Chapitre XI. Vers la fin de l’histoire
p. 817-833
Texte intégral
Les Allemands dans le corps social vénitien
1Pendant le siècle que nous avons traversé en compagnie des Allemands de Venise, nous avons pu constater les effets silencieux et durables de l’osmose qui installe l’étranger dans presque tous les métiers nécessaires à la vie d’une grande ville et d’un port et dans nombre d’institutions publiques et privées qui assurent la cohésion sociale. D’un métier à l’autre, les images offrent des variantes qui tiennent à la nature des sources, mais aussi au caractère propre à chaque métier.
2Ainsi, les métiers du textile présentent-ils à Venise dès le XIIIe siècle des traits que l’on retrouverait dans d’autres villes européennes, à savoir un face-à-face parfois tendu entre des salariés et des patrons, encore renforcé par l’origine étrangère de la main-d’œuvre, qui a vécu et travaillé dans la paroisse de S. Simeone Propheta et dont le souvenir collectif s’est maintenu dans la toponymie vénitienne (« corte dei Tedeschi ») : ici, les salariés allemands travaillent pour des maîtres italiens et nous n’avons saisi que le monde des tisserands, qui ne sont pas les plus démunis sur le fond d’une masse confuse de main-d’œuvre, mobile, sans famille et sans biens, qu’ailleurs on a appelé les « ciompi » ; mais à cette division s’en ajoute une autre, que l’on retrouve même au Fondaco, celle qui oppose Allemands du Sud et Allemands du Nord ; elle court tout au long du siècle et ne s’atténue que grâce aux compromis que favorisent les institutions religieuses face à la dureté du « Verlag ».
3Le secteur du cuir dont on connaît l’importance dans toutes les villes européennes n’est que modestement représenté à Venise par les cordonniers allemands, dont aucun ne semble avoir fait fortune, si l’on en juge par leurs dispositions testamentaires ; ils ont investi une zone de la ville, entre S. Stefano et S. Samuel, où se manifeste la solidarité du groupe envers les jeunes migrants et les vieux serviteurs, soutenue par une communauté monastique où les Allemands sont nombreux. Si l’on passe du cuir à la fourrure et de la futaine à la soie, la situation est totalement différente : on passe de l’atelier à la boutique et des marges urbaines au centre, parce que les métiers de la soierie sont dans la main de familles d’origine lucquoise et florentine et que les rapports de production et de commerce sont directement liés aux marchands du Fondaco ; les étrangers que l’on devine à l’ouvrage dans ces métiers sont souvent des esclaves et les tisserandes que l’on rencontre ne sont pas allemandes.
4En revanche, un des groupes professionnels où les Allemands sont le plus visibles est celui qui les enracine autour des fours : fours industriels au cœur de la ville, à S. Luca, fours à pain à l’Arsenal et dans toutes les paroisses. Les familles, souvent d’origine haut-allemande, ont créé un réseau de solidarité et de transmission de l’outil de travail, qui traverse les niveaux sociaux, des maîtres fortunés aux ouvriers précaires ; pendant plusieurs décennies du XVe siècle, les boulangers allemands ont eu l’exclusivité de la fourniture de pain sur les étals et joué un rôle d’assistance par le crédit à la consommation, particulièrement dans le secteur textile de S. Simeone Propheta ; on a pu, en la personne d’Anzelin de Bâle, donner un visage à cette solidarité du pain quotidien.
5C’est aussi pendant près d’un siècle, avant que triomphe une modernité issue de l’antique, que les professionnels des arts appliqués ont fait prévaloir à Venise la greffe du « goût allemand » sur les décors : le bois tourné et sculpté, le bronze, la peinture de retables, l’orfèvrerie associée au cristal ; les Rhénans, présents dans tous les métiers où la vie intellectuelle et spirituelle inspire l’art du luxe, des tentures et parures à la miniature des manuscrits, du vitrail à la gravure, ont joué à Venise un rôle pionnier : la mobilité n’est pas ici signe de précarité, mais au contraire d’un vif souci d’innovation et de circulation des techniques, encouragé par l’État. C’est dans ce domaine que les liens sont les plus forts entre des métiers nouveaux, comme l’imprimerie, et la commande des élites urbaines et princières : la Renaissance au quotidien est sortie d’officines et d’ateliers où les Allemands ont pris leur place, comme acteurs ou comme commanditaires.
6Ce portrait à grands traits d’une communauté dans ses dimensions professionnelles et sociales manquerait le but s’il ne rappelait le rôle des métiers attachés au Fondaco, métiers physiques, ceux des porteurs et des emballeurs, métier de gestion, celui des courtiers : on a vu combien la présence du commerce international au cœur de la ville favorise la couleur germanique des services. C’est en particulier grâce à leur entremise que des relations constantes et nécessaires ont été entretenues entre les marchands et le « petit peuple » allemand des métiers et les représentants d’une profession essentielle, celle des merciers. L’apprentissage des jeunes gens venus du Nord a créé des liens durables avec des familles d’accueil, qui n’appartenaient pas toutes à l’aristocratie des affaires ; l’assistance linguistique encore indispensable au XIVe siècle, a fait place au cours du temps à des échanges réguliers, traversant les métiers et les catégories sociales ; les « scuole » ont été des lieux d’échange spirituel, social et parfois intellectuel et l’on ne doit pas sous-estimer le rôle d’intermédiaire joué par l’ordre dominicain entre les représentants des élites urbaines allemandes et les monastères vénitiens, comme Santo Stefano et San Zanipolo : des attitudes mentales et des formes de piété communes ont aidé les nouveaux venus à s’installer et à se faire comprendre et accepter. Enfin, les membres les plus respectés de la communauté allemande de Venise ont manifesté, comme les hôtes du Fondaco, leur préférence pour une sépulture à San Zanipolo, où emballeurs et porteurs avaient ouvert la voie ; au XVIe siècle, courtiers, peintres, musiciens ont rejoint dans les caveaux de San Bartolomeo les notables du Fondaco voisin.
7Il faut enfin évoquer ceux qui, à chaque génération, par un mouvement incessant viennent tenter leurs chances, vivent dans les marges de la ville, renoncent parfois à s’insérer dans ce monde urbain à la fois ouvert et périlleux ou demeurent longtemps cantonnés dans les tâches obscures qui sont le quotidien du « petit peuple ». On découvre, sans surprise, que des Allemands sont présents dans des travaux de peine, de service privé1 ou d’emploi modeste2. Le terme de famulus les place au niveau de l’homme à tout faire : ce sont des terrassiers employés à la construction de digues à Malamocco3 ou au creusement de canaux dans la lagune, des mariniers4, des soldats ou des cuisiniers que le destin envoie au-delà des mers5, alors que les marchands demeurent cantonnés dans le Fondaco ; ce sont des travailleurs qui, dans le peuple des domestiques, parmi les Circassiens et les Noirs6, ont gagné la confiance d’un maître de maison, serviteurs dévoués au point de tenter de faire sortir leur employeur de prison7. Quand un Michael, qui fut le famulus d’un Morosini et prit son nom, se retrouve à Alexandrie dans les bagages d’un Dolfin, se souvient-il encore qu’il est theotonicus ?8 C’est la puissance d’évocation des testaments qui permet de saisir, par quelques détails vivants, l’identité d’étrangers si souvent insaisissables, soit qu’ils soient assimilés, soit qu’ils demeurent marginaux.
