Les vieux saints dans les églises romaines XVIe-XVIIIe siècle
p. 13-55
Résumé
À partir des visites apostoliques réalisées entre 1625 et 1630 dans la plupart des églises romaines et de récits comme de guides de voyages, cet article constate le poids de la dévotion aux saints anciens dans la ville moderne, à travers les titulatures des églises, la mémoire des lieux, réactivées par la construction de confessions, ou les rares images sacrées de saints par rapport à la vierge. Les reliques sont le principal signe de leur présence et les lipsanothèques des églises romaines s’enrichissent de dons, de translations, opérées lors des découvertes dans les catacombes comme lors de travaux dans les églises alors en plein chantier. Il s’attache à définir leur présence différentielle selon la nature des églises, leurs emplacements dans ou sur certains autels comme dans les sacristies. Il analyse leur présentation par des listes pariétales ou des expositions temporaires sur des ambons. Il montre enfin que les visiteurs dessinent à travers leurs injonctions une politique qui oscille entre exigence de décence, de sécurisation, de conservation, d’identification et de visibilité des reliques.
Texte intégral
1L’historiographie actuelle tend à valoriser la modernité de la Rome tridentine des XVI-XVIIIe siècles, qui développe une bureaucratie efficace, encourage missions et enseignements auprès des fidèles, canonise des saints contemporains (Ignace, Thérèse), et se couvre d’un blanc manteau d’églises d’un style nouveau, classique et baroque1. Animée de cérémonies qui répercutent les évènements malheureux ou triomphants de la catholicité, la ville serait le « sismographe » de l’époque, une cité à l’écoute du monde et ouverte sur l’universel2. Il serait tentant alors d’y faire du passé table rase, de bâtir du chrétien sur du païen, de détruire la vieille basilique constantinienne pour édifier l’actuelle dont la coupole moderne écrase l’antique Panthéon, de transformer le nom de l’église dédiée à saint Paul en Santa Maria della Vittoria, pour célébrer la victoire de la Montagne Blanche.
2Pourtant ce chantier romain fut également un conservatoire dont on exhuma des ruines et des œuvres de l’antiquité païenne comme des obélisques et des statues, mais aussi les reliques des saints martyrs des origines. L’Antiquité à Rome n’est donc pas caduque. C’est que dans l’affrontement entre catholiques et protestants, les origines sont un enjeu. Au nom de l’argument de continuité apostolique et de possession imprescriptible, Rome entend avoir l’histoire pour elle, comme en témoignent les Annales de Baronius et la publication du martyrologe romain3. Ces entreprises apologétiques et érudites ont non seulement mobilisé les vieux grimoires, mais aussi les témoignages matériels, constituant ainsi une sorte d’archéologie de l’archéologie. L’historiographie a notamment pointé la découverte de catacombes en 1578 et tout le travail d’excavation d’une Rome souterraine qui est, comme écrit joliment Gérard Labrot, une plongée dans l’enfance chrétienne de la ville et du monde4. Au-delà de leur signification mémorielle, celles-ci ont aussi alimenté un commerce et une circulation de reliques pour fournir les lipsanothèques des princes ou les trésors des sanctuaires européens5.
3Dans ce paysage romain, il ne faudrait cependant pas que ce qu’on exhume occulte ce qui est là, présent parfois depuis des siècles : les collections de reliques des églises de la Ville éternelle. Reliques et églises font corps au point qu’en 1520 l’abbé de Clairvaux emploie le terme de « sanctuaires » pour désigner les têtes de saint Pierre ou de saint Paul6. Ces restes sacrés sont loin d’être inertes et empoussiérés. Ces legs du passé ont une vie présente. Leur éternité passe par l’activité qui les entoure et les anime comme par la publication de livres aux titres évocateurs qui associent Rome et reliques7. Ainsi dans sa Guida romana per li forestieri, parue en 1637 et intitulée Ristretto delle grandezze di Roma, Pompilio Totti dresse des listes d’églises (353 dans les 14 quartiers ou rioni), des catalogues de reliques et de fêtes offrant indulgences plénières. Après l’énumération de tant de saints, qui pourrait douter de la légitimité de la possession par Rome du titre de « ville sainte » ?
4Les églises romaines sont autant de traces, mémorielle, reliquaire, cultuelle des vieux saints en même temps que des jalons essentiels qui structurent les itinéraires comme les descriptions de la cité. Il eût été possible d’analyser les publications hagiographiques qui loin de ne servir qu’à alimenter la fabrication de nouvelles réputations de sainteté entretiennent aussi la mémoire des anciennes, comme Jean-Michel Sallmann l’a montré pour Naples ou comme l’atteste par exemple l’édition romaine d’une Vita di santa Bibiana vergine e martire romana en 1627 par Domenico Fedini. Nous avons préféré nous focaliser sur la maison de Dieu en exploitant systématiquement et quantitativement deux sources8.
5La plus ancienne est un ensemble d’archives, constitué de trois volumes totalisant environ 1200 folios en latin et conservé à l’Archivio segreto vaticano9. Il s’agit des visites apostoliques réclamées par le pape entre 1625 et 1630 et réalisées dans toutes les églises romaines. Les rapports ont été globalement classés par types d’église : les basiliques et paroisses (volume 2), les églises des ordres masculins et féminins (volume 3), les églises des confréries, des collèges, des hôpitaux et les églises simples (volumes 3 et 4). Typologie assez complexe et parfois imprécise dans la mesure où un ordre ou une congrégation prend parfois en charge une église paroissiale et que le volume 4, en théorie consacré aux églises de confréries et d’hôpitaux, contient des églises conventuelles. Mais au total, nous avons dénombré 94 églises, basiliques ou paroissiales (33 %), 61 églises de communautés masculines (21 %), 35 de communautés féminines (12 %), 65 églises dévolues à des hôpitaux ou des confréries (23 %) et enfin 33 oratoires, chapelles ou églises simples (11 %).
6L’inspection des églises romaines n’est pas une pratique post-conciliaire. En 1529, 25 d’entre elles avaient déjà été visitées et de nouveau 82 en 153510. Pie IV et Charles Borromée ont ordonné dans la foulée du concile au cardinal vicaire Giacomo Savelli d’en réaliser. 93 édifices furent ainsi inspectés en 1564. Il y eut d’autres visites partielles en 1569, en 1570 et en 157311 ; Sixte Quint les encouragea également12. Tout en renforçant le pouvoir du cardinal vicaire, Pie V est cependant le premier pontife à avoir entrepris personnellement d’en accomplir en 1568 et Clément VIII visita lui-même 27 églises en personne entre 1592 et 160013. Ce pape jeta aussi les bases en 1592 d’une commission, la Congregazione della visita apostolica d’où émanent nos sources14. Cette institution confère aux inspections ordonnées par Urbain VIII une ampleur sans précédent, car elles sont systématiquement et méticuleusement consignées. Elles permettent une photographie globale de 278 églises romaines en cette fin du premier quart du XVIIe siècle, alors que nombre d’entre elles ont déjà été construites ou ont fait l’objet d’une rénovation. Or dès Clément VIII, il a été demandé aux visiteurs de prêter attention au nom, à la fides, tout à la fois l’authenticité et à la confiance, au lieu, au mode de conservation (quomodo asserventur), à la garde, à l’exposition et à l’ostension des reliques qui constituent un support majeur de la présence des saints15.
7 L’autre source utilisée est un livre imprimé de Ridolfino Venuti, paru à Rome en 1766 intitulé Accurata e succinta descrizione topografica e istorica di Roma moderna. Ce guide savant présente les écoles, les palais, les places, mais aussi les églises… de chaque quartier (rione) de Rome16. Nous en avons recensé 345 (sans tenir compte des églises de collèges) et répertorié tout ce qui y concernait les vieux saints au siècle de l’Illuminismo. En sachant que les églises ne sont pas les seuls lieux de conservation des reliques, puisque certains collèges et certains palais en possèdent. On peut en voir aujourd’hui dans la chapelle du palais Doria Pamphili ; Venuti signale que le palais San Marco possède au XVIIIe siècle une image miraculeuse de la Vierge tandis que Totti rappelle que le palais Altemps abrite une chapelle dédiée à saint Anicet17.
8Muni de ces sources propices au traitement quantitatif et de quelques témoignages de voyageurs ou de guides ad usum peregrini, il nous est possible de cerner la mémoire des vieux saints que transmettent les églises romaines, la localisation et la dévotion des reliques dans l’espace urbain et ecclésial et enfin la politique des reliques que les autorités promeuvent.
La mémoire des vieux saints dans les édifices religieux romains
9Les édifices religieux sont des médiateurs de la mémoire des saints, par leur titulature, par la mémoire du lieu où elles sont construites, par les restes qu’elles peuvent abriter et les images qu’elles contiennent.
Le goût des titulatures anciennes dans la Rome moderne
10Un guide anonyme de 1588 offre aux voyageurs l’image d’un saint en face de nombreuses descriptions d’églises romaines18. Leur titulature y fait souvent référence comme le montre le tableau 1 établi à partir de l’analyse du nom des 345 églises mentionnées chez Ridolfino Venuti.
11Dans la toponymie ecclésiale de la Rome moderne dessinée par la littérature érudite du temps, les saints des origines chrétiennes, pour la plupart des martyrs, auxquels il faut ajouter les apôtres, écrasent littéralement de leur présence nominale non seulement le Christ et la Sainte Famille, à l’exception de la Vierge, mais plus encore les saints médiévaux et modernes. 79 saints et 22 saintes donnent leur nom à des églises romaines. Pour une sainte issue des temps modernes, Thérèse, l’Antiquité offre 18 saintes martyres. En tête des saints et des saintes les plus fréquents dans les titulatures viennent saint Laurent et saint Nicolas, avec chacun sept églises, puis saint Blaise avec six églises, sainte Lucie avec quatre églises et enfin, avec trois églises chacun, saint Cosme et Damien, saint Sébastien, saint Julien, saint Grégoire, saint Sylvestre, sainte Catherine de Sienne et saint François d’Assise.
Tabl. 1 – Les titulatures des églises romaines d’après l’ouvrage de R. Venuti (1766).
Catégorie | Nombre d’églises | dont |
Christ et sa famille | 122 | Christ : 21 Vierge : 79 Trinité, Saint Esprit : 7 |
Anges archanges | 4 | |
Apôtres et personnages évangéliques | 58 | Jean Baptiste et Jean Évangéliste : 15 Pierre et Paul : 9 André : 9 Marie Madeleine : 3 |
Saints | 161 | 77 saints antiques 19 saints médiévaux* 7 saints modernes** |
Total | 345 |
12Cette omniprésence des titulatures antiques est bien évidemment liée à l’héritage patrimonial légué par l’Église primitive et le Moyen Âge. Mais le goût pour les titulatures de saints anciens persiste à l’époque moderne. Entre le XVe siècle et le XVIIIe siècle, Ridolfino Venuti signale pas moins de 83 nouvelles églises, qui sont des fondations et non pas des restaurations. Dans cette série de sanctuaires contemporains, progresse, par rapport à l’ensemble des titulatures, la référence à la Vierge (vingt), au Christ et à saint Joseph, puisque au total 47 nouvelles églises sont placées sous leur protection ou celle de la Trinité. Douze édifices sont aussi dédiés aux saints médiévaux et contemporains. Mais vingt églises n’en restent pas moins édifiées en faveur de saints antiques comme Ambroise, Augustin, Denis l’Aréopagite, Athanase, Éloi, Faustin, Isidore, Ildefonse, Onofrio, Ursule, Roch, Pantaléon. Les savetiers (scarpinelli) édifient en 1614 une église Sant’Aniano, en hommage à leur saint patron. Les apôtres en revanche ne suscitent plus guère de constructions nouvelles (trois seulement).
13Cette fidélité maintenue aux vieux saints se remarque aussi dans les changements de titulatures intervenus lorsque de vénérables églises sont confiées à de nouvelles communautés, notamment des confréries. Certes, il arrive que la dévolution d’un lieu sacré à une compagnie entraîne une modernisation du patronage céleste. C’est le cas dans trois cas sur douze modifications repérées dans l’ouvrage de Venuti. Les libraires ont ainsi ajouté à la titulature de Santa Barbara celle de Thomas d’Aquin et de saint Jean de Dieu, leurs saints patrons. De même les Capucins ont redédié à saint Bonaventure en 1575 l’église jusqu’ici dédiée à saint Nicolas19. Et les Polonais qui ont reçu en 1580 l’église San Salvatore l’ont placée sous la protection de saint Stanislas de Pologne. Mais la plupart du temps, le changement ne modifie pas le rapport au temps des origines, seulement le nom du titulaire. L’église San Niccolò est ainsi devenue SS. Cosma e Damiano depuis qu’elle a été confiée aux barbiers en 1440 dont ils sont les saints patrons. L’église Santa Martina, fut confiée en 1588 à la confrérie des peintres, car le pape Sixte Quint avait fait détruire leur église pour agrandir Santa Maria Maggiore : ils accolèrent alors la titulature de leur saint patron, Luc, à Martina20. De même l’église San Giacomo e Martino, aussi appelée San Iacobo d’alto passo e San Anigro, fut confiée aux forgerons et devint l’église Sant’Eligio en 1550, et l’église San Giovanni della Pigna consacrée aux Quarante Martyrs a été dédiée à saint Jean après avoir été confiée en 1587 à la confrérie des pauvres prisonniers21. Dans tous ces cas, on reste dans le vétéro-sanctoral.
