Chapitre 2. Rédiger et transmettre la basilique : du Temple vatican (1694) aux Mémoires historiques (1748)
p. 59-84
Texte intégral
Il fallait suivre la méthode qu’on a adoptée afin que, parmi les nombreuses choses qui furent dites dans tant d’écrits, ce qui conduit à la vérité reste clair et puisse aussi former une sorte de doctrine historique.
Conveniva seguire il metodo che si è seguito, sicché tra tante cose dette in tante scritture resti in chiaro ciò che conduca alla verità e possa formare una specie di Storica dottrina.
Poleni, Memorie…, 1748, § 54
Mémoire et promotion de la « véritable architecture civile »
1Depuis le début du XVIe siècle, l’œuvre de reconstruction de la Basilique fut accompagnée d’une entreprise de divulgation et de valorisation de l’édifice. Cette préoccupation ne relevait pas seulement de la promotion mais était aussi liée à un souci de préserver une mémoire : mémoire du temple constantinien destiné à disparaître mais aussi mémoire des accomplissements architecturaux. La rédaction d’une histoire émanant de l’institution même ne pouvait évidemment être diaphane : elle révélait une mise en ordre documentaire liée à des modes de contrôles spécifiques.
2Aux moments décisifs de son histoire, la fabrique réalisa des publications destinées à faire connaître au public un récit sinon officiel du moins autorisé. Cette politique fut inaugurée en 1629, année de la mort de Maderno dont les travaux avaient définitivement changé le plan et l’aspect de l’ensemble de la basilique1. La fa brique fit alors réimprimer le plan de Tiberio Alfarano (fig. 2), afin de fixer la mémoire de l’ancien édifice2. Le chapitre de Saint-Pierre, dans ses conflits latents avec la fabrique, avait été en effet à l’origine de la première édition en 1590, au moment de l’achèvement de la coupole. On espérait alors préserver la mémoire d’un édifice matériellement condamné. Souvent invoqué pour restituer la basilique constantinienne, cet ouvrage est plus complexe et décrit en fait l’état des travaux dans la seconde moitié du XVIe siècle, superposant ce dessin sur le plan de l’ancienne basilique. La réédition de 1629 prend place quant à elle dans un autre contexte. Elle vise, malgré les bouleversements, à montrer la cohérence des travaux d’achèvement par rapport au projet michelangien. On constate un double décalage chronologique en 1590 (basilique constantinienne / nouveau Saint-Pierre) et même triple décalage en 1629 (basilique constantinienne / projet de Michel Ange / nouveau Saint-Pierre) : un mode de représentation diachronique qui resterait un moteur d’explication privilégié.
3La mémoire archivistique fabricienne fut essentielle à l’entreprise du colossal Tempio Vaticano, publié en 1694 par Carlo Fontana mais conçu bien plus tôt, suite à la polémique survenue en 1680. L’auteur affiche sa contribution aux archives, signalant que les résultats de l’expertise furent consignés « dans l’archive de cette même fabrique pour la perpétuelle mémoire de la postérité »3. Parallèlement, il eut largement recours à la documentation tant administrative que narrative ainsi qu’aux recueils d’images. Les intentions des fabriciens allaient bien au-delà d’une réponse conjoncturelle aux attaques contre la mémoire de Bernin. Ils souhaitaient en effet constituer la basilique Saint-Pierre dans sa perfection au rang de modèle possédant des vertus éducatives. La complexité historique et technique était reléguée au profit d’une édifiante simplicité destinée à être transmise. Le Tempio Vaticano se devait de tracer les contours des écoles d’architecture que l’institution mettrait en place aux siècles suivants. Il possédait :
deux objectifs généreux et nobles : le premier, [de montrer] l’édifice le plus majestueux qui fût jamais au monde et qui concerne toute la Chrétienté. Le second, de servir tous les studiosi de l’art noble de l’architecture, en profitant des exemples et des mesures des œuvres des hommes les plus importants qui se sont épanouis au cours des siècles afin que l’on initie une école publique destinée aux jeunes au moyen d’exemples perpétuels. [… Cette] académie portera le nom de Saint-Pierre au Vatican et aura comme but principal l’enseignement des véritables termes de l’architecture civile et particulièrement les vrais fondements de toutes les mesures et règles pour toute sorte de construction et d’ornement4.