8Tout corps social a ses confins et aucune description, médiévale ou moderne, de la ville de Venise n’a jamais fait état des marges où vivaient ceux qu’une invisible frontière distingue du centre : ces marges ne sont pas seulement les limites indécises conquises sur l’eau, ces zones industrielles où l’on vit près des métiers à tisser et des tenderies, des écorcheries, des savonneries, des tanneries, des fours de réduction et des forges ; ce sont plus largement les formes prises par la fragilité sociale face à l’assurance d’une communauté régie par des règles. Décrire des institutions, comme l’ont fait de nombreux auteurs, c’est implicitement exclure du corps social ceux qui peinent à s’y intégrer ou les subissent en silence, pauvres et misérables, mais aussi des nouveaux arrivants qui doivent longuement consolider leur ancrage à l’échelle du voisinage ou du métier. Sans cesse renouvelés par des apports individuels ou familiaux, les groupes étrangers qui se constituent comportent toutes les strates de l’altérité, de la moins contestable à la plus secrète : celle qui conjugue le dénuement et une instabilité plus ou moins rédhibitoire, celle qui a réussi à se fixer en ville et porte à son compte les premiers fruits de son travail, celle qui manifeste, grâce à la connaissance de la langue, des usages et des normes juridiques, qu’elle a définitivement adopté les formes d’une installation patrimoniale et familiale, celle enfin de la réussite, qui sans perdre sa marque d’origine s’est insérée jusqu’à se fondre dans les réseaux qui l’entourent9.
9Partir d’une description des catégories sociales, en particulier des « classes moyennes », ne permettrait pas d’isoler une présence étrangère : de nombreux Vénitiens partagent au quotidien les mêmes difficultés et les mêmes espérances que leurs voisins venus d’ailleurs ; ce sont les tensions du mal vivre qui raniment l’altérité, qu’on la dénonce ou qu’on s’y raccroche. Inversement, actes notariés et documents judiciaires mettant en cause des Allemands de Venise informent aussi sur le milieu qui les entoure, la famille, le voisinage, les maîtres, la paroisse, les solidarités et les violences : la description de la minorité allemande est bien aussi une introduction à l’histoire du « petit peuple » vénitien10.
10Que l’on replace les legs testamentaires, que nous avons isolés, dans le contexte général de la population vénitienne, on trouverait aisément des niveaux comparables de fortune ou de dénuement dans toutes les strates de la société11 : que l’on considère la constitution des familles, la dévolution des dots, la transmission des biens, le crédit et la dette12, Allemands et Vénitiens présentent la même variété de profil ; qu’il s’agisse des manières de vivre13 et de la préparation à la mort, on pourrait également compter les draps de lit ou aligner les cierges ; que l’on analyse les signes de la piété et de la charité, l’étranger ne s’est pas comporté différemment de ses contemporains. Des singularités qui le distinguent n’apparaissent dans les sources consultées que le lien affectif ou pieux qui rattache encore l’immigré à ses origines et dont il ne faisait sans doute état que dans ses relations personnelles avec des compatriotes. Ce qui manque le plus à l’analyse, c’est la capacité à suivre dans le temps les destins individuels de l’assimilation ou du rejet : nous ne pouvons qu’imaginer les attentes, les ruses, les stratégies qui, sans faire disparaître l’altérité, en limitent les effets : mariage avec une Vénitienne, acquisition d’une maison, témoignage en justice, placement de fonds dans la Dette publique, autant de moments qui construisent une vie résolument et définitivement étrangère et, par conséquent, vénitienne. On ne peut non plus apprécier la part que des événements de grande ampleur, la peste récidivante, le blocus économique, la guerre aux confins de l’État, voire, à partir des dernières années du XVe siècle, les faillites bancaires et les mutations du marché ont pu jouer dans les décisions prises par des étrangers pour s’installer ou pour partir : ce qui nous est le plus évident, ce sont les mouvements qui agitent ou immobilisent la présence de marchands et d’hommes d’affaires au Fondaco.
Le Fondaco au XVIe siècle
11C’est bien la « maison des Allemands » qui nous offre, après la première décennie du XVIe siècle, quelques indications sur la suite de l’histoire, et cela pour deux raisons : l’évolution profonde du commerce international modifie les relations que Venise a nourries avec le monde germanique et les hôtes du Fondaco héritent, avec leurs archives et leurs usages, de conflits latents que la situation ranime. Un autre fait majeur touche toute la communauté allemande de Venise, c’est la prédication de la Réforme, qui a passé les monts et s’installe, avec les marchands, au cœur du Rialto. Ce fait, qui suscite durablement à Venise débats et crises sur le plan politique, n’est pas sans conséquence sur les relations internes à la maison allemande.
12On a noté plus haut comment la révolte des ouvriers boulangers contre leurs patrons avait pris en 1527 un tour religieux, en se référant implicitement au message évangélique de l’égalité des hommes devant Dieu ; la même année, le Conseil des Dix institue un contrôle sur les ouvrages soumis au privilège de l’édition. On savait que depuis quelques années les ouvrages de Luther se vendaient secrètement et que des humanistes vénitiens et padouans entretenaient avec des prédicateurs allemands et des protagonistes de premier plan de la Réforme, comme Mélanchton, des relations épistolaires. Le Fondaco, évoqué par le cardinal Borromée en 1580 comme « ridotto dei Tedeschi », était de toute évidence le bastion d’où se diffusait la nouvelle profession de foi : un rapport transmis au nonce apostolique indiquait que les marchands allemands, exhortés à l’heure des repas par un père jésuite à demeurer de bons chrétiens, répondaient à ce saint homme qu’ils étaient parfaitement capables de lire eux-mêmes l’Évangile14. En cette fin du XVIe siècle, le même rapport considérait que sur une population allemande de 900 personnes, 200 étaient hérétiques et que, officiellement considérés comme catholiques, la majorité des habitants du Fondaco ne l’étaient plus. L’hétérodoxie au visage voilé ne présentait pas pour autant un front commun, car la controverse théologique entre luthériens et calvinistes se doublait d’un différend économique et culturel entre les haut-Allemands majoritaires et les marchands du Nord et du Nord-Ouest de l’Empire : les calvinistes n’étaient qu’une trentaine au milieu du XVIIe siècle, mais ils affirmèrent au Fondaco leur autonomie de prédication et de prière sous l’autorité du marchand Abraham Spillieur, dont on va reparler : en 1652, ils durent céder la place et les luthériens, soit plus de 150 personnes, se dotèrent d’un statut ecclésiastique qui resta en vigueur jusqu’à la fin de la République et installa une cohabitation religieuse discrète de la « Nation allemande » avec les institutions officielles : s’abstenant de toute provocation publique, la communauté réformée de Venise permit au gouvernement d’affirmer hautement sa liberté d’action face à la Curie romaine ou aux injonctions de Charles Quint. Dans les registres de la paroisse de S. Bartolomeo figurent jusqu’au début du XIXe siècle les noms des paroissiens décédés, qu’ils aient été catholiques ou non ; reconnus luthériens, ils furent enterrés au Lido sans bénédiction, puis dans l’île de S. Cristoforo, mais on peut citer des exemples d’ obsèques religieuses accordées à des hérétiques, compromis négociés entre la « Nation allemande », les vicaires de S. Bartolomeo et les « Avvogadori del Comun », au nom de la notoriété des personnes15.
