Un tournant dans la théologie de l’église ?
p. 515-529
Texte intégral
1Cette recherche s’était ouverte par un parcours historiographique, de la Révolution à nos jours. Parvenue à son terme, elle appelle une reprise des principales questions de la théologie catholique qui ont été soulevées : faire l’inventaire de tout ce qui fut mis en jeu dans les événements révolutionnaires et qui se révéla déterminant dans l’évolution de la théologie. Nous suivrons un parcours allant du cadre extérieur des faits vers le cœur de la compréhension du mystère de l’Église.
2Le cardinal Yves Congar fait remarquer à plusieurs reprises, dans son œuvre, que le mouvement de la Réforme luthérienne est au fond un refus des acquis théologiques durant la période médiévale1. On peut porter le même jugement sur le mouvement réformateur jansénisant du xviiie siècle. Pietro Tamburini et ses confrères refusent l’Église des Décrétales du pseudo-Isidore et de Grégoire VII et se situent dans un courant post-conciliariste plus que tridentin. Or les prises de position de Grégoire VII s’inscrivaient dans une réaction politique et théologique qui voulait rendre à l’Église sa liberté face à l’emprise des pouvoirs laïcs2. Pie VI, d’une certaine façon, doit lui aussi donner assise à son autorité pontificale vis-à-vis de pouvoirs laïcs qui interviennent dans la vie de l’Église, qu’il s’agisse de l’empereur Joseph II ou de l’Assemblée Constituante en France. Aussi est-il tenté d’agir comme Hildebrand (quelques contemporains firent la comparaison entre les deux hommes), mais plusieurs siècles sont passés et l’autorité pontificale est mise en demeure de présenter une argumentation solide pour se fonder. Le réformisme janséniste peut être reconnu comme un mouvement qui confine à la secte, au sens où il place quelques-uns de ses principes au-dessus de l’état présent de la structure organique de l’Église3. Mais les objections et les critiques de Fébronius, Eybel ou Tamburini exigent un sérieux travail théologique qui reste alors à accomplir, pour préciser le sens des termes employés à décrire le ministère du pape et des évêques.
3Le bref Quod aliquantum définit la Constitution civile du clergé comme hérétique et schismatique. En quoi peut-on recourir à ces deux qualificatifs forts ? De l’avis de Pie VI, il y a hérésie, donc sortie de la foi droite de l’Église, alors que les constitutionnels protesteront toujours d’y être demeurés. La justification principale de la sentence papale est qu’il y a intrusion du temporel dans le spirituel : une puissance incompétente entreprend de réformer l’Église de son propre chef et d’en modifier les structures. C’est une première hérésie, car il n’appartient qu’aux successeurs des apôtres de guider l’Église selon les formes instituées par le Christ lui-même. La notion presque figée d’institution par le Christ et de conservation des formes, rencontrée selon des modalités plus ou moins souples, depuis Gerdil (qui ne refait pas l’histoire comme certains de ses confrères) jusqu’à Cappellari (qui unifie d’un trait les apôtres et l’Église de 1799), est un critère d’orthodoxie de la foi. De fait, il n’est pas permis à une assemblée politique de modifier la répartition des diocèses, le mode d’élection des évêques, le mode de communion avec le Saint-Siège, ou de supprimer les chapitres cathédraux. Par rapport aux débats parisiens de 1790 qui ont été évoqués, relevons que l’hérésie n’est pas dans le risque d’une déviation théologique de la foi après une modification de structure, mais dans le fait même d’opérer les changements. Les États ne disposent pas de l’Église4. C’est même l’Église qui éclaire leur marche par sa fonction critique et sanctificatrice. On pourrait noter comme un revers de la réforme grégorienne : l’Église a si bien pris le dessus dans les faits au Moyen-âge que la période moderne peut être relue comme une inexorable revanche du pouvoir civil qui s’impose à nouveau à l’Église. Au passage, celle-ci rentre en elle-même pour discerner les véritables lieux de sa mission et les critères de son infaillibilité, que nous étudierons plus loin. Pie IX en 1869 pourra convoquer un concile politiquement libre, ce que ses prédécesseurs n’avaient jamais pu accomplir.
4Pour le moment, relevons que l’accusation d’hérésie dans Quod aliquantum porte également sur la conception de la liberté. La notion d’obéissance due à l’autorité religieuse ou civile prime sur la liberté de l’homme, la distinction entre la conscience et le domaine extérieur de la vie humaine étant à peine entrevue5. Il faudra attendre un demi-siècle pour que des théologiens commencent à avancer la thèse que Dieu veut être choisi et adoré par des hommes libres. Henri Maret écrira en 1850 : « la liberté est le grand don de Dieu à l’homme, parce que Dieu ne veut être adoré et obéi que par la liberté »6. Sur ce point, un moment des échanges au cours de Vatican II peut nous éclairer. Au cours du dernier concile se déroula une passe d’armes entre Mgr Marcel Lefebvre et le père Henri de Lubac dans le débat sur la valeur intrinsèque de la liberté humaine, considérée comme un bien moral en soi au titre de la dignité de la personne humaine, même dans le cas où elle conduit à l’accomplissement du mal7. Dieu veut que l’homme le choisisse librement, et choisisse librement de faire le bien. Cela, Pie VI ne le concevait pas plus que les théologiens en raison de l’argument d’autorité conduisant l’homme dans l’obéissance. Même l’acceptation du bout des lèvres du régime démocratique dans l’homélie de Noël de Chiaramonti, ou dans le projet de bref Pastoralis sollicitudo, ne change rien à la position morale de fond. La liberté de l’homme est définie comme un « délire », terme qui revient sous la plume des souverains pontifes de Pie VI jusqu’à Pie IX.