4L’engagement de la fabrique dans ce projet éditorial ambitieux, devant incarner une académie de papier, fut total mais prudent. Elle prêta d’abord de l’argent à l’auteur entre 1687 et 1692 puis, à partir de cette date, une fois assurée que l’œuvre verrait véritablement le jour, concèda des financements directs permettant à l’ouvrage de sortir des presses en 1694. Le personnel de la fabrique fut mis à contribution : Antonio Valeri assista Fontana pour les mesures. La durée du processus de production n’est pas seulement due à la difficulté de composer cet ouvrage, en italien et en latin, et de faire dessiner puis graver les planches. Elle reflète également les indécisions de la Curie sur l’histoire officielle qu’elle souhaite livrer au public et les obstacles pour parvenir à un consensus institutionnel. Le livre, monumental et coûteux, ne fut guère un succès de librairie5. Après les hésitations et les procrastinations qui avaient présidé à la réalisation, Fontana reçut une exceptionnelle reconnaissance des fabriciens sous la forme d’une imposante rente viagère6. L’institution exprimait sa satisfaction d’avoir contribué à un ouvrage « rempli de tant d’informations et d’érudition qu’il est loué par tous ceux à qui il s’adresse, comme l’un des plus beaux d’Europe »7. Plus que la satisfaction d’avoir réalisé un bel objet, ils exprimaient surtout leur soulagement que les craintes émises publiquement sur la stabilité de la coupole se fussent définitivement dissipées. En effet, elles avaient gravement mis en cause, à travers Bernin, les choix architecturaux d’un collège cardinalice, en l’occurrence les fabriciens. Malgré sa diffusion exiguë, l’ouvrage avait atteint son but.
5La structure décousue du Tempio Vaticano dévoile la nature des débats qui ont dû ralentir la composition et la rédaction. La question d’origine n’est pas véritablement traitée, du moins frontalement. Seules deux pages, placées au milieu de généralités sur la construction de la coupole, fournissent les « raisons pour lesquelles on ne peut douter de la fermeté et de la stabilité de la coupole vaticane ». Le court chapitre invoque des questions d’autorité sur cet édifice. Il répète le discours inaugural, affirmant que quiconque ne peut émettre un jugement sur les « sublimes édifices (fabbriche magnifiche) » qui « saisissent le monde de stupeur ». La spécificité de ces constructions requiert des discours spécifiques rédigés par des auteurs autorisés. Ils ne peuvent donc légitimement faire l’objet de débats et encore moins de polémiques.
6Selon Fontana, les fissures visibles dans le pilier ne sont dues qu’au tassement au moment du désarmement des échafaudages. Et cette « stabilité est confirmée par le fait que toutes les parties [tambour, coupole et lanternon] sont toujours restées indemnes et intactes ; l’opération et la composition ont été plutôt reconnues par l’assistance divine que par le comportement des architectes hautement ingénieux »8.
7Le reste du Tempio Vaticano traite des questions de stabilité de la basilique, mais par circonvolution. Le 1er livre relate en détail le site antique du Mont Vatican et des édifices qui se trouvaient dans son périmètre. Évoquant la présence des restes du cirque de Néron sous la moitié sud des fondations de l’actuelle basilique, mais aussi le terrain anciennement déclive, il ouvre naturellement des questionnements sur la stabilité. Le 2e livre tente de dessiner l’histoire de la construction de la basilique constantinienne et fournit une description de ses monuments, sur le modèle d’Alfarano. Curieusement, il s’achève avec une dissertation « essentielle » sur les toits. La manière dont les travées du toit de la nef centrale avaient été conçues qui a « beaucoup plu » à Fontana ; le fait que seuls les professeurs doivent concevoir les toits pour éviter les modes impropres des artisans ; la manière – toute intuitive cependant – selon laquelle on doit calculer la pente du toit. Ainsi les préoccupations relèvent des couvertures. Le lien avec le problème de la coupole ne réside pourtant que dans l’élévation. Le 3e Livre constitue un hommage aux exploits technologiques de la fabrique et relate, s’il en était encore besoin, le déplacement de l’obélisque par Domenico Fontana. Le 4e livre dresse les louanges de son maître Bernin, en décrivant avec force détails la colonnade de la place ainsi que la Scala Regia. Seule une évocation du campanile qu’on fut contraint de détruire pourrait venir tenir sa réputation. Mais Fontana estime sa perte négligeable puisqu’il ne trouvait pas sa place, pour des raisons esthétiques et non techniques, à l’extrémité de la façade.