13On a vu comment les sociétés d’affaires allemandes s’étaient progressivement sédentarisées à Venise par le biais de la transmission des chambres. Pour complaire aux autorités vénitiennes, les grands marchands durent cependant accepter que fût réservée une place dans le Fondaco reconstruit aux quelques quincaillers et colporteurs qui se réclamaient traditionnellement de la communauté germanique : Grisons et gens du Trentin, qui effectuaient une transhumance régulière entre montagne et lagune et ne résidaient pas assez longtemps à Venise pour être admis dans les deux assemblées annuelles de la « Nation allemande ». Lorsqu’en 1577 un certain Domenico Zilliberti, originaire de Trente et agissant pour le compte de plusieurs marchands de langue allemande, tira argument de son exclusion pour refuser de verser le « cottimo » au nom du principe « mêmes obligations, mêmes droits », la « Nation allemande » obtint des « Visdomini » que ses marchandises fussent bloquées en douane16. L’exclus, le marginal posait un problème de fond, auquel on répondit sur le terrain de la coutume. Les « Governadori alle Intrade » et les « Cinque Savii sopra la Mercanzia » déclarèrent que Zilliberti devait payer le « cottimo » et que la « Nation » avait parfaitement le droit de l’exiger. Comme on s’en doute, les frontaliers durent un jour céder la place ; ils n’étaient pas de « vrais Allemands ».
14De même et pour d’autres raisons, les Suisses furent-ils expulsés du Fondaco après les traités d’Osnabrück et de Münster. L’assemblée de la « Nation allemande » précisa sa position sur ce point le 12 septembre 1649, en traitant du cas personnel d’un « vrai Allemand », Kaspar Mangold de Kaufbeuren, installé au Fondaco et devenu par la suite bourgeois de Bâle. Ayant perdu par son transfert domiciliaire les privilèges de sa naissance en même temps que sa dépendance de l’Empire, Mangold devait quitter sa chambre vénitienne17.
15Cet exemple extrême illustre la prétention des représentants de quelques villes à détenir seuls les privilèges et immunités que comportait la résidence au Fondaco. La liste de ces villes est brève : elle se limite à Augsbourg, Nuremberg, Ulm, Ratisbonne, Lindau, Strasbourg et Francfort. Vus de Nuremberg, d’après un mémoire préparé par le Conseil de ville à l’attention du Doge, les privilégiés sont encore moins nombreux : c’est la haute-Allemagne des villes-libres18. Position exclusive qui reconstruit les principes à partir des faits : car enfin, ni le privilège de 1506, ni celui de 1510 fréquemment invoqué par les haut-Allemands ne mentionnent les trois « requisiti » définissant le cercle étroit des élus : « camera, tavola, capitolo »19. Avec une mauvaise foi insigne, la « Nation allemande » prétend même tirer argument du silence des textes pour démontrer que le Fondaco a été reconstruit pour les seuls Allemands du Sud. La position du gouvernement vénitien n’était pas moins pragmatique. Ainsi, en 1607, le Sénat reprend lui-même la définition du « vrai Allemand » : « Tedeschi naturali del fontegho, cioè quelli che anno partecipatione nel capitolo, camera et tavola » ; mais, pour ajouter aussitôt que le Fondaco avait bien été créé sans exclusive pour l’ensemble des marchands allemands (« tutti quelli mercanti nativi Allemani »), et que s’ils ne pouvaient présentement tous y habiter, ils avaient tous qualité pour y faire passer leurs marchandises en douane20. Malgré la mauvaise grâce de la « Nation allemande », le gouvernement vénitien accorda à la fin du XVIe siècle et au début du XVIIe siècle ces avantages douaniers à des Rhénans, voire à des bourgeois de Danzig. Les archives nurembergeoises ont conservé la lettre adressée aux marchands du Fondaco par le Conseil de ville de Danzig en 1597, sollicitant association et résidence, qui leur fut refusée21 : Danzig à Venise à la fin du XVIe siècle, n’est-ce pas le signe le plus frappant de l’expansion hanséate en Méditerranée ? Si le Conseil de Danzig sollicitait – et obtenait – l’exemption du droit d’ancrage dans le port de Venise, c’est bien parce que les navires de la Baltique ravitaillaient en grains le bassin méditerranéen et louaient leurs services dans le commerce de redistribution22.
16L’intolérance haut-allemande a indubitablement des motifs commerciaux. Les marchands de Danzig sont l’objet d’un refus qui s’attache à l’ensemble des cercles de la basse-Allemagne. On a vu plus haut se développer au XVe siècle des conflits entre haut-Allemands et Rhénans du Fondaco, exprimant une durable hostilité entre concurrents. L’intolérance renaît au milieu du XVIIe siècle avec l’affaire Abraham Spillieur de Cologne, ce marchand exclu de sa chambre du Fondaco après plusieurs années d’activité : on lui reprochait d’avoir dissimulé sa véritable patrie et de s’être fait passer pour un « vrai Allemand ». Cinq années de procédure, dont l’enjeu était la représentation des marchands de Cologne et autres bas-Allemands au Fondaco23.
17L’intérêt du débat, dans la perspective qui nous retient ici, tient aux raisons invoquées par les haut-Allemands pour justifier les positions acquises, mais aussi au silence entretenu sur des questions fondamentales et à des révélations involontaires. Les raisons invoquées sont de deux ordres : la logique et l’histoire. Sur le plan de la logique, la « Nation allemande » déclare, dans un mémoire adressé au Sénat vénitien en automne 1652, qu’on ne peut accorder à Cologne, cité hanséatique, ce que l’on refuserait à d’autres cités hanséatiques : pour loger des « étrangers » (« forestieri »), les haut-Allemands n’étaient pas prêts à priver de leurs privilèges leurs propres fils et descendants24. Sur le plan de l’histoire, on s’aperçoit que la mémoire des faits ne remonte pas au-delà de 150 ans. Comment le Conseil de la ville d’Ulm peut-il affirmer de façon péremptoire en 1648 que les marchands de basse-Allemagne n’ont jamais été admis à loger au Fondaco ?25Le Sénat vénitien a beau se référer, pour trancher en faveur de Cologne, à la loi du 31 août 1475 qui accorde à tous les Allemands et par conséquent à ceux de la ville de Cologne le bénéfice de la chambre, de la table et du chapitre26 ; encore faut-il démontrer que des Rhénans ont effectivement logé au Fondaco, y ont pris régulièrement leurs repas et ont participé aux assemblées annuelles. Aix-la-Chapelle vient au secours de Cologne, qui semble avoir perdu la mémoire ; elle lui communique en 1650 les noms de quelques Rhénans qui, entre 1624 et 1648, ont joui à Venise des anciens privilèges, et s’engage à entamer une recherche dans ses propres archives afin de nourrir un dossier de faits27. On s’étonne que la mauvaise foi des hôtes du Fondaco, assis sur leurs archives, ne s’expose pas à des répliques irréfragables. On a constaté plus haut l’existence d’un non-dit confessionnel qui explique sans doute pour une part cette dénégation : Abraham Spillieur était calviniste, comme nombre de Rhénans.
18Il est enfin des arguments que l’on ne peut employer dans un débat public. La « Nation allemande » a laissé aux « Visdomini » le soin d’une description sympathique et sincère de la vie commune des marchands afin de faire saisir au Doge, peut-être enclin comme le Sénat à trancher en faveur de Cologne, ce que la présence constante de bas-Allemands au Fondaco risquerait de détruire ; donnons-leur la parole, en octobre 1652 :
L’habitation assignée par la générosité publique à la Nation allemande a été un lieu où, de tout temps, les pratiques de vie ont pris des formes plus religieuses et conventuelles que laïques, dans la mesure où, restreignant eux-mêmes leur liberté, les hôtes l’ont réduite à l’obligation de la table commune à heures fixes, dans un silence et une retenue presque monacales et poussant la mesure au point que tout transgresseur de l’ordre établi était par le chapitre écarté et retranché des autres. L’union qui était la leur a été maintenue par l’uniformité de la langue et des coutumes. D’où il s’ensuit qu’introduire en ce lieu d’autres sortes de gens, habitués à des manières de vivre différentes, quand bien même ils seraient soumis au même prince, occasionnerait une telle confusion que, désirant conserver jalousement leurs habitudes antiques, ils préféreraient abandonner l’habitation et le commerce plutôt que d’être contaminés par des pratiques de vie différentes.
