il revient à nouveau sur les critères définissant une maison de thérapie et tente d’utiliser à son avantage les flous juridiques liés à cette appellation en citant le Code pénal suisse. S’appuyant sur les propos du Dr. Kurt pour justifier les subventions fédérales et cantonales demandées, Paillard affirme qu’il est « nécessaire de soumettre les bases de l’action future de ‘La Pommière’ au Département fédéral de Justice et au Département de l’Instruction publique du Canton pour obtenir leur adhésion et leur appui quant aux travaux prévus »101. Alors que Paillard milite activement pour la transformation de La Pommière en maison de thérapie, le comité, quant à lui, annonce attendre les résultats de l’expertise de Mulock Houwer avant de décider quelle sera l’orientation de l’institution102.
43L’analyse interne de Paillard ne suffit visiblement pas à confirmer l’utilité de La Pommière, qui semble être en “concurrence” avec la maison des Verchères pour devenir l’institution responsable de la prise en charge des jeunes filles très difficiles à Genève. Suite à la demande du comité de La Pommière « à pouvoir bénéficier de la subvention accordée à une maison de thérapie »103, le Dr. Kurt demande une analyse de l’institution, externe cette fois-ci, et mandate pour ce faire Mulock Houwer. Celui-ci est chargé, au printemps 1971, d’examiner si La Pommière est susceptible de devenir une maison de thérapie et quelle serait sa place « dans le cadre d’un programme commun dans le domaine des maisons de thérapie de Suisse romande »104.
44L’analyse de Mulock Houwer dure une semaine et doit déterminer si cette institution remplit les conditions nécessaires à l’obtention de la qualification de maison de thérapie : à savoir fournir un cadre pédago-thérapeutique intensif et garantir la thérapie individuelle des pensionnaires, avoir du personnel spécialisé, collaborer avec un psychiatre ou une clinique de psychiatrie, « s’engager à entreprendre tous les cas de traitements thérapeutiques, même lorsqu’ils sont d’un genre particulièrement difficile » et s’assurer que les pensionnaires puissent « rester dans la maison de thérapie jusqu’à la mise en liberté, c’est-à-dire qu’ils ne doivent normalement pas être renvoyés ni déplacés dans une autre maison » afin de limiter les risques engendrés par de nouveaux déracinements.
45Les résultats de cette expertise sont assez complexes à interpréter, tout d’abord parce que de nombreux aspects sont abordés, et ensuite parce que certaines conclusions sont critiques et défavorables à la reconversion de La Pommière en maison de thérapie alors que d’autres le sont beaucoup moins. En ce qui concerne les locaux, quelques transformations seraient à effectuer mais celles-ci demeurent somme toute assez mineures et ne nécessitent pas de reconstruire entièrement le bâtiment. Au niveau du fonctionnement de l’institution, Mulock Houwer confirme les nombreuses tensions entre l’équipe éducative et la directrice et relève qu’il y a deux mondes distincts : « un monde psychothérapeutique plus ou moins isolé à l’extérieur, et un monde pédagogique à l’intérieur de la maison, dans lequel les éducatrices jouent un rôle sans participation suffisante de la directrice ». Il en résulte que « l’approche psychothérapeutique n’est pas synchronisée avec l’approche pédagogique ». Cette collaboration défaillante au sein de l’institution ne touche pas seulement la directrice et l’équipe éducative, mais aussi le comité qui tente laborieusement d’abandonner son attitude paternaliste et les relations avec les intervenants extérieurs (école, thérapeutes). Les adolescentes elles-mêmes sont concernées par ce dysfonctionnement car les interactions au sein de leur groupe sont très peu discutées et analysées en équipe. Celles-ci ne sont donc pas utilisées à des fins thérapeutiques ou « pour améliorer l’adaptation sociale des jeunes filles » comme cela devrait être le cas. L’expert souligne de plus qu’en raison des synthèses d’équipe inexistantes, « les rapports sont insuffisants et irrégulièrement produits. […] On ne peut pas évaluer le comportement des jeunes filles »105.
46Outre un manque de dialogue entre les différent.es protagonistes, une des conséquences de ce clivage entre pédagogie et psychothérapie est que le fonctionnement de La Pommière est « trop peu structuré », « sans ligne directrice en ce qui concerne la pédagogie spécialisée ». En effet, Mulock Houwer constate que le programme de l’institution manque d’élaboration et de réflexion, aussi bien pour le groupe que pour les adolescentes individuellement. Les activités proposées (sportives, créatives, manuelles etc.) sont restreintes, certaines d’entre elles sont irrégulières et comme « il n’existe pas de distinction entre les activités obligatoires et les activités libres, [cela] favorise un grande passivité » chez les adolescentes. De plus, aucune alternative n’est offerte aux adolescentes « difficiles qui ne peuvent pas aller immédiatement à l’école ou à l’apprentissage », lesquelles sont donc peu ou pas assez occupées. En revanche, l’expert relève que les jeunes filles sont contentes d’être à La Pommière. Même s’il attribue leur satisfaction davantage à la grande liberté dont elles jouissent qu’au programme éducatif et thérapeutique en vigueur, il reconnaît néanmoins que la directrice a « introduit un climat de grande tolérance et est une personnalité avec des contacts ouverts avec les jeunes filles ». Il reconnait également que Sidell est confrontée à un dilemme rencontré par beaucoup de directeurs.trices qui ne peuvent pas en même temps diriger et être thérapeutes, au risque de négliger l’organisation de l’institution. De ce fait, il ne peut « pas juger des qualités psychothérapeutiques de la directrice ».
47Pour conclure, Mulock Houwer estime que La Pommière peut remplir les conditions d’une maison de thérapie à condition d’établir « un programme plus structuré », de développer davantage d’activités et de mettre en place une « instruction individualisée donnée par un (e) instituteur (trice) qualifié (e) ». Il faudrait également augmenter le personnel – alors trop chargé pour avoir « les moyens de réaliser un programme pédagogique efficace » –, et améliorer le travail de l’équipe par le biais d’activités collectives car « à présent le rendement pédagogique du travail en groupe est très pauvre ». Il propose aussi, dans l’optique d’une planification intercantonale, de mettre en place une meilleure coopération avec les Verchères pour « garantir une meilleure solution dans le cadre des maisons de thérapie à Genève et en […] Suisse romande. Cette coopération donnera au moins une synchronisation de l’approche thérapeutique et de l’éducation spécialisé »106. Une coopération qui permettrait d’avoir des institutions spécialisées non seulement en fonction de l’âge des adolescentes concernées, mais aussi selon les différents régimes (semi-liberté, internat, post-cure) qui leur conviendraient.