5Mais il faut aller plus loin. La définition d’une hérésie suppose que la foi soit définie clairement, ou qu’elle soit clarifiée à l’occasion de la crise en cause. Le mot dogme se fixe précisément au cours du XVIIIe dans son sens moderne8. Il apparaît de fait sous la plume de Pie VI : dans Super soliditate d’abord9, pour définir la primauté du successeur de Pierre sur l’Église, puis plus loin pour qualifier les décisions du concile de Florence sur la même primauté10. Contre Eybel et contre les conciliaristes, le dogme est donc déjà défini aux yeux du pape. Dans Quod aliquantum ensuite, il est dit à quatre reprises que la Constitution civile du clergé blesse le dogme de l’Église (sans précision sur le contenu de ce dogme), et à deux reprises que le dogme et la discipline sont inséparables11. Relevons comment les définitions de Super soliditate éclairent les accusations de Quod aliquantum, puisqu’il faut tenir la primauté du successeur de Pierre pour juger les réformes hérétiques sur un plan dogmatique, et pas uniquement disciplinaire. Enfin, curieusement, Auctorem fidei ne parle pas de dogme en matière d’ecclésiologie : la seule apparition du mot concerne la transsubstantiation12. Il faut reconnaître là la prudence de Gerdil...
6La seconde accusation de Pie VI porte sur le schisme. Le schisme est la rupture de la communion ecclésiale par atteinte à la relation vivante avec la hiérarchie apostolique13. Après la définition par l’Assemblée du clergé de France des quatre articles de 1682, le pape Alexandre VIII n’avait pas porté de condamnation solennelle par peur d’un schisme gallican14. Avec la Constitution civile du clergé, le schisme gallican s’opère pour de bon, en relation avec une ultime tentative janséniste de réforme de l’Église. C’est comme cela que les Romains et les Français « ultramontains » comprennent les événements de 1790. Le schisme est ici la conséquence de l’hérésie précédente sur l’intrusion du temporel. Paris proteste demeurer dans la communion. Mais les évêques se sont effectivement retirés des négociations, et le processus du serment civique contribue à les mettre à l’écart. On ne peut réformer l’Église contre tous ses pasteurs, quelle que soit la pureté d’intention de ceux qui prendront les places, qu’il ne nous appartient pas de juger ici. Le constat va plus loin. Les évêques constitutionnels enverront au pape une lettre de communion : c’est revenir à un système des premiers siècles. Mais les évêques jansénistes d’Utrecht faisaient la même chose. Rome n’est pas consultée dans le choix de ces hommes ; la communion selon les théoriciens gallicans de l’Assemblée apparaît comme ne fonctionnant qu’à sens unique, puisque le pape n’a rien à dire dans un domaine aussi important que la succession apostolique. Or la communion suppose un échange consistant, une unité de mission. Elle nous renvoie à la compréhension des rapports entre l’épiscopat et le successeur de Pierre. On perçoit une forme d’instrumentalisation de la fonction épiscopale, où l’évêque dans le département ne constitue guère qu’un élu parmi les autres.
7Avant d’en venir à cette question de l’épiscopat, rappelons encore au passage que la notion de tradition est fort imprécise dans les esprits. De même que le rapport à l’Écriture est extrêmement instrumentalisé (dans son traité, Cappellari cite quelques versets en 500 pages), la tradition est surtout comprise comme un amas de références historiques permettant de dégager les éléments de continuité, nous dirions de fixité, entre les temps apostoliques et nos jours. Pie XII, dans l’encyclique Mediator Dei15, fustigera le synode de Pistoie pour exposer que le sens de la tradition ne consiste pas à faire de l’archéologie. Archéologie qu’en 1790 la Curie a beaucoup pratiquée elle aussi. Il faudra attendre le deuxième tiers du siècle suivant avec Newman, Blondel et les suites de la crise moderniste, voire la constitution Dei Verbum de Vatican II, pour mieux saisir la tradition comme « essentiellement la continuité du développement depuis le don initial et l’intégration dans l’unité de toutes les formes que ce développement a prises et présente actuellement »16. La question n’est pas seulement de savoir comment les premiers papes vivaient leur primauté : l’évolution du monde et celle de l’Église font que cette primauté ne peut pas s’exercer exactement de la même façon. Le problème est de fonder dans la connaissance du passé la réflexion théologique qui définit présentement les cadres d’exercice de la primauté. Or, ceux qui sont le plus à même d’œuvrer en ce sens, tel le cardinal Gerdil, sont supplantés par ceux qui entrent dans la polémique avec passion... A défaut de force interne des raisonnements et de maîtrise des sources de la théologie, se bâtit une théologie qui accentue les aspects hiérarchiques17. Le paradoxe du moment est que la connaissance des Pères facilitée par le mouvement mauriste (les références des brefs pontificaux prouvent que ces éditions sont connues et largement utilisées dans la Curie) aboutisse à l’utilisation des citations et non à une reprise de fond de la pensée patristique. La lecture des mêmes Pères aura un tout autre effet dans la théologie qui préparera Vatican II. Une thèse récente18 a mis en lumière combien, par réaction antiluthérienne, on chercha à fonder dans l’Antiquité, et donc dans la pensée des Pères, la légitimité de tous les éléments « de tradition ». D’où la notion de consensus des Pères, qui réapparaît bien après le concile de Trente (dans la reprise de l’adage de Vincent de Lérins), et la remise confiante de la théologie aux historiens, au risque « d’asservir le présent au passé »19. L’Histoire n’est pas la Tradition, et la Tradition ne peut se réduire à l’Histoire. Elle ne fait qu’y chercher des connaissances objectives sur le passé ; il reste au théologien la tâche de réfléchir à partir de l’unique dépôt de l’Écriture et de la tradition20.