Des églises lieux de mémoire
14La Rome chrétienne repose certes sur la Rome païenne, qu’elle semble récupérer et dominer à la manière de ces obélisques surmontés d’une croix. Combien d’églises ont remplacé un temple, des thermes ou le palais d’un des tyrans persécuteurs de chrétiens, comme pour manifester le triomphe de la vraie foi ? Mais certains sanctuaires sont aussi édifiés sur un lieu en rapport étroit avec la vie d’un saint, parce qu’il y a vécu, qu’il y a enseigné, qu’il y a été incarcéré ou qu’il y a été martyrisé. Le fidèle qui se rend à San Lorenzo in Fonte peut voir à l’entrée une inscription lui rappelant qu’ici a été emprisonné saint Laurent, qui y a fait jaillir une source, pour convertir et baptiser Hippolyte22. À San Giovanni in Laterano les fonts sont situés à l’emplacement où Constantin fut guéri de la peste par saint Sylvestre23. Évoquant le lieu où sainte Cécile priait dans son oratoire, où sainte Pudentienne et saint Alexis vécurent chez leurs parents, le prêtre anglais Gregory Martin dit à ses lecteurs en 1581 : « All these places are now Churches, where a good christian hart may at this day feele the warmth of Martyrs blood sheld for the love of our lord and theirs Christ Church »24. Sur les 278 églises des visites apostoliques réalisées sous Urbain VIII, 24 (8,5 %) sont tenues pour des lieux de mémoire de saints (22 anciens, 2 médiévaux). Ces églises mémorielles sont surtout des basiliques, des paroisses et des églises d’ordres masculins. Confréries et ordres féminins sont peu implantés dans ces édifices. Cette conscience mémorielle semble progresser au cours de l’époque moderne puisque sur 345 églises romaines recensées dans Venuti, 44 – soit 12,5 % – sont désormais mentionnées comme des lieux de mémoire hagiographique. Comme si l’essor de la critique historique, loin de désenchanter le monde, avait rénové la mémoire historique des lieux sacrés. Dans la moitié des exemples fournis par Venuti, l’église est édifiée sur la maison paternelle ou sur le lieu où vécut, où fut hébergé, où enseigna et pria le saint, qu’il s’agisse de la maison de saint Alexis ou de sainte Brigitte. Dans les autres cas, la mémoire locale est associée au martyre du saint, à sa sépulture ou à la présence d’un cimetière qui recueillit les restes de nombreux martyrs. Parmi ces 29 églises mémorielles, 6 seulement sont liées totalement ou partiellement à la mémoire de saints médiévaux ou modernes. Grangier de Liverdis voit ainsi en 1661 les oratoires qui ont pris place dans la chambre où moururent Ignace de Loyola et François Borgia, ou dans celle où vécut sainte Catherine25. On ne semble pas cependant alors conserver le lieu d’habitation dans son état, puisqu’il est métamorphosé en chapelle et le fétichisme du lieu est limité comme le montre l’exemple du transfert de la chapelle et de la chambre du capucin Félix de Cantalice, béatifié en 1625, depuis l’endroit où il vécut jusqu’à la nouvelle église des capucins édifiée par Urbain VIII26.
15Un même site peut faire cohabiter des strates mémorielles d’époques différentes. Ainsi Santa Sabina est à la fois édifiée sur la maison paternelle de la sainte et un haut lieu des mémoires dominicaine et franciscaine puisque saint Dominique s’y mortifia et qu’il y rencontra pendant plusieurs jours saint François dans le couvent voisin27. L’évocation mémorielle du lieu étaye le plus souvent la titulature de l’édifice comme à San Benedetto in Piscinula, édifiée là où habita saint Benoît, à Santa Anastasia bâtie sur sa sépulture, comme la basilique San Pietro l’est sur celle de Pierre.
16Cette mémoire des lieux est attestée par la tradition orale, mais aussi par des inscriptions28. Elle fait l’objet d’une rénovation et de débats à l’âge moderne. Le cardinal Reginald Pole aurait fait restaurer la chapelle Domine quo vadis alias Santa Maria in Palmis29. Le pape Urbain VIII a fait exhumer et embellir l’oratoire souterrain de l’église Sant’Urbano alla Caffarella où on dit que Urbain Ier catéchisa et baptisa30. On voit tout le profit que le huitième des Urbain peut tirer de la restauration du premier des papes qui porta ce nom. Sa famille, les Barberini, a aussi une dévotion particulière à saint Sébastien. Le visiteur apostolique se rend le 30 novembre 1626 sur le mont Palatin voir une église en ruine édifiée sur le martyrium du saint31. La vitalité de ces lieux de mémoire se manifeste aussi par les discussions portant sur les traditions. La filiation mémorielle ne relève pas seulement de l’évidence transmise, car la critique met en exergue la multiplicité des traditions. Ainsi certains tiennent que l’église San Lorenzo in Lucina a été édifiée sous Sixte III sur les ruines d’un temple à Junon Lucina. Mais Ridolfino Venuti juge plus probable que l’église fut fondée par santa Lucina, matrone romaine, petite nièce de l’empereur Gallien32. La question est aussi débattue de savoir si saint Pierre fut crucifié sur le site où s’élève San Pietro in Montorio comme l’affirment Baronius, Maffeo Vegio, Ottavio Panciroli, Fioravante Martinelli, Giorgio Porzio ou s’il le fut dans les jardins de Néron comme le dit le vieil Anastase le Bibliothécaire, sur la Via triumphalis comme le pense Onofrio Panvinio ou dans le Borgo comme le croit Flavio Biondo. Pour sa part, Venuti rallie le point de vue de Tiberio Alfarano pour qui le site du martyre est celui de l’inhumation, c’est-à-dire la basilique San Pietro.
17Le lieu de mémoire n’abrite plus forcément les reliques de celui qui l’a marqué de son empreinte. San Salvatore de Pede Pontis repose sur la sépulture de saint Hyacinthe, mais le visiteur constate que l’église n’a aucune relique ni de lui ni d’aucun autre saint. De même, le corps de saint Sébastien n’est pas à San Sebastiano fuori le mura, mais à Sant’Andrea della Valle. Édifiée sur le cimetière de San Callisto qui recueillit les dépouilles d’innombrables martyrs (174000 selon Venuti), San Sebastiano permet d’accéder à ces catacombes dont cependant de nombreux corps de papes et de martyrs ont été enlevés (hodie spoliatum est). Les autels où ont longtemps reposé les reliques ne servent plus qu’à dire des messes33. La tentation est alors grande de vouloir opérer la recharge sacrale de ces lieux mémoriels. Ainsi Grangier de Liverdis signale qu’Innocent X a fait édifier sur la place Navone l’église Sant’Agnese sur le lieu de sa prison et qu’il a envisagé d’y faire transférer les restes de la sainte qui sont à Sant’Agnese fuori le mura34.
18Mais si le lieu de mémoire est vide de tout reste, l’édifice peut lui-même atteindre le statut de relique lorsqu’il est associé à la vie du saint. La collégiale Santa Maria in Via aurait été consacrée à la Vierge par saint Pierre et saint Paul en personne35. Saint Jean, saint Luc, saint Martial y sont passés. À la fin du XVIe siècle, le Français Jacques de Villamont est particulièrement attentif aux édifices construits du temps de Constantin, comme San Pietro, San Giovanni, San Paolo fuori delle mura, Santa Maria Maggiore, San Sebastiano, San Lorenzo et Santa Croce in Gerusalemme fondée sur de la terre du calvaire offerte par sainte Hélène, mère de Constantin36. Grangier de Liverdis pour sa part souligne que saint Pierre a bâti Santa Maria in Trastevere, que San Silvestro a été édifiée par le pape saint Denis, l’église San Sisto par saint Dominique37. Le grenadier planté par saint Dominique à Santa Sabina, le cognassier semé par saint François et dont les fruits portent cinq boutons en hommage aux cinq stigmates reçus par le saint, attestent que le décor monumental, voire végétal, est une trace hagiographique38. Mémoire et reliques se conjuguent alors ensemble.
Les reliques ou l’omniprésence d’un lointain passé
19Un autre support matériel de la mémoire des saints est en effet constitué par les reliques. Certes Rome en possède une très grande diversité, notamment du Christ et de la Vierge ; morceaux de la crèche ou du tombeau, instruments de la Passion (des épines à la croix en passant par l’éponge), sang, lait, larme, sueur, linges divers (des langes au linceul en passant par les ceintures), terres qu’ils foulèrent ou qui recueillirent leurs larmes et leur sang. San Clemente détient une pierre où le Christ fut circoncis39, San Michele e Magno, la branche d’olivier avec laquelle il fut fouetté chez sa grand-mère sainte Anne40, tandis que les bénédictines de Sant’Anna présentent de la terre où le Christ a entendu Ecce homo41. Mais le capital sacré ne s’arrête pas à cette liste fabuleuse de reliques de la sainte famille. Sur 345 églises, Venuti signale que 70 contiennent les restes insignes de vieux saints. À titre de comparaison, chez le même auteur, seules 13 églises sont mentionnées pour posséder des reliques médiévales et 7 pour des reliques modernes. Après les titulatures et les lieux de mémoire, les reliques confirment donc de nouveau le primat des origines dans le sanctoral romain. Encore ne s’agit-il là que d’un ordre de grandeur numérique établi à partir d’un livre imprimé qui ne signale que les plus notables sacralités. Les visites apostoliques permettent d’affiner la présence effective des reliques dans les églises de la Ville éternelle vers 1625-1630.
20Constatons tout d’abord que 89 églises sur 278, soit un tiers des sanctuaires, en sont dépourvus. Sont surtout marqués par cette pénurie les églises simples, les oratoires, les chapelles (29 églises). Mais un cinquième des basiliques, des paroisses, des églises conventuelles, et un tiers des églises de confréries n’en ont pas. Dans une petite quinzaine de cas, cette absence peut se justifier par l’érection récente de l’église comme à Sant’Andrea via Flaminia, Sant’Anna dei Palafrenieri, San Isidro. Mais des fondations nouvelles, comme le Gesù ou Sant’Andrea della Valle, sont très bien dotées alors que de vieux sanctuaires sont sans restes sacrés. L’église du Gesù édifiée en 1575 a vu son autel majeur accueillir des reliques des saints Abundius et Abondantius en 1583 qui y ont été transférées depuis l’église SS. Cosma e Damiano42.
21Cette absence de reliques dans de nombreuses églises souligne la faible corrélation entre titulatures et reliques, mais aussi entre celles-ci et dévotions aux saints. C’est particulièrement manifeste pour les églises dites nationales qui sont loin d’abriter des reliques de leur saint patron. Certes le Collegio Germanico de Sant’Apollinare contient de nombreux restes sacrés venus d’Allemagne, de saint Apollinaire, des os des vierges de Cologne, des reliques des martyrs de la légion thébaine, en provenance de Trêves, et de saint Wolfgang, venant de Ratisbonne43. Mais aucune relique de saint Jean n’est mentionnée à San Giovanni dei Fiorentini ; San Luigi dei Francesi, de son côté, n’a qu’une petite relique de saint Martin, et rien de saint Louis ou de saint Denis. La chapelle Saint-Rémi de cette maison est sans relique de ce saint. Les hôpitaux portugais de Sant’Antonio ou aragonais de Montserrat n’ont aucune sacralité en rapport avec leur titulature, pas plus que l’hôpital San Giacomo des Castillans. Au cours du XVIIe siècle, ces sanctuaires nationaux romains se dotent alors de copies de reliques emblématiques, celle du suaire de Turin chez les Piémontais, du Volto santo chez les Lucquois. Mais souvent accolées à un hôpital, ces églises ne visent pas tant à accueillir des reliques horsaines à Rome qu’à y attirer des pèlerins. Cette carence en reliques vaut pour de nombreux autres lieux que les églises nationales. Ainsi sur 7 sanctuaires placés sous le patronage de saint Laurent, Venuti ne mentionne la présence de restes du saint qu’à San Lorenzo fuori le mura et à San Lorenzo in Lucina. Enfin, la principale relique d’un saint n’est pas forcément dans l’église qui porte son nom. Ainsi Venuti signale que le corps de saint Pèlerin repose dans la basilique San Pietro et non dans l’église placée sous sa titulature.
22Il arrive cependant qu’une insigne relique conduise à désigner le titulaire. On sait que l’église San Pietro in Vincoli porte le nom des chaînes qui servirent à Hérode pour enchaîner le saint, tout comme San Silvestro in Capite fait référence à la détention par ce sanctuaire du chef de saint Jean Baptiste44. Ce phénomène de nomination du tout par une partie reliquaire persiste à l’époque moderne. La confrérie du Saint Suaire érigée en 1537, et qui est savoyarde, édifie à partir de 1605 une église du Santo Sudario qui porte le nom de la copie du suaire de Turin offerte aux confrères par Clément VIII45. La compagnie de tailleurs (sartori) et des fabricants de blousons (giubbonari) s’est installée en 1573 dans une église en ruine jusqu’ici dédiée au saint Sauveur, et la dédie à saint Omobono dont elle possède un bras et qui est leur saint patron.
23Les reliques mentionnées dans les sources consultées des années 1630 (pour 189 des 278 églises) sont principalement celles liées au Christ, à la Vierge ou aux vieux saints : elles se comptent par milliers et parmi elles prédominent les restes des martyrs. Les reliques médiévales et modernes ne sont que quelques dizaines comme l’atteste le tableau 2. Seules 45 églises ont des reliques médiévales et/ou modernes, soit seulement 16 %. Les ordres masculins et féminins sont les institutions les plus enclines à favoriser cette modernisation des lipsanothèques. Alors certes, entre l’ancien et le moderne, joue parfois la réminiscence. Ainsi l’église du Gesù abrite tout à la fois les reliques d’Ignace de Loyola et celle de son homonyme, évêque et martyr d’Antioche. Mais en dissémination et en quantité, les saints de l’Antiquité chrétienne sont d’une écrasante omniprésence.
24Comme pour la Sainte Famille, les restes des saints sont de nature très diverse : restes humains et vestimentaires, mais aussi les instruments du martyre. À SS. Giovanni e Paolo est conservée la pierre sur laquelle furent décapités les deux saints titulaires sur ordre de Julien l’Apostat46.