48Solliciter des experts n’a pas été une stratégie payante pour le comité. Malgré le statut professionnel de Paillard et son engagement en faveur de la transformation de La Pommière, son expertise interne a desservi la cause du comité. L’analyse externe de Mulock Houwer a davantage souligné les dysfonctionnements de La Pommière que relevé ses possibilités de devenir une maison de thérapie. Deux résultats d’expertise contradictoires qui peuvent en partie être imputés aux rivalités entre les experts, liées à leur ancrage national (suisse/hollandais), professionnel (juriste/éducateur spécialisé) ou générationnel (ancienne génération/nouvelle génération). Quoiqu’il en soit, en 1972, le constat est sans appel : aucune des trois stratégies élaborées par le comité n’a permis de sortir l’institution de la situation compliquée dans laquelle elle se trouve.
Céder la gestion de l’institution à des professionnel.les
49La Pommière, installée au foyer des Délices, est en 1972 destinée à fonctionner comme une « maison d’éducation spécialisée pour adolescentes difficiles [qui] collabore de manière permanente avec l’unité de Psychiatrie des adolescents de l’Institut Universitaire de Médecine Légale »107, dirigée par le Pr. Bernheim, également membre du comité de La Pommière. Une psychologue et un psychiatre s’occupent du traitement médical des jeunes filles, lequel est mis en application par l’équipe éducative dans son programme pédagogique. Toutes et tous se réunissent en colloque afin de coordonner leur action, et sont supervisé.es par le directeur de La Pommière qui assume « la prise en charge thérapeutique globale d’une dizaine de jeunes filles, en observation et en traitement »108. Ce programme thérapeutique et pédagogique n’obtient cependant pas les résultats attendus par le comité. Celui-ci, déjà déstabilisé par la décision du Département fédéral de justice et police (ci-après DJP), est de plus confronté à l’inertie des autorités cantonales genevoises qui laissent le comité de La Pommière « depuis plus de 18 mois dans une situation d’incertitude pour le moins peu encourageante »109. En effet, aucune garantie, notamment financière110, n’a été donnée au comité quant à la pertinence de son projet concernant la future Pommière, à son utilité pour la collectivité ou à son éventuelle réalisation111 après que celui-ci ait présenté aux autorités cantonales en janvier 1973112.
50Dans son constat adressé en juin 1973 au DJP, après 7 mois d’activité de La Pommière dans les locaux des Délices, le directeur de l’institution souligne que mélanger différents régimes (observation, semi-liberté et internat), sans pouvoir de plus distinguer les groupes d’âges, n’est gérable que provisoirement et qu’il faut rapidement envisager soit d’accepter de transformer les bâtiments de Conches, soit de modifier le mandat d’accueil de La Pommière113.
51En novembre 1973, le comité de La Pommière transmet, selon la demande qui lui a été faite, un budget d’exploitation sur cinq ans à la Commission de coordination chargée de l’attribution des subventions aux institutions accueillant des mineur.es. Il souligne néanmoins que ces prévisions budgétaires sont aléatoires « en l’absence de toute étude sociologique coordonnée et statistiquement contrôlée de ce que pourraient être dans quelques années les besoins et les moyens pour y faire face »114, ce d’autant plus que des variations au niveau des subventions fédérales et cantonales sont à envisager. Le comité demande à la Commission les raisons de son « objection sur le rapport égal en nombre entre les pensionnaires et le personnel »115. L’expérience actuelle au foyer des Délices montre en effet qu’il est nécessaire « d’assurer une présence permanente de deux personnes au minimum » dans l’institution, comme c’est le cas à La Clairière, un établissement qui accueille des garçons. La Commission ne remet pas en doute l’utilité de La Pommière mais souhaite cependant de plus amples précisions en ce qui concerne notamment le nombre de places et l’orientation de la future maison. À cet effet, la Commission signale que celle-ci ne peut pas être de type « maison de thérapie » puisqu’il en existe déjà une à Gorgier, et qu’une « organisation genre ‘La Clairière’ pose des problèmes de structure bien spécifiques »116, tel le fait de dépendre du DJP. Le comité estime avoir fourni tous les éléments nécessaires pour que la Commission prenne sa décision, cependant celle-ci relance à nouveau le comité et renouvèle sa demande de précisions en mars 1974117.
52Le comité commence à s’inquiéter pour l’avenir de son association : doit-il repenser sa « ligne de conduite actuelle pour aller, apparemment pour certains, à contre-courant, [ou] encore vendre la propriété et laisser à l’État ou à une autre organisation le soin de faire le travail que [le comité a] fait jusqu’à ce jour »118 ? Finalement, la Commission décide, en juillet 1974, d’accepter la transformation des bâtiments de Conches et de subventionner une partie des frais de construction119. Cette subvention cantonale, de 25 %, devra être ratifiée par le Grand Conseil pour être effective. Le comité peut aussi espérer une subvention de la Confédération à hauteur de 50 % pour les travaux de la future Pommière en tant que « maison d’éducation conçue de façon très souple et convertible pouvant s’adapter aux changements continuels intervenant actuellement dans les conceptions et méthodes éducatives »120.