8Le 5e livre procède à une description de l’intérieur de la basilique qui nous mènera enfin jusqu’à la coupole. Il est fort commode pour Fontana de commencer par les problèmes que rencontra Maderno dans l’établissement des fondations de la façade. Ayant creusé à un niveau inférieur à celui du cours du Tibre, les inondations ne tardèrent pas. Si cette question est livrée sur le ton de la conjoncture, il n’en va pas de même pour le problème, épineux à traiter pour l’élève de Bernin, du campanile. Ce chapitre commence par de grande généralités théoriques, invoquant les autorités. Et voici Alberti, le Vitruve de Barbaro et Columelle qui nous livrent leurs secrets sur la bonne manière de creuser les fondations et de proportionner les colonnes. Le Bernin était limité par le souhait de ne pas élever une façade qui pût obstruer la vision de la coupole depuis la place. Toute la faute cependant revient à Maderno, directeur des travaux, qui « comme on sait, avait abandonné son travail de maçon et s’était attribué le nom d’architecte »9. Habilement, Fontana ne reconnaît qu’un tort à Bernin, celui d’avoir laissé les fabriciens ordonner la démolition du campanile. Il est vrai qu’au sein de la fabrique, la question avait alors été posée.
9Comment procéder avec Bernin ? Vespignani avait alors tranché, tentant d’apparaître pour une fois impartial. Il considérait qu’on devait se comporter à son égard « comme à celui de n’importe quel ouvrier (fabro) qui a reçu de l’argent pour un ouvrage public »10. Selon Fontana, la possibilité de le réparer subsistait toutefois, en créant des fondations de soutien qui auraient absorbé une partie de la charge. La large fissure de la façade, nous dit-il, n’était due qu’au tassement de l’édifice. Il reprendrait plus tard cet argument pour justifier que la fissure du pilier ne présente aucun danger pour la coupole. Dans la suite de l’ouvrage, la présentation de la coupole fait appel à des comparaisons avec celle de Sainte-Marie-de-la-Fleur de Florence et débouche, malgré une reconnaissance fugace de la valeur et du mérite des architectes Domenico Fontana et de Giacomo della Porta, sur les capacités de conception de Michel-Ange. Or, comme nous l’avons vu, le projet a subi d’importantes modifications depuis sa mort. Le discours serpente ensuite entre les comparaisons, notamment avec le Panthéon et les règles générales pour l’édification des coupoles. Il s’achève sur les décorations intérieures qui dépassent notre propos. Le 6e Livre est consacré à des questions financières, thème inhabituel des traités d’architecture moderne mais qui rencontre les préoccupations vitruviennes du devis. Il vise à montrer, par une fine comparaison avec le coût du temple de Salomon révélé à Villalpando, que l’argent collecté pour la reconstruction de la basilique fut employé avec justesse. Le 7e et dernier Livre est consacré au Panthéon, permettant ainsi d’inscrire la coupole vaticane dans un destin d’éternité délivré de tout souci de stabilité.
10Avec le Tempio Vaticano, la fabrique inaugurait plus qu’une nouvelle manière de promouvoir son image, elle dessinait les contours d’un récit officiel, reposant sur un rapport complexe à l’histoire. Ce récit était fait d’une stratification d’un lieu, dans lequel les questions architecturales et symboliques se disputaient le premier rôle. Le modèle proposé par Alfarano au XVIe siècle (fig. 2) se trouvait déployé par Fontana, en plan, en élévation, en profondeur aussi avec les différents graphiques des fondations. Au récit s’ajoutait une conviction d’excellence, propre elle aussi à la Renaissance, construite sur des comparaisons en étoile avec d’autres « fabriques magnifiques », revenant toujours sur la primauté de la nouvelle basilique. Cette excellence était avant tout technique et dénotait en filigrane la capacité exceptionnelle des fabriciens à organiser un chantier d’une telle ampleur et d’une telle complexité. Cette stratégie était le résultat gagnant d’une profonde connivence entre Fontana et Vespignani11.
11Naturellement, les entreprises de publication de la fabrique, ou plus exactement celles qu’elle a impulsées et financées, ne sont en rien comparables avec l’ampleur et l’intensité de celles proposées par la chalcographie. Les feuilles gravées circulaient aussi plus volontiers que les encombrants volumes. Benoît XIV, conscient de l’importance des gravures, réforma par ailleurs cette dernière, lui donnant entière autonomie et plaçant à sa tête le fidèle Valenti Gonzaga12. Elle possédait une longue tradition de promotion des œuvres pieuses pontificales et du patrimoine artistique mais elle s’orienta alors dans une nouvelle direction, mettant en avant une conception plus globale du territoire, comme l’attestent les publications de la grande carte de Rome de Giovanni Battista Nolli en 1747 et la nouvelle carte de l’État ecclésiastique qui accompagne la très étonnante Expédition littéraire des Jésuites Christopher Maire et Ruder Boscovich (1755). À travers les mesures géodésiques prises sur le méridien entre Rome et Rimini, c’est la terre tout entière qui était remise en ordre depuis le Siège pontifical.
