Chapitre 2. La structuration du gouvernement par l’écrit
p. 71-93
Texte intégral
Universitas, civitas : quand l’assemblée se nomme
1La forme matérielle de la documentation ne peut être détachée de son contenu. L’examen lexical des registres peut nous permettre de mieux cerner la façon dont se conçoivent les auteurs de la source délibérative, c’est-à-dire en dernière analyse et au travers des notaires et de leurs commanditaires assemblés, le regard de l’institution sur elle-même.
2Car si nous cherchons bien à saisir les modalités de la vie politique marseillaise et les enjeux qui se nouent autour de l’assemblée du conseil, l’étude du contenu enregistré, des événements et débats relatés dans les abondants registres de délibérations, nécessite d’adopter un point de vue critique sur le langage utilisé par ses acteurs, de déterminer la part d’intentionnalité, de subjectivité comprise dans l’outil qu’ils se sont forgé.
3Notre étude n’a certes pas pour objet la stricte analyse du langage d’un conseil de ville, une thématique qui a récemment fait l’objet de travaux spécifiques. Ces derniers ont mis en évidence, notamment ceux de Caroline Fargeix, l’existence d’une « norme lexicale », avec un vocabulaire des registres rigoureusement choisi, qui participe de l’élaboration d’une « culture consulaire »1. L’examen des termes permet en effet de saisir la rhétorique du pouvoir qui s’articule autour du conseil de Marseille2.
4Dans ce type d’étude, il s’agit ainsi de « savoir lire ce qui est écrit », comme le recommande Jean-Philippe Genet, s’appuyant sur les méthodes de la logométrie – qui mesure toutes les « unités jugés pertinentes du discours » – pour dégager parmi les mots employés par les notaires enregistreurs ceux qui relèvent de la définition de l’autorité municipale et de l’assemblée elle-même3. Nous avons ainsi procédé à un sondage systématique de certains termes significatifs de cette façon, plus ou moins consciente, qu’ont les notaires et leurs commanditaires de parler d’eux-mêmes, dans des écritures à la portée largement administrative.
5Les premiers résultats de l’enquête lexicologique sont parlants. Une des difficultés de cette approche réside précisément en l’absence ou la très grande rareté des expressions et des termes désignant précisément ce que nous appelons l’assemblée, la commune, la communauté ou encore la municipalité4. D’autres termes, comme ceux de conseil, de cité, de cour – consilium, civitas, curia – sont au contraire très présents, mais les réalités et conceptions qu’elles recouvrent sont justement rendues complexes par le fait que ces mots semblent bien désigner alternativement la même institution, ces conseillers qui se réunissent en présence d’un officier comtal pour administrer la ville. Quant au dernier terme institutionnel employé plusieurs fois par séance, celui d’universitas, le plus souvent associé au nom de Marseille – près de 40 % des occurrences, plus de 30 % en association avec à ipsius civitatis, ou autres variantes similaires –, il n’a aucun équivalent en français contemporain.
6La compréhension de cette terminologie désignant la communauté et ses usages peut poser problème. La difficulté conceptuelle et le risque d’aporie teintée d’anachronisme sont grands5. Les termes les plus proches de notre terminologie contemporaine sont ceux de « commune » et de « municipalité ». Le mot de commune ne désigne que trois fois l’institution consulaire marseillaise parmi les 133 séances des années 1348-1349 et 1350-1351. Dans trois autres occurrences, ce terme est employé pour la « commune de Florence », avec laquelle le conseil de Marseille entretient une correspondance6 : le mot comme le concept sont connus et les notaires savent juridiquement faire la différence entre la façon dont ils qualifient leur propre institution municipale et celle de la puissante ville toscane.
7La rareté du terme de commune met par contraste en évidence les quelques occasions furtives où les Marseillais se qualifient ainsi : c’est le cas de l’entrée royale pour laquelle deux conseillers éminents sont chargés de porter le vexillum comunis, l’étendard de la commune7 ; et un peu plus loin, le pape adresse une bulle à ses dilectis filiis consilio et comuni civitatis Massiliensis, formulation qui est volontiers et fidèlement recopiée dans l’enregistrement de la séance8. Elle est en effet significative, à plusieurs titres : par l’identification du conseil et de la commune – équivalents sous sa plume –, l’institution est incarnée par ses membres, les « chers enfants » du souverain pontife. Nous retrouvons ailleurs des manières similaires, dans la correspondance ou ailleurs, de s’adresser au conseil comme à une personne, ou plutôt un ensemble de personnes.
8Quant au terme de municipalité, il n’apparaît qu’une seule fois, sous forme d’adjectif : il est là question des « droits municipaux de ladite ville de Marseille »9. C’est donc là la seule occurrence de l’adjectif, ou de tout autre dérivé ou mot apparenté étymologiquement, – d’où son exclusion de notre tableau logométrique. Le terme n’est pas inconnu, mais pas ou peu utilisé.
9Les deux cas sont donc différents. Le terme de commune est chargé d’une connotation d’autonomie politique, qui rappelle les villes italiennes proches, ou le passé pré-angevin de Marseille ; c’est d’ailleurs ce qui peut justifier l’expression « bannière de la commune », celle-ci n’ayant vraisemblablement pas changé depuis le XIIIe siècle. Les Marseillais en font un usage prudent, ne le reprenant que s’il est d’abord utilisé par une autorité supérieure, le pape dans le cas cité, ou la couronne elle-même. Sa rareté n’est pas anodine, et nous nous inspirons de cette circonspection marseillaise du XIVe siècle pour lui préférer le terme de municipalité, tout en gardant à l’esprit que c’est là un mot contemporain, représentant mal le langage de rédacteurs qui l’ignoraient ou le négligeaient presque totalement.
10En revanche un dérivé, ou plutôt un parent du terme de commune est bien présent, de façon régulière, sous forme de l’adjectif comunis – pour reprendre l’orthographe majoritaire de nos sources. Il est particulièrement fréquent pour l’année 1348-1349, particulièrement agitée par le conflit des sénéchaux, avec une utilisation moyenne toutes les 3,1 séances. Le bien commun, l’utilité commune, sont sous-jacents à la plupart de ses emplois. La formulation suivante en est significative : « pour le bien de ladite cité et de ses citoyens et l’utilité évidente et commune de l’universitas de Marseille »10 ; dans une situation de troubles, la ville, ses citoyens et leur organisation institutionnelle sont mêlés pour former précisément communauté d’intérêts, autour du bien commun, notion dont les implications politiques sont multiples. Si les membres du conseil de ville évitent de qualifier de commune leur municipalité, ils recourent à l’outillage idéologique en cours dans les villes de leur temps, à l’instar des plus grandes communes italiennes11. Cette capacité des Marseillais à s’approprier certaines pratiques et prérogatives d’institutions autonomes tout en conservant la prudente réserve d’une ville sous tutelle comtale et royale, est sensible dans le langage de leurs écrits administratifs.
11D’un point de vue numérique, un terme domine nettement dans les registres, c’est celui de « conseil », à raison de près de dix-sept fois par enregistrement de séance. Ce qui se réunit, se rassemble et délibère, c’est le consilium. Mais comme pour sa traduction en français courant, le mot recouvre de multiples sens complémentaires. L’acception la plus répandue est celle qui donne son titre à chaque enregistrement, ce qui reviendrait à notre terme de « séance » ; in dicto consilio, au sens de « dans cette assemblée ». Par ce terme, les rédacteurs et probablement les membres du conseil entendraient donc réunion, assemblée, dans une utilisation très fréquente et quasi hégémonique.