53En octobre 1974, le Pr. Bernheim demande au directeur du SPJ de mener une enquête auprès des travailleurs sociaux et travailleuses sociales (notamment du TJ, du SPJ, du STG et du SMP) afin de pouvoir évaluer leurs besoins de placements en fonction des caractéristiques des adolescentes pour lesquelles aucune solution acceptable n’a été trouvée121. À cet égard, le comité de La Pommière souligne être « très soucieux d’évaluer les besoins insatisfaits afin de mettre à la disposition de la communauté un instrument utile et polyvalent »122. Seuls deux services sur quatre acceptent de remplir le questionnaire (le SPJ et le STG). Les réponses obtenues soulignent le manque chronique, en Suisse romande, d’institutions pour jeunes filles susceptibles d’offrir à la fois un accueil provisoire et une prise en charge de plus longue durée (en internat ou en semi-liberté) et relèvent l’urgence de remédier à cette situation123. Pour combler ce manque, le Pr. Bernheim pense que « la future ‘Pommière’ devrait fonctionner comme ‘foyer de semi-liberté’ et comme ‘maison d’éducation (internat avec prise en charge intensive)’ »124 pour les adolescentes caractérielles, les cas « nécessitant des soins psycho-thérapeutiques intensifs »125 et les cas de détention pénale étant pris en charge par la maison de Gorgier. Il souhaiterait néanmoins que les services sociaux définissent plus précisément en quoi consiste une maison d’éducation à leurs yeux.
54Cependant les efforts du comité pour s’adapter aux besoins des services placeurs, de même que le réajustement de la collaboration entre La Pommière et l’IML pour la prise en charge médicale des jeunes filles, ne suffisent pas à améliorer la situation. En effet, l’équipe éducative est confrontée à des suppressions de postes ainsi qu’à une réduction des heures de consultations psychiatriques pour les adolescentes126, en raison de l’augmentation des charges financières de l’institution. Ces restrictions budgétaires vont avoir un impact direct sur les conditions de travail des éducateurs.trices et sur la qualité des prestations offertes par l’institution127, d’autant plus que la double fonction de La Pommière (internat et semi-liberté) est fortement entravée par « l’exiguïté des locaux actuels, rendant difficiles une diversification des modes de vie et traitements »128.
55En février 1975, le Pr. Bernheim pense qu’« il sera difficile d’associer dans de bonnes conditions un foyer d’accueil, une observation en internat ouvert, une prise en charge pour une plus longue durée en internat ouvert et un foyer de semi-liberté »129. De plus, si La Pommière ne se destine pas à l’accueil d’adolescentes particulièrement difficiles, « les dimensions de l’établissement envisagé et le nombre de places prévues »130 doivent être revues à la baisse. Trois mois plus tard, le Pr. Bernheim se retire du comité de La Pommière car il « estime que la destination de la future [Pommière] n’a pas été prévue […] de façon suffisamment précise »131. Selon lui, si la future institution est prévue pour des adolescentes ne nécessitant pas de soins psychiatriques, celles-ci seront « mieux prises en charge dans de petits foyers ou appartements en ville »132, et au cas où La Pommière rénovée serait dévolue à des cas très difficiles, « il faudrait alors prévoir une prise en charge psycho-dynamique et psycho-sociale intensive »133, ce que le comité n’envisage pas de faire. En effet, la future Pommière « est destinée à fonctionner comme une institution pour 24 adolescentes caractérielles au sens de l’art. 91 du C.P.S »134, réparties en trois groupes « capables de mener une vie tout à fait autonome [afin] de donner un maximum de souplesse dans la répartition des pensionnaires »135 en fonction de leur âge, du régime auquel elles seront soumises ou du type de traitement qu’elles devront suivre.
56Malgré l’accord du Département fédéral de Justice et Police pour subventionner les 50 % du coût total des transformations du bâtiment de Conches, et la probable entrée en matière des autorités cantonales pour une subvention équivalente au 25 % des coûts versés par la Confédération136, le comité de La Pommière doit se résoudre à fermer les portes de son institution en juin 1976, suite au décès du directeur. C’est à ce moment que le comité prend conscience que « la reconstruction et ensuite la gestion de la nouvelle ‘Pommière’ ne pourront se faire qu’avec la collaboration des organismes qui travaillent déjà à l’éducation de la jeunesse »137, rejoignant ainsi l’avis du directeur de l’OJ qui se demande « si une institution privée est à même d’apporter tout le répondant que l’on attend d’elle »138. En juin 1976, la Commission ad hoc chargée d’étudier le projet de loi concernant l’attribution d’une subvention à l’association de l’institution de La Pommière rend son rapport. La commission questionne la capacité du comité à assumer la gestion de la nouvelle Pommière « au vu des événements pénibles survenus au sein de cette maison, et des difficultés qu’a eues le comité à [les] surmonter »139 et la garantie que l’État peut demander à La Pommière : adéquation entre les besoins à satisfaire dans l’équipement institutionnel genevois et la manière dont est conçue la nouvelle institution. La commission a effectué plusieurs auditions auprès du comité de La Pommière, des services placeurs, de l’ARTES et de l’AGOER. Il en ressort qu’en fonction de la situation (urgence de créer des places, possibilité de rénover les bâtiments et possibilités financières de l’association), c’est la solution de « La Pommière » qui a été retenue même si celle-ci n’est pas entièrement satisfaisante. En effet, des réserves sont émises sur le nombre de places envisagées dans l’établissement, jugé trop élevé, et sur « la concentration, dans un même lieu, des trois sections prévues »140. Des craintes qui avaient déjà été soulevées par le Pr. Bernheim. De plus, la commission souligne que l’équipe éducative doit être soutenue par « un comité qui, par sa compétence, sa compréhension des problèmes éducatifs et pédagogiques, et sa cohérence avec le personnel de l’institution qu’il gère, l’aide à passer les caps difficiles », faute de quoi la survie de l’institution sera fortement compromise. Elle relève enfin le fait que l’Association est la seule « qui ne gère qu’un seul établissement et c’est peut-être là sa principale faiblesse »141 : « le rattachement de ‘La Pommière’ à une institution plus large serait le gage de son succès à l’avenir ».
