Chapitre VIII. Fugger et Foscari
p. 573-596
Texte intégral
Michele Foscari, un partenaire pour les Allemands
Les archives et la famille
1Par son testament daté du 1er décembre 1505, Michele Foscari, dont la mort est annoncée par Sanudo à la date du 22 octobre 1506, désignait comme commissaires les Procurateurs de Saint Marc. C’est en effet dans les archives des Procurateurs que sont conservés, en 5 boîtes volumineuses, les documents qui le concernent : un ensemble de cahiers, de carnets, de feuilles volantes isolées, de comptes en originaux ou en copies, de documents divers et d’un vaste ensemble de correspondance. Les Procurateurs font un rapide inventaire par matières, ce qui suppose que Michele Foscari avait conservé et réparti ses archives en les plaçant dans les « chaselette di scriture », boîtes ou tiroirs qu’un menuisier avait faits pour lui en 15011. Les Procurateurs distinguent d’emblée 7 types de documents : comptes de Candie, comptes d’Alexandrie, comptes de nolisement, assurances, qui ressortissent tous du commerce maritime ; puis livre de change, polices de douane et enfin, les Allemands (« todeschi »), classement qui témoigne de l’importance qu’il attachait aux relations d’affaires continentales et en particulier aux échanges commerciaux avec l’Outremont et ses représentants2.
2On n’est pas assuré de disposer véritablement de tout ce que les Procurateurs avaient inventorié ; en revanche on dispose de papiers privés provenant de la succession, dont certains sont directement liés aux affaires en cours au moment du décès, ainsi le décompte général que tente d’établir en 1507, au retour de son ambassade en France, Alvise Mocenigo « dalle gioie », gendre du défunt : l’argent comptant, les créances à récupérer, les dons souhaités, les dépenses engagées, les sommes sorties du règlement général par décision testamentaire3.
3Réunis une première fois par les Procurateurs, puis sans doute classés ou déclassés selon les affaires à régler, carnets et papiers ne sont que la part mobile, la plus fragile et volage, d’une imposante documentation disparue. Ont en effet été inventoriés avec le plus grand soin par les Procurateurs 5 registres comptables, portant les mentions +, A, B, C, D, accompagnés chacun de son « zornal », couvrant la période 1472- 1506, c’est-à-dire toute l’activité marchande et industrieuse de Michele Foscari, soit en tout 1 327 folios, plus les cahiers des journaux, auxquels s’ajoutent deux livres des loyers de 1495/1496 et de 1505/15064. La disparition des registres parfaitement tenus et reliés en cuir laisse entendre qu’aucune action judiciaire n’a nécessité leur consultation ou leur sauvegarde, et que nombre de documents volants en sont extraits sous forme de copie ou de résumés. Les délais d’exécution des contrats, le temps passé à récupérer des créances, le lien entre les affaires conclues et le temps des marchés expliquent que soient demeurés, peut-être extraits des registres, reconnaissances de dettes et listes de débiteurs, qu’il s’agisse de locataires, mais surtout de clients : les héritiers et commissaires de Michele Foscari ont en particulier conservé la trace des difficultés éprouvées pour recouvrer intégralement les sommes dues pour fourniture de malvoisie : le témoignage est saisissant sur l’ampleur et la profondeur du commerce du vin, à Venise, au Fondaco, mais aussi dans l’arrière-pays pendant les trente-cinq ans d’activité de Michele Foscari. Poursuivis jusqu’en Allemagne en 1496 par un émissaire rétribué pour récupérer 460 ducats5, les débiteurs se situent sur une vaste échelle sociale : des petites gens de l’arrière-pays et de la montagne, mais aussi des marchands allemands, dont certains appartiennent à l’aristocratie des affaires, comme les Imhoff et les Hirschvogel de Nuremberg ; les sommes dues sont soit des restes infimes par compensation de services, soit des impayés du grand commerce. Une liste nominative de 1498, comportant une grande majorité d’Allemands, fait apparaître une dette de 2 090 ducats6. La malvoisie est, nous allons le voir, un élément essentiel de la fortune des Foscari et joue un rôle non moins important que les épices dans l’échange marchand, quand il s’agit du commerce local ou du paiement des fournitures : par son testament, c’est le seul secteur que Michele Foscari confie à un gestionnaire, Piero di Coleto et, à défaut, au fils de ce dernier, Antonio, lui accordant 2600 ducats pour gérer ces affaires au nom des petits-enfants, en lui assurant un salaire de 100 ducats par an7. Parvenu à sa majorité, le jeune héritier, Francesco Mocenigo, s’empresse de demander aux Procurateurs qu’un récapitulatif des comptes lui soit fourni, en particulier sur la gestion de la malvoisie8.
4Marin Sanudo apporte une attention particulière à la carrière et à la fortune de Michele Foscari, devenu membre du Conseil des Dix ; notant le décès du personnage le 22 octobre 1506, il paraît bien informé des clauses testamentaires et de la situation familiale : l’homme était « riche de 70 000 ducats » ; où ira cette fortune ?9 Michele Foscari n’a pas de fils et sa fille, un enfant « naturel » – le détail a un sens – est l’épouse de l’ambassadeur de la République auprès du roi de France. Ce sont des petits-fils, des Mocenigo, qui jouiront de la fortune à leur majorité : « aux Foscari, ajoute Marin Sanudo, il n’a rien laissé ».
5La remarque est le fruit d’un réflexe social : voici que s’instaure un transfert lignager, et par un lien généalogiquement indigne, sans qu’ait joué le ressort qui perpétue à la fois la richesse et le nom dans l’aristocratie vénitienne. La remarque est peut-être maligne ; elle ne prend pas en compte la réalité des rapports qui unissaient Michele Foscari à ses proches et comme on ne possède que son ultime testament et quelques documents privés, on ne peut entrer vraiment dans l’histoire des sentiments personnels. Et pourtant, voici le gendre, installé dans la maison familiale à S. Lio, Alvise Mocenigo « dalle gioie », que Michele Foscari associait à toutes ses affaires et traitait comme un fils10 ; Sanudo lui-même rapporte11 qu’à la nouvelle de la mort de son beau-père, nouvelle qui lui parvient à Blois, l’ambassadeur déclare n’avoir plus « de capacité à rien » et veut rentrer à Venise au plus vite.
6Voici les petits-fils, Antonio et Francesco, à qui reviennent tous les biens propres afin qu’ils puissent, à leur majorité, vivre noblement (« azo che sie signori ») et demeurent associés en affaires (« fraterna »). Évoquant cependant la fin possible d’une lignée (la peste a emporté son père en 1478), Michele Foscari se retourne vers sa propre famille et évoque les descendants de son frère et, à défaut, « le plus ancien des Foscari »12. Hors de ce risque, il justifie son refus de léguer à son frère et à ses neveux par le fait étrange « qu’il n’a pas voulu se marier » ; mais il leur laisse à se partager les maisons de S. Simeone qui lui venaient de Nicolo Foscolo « el cavalier » et réserve à ses neveux, fort actifs dans la gestion de ses affaires en Méditerranée, plusieurs centaines de ducats qui devraient leur revenir : un immobilier à remettre en état (« conditionnadi ») et des espoirs peut-être vains de créances à recouvrer… Ce sont là des détails que Marin Sanudo ne connaissait pas et qui n’auraient sans doute pas modifié son point de vue quelque peu théorique : plutôt des parents qui portent son nom qu’une fille naturelle qui transporte les biens dans une autre maison.
Le patrimoine et sa gestion
7De quels biens s’agissait-il et comment s’est constitué le patrimoine promis aux jeunes Mocenigo ?
8Partant d’une tradition qui a sa part de légende, Michele Barbaro indiquait que la famille Foscari était originaire de Terre Ferme, plus précisément de Mestre, d’où le grand-père de Michele vint s’installer dans la « contrada » de Santa Croce et y fit construire vers 1375 l’église de S. Simeone Propheta13 ; les Foscari possédaient effectivement dans les parages de l’actuel rio Marin un certain nombre de maisons, dont Michele percevait à la fin du XVe siècle des loyers14. Les maisons que son testament accorde à son frère et à ses neveux sont, dans ce secteur, un renforcement probablement récent d’un patrimoine hérité. La mort de sa mère, Isabeta Trevisan, en 1495, entraîna une division des biens entre les Foscari, qui aboutit en 1498 à l’attribution au fils d’Urban, Jeronimo, d’une « cha rio Marin » dont les loyers étaient au moins depuis 1489 répartis entre les frères ; cependant, l’autre frère de Michele, Francesco, prenait la maison de S. Vido sur le Grand Canal, Michele se réservant une auberge et un magasin à Padoue.
9On retrouve là, et peut-être du côté Trevisan, la Terre Ferme : les trois frères associés avaient en 1484 fait construire une fournaise à Mestre15 ; ils avaient même, du vivant de leur père, mis des fonds dans l’entreprise minière d’Auronzo16 ; depuis 1477, Michele Foscari achète du fer dans l’arrière-pays et des draps à Feltre17. Mais c’est à Padoue qu’il fait faire des travaux en 1483 et 1484 par des maçons de Mestre et de Castelfranco pour mettre en état ses moulins18. On a conservé une lettre de lui, datée de 1504, au podestat de Padoue19 qui s’étonne qu’on interdise la circulation du blé en arguant des grandes eaux, alors que son meunier s’apprête à « machinar », au moment où il n’a plus de farine : le magasin de Padoue, sous le palais du podestat, devait servir à stocker la récolte ou la farine. En cette même année il est à Padoue, « ca’ Dragon », et c’est là que sur un revers de lettre il établit un bilan chiffré de son patrimoine : sur les 33 425 ducats qu’il inscrit, les moulins de Padoue représentent 2 275 ducats, auxquels s’ajoutent d’autres biens de Terre Ferme, S. Zulian et Ca’Bolo, à savoir 3 600 ducats20. Cette bonne connaissance des lieux et des hommes de l’arrière-pays se retrouve dans les liens constants entretenus par Michele Foscari avec des artisans, comme des affineurs de cuivre, des aubergistes et des transporteurs de la montagne et donne sa tonalité à la liste de ses locataires vénitiens de S. Simeone et du Paradiso.