8Le cœur du débat est donc la compréhension de la primauté du successeur de Pierre par rapport à l’épiscopat. Il faut d’abord poser les faits : un épiscopat national presque entier se trouve privé de l’exercice de son ministère, bientôt contraint à l’exil, tandis que des « usurpateurs » exercent le ministère à leur place. En exil, verront le jour des dissensions sur les méthodes pastorales à mettre en œuvre. Dans les brefs, Pie VI pose que ces évêques vont user de facultés exceptionnelles en tant que délégués du Saint-Siège. Nous avons vu un évêque comme celui d’Embrun refuser catégoriquement cette conception des choses, de même que, dans la période 1791-1792, les évêques du comité parisien, avec Boisgelin, gardent le souci d’agir selon les principes des libertés gallicanes. Or, ces prélats avaient proposé de remettre leur démission, se sentant pour une part responsables du cours des événements dans l’Église de France. Pie VI fit mine de ne pas le remarquer et loua leur constance. Si Rome traite avec le comité parisien, elle veille à ce que le titre de primat des Gaules de l’archevêque de Lyon demeure sans effet canonique. Les faits amènent donc une situation où les pasteurs sont en relation avec le pape dans un rapport ou d’ignorance, ou de dépendance canonique, cette dernière demeurant bien floue puisqu’il ne fut jamais question de faire des pasteurs légitimes des délégués ou des vicaires apostoliques. La Constitution civile du clergé elle-même, durant la discussion à l’Assemblée, a soulevé le problème de la validation canonique : par les évêques réunis en concile, ou par le pape ? Personne n’a voulu du concile. Des années plus tard, Marbeuf se méfie encore d’un comité épiscopal délégué auprès de Louis XVIII : ce ne sera pas un concile. Un concile gallican eût-il changé le cours des choses ? Il se serait opposé à l’Assemblée, et le résultat final eût été le même. Le pape offre l’avantage d’être libre par sa situation extérieure. Le Directoire le comprend bien en cherchant à chasser le pape de ses États. Mais, ce faisant, il fait du pape un martyr de la France, et met donc le gallicanisme dans une position encore plus odieuse aux romains21. Le débat sur l’exercice de la primauté s’en trouve faussé.
9Plus profondément, la compréhension du ministère épiscopal et le positionnement du ministère de l’évêque de Rome sont en cause. Nous sommes alors plus de 70 ans avant Vatican I. Il est reconnu que ce concile chercha à répondre définitivement aux objections de Fébronius, Eybel et Tamburini22. Tamburini expose qu’il faut distinguer dans le pape quatre niveaux d’exercice de l’autorité : l’évêque du diocèse de Rome, le métropolitain de la province romaine, le patriarche d’Occident23, le pasteur universel. Cette distinction permet de délimiter les différents degrés d’intervention qu’il peut se permettre dans la vie de l’Église, selon le lieu géographique de l’affaire en cause. Comme métropolitain et comme patriarche, l’évêque de Rome est une instance d’appel dans les conflits internes aux Églises particulières de sa circonscription ; en outre il a mission de convoquer les conciles quand il le juge nécessaire, et le plus régulièrement possible. Comme pasteur universel, il exerce une primauté d’honneur, qui ne devient effective que de façon extraordinaire24. A cela Rome répond que la primauté du pape s’exerce de façon égale et libre sur toute l’Église. La notion de primauté de juridiction intervient alors. A partir du xiie siècle, les théologiens firent évoluer la distinction du Décret de Gratien entre la potestas et l’executio potestatis vers une distinction entre la potestas ligandi et solvendi et la iurisdictio, aboutissant à une distinction entre le pouvoir d’ordre et le pouvoir de juridiction25. La possession par un baptisé du caractère sacerdotal lui donne de pouvoir célébrer les sacrements et d’enseigner au nom de l’Église. Mais la fixation du mode d’exercice de ce sacerdoce, son lieu, son étendue, le pouvoir de gouvernement qui lui est attaché, relèvent d’une juridiction, c’est-à-dire au sens premier d’un pouvoir de commander et de faire appliquer la loi, qui se reçoit de son supérieur. La question rebondit immédiatement, et le concile de Trente, nous l’avons vu, ne l’a pas tranchée. La juridiction de l’évêque est-elle intrinsèquement liée à son ordination, à son pouvoir d’ordre ? Dans ce cas elle relève de Dieu directement et l’Église, par le pape ou par d’autres instances dans l’histoire, ne fait qu’en délimiter le territoire d’exercice ; ou bien est-elle conférée efficacement et réellement par le pape, qui en est pleinement maître en vertu de sa primauté de juridiction ? Concrètement, dans la situation de la Révolution, les évêques en exil sont-ils sous la dépendance directe du pape, ou bien gardent-ils une légitime autonomie juridictionnelle ? Depuis saint Léon le Grand, le pape revendique une plenitudo potestatis et prétend que l’épiscopat tout entier se comprend in forma Petri, Rome comme tête, caput, étant aussi une fons, la source de toute autorité et de toute sacramentalité dans l’Église26. Grégoire VII a ajouté que les évêques exerçaient leur ministère in partem sollicitudinis, c’est-à-dire dans une part de la charge pastorale du successeur de Pierre. D’où la portée des débats rencontrés dans notre troisième partie sur la distinction entre l’apostolatus et l’episcopatus. Y-a-t-il deux réalités et deux successions distinctes, de la mission de Pierre à celle de son successeur le pape, et du collège des apôtres au corps épiscopal (il est impropre de parler de collège des évêques dans la terminologie du XVIIIe) ; ou bien, selon les vues romaines, un corps apostolique qui reçoit sa mission déjà de Pierre, auquel succède un corps épiscopal qui tient son autorité du pape ?