57Suite aux remarques de la commission, le comité esquisse quatre propositions à la fin de l’été 1976. La première serait que le comité garde la gestion de La Pommière mais « recrute des forces nouvelles [et] procède à la révision des rapports entre le Comité et la Direction de la maison »142. La deuxième proposition rejoint celle faite par la commission de conserver les structures actuelles de l’institution de La Pommière (et de son association) mais de « confier la gestion de celle-ci à une organisation exploitant elle-même plusieurs maisons en faveur de la jeunesse », soit la FOJ, soit l’Astural. La troisième option serait que l’association de l’institution de “La Pommière” cède son institution à une des organisations précitées mais « conserve son capital mobilier et, renonçant à sa forme juridique d’association, […] se transforme en une fondation de droit privée pour le gérer ». La dernière solution, enfin, serait de procéder à la dissolution complète de l’Association de La Pommière.
58Fin 1976, un deuxième rapport du Conseil d’État souligne que l’existence de nombreux organismes autonomes présente certains avantages mais « rend plus fragile une cohérence institutionnelle déjà difficile à atteindre du fait de l’évolution constante des besoins »143 et encourage leur regroupement. Le comité de La Pommière décide alors de prendre contact avec la présidente du bureau de l’Astural afin de lui demander s’il serait possible d’envisager que cet organisme reprenne la gestion de La Pommière144. Malheureusement, malgré l’intérêt manifeste de cette association à pouvoir couvrir tout le secteur des jeunes filles à Genève et ainsi assurer une certaine forme de cohérence dans la prise en charge des adolescentes, l’Astural se voit obligée de répondre négativement car elle ne possède à ce moment-là ni « les forces nécessaires pour se charger de ce secteur [ni] les moyens de développement »145 suffisants pour bien concevoir ce projet. Le comité se tourne alors vers la FOJ et, lors de l’Assemblée générale de l’Association de La Pommière du 31 mai 1977, annonce avoir pris la décision de céder la gestion éducative de La Pommière à la FOJ, qui de son côté s’engage à respecter les buts de l’association146. Celle-ci demeure propriétaire de ses biens immobiliers, et « assurera dans la mesure de ses revenus, une contribution financière annuelle à la Fondation Officielle de la Jeunesse »147. La passation de la gestion entre l’Association de La Pommière (association de droit civil) et la FOJ (institution de droit public) est officialisée le 1er juillet 1977148. La FOJ s’engage à conserver les statuts de l’association149, qui visent à « assurer dans son établissement le placement d’adolescentes nécessitant un traitement psycho-éducatif, sans distinction de confession et d’origine »150. La Pommière, « considérée par la division fédérale de la justice comme ‘maison d’éducation’ au sens des articles 84 et 91 du CPS »151 est prévue pour accueillir 24 « adolescentes objets de ‘mesures éducatives’ ; elle n’est donc pas destinée à être une maison d’arrêt ou de détention ». Les jeunes filles ayant besoin du « ‘traitement spécial’ prévu par les articles 85 et 92 du CPS dans des cas tels que ‘maladie mentale, faiblesse d’esprit, épilepsie, alcoolisme, toxicomanie etc.’ » ne seront pas admises à La Pommière. En revanche, les cas relevant du Code civil (article 283 et suivants) et/ou de la loi genevoise sur l’Office de la jeunesse (article 12) pourront y être accueillies pour autant que leur placement dans l’institution constitue « une indication de traitement requise par l’état de l’adolescente ».
59Le directeur de la future Pommière, engagé par la FOJ, a notamment travaillé au Châtelard (VD), une institution spécialisée qui accueille « des jeunes filles parmi les plus difficiles de la Suisse romande »152. La FOJ, en lien avec les PFI, crée également une Commission technique consultative ayant pour but de « définir et/ou préciser la mission de ‘La Pommière’ en vue de sa réouverture [et de] préfigurer la collaboration étroite qui doit s’établir pour l’exploitation de ce foyer entre la FOJ (respectivement La Pommière) et les services officiels compétents et intéressés »153. Cette commission multidisciplinaire (éducation, enseignement, droit, psychologie, travail social) est constituée de divers.es représentant.es des services officiels et du directeur de La Pommière154. Elle se réunit plusieurs fois avant la remise des clés de La Pommière à la FOJ le 15 juin 1978155. L’inauguration des bâtiments restaurés de La Pommière se déroule en présence de représentant.es des autorités, de membres de la FOJ et du comité de l’Association de La Pommière, d’anciennes pensionnaires, de la nouvelle équipe éducative et du directeur156. À cette occasion, certain.es psychologues relèvent que le cadre de La Pommière est trop superbe pour y élever des adolescentes sans prendre le risque de perturber leur avenir157.
60J’ai jusqu’ici retracé une petite part de l’histoire de La Pommière en essayant de dégager les motifs qui ont conduit l’Association de cette institution à se résoudre à en céder la gestion à la FOJ. Ce choix est en partie expliqué par les multiples transformations qui se sont opérées, tant au niveau du contexte social et politique genevois qu’au niveau des structures de placement, des prescriptions éducatives et pédagogiques ou encore du public concerné. Gutknecht (2016) relève que le ou la professionnel.le doit « travailler avec les moyens et les outils dont dispose son institution – toujours par définition limités –, cette dernière étant à son tour dépendante des besoins conjoncturels et structurels de l’économie » (p. 60). Il souligne le fait que « l’assistance [sociale] s’est constituée historiquement et socialement comme un arbitrage entre les impératifs du marché et la nécessité de cohésion sociale visant le maintien du statu quo (Tabin, Frauenfelder, Togni et Keller, 2008, p. 173) » (p. 70). Cependant, un autre facteur, et non des moindres, est à prendre en compte pour poursuivre cette tentative de compréhension. Il s’agit du fait que l’institution de La Pommière est strictement dévolue aux filles depuis sa création. C’est ici qu’intervient la dimension du genre, dans le sens où existe une disparité évidente en termes de traitement, d’éducation, de perception et de représentations entre les filles et les garçons.