10Mais toute famille a des origines et des intérêts divers et, après avoir évoqué la constitution et le maintien d’un patrimoine terrestre, un saut s’impose vers la Méditerranée orientale, au terme vers Candie. Est-ce du côté Trevisan qu’il faut chercher une orientation durable des affaires et le lien entre le Levant et le monde alpin ? Ou à la tradition attribuant à la grand-mère paternelle de Michele Foscari une origine albanaise et des biens près de Lépante21? Il n’est pas impossible que les deux familles se soient rencontrées par les femmes en Adriatique et sur la ligne des navires pour Candie : plusieurs membres de la famille Trevisan, Alvise, Cristofalo, Zuan, Dimitri sont proches d’un beau-frère de Michele, Zuan Lando, que l’homme d’affaires désigne en 1472 comme son facteur en Orient et qui l’entraîne un temps dans le commerce du fer22; Alvise Trevisan est chargé en 1490 de la location des tavernes vénitiennes, auxquelles Michele Foscari vend du vin ; le fils de Zuan Lando, Andrea, est archevêque de Crète ; quant à ses propres neveux Foscari, ils travaillent pour leur « cher oncle » et sont devenus des habitués du commerce vers les îles, sur la ligne Pola, Corfou, Chypre et la Crète23 : on a conservé des lettres du jeune Alessandro Foscari adressées à son « magnifico miser barba e non men padre »24. L’un des frères d’Alessandro, Polo, est en 1496 capitaine d’une nave pour le voyage de Ponent et Michele Foscari lui confie une cargaison de poivre d’Alexandrie25.
11Élargissant encore le cercle des compagnons d’affaires et des commis, ainsi que la destination du commerce, il faut compter avant tout sur les frères Coppo, Antonio et Daniel. Le premier apparaît en 1482 au service de Michele Foscari à Alexandrie, mais il meurt sur place en 1484, comme l’atteste l’inventaire des biens marchands en attente dans le magasin (poivre, cuivre en pains et argent en sacs)26 ; dès 1485, Michele Foscari fait contrat avec Daniel Coppo27comme gérant de ses affaires pour un montant estimé à 25.000 ducats par an. La présence de Daniel Coppo est assurée définitivement jusqu’à la mort du patron en 1506 ; qu’il soit à Alexandrie, sa résidence attitrée, ou à Pola ou dans les Pouilles, où il traite avec les Fugger à l’Aquila ou les Tornabuoni à Naples, Michele Foscari lui écrit tamquam filio et ne peut plus se passer de ses services ; il lui attribue des commis, Piero di Stefano en 1489, Marco di Zorzi en 1502 et, en 1501, ce sont quatre jeunes gens de Pola dont l’un est envoyé à Alexandrie auprès de lui sans salaire autre que ses dépenses de bouche « per imparar »28. La correspondance de Daniel Coppo avec son maître et ses comptes détaillés occupent plus du tiers des actes de la « commissaria Foscari »29: c’est une source capitale pour l’histoire du commerce levantin de Michele Foscari qui a assuré les bases lointaines de sa fortune et, plus largement, surtout à partir des années de la fin du XVe et du début du XVIe siècle, une ouverture exceptionnelle sur les changements vécus par les contemporains entre Alexandrie, Venise, Lisbonne et Anvers.
12À Venise, le patrimoine et les contrats assurent à Michele Foscari des revenus : à l’héritage s’ajoutent des profits locatifs liés au commerce. Un compte récapitulatif des loyers depuis 148630 fait apparaître un ensemble familial de maisons de rapport (« a sargenti »») à S. Simeon Grande et à S. Simeon Piccolo, déjà évoquées ; des maisons à S. Cassian, dont on connaît les locataires, aux SS. Apostoli, sur lesquels en revanche on ne sait rien, et surtout à proximité de sa propre résidence à S. Lio, essentiellement au « Paradiso », où l’on recense en 1506 33 débiteurs ; il semble en outre que l’abbé de Pomposa ait tenté de vendre à Michele Foscari dans le même « Paradiso » domus, apoteca et edificia pour 4 600 ducats, mais que la transaction ait abouti à un procès de voisinage. À ces maisons de ville s’ajoute une maison à S. Stefano de Murano, habitée par des membres de sa belle-famille, qui payent un loyer31.
13Après les maisons, les magasins : à Padoue, un « fontego » sous le palais du podestat, où s’emmagasine la farine ; au Rialto, la voûte où sont entreposées à l’étage les épices et au rez-de-chaussée, les barriques de vin32 ; mais aussi des voûtes louées par Michele Foscari, l’une, « ruga dei zoieleri », en 1486 à un orfèvre allemand et dix ans plus tard à un « tiraoro » ; l’autre, à S. Mafio, louée à des maîtres d’abaque : en 1486, au fils du célèbre maître Troilo di Cancellariis, puis en 1488, au maître Aluixe Bon, enfin en 1492, au « pre » Bartolomeo33. De cet ensemble locatif, le bilan dressé par Michele Foscari lui-même fait apparaître que les meilleurs rapports sont ceux des maisons des SS. Apostoli, mais au premier chef, ceux du Paradiso34.
14Il faut enfin compter sur une activité essentielle pour le commerce du vin venu de Méditerranée orientale : la malvoisie crétoise est un produit essentiel des affaires Foscari à Venise et dans l’arrière-pays, et sur trois plans qui se superposent : l’approvisionnement constant, voire exclusif, de buvettes tenues sous contrôle ; ensuite un moyen de paiement partiel ou total de fournitures et de services ; enfin, un commerce à moyenne et longue distance dans les Alpes et le monde germanique. L’année 1500 a été, selon le témoignage de Sanudo, dure pour Michele Foscari et ses associés Corner et Contarini, lorsque la flotte espagnole a intercepté des navires chargés de vin à la hauteur de Céphalonie35.
15Le gouvernement vénitien prête la plus grande attention à la vente du vin et à la gestion des buvettes dans toute la ville36. Michele Foscari et ses frères se partagent, au moins depuis 1478, les revenus de plusieurs « caneve », liées à des auberges, en particulier l’auberge du « Pelegrin », dont Michele perçoit le tiers des revenus37. En 1494, outre l’auberge du « Peon », qu’il possède à Padoue, Michele Foscari impose à Venise ses barriques aux auberges de « la Corona », du « Lion », de « la Torre », de » la Campana » et des « Donzelle » : deux des contrats conservés sont conclus, l’un pour 4, l’autre pour 5 ans, à prix fixé. S’y ajoutent, au moins depuis 1504, puisqu’on en a la trace explicite, les débouchés assurés par la « caneva » du Fondaco dei Tedeschi : à cette date, c’est un membre d’une des éminentes familles nurembergeoises, Leonardo Pirckheimer, le frère aîné du consul de la Nation allemande installé à Venise, qui tient la buvette par contrat exclusif avec Michele Foscari : il s‘engage à n’acheter de vin à aucun autre fournisseur pendant le temps de son office, à payer son dû tous les 6 mois ; Michele Foscari ne peut de son côté modifier le prix de vente et doit fournir un magasin pour y stocker les fûts fournis ; il récupérera les barriques vides, qu’il renvoie en Crète38.
16Hors de l’approvisionnement des lieux publics, Michele Foscari règle, en partie ou totalement, par des livraisons de malvoisie, fournitures et services rendus par des artisans et des producteurs ; on ignore si ces ventes correspondent à une demande ou si l’homme d’affaires est en mesure d’imposer, là aussi, un mode de rémunération qui lui convient ; quand il s’agit d’un hôte du Valsugana, on a des raisons de penser qu’il s’agit, comme en ville, d’approvisionnement d’une auberge sur une grande route marchande39 ; mais on a des exemples plus proches du « Verlag » lorsque Michele Foscari paie les 100 draps fournis par un « laner » moitié en laine achetée aux Grimani et moitié en malvoisie, ou du « barato » lorsqu’il s’engage à prendre 34 draps de Venise payables en un an en malvoisie, s’il a en magasin du vin à 17 ducats l’amphore40. Le vin sert aussi à compenser à 23 ducats l’amphore le règlement d’une sentence des Consuls des marchands qui le rend débiteur d’un Allemand pour 123 ducats41. C’est avec les affineurs du cuivre venu d’Allemagne que le mode de règlement de l’achat et du traitement semble imposer d’emblée la fourniture de vin, le reste étant payé comptant, quitte à ce que le prix de la malvoisie fixé par contrat oblige l’affineur, deux ans plus tard à fournir encore du cuivre pour régler 30 ducats. Inversement il se peut que ce soit, comme dans le cas précédent, la fin d’une transaction quand le chaudronnier promet de payer trois amphores de vin par l’affinage de cuivre42.
17Toutes les dettes ne sont pas le résultat de transactions inégales et le vin peut entrer dans le circuit du commerce à moyenne ou à longue distance : on a vu que Michele Foscari charge en 1495 un commissionnaire de récupérer des créances « en Allemagne », tout au long des routes qui traversent les Alpes43 ; dans l’un des cas pendants, le débiteur allemand est originaire de Füssen en Bavière et doit 35 ducats depuis au moins 5 ans : on trouve son nom dans la liste d’une douzaine d’anciens débiteurs de Michele Foscari dont les reconnaissances de dette, souvent en allemand et écrites par un tiers, se retrouvèrent dans les papiers de la succession, peut-être rangés dans la boîte intitulée « Todeschi ». Les dettes pour malvoisie s’échelonnent entre 1479 et 1499. Les débiteurs n’appartiennent pas à une ou deux exceptions près, au monde du grand commerce ; ils vivent à Brixen, à Imst, à Mülhdorf, à Bruck an der Mur, à Laybach et perpétuent à la fin du XVe siècle le train des bêtes et des charriots que l’on rencontre un siècle plus tôt à la douane de Venzone dans le Frioul et qui croise, descendant vers l’Adriatique, des chargements de céréales et de fer44. Ainsi, après jugement des Consuls des marchands, Mian de Cividale en Frioul est sommé de fournir à Michele Foscari et dans les huit jours autant de fer qu’il faudra pour éteindre une dette de 35 ducats suite à un achat de malvoisie45. Les reconnaissances de dette sont souvent rédigées à Venise par des commis au nom de leur patron, un imprimeur, Ambrosi Allansee, écrivant le billet ou donnant sa caution, plusieurs acheteurs indiquant qu’un tiers paiera à terme en leur nom46. Parmi ces acheteurs alpins, qui n’appartiennent pas au monde du grand commerce, figurent trois personnages d’un autre niveau social : en 1489, un Ludwig Rottengater d’Ulm qui appose son cachet au nom de sa compagnie pour 112 « botte » reçues de « miser Fuschyere » ; ou Hans Keller, bien connu par son compte de voyage entre la haute-Allemagne et Venise47, qui rédige une reconnaissance de dette au nom d’un commis venu à Venise de Laybach, Hans Schaller de Strasbourg, qui signe en son nom (« scrito Zuan Soler d’Argentina ») et indique qu’il paiera 40 ducats l’an prochain, au retour de la foire de Recanati.