25Ces collections romaines de reliques ne sont pas un héritage fossilisé. Elles s’étoffent de restes de saints modernes mais aussi vénérables, retrouvés dans les catacombes. La sacristie de l’église San Bernardo alle Terme di Diocleziano s’est enrichie en 1603 de reliques de saint Fabien, qui viennent du cimetière de San Callisto47. À Sant’Agnese fuori le mura, rénovée en 1600 par le cardinal Paolo Sfondrato, aurait été transférée en 1614 une relique de sainte Agnès et de sainte Constantia découvertes dans leur tombeau cette année-là48. Même les églises modernes comme celle du Gesù sont soucieuses d’acquérir des restes des saints martyrs. Ainsi à Santa Maria in Vallicella, les reliques de Papie et Mauro qui reposent sous le maître-autel ont été transférées depuis Sant’Adriano in Foro Boario le 11 février 159049. Ces translations sont une des rares occasions de voir les reliques romaines, plutôt sédentaires, déambuler, car à Rome les fidèles assistent à leurs ostensions plus qu’ils ne processionnent avec elles dans les rues.
26Ces acquisitions sont souvent des dons, manifestant une sorte d’évergétisme. La famille Cenci, dont le palais est à proximité de San Tommaso in Cenci, restaure le juspadronato familial sur l’église en 1575 grâce à l’action de Francesco Cenci qui dote alors le sanctuaire de multiples reliques, dont celles du pape saint Felix50. D’origine florentine, Clément VIII Aldobrandini, donne en 1592 des reliques de saint Proto et saint Giacinto à San Giovanni dei Fiorentini alors qu’elles étaient dans l’église San Salvatore in Ponte Rotto (ou de Pede Pontis). On retrouve un même réflexe patriotique dans la donation par le neveu du duc de Bavière, l’évêque d’Osnabrück, au début du XVIIe siècle d’un reliquaire à l’église San Saba, qui relève du Collegio Germanico51.
27Les cardinaux titulaires sont souvent les principaux bienfaiteurs. Depuis Pie IV, ils sont tenus de restaurer les édifices dont ils portent le titre. Le cardinal Cesio qui fut titulaire de Santa Maria in Portico a remis une relique de sainte Galla52. Le cardinal Baronius titulaire de SS. Nereo, Achilleo et Domitilla a fait le 12 mai 1597 transférer des reliques de ces saints depuis Sant’Adriano in Campo Vaccino où elles étaient placées depuis le XIIIe siècle. Il a aussi fait rénover l’église et peindre une fresque montrant l’histoire de Domitilla, dame romaine53. Mais il a également accordé diverses reliques anciennes – de Nérée, Achille, Flavia, Domitille – comme modernes – de saint Charles Borromée – à Santa Maria in Vallicella54. En 1599, le cardinal Pietro Aldovrandini a demandé la restauration de l’église San Paolo alle tre fontane et ordonné le transfert d’une colonne à laquelle l’on dit que fut lié et décapité le saint55.
28Outre les papes et les cardinaux titulaires, les donateurs sont aussi des religieux ou des membres de confréries. La relique de la sainte éponyme de Santa Eufemia a été offerte par l’évêque de Grossetto, Giulio Sansedoni au début du XVIIe siècle56. S. Eligio de Ferrari a accueilli en 1620 un bras de saint Éloi, venu de France57. Aux somasques de San Biagio in Montecitorio, un prêtre de la congrégation, Angelo Squarcia, a légué en 1613 des reliques qui ont été extraites en 1606 et 1609 des cimetières de Rome et qu’il tenait d’un prêtre romain, Jean de Nobiles58. Sur le Quirinal, l’église San Silvestro s’est enrichie en 1618 des restes d’un moine martyr, saint Placite, offerts par un chevalier de l’ordre de Jérusalem ; l’authentique est de l’évêque de La Valette, donc récente puisque le siège n’a été érigé qu’en 161559. Par cette mention des pourvoyeurs de reliques, le visiteur a le souci de la traçabilité qui permet de garantir l’authenticité. Au total, les visites des années 1625-1630 permettent de repérer 15 collections de reliques enrichies par des apports extérieurs, dont la moitié concerne les églises conventuelles d’ordres masculins. Plus que les religieuses et les clercs séculiers ou les laïcs, les réguliers sont les principaux acteurs et bénéficiaires de ces déplacements.
29Cette générosité se fait parfois au détriment d’autres églises. À Santa Susanna, la sœur du pape Sixte Quint, Camilla Peretti, a fait édifier la chapelle de saint Laurent martyr et l’a pourvue avec l’accord du pontife des corps de saint Genesio et de saint Eleuterio pris à l’église San Giovanni della Pigna. On n’hésite pas non plus à démembrer les corps. En 1580 Grégoire XIII a laissé un bras de saint Grégoire de Nazianze à Santa Maria in Campo Marzio, alors que dans le même temps le corps du saint était transporté à la basilique San Pietro où le pape a fait édifier une chapelle en l’honneur de son saint éponyme60. Les destructions d’église peuvent justifier un déplacement. Dans celle de Santa Dorotea, sur le mur côté évangile se trouve une pierre portant l’empreinte de deux anges qui assistèrent au martyre de saint Pierre. Cette relique était dans une église du Janicule disparue et fut transportée à Santa Dorotea l’année sainte 150061.
30Mais l’enrichissement du capital reliquaire procède aussi souvent de découvertes internes au sanctuaire et non de découvertes dans les catacombes, de dons ou de translations. Les travaux dans les églises sont souvent l’occasion d’extraire des restes de saints qui témoignent alors que Rome est toujours dans Rome. Dans l’église de San Basilio, devenue au XVIe siècle de la Santissima Annunziata, la rénovation de l’autel lors des travaux engagées par les dominicaines en 1566 a permis de découvrir un vieux tabernacle en bois avec des reliques qui ont été déplacées et sont désormais disposées dans une armoire du monastère62. À San Cosme e Damiano en 1582 ont été retrouvés les corps des martyrs Marco, Marcellino, Tranquillino et de Felix II, pape contesté, mais populaire, en raison d’une confusion avec un martyr homonyme63. En 1600, à l’occasion des travaux effectués dans San Giovanni Colavita pour l’année sainte sont découverts les corps de saint Jean Colavita ainsi que les reliques de martyrs, Mario, Marta, Audiface, Abacum, Hippolyte, Taurin, Ercule, qui sont déposés en 1640 sous l’autel majeur64. Aux SS. Stimmate di San Francesco, ainsi nommée après la dévolution de l’église en 1594 à la confrérie des Stigmates de saint François, la rénovation de l’autel a permis de dresser la liste des reliques des Quarante Martyrs qu’il contient et sous le vocable desquels était jadis placée l’église65. En 1624, le cardinal Giovanni Garcia Millini, titulaire des Quattro Coronati fait entamer des recherches pour trouver les dépouilles des saints Severo, Severiano, Carpoforo. Leur découverte donne lieu à la publication par Decio Memmolo en 1625 de son Della vita, chiesa e reliquie de’Santi Quattro Coronati. L’église San Luca e Martina s’est dotée du corps de cette dernière, retrouvé sous le pontificat d’Urbain VIII lors de travaux dans l’église66. Pendant les travaux intervenus sous Clément XIII (1758-1769) dans l’église Santa Maria del Priorato de Malte, a été mise à jour une urne avec une vieille inscription signalant qu’elle contient les restes de saint Abondio et saint Savino67. À SS. Rufina e Seconda, lors de la restauration de l’autel majeur, les corps des deux sœurs sont trouvés dans le sol et sont décemment replacés dans un nouvel autel68. Les réhabilitations matérielles sont donc souvent l’occasion d’une rénovation mémorielle, qui peut se manifester par de grandes cérémonies. L’église Sant’Eustachio abrite sous son autel majeur le corps du saint, celui de son épouse Teopista et de leurs enfants Agapito et Teopisto. Lorsqu’il a été refait à l’initiative du cardinal titulaire, Neri Maria Corsini (1685-1770), celui-ci a replacé avec grande solennité les corps saints.
Les images : compenser les lacunes du passé ou vecteur de l’hagiographique ?
31Dans un monde aujourd’hui saturé d’images, l’historiographie tend à accorder à celles-ci un intérêt et un rôle croissants dans la vie des hommes de jadis. Pourtant, notre enquête sur les églises romaines montre que l’image n’est pas le vecteur de sacralisation le plus employé lorsqu’il s’agit de vieux saints.
32Certes, il y a de multiples tableaux des saints visibles dans les églises, ces représentations rehaussant la présence de leurs reliques, signalant le lieu de mémoire ou suppléant au contraire l’absence de toute trace. Des autels contenant le corps d’une sainte ou d’un saint sont en effet souvent surmontés d’une image d’eux, comme l’autel de sainte Hélène à l’Ara Coeli ou celui de sainte Pétronille à la basilique San Pietro. À San Gregorio, qui est établie sur la maison paternelle du saint pontife éponyme, Baronius a fait réaliser en 1600 une statue de saint Grégoire à proximité de la table-relique sur laquelle il servait les pauvres69. Cette église ne possède toutefois qu’un bras du saint, le corps étant à San Pietro. Mais de nombreux autels, sans relique, présentent également une image de leur titulaire. C’est vrai pour les anciens saints comme dans l’église Santa Agata où l’image de la sainte compense l’absence de ses restes sacrés70. C’est encore plus fréquent pour les saints médiévaux et modernes, dont les reliques sont bien plus rares que les dédicaces d’autels et les représentations. À San Girolamo, la chapelle gentilice des Spada montre une image du bienheureux Guy Spada, compagnon de saint François, dont le corps est cependant à Bologne71. À San Bartolomeo all’isola, les autels de saint François, saint Antoine et saint Charles présentent leur image sans que ce sanctuaire n’ait aucun reste d’eux, ce qui n’empêche nullement la chapelle saint Antoine de recueillir des ex-voto72. Si possible, l’image présentée au-dessus d’un autel doit illustrer le titulaire. À San Lorenzo fuori le mura, le visiteur réclame que dans les deux mois l’image de saint Charles qui surplombe l’autel de saint Romain soit déplacée et remplacée par une représentation de ce dernier73.
33Cependant la présence sacrée des saints se manifeste peu par l’image sainte ou miraculeuse, et peut-être même de moins en moins, ce qui contraste avec une des modalités favorites de la présence mariale. Pour de nombreux autels, comme celui de saint Lambert à Santa Maria dell’Anima, le visiteur mentionne que « pro icona habet imaginem eiusdem santi »74. L’image signale le titulaire sans qu’il y ait dévotion. Les visites apostoliques permettent de recenser les images miraculeuses qui sont signalées soit parce qu’elles sont cernées d’ex-voto, soit parce qu’elles sont couvertes d’un voile, ce qui témoigne d’une vénération. L’image sainte n’est pas faite pour être vue en permanence, mais cachée et montrée en certaines circonstances. Dans 278 églises inspectées vers 1625-1630, on dénombre 76 images de ce type réparties dans 70 églises : 32 % sont des conventuelles masculines, 26 % des églises de confrérie. Les sanctuaires qui étaient les plus dépourvus de reliques, à savoir les églises de confréries et les oratoires, chapelles, églises simples ont des pourcentages de présence d’images vénérées comparables voire supérieurs à ceux des autres catégories de lieux de culte. 79 % des basiliques et paroisses ont des reliques et 21 % ont des images sacrées. À titre de comparaison, alors que seules 13 % des églises simples, oratoires et chapelles ont des reliques, néanmoins 30 % possèdent des images vénérées. L’image sacrée vient donc suppléer une certaine carence en reliques. L’église San Giovanni Battista de’ Genovesi n’a aucun reste de son saint patron et compense cette absence par une image de saint Jean qui est voilée et vénérée. Enfin il faut constater que les images miraculeuses sont pour moitié repérées dans des églises conventuelles, surtout masculines, alors que celles-ci ne représentent que 33 % des églises romaines. L’environnement régulier est le milieu le plus propice à la sacralisation des images.
34Si l’on examine cette iconographie sacrée (tabl. 3), force est de constater que la Vierge est la plus fréquemment vénérée, avec 48 images dont sept ou huit sont réputées avoir été peintes par saint Luc. Mais au début du XVIIe siècle, les saints, avec 22 représentations principalement localisées dans les églises d’ordres masculins et de confréries, ne sont pas absents de cette iconographie sacralisée. Par rapport aux statistiques établies pour les titulatures, les lieux de mémoire ou les collections de reliques, les saints médiévaux et modernes y sont plus nombreux. Si l’on fait abstraction de la Vierge, l’image vénérée est donc le média d’une réputation de sainteté plus récente. En effet, les saints antiques ne sont que six à bénéficier d’images sacrées alors que les seize autres présentent des saints médiévaux (François d’Assise, Élisabeth du Portugal, Bernard) et surtout modernes (François de Paule, Charles Borromée, Ignace, Louis de Gonzague, Philippe Neri, Andrea Avellino). Ces images miraculeuses des saints des origines ne sont cependant pas des traces d’une dévotion révolue. Ainsi celle de saint Sébastien, figuré vieux et barbu, qui se trouve à San Pietro in Vincoli a été invoquée par le peuple de la ville en 1573 lors de la peste75.
35Avec le temps, il semble cependant que le caractère sacré des images soit moins prisé, surtout pour les saints. Dans des églises romaines plus nombreuses au XVIIIe siècle, Venuti ne signale plus que 55 images miraculeuses et vénérées, dont 52 de la Vierge. On pourrait penser que l’auteur est plus réfractaire à la sacralisation des représentations ; il considère avec respect celles de la Vierge. Il faut donc former l’hypothèse que les Romains ont moins de dévotion pour les images de saints, alors qu’ils continuent d’en avoir pour les images mariales, dont certaines se révèlent miraculeuses tout au long de l’âge moderne, en 1536 (celle de l’église Santa Maria del Pianto), en 1556 (Santa Maria dell’Orto), en 1573 (Santa Maria in Posterula), en 1575 (celle de Santa Maria dell’Orazione), en 1620 (Santa Maria della Vittoria), en 1645 (celle de San Rocco) et en 1718 (la Vierge del Pascolo de l’église des Santi Sergio e Bacco)76. Des livres relatent l’histoire de ces trésors mariaux, comme celui de Giuseppe Matraia paru en 1627, Historia della miraculosa imagine della B. Vergine detta S. Maria in Portico. Ces images miraculeuses de la Vierge sont plutôt localisées dans les églises à titulature mariale (30 sur les 53 églises abritant une image), mais pas exclusivement. Cette persistance de l’image virginale miraculeuse contraste avec la raréfaction des images sacrées de saints puisque Venuti n’en signale plus que trois ; une de sainte Agnès, une autre de saint François de Paule et une statue de saint Pierre77. Il est vrai que le Christ lui-même n’est plus le support iconique que d’une seule image ayant provoqué en 1628 un miracle78.