Notes de bas de page
1 AEG, APAP : 372.9.12 : expertise de Mulock Houwer : « La Pommière : quelques notes historiques », printemps 1971.
2 AEG, APAP : 372.9.12 : expertise de Mulock Houwer : « La Pommière : quelques notes historiques », printemps 1971.
3 AEG ; APAP : 372.1.1 : brochure de l’Association de l’institution de La Pommière, 1821‑1975, rédigé en juin 1979.
4 AEG ; APAP : 372.1.1 : brochure de l’Association de l’institution de La Pommière, 1821‑1975, rédigé en juin 1979.
5 AEG ; APAP : 372.1.1 : brochure de l’Association de l’institution de La Pommière, 1821‑1975, rédigé en juin 1979.
6 AEG ; APAP : 372.1.1 : brochure de l’Association de l’institution de La Pommière, 1821‑1975, rédigé en juin 1979.
7 BGE : Rapport de l’année 1961 de l’Asile de La Pommière, 141e année.
8 AEG, APAP : 372.9.12 : expertise de Mulock Houwer : « La Pommière : quelques notes historiques », printemps 1971.
9 AEG, APAP : 372.9.12 : expertise de Mulock Houwer : « La Pommière : quelques notes historiques », printemps 1971.
10 AEG, APAP : 372.3.6 : rapport annuel du comité de 1970.
11 BGE : Rapport de l’année 1965 de l’Asile de La Pommière, 145e année.
12 AEG, APAP : 372.3.6 : rapport annuel du comité de 1970.
13 AEG, APAP : 372.3.6, rapport annuel du comité de 1972.
14 AEG ; APAP : 372.1.1 : brochure de l’Association de l’institution de La Pommière, 1821‑1975, rédigé en juin 1979.
15 AEG, APAP : 372.7.33 : lettre de la présidente du comité à une éducatrice du 8 avril 1976.
16 AEG, ADIP : FOJ, 1986 va 5.4.3.3, dossier 3.2 : modifications selon la décision de la commission d’étude consultative de la séance du 26 juin 1972. La citation suivante est issue de cette source.
17 AEG, APAP : 372.3.6 : rapport de l’année 1970.
18 AEG, APAP : 372.9.12 : expertise de Mulock Houwer (p. 6), printemps 1971.
19 AEG, APAP : 372.9.12 : expertise de Mulock Houwer, « La Pommière : quelques notes historiques », printemps 1971.
20 AEG, APAP : 372.9.12 : expertise de Mulock Houwer, « La Pommière : quelques notes historiques », printemps 1971.
21 AEG, APAP : 372.9.12 : expertise de Mulock Houwer, « La Pommière : quelques notes historiques », printemps 1971.
22 Conformément aux dispositions légales sur la protection des données, notamment celles relatives à la violation du devoir de discrétion, toutes les personnes nommées dans ce livre ont été anonymisées, hormis les expert.es mandaté.es par le comité de La Pommière et par les diverses commissions officielles, les responsables issu.es des services officiels et les membres des commissions officielles.
23 AEG, ADIP : FOJ, 1986 va 5.2.14.6, dossier 6.2 : article de La Tribune de Genève du 24 mars 1970.
24 AEG, APAP : 372.4.11 : PV du comité du 20 décembre 1971.
25 AEG, APAP : 372.4.11 : procès-verbaux du comité des 6 octobre 1971 et 24 novembre 1971.
26 AEG, APAP : 372.4.11 : PV du comité du 6 octobre 1971.
27 AEG, APAP : 372.4.11 : procès-verbaux du comité des 31 mars 1971 et 2 juin 1971.
28 AEG, APAP : 372.4.11 : PV du comité du 30 juin 1971.
AEG, APAP : 372.9.12 : expertise de Mulock Houwer, printemps 1971 (p. 3).
29 AEG, APAP : 372.4.11 : PV du comité du 24 novembre 1971, à propos de la lettre reçue de Mme Fert du Service Médico-Pédagogique.
30 AEG, APAP : 372.7.29 : rapport du service du tuteur général rédigé par un assistant social, le 13 avril 1972.
31 AEG, APAP : 372.7.29 : rapport du service du tuteur général rédigé par un assistant social, le 13 avril 1972.
32 AEG, ADIP : FOJ, 1986 va 5.12.14.6, dossier 6.1 : courrier de C. Turian, tuteur général, adressé au rédacteur en chef de La Tribune de Genève, daté du 1er avril 1970.
33 Cette expertise a été commanditée au printemps 1971 par le Docteur Kurt (chef de section du droit pénal et des établissements d’éducation du Département fédéral de la Justice à Berne) et porte sur le fonctionnement de La Pommière en vue de son éventuelle transformation en maison de thérapie.
34 AEG, ADIP : FOJ, 1986 va 5.2.14.6, dossier 6.1 : courrier de C-N. Robert, du Service de Protection de la Jeunesse, adressé au directeur de l’Office de la jeunesse, R. Berger, daté du 9 février 1972.
35 AEG, APAP : 372.4.11 : PV du 20 décembre 1971.
36 AEG, APAP : 372.4.11 : PV du 20 décembre 1971.
37 AEG, APAP : 372.4.11 : PV du 20 décembre 1971.
38 AEG, APAP : 372.4.11 : PV du comité du 20 décembre 1971.
39 AEG, APAP : 372.4.11 : PV du comité du 20 décembre 1971.
40 AEG, APAP : 372.4.11 : PV du 24 novembre 1971.
41 AEG, APAP : 372.4.11 : PV du comité du 20 décembre 1971.
42 AEG, APAP : 372.7.29 : recommandé du comité de La Pommière adressé à Madame L. Sidell et lui signifiant la rupture de son contrat en tant que directrice de La Pommière du 3 février 1972.
43 AEG, APAP : 372.2.4 : nouveaux statuts de l’association de l’institution « La Pommière », 21 juin 1972.
44 AEG, APAP : 372.7.29 : courrier du directeur de La Pommière du 5 octobre 1972.
45 AEG, APAP : 372.5.2 : PV de l’assemblée générale de l’association de l’institution de La Pommière du 19 juin 1973.
46 AEG, APAP : 372.3.24 : extrait du rapport du directeur de La Pommière issu du rapport du comité de l’année 1973.
47 AEG, APAP : 372.3.24 : extrait du rapport du directeur de La Pommière issu du rapport du comité de l’année 1973.
48 AEG, ADIP : FOJ, 1986 va 5.2.14.6, dossier 6.2 : Rapport 4522-A de la commission ad hoc et de la commission des travaux sur le projet de loi concernant l’attribution d’une subvention à l’association de l’institution de « La Pommière », secrétariat du Grand Conseil, 9 juin 1976.