18Lorsque les commissaires de la succession Foscari établissent après sa mort en 1506 une liste de débiteurs, on y retrouve, parfois dix ans après, le nom de quelques personnages entrevus, soit dans l’affinage du cuivre, comme Hieronimo Falcon, soit dans le commerce alpin, comme Hans Keller, signe évident de la difficulté de faire face à des paiements sans cesse retardés qui deviennent les « mauvaises dettes », sans qu’on puisse pour autant faire de cette situation une condition générale des affaires avec l’arrière-pays vénitien48.
19C’est par cette transition qu’on pourrait aborder la place de la malvoisie, si appréciée dans les bonnes maisons de la notabilité allemande, dans des échanges à plus grand rayon d’action49 ; mais il ne semble pas que ce soit le produit essentiel avec lequel Michele Foscari contrebalance ses achats de métaux monétaires : face au cuivre et à l’argent, si présents dans les dossiers de sa « commissaria », ce sont les épices, voire le coton50 qui jouent un rôle majeur : les relations entre les Alpes et la Crète n’ont que peu de rapport avec l’échange entre les mines de cuivre argentifère du Tirol ou de Hongrie et le marché d’Alexandrie. Un seul exemple est demeuré d’une livraison de malvoisie pour compenser, après action judiciaire, un achat de vif-argent à la « commissaria « de Katzanderle », exploitant fameux du vitriol de Slovénie51 et l’on demeure encore dans le secteur alpin d’activité. De même, les traces de commerce de fer et de socs de charrue que Michele Foscari entreprend avec son beau-frère Lando semblent liées aux relations avec la Crète : de la même façon qu’il renvoie les « bote » vides et expédie des milliers de planches à Candie pour la fabrication de tonneaux, il semble que le fer serve à la fois en Crète à l’activité agricole et au cerclage des tonneaux52. Autre produit bien vénitien chargé sur les galères du Levant, le savon : jamais de malvoisie en contrepartie, mais des colorants ou des épices53.
20Les papiers Foscari ne nous livrent évidemment que la part résiduelle des activités enregistrées par l’homme d’affaires pendant 35 ans et on va voir à travers les documents relatifs au commerce du cuivre entre le monde germanique et la Méditerranée combien le dossier qu’il avait lui-même constitué sous le titre « Todeschi » correspond à une réalité essentielle non seulement pour lui, mais pour une histoire générale des échanges à la fin du XVe siècle.
21La correspondance conservée de son représentant à Alexandrie, Daniel Coppo, à la fin du XVe et au début du XVIe siècle54, fait apparaître la diversité des champs, des trajets, des relations qui unissent le bureau vénitien à la fois à la Crète et aux Pouilles, à Beyrouth et à Chypre et surtout à Alexandrie. Pour reprendre le cas de la malvoisie, il est évident d’après cette correspondance que les tonneaux de Michele Foscari sont chargés sur des embarcations variées qui sillonnent la Méditerranée orientale et ne viennent pas s’amarrer à Venise : nous avons fait le choix de nous intéresser aux seuls chargements qui mettent en relation Michele Foscari avec des Allemands et de suivre dans la mesure du possible le devenir des charges de cuivre qui passent les Alpes en direction d’Alexandrie ; lorsqu’on atteint le niveau d’affaires qui impliquent une firme comme celle des Fugger, quelques tonneaux de malvoisie ne permettent pas d’apprécier les modalités de l’échange.
Le commerce du cuivre : entre le Tirol et Alexandrie
22On a traité ailleurs de la provenance, du traitement du métal et de la politique du gouvernement vénitien sur le fait des métaux monétaires. Ce que les papiers Foscari nous permettent d’aborder ici touche à la réalité matérielle de l’échange : achats de cuivre tirolien ou hongrois, affinage, modalités de l’embarquement, contraintes liées au transport, aux conditions de sécurité en mer, aux rapports d’assistance ou de concurrence avec d’autres marchands à Alexandrie ou Beyrouth, aux prix des marchés en amont comme au Levant, au financement qu’imposent le temps des parcours et les délais de paiement contractuels : les relations personnelles avec les marchands allemands du Fondaco, mais aussi avec les marchands arabes d’Alexandrie peuvent jouer leur rôle dans la réussite des opérations, toujours risquées, puisqu’elles participent à un vaste courant qui s’étend au début du XVIe siècle, les contemporains en sont parfaitement conscients, de Lisbonne à Calicut.
23Les premières années du XVIe siècle, en dépit de la crise que le détournement des voies maritimes provoque sur le marché vénitien, attestent le rôle essentiel que Michele Foscari a su jouer dans le commerce au long cours du cuivre germanique et, par conséquent, dans les relations prioritaires avec la firme Fugger. Mais les premières traces laissées par les contrats conclus et les extraits de compte qui nous sont parvenus font apparaître que depuis vingt-cinq ans au moins les métaux monétaires prennent la mer, sous sa marque, en direction du Levant. La différence sensible entre les années 1480 et les années 1500 tient au volume et à la nature des produits : alors que le cuivre hongrois des Fugger arrive massivement à Venise après affinage à Fuggerau, Michele Foscari achetait vers 1480 du cuivre dit de « Bruneck », de Rattenberg sur l’Inn ou « de Vienne » à un marchand nurembergeois Paul Kolb55 : ce cuivre « sporco », c’est-à-dire brut, devait être affiné au « Getto » de Venise. On perçoit ainsi la différence d’échelle franchie en l’espace d’une vingtaine d’années par Michele Foscari, devenu le principal intermédiaire de la plus puissante firme d’Europe.
24Aussi fragmentaires que soient les documents relatifs aux affaires conclues par Michele Foscari avec Paul Kolb et avec l’affineur vénitien, sur les 10 années qui sont évoquées, ce sont les deux années 1482 et 1483 qui présentent un tableau convaincant des opérations qui se succèdent56. D’abord, le contrat d’achat au printemps (avril ou juin) qui précède de peu la livraison du cuivre, le pesage au Fondaco et le contrat avec l’affineur, qui doit remettre les plaques à la marque de Venise dans le courant du mois de juin ; effectivement, le paiement du travail d’affinage s’effectue dans la première quinzaine de juillet, suivant de peu la mise en paiement de l’achat à Paul Kolb. Quelques mois plus tard, le cuivre embarqué se trouve sur les quais d’Alexandrie : le compte de frais de 1482 est établi sur place par le commis de Michele Foscari dans la première quinzaine d’octobre, et le pesage de la marchandise à Alexandrie a lieu en 1483 le 15 novembre : en 5 à 6 mois, l’opération est arrivée à son terme. L’intérêt du pesage à Alexandrie au petit « fondaco », effectué entre novembre et mai à la demande du représentant vénitien par le peseur du Sultan et en présence du chancelier du consul vénitien, tient au calcul minutieux de la tare, c’est-à-dire en l’occurrence du poids de l’emballage ; la tare automatiquement calculée à Venise au moment où le cuivre est débarqué pourrait avoir la même signification, puisqu’elle représente un pourcentage du poids de la marchandise, que le cuivre soit destiné à l’affinage au « Getto » ou arrive déjà affiné57.
25Revenons au point de départ et examinons les modalités de paiement du fournisseur et du métallurgiste. Leur point commun est la confiance (ou la dépendance) qui les lie à Michele Foscari : ce dernier leur impose en effet des délais de paiement et une variété calculée de rémunération. Un récapitulatif, qui semble impliquer une contestation pour défaut montre que l’affineur au « Getto » est traité comme un des artisans que nous avons rencontrés plus haut à propos de la malvoisie : Michele Foscari lui porte « in mia botega », dit l’affineur, et en présence d’un témoin, 32 ducats en or et monnaie et ce furent ensuite 7 paiements échelonnés aux praticiens de l’atelier ; mais le maître note qu’il a aussi accepté de signer de sa main dans le registre de l’acheteur une reconnaissance de dette de ce dernier, s’élevant à 58 ducats ; il a enfin reçu une amphore de malvoisie pour 14 ducats, puis un surcroît pour 4 ducats en 1484 ; on est encore loin du solde, car les relations courent sur plusieurs années et sur les 364 ducats dus par Michele Foscari depuis 1481 116 sont toujours à payer en 148458.
26Les modalités de paiement du cuivre fourni par Paul Kolb sont d’une autre nature, même si elles sont aussi composites et étalées dans le temps59. La somme est d’une autre ampleur puisqu’elle s’élève en 1482 à 5 000 ducats et en 1483 à 5 500 ducats. Pour la première année, plus de 3 000 ducats sont à obtenir en 10 sommes sur des débiteurs de Michele Foscari, les promesses étant liées, entre avril et le mois de janvier suivant, au calendrier des affaires (l’Ascension, le retour des galères…) ; à ces sommes s’ajoute un versement comptant de 1 000 ducats et le reste à compléter par des lingots d’argent à la marque de St. Marc ; l’année suivante, ce sont 19 sommes sur des débiteurs, parfois les mêmes que l’an précédent, puis 800 ducats en banque et pour solde de tout compte, à nouveau des débiteurs « boni e soficientti ».
27Qui sont les débiteurs assignés à Paul Kolb ? Dans les deux listes se retrouvent les mêmes noms, ceux, bien connus, de Bernhardin Hirschvogel ou de Gotardo da Cologna, celui de Markus Tochauer, qui fut aussi fournisseur de cuivre ; mais aussi quelques artisans du textile pour des sommes importantes avec caution d’un Gritti, et la banque Lippomani, où nombre d’Allemands ont leur compte ; la fourniture de malvoisie n’apparaît qu’une seule fois au crédit de Paul Kolb, pour diminuer de 235 ducats la dette de Michele Foscari. Une note, non datée, mais postérieure aux livraisons de cuivre, laisse apparaître une dette de 128 ducats pour solder le compte avec le marchand nurembergeois60 ; nous sommes bien dans un autre registre que dans les rapports avec les techniciens du métal.