12Mais on trouve à l’occasion l’idée du conseil en tant qu’avis donné par les conseillers. Le protocole d’enregistrement de la séance du 21 mars 1349 utilise ainsi, pour introduire l’énoncé des décisions prises, la formule :
Selon les opinions et conseils entendus, […] dans ce conseil, de façon concordante et tout ce conseil le voulant, s’ensuivirent les décisions ci-dessous écrites17.
13On peut observer la proximité, dans cette même phrase, de trois acceptions du mot « conseil » :
- l’avis donné par les conseillers et écouté de tous, nuançant dans le sens de « proposition » le terme accolé « d’opinion ».
- le lieu ou la séance, ce que l’on pourrait aussi traduire par « au cours de cette réunion » – in eo.
- l’assemblée des membres, le collectif des conseillers qui se réunit et unanimement décide – volente toto consilio.
14Le conseil est donc le produit de ses propres membres, les avis prodigués au cours des délibérations, pour parvenir à une décision. Il peut aussi être donné de l’extérieur, sous forme écrite ou orale. L’assemblée peut encore envoyer rechercher un tel avis par un de ses membres : c’est le cas le 29 juillet 1351, lorsque successivement l’assemblée reçoit un conseil en provenance d’Avignon – une cédule sigillée, lue en séance –, puis en refuse le contenu et décide d’aller en chercher un autre, à nouveau hors de Marseille18.
15On trouve donc là une diversité d’utilisations métonymiques : le conseil est à la fois le lieu d’expression des conseils, la séance au cours de laquelle ces derniers sont émis, mais aussi de façon plus ponctuelle, la cédule qui contient un conseil, lequel sous cette forme peut être lu en public. Ce qui nous ramène au sens originel d’avis donné, comme signification essentielle.
16Pour poursuivre sur cette piste, le terme de conseil a retenu l’attention des lexicologues et historiens, par sa proximité avec le concilium ecclésiastique. Les deux mots se révèlent impossibles à distinguer lorsqu’ils désignent un groupe, un rassemblement de personnes : ainsi le Thesaurus linguae latinae, qui recommande de ne pas tenir compte de la graphie « s » ou « c », ou encore du lexicologue Niermeyer, qui parle pour le sens « conseil, assemblée » d’une « confusion ancienne avec concilium » ; quant à Kantorowicz, il préfère conserver le terme consilium latin, car selon lui il désigne à la fois « counsel » et « council »19.
17Le concilium désigne étymologiquement et historiquement une assemblée, une réunion et les assemblées politiques sous la république romaine, pour être repris ensuite par l’Église comme équivalent de synode et enfin se diffuser aux villes pour l’assemblée de justice ou fiscale – en Espagne en particulier. Consilium, quant à lui, a pour sens primitif celui d’avis à donner et à recevoir. Par métonymie, le terme a désigné le groupe chargé de cette fonction ; ainsi le Sénat romain était le consilium publicum des magistrats gouvernant la république, et sous l’Empire le prince s’entoure de son consilium principis. Selon Pierre Michaud-Quantin, le terme de consilium prend au Moyen Âge la valeur d’un idéal aux fondements religieux et relève d’une « mystique du conseil ». Pour exemple, le juriste s’appuie sur le chapitre 3 de la Règle de saint Benoît : « ne fais rien sans conseil »20 :
De adhibendis ad consilium fratribus
Si qua vero minora agenda sunt in monasterii utilitatibus, seniorum tantum utatur consilio, sicut scriptum est : « Omnia fac cum consilio et post factum non pænitebis »21.
18Le scriptum est indique la référence aux Écritures – en l’occurrence l’Ecclésiastique, 32.24. Or, à bien y regarder, cette citation relève plutôt d’une interprétation de la Bible : le passage en question de la Vulgate latine indique plutôt Qui credit Deo attendit mandatis et qui confidit in illo non minorabitur, ce que les éditions récentes traduisent par « Celui qui a confiance dans la loi observe ses préceptes, celui qui met sa confiance dans le Seigneur ne souffre aucun dommage »22. Tout cela confirme en partie l’idée d’une mystique du consilium, suscitant des références modifiées aux Écritures23.
19L’activité de se réunir pour délivrer collectivement un conseil engage la pratique de la délibération. C’est ce que Jacques Dalarun met en évidence en définissant pour le monde ecclésiastique le conseil comme la « décision résultant d’une délibération collective »24. Pour Michel Hébert, dans les assemblées représentatives la délibération est elle-même un préalable à l’action, au contenu relativement ouvert, dans un cadre d’autorité défini. La délibération obéit en effet à des règles gouvernant la discussion, généralement non écrites, permettant de juger de la question posée25.
20À Marseille, depuis le milieu des années 1320 le terme de consilium est inscrit comme titre de l’enregistrement de la plupart des séances, ce qui traduit une conceptualisation par emboîtement26. Ce consilium se prétend relativement souvent général, consilium generale – soit un peu plus d’une fois par séance. Que recouvre l’association des deux termes ? Doit-on y entendre l’assemblée générale de toute la ville, le parlamentum ? On ne trouve ce dernier terme que très rarement, à propos du parlement général – generale parlamentum – nécessaire pour modifier les Statuts27. Les Marseillais connaissent donc bien les deux termes, mais font la différence et n’emploient pas l’un pour l’autre. Donc l’ensemble de la ville n’est pas supposé assister régulièrement aux réunions du conseil, ni participer à ses délibérations. Dès lors, que représentent les membres ? Derrière ces questions terminologiques, se pose donc la question du rapport entre gouvernants et gouvernés.
21Par ailleurs, le détail des formulations est intéressant : cette délégation de pouvoir, cette abstraction d’une réunion collective apparaît incarnée, de la même façon que l’était précédemment le terme de « commune », sous la plume papale. Entre autres exemples similaires, le 12 octobre 1348, une ordonnance statue qu’un ambassadeur doit faire un rapport après sa mission « aux seigneurs viguier et conseil »28. L’individu qu’est l’officier royal et le collectif constitué par l’assemblée sont équivalents, déterminés par le même dictis dominis ; et si l’on considère ce viguier comme une personne physique représentant la tutelle, le conseil représente ici l’institution, une personne morale indéterminée gouvernant la municipalité.
22Le conseil, instance dont les réunions sont empreintes d’assez de solennité pour que l’on emploie à son sujet le terme de « célébration », est administré, « régi », comme on s’en rend compte à la lecture des enregistrements29. Recouvrant des pratiques discursives, ce simple et omniprésent consilium se situe donc aussi sur un terrain dont les implications sont politiques, juridiques et institutionnelles.
23Moins fréquent mais tout de même très présent, avec trois occurrences et demie en moyenne par séance, le terme d’universitas se place lui aussi sur un plan nettement institutionnel. Cette notion semble désigner à la fois toute la ville de Marseille – d’où la fréquence de l’association universitas Massilie –, mais aussi les syndics et les conseillers. Il apparaît à Marseille dès le début du XIIIe siècle, aux premiers temps de la commune30. Le droit de se réunir pour délibérer des affaires communes semble avoir été une revendication première des universitates, selon Albert Rigaudière, s’appuyant sur le juriste médiéval Pierre Jacobi, pour qui habere universitatem signifiait avant tout pouvoir se réunir librement, congregare, pour délibérer31.