19Cet étonnant exposé transpose, en plein XVIIe siècle, un modèle conventuel né dans la société de l’an Mil. Le rapprochement n’est pas venu par hasard sous la plume des « Visdomini » : il développe spontanément les trois « requisiti » : la chambre devient cellule, la salle-à-manger, réfectoire et l’assemblée porte le nom de chapitre. Le texte multiplie les épithètes qui approfondissent encore la comparaison entre la règle de vie du Fondaco et celle d’une maison religieuse : c’est la solitude du groupe, c’est le refus du mélange, c’est la ferveur opposée au dégoût. Les heureux élus qui résident au Fondaco sont des personnes de qualité : nés dans leurs villes d’origine, issus de mariages légitimes, éminents par leur noblesse ; ils constituent une société choisie, qui ne pourrait supporter la discordance28 : sous ce mot figure sans doute encore une incompréhension religieuse.
20Portrait idéal sans doute que celui de ce cloître ; mais alors qu’à Venise et dans ses environs le modèle aristocratique du cénacle ou de la retraite s’est imposé depuis le XVe siècle aux classes dirigeantes – que l’on pense au Saint-Jérôme de Carpaccio, à l’Académie Aldine ou à l’Hypnerotomachia Polyphili – c’est une transposition laïque du monastère qui vient à l’esprit des officiers vénitiens. Avatar de la domus divine, le Fondaco est, depuis le début du XVIe siècle, une maison privée dans un bâtiment public, soumise à l’autorité de l’un des siens, fidèle à une règle de vie commune : société de célibataires forcés, qui vit et travaille en un lieu clos. La grande différence avec l’époque antérieure, c’est que la « Nation allemande » définit elle-même les conditions d’admission au Fondaco : la domus tend à devenir un « club ».
21Ce phénomène, déjà perceptible dans l’évolution qui se dessinait au XVe siècle, est d’autant plus frappant que résidence et privilèges commerciaux se sont progressivement séparés. De l’obligation originelle d’habiter au Fondaco, ceux qui s’y trouvaient installés ont fait le signe de leur prééminence diplomatique, sociale et commerciale ; ils ne peuvent en revanche s’opposer à ce que le gouvernement vénitien accorde à des non-résidents le droit d’expédier leurs marchandises par le Fondaco, qu’ils soient Suisses, Baltes ou Slovènes. Au groupe des haut-Allemands qui se sont, avec l’accord du gouvernement vénitien, définis comme les « vrais Allemands » s’opposent les autres sujets des cercles d’Empire, en particulier les Rhénans : Rhin, Meuse et Escaut sont contenus hors des murs du Fondaco, à quelques exceptions près, de plus en plus rares au cours du XVIe siècle ; sans avoir été formellement exclus de la « Nation allemande », Flamands, Brabançons, ont été les premiers à affirmer leur singularité linguistique et leurs intérêts pour la nouveauté et le luxe : livres, tapisseries, pierres précieuses ; ils résident en ville comme les merciers et les imprimeurs venus du Nord-Ouest de l’Europe, mais n’ont formé un véritable groupe cohérent que dans la seconde moitié du XVIe siècle29.
22Alors que l’installation hors du Fondaco était jusqu’à la fin du XVe siècle considérée comme une infraction à la loi générale, le concept de « vrais Allemands » a permis des accommodements. Le Collegio reconnaît explicitement en 1510 à des sujets de l’Empire la faculté de ne pas résider au Fondaco30. La pratique est évidemment plus ancienne et le hasard testamentaire permet de faire remonter à 1488 deux mentions d’Allemands exerçant la profession de marchands et habitant le sestier de leur choix : Gotardus d’Allemagne réside à S. Cassian et Wilhelm Vairloes de Bulduch, marchand de tapisseries, vit à S. Maria Formosa31. Non seulement ces marchands ne sont pas de « vrais Allemands », mais encore ils sont proches de techniciens et d’artistes enclins à s’installer à Venise : par exemple, Henricus Stal di Aidelberg mercator theutonicus ad presens de confinio S. Canciani révise en 1515 son testament de 1501 ; il a entre- temps épousé une Padane, veuve de l’imprimeur Hermann Lichtenstein ; en 1507, un Zacharia Stal, employant à son service le Nurembergeois Georg Spengler, était réputé civis venetus32.
23Si nous passons de ces prodromes au milieu du XVIIe siècle, nous saisissons parfaitement le sens d’une évolution qui banalise l’institution même du Fondaco. On distingue en effet, dans une décision du Sénat du 25 mai 1675, quatre groupes de marchands allemands à Venise, en dehors des Flamands : ceux qui résident réellement au Fondaco sur la base des trois « requisiti » ; ceux qui, tout en bénéficiant de ces privilèges, n’en usent pas complètement et préfèrent résider hors du bâtiment33 ; ceux qui refusent totalement d’user de ces privilèges pour ne pas être contraints en retour de partager les charges de la communauté ; ceux qui, quoique « vrais Allemands », ne viennent à Venise que rarement et font gérer leurs affaires par des représentants qui ne sont pas admis au Fondaco.
24Jetons un dernier regard sur les chambres du Fondaco au milieu du XVIIe siècle, puisque la liste complète des locataires permet alors d’utiles comparaisons avec celle de 150834. Les remarques qu’elle inspire sont les suivantes :
Les « viandanti » ou marchands du Trentin ont été définitivement expulsés du 3e étage, sans doute en 1608 ; lieu de culte et archives ont pris leur place.
Des familles et sociétés représentées en 1508 dans le bâtiment reconstruit ne subsistent, et dans les mêmes chambres, que les Fugger et les Imhoff35.
Le nombre des sociétés représentées étant moins élevé, la tendance naturelle est à l’étalement ou à l’accaparement des chambres et des magasins : les Viatis-Peller de Nuremberg ont trois chambres et cinq magasins ; les Ott d’Augsbourg ont trois chambres, mais une à chaque étage, par appropriations successives ; les Sorer d’Augsbourg ont quatre magasins et sept chambres (les n° 41 à 48), c’est-à-dire qu’ils occupent toute une aile du bâtiment.
Nurembergeois et Augsbourgeois tiennent toujours la première place par le nombre ; ils représentent ensemble la moitié des marchands logés au Fondaco. Aux « vrais Allemands » se sont adjoints par grâce un marchand d’Aix-la-Chapelle et un marchand de Zittau : ils doivent avoir, l’un et l’autre, des circonstances atténuantes.