28Entre les Fugger et Michele Foscari, c’est encore un autre niveau de l’échange qui s’installe pendant quelques années dans les dernières décennies du XVe siècle ; le cuivre est essentiellement payé par des fournitures d’épices, l’échange donnant lieu à des instructions précises de Michele Foscari à son fidèle Daniel Coppo, qui, d’Alexandrie, l’informe sur les quantités et les prix grâce à ses relations personnelles avec des marchands arabes.
29La première mention de relations d’affaires avec les Fugger l’est avec Lucas « au chevreuil », représentant de la branche aînée et pour une vente de cire en 148661. Un contemporain de Michele Foscari, Alvise Baseggio62, dont les affaires sont liées au commerce du coton par Beyrouth, est en relations à la fois avec Lucas Fugger et avec son cousin Ulrich « au lys » : Lucas lui achète du coton syrien en 1481 et en 1485, associé à un marchand de cuivre, Markus Tochauer, que connaît bien Michele Foscari ; la société « Ulrich Fugger et C° » compense sa vente de cuivre en barres en juillet 1481 par un achat de coton au mois de septembre63 : les Fugger entrent ainsi en scène à Venise pour fournir Augsbourg en coton, mais le cuivre élaboré (« lavorado ») qu’ils écoulent en quantités moyennes n’a pas d’autre provenance que celles utilisées par Paul Kolb. « Ulrich Fugger et ses frères » se font attribuer en 1484 la chambre de la communauté de Judenburg au Fondaco64 et Jacob Fugger conclut un premier marché d’acquisition d’argent-métal, 1 000 marcs, contre un prêt à la cour d’Innsbruck en 148565; mais on est encore loin de la présence écrasante des Fugger au Tirol à la suite des avances consentis à l’archiduc Sigismond, puis à l’Empereur Frédéric III et à la première assignation de cuivre de la fonderie d’État de Schwaz en 149466.
30Mais à partir du moment où les Fugger ont mis leur dévolu sur la production du Tirol, les premières provenances de cuivre (Taufers, Bruneck) disparaissent des comptes Foscari : Paul Kolb a fait faillite après la guerre de 1488 et les Paumgartner ne mettent plus de cuivre sur le marché vénitien sans l’entremise ou l’accord des Fugger. Dès lors, les achats de Michele Foscari s’accroissent massivement grâce à la relation exceptionnelle qu’il a su nouer avec l’entreprise « Ulrich Fugger et frères »67.
31On sait que dans le champ du commerce méditerranéen, le tournant du siècle présente un vif intérêt : tous les observateurs contemporains s’alarment de la crise qui se traduit sur le marché vénitien par la mévente. On saisit au vif dans les décisions publiques, les correspondances et les chroniques les menaces qui pèsent sur le mécanisme fondamental de l’entre-cours. On a jusqu’à présent mis l’accent de façon presque exclusive sur la raréfaction des cargaisons d’épices qui arrivent à Venise sans examiner les cargaisons qui partent pour l’Orient et où les métaux tiennent une place primordiale.
32Une première question se pose, celle des quantités de cuivre qui quittent le port de Venise dans ces années de crise : il apparaît clairement que le trafic des galères ne peut suffire à évaluer le volume des expéditions. Les chargements sont sans doute réduits par rapport à des années régulières, mais leur volume est toujours largement supérieur à celui qu’on connaît par les indications officielles que transmettent les chroniques. La navigation privée représente alors comme toujours une part méconnue par rapport à celle de la navigation d’État.
33La bonne fortune des découvertes d’archives permet de poser une seconde question : que représentent les expéditions de cuivre faites par un grand homme d’affaires, Michele Foscari, par rapport aux expéditions signalées par les chroniques, mais aussi par rapport aux quantités de métal mises sur le marché vénitien par les Fugger : en effet, certaines années, il semble que le rapport entre les deux entreprises soit exclusif : la concordance de certaines indications est frappante et, au moins en 1502, on peut affirmer que la totalité du cuivre embarqué sur les galères d’État pour Alexandrie appartenait à Michele Foscari et représentait la totalité des achats qu’il avait faits auprès des Fugger.
34À partir de ce constat et en remontant le circuit de l’écoulement, on peut se poser une troisième question : que représentent les quantités de cuivre écoulées à Venise par les Fugger par rapport à l’ensemble de la production des mines tiroliennes et hongroises ? Car c’est dans ces années de crise sur le marché vénitien que les Fugger acquièrent face à leurs concurrents leur position de monopole et que Michele Foscari devient l’un des premiers, voire le principal marchand de cuivre sur l’arc entre le Tirol et Alexandrie.
35Enfin, et c’est le quatrième point, si la vente de métal est l’objectif fondamental de la firme Fugger, l’obligation demeure pour tous les hôtes du Fondaco de trouver à Venise des partenaires à leur mesure : Michele Foscari est l’un d’eux et l’on peut se demander si ce dernier tira plus de profit de l’écoulement du métal ou de la fourniture aux Allemands de produits importés du Moyen Orient.
36Dans la période de crise que décrivent les sources narratives vénitiennes, essentiellement, les notes de Sanudo, Malipiero et Priuli, et dont témoignent à la fois les délibérations publiques et les correspondances privées, les achats de cuivre par Michele Foscari s’accroissent régulièrement : des 15 tonnes de 1481 aux 50 tonnes de 1482, puis aux 55 tonnes de 1483, on passe à des centaines de tonnes en 1495 et jusqu’à 860 tonnes en 1502, chiffre si élevé que Priuli le cite avec stupéfaction : cette année-là, la presque totalité du chargement de cuivre des cinq galères d’Alexandrie appartient à Michele Foscari qui l’a achetée aux Fugger, soit 525 tonnes sur les 575 embarquées ; mais les possibilités de chargement étant épuisées, Foscari affrète aussitôt un navire privé qui part après les galères avec 200 tonnes ; il reste encore 150 tonnes à quai, faute de moyen de transport68. Les contrats conservés, qui précèdent immédiatement le départ des galères et de la nave prouvent que Foscari avait l’espoir d’écouler à Alexandrie des quantités très importantes de cuivre, puisque, outre le cuivre acheté aux Fugger, il en achète encore à des tiers, aux da Lezze et à Nicolo Dolze. Autre indice concordant, neuf mois plus tard, trois galères pour Alexandrie chargent une petite cargaison de cuivre, dont la moitié, soit 30 tonnes, appartient à Michele Foscari tandis qu’une nave est affrétée pour conduire encore 200 tonnes à la même destination. Cet écoulement est à la mesure de la production du Tirol et des contrats conclus par les Fugger avec le prince et avec leurs concurrents.
37Reprenons le fil des marchés conclus depuis le 31 mai 149469. À cette date, Jacob Fugger s’assure la production de la fonderie d’État d’Innsbruck pendant deux ans et demi, soit 10 % de la production des mines tiroliennes, soit 110 tonnes par an. Le 22 août 1496, le commerce du cuivre étant redevenu libre et concurrentiel, Jacob Fugger est contraint de s’entendre avec les Herwart et les Gossembrot et de conclure un contrat pour écouler à Venise jusqu’en décembre 1497 1 345 tonnes de cuivre tirolien, tandis que les Paumgartner qui livrent aux associés au nom de Maximilien une partie du cuivre qu’ils ont déjà emmagasiné à Venise s’engagent à ne pas vendre pour leur propre compte jusqu’à l’expiration du contrat70. Comme on sait que le cuivre de Taufers, celui d’autres mines comme celle de Brixen, et le cuivre hongrois ne peuvent être acheminés, on peut raisonnablement penser que la plus grande partie du cuivre tirolien se trouve alors sur la place de Venise.
38Or en décembre 1497, les associés n’ont réussi à vendre à Venise que 800 tonnes sur les 1 345, c’est-à-dire que 537 tonnes se trouvent en stock et en souffrance dans la vallée de l’Inn71. Que représentent alors les expéditions vers le Levant ? On l’ignore, mais si l’on se souvient que les galères d’Alexandrie ont emporté en 1495 plus de 500 tonnes, c’est à peu près le rythme d’écoulement que pouvaient espérer les associés en 1497. Loin du pessimisme qu’affichent alors les observateurs du marché, comme Sanudo ou Priuli, les contractants sont sans doute persuadés que la crise est passagère et même favorable à l’audace.
39Tout au plus faut-il diviser les risques : risque de surcharge des navires, lorsque des masses de cuivre encombrent les coursives et tombent à la mer, comme il arrive à un chargement de Michele Foscari, perdu dans l’Adriatique72 ; risque de piraterie en temps de guerre et d’insécurité, évoqué dans la correspondance entre Michele Foscari et son représentant à Alexandrie : il est suffisamment élevé pour être spécifié dans le contrat passé avec les Fugger et faire l’objet d’une assurance en 150073. L’habitude est prise depuis plusieurs années de répartir les cargaisons de cuivre sur les différents bâtiments de la « muda » : ainsi, en 1495, les 631 « cofe » destinées à Alexandrie sont embarquées en quatre masses sur les galères, le règlement du « nolo » étant divisé entre les quatre patrons solidaires74.
40On en vient alors à la convention passée le 12 mai 1498 entre les associés de 1496, par laquelle les Fugger se font fort d’écouler 1 430 tonnes, soit le stock invendu, plus 450 tonnes de cuivre tirolien et 450 tonnes de cuivre hongrois75. Mais entre septembre 1498 et mai 1499, Jacob Fugger déclare lui-même que presque rien n’a été vendu à Venise76. Le 26 mai 1499, l’invendu s’élève à 1120 tonnes : le « presque rien » représente 330 tonnes expédiées à Alexandrie, mais aussi à Beyrouth et à Londres. Comme il n’était pas question que d’autres quantités de cuivre tirolien arrivent avant l’écoulement du stock, les Paumgartner s’étaient engagés, le 16 mars 1499, à empêcher les producteurs tiroliens de vendre à leur propre compte. En revanche, toute liberté d’action était reconnue aux Fugger pour écouler, au terme de l’accord de 1498, le cuivre hongrois dans lequel ils avaient beaucoup investi, soit 840 tonnes à Noël 1499 et ensuite, chaque année, 670 tonnes en 1500, 1501 et 150277.