12La fabrique reprit ainsi ses publications sous le pontificat de Benoît XIV, réaffirmant sa précellence dans le domaine architectural. Elle le fit alors un peu à contre-courant des traités d’architecture de l’époque, préférant aux modèles de colonnes et aux suggestions de distribution, mettre en avant les exposés technologiques. Le Castelli e ponti de Niccola Zabaglia (1743) est un ouvrage consacré aux échafaudages ; son ambition va cependant au-delà d’une simple collection commémorative13. Il est unique à plusieurs titres : en premier, car il vulgarise le travail d’un ouvrier manuel ayant de longues années dirigé les éphémères constructions de bois nécessaires à l’entretien de la basilique ; deuxièmement, car il met en scène un savoir technique, renouant avec la tradition des théâtres de machines de la Renaissance. Le culte des sciences de l’âge classique avait quelque peu exclu ce domaine du savoir des rayonnages de librairie.
13Le projet de livre fut initié sous Clément XI « pour le service de la fabrique »14 puis interrompu vingt ans avant de sortir finalement en 1743. Le texte résulte d’une collaboration avec l’abbé Lelio Cosatti, un amateur d’architecture qui joua un rôle essentiel dans la polémique sur la coupole. Il en rédigea les commentaires ensuite traduits en latin par Niccolo Salulini, professeur de droit à La Sapienza15. Ces textes furent livrés en août 174316. La série de planches commence avec les outils du menuisier, montre ensuite nombre de machines à poulies destinées à la levée des matériaux, d’autres servant à leur transport, mêle des scènes d’instrumentation en situation avec des planches plus allégoriques composées d’improbables échelles télescopiques, parvient enfin à la voûte de la coupole pour laquelle Zabaglia inventa d’ingénieux systèmes d’échafaudages accrochés à l’imposte intérieure du tambour (fig. 3). L’ouvrage, vers sa fin, reprend certaines planches du transport de l’obélisque de Domenico Fontana, comme si elles constituaient un moment fondateur des publications techniques de la fabrique.
14Les Memorie istoriche della gran cupola del Tempio Vaticano, publiées à Padoue par le marquis Giovanni Poleni vers la fin de l’année 1748, constituent un monument à l’œuvre de la coupole et à sa restauration. Commandées par Benoît XIV et financées par la fabrique, elles forment une réponse rationnelle, factuelle et théorique au chaos que la violente polémique avait engendré. Peu de savants, dans l’Italie du premier XVIIIe siècle, pouvaient mettre en avant la triple compétence que Poleni revendiquait : une expérience des chantiers, une recherche scientifique expérimentale et une capacité de rédaction éprouvée. Par ailleurs, Poleni n’était pas un inconnu des milieux romains : il avait déjà été sollicité par la Chambre apostolique dans le passé. Clément XII l’avait fait demander par l’intermédiaire de Manfredi pour connaître son avis sur le calendrier17.
Giovanni Poleni : techniques architecturales et savoir antiquaire
15Le professeur de « philosophie expérimentale » à l’université de Padoue, un intitulé de chaire rare et innovant à l’époque, peut sembler une figure en décalage avec son temps. Sa carrière académique fut marquée par une volonté de faire évoluer les catégories disciplinaires séparant mathématiques et physique et d’insuffler, à travers l’expérimentation, une nouvelle impulsion didactique. Son engagement universitaire s’est aussi doublé d’une activité d’expertise, notamment dans les questions hydrauliques auxquelles la République de Venise était fréquemment confrontée : érosion lagunaire, ensablement des ports, construction des polders, drainage des bas-champs, déforestation et zones alluviennes… Son activité académique se doublait d’une importante responsabilité sociale. À partir de 1738, il assuma différentes charges politiques au sein de la commune de Padoue ; il put renforcer le rôle que les savants jouaient dans l’espace publique, en particulier dans le domaine de l’ingénierie civile. Ses contributions, nombreuses, au domaine de l’architecture peuvent être vues comme des expertises. Elles portaient alors souvent le nom « d’information », ne relevant pas du cadre décisionnel qui dépendait des fabriques et autres conseils administratifs. Il ne fut pas à proprement parler architecte, du moins dans le sens contemporain du terme. Il est vrai que Poleni ne signa aucune construction et qu’il ne fut appelé à émettre un avis que dans des cas de dangers structurels des édifices. La division des interventions architecturales alors doit être plus vue comme ordonnant les opérations selon deux mouvements distincts : d’une part, le projet et d’autre part, le toisé. La planification contre l’analyse en somme. D’un côté, une composition des formes dans une optique constructive ou restauratrice, de l’autre une déduction des conditions réelles dites « naturelles », dans une optique financière, fiscale ou conservatoire (fig. 4).