36De l’examen de ces différents indicateurs, il s’avère que les églises romaines de l’âge moderne restent massivement des vecteurs de la mémoire des vieux saints, principalement par les titulatures, le souvenir des lieux où ils vécurent et moururent, et par les innombrables reliques qu’elles conservent. C’est la disposition de celles-ci au sein de l’édifice qu’il s’agit maintenant d’aborder afin de déterminer quelles sont les modalités de leur présence et de contact avec les fidèles.
Disposition des reliques
37Les relations de visites contiennent de longues listes de reliques dont il faut se demander comment elles ont été établies avant d’étudier les lieux de leur conservation et les modes de leur présentation aux fidèles.
La liste entre vestige et vertige
38Chaque visite se conclut par de vertigineuses listes de reliques dont l’énumération fabuleuse provoque un effet merveilleux79. Dans certains cas, le visiteur s’est contenté de recopier des séries de noms déjà établies par les responsables des sanctuaires visités, comme à San Lorenzo in Panisperna où les clarisses lui présentent une liste de reliques contenues dans cinq lieux de l’église et du couvent80. Y apparaît souvent une certaine organisation dans la présentation des sacralités. Cet ordre mêle à la fois une hiérarchie de personnes, établie par rapport à l’antériorité historique – le Christ source de la foi ou le protomomartyr Étienne étant dans des positions privilégiées de l’énumération –, mais aussi définie par rapport au type de saints (les martyrs avant les confesseurs), par rapport à la hiérarchie ecclésiastique (les papes en tête), par rapport au sexe, les saintes passant après les saints. Enfin l’énumération doit tenir compte de la nature des reliques conservées, un corps, une tête, des côtes ou un bras étant plus précieux que des doigts ou que la multitude de fragments (parva frustula) de reliques. Ainsi au Gesù, l’énumération des restes sacrés est avant tout anatomique, comme à San Paolo, où sont inventoriés successivement les chefs, les bras, les croix, le sang, les vêtements enfin81. Chez les franciscains de l’Ara Coeli, viennent en tête les reliques du Christ et de sa mère, puis les têtes, les côtes et les bras82. Dans ces diverses logiques de catalogage, les instruments de supplice (croix, colonne de flagellation, pierre de lapidation ou de décapitation, gril, chaîne) ne servent jamais à hiérarchiser, car ils évoquent moins le saint que ses bourreaux. Eux, plus que le martyr, choisissent le type de tourment létal. La mort égalise donc, quelle que soit la manière dont elle est reçue. Mais mourir en martyr est incontestablement ce qui est le plus valorisé dans les lipsanothèques encombrées de vénérables saints. En effet, l’ordre qui se dégage le plus souvent de ces pieux inventaires est de commencer par le Christ ou la Vierge, puis d’évoquer les apôtres et les papes martyrs, les saints martyrs, puis les confesseurs avant de conclure par les saintes, les martyrs passant avant les vierges. Mais cet idéal type se décline et se combine selon les particularités des différents dépôts reliquaires. À la basilique San Paolo, après les restes de la croix et de saint Paul, sont énumérés les chefs des papes et des martyrs, les bras des apôtres et des confesseurs, les croix des martyrs (en commençant par celle de saint André), le sang, les reliques vestimentaires en commençant par la Vierge, les papes, les martyrs, enfin les femmes martyrisées et les vierges83. Cette typologie se retrouve à San Sebastiano où sont mentionnés les vestiges (marque du pied du Christ quand il dit à Pierre Quo vadis, flèche de Sébastien), puis les chefs de saints papes martyrisés, les martyrs, les vierges puis les bras, puis les autres reliques, les saints passant avant les saintes84. Mais un certain métissage taxinomique caractérise ces classifications.
39Ces inventaires ont parfois été recopiés par le visiteur à partir des plaques murales placées le plus souvent à côté des autels. La liste recopie ici un vestige, se fait transcription d’inscriptions. L’autorité apostolique ne procède pas différemment des voyageurs qui, comme Grangier de Liverdis, indiquent avoir lu des listes placardées ou gravées sur les murs de diverses églises, ainsi à Sant’Alessio, Santa Prassede, San Lorenzo fuori le mura ou San Pietro in Vincoli85. Ces inscriptions peuvent être fort anciennes et attestent des reliques contenues dans un autel, voire dans l’église, sans que l’on soit certain qu’elles y sont toujours. Ainsi à Santa Maria in Cappella ou à Santa Lucia, la liste est établie à partir d’une vieille inscription pariétale placée du côté de l’épître, mais sans qu’on sache où sont les reliques86. L’important est de savoir qu’il y en a eu, qu’elles y sont peut-être toujours, et qu’on pourrait les retrouver. La liste est un lieu de mémoire d’une présence reliquaire parfois devenue invisible et non localisable. Beaucoup de ces inscriptions murales témoignent notamment des reliques établies dans un autel lors de sa consécration. À Santa Maria in Cosmedin, la liste des reliques du maître-autel qui commence par celles du Christ, puis celles des saints papes, saints martyrs, enfin les vierges et martyres, est celle que le pape Calixte II a dressée lors de la consécration de l’autel en 1123 et qu’a mentionnée Baronius87. À San Marco, le visiteur sait en 1627 que l’autel du pape San Marco rénové en 1554 contient des reliques de ce pape par une bulle du vénitien Paul II de 146688. Au total, les visiteurs ont ainsi recopié les inscriptions murales d’une dizaine d’églises.
40Certaines églises dont les plus notoires comme la basilique San Pietro n’ont cependant pas toujours un catalogue de leurs reliques. Comme l’explique Pompilio Totti, leur nombre est si infini dans les grottes vaticanes et dans les autels qu’il est impossible d’en dresser la liste89. L’abondance est indicible et toute liste serait limitation. Leur profusion témoigne que le siège de Pierre est bâti sur la souffrance des martyrs, et illustre une Église triomphante, hier comme demain. La concentration des reliques dans un ou deux lieux facilite la mise en série alors que la dispersion topographique semble réfractaire à l’inventaire. Pour remédier à cette lacune et à cette dispersion, le visiteur a lui-même parfois procédé à l’enquête en fonction de l’ordre topographique dans lequel se présentaient les reliquaires, sans hiérarchie des restes sacrés, comme à San Celso où on le voit déchiffrer les noms sur les reliquaires90. De même à Santa Maria dei Teutonici in Camposanto, il énumère les reliques boîte par boîte, soit à partir de ce qui est inscrit sur celle-ci, mais qui n’est pas toujours visible, soit à partir des authentiques, dont quatre sont en allemand91.
41Enfin, le visiteur fait parfois confiance aux témoignages oraux. À Santa Maria in Campitelli, l’authenticité des reliques inventoriées est attestée par une « antiqua traditione et populi devotione ». À Santa Prisca, il n’y a qu’une vénérable tradition pour attester que le corps de la sainte est dans l’autel92. À San Biagio in Montecitorio, le visiteur se fie aux somasques qui lui ont assuré que les deux vases sous l’autel contenaient des reliques93. Mais ce recours à la coutume orale et au consensus fidelium n’est qu’une solution ultime comme le montre cette remarque extraite de la relation de la visite de Santa Apollonia ; « il y a des reliques sans nom décemment conservées dans la sacristie, mais que ne rien n’authentifie si ce n’est une ancienne tradition »94.
Topographie des reliques
42Les énumérations reliquaires dressées à la fin des relations de visite n’empêchent pas le visiteur d’avoir, au cours de son inspection, mentionné leurs emplacements dans l’édifice sacré. Sur 278 églises, dont seules 189 en détiennent, nous sommes parvenus à établir le dispositif de leur localisation dans 147 établissements (tabl. 4).
43Dans le passage consacré aux reliques dans ses Instructiones fabricae et supellectilis ecclesiasticae de 1577, Charles Borromée ignore totalement les sacristies95. Or dans deux tiers des cas, c’est là que sont conservées tout ou partie des reliques et dans un tiers des églises, elles sont même le lieu exclusif de leur entrepôt. Il y a dans cette mise à l’écart des reliques la manifestation de leur caractère sacré, au sens étymologique du terme. Si les images compensent souvent une absence, les reliques sont des présences retirées dans les sacristies, nullement accessibles et visibles à tout instant puisque avant tout réservées aux clercs. Encore que ces endroits ne soient pas aussi clos qu’on pourrait l’imaginer, car il se trouve alors souvent un gardien pour les faire visiter aux gens de qualité, comme Balthazar Grangier de Liverdis qui entre ainsi au printemps 1661 dans celles de Santa Maria della Vittoria ou de Sant’Andrea della Valle où un cicerone obligeant lui montre les trésors96. Il n’en demeure pas moins que les sacristies sont avant tout des coulisses du spectacle sacré romain dont la scène est l’église, voire les rues. Dans cet espace clos, les reliques peuvent être conservées dans des urnes, des reliquaires de toutes formes, enfermés eux-mêmes dans des armoires ou bien disposés sur des autels. Dans la sacristie de la basilique San Pietro, un luminaire brûle en permanence devant l’armoire des reliques. Mais celles-ci sont aussi sur un autel dédié à saint Lambert et dans une petite chapelle de saint Antoine de Padoue incluse dans la sacristie97. Plusieurs sacristies comme celle de Santa Maria in Ara Coeli disposent d’un luminaire permanent devant les restes sacrés des saints98. Il est le plus souvent financé par la confrérie ou la communauté monastique, mais aussi parfois par des bienfaiteurs, comme le duc de Bavière, qui a légué de quoi alimenter une lumière permanente près du corps de saint Philippe Neri à Santa Maria in Vallicella99.
44Le second lieu principal de conservation des reliques est l’autel et au premier chef le maître-autel, puisque dans un peu plus de la moitié des sanctuaires romains il abrite des reliques, et que dans un tiers des cas, il est même le seul autel à en posséder. Une plaque murale indique souvent leurs noms. Il est en effet rare de « voir » la relique sous le maître-autel. Le dispositif de l’effigie de cire représentant un saint, si familier du touriste romain contemporain, est rare puisqu’il n’apparaît qu’avec la représentation de sainte Catherine de Sienne dans la chapelle du Rosaire de Santa Maria sopra Minerva100. Lorsqu’il y a plusieurs chapelles dans une église, seul un très petit nombre disposent d’un capital reliquaire. Au Gesù, sur dix chapelles, seules trois possèdent des reliques, à SS. Cosma e Damiano, une seule chapelle sur sept en détient et à San Clemente, un seul autel sur quatre, à Santa Maria dell’Anima, une chapelle sur huit. Si la plupart du temps l’autel principal s’impose aux autres autels pour capter les reliques, force est cependant de noter que, dans certaines églises, l’essentiel des restes sacrés est centré dans une chapelle ou un autel autre que le principal. À Santa Pudenziana, si l’autel majeur comporte quelques reliques, le centre du dispositif de conservation et de présentation des sacralités les plus insignes est la chapelle Santa Pudenziana où reposent les restes de 3000 martyrs101. De même à Sant’Andrea della Valle, les Barberini ont fait bâtir en 1616 une somptueuse chapelle pour saint Sébastien, qui abrite une flèche du martyre102.
45Il est parfois difficile d’établir un lien entre présence de reliques et consécration de l’autel. À San Pietro, l’autel de la crucifixion de saint Pierre est un des sept autels non consacrés de la basilique en raison de l’absence de reliques103. Pourtant à San Giovanni in Laterano, l’autel des saintes Rufina et Secunda abrite des reliques, mais n’est pas consacré, ce qui n’empêche pas d’y célébrer104.
46De même est-il difficile de corréler le capital reliquaire d’un autel avec sa titulature. Le plus souvent l’incorporation d’un corps dans l’autel, majeur ou pas, impose la dédicace de l’autel. À Santa Sabina le corps de la sainte est dans l’autel majeur. De même celui de SS. Cosma e Damiano contient les corps des deux saints éponymes. Aux Santi Apostoli, l’autel de sainte Eugénie contient son corps et celui de sa mère, tant il est vrai qu’à Rome, la sainteté des premiers chrétiens est fréquemment affaire de famille105. À San Lorenzo in Panisperna, l’autel de sainte Brigitte abrite ses reliques, le grand autel contient celle de saint Laurent, mais il y a aussi des reliques de ce saint dans l’autel dit du four de saint Laurent. Mais lorsque les reliques ne sont pas incorporées dans l’autel, le lien entre titulature et noms des reliques se relâche.
47Les reliquaires peuvent être conservés sur l’autel, ou surélevés au-dessus de lui dans un tabernacle, voire dans une sorte de galerie comme à San Giovanni in Laterano où il faut une échelle pour y accéder106. Mais les reliques peuvent aussi être dans la proximité de l’autel majeur, dans des armoires, comme dans les fondations récentes du Gesù ou du collège San Francesco di Paola. Elles peuvent aussi être conservées dans des fenestrela adossées ou encastrées aux murs. À Santa Maria in Traspontina, un autel de retro situé dans le chœur présente deux tabernacles à reliques et ce dispositif de l’autel de retro se retrouve aussi à San Martino ai Monti.