41Aucun départ de galère n’ayant eu lieu en 1499 et en 1500, aux 1120 tonnes invendues risquaient de s’ajouter les 840 tonnes hongroises. Dans ces conditions, le 2 septembre 1502, Jacob Fugger obtint de ses associés de se décharger de la vente totale, se fit fort de vendre les 336 tonnes de cuivre tirolien pour sa part de contrat et commença à faire venir du cuivre de Hongrie78.
42Effectivement, le 29 novembre 1500, Jacob Fugger vend à Michele Foscari 300 tonnes de cuivre qui sont embarquées sur des naves pour Alexandrie entre novembre et janvier ; le 5 février 1501, Michele Foscari établit sa reconnaissance de dette envers les Fugger79. Ayant réussi à vendre son stock, Jacob Fugger entame de nouvelles discussions avec ses rivaux, en particulier les Paumgartner, sur l’écoulement du cuivre tirolien et ne pouvant s’entendre avec eux en raison de sa position dominante en Hongrie, il compte résolument sur l’acheminement régulier du cuivre hongrois à la fonderie de Fuggerau et au marché de Venise. En août 150280, Michele Foscari fait contrat d’affrètement de 520 tonnes de cuivre probablement hongrois, qui partent pour Alexandrie en février 1503 ; en juin, 140 tonnes partent par une nave, puis 180, de sorte que Michele Foscari réussit à écouler les 840 tonnes qu’il avait achetées. On conçoit l’admiration que ne peut s’empêcher d’exprimer Marin Sanudo vis-à-vis de Michele Foscari, qui négocie avec audace dans la conjoncture la plus défavorable au commerce de ligne en Méditerranée orientale81.
43Le cuivre expédié en Orient comporte évidemment un retour de marchandise depuis Beyrouth et, surtout, Alexandrie. La confrontation entre les dossiers Foscari et les papiers contemporains d’Alvise Baseggio présente l’intérêt, dans les années 80 et 90 du siècle, de faire apparaître le même groupe étroit de marchands du Fondaco ; mais à la différence de Baseggio, importateur de coton de Beyrouth à destination des ateliers de haute-Allemagne, Michele Foscari contrebalance les ventes de cuivre et d’argent avec les épices que lui achètent les Fugger. Il est donc du plus haut intérêt de revenir sur les conditions de l’offre et de la demande, à un moment de l’histoire des échanges méditerranéens où se joue le destin de Venise.
44La correspondance adressée à Michele Foscari par son représentant à Alexandrie, le fidèle Daniel Coppo, permet à la fois de confirmer les points de vue et les chiffres fournis par les chroniqueurs vénitiens, de suivre les analyses d’un acteur installé de longue date sur le marché alexandrin et de comprendre comment se construit à distance et dans le secret de l’entreprise une politique commerciale.
45Cette correspondance apporte sur le marché d’Égypte des précisions qu’aucune source publique, à l’exception de Priuli, très bien informé, ne détaille à Venise. Ainsi, Daniel Coppo écrit à son patron, le 12 août 1500, que des bassines de cuivre, arrivées en 29 balles et 86 grandes caisses, ont été déchargées en mauvais état : elles ont été éparpillées dans la nave, impossibles à empiler à cause des anses trop larges qui se cassent ; on aura bien du mal à s’en défaire et il faudra sans doute les refondre82. Lorsqu’il donne, le 7 novembre 1500, les prix du cuivre au Caire, il indique une gradation selon la nature des chargements, qui fait apparaître qu’à côté du cuivre en pains, celui qui est la base des contrats, sont expédiés plusieurs variétés de produits semi-finis, en barres, en plaques étroites ou larges, en fil épais ou mince83; ces détails enrichissent le tableau de la production, probablement nurembergeoise, qui voyage à côté du cuivre tirolien ou hongrois : ces produits élaborés sont destinés à l’usage local, alors que le dernier chargement de cuivre en pains expédié par Michele Foscari a été immédiatement expédié en Inde84.
46En janvier 1502, Daniel Coppo confirme et précise l’importance de l’expédition de cuivre, notée par Priuli : à Pola, la police de chargement des galères atteste que Michele Foscari est, de loin, le premier exportateur : 1 075 miers en 2 200 « cofe », à côté des 160 miers des Malipiero et des da Lezze, des 50 miers des Loredan, des 40 miers des Baxadona et des 40 miers des Venier85 ; et comme Michele Foscari entend en plus envoyer 400 miers par la nave Biancho, qui risque d’arriver à Alexandrie avant les galères, les prix vont baisser à la vente : Daniel Coppo manifeste respectueusement son étonnement d’une expédition qui va dépasser les possibilités d’absorption habituelles du pays, soit entre 800 et 1 000 miers au lieu des 2 000 qui lui sont annoncés86. On ne peut à la fois écouler massivement des marchandises et espérer les vendre au prix fort : ainsi en mars 1503, Daniel Coppo écrit à Michele Foscari que l’injonction de vendre le cuivre à 13 ducats le cantare contre du poivre à 80 lui paraît improbable : le poivre sera à 90 ; il attend donc un ordre formel d’exécution. Trois mois plus tard, le prix du cuivre ayant fortement baissé, il écrit qu’il espère pouvoir le vendre entre 11 et 12 ducats : le prix va remonter à condition que l’on n’en envoie plus jusqu’au retour des prochaines galères du voyage : il faut veiller, dit-il, à ce qu’il n’en arrive plus par le Fondaco ou par ailleurs87.
Les achats d’épices
47Vendre le cuivre, c’est toujours dans la perspective d’acheter des épices ; mais, comme on va le voir, quelle que soit la quantité de cuivre offerte, le Sultan ou les marchands arabes exigent du comptant : il n’est aucune galère qui n’emporte des sommes considérables de ducats pour satisfaire une demande constante en cette période de conflits armés en Égypte, où il faut payer des soldes. Ainsi, comme l’écrit Daniel Coppo le 7 novembre 1500, le Consul vénitien et 4 marchands ont été contraints de prendre le poivre à la douane du Caire au prix fort : il a fallu verser au Sultan 10 000 ducats et, faute de liquidités, emprunter 22 000 ducats à usure, à 10 % par mois88. Ainsi, faut-il que Michele Foscari fasse partir en 1502 2 000 ducats en 4 sacs ; ainsi, achetant des épices pour le compte des Loredan, Daniel Coppo doit donner autant d’argent que de cuivre89 et, à plusieurs reprises, demande que l’on charge sur les naves du savon, qui se vend rapidement et procure des liquidités sur place90. En 1504, il prévient que si l’on ne fournit pas la monnaie comme convenu, les marchands arabes menacent de laisser sur le carreau les marchandises débarquées91. Il est donc inutile d’envoyer aveuglément du cuivre à Alexandrie : « que l’Allemand (c’est-à-dire Fugger) vende d’autres cuivres à qui lui plaira »92.
48Autant les Arabes établissent la valeur d’échange en fonction des quantités de cuivre proposées93, autant ils tiennent, quel que soit le volume des épices qui arrivent par les caravanes, à maintenir des prix élevés face à la concurrence que se font les Occidentaux en ce début du XVIe siècle94. En août 1500, il y avait peu d’épices au Caire à cause des caravelles du Portugal, aussi peu par la mer que par La Mecque95et le prix du poivre ne cessait de monter. La situation change en 1502, où il y a abondance d’épices : Daniel Coppo enrage, car un puissant homme d’affaires arabe, Ahmed Bubako, a tout le poivre en sa main et le vend au nom du Sultan : non seulement il fixe le prix très haut96, mais en outre il organise chaque année un véritable bras de fer avec les Vénitiens dont les galères sont à quai pour les 20 jours de la « muda » : en 1504, Daniel Coppo attend impatiemment que le poivre arrive du Caire à Alexandrie afin de procéder à l’échange des marchandises et sait qu’il y a suffisamment d’épices pour trois ans d’échange ou le chargement de 10 galères97 ; mais les marchands arabes font durer l’attente, prêts à laisser repartir les galères à vide plutôt que de baisser le prix du poivre98: la réaction de Daniel Coppo, partagée par tous les Vénitiens, est le refus de payer comptant alors que les navires sont remplis de marchandises, en particulier de cuivre99 ; il enrage de constituer des stocks qui ne s’écouleront plus vers l’Inde aussi longtemps que la route maritime sera menacée par les entreprises portugaises : à son avis, les réserves de poivre du Caire sont bloquées pour longtemps, alors que, selon le consul des Catalans à Alexandrie, de très grandes quantités de poivre sont arrivées en Occident par les caravelles : le prix sera de l’ordre de 90 ducats à Venise alors qu’il est de 120 à 140 à Alexandrie100. Dans ces conditions, Daniel Coppo prie Michele Foscari de l’autoriser soit à accepter le très haut cours du poivre, soit de renoncer au poivre au profit d’autres épices, gingembre, clous de girofle et cannelle pour vendre le cuivre dont le prix va baisser101 ; travaillant pour le compte d’autres marchands, il a déjà acheté du gingembre mais manque d’argent et a dû émettre une lettre de change de 3 000 ducats. Le témoignage d’un fidèle commis de son maître apporte ainsi toute la dimension humaine102 à une situation des marchés d’Orient dont les chroniques vénitiennes décrivent, en les chiffrant, les conséquences au Rialto : les Allemands commencent à se détourner de Venise, puisqu’ils ne peuvent plus vendre leur cuivre et acheter des épices à des prix raisonnables : Priuli déplore, année après année, les maigres affaires (« pochissime facende ») traitées au Fondaco103, qui obligent les Vénitiens à baisser le prix du poivre qu’ils ont pourtant acheté très cher à Alexandrie.