16Pour cette raison, malgré sa profonde connaissance du milieu de l’architecture, Poleni fut parfois regardé comme un « expert des théories mathématiques et de l’hydraulique mais peut-être moins exercé (pratico) dans l’art de l’édification »18. Il faut dire qu’il fut l’élève de Jacob Hermann qui introduisit à Padoue le calcul différentiel et la géométrie cartésienne, une réputation qu’il dut longtemps assumer. Sa première intervention remonte à 1726 : en treize pages, il livre son sentiment sur la stabilité des tirants des arcs de l’abside de la basilique Saint-Antoine19. En 1729, il est conduit au chevet de l’une des coupoles de la basilique Saint-Marc20 ; cette expertise est suivie de l’examen, en compagnie de Giovanni Francesco Orsato, du palais de la douane de Padoue en 1731. De nombreuses autres se succédèrent, en particulier après l’épisode romain : le Monte Berico de Vicence (1746), les ruines du château de Brescia ainsi que la cathédrale (1748), la transformation du pont du Rialto (1749) et la façade de la Scuola di San Rocco ; tant d’autres à Padoue même : la basilique de Saint-Antoine suite à un incendie (1749), le palais de la Ragione après la tornade (1756) puis le défi de sa voûte en charpente sans colonnes (1758)21.
17Scientifique reconnu en son temps, membre de la Royal Society et des Académies des sciences de Berlin et Pétersbourg, Poleni entretint des relations avec une grande diversité de savants, qu’ils soient spéculatifs ou praticiens, indépendamment des clivages théoriques. Il constitue un jalon essentiel pour comprendre les liens dialectiques qui s’ébauchent alors entre science et technique. Plus encore, son action éclaire l’extension du domaine de l’expérimentation classique, jusqu’alors centrée sur la connaissance de la matière, vers la constitution des pratiques. Son itinéraire au sein de l’atheneum padouan éclaire largement son programme : nommé en 1710 sur une chaire d’astronomie, il évolue rapidement vers la chaire de philosophie naturelle où il met en avant tout l’intérêt d’une approche mathématique pour la physique, puis vers la chaire de mathématique, où il ne cesse de professer l’importance de la physique comme fondement des sciences du nombre et de celles de l’espace22. Il confirme la qualité des mathématiques comme méthode (mathesis) mais remet en question leur rôle dans l’établissement d’hypothèses indépendantes des réalités matérielles observables : pour cette raison, Poleni est difficilement classable dans le triangle Descartes-Leibniz-Newton qui polarise le débat scientifique du premier XVIIIe siècle. Il ne se contentait pas d’interroger les limites disciplinaires. Dans son enseignement, il tenait à situer les contenus dans une perspective historique. Son cours d’histoire des sciences remontait à la géométrie des indivisibles de Bonaventura Cavalieri, confrontait Descartes et Newton avant de parvenir à la théorie des probabilités de Jakob Bernoulli et aux démonstrations astronomiques sur le système héliocentrique d’Eustachio Manfredi23.
18En 1739, il parvint à convaincre les autorités académiques de créer une chaire de « philosophie expérimentale » dans laquelle il pourrait développer sa méthode d’investigation scientifique liée à la confrontation du savoir établi tant avec l’héritage disciplinaire qu’avec la mise à l’épreuve. Cet enseignement académique était renforcé par un laboratoire, créé la même année, en dépit du scepticisme d’une large partie du sénat. Le fameux « théâtre de philosophie expérimentale », était un lieu d’expérience et d’enseignement, composé d’instruments reproduisant des conditions réelles mais observables. Une centaine d’entre eux sont parvenus jusqu’à nous24. Plusieurs de ces machines furent employées à l’occasion de la restauration de la coupole de Saint-Pierre.
19Parallèlement et pour ainsi dire, consubstantiellement, Poleni était un grand connaisseur de la science Vitruvienne ; non seulement le Vitruve de l’édification romaine, mais également le Vitruve comme méthode de connaissance et, plus encore, d’exposition du savoir. Il fut attiré vers l’Antiquité par les philologues allemands Graevius (1632-1703) et Gronovius (1611-1671) dont les travaux, par leur caractère systématique et classificatoire, l’avaient séduit. Mais la persévérance dont ils firent preuve donna à Poleni la force de forger une nouvelle manière d’interroger ce domaine du savoir. Ses recherches se fondent sur une méthode d’investigation qui puise en permanence ses ressources dans la confrontation entre connaissance de l’Antiquité et hypothèses contemporaines. Il y trouve ses outils de validation ou de mise en question.