48Les reliques sont donc multisites, non seulement parce qu’un même saint peut avoir des reliques disséminées dans différents sanctuaires, mais parce qu’au sein même de ceux-ci, il peut y avoir bi ou multilocalisation. À San Clemente la relique la plus insigne du saint – un bras – est dans la sacristie tandis que l’emplacement (supposé ?) du corps dans l’église est signalé par une plaque. Il semble que les sacristies aient été le lieu privilégié de conservation des chefs et des membres, mais aussi des poussières de reliques ou des reliques sans nom. À Sant’Alessio, le maître-autel qui est au-dessus de la confession d’Alexis contient les corps d’Alexis et de Boniface dont les têtes sont dans l’armoire de la sacristie. À San Giovanni Evangelista dei Bolognesi, les reliquaires sont placés dans des vitrines fermées disposées près de l’autel majeur tandis que les chefs des saints et des saintes sont dans la sacristie107. C’est pour aider les fidèles à se retrouver que Pompilio Totti publie une liste de 56 pages présentant par ordre alphabétique les saints et les lieux où l’on peut trouver leurs reliques. La liste s’efforce de rassembler pour faciliter la dévotion. Tout dévot à saint Blaise, évêque et martyr, sait ainsi qu’il y a six églises au moins qui détiennent ses restes même si l’on ne sait où est son corps108.
49Mais sacristie et autels n’épuisent pas les localisations possibles des reliques dans les églises puisqu’il existe aussi le dispositif des confessions.
Les confessions pour mémoire
50Tandis que l’architecture renaissante et baroque élève des coupoles pour lancer les églises vers les cieux, celles-ci sont aussi aménagées dans leurs tréfonds. Les catacombes sont des lieux souterrains où les chrétiens persécutés ont trouvé refuge, ont organisé la célébration collective du culte, mais ont aussi enterré et célébré les martyrs. Elles témoignent de la naissance dans la souffrance de l’église triomphante, mais aussi de l’ancrage tellurique des sacrements, du culte des images et de celui des saints dans le temps des origines. Un certain nombre de sanctuaires romains ont été édifiés sur des oratoires souterrains, des catacombes, ou des martyrium qui sont autant d’espaces cryptiques placés sous les églises. San Sebastiano sulla via Appia est sur le cimetière de saint Calixte où l’on voit encore les chambrettes où se réfugiaient les fidèles et où reposent 174000 martyrs dont 18 papes selon Jacques de Villamont, 46 pour d’autres auteurs109. Santa Prassede est aussi à proximité d’un cimetière de martyrs, Santa Maria Scala Coeli sur celui de saint Zénon et Santa Maria Maggiore près de celui de San Ciriaco. San Giuseppe est sur une grotte où des martyrs furent incarcérés ou baptisés par saint Pierre ou saint Paul110. Cette superposition ou cette proximité avec des lieux enfouis est soulignée par l’aménagement d’accès. À San Pancrazio, on parvient par un escalier au lieu de décapitation de saint Pancrace, mais le visiteur interdit en 1626 de s’y rendre sans l’accord du cardinal titulaire, car le lieu semble mal entretenu. De fait, lors de son séjour romain en 1661, Grangier de Liverdis ne descend jamais seul, mais accompagné d’un guide dans ces dédales souterrains, dont certains sont même fermés au public, ce qui excite beaucoup les imaginations111. Force est cependant de constater que l’esprit de la Contre-Réforme valorise ces lieux enfouis sous les églises, notamment en rénovant ou en réalisant des confessions112. Elles évoquent au sein même des églises la Roma sotterranea paléochrétienne113. Les visites des années 1626-1630 permettent d’en repérer une quinzaine, exclusivement dans les églises paroissiales ou conventuelles d’hommes et de femmes. Les églises de confréries, d’hôpitaux et les chapelles en sont dépourvues. Pour sa part, Venuti en dénombre dix au XVIIIe siècle, mais qui ne sont pas toujours signalées dans les visites du siècle précédent, de sorte que par cumul des deux sources, on peut établir le nombre de confessions à une vingtaine114. C’est un dispositif ancien de présentation des reliques qui associe le lieu du martyre ou de la sépulture du saint avec l’autel majeur dans un axe vertical. Pour le polygraphe Pompilio Totti, confession est synonyme de martyrium115. Il arrive certes qu’elles aient perdu leurs reliques comme le constate en 1628 le visiteur de San Saba, car le lieu est si humide qu’elles ont été transférées depuis un demi-siècle dans la sacristie116. À San Giorgio in Velabro, les reliques ont aussi disparu117. Mais la plupart du temps, comme à San Pietro, la superposition du tombeau et de l’autel principal illustre l’analogie entre le martyr et le prêtre comme homme du sacrifice de la messe. Cette verticalité est garante de l’immobilité de la doctrine, face aux errances de l’hérésie. Enfin cette verticalité du tombeau, de l’autel et de la coupole unifie aussi la souffrance du passé, le sacrifice du présent et l’espérance de l’éternité céleste.
51Aussi les autorités entendent valoriser ces cryptes ouvertes sous le maître-autel. Venuti rapporte qu’à Sant Alessio e Bonifacio, le cardinal titulaire Francesco de Conti Guidi de Bagni a fait refaire l’autel majeur et établir un escalier pour descendre et rejoindre la chapelle où sont les corps de Boniface, Alexis et de la fondatrice de l’église, sainte Aglaé118. Paul V a fait aménager en 1615 la confession de saint Pierre dans la basilique. À Santa Prisca, le cardinal Benedetto Giustiniani a restauré la confession tandis qu’à Santa Cecilia, c’est le neveu de Benoît XIV, le cardinal Sfondrati qui fait aménager une confession afin de mettre en valeur le corps de sainte Cécile découvert lors de travaux. Sous la tribune de Santa Maria in Cosmedin, la confession en forme de petite basilique abrite le corps de santa Cirilla fille de Decius119. Fermé depuis le XVe siècle, l’accès n’a été rouvert qu’en 1717 par la construction d’un double escalier. À cette occasion, le chanoine et archiprêtre de la collégiale, Giovanni Crescimbeni fit aussi consacrer l’autel de cette confession et y plaça des reliques.
Ostension de reliques
52Enfermés dans les sacristies ou les autels, enfouis dans les confessions, les restes des saints ne sont pas toujours visibles. Recluse dans des boîtes disposées dans des armoires, le plus souvent dans la sacristie, la relique n’est pas un objet banal et familier, accessible et visible quotidiennement même si elle fait l’objet d’un intense commerce. La clôture monastique, particulièrement sévère chez les femmes, renforce encore cette séparation des reliques de la vie quotidienne120. Et lorsque près des autels, des fenestrela existent, la visibilité ne suppose pas le contact. Les images sacrées quant à elles sont le plus souvent voilées, voire enfermées comme à San Paolo, où l’image miraculeuse qui répondit à sainte Brigitte est gardée sous un voile et sous clé pour n’être montrée au peuple qu’aux fêtes121. Enfin, l’accès au trésor reliquaire est parfois interdit aux femmes, comme si elles constituaient un risque de pollution. À San Giovanni in Laterano où sont conservées des reliques de la Passion dans une chapelle appelée du saint des saints, où les fidèles peuvent les toucher, les femmes sont proscrites122. Grangier de Liverdis attribue cette exclusion, non à une quelconque pollution féminine, mais à la responsabilité de Salomé dans la mort de Jean Baptiste123. À Santa Croce in Gerusalemme, l’oratoire dédié à sainte Hélène, qui est sous l’autel majeur, est interdit au sexe féminin, sauf lors de la fête de la dédicace de l’église124. À Santa Prassede, la chapelle qui abrite une colonne de la flagellation du Christ est aussi fermée aux femmes125. Enfin des reliques, qui sont sans nom ne sont jamais montrées comme à Santa Maria in Via126. L’économie de la visibilité des reliquaires repose donc sur la médiation ecclésiale et la coutume.
53La vie des reliques est étroitement associée à celle du calendrier, sans qu’il faille pourtant limiter leur ostension à la fête du saint. La dédicace de tel lieu de culte, la désignation de l’église comme station jubilaire, la Semaine sainte enfin sont autant de circonstances pour déballer les plus insignes pièces d’un trésor ecclésiastique. Les jubilés sont notamment, selon l’expression de Gérard Labrot, l’occasion d’une « levée en masse » des reliques romaines127. Mais dans son guide de 1637, Pompilio Totti offre une liste des fêtes avec indulgences qui atteste que tous les jours il est possible de voir dans la Ville sainte des reliques et de gagner des indulgences128. Prenons Grangier de Liverdis entre décembre 1660 et avril 1661. À Noël, il assiste à Santa Maria Maggiore, véritable Bethléem romaine, à la montre du berceau du Christ présenté dans un tabernacle élevé tandis qu’au même moment, dans la chapelle de Paul V de ce sanctuaire sont présentés sur l’autel majeur six chefs, six bras et d’autres reliquaires. À propos du berceau, il prévient qu’il faut le voir en ce jour « car il n’est pas permis de le montrer » à d’autres moments. Le lendemain, il honore d’autres reliques exposées à San Giovanni in Laterano. Le 27, visitant San Paolo sulla via Ostiense, il peut voir le crucifix qui parla à sainte Brigitte, non parce que c’est son jour d’ostension, mais en raison de la présence d’évêques qui obtiennent l’ouverture de l’armoire. Il reverra pendant son séjour cette relique qui est présentée le premier dimanche de chaque mois.
54Les autels destinés à les montrer sont alors couverts de nappes, de tapis et le luminaire est déployé de manière fastueuse. Un mobilier, voire des éléments d’architecture tels des tabernacles ou des galeries (maeniana) de bois sur un mur latéral, comme à Santa Maria in Campitelli, sont prévus pour permettre cette démonstration de reliques dans les conditions de sécurité et de visibilité requises par l’afflux de pèlerins et de fidèles129. Chez les franciscaines de San Silvestro in Capite, se trouve ainsi en permanence près de l’autel majeur une armoire bien fermée et capitonnée de soie où l’on expose le chef de saint Jean Baptiste au peuple lors de sa fête. Il est ordinairement conservé dans le monastère130. À San Pietro in Vincoli, les chaînes de saint Pierre sont exposées sur un autel des saints liens le jour de sa fête et conservées dans une armoire attenante durant la semaine d’ostension qui suit la fête131. Parfois ce mobilier qui favorise la visibilité des reliques écrase un peu celles-ci, comme le constate Grangier de Liverdis à San Pietro à propos de la chaire de saint Pierre. Le monument somptueux contraste trop avec la modestie de la chaise du prince des apôtres132.
55Dans plusieurs passages de sa Roma sancta parue en 1581, Gregory Martin nous décrit dans plusieurs passages les conditions précises de présentation des reliques aux fidèles comme leurs attentes et leurs gestes. Voir les reliquaires, connaître le nom de ceux qu’ils contiennent, mais aussi établir un contact via leurs chapelets caractérisent ces gestes dévots.
Devant l’autel majeur où les principales reliques sont exposées, un ou deux clercs se trouvent en surplis pour prendre les chapelets de ceux qui voulaient leur faire toucher les reliques et si le nom des reliques n’était pas assez clairement écrit ou ne pouvait être lu par les illettrés, ils les en informaient133. […]
Dans chaque église où des reliques sont conservées et exposées, il existe à cet effet à l’endroit le plus en vue et visible du plus loin, au-dessus de l’autel, une galerie carrée reposant sur quatre piliers de pierre au milieu de laquelle est disposé un tabernacle autour duquel un homme peut marcher. Là sont conservées en partie des reliques et d’autres sont temporairement exposées. Depuis cet emplacement, elles sont exhibées au milieu de luminaires, tandis qu’un évêque ou un prélat de moindre rang, avec sa mitre et sa chape, assisté de deux clercs de chaque côté, revêtus de leur surplis, annoncent au peuple l’un après l’autre, en deux langues, l’un en latin, l’autre en italien, le nom de chaque relique que présente l’évêque134.
56Le visiteur de San Giovanni in Laterano atteste que le jour de Pâques un chanoine de la basilique lit en latin et en langue vulgaire le nom des insignes reliques présentées à la foule135. Le peuple agenouillé écoute dans le silence prononcer le nom de chaque saint. Et si d’aventure l’un n’entend pas, il demande à son voisin136. Et le nom se propage ainsi comme une rumeur d’admiration souligne Gregory Martin, qui constate aussi qu’après le départ des fidèles, les églises sont pleines de tabourets (stooles) ou de grandes pierres apportées par les pèlerins afin de bien voir, « great stones, brought in before to take the advantage of standing higher »137.
57Le témoignage de Montaigne corrobore celui de Gregory Martin. La veille de Pâques, il assiste à la présentation des chefs de saint Paul et de saint Pierre à San Giovanni in Laterano. Depuis un lieu élevé et grillagé, « on dévale contrebas un rideau au derrière duquel sont » les deux têtes, « on les laisse voir le temps de dire un Ave Maria et soudain on remonte le rideau et cela jusqu’à trois fois ». L’opération est répétée à quatre ou cinq reprises par jour138.
58Les rapports de visite apostolique nous éclairent enfin sur la réaction des fidèles devant les bienfaits que procurent les saints. Dans l’église Santa Lucia, l’autel portant le nom de la sainte et un bras reliquaire de celle-ci reçoivent beaucoup d’oblations lors de son exposition139. Les reliques ne sont pas seulement des restes inanimés témoignant de l’antiquité et de l’enracinement de l’Église romaine, mais aussi des objets dotés d’un pouvoir quasi magique associé à la médiation du saint. À San Vito e Modesto, église établie sur un martyrium, une pierre « scélérate » qui a jadis servi à tourmenter des chrétiens est utilisée par les fidèles victimes de morsures de chiens enragés : ils passent dessus dans l’espoir de guérir140. Mais oblations et ex-voto ne se manifestent pas exclusivement à proximité des traces matérielles d’un bienfaiteur. Un simple autel consacré suffit. À San Teodoro, l’autel majeur qui expose un tableau du saint patron est cerné sur le mur de vêtements de petits enfants suspendus. Cette église sans relique ni image miraculeuse attire malgré tout la dévotion et les ex-voto pour des guérisons d’enfants141.