Fugger et Foscari : les années 1500
49C’est dans ce contexte que se situent les relations entre Michele Foscari et Jacob Fugger, dont on peut, à la faveur des pièces justificatives et des récapitulations comptables, tenter d’estimer le bilan. Le contrat conclu entre eux le 29 octobre 1500 prévoyait que la livraison de 5 à 600 miers de cuivre se ferait pour la contre-valeur en poivre, avec la liberté de payer en monnaie104 ; cette clause qui prévoit une difficulté à fournir les épices se retrouve, sous des formes diverses, dans d’autres contrats conclus en 1502 : les Loredan, vendeurs de cuivre, s’engagent à donner sur place à Alexandrie 2 400 ducats pour que Daniel Coppo puisse acheter comptant par tiers gingembre, poivre et clous de girofle ; Dolze qui vend à Foscari 220 miers de cuivre destinés à Alexandrie reçoit à Venise un premier versement de 3 000 ducats de Foscari qui s’engage à ce que son commis lui réserve la valeur de 500 ducats de gingembre et de poivre ; Dolze lui fournira sur place des barres d’argent pour payer les épices105. Les consignes de Foscari à Daniel Dolze sont détaillées : acheter en priorité du poivre et mettre la cannelle en dernière position, car les Portugais en ont apporté une grande quantité ; mais surtout, vendre comptant, sachant que près de 20 000 ducats seront adressés par les différents clients au commis de Michele Foscari et que ce dernier lui fait virer par change sur la banque Pisani 6 000 ducats106.
50Les documents d’expédition du cuivre sont très fournis dans ces années 1500-1504 : contrats de nolisement, fiches de pesage, polices de chargement au départ de Venise ; en 1500, le cuivre part sur des naves, car il n’y a pas de départ de galères, et de retour d’épices il n’y a pas de trace. La situation paraît à nouveau plus équilibrée en 1501 et 1502, mais les craintes de voir les Allemands acheter ailleurs paraissent fondées ; faute d’épices, Michele Foscari paie assez vite les livraisons de cuivre de 1500 par la banque Agostini107, comme s’il prenait son parti d’une dissociation des deux éléments séculaires du trafic d’Orient.
51En 1502 et 1503, Michele Foscari tente de payer les énormes quantités de cuivre fournies par les Fugger108 en faisant acheter des épices par « barato » : effectivement, Daniel Coppo lui fournit un compte précis et complet de toutes les transactions assurées avec les marchands arabes et juifs d’Alexandrie109 ; mais Michele Foscari s’engage en outre à payer à des hommes d’affaires vénitiens, Alvise Grimani, Piero Duodo, Alvise Contarini et aux héritiers de Nicolo da Molin, poivre et gingembre qu’il leur a acheté pour le compte de Jacob Fugger110: de son côté, ce dernier est déclaré débiteur par son garant jusqu’aux prochaines échéances de 1504, « nave ou galère ». Pour mettre la situation au clair, Michele Foscari a en effet établi de sa main plusieurs tableaux, l’un sur le cuivre, l’autre sur les épices, le troisième sur ses rapports avec les Fugger. Il a bien écoulé et à bon prix le cuivre à Alexandrie ; il en retire un bénéfice, à condition que les épices, essentiellement le poivre, soient achetées aussi à bon prix à Venise par les Allemands ; dans une conjoncture morose, il ne peut que se féliciter des achats opérés par les Fugger, alors qu’il n’a pas fini de payer le cuivre : c’est en octobre 1504 que la banque Agostini solde le reste, soit 486 ducats111. C’est ce bilan qui fournit les éléments d’une conclusion, non point sur l’ensemble de la gestion, faute de sources, mais sur la crise traversée avec maîtrise grâce au sang-froid de Michele Foscari et au savoir-faire de son commis alexandrin, Daniel Coppo.
52On pourrait suivre l’entreprise jusqu’à la mort de l’homme d’affaires en 1506, fortement soutenu jusqu’à la fin par son gendre Alvise Mocenigo « dalle zoie », qui, depuis Blois où il est ambassadeur auprès de Louis XII, exprime alors sa profonde douleur.
53Mais les relations avec Jacob Fugger se sont estompées après 1504112 et il peut paraître opportun de prendre congé de Michele Foscari au moment où l’équilibre du monde occidental, tournant autour de son axe, subit l’attrait de Lisbonne et d’Anvers. Les Allemands n’ont pas quitté Venise et le nouveau Fondaco, réédifié après l’incendie, atteste la solidité des liens anciens que magnifiait la fameuse « veduta » de 1500 par Jacopo de’ Barbari, le plus allemand des peintres vénitiens. Pourtant, les commentateurs les plus avisés sont parfaitement conscients à Venise de l’attrait que représente, du Rhin jusqu’à la mer du Nord, la puissance de l’économie financière : la Bourse d’Anvers impose le rythme que donnait, à l’arrivée des galères d’Orient, la « foire des Allemands » au Fondaco. L’inventaire de la chambre déserte des Fugger en 1527 donne le sentiment de l’irrémédiable passé113. Touchant à sa fin, l’enquête séculaire ne débouche pas sur le vide, mais sur un temps nouveau. C’est sur ce temps nouveau que va se conclure cette longue enquête. Mais, avant d’y venir, il faut quitter un temps les parages du Fondaco et prendre en compte la communauté allemande de Venise qui, loin du monde des affaires internationales, s’est installée dans tous les secteurs de la ville et dans toutes les professions : moins soumise au risque de l’aventure marchande, elle vit et respire à l’unisson de la société vénitienne.
Notes de bas de page
1 ASV, Proc. S. Marco (PSM) Misti 42, 14.
2 ASV, PSM Misti 44, 32.
3 ASV, PSM Misti 44, 32.
4 ASV, PSM Misti 41, 2.
5 ASV, PSM Misti 42, 20.
6 ASV, PSM Misti 44, 32.
7 ASV, Not. T. 957 : le dernier testament de Michele Foscari est daté du 1er décembre 1505 ; il a été enregistré le 21 mai 1506 ; un résumé du testament in MCC, PD 1105, 12.
8 ASV, PSM Misti 41, 13 (s. d.) : « che io veda le ragion mie… ».
9 M. Sanudo, I Diarii… VI, p. 454 : « Morite sier Michiel Foscari, è dil Consei di X, richo di 70 000 ducati, non ha fioli, ma nipoti, fioli e fie di soa fia natural… ».
10 ASV, PSM Misti 43, 25.
11 M. Sanudo, I Diarii, VI, p. 498 (1506/28/XI) : « come ha inteso la morte del suosero, sier Michiel Foscari, la qual l’à molto stornito, dice non aver piu capo a o… ».
12 Cf. note 7 : « descendenti di mio fradeli sie chiamadi i piu vechi da cha Foschari che se trove… ».
13 MCC, Codici Cicogna 2458 bis, cahier 1486-1496 ; M. Barbaro, genealogie nobili venete, III, f. 161.
14 ASV, PSM Misti 43, 27.
15 ASV, PSM Misti 44 A, 30.
16 ASV, Senato Terra VI, f. 198’.
17 ASV, PSM Misti 41, 13 et 44, 31.
18 ASV, PSM Misti 41, 13.
19 ASV, PSM Misti 43, 25.
20 ASV, PSM Misti 43, 23 (1504/24/IV).
21 MCC., Cod. Cicogna 2458 bis, III, ff. 161-162.
22 ASV, PSM Misti 42, 20.
23 ASV, PSM Misti 44, 31.
24 ASV, PSM Misti 43, 23 et 24.
25 ASV, PSM Misti 41, 10.
26 ASV, PSM Misti 42, 20 et 44A, 29.
27 ASV, PSM Misti 41, 10.
28 ASV, PSM Misti 41, 10 ; 42, 20 ; 43, 23.
29 ASV, PSM Misti 43.
30 ASV PSM Misti 44, 32 et 33.
31 ASV, PSM Misti 41, 13.
32 ASV, PSM Misti 41, 2.
33 ASV, PSM Misti 41, 13 ; sur Troilo, plus haut, p. 430.
34 ASV, PSM Misti 44, 32.
35 M. Sanudo, I Diarii III (1500/5/XI).
36 Cf. plus haut, pp. 260 et suiv.
37 ASV, PSM Misti 41, 13 et 44, 32.
38 ASV, PSM Misti 41, 12 : « Adi I° luio 1504. Noto sia como io Lunardo Perchemer al presente canaver in fontego de li todeschi ho fatto contrato con la magnificentia de miser Michiel Foschari zoe lui me debia fornir de vini per mio fruar in fontego zoe malvasia et malvasie moscatele de quanto ho de bisogno zoe per la mia caneva in fontego del tempo che ho astar in la ditta caneveria in fontego obligandomi jo Lunardo sopraditto de non tuor vini zoe malvasie salvo che dal sopranominato miser Michiel Foscari obligandose lui de darme ditte malvasie et moscatele per tal concluso pretio et mercado zoe la malvasia a duc.16 lanfora et le moscatele a duc. 20 lanfora non me possendo creser per modo niuno el pretio et io sopraditto Lunardo prometo a dito miser Michiel de pagar le ditte malvasie che io toro in el tempo del ditto acordo de mesi 6 in mesi 6 zoe in due page alano obligandosi el dito miser Michiel ancora de darmi uno magazen a suo costo et fitto per tegnir ditte malvasie et moscatelle tolte da lui et altri mei vini che me acaderano per ditta mea caneva et mantegnir me el magazen et ditte malvasie e simelmente vini che dentro tegnero senza dano alcuno ali offitii de Venesia sopraposti ali vini et io Lunardo sopraditto prometto da restituirli tute le bote che io toro con vini da lui. Jo Lunardtt perckeymer son chonttentto utt supra ».
39 ASV, PSM Misti 41, pergg. (1497).
40 ASV PSM Misti 41, 13.
41 ASV, PSM Misti 42, 20.
42 Deux exemples de contrat d’affinage pour le compte de Michele Foscari : 1) ASV, PSM Misti 42, 14 (1482/8/VI) : « Prometo Piero de Martin da Bergamo e Antonio Bissoja chompagni a miser Michiel Foschari fo di miser Filippo el procurador de afinarli miera zinquanta uno a la fineza de la bola di provededori de chomun pro prexio de ducati tre el mier dagandoli rami da Bornich chon tara de lire quaranta per mier. El pagamento de eser fato veramente in questa forma chel dito miser Michiel le da amphore tre circha de malvassia per ducati vinti l’amphora el resto die li dar tanti chontadi promette dito Piero de Martin e chompagni de dar ditti rami chompidi de afinar per tuto el mexe presente e promete de dar al dito miser Michiel per piezo di ditti rami miser Aluixe Malipiero di miser Jacomo e deli danari e di l’afinadura.