24Alors que le terme de communauté est quasiment absent des registres, il serait abusivement simplificateur de considérer celui, bien présent, d’universitas comme son équivalent médiéval. Universitas, qui certes s’en approche, contient de bien plus vastes implications politiques et juridiques. Sous la plume des notaires marseillais, l’universitas représente une entité institutionnelle et un corps civique plus large que le consilium. C’est ce que l’on peut comprendre du protocole de séance du 13 mars 1349, qui mentionne le rassemblement du « conseil général et de la plus grande part de l’universitas de la ville ». Cette formulation est inhabituelle et se comprend à la lumière d’une situation exceptionnelle : en situation de crise ouverte du conflit des sénéchaux, les officiers de tutelle semblent avoir déserté la ville et le conseil se convoque lui-même, sans leur mandat. Afin de renforcer la validité de la réunion, les rédacteurs se revendiquent d’une légitimité plus large que celle du simple corps des conseillers, ce qui peut signifier l’appui et la présence de la plus grande et meilleure part de la ville32.
25C’est dans ce sens qu’il faut comprendre l’expression récurrente d’universitas Massilie, comme relevant donc d’une appréhension holiste du fait politique. La sphère publique, telle qu’exprimée par les sources consulaires elles-mêmes, ne se conçoit pas comme détachée du reste de la société, mais au contraire de façon englobante33.
26D’un point de vue statistique, le mot civitas est le second par ordre de fréquence, avec près de douze occurrences en moyenne par séance. Les formulations l’associent le plus souvent à Massilie, pour former le binôme lui aussi très fréquent de « cité de Marseille », à raison de près de cinq fois par enregistrement de séance. Ces décomptes, commencés au mois d’août 1348, sont postérieurs à l’union des deux villes haute et basse : et le remplacement de civitas vicecomitalis Massilie – ville vicomtale de Marseille – par la simple expression civitas Massilie doit retenir notre attention. Le conseil de la ville unifiée conserve de façon générale les usages de celui de la ville basse avant 1348, avec le même lieu de réunion, les mêmes modes de convocation et les mêmes techniques scripturaires d’enregistrement de son activité. De cette continuité institutionnelle, on peut observer que sous la plume des notaires, l’unification est une réalité immédiate : de la même façon et dans les mêmes proportions que pour l’universitas Massilie – autour de 40 % – la civitas Massilie parvient à devenir le tout, la ville.
27Les sources consulaires marseillaises emploient encore un autre terme pour caractériser l’ensemble institutionnel auquel elles appartiennent : curia, la « cour », présente en moyenne 3,6 fois par enregistrement de séance, qui désigne l’autorité publique marseillaise, de façon diverse : « cour de Marseille », « cour du palais » ou « cour de la reine ». Les notaires du conseil, dans leurs souscriptions, se qualifient ainsi tour à tour de « notaire du palais de Marseille » ou de « notaire de la cour de Marseille », tout en étant élus en début de mandat annuel en tant que « notaires près du tribunal du viguier »34. De cet ensemble quelque peu indistinct, ressort précisément l’aspect d’une autorité globale sur la ville rassemblant l’assemblée du conseil et les officiers royaux, dont on ne sait clairement si elle est partagée entre ces deux pôles de pouvoir, ou si le viguier et ses subordonnés la dirigent.
28Selon Pierre Michaud-Quantin, à partir du Xe siècle le mot curia a la valeur de groupe assistant celui qui exerce une autorité et pouvant recevoir de celui-ci une délégation pour agir en son nom dans un domaine donné. On peut trouver dans le droit l’utilisation du terme curia pour la municipalité, dans le Digeste notamment ; mais les glosateurs médiévaux ne mentionnent que de façon anecdotique pour curia le sens de conseil municipal de la cité35. La signification à privilégier tend donc vers l’autorité, seigneuriale à l’origine, souveraine ici. C’est ainsi la couronne napolitaine qui est pourvoyeuse de légitimité politique, d’autorité publique.
29Peut-on considérer l’utilisation de ce terme de curia comme l’affirmation de la tutelle comtale sur la municipalité marseillaise ? De fait, concernant les notaires, par exemple, ou la justice, il s’agit à l’origine de regalia, obtenus par les communes d’Italie après la paix de Constance en 1183 et longtemps remis en cause par l’empereur36. De la même manière que les rédacteurs des registres évitent d’employer le mot de commune pour désigner la municipalité marseillaise, ils se placent ainsi dans une légitimité institutionnelle découlant de l’autorité souveraine.
30Toute l’ambiguïté et la part de glissement sémantique dans l’usage assez fréquent de ce terme, résident en ce qu’il s’applique au conseil lui-même, ou aux notaires qui sont élus par le conseil. Vincent Challet a démontré, pour le Languedoc, que la présence du lieutenant du roi suffisait à fonder la cour, qui pouvait même se prolonger en son absence. Le conseil marseillais étant le lieu de contact entre les instances locales – l’assemblée des conseillers – et les officiers représentant la couronne, il est un lieu de dialogue entre ces deux pôles de pouvoir. Il participe du « double espace de la cour », existant à la fois autour de la personne du souverain et dans les différents lieux du pouvoir où ce dernier est représenté37. La légitimité « curiale », pourrait-on dire, bénéficie en effet aussi au conseil et n’est en soi pas contradictoire avec une certaine autonomie de fonctionnement et de décision vis-à-vis de la tutelle.
31On rencontre ainsi de très fréquentes expressions associant le nom de la ville à ses libertés et statuts particuliers, ses privilèges, en particulier les « Chapitres de paix », scellant depuis 1257 et 1262 les relations entre la ville et son souverain. Ces Chapitres sont ainsi invoqués en moyenne deux fois par enregistrement de séance du conseil entre 1348 et 135138, le plus souvent accolés aux termes de libertés, privilèges, statuts, représentant l’ensemble de droits sur lequel les officiers royaux doivent prêter serment à leur entrée en office39. Que recouvrent ces termes très nettement institutionnels, voire constitutionnels ? La revendication des « libertés » par les universitates médiévales est à comprendre de façon large, comme la tendance à se dégager de la soumission à un pouvoir étranger, afin de lui substituer autant que possible les règles et la normativité émanant de la volonté collective de ses membres40.
32Le terme d’assemblée lui-même est absent en tant que tel des sources municipales marseillaises. La forme la plus proche que nous pouvons en trouver est le terme de congregatio, un rassemblement, qui est rare – six fois en 1348-1351 – et le plus souvent entendu de façon négative, comme celui d’hommes armés ennemis – et une seule fois dans la même période pour désigner la réunion du conseil41. En revanche, la pratique du rassemblement, sous la forme du participe passé congregatus, est bien plus présente dans les enregistrements, soit plus d’une fois par séance. On rassemble le conseil par la criée, la trompe et le son de la cloche, comme nous l’indique chaque protocole d’enregistrement – congregato voce tube et sono campane. Le verbe congregare dont ce terme est la conjugaison désigne l’activité de rassembler des animaux, greges, et par suite des personnes et des choses. Pour ce qui nous concerne, l’acception qui s’impose indique le résultat du mouvement de rassemblement, la réunion elle-même. Mais on peut dès à présent remarquer la dimension pastorale d’origine et l’idée d’une action de rassemblement précédant la congregatio, l’assemblée. On retrouve ce terme de congregare dans d’autres sources délibératives, ainsi celles de la cité de Rodez au XVe siècle42.