10Ajoutons que ce même Moyen âge voit la théologie scolastique définir le sacerdoce essentiellement en rapport avec le pouvoir de consacrer l’Eucharistie, et de célébrer les autres sacrements27. La distinction entre le sacerdoce presbytéral et l’épiscopat ne s’en trouve pas facilitée. C’est un point important à retenir dans les débats du xviiie siècle : la sacramentalité de l’épiscopat, le fait que l’ordination de l’évêque soit un sacrement à part entière et non le simple franchissement d’un degré à l’intérieur du sacerdoce, n’est pas tranchée. D’où la force des questions d’Edmond Richer sur la place des prêtres dans l’Église, d’où le choix de Ricci de réunir ses curés en synode diocésain, d’où la portée des revendications des curés dans les cahiers de doléances.
11Cristianopulo et Bolgeni, pour faire avancer la question de la juridiction épiscopale, posent la distinction entre une juridiction universelle reçue du Christ dans le sacrement de l’ordre, donnant aux évêques un pouvoir pastoral sur le soin de toute l’Église, et la juridiction particulière remise par le pape. Le but est de rendre compte théologiquement du rôle des évêques dans un concile et de préserver un lien entre ordre et juridiction. Cela ne les empêche pas de concevoir une séparation entre les deux domaines, un prêtre pouvant remplir une juridiction épiscopale (pensons à l’abbé d’un monastère ayant juridiction territoriale, ou à un légat pontifical non ordonné), et un évêque pouvant être privé de sa juridiction pour faute grave ou incapacité. Mais cette distinction demeure insatisfaisante : elle disparaît déjà chez Cappellari ; elle sera évoquée dans les débats du concile Vatican II28. Car quelle est la matière de cette juridiction universelle ? Quels en sont les sujets ? En quoi consiste-t-elle en dehors d’un concile ? Ainsi le concile préférera finalement dans la constitution Lumen Gentium parler de sollicitude pastorale universelle des évêques, mais point de juridiction :
« Comme membres du collège épiscopal et légitimes successeurs des apôtres, chacun d’entre eux est tenu, à l’égard de l’Église universelle, de par l’institution et le précepte du Christ, à cette sollicitude qui est pour l’Église universelle éminemment profitable, même si elle ne s’exerce pas par un acte de juridiction »29.
12Le concile Vatican I était auparavant revenu sur un point important : le pouvoir du pontife romain est vere episcopalis, vraiment épiscopal, ce qui explique le sens des termes ordinaire et immédiat qui caractérisent sa primauté sur l’Église universelle30 (le terme « immédiat » étant une réponse à Tamburini qui parlait de pouvoir médiat du pape relayé par les évêques dans le monde). Mais l’autorité des évêques sur leur diocèse est également ordinaire et immédiate.
« Nous enseignons et déclarons que l’Église romaine, par disposition du Seigneur, possède sur toutes les autres une primauté de pouvoir ordinaire et que ce pourvoir de juridiction du pontife romain, qui est vraiment épiscopal, est immédiat. <...> Mais il s’en faut de beaucoup que ce pouvoir du souverain pontife fasse obstacle au pouvoir de juridiction épiscopal, ordinaire et immédiat par lequel les évêques établis par l’Esprit-Saint successeurs des apôtres, paissent et gouvernent en vrais pasteurs chacun le troupeau qui a été confié. Au contraire, ce pouvoir est affirmé, affermi et défendu par le pasteur suprême et universel, comme le dit saint Grégoire le Grand : “Mon honneur est l’honneur de l’Église universelle. Mon honneur est la force solide de mes frères. Je suis vraiment honoré lorsqu’on rend à chacun l’honneur qui lui est dû” »31.
13La discussion avait été forte sur ces termes car comment concevoir que dans chaque diocèse s’exercent deux juridictions épiscopales ordinaires et immédiates, celle du pape et celle de l’évêque ? Mgr Zinelli exposa en séance que la charge ainsi décrite était celle du pascere, la fonction pastorale vraiment épiscopale qui peut s’entendre du pape et des évêques sur un diocèse à des niveaux qui n’entraînent point de contradictions ou de conflits, mais le service du bien même des fidèles32. La citation de saint Grégoire aide à comprendre une définition portant bien sur le primat de juridiction, dans une logique qui permet de rendre compte de l’attitude de Pie VI durant la Révolution. Vatican II reprend les choses dans le même esprit mais en exprimant plus clairement la place des évêques :
« Ce pouvoir qu’ils exercent personnellement au nom du Christ est un pouvoir propre, ordinaire et immédiat : il est soumis cependant dans son exercice à la régulation dernière de l’autorité suprême de l’Église et, en considération de l’utilité de l’Église ou des fidèles, il peut être, par cette autorité, resserré en certaines limites... La charge pastorale, c’est-à-dire le soin habituel et quotidien de leurs brebis, leur est pleinement remise ; on ne doit pas les considérer comme les vicaires des Pontifes romains, car ils exercent un pouvoir qui leur est propre et, en toute vérité, sont, pour les peuples qu’ils dirigent, des chefs »33.