49 AEG, APAP : 372.7.33 : courrier d’une éducatrice adressé à la présidente du comité de La Pommière du 23 juin 1976.
50 AEG, APAP : 372.7.33 : courrier d’une éducatrice adressé à la présidente du comité de La Pommière du 23 juin 1976.
51 AEG, APAP : 372.7.32 : lettre du Dr. Mati au directeur de La Pommière du 30 mai 1975.
52 AEG, APAP : 372.7.31 : courriers d’un avocat adressés à Roland Berger, directeur de l’Office de la Jeunesse, des 21 et 26 juin 1974.
53 AEG, ADIP, FOJ 1986 va 5.2.14.6, dossier 6.2 : PV de la commission chargée d’étudier le projet de loi 4522, du 14 mai 1976.
54 AEG, ADIP, FOJ 1986 va 5.2.14.6, dossier 6.2 : PV de la commission chargée d’étudier le projet de loi 4522, du 14 mai 1976.
55 AEG, ADIP, FOJ 1986 va 5.2.14.6, dossier 6.2 : rapport de la commission ad hoc et de la commission des travaux sur le projet de loi concernant l’attribution d’une subvention à l’association de l’institution « La Pommière » du 9 juin 1976.
56 AEG, APAP : 372.3.24 : rapport présidentiel de l’année 1975 à l’Assemblée générale du 9 juin 1976.
57 AEG, APAP : 372.3.24 : rapport présidentiel de l’année 1976 à l’Assemblée générale du 31 mai 1977.
58 AEG, APAP : 372.3.24 : rapport présidentiel de l’année 1976 à l’Assemblée générale du 31 mai 1977.
59 AEG, APAP : 372.7.33 : « Disparition d’un foyer genevois » rédigé par les employés de La Pommière le 17 juin 1976.
60 AEG, APAP : 372.7.33 : « Disparition d’un foyer genevois », rédigé par les employés de La Pommière le 17 juin 1976.
61 AEG, APAP : 372.7.33 : lettre de la porte-parole du groupe des responsables de foyers éducatifs pour adolescents et adolescentes à la présidente du comité de La Pommière, du 5 mai 1976. La citation suivante est issue de cette source.
62 AEG, APAP : 372.7.33 : lettre de la porte-parole du groupe des responsables de foyers éducatifs pour adolescents et adolescentes à la présidente du comité de La Pommière, du 5 mai 1976.
63 AEG, ADIP, FOJ 1986 va 5.2.14.6, dossier 6.1 : propos tenus par Roland Berger, directeur de l’Office de la jeunesse, lors de sa visite à La Pommière le 22 mai 1970.
64 AEG, APAP : 372.3.6 : Rapport de l’année 1972.
65 AEG, APAP : 372.3.6 : Rapport de l’année 1970.
66 AEG, APAP : 372.3.24 : Rapport de l’année 1974.
67 AEG, ADIP, FOJ 1986 va 5.2.14.6, dossier 6.2 : rapport de la commission ad hoc et de la commission des travaux sur le projet de loi concernant l’attribution d’une subvention à l’association de l’institution « La Pommière » du 9 juin 1976.
68 AEG, ADIP, FOJ 1986 va 5.2.14.6, dossier 6.2 : rapport de la commission ad hoc et de la commission des travaux sur le projet de loi concernant l’attribution d’une subvention à l’association de l’institution « La Pommière » du 9 juin 1976.
69 AEG, APAP : 372.7.29 : lettre de R. Paillard au Dr. V. Kurt du 30 octobre 1972.
70 AEG, ADIP, FOJ 1986 va 5.2.14.6, dossier 6.1 : conférence des directeurs des services de l’OJ du 30 janvier 1974.
71 AEG, APAP : 372.4.12 : PV du comité du 12 février 1974.
72 AEG, APAP : 372.4.11 : PV du comité du 6 octobre 1971.
73 AEG, APAP : 372.10.5 : « Rétrospective de deux ans de collaboration avec l’équipe éducative de l’institut de la Pommière », juin 1972.
74 AEG, APAP : 372.10.5 : « Rétrospective de deux ans de collaboration avec l’équipe éducative de l’institut de la Pommière », juin 1972.
75 AEG, ADIP, FOJ 1986 va 5.2.14.6, dossier 6.1 : lettre de la présidente du comité de La Pommière adressée à H. Cartier (DIP), du 1er avril 1972.
76 AEG, APAP : 372.4.11 : PV du 20 décembre 1971.
77 AEG, APAP : 372.9.12 : « Historique », expertise de Mulock Houwer.
78 AEG, APAP : 372.2.4 : « Nouveaux statuts » de l’association de l’institution de La Pommière, 21 juin 1972.
79 AEG, ADIP : FOJ, 1986 va 5.2.14.6, dossier 6.2 : courrier de Muff à la présidente du comité de La Pommière du 28 septembre 1972.
80 AEG, APAP : 372.4.11 : PV du comité du 12 janvier 1972.
81 AEG, APAP : 372.4.11 : PV du comité du 12 janvier 1972.
82 AEG, APAP : 372.4.11 : PV du comité du 1er mars 1972.
83 AEG, APAP : 372.4.11 : PV du comité du 1er mars 1972.
84 AEG, ADIP : FOJ,1986 va 5.4.3.3, dossier 3.2 : lettre de Ruth Hutmacher (secrétaire générale de l’Astural) à Berger, du 4 janvier 1972.
85 AEG, ADIP : FOJ, 1986 va 5.4.3.3, dossier 3.2 : PV de la séance du 2 mars 1972 consacrée aux institutions pour jeunes filles.
86 AEG, ADIP : FOJ, 1986 va 5.4.3.3, dossier 3.2 : PV de la séance du 2 mars 1972 consacrée aux institutions pour jeunes filles.
87 AEG, APAP : 372.7.29 : courrier de Jacques Bernheim à la présidente de l’association de La Pommière, du 12 avril 1972.