20Dans son édition du De Aquis urbis Romae de Frontin en 1722, Poleni développe une « méthode de conjecture » visant à établir le texte au plus près possible de sa réalité du Ier siècle. En bien des points, elle remet en cause la version de Frontin publiée en 1513, alors considérée comme canonique. Cette démarche ne relève pas seulement d’un intérêt antiquaire, mais elle doit également permettre une évolution des questionnements contemporains sur l’architecture hydraulique. Les cinq volumes qu’il consacre à la poursuite du Thesaurus antiquitatum Romanarum (1737), dont le très utile index, mettent en œuvre la même méthode pour les témoignages matériels de l’Antiquité25. Ses abondantes recherches sur le texte de Vitruve, qui ne seraient mises en ordre et publiées qu’après sa mort entre 1825 et 1830 par son élève Simone Stratico, sont destinées à composer un corpus sur les techniques de construction des Anciens, comprises à la lumière des connaissances contemporaines. On disait alors que Poleni « avait réduit Vitruve à son véritable enseignement »26. Mais quelle est cette vérité ?
21Poleni déclare dans une lettre à Ludovico Antonio Muratori, autre éditeur infatigable de sources anciennes : « il faut utiliser de nombreuses parties des mathématiques mais selon la constitution qu’elles possédaient au temps où Vitruve écrivait »27. Il met ainsi en garde contre un usage instrumentalisé et anachronique des savoirs des Anciens, critique assez nette tant à l’égard de l’humanisme de la Renaissance que de la scolastique du XVIIe siècle. Cette exigence pourrait sembler contradictoire avec l’affirmation de Stratico qui décrivait le travail de son maître selon la double inspiration : « en suivant le texte de Vitruve et l’esprit de Newton »28. Cependant, il n’en est rien. La connaissance historique de ces textes repose sur la conscience du décalage historique, puisant chez Vitruve la force explicative et chez Newton la modernité démonstrative. Appliquer Newton à la philologie signifie pour lui partir de la réalité historique du texte vitruvien. Il s’agit de reconstruire le rapport entre Antiquité et Modernité et non d’opposer les deux périodes, se réfugiant dans l’une pour exclure l’autre. Dans cette pensée, l’architecture et la science de la construction ne forment pas deux domaines séparés : l’art de bâtir constitue une seule préoccupation. La dissociation entre les deux ferait la force du début du XIXe siècle – les temps de Stratico – en confirmant et renforçant les puissantes écoles d’ingénieurs établissant les savoirs constructifs indépendamment de la connaissance antiquaire. Ce n’était pas le projet intellectuel de Poleni.
22Poleni avait surtout publié en astronomie, en météorologie et en hydrologie. Il avait par ailleurs largement avancé son œuvre sur la construction antique : trois volumes des Exercitationes Vitruvianae, les pratiques vitruviennes, étaient sortis des presses. Il y présentait notamment les interprétations des différents éditeurs et traducteurs de Vitruve. En 1742, il publia son étude sur le temple de Diane d’Éphèse dans les actes de l’Académie étrusque de Cortone. Dans le même volume, on trouvait une contribution de Diego Revillas.
23Les thèmes de ses enseignements reflètent cet univers intellectuel. L’architecture militaire, partie traditionnelle des mathématiques ainsi que la mécanique, étaient à son programme depuis les années 1720. Mais il n’intégrerait l’architecture navale et, plus étonnamment, l’architecture civile, qu’à partir de 1756, donc bien après la publication des Memorie. Si le regroupement des chaires de philosophie expérimentale et de nautique correspondait à une conception ancienne des mathématiques, Poleni y développa une conception des mathématiques mixtes proche de la mécanique rationnelle, réaffirmant la primauté de la matière et la fonction du calcul comme descripteur de cette réalité. L’intégration de l’architecture civile au cours de mathématique, y compris la théorie des ordres, constituait une décision courageuse et volontariste, contestant la séparation alors croissante entre la science de la construction et l’art de l’architecture. Cet enseignement, sans se limiter à Vitruve, reposait largement sur le cours de François Blondel et se permettait quelques incursions dans des ouvrages beaucoup moins classiques comme celui de Villalpando29. L’intérêt de Poleni pour la théorie de l’architecture était vaste en particulier lorsqu’elle parvenait à dépasser la fracture technique et associait les différents arts du dessin, dans la définition que la Renaissance avait léguée.