33Le conseil désigne le résultat de son activité, les décisions prises, par les termes de reformatio, et surtout le participe reformatus, d’un usage courant, un peu plus d’une fois par séance, bien davantage que les termes apparentés à la délibération – deliberatio, deliberatus. Le mot de « délibération » est connu des notaires enregistreurs, mais ils ne l’utilisent en tout et pour tout qu’à huit reprises au cours des deux mandats municipaux 1348-1349 et 1350-1351. Il s’agit moins là de mettre en valeur la discussion contradictoire, que l’idée d’un avis mûri et concerté, d’une sagesse collective : ainsi, le 20 mai 1349 Montolieu de Montolieu lit une cédule en séance, où il recommande de prendre l’avis de tous les juges et experts en droit marseillais, afin d’en obtenir un « conseil mûri et délibéré » – maturato et deliberato consilio –, pour dénouer une situation délicate43.
34Ce qui caractérise donc le mieux l’activité du conseil, selon le langage des registres, c’est bien l’activité de « réformer », terme polysémique et malléable : parmi ses diverses implications idéologiques, l’activité de reformare renvoie à la fois à l’idéal du retour à une forme primitive – retrouver les anciens usages pour éviter toute « déformation » –, à la politique souveraine de construction du pouvoir – mettant en avant le bien commun pour renouveler ses structures – et enfin à l’idée d’une prise en compte de l’avis de la population, avec une dimension éventuellement contestataire – en particulier dans le royaume de France depuis l’ordonnance de 1254 et les enquêtes ordonnées par Louis IX sur ses officiers44. Dans l’Italie des communes, reformare aurait été originellement entendu comme « modifier le statut » de la commune ; de là, le terme se serait étendu à la délibération, à la discussion au sujet de cette modification45. Cette dimension engage ainsi la capacité normative générale de l’assemblée.
35Le terme n’est donc pas aussi anodin que sa répétition dans les registres du conseil ne pourrait le laisser supposer ; l’étude détaillée des modalités, des contenus et des conséquences de la politique menée par le conseil, au travers de l’ensemble des reformationes adoptées par lui, est nécessaire pour en évaluer la portée à Marseille.
36La connotation idéologique du verbe reformare et de ses dérivés, est à rapprocher d’une série de termes fondant en légitimité l’action du conseil. On peut ainsi remarquer la présence assez fréquente dans nos registres de l’adjectif publicus – 1,4 fois par séance en moyenne. Couramment utilisé par la doctrine politique et juridique médiévale, son recours a longtemps été interprété de façon téléologique comme la modernisation de l’État46. Publicus contient une dimension de légitimation de l’action du conseil, au même titre que le florilège présenté dans la Figure I. 10 : par ordre décroissant de fréquence, les termes de bonus status, fidelitas, honor sont autant de signes que les registres de délibérations sont marqués par les conceptions de leurs rédacteurs, émanant de l’assemblée elle-même.
37Tout indique en effet que l’on ne doit pas se limiter aux seuls vocables désignant directement l’assemblée pour la comprendre. Le vocabulaire dans son ensemble indique une certaine conception de soi-même de la part de l’autorité « auteur », dont procède le document47. Ainsi, l’emploi d’un terme tel que honorabilis exclusivement accolé au conseil ou à ses hommes, confirme l’idée d’un « honneur consulaire »48.
38Ce sont là des apports réels pour accéder à la compréhension du langage politique de l’assemblée. Cependant le contexte de mise en œuvre des mots, les logiques actives, la pratique de l’assemblée et le « jeu des acteurs » doivent retenir toute l’attention. D’où l’intérêt particulier à accorder aux verbes indiquant une action : le matériau documentaire délibératif prend en effet tout son sens dans son usage pratique courant, comme outil de travail de l’institution et par là, de gouvernement des hommes. L’écriture des registres est porteuse de sens juridique, politique, idéologique même – nonobstant son caractère « pragmatique », ou au travers de celui-ci.
Un reflet du jeu des pouvoirs
39Quel type de filtre la source délibérative applique-t-elle sur la réalité de l’assemblée dont elle rend compte ? Les premiers enseignements tirés de l’étude, jusqu’ici essentiellement formelle, placent les assemblées au croisement de l’oral et de l’écrit, par le mouvement incessant des pièces écrites, lues devant ce conseil, des décisions annoncées publiquement durant les séances, de l’écrit qui en résulte, dans les enregistrements, les lettres émises ou les textes des criées ensuite diffusées de vive voix dans la ville. Les dimensions orale et écrite de la communication y sont complémentaires et interdépendantes49. La tenue des assemblées, une pratique dont le déroulement pourrait paraître de prime abord essentiellement gestuel et oral, participe de l’explosion de l’écrit, qu’elle alimente50.
40Mais justement, une fois ces constats effectués, comment interpréter dans nos registres le très large effacement de fait de cette oralité ? On ne peut tout à fait exclure la mise volontaire sous silence de certains aspects, des questions délicates ou des désaccords. Cependant, il faut faire la part entre ce qui relève de phénomènes de censure ou d’euphémisation, et ce qui tout bonnement n’intéresse pas les rédacteurs, n’entre pas dans le champ de leurs préoccupations, quelque intérêt que nous puissions y trouver à présent. Il s’agit donc d’intégrer, pour mieux l’examiner, la logique du personnel responsable de l’enregistrement de ces assemblées.
41Le cas de deux séances présente une situation où l’oralité devrait être la plus saillante, séances durant lesquelles des dizaines d’avis différents, souvent contradictoires – quarante-sept en tout – sont exprimés et surtout enregistrés : les 18 et 19 août 1351, lorsque se pose le problème de l’admission controversée de Raymond d’Agoult à prêter de nouveau serment pour l’office de sénéchal. Les Marseillais sont très réticents au retour de ce personnage, par deux fois déjà destitué, et souhaitent que les exactions levées par lui et ses partisans soient annulées. L’assemblée débat donc des conditions de son retour51.
42Précisément, les formulations de ces quarante-sept avis restent peu orales, toujours rédigées au style indirect, celui du discours rapporté, sans aucune mention de véhémence, ou de solennité52. Les seules expressions à la première personne sont dues à un document particulier, inséré dans le fil du débat, une « cédule » rédigée par un notaire, Antoine Lurdi (BB21, fol. 158-159), sur un papier demi-format particulier du type des cahiers préparatoires, préparée avant et corrigée par passages. S’exprimant devant l’assemblée, le notaire et conseiller le fait ainsi sous une forme profondément marquée par la scripturalité53. Après être intervenu, il réclame que lui soit rédigé un instrument public consignant la nature de sa proposition – un autre écrit, donc. L’oralité existe ainsi, mais filtrée, à plusieurs reprises, par l’écrit.
43La décision controversée, mais finalement adoptée par des Marseillais contraints et forcés – à la sanior et major pars, façon de mettre fin à la discussion54 – est de recevoir dans son office un sénéchal d’Agoult qui semble indésirable à tous. Pour une fois, afin d’appuyer les futures protestations et demandes de réparation des griefs et exactions subis, les notaires mettent en valeur les réticences des conseillers, la difficulté à accorder les divers avis émis sur ce sujet – difficulté sans doute réelle, au point que la séance doit être ajournée et reprise le lendemain. Cette situation exceptionnelle justifie que, contrairement à l’habitude, tous les désaccords et avis soient relatés dans les registres. La crise traversée rend apparente une pratique en général effacée, ou lissée par des enregistrements dont seul le point d’arrivée, la décision prise, compte.