88 AEG, ADIP : FOJ, 1986 va 5.2.14.6, dossier 6.2 : courrier de Muff à la présidente du comité de La Pommière du 28 septembre 1972. Toutes les citations de la fin de cette page sont issues de la même source.
89 AEG, ADIP : FOJ, 1986 va 5.2.14.6, dossier 6.2 : courrier de Muff à la présidente du comité de La Pommière du 28 septembre 1972.
90 AEG, APAP : 372.4.12 : PV du comité du 17 octobre 1972.
91 AEG, APAP : 372.4.12 : PV du comité du 17 octobre 1972.
92 AEG, ADIP : FOJ, 1986 va 5.2.14.6, dossier 6.1 : rapport de Amblet à Paillard du 18 novembre 1970. Toutes les citations de ce paragraphe proviennent de cette source.
93 AEG, ADIP : FOJ, 1986 va 5.4.3.3, dossier 3.2 : lettre de Valy Degoumois adressée à René Paillard du 20 juillet 1971.
94 AEG, ADIP : FOJ, 1986 va 5.4.3.3, dossier 3.2 : lettre de Valy Degoumois adressée à René Paillard du 20 juillet 1971.
95 AEG, ADIP : FOJ, 1986 va 5.4.3.3, dossier 3.2 : courrier de Degoumois à Paillard du 20 juillet 1971.
96 AEG, ADIP : FOJ, 1986 va 5.4.3.3, dossier 3.2 : lettre de Valy Degoumois adressée à René Paillard du 20 juillet 1971.
97 AEG, ADIP : FOJ, 1986 va 5.4.3.3, dossier 3.2 : lettre de Valy Degoumois adressée à René Paillard du 20 juillet 1971.
98 AEG, ADIP : FOJ, 1986 va 5.2.14.6, dossier 6.1 : rapport de la visite de La Pommière du 22 mai 1970 par Berger.
99 AEG, ADIP : FOJ 1986 va 5.2.14.3, dossier 3.1 : rapport d’entretien avec Paillard du 20 septembre 1971, rédigé par Degoumois.
100 AEG, ADIP : FOJ, 1986 va 5.2.14.6, dossier 6.1 : réponse de Paillard à Amblet du 26 novembre 1970.
101 AEG, APAP : 379.9.12 : Mémorandum de René Paillard, décembre 1971.
102 AEG, APAP : 372.4.11 : PV du comité de La Pommière du 8 septembre 1971.
103 AEG, ADIP : FOJ, 1986 va 5.4.3.3, dossier 3.2 : PV de la séance du 2 mars 1972 consacrée aux institutions pour jeunes filles, rédigé par Corthay de l’Office de la jeunesse.
104 AEG, APAP : 372.9.12 : expertise de Mulock Houwer, printemps 1971. Les citations suivantes proviennent de cette source.
105 AEG, APAP : 372.9.12 : expertise de Mulock Houwer, printemps 1971. Les citations qui suivent sont issues de cette source.
106 AEG, APAP : 372.9.12 : expertise de Mulock Houwer, printemps 1971.
107 AEG, APAP. 372.7.29 : courrier du directeur de La Pommière au Pr. Vinh-Bang (directeur de l’École de psychologie et es sciences de l’éducation à l’Université de Genève), du 5 octobre 1972.
108 AEG, APAP. 372.7.29 : courrier du directeur de La Pommière au Pr. Vinh-Bang (directeur de l’École de psychologie et es sciences de l’éducation à l’Université de Genève), du 5 octobre 1972.
109 AEG, APAP : 372.5.2 : document manuscrit non signé et non daté, mais probablement écrit par la présidente du comité de La Pommière en mai 1974.
110 AEG, APAP : 372.5.2 : PV de l’Assemblée Générale de l’Association de l’institution de La Pommière du 19 juin 1973.
111 AEG, APAP : 372.3.24 : Rapport de l’année 1973 : extrait du rapport présidentiel à l’Assemblée générale du 14 mai 1974.
112 AEG, APAP : 372.3.24 : Rapport de l’année 1973 : extrait du rapport présidentiel à l’Assemblée générale du 14 mai 1974.
113 AEG, APAP : Courrier du directeur de La Pommière au Dr. Baechtold du 29 juin 1973.
114 AEG, ADIP, FOJ 1986 va 5.2.14.6, dossier 6.1 : courrier du comité à H. Cartier du 8 novembre 1973.
115 AEG, ADIP, FOJ 1986 va 5.2.14.6, dossier 6.1 : courrier du comité à H. Cartier du 8 novembre 1973.
116 AEG, ADIP, FOJ. 1986 va 5.2.14.6, dossier 6.1 : courrier de H. Cartier à la présidente du comité de La Pommière du 3 décembre 1973.
117 AEG, ADIP, FOJ : 1986 va 5.2.14.6, dossier 6.1 : courrier de H. Cartier à la présidente du comité de La Pommière, du 5 mars 1974.
118 AEG, ADIP, FOJ : 1986 va 5.2.14.6, dossier 6.1 : courrier de H. Cartier à la présidente du comité de La Pommière, du 5 mars 1974.
119 AEG, APAP : 372.3.24 : Rapport de l’année 1973 : extrait du rapport présidentiel à l’Assemblée générale du 14 mai 1974.
120 AEG, APAP : 372.4.12 : PV du comité du 8 octobre 1974.
121 AEG, APAP : 372.4.12 : PV du comité du 8 octobre 1974.
122 AEG, ADIP, FOJ : 1986 va 5.2.14.6, dossier 6.2 : projet du « Bref justificatif de la nécessité à moyen terme de notre institution dans le cadre régional », (joint à la demande de subvention fédérale) rédigé par le comité de La Pommière le 20 janvier 1975.
123 AEG, ADIP, FOJ : 1986 va 5.2.14.6, dossier 6.2 : projet du « Bref justificatif de la nécessité à moyen terme de notre institution dans le cadre régional », (joint à la demande de subvention fédérale) rédigé par le comité de La Pommière le 20 janvier 1975.
124 AEG, APAP : 372.4.12 : séance de synthèse des résultats des enquêtes auprès des travailleurs sociaux du comité, du 9 décembre 1974.