La mutation des temps
25Sommes-nous revenus aux origines du Fondaco, lorsque les marchands qui s’y pressaient étaient presque tous originaires des mêmes villes de Bavière et d’Autriche ? Les apparences ne doivent pas tromper ; autant Venise s’efforçait, entre XIIIe et XVe siècle, d’attirer les métaux précieux indispensables à l’équilibre de ses échanges méditerranéens, autant le commerce de part et d’autre des monts ressortit aux XVIe et XVIIe siècles aux échanges de matières premières et de produits manufacturés entre régions complémentaires. L’acharnement à enfermer les Allemands afin de mieux contrôler leurs trafics a fait place au milieu du XVIIe siècle à une parfaite indifférence à leurs conditions de résidence ; Venise semblait même disposée en 1647 à vendre le Fondaco à la « Nation allemande » ; cette dernière proposa 20.000 ducats, qui parurent sans doute insuffisants et l’affaire en resta là36. Mais elle témoigne d’un retournement complet de point de vue sur cette institution plusieurs fois centenaire qui, après avoir rassemblé tous les marchands du Nord, de Bruges à Cracovie, n’abritait plus que des marchands de l’autre versant des Alpes.
26Ces « vrais Allemands », tout en conservant leurs positions à Venise, sont fortement implantés à Anvers et à Lisbonne où parviennent, avec les nouvelles des mondes lointains, les produits les plus recherchés en Occident : les épices, mais aussi les pierres précieuses, les perles et toutes les senteurs de l’Orient. Installé à Lisbonne, Lucas Rem d’Augsbourg note, le 1er août 1503, qu’a été conclu le traité entre le roi de Portugal et les sociétés haut-allemandes qui comptent participer financièrement à l’armement de trois navires à destination de l’Inde37. Début janvier 1505, on charge à Anvers les navires qui feront escale à Lisbonne à destination de « Calicut »38 ; Balthazar Sprenger, facteur des Fugger, Ulrich Imhoff, facteur des Hirschvogel, sont du voyage. On peut imaginer les fortes impressions rapportées à leur retour en 1506 par ces jeunes gens, qui connaissaient depuis longtemps la carte du monde (« Erdapfel ») offerte en 1492 à la ville de Nuremberg par un précurseur, Martin II Behaim, facteur des Hirschvogel à Anvers, puis époux d’une princesse des Açores et découvreur des côtes d’Afrique, qui mourut de la peste à Lisbonne en 1507 comme Ulrich Imhoff et son frère Wolfgang39. Un autre représentant de la maison Hirschvogel, Lazarus Nürnberger, revient de l’Inde à Lisbonne en 1518 après 16 mois de navigation ; il y retrouve Georg Pock, qui l’avait remplacé, et dont on a conservé la correspondance échangée avec Michael IV Behaim entre 1518 et 152040 ; à son tour, Georg Pock s’embarque pour l’Inde et s’engage par contrat à y résider trois ans pour le compte des Hirschvogel41 ; la lettre qu’il a adressée de Cochim à Nuremberg, le 1er anvier 1522, est un document exceptionnel sur le royaume de Vijayanagara, le pays des pierres précieuses, et sur la politique commerciale des princes indiens ; elle atteste aussi qu’il a reçu en Inde, entre autres nouvelles d’Europe qu’il commente, l’annonce du couronnement impérial de Charles Quint à Aix-la-Chapelle et des premiers actes publics de Luther42. Cette ouverture du monde, cet élargissement des espaces, cette communication entre les continents découverts, fait désormais partie du patrimoine culturel et marchand des sociétés d’affaires installées à la fois à Venise et à Anvers ; en témoigne la rédaction des papiers Paumgartner-Imhoff rangés sous le titre significatif des « Welthandelsbräuche » auxquels nous nous sommes plusieurs fois référés ; évoquons aussi une célèbre xylographie de Dürer, représentant le rhinocéros arrivé de Cochim à Lisbonne en 1515, avec le poivre, le camphre et les pierreries43. Une autre dimension de la découverte, à laquelle participent les mêmes groupes d’hommes d’affaires nurembergeois et augsbourgeois, est celle qui partant de Séville aboutit, quelques années plus tard, à l’exploration du Rio de la Plata, à la création de Buenos Aires et à l’exploitation des mines de Cuba44 : on avait trouvé la route directe des épices, mais, comme l’expliquait Georg Pock, les épices s’échangent contre de l’or et les métaux précieux arrivent maintenant aussi par l’Atlantique.
27Les Italiens ne sont pas restés à l’écart de ces grands mouvements : une quinzaine de maisons italiennes étaient installées à Nuremberg en 1593 et des Vénitiens ont fait construire à Danzig des navires destinés à importer directement sur la Baltique du vin crétois45. Ainsi, alors qu’au début du XIIIe siècle, la présence vénitienne en Allemagne était occasionnelle et réduite à quelques individus ou groupes, le XVIe siècle est marqué par des initiatives conquérantes : Bartolomeo Viatis offre un bon exemple d’une aventure commerciale que la banalisation du Fondaco rend possible46 : venu à Nuremberg à l’âge de 12 ans pour apprendre la pratique des affaires chez un plumassier, Hans Wollandt, il est envoyé à Lyon à l’âge de 18 ans et y travaille pour les sociétés Tucher et Imhoff ; en 1570, ayant acquis le droit de bourgeoisie par son mariage, il fonde une société en compagnie de deux Nurembergeois ; il s’associe en 1581 à un autre Nurembergeois, hôte du Fondaco vénitien, Martin Peller, qui épouse sa fille : c’est le début de la société Viatis-Peller, dont la réussite se marque encore dans le paysage urbain de Nuremberg par le palais que s’est fait construire Bartolomeo Viatis, tandis que l’entreprise allemande créée par ce Vénitien s’installe, nous l’avons vu, dans trois des belles chambres du Fondaco dei Tedeschi ; dans les mêmes années, le pont principal sur la Pegnitz qui traverse la ville de Nuremberg est reconstruit sur le modèle du pont du Rialto. Exemple de la réussite vénitienne acclimatée au Nord des Alpes, l’aventure de Viatis ne signifie pas pour autant la fin des échanges au long cours de part et d’autre des Alpes : les revenus douaniers du Tirol, sur la route du Brenner comme sur la route du Reschenpass, connaissent un essor croissant au cours du XVIe siècle : même si la nature du commerce a changé, la douane de Lueg a doublé ses recettes en 1600 par rapport aux années 150047.
28Ces quelques signes pourraient inciter à une nouvelle immersion dans les fonds des archives vénitiennes des Temps Modernes, d’autant plus prometteuse que subsistent, non seulement à Nuremberg, Augsbourg et Francfort, mais encore à Anvers, des sources inépuisables pour une histoire des relations d’affaires entre le Nord et la Méditerranée : largement exploitées par des historiens de l’économie d’échange des Temps Modernes, ces masses de registres et de correspondances n’ont pas été confrontées à la réalité quotidienne d’une communauté allemande rayonnant autour du môle du Fondaco : on connaît peu l’importance, la qualité, les fonctions et les liens que ces étrangers ont pu entretenir dans la vie publique, les métiers et les « scuole » avec leurs contemporains vénitiens.