44Dès lors, peut-on parler à Marseille, comme résultat du filtre de l’écrit et de l’enregistrement, d’une normalisation de l’outil, ou d’une mise en conformité de l’assemblée ?
45Le passage de l’oral des réunions à l’écrit des registres est nécessairement l’occasion d’un certain lissage. La normalisation s’effectue matériellement, par la mise en forme, de plusieurs façons déjà décrites : tout d’abord la forme et le contenu des intitulés, les dates, les formules récurrentes, les rubriques ; par ailleurs la codicologie et la façon dont s’agencent les cahiers, dont la taille indique ce que l’on peut y trouver – élections de début d’année municipale, délibérations, insertions diverses. Le processus de normalisation par l’enregistrement se constate également avec l’utilisation omniprésente du latin. La langue du droit, à Marseille comme dans le reste de la Provence, est la norme linguistique pour l’enregistrement des délibérations municipales55.
46Les occurrences de la langue vulgaire locale, le provençal, sont très rares, moins d’une fois par registre en moyenne56. À chaque fois, il s’agit de la reproduction de lettres reçues par la ville ou de documents préparatoires rédigés par des conseillers et lus en conseil. Après leur lecture, le notaire les conserve à l’écrit dans leur langue originelle, soit qu’il les recopie dans le registre, soit qu’il les y insère. Sous cette forme épistolaire, le vernaculaire est admissible, car authentique57. Le 23 novembre 1359 un conseiller, Jean Elie, produit ainsi un document en provençal faisant office de pièce comptable, par lequel il demande au conseil le paiement de la réparation d’une cloche dont il a avancé le montant58. Cette quittance, tout comme le rapport préalable à la venue d’Urbain V, n’est pas destinée aux seuls notaires. Il s’agit là de documents de travail utiles aux Marseillais membres du conseil, et au-delà, dans les situations où un notaire n’est pas forcément disponible pour traduire le latin.
47Mais à l’inverse, tous les débats, qui se font en provençal, sont enregistrés en latin. Si l’écrit vernaculaire peut rester intact, l’oralité elle est systématiquement traduite. C’est le cas notamment des substantifs difficilement traduisibles ou des noms propres, qui sont latinisés : ainsi pour les métiers de la pêche59 ; on ne trouve qu’exceptionnellement un surnom, celui de Jean de Jérusalem dit le Pisan, sous sa forme provençale, alors que dans la majeure partie des cas il est mentionné alias Pisanus – et encore ne s’agit-il là que d’une entorse très mineure, la seule omission d’une déclinaison60. On trouve ainsi ça et là des exceptions, avec l’emploi de provençalismes, par souci de précision : pour désigner les boulangers hommes et femmes, le terme latin pistor peut être associé à pistray, mot féminin61. Le cas se retrouve avec le tailleur de pierre, ou des objets tels que des cruches, ou encore les sarrioni et sarrie, des doubles-cabas servant à bâter les bêtes de somme62.
48Par les objets dont il traite, le langage des notaires ne peut être coupé de la réalité linguistique qui les entoure, ne serait-ce que pour ces termes techniques, ou les noms de lieux, comme le Pré Auquier, dit Prat Auquier, où se trouve une maison qui fait l’objet d’un litige. Le plus banal étant la déformation de phonèmes, ainsi le son /j/ de taillie est orthographié talhie dans l’expression de peccunia talhie, par équivalence des sons lus63. Le registre de l’assemblée recueille et valide ces frontières non hermétiques entre l’oral et l’écrit.
49La normalisation touche aussi le contenu. Certains désaccords, ou opinions portés par tel ou tel conseiller sont certes enregistrés. Cependant, ces occurrences s’équilibrent avec la présence d’autres expressions, marquant au contraire l’unanimité de l’assemblée : on peut en effet relever autant de formulations du protocole indiquant que les décisions adoptées l’ont été « en harmonie, dans la concorde » – concorditer, ou nemine discrepante. De plus, l’expression des désaccords est, hormis quelques cas exceptionnels, pour le moins allusive : c’est par les euphémismes « la plus saine et majeure part », ou « la plus grande part » du conseil que les notaires les signalent, sans plus de précisions, en particulier sur l’identité des conseillers réticents.
50Mais surtout, c’est la répétition systématique de la formule placuit dicto consilio reformare/requirere, et ses variantes – « il plut audit conseil de décider/requérir » – lors de chaque délibération, qui marque l’unanimité dans l’enregistrement final des séances, sans tenir compte des désaccords antérieurs à la décision prise. La grande majorité des enregistrements – soit 73,7 % – est tout simplement régie par l’absence d’une quelconque mention sur le caractère consensuel ou non des débats. Par défaut, c’est l’unanimité qui prévaut : les décisions sont réputées adoptées par « tout le conseil général de l’universitas de Marseille », comme l’indiquent les protocoles de séances.
51Dès lors, les expressions assez fréquentes d’intervention en séance, comme primo surgens – « untel est d’abord venu [pour exposer ceci ou cela] » –, ne sont pas des signes de désaccord, ni même forcément l’expression d’une opinion personnelle. Tel ou tel éminent conseiller, le plus souvent un des syndics, se met en avant, porteur d’un sujet de délibération, manifestant dans le déroulement des débats son importance politique personnelle64. Enregistrer ce déroulement sonne à la fois comme une façon de « faire réel », un lointain écho de l’oralité, et renforce l’impression d’organisation, d’un ordo préétabli dans lequel se tiennent les séances.
a) Les mots de l’unanimité et du partage des avis
52Des désaccords internes au conseil existent pourtant bien, comme le prouve la défense édictée par l’assemblée en 1349 de faire des conciliabules en séance et de s’exprimer ailleurs qu’à la tribune ; la période de crise traversée doit amplifier ces désaccords et tensions et occasionner cette interdiction66. Mais de ces dissensions nous ne disposons que de faibles traces dans les registres. Dans les rares cas de désaccords nommément attribués à un conseiller, ce dernier en réclame un instrument public, pour ne pas être tenu responsable de la décision prise – et c’est ce qui justifie l’enregistrement à la fois de l’instrument public et du désaccord en question67. Mais pour le reste et le plus souvent, par une pudique ellipse, le registre énonce que telle décision a été prise à la major et sanior pars, sous-entendant que ce ne fut pas aussi concorditer qu’à l’habitude.
53Dès lors l’unanimité de règle dans les registres semble l’être moins dans la réalité des séances. Cela confirme l’impression donnée par le retrait de certaines séances, éventuellement réinsérées ensuite. L’enregistrement de l’assemblée agit sur ses débats comme un filtre déformant, lissant ou éludant les désaccords68.