Io Piero di Martin da Bergamo son chontento di quanto e soprascrito
Io Aluixe Malipiero di miser Jacomo son chontento de tuor me constituir piezo di el dito Piero di Martin di rami soprascritti che el dito miser Michiel Foschari dete a lavorar e de idanari el dito li dara
A di dito receve mi Piero di Marti da Bergamo da miser Michiel Foschari pro parte de afinadura di soraditi rami duchati vinti zoe duchati 20 ». 2) Ibid., « 1497 adi 28 april Prometo io Sebastian Donini a miser Michiel Foscari fo de miser Filippo el procholator de chomprar miera 10 di rami e piu mancho di quelo i parera de la sorta a purgar de ducati 18 el mier abiando el mio calo segondo el costum e diebo li ttuor botti di malvaxie a rason de ducati 16 lanfora el resto stante contadi e diebo darli i diti rami compidi de tutto quelo i achadera per tuto ziugno prosimo che mo vien
Scripto da Sebastian Donini chaldarer Io Sebastian scrissi per suchertta
(au dos, de la main de Michele Foscari) Schrito di Sabastian Donini chaldarer che el me die trar miera 10 di rami lavoradi per ducati 16 el mier li debo dar b. 7 ½ di m (alvasi) a che la mito per ducati 16 l’un lo resto in conto ».
43 ASV, PSM Misti 42, 20 (1496/25/II).
44 Cf. Ph. Braunstein, Guerre, vivres et transports dans le haut-Frioul en 1381, dans Festschrift Herbert Hassinger, Innsbruck, 1977, p. 85-108. Cf. Annexes, III, 9.
45 ASV, PSM Misti 41, pergg. (1491/14/XI).
46 ASV, PSM Misti 42, 17 : dossier d’une quinzaine de petits billets autographes, reconnaissances de dette allemandes. Le transport est prévu en tonneaux ; le délai de paiement est parfois différé d’un an, avec l’indication de la prochaine mise sur le marché (« auf den newen malvasier » ou « wan der neuw malvasier kompt ») ; en voici deux exemples : 1) « ich Andre Prettl burger zu Bruck an der Muer bekenn das ich schuldig worden pin dem miser Michel Foschori burger zu Venedig umb vierghungisch und wanzek gros zoe duc. 41 gr. 20 der glob ich im zu bezallen zu den nachskomenden sans Merteins tag da gib ich zu urkund mein aigne hand geschrifft und mein furgedruckten petschaft in Venedig 1492 adi 10 zener ». 2) L’imprimeur qui s’est engagé pour son propre compte en 1490, rédige en 1495 le billet pour le compte de Jacob Dieffenbrun, « wan er nit schreiben kan » : « Jesus Maria 1490 adi 11 marzo in Venedig Ich Ambrosi Allanse stampador bekenn mit meiner aigner handgeschrifft das ich schuldig pin worden dem edlen miser Michele Fuschari umb malvasia den ich eingehapt hab un dalle stich abgerait das ich mit im zum handel gehapt hab und den malvasier den ich gehapt hab und pin im schuld gepeliben aller stich dug. 20 und 3 gros tutezwainzig duch und trey gros welch ich im versprich zu zallen auf den (blanc) ».
47 Reiserechenbuch des Hans Keller aus den Jahren 1489-1490, éd. A. Bruder, Zeitschrift für die gesamte Staatswissenschaft, 37, 1881, p. 835 : Hans Keller travaille alors pour le compte de Hans Rottengater d’Ulm : il note qu’il a payé quelques vieilles dettes envers Michele Foscari, soit 167 ducats pour de la malvoisie. Hans Keller devient plus tard gestor negotiorum societatis Fugger Udalrici et fratrum : Si I, 622 (1503/2/IX).
48 ASV, PSM Misti 41, 2 ; 42, 13.
49 Cf. comptabilité Tucher : Anton Tuchers Haushaltsbuch, éd. W. Loose, Stuttgart, 1878 (BlV, 134).
50 ASV, PSM Misti 41, 10, 13 ; 44, 20.
51 ASV, PSM Misti 42, 14 (1495) et 17 (1496/1497).
52 ASV, PSM Misti 44, 32 (1504).
53 ASV, PSM Misti 41, 2 : inventaire des épices retrouvées dans le magasin après la mort de Michele Foscari.
54 ASV, PSM Misti 41, 13 (1485) : déclaration de Daniel Coppo : « io vado per el prexente viazo d’Alessandria per far le ttutte fazende del ditto miser Michiel Foschari e per provixion de ttutte sue fazende se fose ben per ducati 25 000 e pui… ».
55 Probable parent du commanditaire de la fameuse « veduta » de Venise, Anton Kolb, ce Nurembergeois a des intérêts dans les mines d’argent et de cuivre de Primiero : il reçoit un sauf-conduit pour se rendre à Venise dans le cadre de la négociation engagée avec le duc d’Autriche après le séquestre des mines et des biens vénitiens à Primiero ; il apparaît aussi à la suite de sa faillite de 1491, comme débiteur d’ hommes d’affaires de premier plan à Venise, les frères Aigel de Nuremberg et le défunt « Zorzi orese » : ASV, Collegio, lettere, 5, f. I (1484/1/IX) ; ASV, Senato Terra IX, f. 101’ (1484/30/VIII) : ob ramina Pauli Colb mercatoris theotonici ; Secreti 32, f. 102 (1484/16/X) : illis qui pretendent habere jus et interesse in raminibus Pauli Colb administrabitur jus et justicia ; Terra XI, f. 93 (1491/9/I m. v.) : « … ducati 250 per i rami el have quondam miser Zorzi et starli a scoder da Polo Cholb marcadante todesco fallito ». Ses armoiries figurent toujours sur la façade du Fondaco.
56 ASV, PSM Misti 44, 31 et 32 ; 44 A, 29.
57 Sur tout ce processus, ASV, PSM Misti 41, 9 (contrat d’achat du cuivre), 41, 10 (pesage), 42, 14 (contrat d’affinage, décompte avec l’affineur), 41, 9 et 44, 32 (paiement à l’affineur), 42, 20 (embarquement sur la galère), 42, 32 (débarquement à Alexandrie), 41, 9 (pesage à Alexandrie), 44 A, 29 (compte de frais à Alexandrie).
58 Le contrat avec l’affineur, cf. note 42, p. 580.
59 AS, PSM Misti 41, 9 (1482/4/VI, 1483/19/IV) ; cf. Annexes, III, 4.
60 ASV, PSM Misti 44, 31 (compte récapitulatif).
61 ASV, PSM Misti 41, 10 (1486/6/II m. v.).
62 ASV, PSM Misti 116-117 A, comm. Alvise Baseggio.
63 ASV, PSM Misti 116, 11 et 12.
64 ASV, Notatorio del Collegio 21, f. 73 (1484/10/XI : Si I, 568.
65 G. von Pöllnitz, Jakob Fugger, Tübingen 1949 ; I, p. 30.
66 M. Jansen, Die Anfänge der Fugger (bis 1494), Studien zur Fuggergeschichte, I, Leipzig 1907, pp. 131-134.
67 Le plus ancien document mettant en relation les Fugger avec Michele Foscari est une lettre de change sans rapport avec le cuivre : elle témoigne d’une probable vente de safran de l’Aquila destiné à Alexandrie. Signée « Rÿgo fucher e fr. Alamani in Venexia » elle porte la marque au trident de la firme : ASV, PSM Misti 42, 16 (1492/31/VII).
68 G. Priuli, Diarii, R.I.S., t. XXIV, part. III, p. 254 ; Ph. Braunstein, Le marché du cuivre à Venise à la fin du Moyen Âge, dans Schwerpunkte der Kupferproduktion und des Kupferhandels in Europa 1500-1650, éd. H. Kellenbenz, Cologne-Vienne, 1977, p. 91-92.
69 Les textes in M. Jansen, o. c., p. 131-134 ; L. Schick, o. c., p. 40.
70 M. Jansen, o. c., p. 82.
71 R. Ehrenberg, Das Zeitalter der Fugger. Geldkapital und Kreditverkehr im 16. Jahrhundert, Iéna, 1922, I, p. 417 ; L. Schick, o. c., p. 60.
72 ASV, Senato Mar 15,f. 46’ (1500/24/XI) ; PSM, Misti 43, 23 (1501/3/I m. v.).
73 ASV, PSM, Misti 41, 13 (1500/29/X) : « essendo ditto comprador obligado farsi segurar si da landar come dal ritorno e questo per segurta del venditor » : le contrat porte sur 600 miers de cuivre. Cf. Annexes, III, 5.
74 ASV, PSM, Misti 42, 14 (1495/ 1 et 9/VIII, 29/IX).
75 À partir de L. Schick, o. c. ; F. Dobel, Der Fuggerbergbau und -Handel in Ungarn, dans Zeitschrift des historischen Vereins für Schwaben und Neuburg, 6, 1879 ; Id., Über den Bergbau und Handel der Jacob und Anton Fugger in Kärnten und Tirol (1496-1560), dans Ibid., 9, 1882 ; M. Jansen, Die Anfänge der Fugger, Leipzig, 1904 ; Id., Jacob Fugger der Reiche, Leipzig, 1910, (Studien zur Fuggergeschichte, I et III) ; cf. Ph. Braunstein, Le marché du cuivre… p. 93.
76 C’est ce qui explique sans doute que les Fugger explorent le marché milanais : cf. U. Israel, Fremde aus dem Norden. Transalpine Zuwanderer im spätmittelalterlichen Italien, Tübingen, 2005, p. 86-87.
77 La convention dans M. Jansen, o. c., p. 381-383.
78 R. Ehrenberg, o. c., I, pp. 417-420. On a calculé qu’entre 1495 et 1504 les Fugger ont écoulé à Venise la moitié de la production hongroise de cuivre, soit 3300 tonnes.
79 ASV, PSM, Misti 41, 13.
80 ASV, PSM Misti 41, 9 et 10 ; 44, 31 et 32.
81 En ces années périlleuses pour les échanges entre Venise et le monde méditerranéen, ce sont près de 4000 tonnes de cuivre tirolien et hongrois qui ont été écoulées par les Fugger à Venise en l’espace de trois ans. Michele Foscari a été l’investisseur le plus avisé. Cf. M. Sanudo, I Diarii, IV, 305 (1502/26/VIII) : « in questo mexe Michele Foscari quondam ser Filippo procurator fece uno marcha de rami per ducati 40.000 a ducati 36 il mier… ».