29C’est sur cette perspective entr’ouverte que se clôt notre enquête : le long XVe siècle avait hérité d’une institution encadrant puissamment le seul groupe des Allemands parmi les marchands étrangers présents sur la place ; il avait aussi hérité d’une immigration constamment renouvelée, traversant la zone alpine du Nord en direction de l’Adriatique, et formant autour du Fondaco une nébuleuse germanique diffusée dans tous les métiers, tous les secteurs urbains, toutes les paroisses, tous les groupes de solidarité spirituelle et sociale. Si l’on considère la position de la haute-Allemagne pendant ce siècle, on peut dire qu’on est passé vers 1400 d’une économie urbaine artisanale et marchande à une économie-région animée par des métropoles d’équilibre, Ulm, Nuremberg et Augsbourg, dont les hommes d’affaires étaient présents ou représentés en permanence sur les principales places d’Europe comme Venise ; la conjonction d’intérêts industriels et financiers entre la maison des Habsbourg et quelques grandes firmes, les sociétés Imhoff, Paumgartner, Welser et Fugger, a construit à partir des années 1470 une structure puissante et fragile fondée sur l’exploitation de la richesse minière de l’espace germanique : on a vu s’affirmer à Venise même la prépondérance du capitalisme nurembergeois, puis augsbourgeois, focalisée sur quelques sites miniers tiroliens et hongrois, les plus rentables, transformés pour un temps en pactole pour les Allemands, mais aussi pour quelques grandes firmes vénitiennes. La tentation du grand large a temporairement clairsemé le groupe des marchands d’Outre-Alpe : inquiétude des revendeurs, des transporteurs, des aubergistes qui, du Frioul au Danube, vivaient de trafics bien rôdés, fureur des « petits » qui accusaient les accapareurs, leurs ententes injustifiables ; mais un mouvement irrésistible qui resserrait les liens entre l’Europe des affaires et les ports maritimes de la découverte, sans abolir les usages d’un glorieux passé, a entraîné de nouvelles définitions des rapports entre Venise et son arrière-pays germanique. Les vents qui soufflent sur la ville dans la fameuse Vue perspective de Jacopo de’Barbari demeurent puissants et favorables.
30Une phase essentielle de l’histoire de Venise s’est achevée : ouverte sur toutes les formes de la création, de l’échange et de l’innovation, elle a conjugué pendant plusieurs générations l’aventure maritime orientale et l’indispensable recours aux ressources de l’Outremont : la splendeur et la puissance de la Sérénissime a été constamment soutenue par les rapports étroits qu’elle a su nouer avec les villes d’Empire et leurs élites, mais aussi par l’accueil qu’elle a voulu réserver en son sein aux étrangers utiles et fidèles, au premier chef, les Allemands. À leur manière, ces étrangers enracinés ont contribué à l’illustration de ce grand mouvement qui, à partir de Venise, mais aussi d’autres villes italiennes, s’est diffusé au XVIe siècle dans toute l’Europe et que la tradition historiographique a appelé la Renaissance.
Notes de bas de page
1 ASV, Canc. Inf. 146, 25’ (1392/7/VIII) : Chelinus theutonicus camerarius domini Karuli de Malatestis ; Canc. Inf. 230, reg. 1411-1417, f. 25 (1417/16/III) : Georgius de Bavaria familiaris domini Leonardi Mocenigo ; Ibid., 1417-1427, f. 7’ : Paulus ser Martini de Alemania habitans in domo domini Angeloti Venier (S. Lio) ; Not. T. 1157, 139’ (1443/18/I m. v.) : Johannes theotonicus famulus nobilium virorum Francisci et Marci de ca’Ruzino (S. Maria Formosa) ; Canc. Inf. 75,X, (1452/16/XII) : Matheus ser Nicolai Salimdego de Alemania qui moratur cum domino Cristoforo Moro procuratore S. Marci ; Ibid. X, 128 (1454/26/III) : Coradus de Alemania olim familiaris reverendissimi domini Francesci Maripetri episcopi Vincentie ; Avogaria di Comun, Raspe 1468-1472, f. 61 (1471) : Michael theotonicus alias famulus magistri Bartholomei pictoris (S. Marcialis) ; Canc. Inf. 177, reg., f. 144 (1473) : Leonardus quondam Johannis de Saspurch stabat et morabat cum Petro domino de Gospart in calle Rassiarum.
2 ASV, Canc. Inf. 122 (1437/30/XI) : Petrus Biriganer, domicellus ducis : Avogaria di Comun, Raspe 3649,74 (1444/16/XII) : Jacobus theotonicus officialis carcerum ; Ibid., 110’ (1450/4/XI) : Johannes theotonicus famulus domini ducis ; Canc. Inf. 75, 97 (1453/17/VIII) : Johannes de Alemania, planton au Palais ducal ; Canc. Inf. 76, XIII, 2’ (1466/22/X) : un héraut hongrois au Palais ducal.
3 ASV, Avogaria di Comun, Raspe 3642, 122 (1416) ; Si II, 41.
4 ASV, Not. T 573, 364 (1379/18/VI) : Julianus todeschinus barcarolus ; Canc. Inf. 230, f. 29’ (1424/24/VI) : Antonius de Brugia marinarius vagabundus ; Canc. Inf. 96, reg., (1425/8/VI) : Daniel Johannis de Strasburgo marinarius, époux d’une ancienne esclave ; Not. T. 732, 81 (1432/3/X) : Enricus de Flandra marinarius : Not. T 361, 221 (1443/1/ III) : Johannes quondam Philippi ungarus marinarius ; Canc. Inf. 76, 171 (1461/16/VII) : Petrus quondam Pauli di Hungaria barcarolus .
5 ASV, Signori di Notte al Criminal, processi 3, f. 86 (1360/30/XI) ; Si II, 25 : Matheus theutonicus qui utitur in galeis ; ASV, Not. T. 852, 201 (1404/2/IX), le testament d’un Allemand, marchand de gauffre embarqué : « Yo Zane dale Magna schaleter in la contrada di S. Sophia san dela mente e del corpo hordeno e son contento che sia fato questo mio testamento. La chasion sia questa perche io si vo in servixio dela Signoria so del mio andar non so del mio tornar e per chasion chel non sia dado inpazo a mia muier chatarina voio e son contento aver fato questo mio testamento conzo sia chossa ch’io sii laso tuto el mio mobele e stabele e tuto zo ch’io al mondo e de questo sie testimonii ser Piero de le Doplo frutaruol e ser Matio de Costantin pelizer che sta in la contrada de S. Sophia, e se Dio fesse alcuna chossa de mi, voio chel sia redato in plucha forma per muodi di Veniexa e segondo luxanza dela tera » ; Canc. Inf. 24, 82’ (1423/16/X) : un cuisinier allemand embarqué avec les instruments que lui a prêtés un cuisinier du Fondaco, Angelinus de Vienne ; ASV, Canc. Inf. 230, reg., f. 22’ (1419) : le jeune Pasqualin Rosea, Flamand au service de Lodovico Grimaldi, qui meurt à Damas ; ASV, Canc. Inf. 74, VII, (1446/9/VI) : Martinus quondam Jacobi de Alemania qui fuit per balistario sive sclopetario super galea d. Marchi Contareno.
6 Ph. Braunstein, Être esclave à Venise à la fin du Moyen Âge, dans Couleurs de l’esclavage sur les deux rives de la Méditerranée (Moyen Âge-XXe siècle), éd. R. Botte et A. Stella, Paris, 2012, p. 93.
7 ASV, Avogaria di Comun, Raspe 3649, 2 (1442/28/IV) : Georgius teutonicus et Georgius cerchassius famuli dont le maître, Giovanni Morosini est en prison pour dettes.
8 ASV, Canc. Inf. 211, II, 1454-1456, f. 55’.
9 ASV, Not. T. 1000, 332 : un Conradus de Alemania, créateur d’une fraterna et societas et compagnia avec son frère Rodolphus transmet ses pouvoirs à son fils ; ASV, Not. T 989, 21 (1406) : Johannes de Mitemburg est associé à un teinturier vénitien ; ASV, Not. T. 985, 95 (1450) : Nicolaus de Coradino de Argentina, ceinturier, lègue sa boutique à son petit-fils, qui fera société avec sa mère ; ASV, Not. T. 481, 24 (1461) : Guglielmus de Bruges a stagnatis fait des legs à tous ses ouvriers ; ASV, Not. T 46, 26 (1455) : Bartolomeus quondam Daniel de Flandria strincarius (S. Cassian) a cinq famuli.