Les « Memorie » : la polémique comme fresque historico-scientifique
24C’est avec cette préparation et aussi cette exigence intellectuelle que Poleni s’engagea dans la rédaction de l’ouvrage monumental des Memorie qui dresse un vaste tableau historique et synchronique de la coupole de Saint-Pierre. La structure de l’ouvrage suit un plan rationnel, alternant parties narratives et thématiques, affirmant graduellement et avec habileté les choix de restauration mis en œuvre.
25Le premier livre retrace l’histoire du site de la basilique, depuis le Cirque de Néron, ainsi que la construction, depuis la basilique constantinienne jusqu’à l’édification de la coupole. Il décrit les grands traits de celle-ci, mêlant remarques sur ses particularités et règles générales d’édification des voûtes et coupoles. Il met l’accent sur les difficultés techniques de la construction : la variabilité des matériaux, la friction des pierres et les mortiers ou les effets des variations climatiques. Le livre s’achève avec une description détaillée et justifiée de l’emploi des cercles de fer.
26Le 2e livre est consacré plus spécifiquement à l’établissement des problèmes observés sur la coupole. Après avoir relativisé le caractère exceptionnel des fissures de Saint-Pierre en apportant plusieurs exemples, dont la coupole de Florence, il relate brièvement les moments d’inquiétude aiguë sur sa stabilité : l’époque de Serlio, celle de Maderno, puis enfin celle de Bernin. Le premier observait la mauvaise qualité des fondations et de la maçonnerie, le second devait remédier aux « contre-fissures ou infortunes »30 provoquées par l’allongement de la nef et le troisième, en ayant aménagé des escaliers dans les vides-noyau des piliers de la croisée, aurait affaibli leur résistance. Ces moments sont choisis en fonction de l’écho qu’ils reçurent dans le public : à l’époque de Serlio, « à cause des désordres de l’édifice, les différentes interprétations et les controverses ne manquèrent pas »31 ; à celle de Maderno, « il y eut des désaccords et des rumeurs »32 ; à la mort de Bernin, enfin, on connut une « fière bourrasque »33. Poleni qualifie ces moments de crainte de « défauts » de la coupole, renvoyant à leur cause plus qu’au contexte de leur émergence. Sans passer par une désignation des problèmes techniques dans leur synchronie, Poleni fait ensuite référence aux « premiers défauts » pour parler de la question des fondations et de l’édification des murs, aux « seconds défauts » pour désigner tout ce qui, dans les travaux postérieurs à l’édification de la coupole, eut une incidence sur celle-ci et des « troisièmes défauts » pour parler de la stabilité des piliers en particulier de celui de Véronique. Si le choix de ces moments n’est pas dû à l’importance statique des défectuosités mais à l’ampleur des craintes que celles-ci suscitèrent, ce n’est pas seulement parce qu’ils sont naturellement mieux documentés. Ces appellations, qui suivent une séquence chronologique, dénotent un mode explicatif accordant autant d’attention aux racines historiques des problèmes qu’à leur caractère technique.
27Les problèmes qui causèrent la polémique des années 1740, visibles à travers la dilatation de la fissure du pilier de Véronique et les fissures réticulées du tambour et de la coupole intérieure, furent, dans cette perspective, qualifiés de « quatrième défaut ». Et la rumeur commença cette fois, précisément en 1740, année de l’élection de Benoît XIV. Poleni, dans ce deuxième livre, trace les grandes lignes de l’évolution de la polémique et justifie, peu à peu, le choix du pape de lui confier la direction des travaux. Ce Livre s’achève sur une partie essentielle, documentant en détail l’expertise conduite conjointement avec Vanvitelli à partir de 1743 et formant un argumentaire incontestable sur la nécessité d’une intervention. Au moyen de dix-neuf planches gravées, l’accent est mis sur une preuve de nature visuelle. Ce document, qui se présente de manière autonome à l’intérieur du volume, est appelé le Stato dei difetti, l’état des défauts.