54En forme de bilan provisoire, revenons sur ce qui pouvait à première vue sembler autant d’imperfections et de caractères insatisfaisants de nos sources. Les ajouts et insertions de séances ou délibérations, sous forme de brouillon par exemple, ne sont pas des anomalies, mais plutôt les preuves d’un processus de validation, d’un contrôle du contenu des registres par les rédacteurs, et en dernière analyse par l’institution dont émanent les registres. Les modifications et l’intégration d’éléments extérieurs dans les enregistrements permettent une meilleure compréhension et utilisation du document, ainsi que l’adaptation à des nécessités apparues par la suite. On assiste là à un dialogue des pièces enregistrées entre elles, dialogue qui est celui d’un gouvernement de la ville en cours d’élaboration.
55Avec les séances non enregistrées, on peut parler de mise sous silence de certains aspects des réunions de l’assemblée. Cependant il ne s’agit pas nécessairement, ou pas toujours, d’une mise au secret. Des délibérations sont biffées, mais conservées sous forme de brouillons. Le choix est fait de privilégier ce qui mérite de durer, ce qui risque d’être utile à l’administration de la ville. On touche ici à un autre aspect du gouvernement de la ville, la fonction de prévision. L’enregistrement, en tant qu’acte administratif et de gouvernement, sélectionne ce qui risque de servir plus tard, ou ce dont on n’a plus besoin, ce que l’on ne veut plus conserver par écrit69.
56La normalisation que subissent les registres marseillais correspond à une façon d’administrer dont la fiabilité passe par la mise à l’écrit. Les rapports préalables, les brouillons, les passages laissés en blanc, les biffures, les omissions ou ajouts sont autant de signes du travail en amont et en aval de la séance de l’assemblée. Ils attestent au même titre que les énumérations dans l’expression écrite, non une faiblesse, mais plutôt une certaine précision : on ne consigne que l’exactitude, ou l’utile au gouvernement. L’enregistrement et ses choix relèvent du processus de décision, de pouvoir.
57De la mise en forme des séances, on arrive ainsi à leur mise en conformité. De la structuration d’un pouvoir par l’écrit, dans un processus réciproque, on aboutit au contrôle a posteriori de l’assemblée, de l’institution municipale, sur son image et sur son patrimoine scripturaire. Dans certains cas extrêmes, on peut soupçonner une certaine censure, même si elle est difficile à déceler autrement que par le constat qu’existent des omissions ou des soustractions. Tout ce qui est enregistré relève de l’assemblée, du processus de délibération et de gouvernement de la ville. Mais a contrario, l’intégralité des assemblées n’est pas consignée dans les registres.
58Mémoire écrite des décisions prises par l’assemblée, le registre de délibérations garantit la cohérence de la politique menée par le conseil. Il conserve par ailleurs les pièces nécessaires au processus délibérant, telles que les lettres reçues ainsi que certains documents préparatoires, à titre justificatif. Outil de référence, il reste en cours d’élaboration, au contenu vivant, non entièrement fini. Cet inachèvement du registre en fait un instrument évolutif d’administration, auquel on revient. À ce titre, les registres sont bien un miroir des enjeux du gouvernement de la ville, qui se nouent autour de l’assemblée.
59De ce point de vue, l’accès du groupe des conseillers marseillais aux registres – ainsi qu’à leurs sous-produits que sont les instruments publics – a une valeur politique, celle du partage de l’autorité scripturaire et de la capacité de prise de décision collective70. Au reste de la population, celle-ci s’impose par voie d’ordonnances, qui leur sont éventuellement criées.
60L’écrit et la scripturalité méritent ainsi de naviguer de conserve avec l’analyse historienne. Car il ne s’agit plus simplement d’interroger la source délibérative pour fournir des « preuves » ponctuelles de ce que l’on avance, mais d’en questionner les significations intrinsèques. La prise en compte de la forme écrite se poursuivra donc tout au long de l’étude, la présente partie n’ayant pas épuisé la question, loin s’en faut. De la même façon que l’étude « formelle » s’est elle-même alimentée des éléments de contexte, les processus et événements marquants, comme l’unification de la ville en 1348, les guerres des sénéchaux de 1348 à 1352, ou encore la question de la mort et de la succession de la reine Jeanne dans les années 1380, se traduisent par des décisions politiques sous-jacentes aux choix rédactionnels, scripturaires.
61Il faut donc à présent déterminer quelles significations politiques, juridiques et sociales les Marseillais membres du conseil donnent à cette cohérence, à cette logique documentaire, quelle administration ils parviennent à faire de la ville et quel gouvernement ils exercent sur sa population.
Notes de bas de page
1 C. Fargeix, Les élites lyonnaises... cit., p. 107-113, 355.
2 P. Beck, op. cit., p. 115 et suivantes.
3 J.-Ph. Genet, L’historien et les langages de la société politique, dans A. Gamberini, J.-Ph. Genet, A. Zorzi (dir.), The Languages of Political Society, Western Europe, 14th-17th Centuries, Rome, 2011, p. 17-36, ici p. 25-28 ; J.-Ph. Genet, A. Zorzi (dir.), Les historiens et l’informatique : un métier à réinventer, Rome, 2011.
4 Les mots de celebratio, de congregatio et de commune sont très rarement utilisés. Le mot communitas n’apparaît que lors d’une seule séance dans les registres BB20-21, et à l’intérieur d’une lettre expédiée par le roi d’Aragon ; de la même façon, on ne trouve qu’à une seule reprise le terme de municipalité, sous la forme de l’adjectif municipalis ; AMM, BB21 fol. 168r, 122v-123r.
5 J. Morsel, Introduction, dans La formation des communautés d’habitants au Moyen Âge. Perspectives historiographiques, Xanten, 2003 : « Il me semble ainsi vain d’espérer « trouver » la bonne définition [du terme de communauté] quelque part ».
6 BB21, fol. 121r.
7 AMM, BB21, fol. 48r, 49r.
8 AMM, BB21, fol. 65r.
9 Jurium municipalium civitatis predicte Massilie ; AMM, BB21 fol. 168r.
10 Pro dicte civitatis et civium ac universitatis Massilie hutilitate evidenti et communi ; AMM, BB20 fol. 115r.
11 É. Lecuppre-Desjardin, A.-L. Van Bruane (dir.), De bono communi, Discours et pratique du Bien Commun dans les villes d’Europe (XIIIe au XVIe siècle), Turnhout, 2010, notamment la contribution d’A. Zorzi, Bien Commun et conflits politiques dans l’Italie communale, p. 267-290.
12 Les occurrences des différents mots sont recensées sous toutes leurs diverses formes déclinées, et classées selon leur fréquence, par ordre décroissant.
13 Trois occurrences du terme, désignant la « commune de Florence », n’ont pas été relevées ici.
14 Une seule congregatio « du conseil » (AMM, BB21, 108r), toutes les autres sont à connotation négative, d’hommes armés, ou « illicite » (BB21, 146v).
15 Dont une fois pour une celebratio à Marseille du chapitre général des Prêcheurs, BB21 fol. 132r.
16 Dont une fois pour une celebratio à Marseille du chapitre général des Prêcheurs, BB21 fol. 130v.
17 Juxta auditisque oppinionibus et consiliis […] fuerunt in eo concorditer ac volente toto consilio sequte reformationes infrascripte ; AMM, BB20 fol. 99v.
18 Ad executionem dicti lecti consilii nullatenus procedatur […] ad dictum habendum consilium extra Massilie et querendum ; AMM, BB21 fol. 146.
19 Thesaurus linguae latinae, Leipzig, Teubner, 1958. J.F. Niermeyer, Lexicon, p. 255. E.H. Kantorowicz, The King’s Two Bodies. A Study in Mediaeval Political Theology, Princeton, 1957, p. 153, n. 187.