10 Le petit peuple dans l’Occident médiéval. Terminologies, perceptions, réalités, éd. P. Baglioni, R. Delort, C. Gauvard, Paris, 2002.
11 Entre un Rauchfass, qui dispose de 10 000 ducats et telle veuve de tisserand qui a moins de 30 ducats à léguer, toute l’échelle sociale est à parcourir ; dans la masse des “petites gens”, évoquons la veuve d’un tonnelier venu de Trogir, qui vit à S. Cassian : son père s’appelait Sinibald de Nuremberg ; elle doit à sa logeuse, qui la soigne, 4 sous par jour et déjà 2 ducats ¾ d’arriéré qui seront payés avec les 15 livres de fil de lin qu’elle possède encore ; elle a dû engager quelques objets chez un cribleur de blé de S. Moysè, un vêtement violet mis chez des Allemands pour 8 livres et 4 sous ; suit l’inventaire : une pelisse, une robe grise, 2 chaudrons, 3 seaux, 2 châlits, 5 coussins, 3 paires de drap, une caisse, un coffre, un banc, une chaise ; la table a été vendue pour 55 sous. Elle n’aura qu’un prêtre pour l’enterrement : ASV, Not. T. 508, 3 (1469).
12 Nombreux exemples de dettes à payer et simultanément de créances à récupérer ; le manque de liquidité est largement partagé dans la vie quotidienne des plus humbles : tel jeune orfèvre allemand, Konrad, doit 9 ducats à son maître, Zuffredus, pour deux ans de loyer : ASV, Not. T. 995 (1420) ; telle tisserande doit 7 ducats pour son loyer alors qu’elle attend de son employeur, « Girardo tedesco » 4 livres pour des navettes qu’elle a faites : ASV, Not. T. 285, 224 (1456). Bien différent, le prêt de 20 livres consenti par un Coradus de Friburgo, habitator, à un compatriote de passage, Rodolphus mercator de Friburgo : ASV, Canc. Inf. 122 (1442/14/V).
13 Dans nombre de testaments, vénitiens ou allemands de Venise, la réversibilité des legs aux enfants sur la tête de leurs parents : un adulte qui a survécu à sa jeunesse est plus résistant qu’un enfant et surtout, qu’un nouveau-né. Trois exemples de gestes familiaux : Johannes de Bruneck met des enfants en nourrice : ASV, Not. T. 721, 252 (1442) ; Johannes Georgii et Anzelin quondam Johannis pifarus lèguent à leur concubine : ASV, Not. T. 732, 6’ (1437) et Not. T. 361, 49 (1466) ; Johannes de Mitemburg fait un legs à son fils spirituel, un jeune vénitien : ASV, Not. T. 989, 21 (1406).
14 S. Oswald, L’Inquisizione. I vivi e I morti. Protestanti tedeschi a Venezia, Venise, 2012, p. 41.
15 M. Cassese, I Tedeschi luterani a Venezia e il loro rapport con la parrocchia di San Bartolomeo (dall’500 alla fine della Repubblica), dans La chiesa di S. Bartolomeo e la comunità tedesca a Venezia, éd. N. Bonazza, I. di Leonardo, G. Guidarelli, Venise, 2013, p. 265-267.
16 G. M. Thomas, Beiträge aus dem Ulmer Archiv zur Geschichte des Handelsverkehrs zwischen Venedig und der deutschen Nation, Sitzungsberichte der k. bayr. Akademie der Wisenschaften, 1869, p. 71. L’affaire est résumée in Si II, pp. 137-138.
17 « Als nit mehr ein Reichsgesessener sondern ein basseler Burger der privilegien des Teutschen Hausses nit fähig, und da er dieselbe durch sein nascita und geburt hibevor gehabt, sich deren per domicilii translationem extra imperium genzlich verlustigt gemacht hat » : Si I, 761.
18 Si I, 763 : nulli Germanorum praeter hos qui ex praefato Germaniae Superioris tractu oriundi et in eo fixam sedem habent…
19 Si I, 761 : « Teutschen… welche ihrer geburt und nascita wegen zwar für Teutsche zue halten, darumb aber der privilegien, kämmern, täffel und capitelle nicht fähig seyen ». On ne peut dater l’apparition première des trois « requisiti », probablement antérieure à la fin du XV° siècle.
20 ASV, Capitolare dell’officio del fontego dei Todeschi, f. 166’ ; Si I, 722.
21 Si I, 713.
22 Cf. P. Jeannin, Entreprises hanséates et commerce méditerranéen à la fin du XVIe siècle, dans Histoire économique du monde méditerranéen 1450-1650, Mélanges en l’honneur de Fernand Braudel, Toulouse, 1973, p. 263.
23 Si II, pp. 145 et suiv.
24 Si I, 773 : « Colonia è ben città libera dell’imperio, ma anco una delle città hanseatiche nella Germania bassa, contradistinta dai veri Tedeschi. Sarebbe necessario escludere dal fontico i nostri figliuoli e discendenti in perpetuo per alloggiar i forestieri… ».
25 MCC, Cod. Cicogna 3468 (1648/2/V) : « immemoriali temporis observantia non nisi superioris Germaniae mercatores in hanc domum recepti, alii vero ex inferiori Germania oriundi nunquam admissi fuerint ».
26 Si I, 772 (1652/5/X).
27 SI I, 767 (1650/24/V).
28 « Che si trovano soli per tanta serie d’anni senza altra comistione di persone… se con altre nationi fossero mescolati, quanto acerbo sarebbe il disgusto… per nobiltà conspicui et eminenti, et in oltre tutti di legitimo matrimonio nati… ».
29 W. Brulez, Marchands flamands à Venise I, 1568-1605, Bruxelles-Rome, 1965 (Études d’histoire économique et sociale publiées par l’Institut belge de Rome, VI). L’étude est fondée sur 2 000 documents notariés dont émergent des inventaires et testaments d’hommes d’affaires résidant dans leurs maisons à S. Salvador ou S. Maria Formosa. Les inventaires font apparaître l’importance et la diversité des livres tenus à Venise : Franz Vriens, qui a le privilège de citoyenneté, laisse en 1604 un dossier comportant une centaine de reconnaissances de dette, 58 « copialettere », mémoriaux, livres de caisse, polices de chargement, journaux et « libri doppi ».
30 ASV, Notatorio del Collegio, 24, f. 69’ (1510/25/X) : … Illi mercatores Theutonici qui non venient habitatum in fonticum antedictum subjacere debeant gravedini supradicta, cui subjacent ceteri forinseci.
31 ASV, Not. T. 508, n° 211 (1488/13/IV) ; Not. T. 718 (1488/4/X). Ils sont ainsi les voisins d’Allemands habitant Venise et propriétaires : Jacobus de Alemania, qui achète à Marco Nigro a cera, scribe à l’Office du poivre, une maison à S. Ermacora : ASV, Canc. Inf. 177 (1480) ; Georgius quondam Johannis de Augsburgo pistor (S. Salvador) lègue trois maisons qu’il possède à S. Ermacora au monastère de S. Antonio : ASV, Canc. Inf. 177 (1485).