14On notera l’introduction du terme latin munus, traduit par charge, à côté de celui de potestas pour décrire avec plus de justesse le ministère épiscopal. C’est dans le cadre de la charge pastorale, plus que dans celui du pouvoir, que peut se résoudre la tension des deux juridictions ordinaires et immédiates. Vatican II exprime par ce terme le lien indispensable à conserver entre l’ordre et la juridiction, tout en posant bien dans la suite de Pie XII34 que la juridiction de l’évêque est déterminée par « l’autorité suprême de l’Église ».
15Le reproche que l’on pourrait faire à la théologie de l’école romaine est en effet de ne pas distinguer avec assez de finesse les différents aspects du ministère épiscopal, et à ce titre de compliquer les choses dans la compréhension du primat pétrinien. L’infaillibilité du magistère du pape, par exemple, n’est pas du même ordre que la primauté de juridiction. Fixer une définition dogmatique n’est pas du même ordre que délimiter la charge d’un évêque. Quand le pape s’exprime ex cathedra, c’est en vertu d’une grâce spéciale qui ne peut se communiquer35, qui ne provient pas en soi de l’Église36. Et cette infaillibilité ne concerne pas une stricte répétition des éléments du passé : la vérité, dans la Bible, est d’abord l’accomplissement de la volonté de Dieu37. Au plan de la juridiction, manque au xviiie siècle une juste idée du corps épiscopal en tant que formant un collège38, permettant une communion. L’évêque ne peut jamais être un homme seul : il est ordonné par plusieurs de ses frères, pour le service d’un peuple, en communion avec ses frères. On peut s’interroger par exemple sur l’ancrage ecclésial des premiers sacres constitutionnels : deux ou trois évêques ordonnèrent les premiers, qui a leur tour ordonnèrent les suivants. C’est là une notion fort appauvrie de l’Église universelle, même si le rituel fut respecté. La communion renvoie dans son étymologie au fait de partager une même charge, un même munus39. L’évêque est ainsi en sa personne un point de passage, un nœud structurel entre l’Église particulière et chacun de ses membres, et l’Église universelle.
16De plus, Lumen Gentium donne une précision importante sur les différents munus de l’évêque et la communion hiérarchique :
« La consécration épiscopale, en même temps que la charge de sanctifier, confère aussi les charges d’enseigner et de gouverner, lesquelles, cependant, de par leur nature, ne peuvent s’exercer que dans la communion hiérarchique avec le chef du collège et ses membres »40.
17Nous comprenons dès lors pourquoi les allusions à la communio chez Gerdil ou Gerbert ne purent alors déboucher véritablement : il manquait une théologie de l’épiscopat construite. Il manquait une théologie conséquente du Saint-Esprit dans l’Église. Yves Congar écrivait au lendemain de Vatican II :
« La constitution de l’Église est à la fois juridique et pneumatique, de droit et d’amour : elle inclut la présence et l’action du Saint-Esprit. Ce n’est pas au plan juridique ni par des règles de droit écrites que l’autorité du Souverain Pontife se trouve limitée par rapport à celle des évêques, c’est par le Saint-Esprit, qui est le principe à la foi transcendant et immanent de la vie du corps du Christ et qui porte les membres de ce corps ; y compris son président suprême le pape, à se tenir dans le corps et à en respecter la structure, laquelle comporte, par institution divine, l’ordo ou collegium episcoporum. C’est toute une théologie de la communion qu’il faudrait développer ici, en dépendance de la christologie, de la pneumatologie, de la sacramentaire (eucharistique surtout) et de l’anthropologie chrétienne »41.
18Et le futur cardinal d’exposer que la primauté du pape ne peut se comprendre qu’en fonction d’une collégialité nécessaire dont les termes restent à déployer. Le synode romain et les conférences épiscopales sont encore aujourd’hui des points de recherches théologiques42. Les expériences du comité des évêques, les échanges entre l’épiscopat français en exil, les difficiles relations avec Rome, les idées de conciles nationaux, montrent que la Révolution offre quelques éléments illustrant la pertinence de ces questions, sans être vraiment éclairante sur le plan théologique à cause du caractère si particulier des circonstances politiques. Sinon que le rôle de l’évêque de Rome fut bien indispensable in fine : avec qui Bonaparte pouvait-il négocier pour rétablir l’Église en France ? Un concile au-rait-il été possible en 1801 ? Les difficultés des constitutionnels à tenir les leurs et les réactions de l’épiscopat légitime dispersé montrent assez qu’une assemblée était encore une fois impensable. D’où la mise en œuvre par Pie VII d’un acte de juridiction d’une portée inégalée dans l’histoire : demander la démission de tout un corps épiscopal légitime, pour le bien supérieur de l’Église, et sous-entendre la démission de l’épiscopat constitutionnel. Pie VII mettait en action une vision de la primauté plus forte encore que les paroles de Pie VI !