20 P. Michaud-Quantin, Universitas, Expressions du mouvement communautaire dans le Moyen Âge latin, Paris, 1970, p. 135-137.
21 Règle de saint Benoît, édition et traduction établies en 1689 par l’ordre de Cluny, rééditée en 1824, librairie Rusand, Paris : Comment l’Abbé doit prendre l’avis des Frères. « Touchant les choses moins considérables qui regardent les besoins du Monastère, l’Abbé se servira seulement du conseil des anciens, selon ce qui est écrit : “Ne faites rien sans conseil, et vous ne vous en repentirez point” ». La Traduction nouvelle par un moine de Solesmes, 2ème éd., Solesmes, Sablé-sur-Sarthe, 1988, traduit sensiblement de la même façon le chapitre 3 de la Règle, mais intitule celui-ci Le recours au conseil des Frères, ce qui nous rapproche du terme de consilium.
22 Version latine tirée de l’édition Gutenberg de la vulgate en latin, dite Bible à 42 lignes, vol. 2, fol. 37v. Traduction française tirée de la Bible de Jérusalem, Paris, 1997, « Ecclésiastique ou Siracide », p. 1171-1259. Le même verset, selon une nouvelle traduction de 2001, indique « Qui se fie à la Tora garde les commandements, qui s’en remet au Maître est indemne ». La Bible, ed. Fr. Boyer, Paris-Montréal, 2001, dans « Sagesse de Jésus ben Sira/Siracide », traduction de P. Alferi et J.-J. Lavoie, p. 2158.
23 P. Michaud-Quantin, op. cit., p. 137 ; C. Leveleux-Teixeira, Opinion et conseil dans la doctrine juridique savante (XIIe-XIVe s.), dans M. Charageat, C. Leveleux-Teixeira (dir.), Consulter, délibérer, décider : donner son avis au Moyen Âge (France-Espagne, VIIe-XVIe s.), Toulouse, 2010, p. 33-50, affirmant que la vision thomiste fait du conseil, qui relève de la vertu de prudence, un don du Saint Esprit, d’après Thomas d’Aquin, Summa Theologiæ, IIa IIæ,q. 52, art. 1.
24 J. Dalarun, op. cit., p. 339.
25 M. Hébert, Parlementer... cit., p. 378-379. Cette association de pratiques a donné son titre à une publication collective, M. Charageat, C. Leveleux-Teixeira (dir.), Consulter, délibérer, décider… cit., notamment B. Sère, La compréhension médiévale du concept aristotélicien de deliberatio, ibid., p. 201-222, pour qui les exégètes de l’Éthique à Nicomaque d’Aristote utilisent de façon équivalente consilium ou deliberatio, pour désigner l’étape antérieure au choix.
26 AMM, registre BB14, daté de 1325-1326. Mais certains notaires comme Pierre Lurdi omettent d’inscrire ce titre, qui peut aussi être remplacé, par celui de In nomine Domini, amen, marquant des occasions qui se veulent plus solennelles ; BB20, fol. 68r.
27 AMM, BB21, fol. 20v.
28 Dictis dominis vicario et consilio faciat relationem ; AMM, BB20 fol. 49v.
29 Pour signaler la présence d’un conseiller, il est dit qu’il assiste à la « célébration du conseil » ; dictus Guillemus Mercerii in ejusdem consilii celebratione assistens. AMM, BB21, fol. 147v. Sur la question de la direction, du gouvernement du conseil, c’est le verbe regere qui est utilisé : in aula sancti Spiritus ubi dictum consilium regebatur, « dans la salle [de l’hôpital] du Saint-Esprit, où le dit conseil est administré », BB20 fol. 40v.
30 Le premier acte mentionnant l’universitas est un accord passé en 1219 entre la ville basse, l’évêque et le chapitre. AMM, AA11bis, 1-2. Le terme se développe alors en concurrence avec celui de commune ; J.-P. Boyer, Entre soumission… cit., p. 209-210.
31 A. Rigaudière, Pratique politique et droit public dans la France des XIVe et XVe siècles, dans Arch. phil. Droit, 41, (1997), p. 83-114, ici p. 104 et n. 76., citant Pierre Jacobi, Aurea practica libellorum Petri Aurelianensis. Coloniae Agrippinae, apud Geruinum Colenium et heredes Quintilios, Lyon, ed. G. Calenium, 1575.
32 Congregatis honorabili consilio generali civitatis totius Massilie et magna parte universitatis ejusdem civitatis ; AMM, BB20 fol. 90r, séance durant laquelle le sénéchal contesté Barrili prête son serment d’entrée en office. Sur la notion de sanior et major pars, dont aucun des termes ne peut se comprendre comme une stricte majorité numérique, J. Théry, Moyen Âge, dans P. Perrineau, D. Reynié (dir.), Dictionnaire du vote, Paris, 2001, p. 667-678.
33 V. Azoulay, P. Ismard, Le politique en Grèce ancienne, dans C. Delacroix et al. (dir.), Historiographies, Concepts et Débats, t. II, 2010, p. 1162-1170, ici p. 1163.
34 34Item elegit ad tribunal domini vicarii loco Petri Amelii notarii vicelicet Philippum Gregorii ; AMM, BB21 fol. 2v.
35 P. Michaud-Quantin, op. cit., p. 141-142, citant le Digeste, 1. 3, t. 4. Pillius, Summa Codicis, 10.22, fol. 251v.
36 G. Andenna et alii (dir.), Comuni e signorie nell’Italia settentrionale : la Lombardia, dans G. Galasso (dir.), Storia d’Italia, t. 6, Turin, 1998, p. 111-113.
37 V. Challet, Un espace public sans spatialité : le dialogue politique entre le roi et ses sujets languedociens, dans P. Boucheron, N. Offenstadt (dir.), L’Espace public au Moyen Âge, débats autour de Jürgen Habermas, Paris, 2011, p. 337-352.
38 Soit 276 occurrences dans les registres BB20 et BB21.
39 Ainsi, quia idem subvicarius capitula pacis et libertates dicte civitatis ad quorum observancia juramento per ipsum prestito tenebatur. AMM, BB20 fol. 69r.
40 P. Michaud-Quantin, op. cit., p. 268.
41 AMM, BB21, fol. 108r.
42 F. Garnier, N. Preynat, Notes sur les registres de délibérations des villes du Rouergue et de l’Auvergne. L’exemple de la Cité de Rodez et de Clermont au milieu du XVe siècle, dans Memini, 12/2008, L’écrit et la ville, p. 233-290, p. 237.
43 Il s’agit alors de démêler l’épineuse question du retour en office du sénéchal Raymond d’Agoult, qui avait auparavant été rejeté par les Marseillais. AMM, BB20 fol. 144v.
44 A. Rigaudière, Conclusions, dans T. Pécout (dir.) Quand Gouverner... cit., p. 533-578, ici p. 547-548. R. Cazelles, Une exigence de l’opinion depuis saint Louis : la réformation du royaume, dans Annuaire – Bulletin de la Société de l’Histoire de France, 1962-1963, Paris, 1964, p. 91-99. Ph. Contamine, Réformation : un mot, une idée, dans Id., Des pouvoirs en France, 1300-1500, Paris 1992, p. 37-47. C. Gauvard, Réforme, dans C. Gauvard, A. De Libera, M. Zink (dir.), Dictionnaire du Moyen Âge, Paris, 2002, p. 1186-1188.