32 ASV, Not. T. 66, 314 (1515/15/VI) ; Si I, 645 (1507/20/II m. v.). Franz Hirschvogel, Consul de la « Nation allemande », meurt dans sa maison au printemps de 1505 ; créancier d’un Grimani, il avait reçu pour 1 200 ducats quelques maisons à S. Nicolo : Stadtbibliothek Nürnberg, Pirckheimer-Papiere 364, Umschlag 17, f. 8 : cf. Ch. Schaper, Die Hirschvogel von Nürnberg… p. 187. Les Welser possèdent aussi une maison, venue en paiement d’un débiteur insolvable : cf. plus haut, p. 346.
33 Si II, p. 162. Deux exemples du milieu du XVIe siècle (p. 155 et p. XV) : Heinrich Helman de Cologne « tien camera in fontego e habita in contrà di S. Maria Formosa in casa propria » ; « Justus Buzz, alamano, habita in Venezia in contrada de S. Zuane Grisostomo e tien camera in fontego di Todeschi ».
34 Si I, 748 (1646-1647).
35 Selon une procédure dont on a vu plusieurs applications au cours du XVe siècle, les « Visdomini » s’apprêtent à assigner en 1637 la chambre des Imhoff de Nuremberg à une autre société ; mais les Consuls de la « Nation allemande » obtiennent le maintien des Imhoff dans les lieux : Si I, 738.
36 Si II, p. 129.
37 Tagebuch des Lucas Rem aus den Jahren 1494-1541, éd. B. Greiff, 26. Jahresbericht des Historischen Kreisvereins von Schwaben/Neuburg, Augsbourg, 1861, p. 8 : « tat wir den vertrag mit Portugal köng der armazion 3 Schiff per Indiam ». Les sociétés en question, avec leur mise de fonds, sont celles des Welser (20 000 cruzados), des Fugger (4 000), des Höchstetter (4 000), des Gossembrot (3 000), des Imhoff (3 000) et des Hirschvogel (3 000). Cf. F. Hümmerich, Die erste deutsche Handelsfahrt nach Indien 1505/1506. Ein Unternehmen der Welser, Fugger und anderer Augsburger sowie Nürnberger Häuser, Munich-Berlin, 1922.
38 Lettre de Balthazar Sprenger (1505/15/I) : « wir zu Antorff insassen gegen Lisibon und furtter in Kallekutten ze segeln » : Staatsarchiv Nürnberg, BB 44, f. 134’ ; cité par Ch. Schaper, Die Hirschvogel von Nürnberg und ihr Handelshaus, Nuremberg, 1973 (Nürnberger Forschungen, 18), p. 209.
39 Le testament d’Ulrich Imhoff, rédigé de la main de Wolfgang Behaim, qui le suivit dans la mort à Lisbonne : GNMN, Kupferstichkabinett, Imhoffarchiv, fasz. 11, 16b. Sur Martin II Behaim et son frère Wolfgang, ainsi que sur Ulrich Imhoff, beau-frère de Lienhart Hirschvogel, des notices biographiques in Ch. Schaper, o. c., p. 235-241 ; cf. F. W. Ghillany, Geschichte des Seefahrers Ritter Martin Behaim nach den ältesten vorhanden Urkunden bearbeitet, Nuremberg, 1853 ; H. Kellenbenz, Portugiesische Forschungen und Quellen zur Behaimfrage, dans MVGSt. Nbg, 48, 1958, p. 94 : la bibliographie exhaustive et les controverses : P. Chaunu, L’expansion européenne du XIIIe au XVe siècle, Paris, 1969, p. 176.
40 Stadtarchiv Nürnberg, Behaimarchiv, n° 582, 11a-c, 12 : « dann ich thun euch zu wissen inngeheym das ich des willen pin nach India zu faren dis zu kunfftig jar, so gott will… drey jar lanng in India von irent wegen zu pleiben… nachdem ir vornomen hapt das ich nach India will ich pin adi ditto schon aller ding ferttig, alain das wir auff den windt wartten… ».
41 Stadtarchiv Nürnberg, Libri litterarum 45, f. 38’-39. Pas plus de trois ans ! « Senn mich fast nach thewtzschen Lande… ».
42 Stadtarchiv Nürnberg, Behaimarchiv 582, 14 : « Ich hab gern gelesenn die zeittung vom münchen vonn Wittenberg, habs hir all den bristern gesagt, wundern sich fast unnd sagen das der di warheytt predich » : sur le personnage, cf. H. Kömmerling-Fitzler, Der Nürnberger Kaufmann Georg Pock (+ 1529) in Portugiesich-Indien und im Edelsteinland Vijayanagara, dans MVGSt. Nbg, 55, 1968, p. 137-184.
43 Albrecht Dürer 1471 bis 1528, Das gesamte graphische Werk, Munich, 1971, p. 1753 ; H. Kellenbenz, Die Beziehungen Nürnbergs zur iberischen Halbinsel im 15. und in der ersten Hälfte des 16. Jahrhunderts, dans Beiträge zur Wirtschaftsgschichte Nürnbergs I, Nuremberg, 1967, p. 480. Envoyé par le roi Manuel du Portugal au Pape, le rhinocéros a sombré dans un naufrage en Méditerranée ; mais il avait suscité de nombreuses représentations, dessins et feuilles volantes imprimées dont Dürer s’est inspiré : Dürer. Kunst-Künstler-Kontext, éd. J. Sander, Städel Museum, 2013, Dürers Flugblätter, p. 306-307.
44 Sur tous les fronts de la découverte du monde on retrouve, à côté des Welser et des Fugger, les noms de marchands, d’explorateurs, voire d’armateurs originaires de haute-Allemagne : cf. Th. G. Werner, Die Beteiligung der Nürnberger Welser und Augsburger Fugger an der Eroberung des Rio de la Plata und der Gründung von Buenos Aires, dans Beiträge zur Wirtschaftsgeschichte Nürnbergs, I, Nuremberg, 1967, p. 496-592.
45 P. Jeannin, Entreprises hanséates et commerce méditerranéen à la fin du XVIe siècle, repris dans Marchands du Nord . Espaces et trafics à l’époque moderne, éd. Ph. Braunstein et J. Hoock, Paris, 1996, I, p. 316-317.
46 G. Aubin, Bartholomäus Viatis, ein Nürnberger Grosskaufmann vor dem 30. Jährigen Krieg, dans VSWG, 33, 1940, p. 145-157 ; H. Kellenbenz, Bartholomäus Viatis (1538- 1624), dans Veröffentlichungen der Gesellschaft für fränkische Geschichte 7 A, Fränkische Lebensbilder, 1, 1967, p. 162-181 ; A. Tacke, Bartholomäus Viatis im Porträt, dans Mitteilungen der Vereins für die Geschichte der Stadt Nürnberg, 83, 1996, p. 57-64.
47 R. Hildebrandt, Wirtschaftliche Beziehungen zwischen Oberdeutschland und Venedig, dans Venedig und Oberdeutschland in der Renaissance. Beziehungen zwischen Kunst und Wirtschaft, éd. B. Roeck, K. Bergdolt, A. J. Martin, Siegmaringen, 1993, p. 283.
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La Curie romaine de Pie IX à Pie X
Le gouvernement central de l’Église et la fin des États pontificaux
François Jankowiak
2007
Rhétorique du pouvoir médiéval
Les Lettres de Pierre de la Vigne et la formation du langage politique européen (XIIIe-XVe siècles)
Benoît Grévin
2008
Les régimes de santé au Moyen Âge
Naissance et diffusion d’une écriture médicale en Italie et en France (XIIIe- XVe siècle)
Marilyn Nicoud
2007
Rome, ville technique (1870-1925)
Une modernisation conflictuelle de l’espace urbain
Denis Bocquet
2007