19Reste que les positions théologiques sur la primauté romaine durent être définies par un concile œcuménique, et non par la papauté seule. On retrouve ici une part de la pertinence des conceptions gallicanes sur la réception des définitions dogmatiques43. Si dans l’évolution des choses, la notion gallicane de réception active de la foi de l’Église par l’ensemble du peuple de Dieu s’estompe au profit d’une vision plus hiérarchique, il n’en demeure pas moins que la vérité doit être vécue, pénétrer dans le peuple de Dieu, pour porter tous ses fruits. Il restera dans la logique pneumatologique qu’un concile exprime mieux l’unité de la foi de l’Église qu’une définition venant d’en haut. Auctorem fidei, monument d’équilibre théologique dans la réponse au jansénisme, ne fut reçue dans l’Église qu’avec lenteur et faiblesse ; on peut dire que le jansénisme disparut autrement, sans elle. Les grandes questions ecclésiologiques seront renvoyées à Vatican I, qui n’en traitera qu’une partie au sujet du pape. Ce malgré toutes les démonstrations du cardinal Gerdil sur le fait qu’un seul évêque avait refusé Auctorem fidei, et que ses définitions étaient donc reçues.
20C’est qu’il faut du temps pour intégrer les évolutions, les terminologies nouvelles, etc. Yves Congar écrivait avec sagesse : « L’Église elle-même, à vrai dire, ne peut se définir adéquatement, ni se rendre compte explicitement, à un moment donné, de tout ce qu’elle porte en soi »44.
21Henri Grégoire écrivait à Scipion de’ Ricci le 20 Germinal, an VI (9 avril 1798), en parlant de Pie VI :
« D’un mot, d’un seul, il aura pu calmer les troubles qui déchiraient l’église Gallicane ; ce mot eut empêché le sang de couler, il ne l’a pas fait »45.
22Ces mots de l’évêque constitutionnel du Cher expriment bien le fossé séparant les deux logiques, politique et théologique, réformiste et romaine46. Car comment imaginer qu’une acceptation de la Constitution civile du clergé eût réellement changé le cours des événements révolutionnaires ? Certes, sans la crise du serment civique, le climat ne se serait pas détérioré dans la société française de la même façon. Mais ce serment rend compte du caractère englobant, voire totalitaire, que l’Etat prend alors vis-à-vis de la religion. Le pontife romain se devait d’être le gardien de la liberté spirituelle des chrétiens, par fidélité au dépôt de la foi. Et l’on voit mal, malgré les affirmations de Grégoire, en quoi le pape peut être tenu pour responsable du sang qui coula en France. Sa prise de position fortifia évêques et fidèles dans leur attachement au Saint-Siège et à l’Église, ce qui en amena un certain nombre à verser leur sang comme martyrs de la liberté et de l’unité de l’Église.
Notes de bas de page
1 Par exemple, en « Jus divinum », in Église et papauté, Paris, 1994, p. 72.
2 Voir la synthèse de cette histoire dans Y. Congar, L’Église, de Saint Augustin à l’époque moderne, Paris, 1996, p. 93 sv.
3 Selon les termes de Y. Congar, Vraie et fausse réforme dans l’Église, Paris, 1969 (seconde édition), p. 238. Un groupe catholique devient une secte quand il place certains critères (par exemple des points de la théologie de saint Augustin) au dessus de la foi de l’Église, jugée dévoyée et s’éloignant de la vraie foi. Yves Congar rapporte les propos de Monsieur Olier qui reprochait aux jansénistes « de dévorer le cœur de la charité qui fait vivre l’Église ».
4 J. R. Armogathe, « Théorie de l’Etat et Constitution de l’Église dans la Constitution civile du clergé », in Diritto e Stato nella filosofia della Rivoluzione francese, atti del colloquio internazionale, Milano, 1-3 ottobre 1990, p. 115-127.
5 Pie XI, face aux totalitarismes de son temps, fera avancer la distinction nécessaire entre la liberté de conscience, refusée en temps qu’indépendance de l’homme vis-à-vis de Dieu, et la liberté des consciences, nécessaire au titre de la défense des droits et de la dignité de l’homme. Cf. J. Hamer-Y. Congar, La liberté religieuse, Paris, 1967, avec en particulier la contribution de J. Courtney Murray, « Vers une intelligence du développement de la doctrine de l’Église sur la liberté religieuse », p. 111-147.
6 H. Maret, L’Église et l’Etat, cours de Sorbonne inédits 1850-1851, édités par Cl. Bressolette, Paris, 1979, p. 98.
7 H. de Lubac, « Observations destinées à des évêques sur le discours de Mgr Marcel Lefebvre prononcé le 24 septembre 1964 durant la 87e congrégation générale du concile Vatican II », in Œuvres complètes XXXI, Paradoxes, Paris, 1999, p. 373-382 ; Sur le thème de la liberté à Vatican II : P. d’Ornellas, Liberté, que dis-tu de toi-même ? Vatican II, 1959-1965, Paris, 1999.
8 Voir Y. Congar, « Les normes de fidélité et d’identité chrétiennes à travers l’histoire de l’Église », in Église et papauté, Paris, 1994, p. 278 ; et J. F. Chiron, L’infaillibilité et son objet, Paris, 1999.