82 ASV, PSM Misti 43, 139-140 (1500/12/VII) ; 160-163 (1500/12/VIII).
83 ASV, PSM Misti 43, 136-138 (1500/7/XI) : « in pan (6 I/2), verga (7), banda raspa (8), banda larga (9), fil grosso (7) ; fil sotil (9) ».
84 ASV, PSM Misti 43, 160-163 (1500/12/VIII) : « usitti del paexe e andatti in India ».
85 ASV, PSM Misti 43, 173-175 (1502/9/I et 17/I).
86 ASV, PSM Misti 43, 177-179 (1502/30/I) : « mi par chosa nova chel paexe deba consumar puj rami di quelo el suo consuetto che quando ne va m. 800 in 900 e mille ze sufizientte per el paexe ».
87 ASV, PSM Misti 43, 182-183, (1503/24/VI) : « guardar ne in fontego ho per altra via non ne podese venir rami… »« intende ben se prima ne se rami in man d’altri e de todeschi chome de nostri azo non ne venisse quale rami de piu ale spale per eser stadi compradi per avanti… ».
88 ASV, PSM Misti 43, 136-138.
89 ASV, PSM Misti 43, 174-176 (1502/5/ I et 17/I).
90 ASV, PSM Misti 43, 192 (1503/12/III).
91 ASV, PSM Misti 43, 232 : « se ne sara tantti danari chome e sta schritto de qui el sta a pericholo che le merze resta in terra perche moro inttendera a chonttadi e laserà le merze dapo muda perche non sara posibele che 3 galie posi levar il tratto dele merze e da chonttadi ele spezie che xe fatte e se fara ».
92 Dans une lettre à Michele Foscari, l’« Allemand » ne peut être que Jacob Fugg ger : (ASV, PSM Misti 43, 243).
93 ASV, PSM Misti 43, 164 (1502/I/II) : « I mori se governa de presio per la quantità ».
94 En novembre 1500, Daniel Coppo évoque les marchands français, catalans et gênois à Alexandrie : « deventtano matti de chonttratar le sue merzi avantti veni le galie per andar presto adrettura in Aqua Morta per metter le spezie a Lion avantti che se spaze de qui… ».
95 Beaucoup de cannelle, peu de poivre : la moitié de la quantité habituellement mise sur le marché ; en conséquence, on ne pourra traiter « a baratto » : « tutti sera sopra i chontadi » : ASV, PSM Misti 43, 143-146 (1501).
96 ASV, PSM 43, 177-179 (1502/30/I) : « el chonzolo d’Alesandria schrive chel piper era restretto tutto in man de Ametto Bubacho e quelo venderlo per chonto del soldan. Questo mi despiaze molto ne non pottria aver pezor nova perche esendo a questo modo ttenite zertto el piper rezera di chonttadi d. 100 la sportta ».
97 ASV, PSM Misti 43, 221 (1504/27/IX) : « Moro ano tutte ste nove e governasi saviamente che chon gran suma de spezie che se i attrova qui e al Chairo e in Alttor che basteria per ani 3, loro le manttien in gran presi e simel fara ale galie… ».
98 Comme l’explique parfaitement Priuli, la rétention d’épices que pratiquent les marchands du Caire conduit les patrons de la flotte vénitienne à tenter de prolonger la « muda » jusqu’à ce qu’ils cèdent. Le débat fait rage à Venise entre ceux qui ont des marchandises et des sacs de monnaie embarqués et n’ont plus d’épices en magasin et ceux qui ont constitué des stocks de poivre à Venise et espèrent mieux les vendre s’il n’en arrive pas d’Alexandrie : « combateva li magazeni pieni cum li vuoti » : I Diarii, p. 201 (1502/26/III).
99 ASV, PSM Misti 43, 224 (1504/11/V) : « melio serà che le galie non podese metter in terra merze de neuna sortte ne danari gropo neun se prima non fose le ditte spezie fatte in galia… ».
100 ASV, PSM Misti 43, 226-227 (1504/ 10/III) : « in man de marchadantti ne son bon suma ttandem neun ne vol vender se prima non se rompe prezio dele spezie del soldan ; ttamen el « coxa » tegnia de vender el piper a d. 140 la sportta… Tutti che ano spezie le ttien schoxe per dubitto del soldan e per dubitto de le nave d’India che non si posi quele navegar respetto le charavele de Portogal che stano in queli mari d’India… che Dio el sa se le charavele pottra chonttinuar a queli viazi de l’India... Ho visto per lettere de Barzelona fresche venute per via de Zizilia in man del chonsolo de chattalani che dize del eser zonto le 15 charavele e dize dela gran quanttita de piper i ano porttado… quale de Porttogal fara prezio a Venezia… ».
101 Ibid. : « I rami che avi per le ultime galie chusi stano in magazen al Chaiero .. Se ttrovero modo de ttor ttanti zenzeri beledi e garofali io venderia li rami… » Le poivre est sans doute alors plus touché par la crise que des épices chères comme la cannelle ou les clous de girofle, parce que les Portugais ont investi Malabar dès 1500, mais ne prennent Malacca qu’en 1511 : V. Magalhaes-Godinho, L’économie de l’Empire portugais aux XVe et XVIe siècles, Paris 1969, p. 724.
102 ASV, PSM Misti 43, 242 (1504/I/VII) « desidero insir de qui per neser piu tempo de star in sto paexe se le charavele de Porttogal avoria le spezie : sto paexe e governado per man de matti e semo mal trattadi… ».
103 I Diari, p. 197 (1502/13/II) : « pocho se faceva et questo perchè principiava a manchar le marchadanti todeschi e de Alemagna che solevanno a comprar a Venetia le speterie » ; p. 221 (1502/12/VIII) : « la fiera di Todeschi in fontego fece pochissime facende… e solum fu levato piper cargi 257 a ducati 94 el cargo » ; p. 282 (1503/10/VIII) : la fiera consueta dei Todeschi a Venetia fece molto poco et questo perche Todeschi non volevano comprar stante li priexi grandi che corevanno et li marchadanti veneti non volevano chalar de prexio cum sit ch’el se atrovava pochissima quantitate de spetie… non compravanno salvo quanto stretamente aveanno de bisogno : tamen fu roto priexio, piper a ducati 80 el cargo… perchè li marchadanti veneti heranno molto desiderossi de vendere… in ultima, che fo al 7 et 8 di questo, li Todeschi comproronno da chargi zercha 70 di piper in tuto a ducati 88 el cargo et do miera di zenzeri blanco a ducati 10 I/2 in 11, noxe libre 7000 a grosi 5 la libra, garofani libre 9000 a grosi 10 ¼ in 10 ½… Questo viazo di Portogallo novamente dele spetie de l’India a facto maggior damno a la citade venetta cha tutte le guere passate ».
104 ASV, PSM Misti 41, 13 (1500/29/X) ; cf. Annexes, III, 5.
105 ASV, PSM Misti 41, 9 (1502/ 15/XII, 1502/18/XII, 1502/29/XII, 1503/19/I).
106 ASV, PSM Misti 41, 9 (1502/19/XII).
107 ASV, PSM Misti 42, 20 (1501/5/II).
108 ASV, PSM Misti 41, 9 : contrat de nolis avec le capitaine, Sebastian Moro, et les patrons des galères d’Alexandrie pour 1000 miers de cuivre (1502/17/VIII) ; cf. Annexes, III, 6 et 7 ; on dispose de toutes les fiches de pesage et d’embarquement du cuivre (1.081.313 livres poids) réparti entre les cinq navires.
109 ASV, PSM Misti 44, 31 : livret de comptes de Daniel Coppo, qui détaille les 20 ventes de cuivre à des Alexandrins, les 17 achats de poivre, les 6 achats de clous de girofle, les 4 achats de cannelle et les 3 achats de gingembre effectués pour le compte de son patron. Une partie du poivre est vendue sur place à des Vénitiens, qu’il s’agisse d’arrangements comptables ou d’opérations rémunératrices, mais l’essentiel est embarqué pour Venise. On sait que sont arrivés officiellement à Venise 2630 « colli » d’épices en 1501, mais seulement 1000 en 1502 et 945 en 1503 : « pocha roba » dit Priuli, qui donne les prix : la « sporta » de poivre à 140 ducats : I Diarii, p. 207 ; cf. V. Magalhaes-Godinho, o. c., p. 717.
110 ASV, PSM Misti 42, 14 : 1503/4/I, 1503/7/I, 1503/20/II : Michele Foscari se déclare garant et s’engage à payer dans l’année les achats qu’il a fait au nom de Jacob Fugger.
111 ASV, PSM Misti 42, 14 : « prometo io Michiel Foschari fo del M° m. Fillipo el proc° al M° miser Rigo Focher e fradelli dar e pagar ad ogni lor piazer duc. 2757 d. 14 i qual son pro resto dachordo fin questo zorno… di ogni chaxon abiamo auto insieme fin asto zorno per secureza… » ; (au dos) « pagi adi 14 hot. 1504 pro resto di hogni raxon duc. 486 d.10 ».
112 ASV, PSM Misti 43, 23 (1504/24 et 26/IV) : deux lettres adressées par un de ses commis à Michele Foscari, qui réside alors à Padoue, laissent entendre qu’il est moins attentif au marché et laisse passer les occasions de profit : faute d’un transfert d’argent à Alexandrie par les banques Pisani et Agostini, Foscari qui espérait acheter du poivre à 90 ducats a laissé les « bazariotes » en vendre à d’autres à 89 ; il croit pouvoir vendre le sien à 92 ou 93 ducats, mais à ce prix, lui dit-on, il n’y a pas de demande. Quant aux noix de muscade, il en voulait 5 ¾, ce qui est devenu impossible : un mois plus tôt, il en aurait eu 6 avec les Fugger ; il aurait aussi pu vendre aux Fugger les clous de girofle à 15 ducats, mais on a attendu en vain un ordre de sa part.
Ce sont les dernières mentions des Fugger dans les dossiers Foscari. En septembre 1506, les derniers grands noms d’hommes d’affaires du Fondaco qui apparaissent dans des livraisons d’épices sont ceux des Hirschvogel et des Welser : ASV, PSM Misti 41, 10.
113 J. Strieder, Die Inventur der Firma Fugger von 1526, dans Zeitschrift für die gesamte Staatswirtschaft, Ergänzungsheft 17, 1905, p. 97-99. Cf. Annexes, II, 6
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