45 L. Tanzini, Delibere e verbali… cit., p. 50.
46 A. Zorzi, L’affirmation du droit pénal dans les cités communales italiennes (XIIIe-XIVe s.), dans A. Mailloux, L. Verdon (dir.), L’Enquête en questions… cit., p. 221-229.
47 Le vocabulaire permet de toucher à « l’inconscient linguistique d’une communauté », selon la linguiste J. Picoche reprise par C. Fargeix, Les élites lyonnaises… cit., p. 88 n. 362. L. Gaudreault, Écrit pragmatique… cit., ici p. 172-175.
48 48Ibid., p. 174-175. En 1348-1351 à Marseille, l’adjectif honorabilis s’applique exclusivement au conseil et à ses membres, à deux exceptions près (BB20, fol. 76r, pour l’évêque de Marseille), soit 135 fois, un peu plus d’une fois par séance. À 93,3 % il est employé au début du protocole de séance, dans la formule Congregato honorabili consilio ; les quelques autres occurrences sont dues à des lettres reçues, dans lesquelles les destinateurs s’adressent de cette façon au conseil de Marseille. On peut remarquer la similitude, pour la façon de s’adresser à des membres d’une assemblée, avec l’usage actuel de l’adjectif onorevole pour les parlementaires italiens, désignant à l’origine les magistrats et ecclésiastiques, aussi bien en latin qu’en français et en italien.
49 O. Guyotjeannin, Penuria scriptorum. Le mythe de l’anarchie documentaire dans la France du Nord (Xe-première moitié du XIe siècle), dans Bibliothèque de l’École des Chartes, 155, 1997, p. 11-44, p. 30 et suiv. L. Buchholzer, O. Richard, Villes médiévales et serment : une enquête, dans É. Clementz (dir.), Autorité, liberté, contrainte en Alsace. Regards sur l’histoire d’Alsace XIe-XXIe siècle, Strasbourg, 2010, p. 73-81. A. Jamme, O. Poncet, L’écriture, la mémoire et l’argent : un autre regard sur les officiers et offices pontificaux (XIIIe-XVIIe siècle), dans A. Jamme, O. Poncet (dir.), Offices, écrit et papauté (XIIIe-XVIIe siècle), Rome, 2007, p. 1-13. P. Chastang, La ville… cit., p. 392-402, 415-416.
50 P. Cammarosano, L’éloquence laïque dans l’Italie communale (fin du XIIe-XIVe siècle), dans Bibliothèque de l’École des Chartes, 158, 2001, p. 431-442, p. 432.
51 AMM, BB21 fol. 155-160.
52 Solennité que savent fort bien manier les conseillers, et enregistrer les notaires, ce que l’on peut vérifier dès le jour suivant, lorsque les syndics émettent en séance une protestation « aussi solennellement qu’ils le purent », dixerunt et protestati fuerunt, modo solenniori quo potuerunt. AMM, BB21 fol. 168r.
53 Cet Antoine Lurdi connaît bien le fonctionnement scripturaire du conseil de ville, pour intervenir dans ses registres en 1348-1349, et en être le notaire désigné en 1357 ; AMM, BB22 fol. 273r.
54 Placuit dicto consilio ac majori et saniori parti ejusdem ; AMM, BB21 fol. 160r.
55 Les enregistrements en provençal n’apparaissent qu’au XVe siècle, d’abord dans de petites communautés telles que Digne ou Brignoles, puis à Arles en 1475. En revanche à Marseille, Aix ou Apt, le latin se maintient jusqu’au siècle suivant, pour être remplacé par le français. M. Hébert, Latin et vernaculaire. Quelles langues écrit-on en Provence à la fin du Moyen Âge ?, dans Provence historique, 188 (1997), p. 281-299. H. Bresc, La pratique linguistique des municipalités. Sicile et Provence, 1300-1400, dans MEFRM, 117-2, 2005, p. 641-664.
56 Ainsi, seulement quatre fois durant les sept années enregistrées entre août 1348 et octobre 1365, soit une tous les 1,75 années enregistrées en moyenne. AMM, BB20 à BB24.
57 On observe d’ailleurs le même phénomène pour une lettre en catalan ; AMM, BB24, fol. 186v-187r.
58 AMM, BB22, 242 bis.
59 Oblata quadam suppliquee pro parte eyssaneguatorum civitatis Massilie et lecta in consilio supradicto asserentium piscatores broginorum Massilie injuriare eidem, ce que Mabilly traduit par les « pêcheurs de l’art de l’eissaugo et de l’art du Borgin » Ph. Mabilly, Inventaire, Série BB… cit., p. 62. AMM, BB21, fol. 94r.
60 Johannes de Jerusalem dictus Pisan ; AMM, BB21 fol. 97v. On le trouve dans le même registre sous la forme alias Pisanus, et ses déclinaisons, fol. 32r, 33r, 41r.
61 quod nullus pistor seu pistray, pour désigner les boulangers, le second terme, féminin, étant lié au provençal pistre ; AMM, BB21, fol. 123v. F. Mistral, Lou trésor, p. 584.
62 Peirerius, AMM BB21 fol. 139v ; aygaderius seu aygaderia BB21 fol. 154r ; Ph. Mabilly, Inventaire, Série BB… cit., p. 68.
63 AMM, BB21 fol. 125r ; BB21 fol. 133v.
64 Ainsi Nam primo surgens Jacobus Syalle syndicus, AMM, BB20 fol. 39r.
65 Les mentions de partage des avis ou de consensus étant fréquemment redoublées, voire triplées, le nombre de séances est nettement inférieur au nombre de ces mentions.
66 Séance du 23/5/1349, AMM, BB20 fol. 146-148.
67 Ce cas de figure ne se rencontre qu’une seule fois dans les registres BB20 et BB21, le 20/6/1349, lorsque les marchands Pierre Austrie et Guillaume de Martel demandent un instrument public de leur opposition à l’émission de lettres de marques contre les Montpelliérains. AMM, BB20 fol. 156v.
68 68Cela rejoint les observations de C. Fargeix, Les élites lyonnaises… cit., p. 81. On rencontre des exceptions à cette pratique du « lissage délibératif » : à Compiègne, la sélection opérée s’applique au contraire à conserver les séances litigieuses, aux débats assez fidèlement retranscrits. J.-Ch. Tölg, Prendre avis, délibérer, conclure. Les délibérations municipales à Compiègne au début du XVe siècle, dans M. Charageat, C. Leveleux-Teixeira (dir.), op. cit., p. 299-316.
69 De manière proche, pour la documentation urbaine de Viterbe au XIIIe siècle, C. Carbonetti Vendittelli, Documenti... cit., notamment p. 178-184.
70 L. Tanzini, Delibere... cit.
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Contacts, comparaisons et contrastes
Philip Benedict, Silvana Seidel Menchi et Alain Tallon (dir.)
2007
Pratiques sociales et politiques judiciaires dans les villes de l’Occident à la fin du Moyen Âge
Jacques Chiffoleau, Claude Gauvard et Andrea Zorzi (dir.)
2007
Souverain et pontife
Recherches prosopographiques sur la Curie Romaine à l’âge de la Restauration (1814-1846)
Philippe Bountry
2002