125 AEG, ADIP, FOJ : 1986 va 5.2.14.6, dossier 6.2 : projet du « Bref justificatif de la nécessité à moyen terme de notre institution dans le cadre régional », (joint à la demande de subvention fédérale) rédigé par le comité de La Pommière le 20 janvier 1975.
126 AEG, APAP : 372.7.32 : courrier de J. Bernheim à la présidente du comité de La Pommière, du 25 avril 1975.
127 AEG, APAP : PV de l’Assemble générale du 20 juin 1975.
128 AEG, APAP. 372.7.32 : « Justification de la nécessité à moyen terme de notre institution dans le cadre régional », rédigé par le comité de La Pommière le 31 mars 1975.
129 AEG, APAP : 372.7.32 : courrier de J. Bernheim à la présidente du comité de La Pommière du 24 février 1975.
130 AEG, APAP : 372.7.32 : courrier de J. Bernheim à la présidente du comité de La Pommière du 24 février 1975.
131 AEG, APAP : 372.7.32 : courrier J. Bernheim à la présidente du comité de La Pommière du 30 mai 1975.
132 AEG, APAP : 372.7.32 : courrier J. Bernheim à la présidente du comité de La Pommière du 30 mai 1975.
133 AEG, APAP : 372.7.32 : courrier J. Bernheim à la présidente du comité de La Pommière du 30 mai 1975.
134 AEG, APAP : 372.3.24 : extrait du rapport présidentiel à l’Assemblée générale du 20 juin 1975.
135 AEG, APAP. 372.7.32 : « Justification de la nécessité à moyen terme de notre institution dans le cadre régional », rédigé par le comité de La Pommière le 31 mars 1975.
136 AEG, ADIP, FOJ : 1986 va 5.2.14.6, dossier 6.2 : projet de loi no 4522 concernant l’attribution d’une subvention à l’association de l’institution de « La Pommière », rédigé par le Grand Conseil et approuvé par le Conseil d’État le 15 mars 1976.
137 AEG, APAP : 372.3.24 : rapport présidentiel à l’Assemblée générale du 9 juin 1976.
138 AEG, ADIP, FOJ : 1986 va 5.2.14.6, dossier 6.2 : PV de la séance de la commission chargée d’étudier le projet de loi 4522 concernant une subvention à accorder à l’association de l’institution de « La Pommière », du 14 mai 1976.
139 AEG, ADIP, FOJ : 1986 va 5.2.14.6, dossier 6.2 : rapport de la commission ad hoc 4522-A pour le Secrétariat du Grand Conseil du 9 juin 1976.
140 AEG, ADIP, FOJ : 1986 va 5.2.14.6, dossier 6.2 : rapport de la commission ad hoc 4522-A pour le Secrétariat du Grand Conseil du 9 juin 1976. Les citations suivantes proviennent de cette source.
141 AEG, ADIP, FOJ : 1986 va 5.2.14.6, dossier 6.2 : rapport de la commission ad hoc 4522-A pour le Secrétariat du Grand Conseil du 9 juin 1976. Les citations suivantes proviennent de cette source.
142 AEG, APAP : Propositions concernant l’avenir de « La Pommière », rédigées par l’Association de l’institution de « La Pommière » le 25 août 1976. Toutes les citations de ce paragraphe proviennent de cette source.
143 AEG, ADIP, FOJ : 1986 va 5.2.14.6, dossier 6.2 : rapport du Conseil d’État no 4584-A au Grand Conseil sur la motion concernant la création d’unités de transitions séparées de l’internat “La Pommière” du 13 décembre 1976.
144 AEG, APAP : 372.7.34 : courrier du comité de “La Pommière” à M. Burnand, présidente d’Astural, du 10 décembre 1976.
145 AEG, APAP : 372.7.34 : réponse du comité d’Astural au comité de “La Pommière”, du 3 janvier 1977.
146 AEG, APAP : rapport présidentiel à l’Assemblée générale du 31 mai 1977.
147 AEG, APAP : rapport présidentiel à l’Assemblée générale du 31 mai 1977.
148 AEG, ADIP, FOJ : 1986 va 5.2.15.6, dossier 6.4 ; AEG, APAP : 372.5.7 : convention du 1er juillet 1977.
149 AEG, ADIP, FOJ : 1986 va 5.2.15.6, dossier 6.4 : exposé introductif et résumé en vue de la réouverture et de l’exploitation par la fondation de l’institution pour adolescentes “La Pommière”, à Conches/Genève, rédigé par G. Vecchio, secrétaire général de la Fondation officielle de la jeunesse en juin 1977.
150 AEG, APAP : 372.2.4 : nouveaux statuts de l’association de La Pommière, 21 juin 1972 et 1er juin 1977.
151 AEG, ADIP, FOJ : 1986 va 5.2.15.6, dossier 6.4 : exposé introductif et résumé en vue de la réouverture et de l’exploitation par la fondation de l’institution pour adolescentes “La Pommière”, à Conches/Genève, rédigé par G. Vecchio, secrétaire général de la Fondation officielle de la jeunesse en juin 1977. Toutes les citations de ce paragraphe proviennent de cette source.
152 AEG, ADIP, FOJ : 1986 va 5.2.15.6, dossier 6.4 : courrier G. Vecchio et F. Dominicié (FOJ) à A. Chavanne (DIP), du 30 septembre 1977.
153 AEG, ADIP, FOJ : 1986 va 5.2.15.6, dossier 6.4 : rapport de synthèse des décisions prises par la “Commission technique consultative”, juin 1978.
154 AEG, ADIP, FOJ : 1986 va 5.2.15.6, dossier 6.4 : rapport de synthèse des décisions prises par la “Commission technique consultative”, juin 1978.
155 AEG, APAP : 372.7.35 : courrier du comité de La Pommière à F. Dominicé, président de la FOJ, du 19 avril 1978.
156 AEG, ADIP, FOJ : 1986 va 5.2.15.6, dossier 6.4 : article de La Tribune de Genève du 19 juin 1978.
157 AEG, ADIP, FOJ : 1986 va 5.2.15.6, dossier 6.4 : article de La Tribune de Genève du 19 juin 1978.
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