Une politique des reliques
59Les visites enregistrent des informations, comme pour archiver des traces matérielles et mémorielles toujours susceptibles de disparaître avec les outrages du temps ou la malice des hommes. Mais elles ont aussi une fonction disciplinaire, concernant les clercs, les fidèles et l’aménagement des lieux où s’accomplit le culte divin. Dans 47 visites sur 278 (17 %), le visiteur a fait des recommandations impératives invitant les responsables des sanctuaires à corriger l’état de conservation et de présentation des reliques ; ces injonctions ont particulièrement touché les églises paroissiales et les basiliques, alors que le visiteur repère moins d’abus ou laisse plus de latitude aux ordres réguliers et aux confréries142. Un même sanctuaire a pu faire l’objet d’injonctions multiples pour ses reliques, de sorte que nous avons récolté 68 prescriptions qui se répartissent ainsi : 21 concernent la qualité des reliquaires, 15 la décence du lieu de leur conservation, 12 abordent la sûreté des reliques, 12 la question de leur identification, enfin 8 sont relatives à leur visibilité.
60Un premier constat préalable doit être fait. Lorsque la visite constate l’absence de reliques, jamais le visiteur ne réclame leur acquisition, alors qu’il va encourager l’illustration du titulaire en réclamant que l’église Sant’Eligio installe une statue de saint Éloi sur la porte extérieure143 ; de même à San Martinello144. Les visiteurs n’encouragent donc pas un commerce de reliques et ne stimulent pas une concurrence entre les lieux de culte qui en sont dotés et ceux qui en sont dépourvus. Leur préoccupation porte sur l’aménagement de l’existant et du passé, non sur la stimulation à la possession de reliques.
61Quatre mots caractérisent cette police des reliques : décence, identification, sécurité, visibilité.
Décence des reliques
62Une des réclamations les plus courantes est d’obtenir que les reliques soient conservées dans des reliquaires plus décents. Sont en jeu la forme du contenant comme le matériau utilisé. À Santa Maria in Grotta Pinta, il faut remplacer les capsules par des boîtes qui soient au moins en bois doré et munies d’une vitre145. À San Bartolomeo des Bergamasques, les confrères doivent mettre les reliques de l’apôtre Bartolomeo qui sont dans la sacristie dans une boîte d’argent plutôt qu’en bois146. La même demande de remplacement du bois par de l’argent est exprimée à l’hôpital Santa Maria dell’Orto147. Dans la sacristie de San Simone e Jude où sont conservées les reliques de sainte Ursule, l’armoire qui les contient doit être peinte et tapissée de soie148. Le capitonnage des reliquaires, des armoires à reliques comme leur emballement requièrent au moins l’usage de ce tissu.
63Cependant la décence n’est pas seulement liée aux reliquaires, mais aussi à l’emplacement de leur conservation. Cette convenance des lieux concerne tout à la fois leur état matériel, notamment lorsqu’il s’agit de crypte, mais aussi le comportement des fidèles qui les hantent. À San Giuseppe, les autorités sont sommées de rendre accessible aux pèlerins la grotte inondée où est conservée la colonne qui servit à ligoter saint Pierre149. À San Sebastiano, la crypte ouverte à tout vent doit être vitrée et nettoyée. C’est peut-être cet état d’indécence qui conduit le visiteur de San Pancrazio à demander la fermeture du lieu où fut décapité le saint150. Il exige une porte qui est peut-être provisoire puisqu’il réclame que l’autel qui est dans ce souterrain soit doté de candélabres, et l’endroit peint de scènes dévotes. À moins que la décence du lieu ne suppose la limitation du public comme à la basilique San Paolo, où les femmes doivent être interdites d’accéder à la sacristie sans l’autorisation du prieur, qui ne doit l’accorder que pour des motifs raisonnables151. À San Gregorio in Monte Celio, il est déconseillé de laisser entrer dans la sacristie sans autorisation du cardinal vicaire152. L’ouverture au public présente un risque de profanation et de désacralisation.
64De manière paradoxale, la décence du lieu suppose même parfois la limitation des manifestations dévotes des fidèles. À Sant’Andrea della Valle le visiteur demande que dans la chapelle d’Andrea Avellino, les ex-voto, des vêtements d’enfants, ne soient plus admis, mais remplacés par des tables votives (tabellae votivae)153. Une même suggestion est formulée à Santa Bibiana, où les miraculés ont légué des vêtements d’enfants qui pendent autour de l’autel de la sainte et dont le visiteur réclame l’enlèvement154. Dans la chapelle Carcerum Turris, toutes les tables votives près de l’image de la vierge doivent être enlevées et il ne sera plus possible d’en déposer sans l’accord du cardinal vicaire155. Dans ses Instructiones fabricae et supellectilis ecclesiasticae de 1577, Charles Borromée, sans proscrire les ex-voto, réclamait qu’ils soient exposés de manière qui ne soit ni honteuse, ni superstitieuse et ni indécente156. Le concile de Trente dans sa 25e session avait interdit toute vénération reliquaire qui puisse nourrir idolâtrie et superstition.
Identité et identification des reliques
65Les visiteurs veillent à ce qu’aucun culte indu ne soit permis. Cela va sans dire pour les contemporains morts en honneur de sainteté, mais pas encore béatifiés ou canonisés par Rome. Ainsi en 1629 le visiteur s’interroge sur la présence d’une image de Gaétan de Thiène dans le presbyterium derrière l’autel majeur de San Silvestro al Quirinale puisque la procédure de béatification n’a commencé qu’en 1624157. Les visiteurs ne sont pas plus tolérants à l’égard des saints incertains et entendent juguler la propension des contemporains à tenir pour des restes de martyrs tous les ossements anciens. À Santa Maria Scala Coeli, bâtie sur le cimetière de saint Zénon, des os de quatre défunts inconnus ont été trouvés en 1584 lors de la restauration de l’église et placés dans une armoire sous clé. Le visiteur réclame que ces reliques soient replacées dans leur sépulture, car rien n’atteste que l’on est en présence de martyrs158. La terre ne ment peut-être pas, mais il ne s’agit pas d’honorer n’importe qui159. À San Giovanni de Mercato, le scrupule identificatoire va jusqu’à demander que les enveloppes de soie qui contiennent les particules de reliques portent le nom du saint et soient fermées par des sceaux160. Le mot et la chose doivent coïncider, car le faux est une fraude. Cette assignation d’un nom témoigne du désir d’authenticité et de vérité qui travaille l’institution, car le culte des reliques est fondé en vérité.
66Nulle relique ne peut en effet être vénérée si elle n’est pas identifiée. Au début du XVIIe siècle, ce n’est pas la nature de la relique, son caractère extraordinaire (comme la terre avec laquelle Adam fut réalisé par Dieu conservée à San Salvatore in Monte) qui peut interpeller ou rebuter le visiteur, mais son absence d’identité et de traçabilité. Ainsi les reliques extraites des catacombes sont aussitôt emballées et scellées et toute rupture de sceau jette la suspicion sur le contenu. Dans ses Instructiones de 1577, Charles Borromée a demandé que les reliques des saints ne soient pas mélangées, mais bien gardées dans des boîtes distinctes, que les noms soient portés sur les sachets de reliques comme sur les reliquaires, que l’histoire des reliques soit inscrite sur des plaques murales et que les reliques sans nom soient signalées comme étant de saints inconnus161. Mais les visiteurs ne suivent pas forcément Borromée dans toutes ces consignes. À Santa Apollonia, le visiteur demande que les reliques qui sont sans nom ne soient pas exposées en public162. Alors certes, devant l’anonymat et l’inconnu, le visiteur n’est pas toujours aussi intransigeant. À Santa Maria del Sole, deux boîtes de reliques sont suspectes, faute de documents les authentifiant. Le visiteur ne prend cependant aucun décret163. La plupart du temps, plutôt que de proscrire tout culte, il préfère demander une enquête. À l’hôpital Santa Maria des déments, il est demandé aux gouverneurs de l’hôpital de se démener (satagant) pour identifier le nom des reliques de saints inconnus et d’en informer pour confirmation le cardinal vicaire ou la Congrégation des Visites apostoliques164. À Sant’Ivo, une enquête dans les archives est réclamée en 1626 afin de déterminer les noms des saints dont l’église possède les reliques et de faire inscrire leur nom sur les vases reliquaires165. Chez les jésuates de SS. Giovanni e Paolo, l’inventaire des reliques est jugé trop imprécis et le visiteur réclame un livret les décrivant avec soin, qui sera conservé dans l’armoire à reliques de la sacristie166.
67Si les authentiques et les registres permettent l’identification des restes, les autorités souhaitent aussi qu’une inscription visible des noms sur les reliquaires rende public leur contenu. À Santa Maria in Monticelli, les reliques conservées dans le maître-autel sont connues par une pierre gravée qui a été déplacée dans la sacristie. Le visiteur demande à ce qu’on la remette près de l’autel167. Il faut rendre publics les noms des reliques. Dans la même église, concernant un autre autel où certaines sont exposées, l’inspecteur demande que soit faite mention du nom des saints afin que les fidèles les puissent vénérer168. Ce ne sont donc pas tant les restes en soi qui doivent être objet de culte, mais la mémoire du saint dont les reliques ne sont qu’un sémiophore. L’identification participe d’une forme de démagification dans la mesure où elle substitue au magnétisme de l’objet la médiation du nom du saint.
68Cette logique d’identification et de publication des reliques n’est toutefois pas sans se heurter à une exigence tout aussi pressante, celle d’assurer la protection des sacralités.
Sécurité des reliques
69Dans leurs tournées, les visiteurs se sont souvent enquis de savoir qui avait les clés des armoires ou des lieux où étaient entreposées les reliques. Ils ont souvent vérifié que reliquaire, vitrine (fenestrela) et autres armoires étaient bien clos. La crainte des vols est réelle et à Santa Croce, les trois autels de l’oratoire souterrain sont nus à cause de la menace des voleurs, propter latronum periculum169. Aussi ne faut-il pas s’étonner de voir que près de 18 % des exigences des autorités de tutelle concernent la garde des reliques, leur sûreté, afin de les prémunir contre les vols et autres furta sacra. À San Sergio, une armoire fermant bien à clé doit recevoir les trois reliquaires qui sont sur l’autel de Montserrat170. À San Pantaleo, les reliques de la sacristie doivent être gardées dans une armoire fermée171.
70Ce désir de protection peut conduire à un déplacement des reliques vers des lieux plus sécurisés. À Santa Barbara alias San Tommaso, il est demandé de placer les reliques dans des armadium et d’enfermer le tout dans la sacristie172. Il serait cependant erroné de considérer que ce besoin de sécurité conduit à un transfert massif vers les sacristies, dont nous avons vu qu’elles étaient déjà le principal dépôt reliquaire. À Santo Stefano in Piscinula, le visiteur demande que les reliques qui sont dans des boîtes disposées dans le chœur soient mises, soit dans la nef, soit dans la sacristie, dans une armoire ou vitrine, dorée, tapissée de soie et munie de clés173. La protection dépend moins ici du lieu que de la solidité de l’armoire.
Visibilité des reliques
71Entre sécurisation des reliques et publication de leur nom, il est finalement tentant de se demander si la police des reliques privilégie leur mise à l’écart, leur rétention, afin d’éviter leur désacralisation par banalisation, au risque d’inciter à un déclin du culte, ou si elle entend les rendre visibles. Derrière cette politique se dessine le rôle de l’institution ecclésiale dans la disciplinarisation des gestes et la réforme d’une anthropologie des pratiques du croire à l’époque moderne.
72Les hommes du début du XVIe siècle aiment toucher les choses. Cette appréhension tactile est partagée par les clercs, comme dom Edme, abbé de Clairvaux, en voyage en Italie en 1520. Chez les clarisses de Viterbe, il achète des ceintures qu’il fait mettre en contact avec les reliques de sainte Rose, car elles ont le pouvoir de soulager les femmes enceintes. Cet austère prélat réformateur monastique joue ici les intermédiaires pour alimenter en sacralités des femmes mariées. Il rapportera aussi de Rome des reliques de martyrs prises à Santa Anastasia. Près de Subiaco, visitant des lieux de mémoire de saint Benoît, il touche aussi la clochette que le diable rompit dans son combat avec le saint174. Toucher et posséder sont un même besoin. Dans ses Instructiones de 1577, Charles Borromée prévoit aussi que les fidèles puissent par le moyen de verges crochetées hisser leurs rosaires sur les ambons où sont exposées les reliques afin de les mettre en contact avec elles ou leurs reliquaires, ad sacras reliquias vel potius eorum vasa tangenda175. En 1660, dans le baptistère de San Giovanni in Laterano, les fidèles peuvent encore baiser deux pierres qui auraient servi à tourmenter les martyrs176. Cependant les autorités semblent vouloir juguler cet appétit de contact. Elles n’encouragent pas les acquisitions, et en limitant leur toucher, elles participent aussi à une rehiérarchisation du rôle des cinq sens dans la formation des facultés cognitives et affectives, que Robert Mandrou avait déjà décelée pour l’époque moderne. À San Giovanni in Laterano, les laïcs se voient interdire par le visiteur l’accès à l’ambon où sont exposées les reliques sous peine d’excommunication177. Cette prévention contre la perception haptique procède avant tout d’un désir de les protéger contre la pollution profane, contre le vol, mais aussi contre l’usure. Ainsi à Santa Bibiana, la colonne où fut flagellée la sainte doit être cernée d’une grille afin qu’elle ne soit abîmée par le toucher répété des fidèles178. Limiter le contact vise à préserver cet objet sacré et mémoriel. À San Giovanni in Laterano, la Scala Santa qu’emprunta le Christ pour se rendre au prétoire de Pilate est marquée de ses taches de sang dont on empêche l’effacement en interdisant aux fidèles d’y toucher. Or c’est une étape majeure du parcours des pèlerins à Rome. À Santa Prassede, Léon X fit aussi enclore une pierre encore rougie du sang des martyrs tandis qu’à San Pietro, les colonnes du temple de Salomon, contre lesquelles le Christ s’appuya, sont cernées de grilles métalliques afin d’éviter leur abrasion sous l’effet des gestes de fidèles, même si ce geste a parfois guéri des malades. Il ne s’agit pas de défendre à Dieu de faire des miracles – comment du reste une grille pourrait-elle l’arrêter ? – mais de juguler l’effet abrasif du toucher sur une relique mémorielle179. C’est moins le toucher que ses conséquences néfastes sur l’objet sacré qui est en jeu. Ainsi, jamais le visiteur n’interdit de goûter l’eau des fontaines miraculeuses de Santa Maria in Trastevere ou de San Paolo. Cette mise à distance et cette clôture sont un moyen de les prémunir contre les bousculades des foules pérégrines animées par une piété panique qui a pu être constatée lors du jubilé de 1625. La mise à distance visuelle est donc un moyen de protection. Le marquis de Seignelay note en 1671 que les reliques montrées à la basilique San Pietro le sont depuis des balcons que Le Bernin a fait établir dans les piliers qui supportent la coupole afin que « personne ne puisse voir ces reliques de plus près, sous peine d’excommunication », hormis les chanoines180. Si les reliques ne sont pas si facilement accessibles, elles sont lisibles à travers les plaques murales ou les listes qui, loin de demeurer confinées dans les relations de visites, s’étalent dans les guides imprimés181. Grangier de Liverdis signale ainsi qu’à San Giovanni in Laterano, le catalogue des reliques qui se montrent à Pâques se lit sur la porte182. Elles sont aussi visibles, parfois de loin, à travers les ostensions et les vitres des reliquaires. Car les gens veulent voir dans le détail. Montaigne est attentif à la couleur du poil des cheveux et de la barbe des chefs de saint Pierre et de saint Paul. Grangier de Liverdis apprécie de voir la tête de sainte Prassede avec sa peau, sa langue, ses yeux et ses lèvres183. Les visiteurs ecclésiastiques n’entendent pas priver les fidèles de cette vue des reliques et leurs décisions témoignent de ce souci de montrer. Ils encouragent ainsi à placer les reliques dans des reliquaires vitrés. À San Lorenzo ad montes, les cendres de saint Laurent sont jugées indécemment conservées. Elles doivent être placées, soit dans un vase d’argent, soit dans un reliquaire doré, bien fermé, mais où l’on puisse voir le contenu184. À San Tommaso in Parione, le visiteur recommande de placer les reliques dans des boîtes munies d’une vitre pour les exposer lors des fêtes185. Voir la relique et son nom est une recommandation fréquente.