9 Super soliditate, § 1. « Que l’Église ait été fondée par Jésus-Christ sur la solidité de la pierre ; que Pierre, préférablement à tous les autres, ait été choisi par une faveur privilégiée de Jésus-Christ, afin qu’ayant le pouvoir de son Vicaire en terre, il fût le Prince du Collège apostolique, et reçût, en conséquence, pour lui et pour ses successeurs jusqu’à la fin des siècles, la charge et l’autorité suprême de paître tout le troupeau, de confirmer ses frères, de lier et de délier dans tout l’univers : C’est là un dogme catholique recueilli de la bouche même de Jésus-Christ, transmis et défendu par l’enseignement perpétuel des Pères, que l’Église universelle a conservé dans tous les âges avec un soin religieux, et qu’elle a très souvent confirmé par les décrets des Souverains Pontifes et des Conciles contre les erreurs des novateurs ».
10 § 13. « Suivant les traces de ces derniers conciles, celui de Florence a sanctionné par un décret célèbre le dogme catholique de cette primauté ».
11 § 4. La Constitution civile du clergé « renversoit en effet les dogmes les plus sacrés et la discipline la plus solemnelle de l’église, détruisoit les droits du premier siège apostolique, ceux des évêques, des prêtres, des ordres religieux des deux sexes, et de toute la communauté catholique, abolissoit les cérémonies les plus saintes, s’emparoit des domaines et des revenus ecclésiastiques... ».
12 Proposition XXIX.
13 Voir sur cette définition Y. Congar, Vraie et fausse réforme dans l’Église, p. 247.
14 Ibid., p. 490.
15 Pie XII, Lettre encyclique Mediator Dei, 20 novembre 1947, Paris, Bonne Presse, 1948. § 60, p. 28 : « Une telle façon de penser et d’agir ferait revivre cette excessive et malsaine passion des choses anciennes qu’excitait le concile illégitime de Pistoie, et réveillerait les multiples erreurs qui furent à l’origine de ce faux concile et qui en résultèrent, pour le grand dommage des âmes, erreurs que l’Église, gardienne toujours vigilante du « dépôt de la foi » à elle confiée par son divin fondateur, a réprouvées à bon droit. Car des desseins et des initiatives de ce genre tendent à ôter toute force et toute efficacité à l’action sanctificatrice, par laquelle la liturgie sacrée oriente, pour leur salut, vers le Père céleste, les fils de l’adoption ». Il est fait référence en note à Auctorem fidei.
16 Définition donnée par Y. Congar, Vraie et fausse réforme dans l’Église, Paris, 1969, p. 303.
17 Yves Congar écrira sur les cours qu’il reçut : « L’Église était présentée comme une société organisée... l’ecclésiologie consistait presque exclusivement dans un traité de droit public. J’ai créé, pour la caractériser, le mot de « hiérarchologie ». Ce n’était pas cela qui pouvait attirer les hommes ! Or la tradition catholique, celle de l’Ecriture, des Pères et de la liturgie, nous donnait une idée de l’Église autrement plus large... » in « Mon cheminement dans la théologie du laïcat et des ministères », in Ministères et communion eccclésiale, Paris, 1971, p. 10.
18 Sur l’utilisation des Pères dans la pensée théologique dans une période précédant celle de notre étude, signalons J. L. Quantin, Le catholicisme classique et les pères de l’Église, un retour aux sources (1669-1713), Paris, 1999.
19 Ibid., p. 585-586.
20 Vatican II, Contitution dogmatique Dei Verbum, § 10 : « La Sainte Tradition et la Sainte Ecriture constituent un unique dépôt sacré de la parole de Dieu, confié à l’Église ; en s’attachant à lui, le peuple saint tout entier uni à ses pasteurs reste assidûment fidèle à l’enseignement des apôtres et à la communion faternelle... ».
21 K. Schatz, Vaticanum I, 1869-1870, Paderborn-Munich, 1992, vol. 1, p. 9.
22 Y. Congar, « Le pape, patriarche d’Occident », in Église et papauté, Paris, 1994, p. 25.
23 Sur le sens de ce titre, voir Y. Congar, « Le pape, patriarche d’Occident », in Église et papauté, Paris, 1994, p. 11-30. L’auteur montre les limites du sens théologique de l’Église comme communion de patriarcats selon les données historiques. Sur la pentarchie selon l’empereur Justinien : L’Église de Saint Augustin à l’époque moderne, Paris, 1996, p. 178.
24 v G. Thils fait remarquer que ce terme de Tamburini est un contre-sens : « ordinaire », en droit, signifie « qui n’est pas délégué » ; extraordinaire impliquerait donc une notion de délégation, ce qui ne peut s’appliquer en soi au pouvoir du pape sur l’Église. (Mais « extraordinaire » peut aussi vouloir dire simplement « exceptionnel ») Voir « Potestas ordinaria », in Y. Congar – B. D. Dupuy, L’épiscopat et l’Église universelle, Paris, 1962, p. 693.
25 Y. Congar, L’Église de Saint Augustin à l’époque moderne, Paris, 1996, p. 148 sv. Voir également, L. Villemin, Pouvoir d’ordre et pouvoir de juridiction, Paris, 2003.
26 Ibid., p. 28.
27 Ibid, p. 231.
28 R. Gagnebet, in Divinitas 2 (1961), p. 431-493.
29 Lumen Gentium 23. « Sed qua membra Collegii episcopalis et legitimi Apostolorum successores singuli ea sollicitudine pro universa Ecclesia ex Christi institutione et praecepto tenentur, quae, etiamsi per actum iurisdictionis non exerceatur ».
30 Voir W. F. Dewan, « Potestas vere episcopalis » au premier concile du Vatican », in Y. Congar-B. D. Dupuy, L’épiscopat et l’Église universelle, Paris, 1962, p. 661-687 ; R. Minnerath, Le pape, Evêque universel ou premier des évêques ?, Paris, 1978.
31 « Docemus proinde et declaramus, ecclesiam Romanam, disponente Domino, super omnes alias ordinariæ potestatis obtinere principatum, et hanc Romani pontificis iurisdictionis potestatem, quae vere episcopalis est, immediatam esse <...> Tantum autem abest, ut haec summi pontificis potestas officiat ordinariæ ac immediate illi episcopalis iurisdictionis potestati, qua episcopi, qui positi a Spiritu sancto in apostolorum locum successerunt, tamquam veri pastores assignatos sibi greges, singuli singulos, pascunt et regunt, ut eadem a supremo et universali pastore asseratur, roboretur ac vindicetur, secundum illud sancti Gregorii Magni : “Meus honor est honor universalis ecclesiae. Meus honor est fratrum meorum solidus vigor. Tum ego vere honoratus sum, cum singulis quibusque honor debitus non negatur” ». Consitution Pastor aeternus, Ch. III. Les conciles œcuméniques, vol. 2**, les décrets, Paris, 1994, p. 1652-1655.
32 Ibid., p. 677.
33 « Haec potestas qua, nomine Christi personaliter funguntur, est propria, ordinaria et immediata, licet a suprema Ecclesiae auctoritate exercitium eiusdem ultimatim regatur et certis limitibus, intuitu utilitatis Ecclesiae vel fidelium, circumscribi possit... Ipsis munus pastorale seu habitualis et cotidiana cura ovium suarum plene committitur, neque vicarii Romanorum pontificum putandi sunt, quia potestatem gerunt sibi propriam verissimeque populorum quos regunt, Antistites dicuntur ». Constitution Lumen Gentium, 27.
34 Pie XII, encyclique Mystici corporis, DS 3804. « ...id tamen dum faciunt, non plane sui iuris sunt, sed sub debita Romani Pontificis auctoritate positi, quamvis ordinaria iurisdictionis potestate fruantur, immediate sibi ab eodem Pontifice Summo impertita ».
35 Lumen Gentium, § 24.
36 Mgr Gasser s’exprima sur ce sujet à Vatican I ; Voir J. Lecuyer, « Orientations présentes de la théologie de l’épiscopat », in Y. Congar-B. D. Dupuy, L’épiscopat et l’Église universelle, Paris, 1962, p. 799.
37 Y. Congar, « infaillibilité et indéfectibilité », in Ministère et communion ecclésiale, Paris, 1971, p. 151.
38 Y. Congar, « La consécration épiscopale et la succession apostolique constituent-elles chef d’une Église locale ou membre d’un collège ? », in Ministère et communion ecclésiale, Paris, 1971, p. 123-140.
39 Idem.
40 Lumen Gentium, § 21. « Episcopalis autem consecratio, cum munere sanctificandi, munera quoque confert docendi et regendi, quae tamen natura sua nonnisi in hierarchica communione cum Collegii Capite et membris exerceri possunt ».
41 « Synode épiscopal, primauté et collégialité épiscopale », in Ibid., p. 201. Voir aussi « Le problème ecclésiologique de la papauté après Vatican II », in Ibid., p. 168-186. Sur les developpements de l’ecclésiologie de communion, voir J. M. R. Tillard, Église d’Églises, l’ecclésiologie de communion, Paris, 1987 ; et plus récemment J. M. R. Tillard, L’Église locale, Ecclésiologie de communion et catholicité, Paris, 1995 ; J. Rigal, L’ecclésiologie de communion, son évolution historique et ses fondements, Paris, 1997 ; Pour une approche de la communion hiérarchique : Congrégation de la doctrine de la foi, L’Église comprise comme communion, Paris, 1993 ; J. Ratzinger, Appelés à la communion, comprendre l’Église aujourd’hui, Paris, 1993 ; et la récente intervention du cardinal dans un colloque à Rome : « L’Ecclésiologie de Lumen Gentium », in La Documentation Catholique, XCVII (2000), n° 2223, p. 303-312. Dans un point de vue plus ancien H. de Lubac, Les Églises particulières dans l’Église universelle, Paris, 1971.
42 H. M. Legrand-J. Manzanares-A. Garcia y Garcia, Les conférences épiscopales. Théologie, statut canonique, avenir, Paris, 1988.
43 Y. Congar, « La réception comme réalité ecclésiologique », in Église et papauté, Paris, 1994.
44 Vraie et fausse réforme dans l’Église, Paris, 1969, p. 244.
45 M. Vaussard, Correspondance Scipione de’ Ricci – Henri Grégoire (1796-1807), Paris, 1963, p. 67.
46 Dans ses mémoires, rédigées en 1808, Grégoire fait preuve du même idéalisme en concluant au sujet de la Constitution civile du clergé : « Au reste, comme le congrés d’Ems, comme le synode de Pistoie, elle sera un fanal à travers l’obscurité des siècles. Cette Constitution emprunte encore un nouvel éclat de ce qu’elle se trouve placée entre deux concordats ». in Mémoires de l’abbé Grégoire, Paris, 1989, p. 155.
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