73Cette politique de la visibilité implique même parfois de déplacer les reliques pour les disposer dans des lieux plus accessibles et visibles au public. À San Giovanni in Laterano, la table de bois où le Christ prit son dernier repas doit être placée dans un lieu plus visible (conspicuo) et bien enclos (firmiter septio)186. À San Marcellino, le visiteur réclame en 1624 que dans les quatre mois, les reliques conservées sans reliquaire dans la sacristie soient installées dans des boîtes et déplacées vers le sacrarium qui est dans le chœur, derrière le maître-autel. Il abrite en effet quasi toutes les reliques exposées dans l’église et se présente comme une armoire fermée par deux clés détenues par le sacristain et le prieur187. Le rassemblement de la collection, jamais requis en général, est ici conditionné par le désir de ne pas laisser des reliques à l’abandon. Le déplacement vise parfois aussi à extraire les reliques de la clôture monastique comme à Sant’Agnese fuori le mura où le visiteur estime qu’elles sont mal conservées et réclame leur enfermement dans deux reliquaires décents et leur déplacement dans la chapelle de la Vierge située dans l’église188. L’exposition dans un lieu public contraint à la décence de la présentation.
74Cette visualisation des reliques sur laquelle insiste beaucoup Charles Borromée montre le désir de l’Église de répondre à l’attente des fidèles et explique les travaux réalisés dans les églises romaines pour surélever les autels majeurs, comme à Santa Maria Maggiore en 1562 ou pour édifier des édifices à nef unique, sans bas-côté comme à San Marcello (servites) ou à San Silvestro al Quirinale (théatins).
75Notre enquête s’est centrée sur les reliques des saints dans les églises. Elle a négligé les cycles de fresques peints dans les monastères, les tableaux de saints exposés dans les palais, les statues qui ornent les places ou les ponts. Du moins nous permet-elle de souligner que Rome n’est pas un palimpseste dont la modernité s’efforcerait d’effacer l’antiquité. Bien au contraire, la mémoire des vieux saints y est sans cesse ravivée. Une grande partie de la Rome moderne entend édifier du neuf en aménageant la visibilité du passé et en conservant la trace des lieux où il s’est jadis déroulé quelque chose, comme la vie ou le supplice d’un saint. Les collections de reliques ne sont pas des legs sans vie, laissées à l’abandon et enfermées dans des lieux poussiéreux. Au contraire, ceux-ci doivent être décents pour conserver comme pour présenter les plus insignes reliques lors des fêtes, dans de beaux reliquaires vitrés. Cette ostension s’accompagne d’un souci de ne pas profaner en galvaudant l’usage de la relique, afin de ne pas l’exposer à l’usure du temps, afin aussi de préserver cette part de mystère et de secret qui sied au sacré. Loin d’être figées dans un état indépassable, ces collections s’enrichissent de transferts et surtout de découvertes, notamment faites in situ lors de travaux de rénovation. Mais des reliques viennent aussi de la chrétienté enrichir le capital reliquaire de la Ville éternelle dans un mouvement centripète qu’il ne faut pas sous-estimer, même s’il n’a pas la même intensité que le mouvement centrifuge de distribution de reliques des catacombes romaines189. Tout cela fait vivre et aussi circuler du passé, sous forme de reliques, alors que la mobilité est souvent présentée comme un vecteur de modernisation. Ces innombrables martyrs dont il serait vain de dénombrer la totalité attestent que l’Église triomphante a été une Église souffrante, prête, hier comme aujourd’hui, au sacrifice. Ces origines baignées de sang sont un ressourcement pour le présent, moins celui de la croisade (une mystique qui a sombré dans la politique et le commerce), moins celui de la guerre sainte, qui s’épuise même si ces années 1620 sont encore marquées par les guerres de Religion, que par l’élan missionnaire de la Propagation de la Foi qui s’établit en 1622.
Annexe
ANNEXE listes des images vénérées et des reliques des saints médiévaux et modernes
Églises paroissiales
Santa Maria Maggiore : reliques saint Thomas de Canterbury.
Santa Maria in transtyberim : relique de sainte Brigitte.
San Nicolò in Carcere : image de saint Laurent avec ex-voto, statue de saint Laurent avec ex-voto, vêtement de Catherine de Sienne.
San Luigi dei Francesi : cheveu de sainte Élisabeth de Hongrie.
San Nicolò dei Cesarini : relique de saint Charles donnée par Antonio Seneca évêque d’Agnani ; scapulaires de saint François et de sainte Catherine de Sienne.
San Biagio in Campitello : reliques de saint Antoine de Padoue et de saint Pierre Martyr.
Sant’Apollinare (Collegio Germanico jésuite) : reliques de saint Ignace, François Xavier.
Santa Maria in Traspontina : image de saint Charles avec ex-voto.
San Marcello : scapulaire de saint François.
Santa Prassede : Charles Borromée en a été cardinal titulaire. Une chapelle lui est dévolue avec son image et la table où il mangeait. Il a grand afflux et dévotion du peuple.
Sant’Agostino : sang de saint Nicolas de Tolentino dans une chapelle dont il est titulaire et du bienheureux Thomas de Villanova (ce prélat espagnol du XVIe siècle n’est canonisé qu’en 1658).
Sant’Andrea della Fratte : image de François de Paule avec ex-voto.
Santi Apostoli : scapulaire de saint François et relique de saint Antoine de Padoue.
Santa Maria sopra Minerva : corps de sainte Catherine de Sienne. Reliques de saint Dominique et saint Raymond.
San Biagio e San Carlo ai Catinari : reliques de Charles Borromée (sang, mitre, couverture de lit).
Églises conventuelles (ordres masculins)
San Pietro in Vincoli : image de saint Sébastien.
San Paolo in Platea : deux lettres de Borromée.
San Pantaleo : image de Pantaleon avec ex-voto.
Santa Agata transtyberim : saint Antoine de Padoue, tunique de saint François d’Assise.
Sant’Alessio : relique de saint Thomas Canterbury.
Trinité des Monts : image vénérée de saint François de Paule. Il y a des os et des dents de François de Paule venus de Tours.
Santa Maria in Ara Coeli : il y a la portioncule de saint François d’Assise ; reliques de saint Bernardin de Sienne et de saint Louis évêque.
Santa Maria Nova : corps et voile de sainte Françoise romaine avec image d’elle entourée d’ex-voto.
San Silvestro al Quirinale : relique de Andrea Avellino.
San Francesco : statue de saint François d’Assise avec ex-voto ; image de sainte Anne avec ex-voto ; corps de Ludovica Albertoni, morte en 1553.
Santa Maria in Vallicella : corps de saint Philippe Neri ; reliques de saint Charles Borromée.
Gesù : relique de saint Ignace, Bellarmin, François Xavier, François Borgia et de saint Louis de France.
Collegio Romano : image de Louis de Gonzague avec ex-voto.
San Sisto : vêtement de saint Antonin de Florence.
SS. Cosma e Damiano : ceinture de saint François.
Sant’Andrea della Valle : image avec ex-voto d’Andrea Avellino.
San Giovanni e Paolo : reliques de Jean Colombini.
Santa Maria della Scala : relique de sainte Thérèse.
San Salvatore in Lauro : reliques de saint Laurent Giustiniani et de François d’Assise.
Églises conventuelles (ordres féminins)
San Domenico e Sisto : reliques de sainte Catherine de Sienne et de saint Dominique.
Santa Caterina da Siena : reliques de sainte Catherine.
Santo Spirito : reliques de saint François d’Assise et saint Charles Borromée.
San Lorenzo in Panisperna : reliques de sainte Brigitte.
Santa Cecilia : reliques des saints Bernard, Bernardin de Sienne et François de Paule.
Sant’Egidio : reliques de sainte Thérèse.
Sant’Urbano : relique de saint François.
Santa Croce : reliques de saint François et de Charles Borromée ; image vénérée du Christ.
Santa Margherita : reliques des saints Antoine de Padoue, François d’Assise, Bonaventure, Bernardin de Sienne, Raymond.
Santa Marta : reliques des saints Bernard, François de Paule, François d’Assise, Françoise romaine, et du bienheureux Jean Colombini.
Sant’Anna : image de sainte Anne.
Églises de confréries, d’hôpitaux et églises simples
San Filippo Neri : relique de saint Philippe Neri.
San Giuliano in Monte : relique de Borromée.
San Bernardo : image de saint Bernard avec ex-voto.
Santa Maria in Campo Santo : relique de saint François d’Assise.
Sant’Aniano : image vénérée de saint Aniane.
Quaranta Martiri : image vénérée de saint Roch et saint Antoine.
Santa Bibiana : image vénérée de sainte Viviane.
San Giovanni Battista dei Genovesi : image vénérée de saint Jean Baptiste.
Église des Stigmates de saint François : image vénérée des stigmates.
Hôpital Sant’Antonio de Padua : image de sainte Élisabeth du Portugal.
Hôpital San Rocco : image vénérée de saint Roch et relique de sainte Catherine de Sienne.
Hôpital Santa Maria dell’Orto : image vénérée de saint François.
Hôpital Santa Maria della Pietà : relique de saint Philippe Neri.
San Girolamo della carità : images vénérées de saint Charles Borromée et saint Philippe Neri ; reliques des deux saints.
Hôpital Sant’Ambrogio e San Carlo : trois reliques de saint Charles Borromée.
Notes de bas de page
1 Sur les saints canonisés à l’époque moderne, Burke 1988. Sur les églises romaines, 17 édifiées au XVe, 45 dont 9 reconstructions au XVIe, 81 au XVIIe siècle dont 8 reconstructions, et 43 constructions au XVIIIe siècle, voir Armellini 1891a et Buchswiecki 1967-1974.
2 Labrot 1978, p. 349.
3 Ditchfield 1995.
4 Sur les découvertes notamment de vestiges de la Rome païenne, voir Vacca 1704 (1594), Ghilardi 2010b.
5 Boutry – Fabre – Julia 2009.
6 Évoquant San Giovanni in Laterano, il dit qu’en « ceste église sont les principaux sanctuaires de Rome comme le chef de saint Pierre et de saint Paul », Dom Edme 1850, p. 199.
7 Voir Cose meravigliose 1558. Des églises ont fait dès l’époque l’objet de monographies qui accordent une grande place aux reliques.
8 Iogna-Prat 2006.
9 ASV, Congr. Visita ap., 2, 3, 4 (Acta sacrae visitationis apostolicae sanctitatis domini nostri Urbani VIII).
10 Beggiao 1978, p. 24.
11 Ibid., p. 25, 27.
12 Ibid., p. 18, 30.
13 Ibid., p. 11, n. 38, et p. 69, n. 6.
14 Ibid., p. 47.
15 Ibid., p. 103.
16 Boiteux 2010.
17 Venuti 1766, t. 1, p. 288 ; Totti 1637, p. 46.
18 Labrot 1978, p. 288.
19 Venuti 1766, t. 1, p. 102.
20 ASV, Congr. Visita ap., 4, fol. 285.
21 ASV, Congr. Visita ap., 4, fol. 298v°.
22 ASV, Congr. Visita ap., 4, fol. 84.
23 ASV, Congr. Visita ap., 2, fol. 33.
24 Martin 1969 (1581), p. 43.
25 Grangier de Liverdis 1667, p. 289, 303.
26 Ibid., p. 438.
27 Venuti 1766, t. 2, p. 37.
28 Voir par exemple à San Sebastiano, ASV, v. a. no 2, fol. 82.
29 ASV, Congr. Visita ap., 2, fol. 84.
30 Venuti 1766, t. 2, p. 385.
31 ASV, Congr. Visita ap., 4, fol. 281.
32 Venuti 1766, t. 1, p. 145.
33 ASV, Congr. Visita ap., 2, fol. 82.
34 Grangier de Liverdis 1667, p. 314.
35 Venuti 1766, t. 1, p. 110.
36 de Villamont 1604.
37 Grangier de Liverdis 1667, p. 428, 456.
38 Ibid., p. 367, 430.
39 ASV, Congr. Visita ap., 3, fol. 170v°.
40 ASV, Congr. Visita ap., 3, fol. 149.
41 ASV, Congr. Visita ap., 3, fol. 296v°.
42 ASV, Congr. Visita ap., 3, fol. 127.
43 ASV, Congr. Visita ap., 2, 295v°.
44 Venuti 1766, t. 1, p. 122.
45 Ibid., t. 1, p. 265.
46 Ibid., t. 2, p. 394.
47 ASV, Congr. Visita ap., 3, fol. 138v°.
48 ASV, Congr. Visita ap., 3, fol. 114.
49 ASV, Congr. Visita ap., 3, fol. 107v°.
50 Venuti 1766, t. 1, p. 223.
51 ASV, Congr. Visita ap., 3, fol. 96.
52 ASV, Congr. Visita ap., 2, fol. 429.
53 ASV, Congr. Visita ap., 3, fol. 56. Voir aussi Hertz 1988a, p. 590-620.
54 ASV, Congr. Visita ap., 3, fol. 110v°.
55 Venuti 1766, t. 2, p. 380.
56 ASV, Congr. Visita ap., 3, fol. 376.
57 Totti 1652, p. 161.
58 ASV, Congr. Visita ap., 2, fol. 427.
59 ASV, Congr. Visita ap., 3, fol. 85v°.
60 ASV, Congr. Visita ap., 3, fol. 296.
61 Venuti 1766, t. 1, p. 427.
62 ASV, Congr. Visita ap., 3, fol. 222.
63 Venuti 1766, t. 2, p. 354.
64 Ibid., t. 2, p. 365.
65 ASV, Congr. Visita ap., 4, 105v°.
66 Venuti commet lui aussi la confusion (Venuti 1766, t. 1, p. 352).
67 Ibid., t. 2, p. 373.
68 Ibid., t. 1, p. 8.
69 Grangier de Liverdis 1667, p. 422.
70 ASV, Congr. Visita ap., 3, fol. 190.
71 Grangier de Liverdis 1667, p. 359.
72 ASV, Congr. Visita ap., 3, fol. 190.
73 ASV, Congr. Visita ap., 2, fol. 75.
74 ASV, Congr. Visita ap., 4, fol. 192v°.
75 ASV, Congr. Visita ap., 3, fol. 4.
76 Sauf pour Santa Maria del Orto signalée par ASV, Congr. Visita ap., 4, fol. 240-241v°, les autres informations sur ces images viennent de Venuti 1767.
77 Venuti 1766, t. 1, p. 123, 121, 479.
78 Ibid., p. 204.
79 On trouvera des réflexions stimulantes sur la liste dans Eco 2009.
80 ASV, Congr. Visita ap., 3, fol. 328.
81 ASV, Congr. Visita ap., 2, fol. 72v°.
82 ASV, Congr. Visita ap., 3, fol. 37.
83 ASV, Congr. Visita ap., 2, fol. 72v°.
84 ASV, Congr. Visita ap., 2, fol. 82.
85 Grangier de Liverdis 1667, p. 366, 392, 406, 418.
86 ASV, Congr. Visita ap., 4, fol. 43, 63v°.
87 ASV, Congr. Visita ap., 2, fol. 140.
88 ASV, Congr. Visita ap., 2, fol. 106v°.
89 Totti 1637, p. 8.
90 ASV, Congr. Visita ap., 2, 116v°.
91 ASV, Congr. Visita ap., 4, fol. 51.
92 ASV, Congr. Visita ap., 2, fol. 112.
93 ASV, Congr. Visita ap., 2, fol. 425.
94 ASV, Congr. Visita ap., 3, fol. 301v° : « Habet reliquias innominatas quae retinentur decenter in sacristia nec probantur nisi ex antique traditione ».
95 Charles Borromée 2000 (1577), p. 60-75.
96 Grangier de Liverdis 1667, p. 337.
97 ASV, Congr. Visita ap., 2, fol. 55v°.
98 ASV, Congr. Visita ap., 3, fol. 40.
99 ASV, Congr. Visita ap., 3, fol. 107v°.
100 Grangier de Liverdis 1667, p. 303.
101 ASV, Congr. Visita ap., 3, fol. 73v°.
102 ASV, Congr. Visita ap., 3, fol. 194.
103 « altare nuncupatum crucifixionis s petri est unum ex septem non consecratum absque sanctorum reliquiis », ASV, v. a. no 2, fol. 57.
104 ASV, Congr. Visita ap., 2, fol. 36v°.
105 ASV, Congr. Visita ap., 2, fol. 372.
106 ASV, Congr. Visita ap., 2, fol. 33v°.
107 ASV, Congr. Visita ap., 3, fol. 348.
108 Totti 1637, p. 114-170 pour la liste.
109 de Villamont 1604, p. 34.
110 ASV, Congr. Visita ap., 4, fol. 95v°.
111 Grangier de Liverdis 1667, p. 347, 406, 412, 415.
112 ASV, Congr. Visita ap., 3, fol. 53v°.
113 Hertz 1988b.
114 Santa Cecilia, San Lorenzo fuori le mura, Santa Maria in Cosmedin, Santa Maria in Trastevere, San Pancrazio, San Paolo fuori le mura, Santa Prisca, San Sebastiano fuori le mura, San Silvestro, Santa Susanna, San Pietro, San Pietro in Montorio, Sant’Alessio, San Saba, San Giorgio in Velabro, San Lorenzo Panisperna, Quattro Coronati, San Giovanni in Laterano, Sant’Eustachio, San Martino ai Monti. Grangier de Liverdis en voit aussi une à Sant’Adriano et à Santa Martina.
115 « Confessione che vuol dire l’istesso che martirio », Totti 1637, p. 4.
116 ASV, Congr. Visita ap., 3, fol. 96.
117 ASV, Congr. Visita ap., 4, fol. 141-142.
118 Venuti 1766, t. 2, p. 372.
119 Ibid., p. 368.
120 Dans la moitié des églises relevant d’un ordre féminin, le visiteur est dans l’incapacité de localiser les reliques car elles sont dans l’espace de la clôture.
121 ASV, Congr. Visita ap., 2, fol. 71v.
122 ASV, Congr. Visita ap., 2, fol. 37.
123 Grangier de Liverdis 1667, p. 292.
124 ASV, Congr. Visita ap., 2, fol. 78v°.
125 Grangier de Liverdis 1667, p. 392.
126 ASV, Congr. Visita ap., 2, fol. 333.
127 Labrot 1978, p. 168.
128 Totti 1637, p. 171-200.
129 ASV, Congr. Visita ap., 2, fol. 413.
130 ASV, Congr. Visita ap., 3, fol. 240.
131 ASV, Congr. Visita ap., 3, fol. 2v°.
132 Grangier de Liverdis 1667, p. 400.
133 « Then at the High aultar before the principal relikes where there stand al the day one or two in surplises to take the beades of them that wil and with them to touche al the relikes : and if the name of the relike be not writtenn though comenly it is, or can not be redde of the ignorant, they also inform them that aske what every relike is. », Martin 1969 (1581), p. 50.
134 « In every Church where these relikes are reserved and shewed there is for this purpose in the place of greatest sight and fardest prospect over an aultar a square loft walled in upon foure pillers al of fayre wrought stone, in the middle xherof is a goodly tabernacle so sette that a man may walke round about. Here are the relikes partly reserved partly brought thither for that day. And from this place they are shewed thus. Lightes round about, a bishope commonly, sometime an inferiour prelate, in his mittre and cope, with two assistantes, on eche side on, in surplice, the one for latin, the other for italian, to pronounce and to tel the people in both languages on after an other what everie relike is which the bishope sheweth. », Martin 1969 (1581), p. 52.
135 ASV, Congr. Visita ap., 2, fol. 34.
136 Martin 1969 (1581), p. 53.
137 Ibid.
138 Montaigne 1983, p. 228-229.
139 ASV, Congr. Visita ap., 4, fol. 42 v°.
140 Venuti 1766, t. 1, p. 45.
141 ASV, Congr. Visita ap., 4, fol. 90.
142 Parmi les paroisses et basiliques, 23 % des églises font l’objet de recommandations et ce pourcentage s’élève à 29 % si l’on calcule par rapport aux seules églises possédant des reliques. Dans les églises de confréries, d’hôpitaux, on est respectivement à 17 % et 24 %. Dans les communautés masculines les pourcentages sont de 18 ou 23 % et chez les femmes entre 6 et 7,5 %.
143 ASV, Congr. Visita ap., 3, fol. 361.
144 ASV, Congr. Visita ap., 3, fol. 365v°.
145 ASV, Congr. Visita ap., 2, fol. 159.
146 ASV, Congr. Visita ap., 4, fol. 303.
147 ASV, Congr. Visita ap., 4, fol. 244v°.
148 « Armarium in quo sacra reliquia sancta Ursula in sacristia asservatur decentius aliqua pictura elaboretur et intus serico circuvestiatur infra duos mensa », ASV, Congr. Visita ap., 2, fol. 211.
149 ASV, Congr. Visita ap., 4, fol. 96.
150 ASV, Congr. Visita ap., 4, fol. 53v°.
151 ASV, Congr. Visita ap., 2, fol. 73.
152 ASV, Congr. Visita ap., 2, fol. 80v°.
153 ASV, Congr. Visita ap., 3, fol. 197.
154 ASV, Congr. Visita ap., 4, fol. 82v°.
155 ASV, Congr. Visita ap., 3, fol. 385v°.
156 Charles Borromée 2000 (1577), p. 74.
157 Ayant su que cette exposition a été autorisée par Paul V, le visiteur autorise son maintien. Plus que cette approbation pontificale, il faut souligner que la visite a lieu en 1629, année de la béatification de Gaétan de Thiène. ASV, Congr. Visita ap., 3, fol. 83 et 86v°. Il faut noter qu’à l’église San Francesco in Trastevere, la présence d’un luminaire permanent sur la tombe d’une religieuse décédée en 1533, Ludovica de Mattei [Ludovica Albertoni], sur laquelle viennent se recueillir les femmes de Rome ne suscite aucune décision du visiteur. ASV, Congr. Visita ap., 3, fol. 87. En 1661, Grangier de Liverdis évoque aussi la dévotion pour une Louise Mathei dans cette église. Il s’agit de Ludovica Albertoni, tertiaire franciscaine qui n’est en fait béatifiée qu’en 1671 par Clément X et dont le tombeau sera orné en 1674 d’une statue du Bernin représentant Ludovica en extase.
158 ASV, Congr. Visita ap., 3, fol. 62.
159 Cette prudence n’est pas réservée aux visiteurs. Lors de la découverte de nombreux ossements dans les thermes de Constance, Flaminio Vacca évoque le débat entre les partisans de restes de martyrs ou de victimes de la peste. Vacca 1704 (1594), p. 19.
160 ASV, Congr. Visita ap., 2, fol. 249.
161 Charles Borromée 2000 (1577), p. 62, 68. Il réclame aussi (p. 75) que les peintures signalent le nom des saints en s’appuyant sur le constat fait par Paulin de Nole (S. Felice natalium carmen, X, 20) : « Martyribus mediam pictis pia nomina signant ». Cette citation et cette injonction étaient aussi celles de Gabriele Paleotti dans son Discorso interno alle imagine sacre et profane. Klein – Zerner 1966, p. 127.
162 « Le reliquie che si conservano dentro del monasterio per essere innominate non s’esponghino in publico », ASV, Congr. Visita ap., 3, fol. 302.
163 ASV, Congr. Visita ap., 4, fol. 94.
164 ASV, Congr. Visita ap., 4, fol. 257v°.
165 ASV, Congr. Visita ap., 2, fol. 272.
166 ASV, Congr. Visita ap., 3, fol. 305.
167 « Quod lapsis ipse in loco congru reponatur. », ASV, Congr. Visita ap., 2, fol. 164.
168 « In tabulis praedicti reliquaris vel subtus desiderantur litteres exprimentes relquias sanctorum ibidem esse positas ut a fidelibus venerari possint. », ASV, v. a. no 2, fol. 164.
169 ASV, Congr. Visita ap., 2, fol. 78v°.
170 ASV, Congr. Visita ap., 2, fol. 432.
171 ASV, Congr. Visita ap., 3, fol. 16.
172 ASV, Congr. Visita ap., 3, fol. 325.
173 ASV, Congr. Visita ap., 2, fol. 178v°. « Pro custodiendis thecis sacrarum reliquiarum aptetur in ecclesia vel in sacristia armarium aut fenestella ornata, sera et clave munita ».
174 Dom Edme 1850, p. 143-235 ; ici, p. 195, 199, 208, 211.
175 Charles Borromée 2000 (1577), p. 68.
176 Grangier de Liverdis 1667, p. 291.
177 ASV, Congr. Visita ap., 2, fol. 43v°.
178 ASV, Congr. Visita ap., 4, fol. 83v°.
179 de Villamont 1604, p. 32, 33, 36.
180 Seignelay 1867 (1671), p. 133.
181 Voir par exemple Panciroli 1600, p. 839 sq.
182 Grangier de Liverdis 1667, p. 297.
183 Ibid., p. 433.
184 ASV, Congr. Visita ap., 2, fol. 270.
185 ASV, Congr. Visita ap., 2, fol. 151v°.
186 ASV, Congr. Visita ap., 2, fol. 43v°.
187 ASV, Congr. Visita ap., 2, fol. 341v°.
188 ASV, Congr. Visita ap., 3, fol. 114.
189 Il est en effet abusif d’affirmer comme l’écrit Gérard Labrot que « tout vient de Rome », Labrot 1978, p. 53.
Auteur
Université Paris I Panthéon-Sorbonne
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