28Avec le 3e livre, commence la matière « très difficile et très dangereuse ». Poleni y présente dix-neuf écrits, rédigés entre la fin de l’année 1742 et son arrivée à Rome, en mai 1743. Ces interventions prennent place dans un contexte de concurrence, où les décisions de restauration n’ont pas encore été rendues publiques et le choix de ceux qui les dirigeraient n’était pas encore arrêté. Au cours de la rédaction, Poleni ne souhaitait pas faire figurer ses propres rapports « par respect pour les autres »34. Il se résoudrait finalement à donner un très bref résumé de ses longues expertises, destinant une partie de la matière à d’autres sections du livre. S’il ne cache pas ses opinions, il laisse de côté le détail des critiques techniques adressées aux autres contendants qui se trouve dans les rapports envoyés au pape et aux fabriciens. En somme, les Memorie ne proposent pas de comparaison des propositions et ne livrent par conséquent pas au lecteur les raisons qui ont conduit le pape à choisir le savant padouan parmi d’autres. Cette attitude, une modestie de façade, est en réalité une position stratégique.
29Le 4e livre s’ouvre sur quatre contributions dont Poleni a eu connaissance après son voyage à Rome et, par conséquent, après l’exposé des remèdes conseillés. Ces rapports sont ici séparés de ceux présentés dans le livre précédent puisqu’ils n’ont pas nourri sa réflexion sur la restauration. S’il évoque les vertus de la controverse, permettant de faire naître la vérité par la confrontation, il n’en passe pas moins sous silence une série importante de contributions. Cette ellipse lui donne l’occasion de dresser un tableau des modes explicatifs invalidés par la science. Cette synthèse est générale et thématique et non nominale ou personnelle. Il appelle « systèmes, les propositions introduites pour attribuer à une cause pernicieuse primordiale tous les effets des dommages que l’on peut observer dans la grande [coupole] »35. Apparaît à ce stade l’un des terrains d’affrontement les plus durs, concernant les causes des fissures et qui polarisa les débats plus encore que les remèdes à employer. Ces causes sont classées selon deux catégories : les causes internes et celles externes. Les causes internes concernent les questions de construction et renvoient à l’histoire architecturale de la basilique. Les causes externes – événements climatiques et sismiques – font naturellement moins l’objet de discussions. Encore faut-il déterminer quelle est la part des catastrophes naturelles et celle des erreurs humaines ! Le chapitre de synthèse que Poleni consacre aux causes internes vise à un apaisement : il dédouane Bramante sans accabler ses successeurs. Il préfère ne pas entrer dans les débats partisans. Ce choix le conduit à renoncer à traiter frontalement dans les Memorie l’un des aspects décisifs de la polémique, celui des responsabilités historiques. Il est largement plus disert et volubile, fournit nombre d’arguments chiffrés, dans les deux paragraphes qui suivent, consacrés aux remèdes à éviter et à ceux à prescrire. C’est précisément parce qu’il n’y a pas véritablement d’enjeu dans ce domaine qu’il s’y exprime avec aisance. À l’exception de certains, refusant l’emploi des cercles dans l’architecture en général, et de quelques remèdes relativement marginaux çà et là évoqués, les opinions sur la restauration convergent assez largement.
30Le 5e et dernier livre, composé juste avant la sortie des presses, expose brièvement la découverte en 1747 de la rupture de deux des cercles anciens. Peut-être cet événement encouragea-t-il l’achèvement d’un ouvrage dont la rédaction avait commencé cinq ans plus tôt. En dévoilant une cause interne jusque-là ignorée, il invalidait une partie des violents débats qui avaient eu lieu…
31En effet, c’était au cours de l’été 1743, alors que les décisions sur la restauration étaient désormais prises, que Benoît XIV fit savoir à Poleni qu’il serait opportun de rédiger un ouvrage contenant le récit de la construction de la coupole. Celui-ci devrait en outre relater le débat qui continuait de faire rage à Rome. Peut-être le pape espérait-il réitérer le succès rencontré à la fin du XVIIe siècle, lorsque l’ouvrage de Carlo Fontana avait contribué à faire définitivement taire les contestations ? La voie empruntée était cependant extrêmement différente. Alors que le Tempio Vaticano contenait un récit positif de la construction, reposant sur une méthode comparative visant à placer la basilique de Saint-Pierre sur un terrain incontestable, Benoît XIV, en demandant d’apporter une synthèse des débats, engageait l’entreprise dans un terrain beaucoup plus dialectique et potentiellement source de nouvelles querelles. Avec prudence, Poleni considérait son ouvrage plus comme une suite que comme un nouveau Fontana36. Pour parvenir à cette synthèse des débats, il entendait concentrer son attention sur le contenu des réflexions et délaisser autant qu’il serait possible, les querelles entre personnes. L’exercice était périlleux. Le public attendait en outre que la polémique ne restât pas vaine, qu’elle servît d’enseignement pour l’avenir. Il fallait que la multitude d’interventions permît de disposer, comme la presse s’en fit l’écho, d’une « grande quantité de matériel duquel construire une science assurée de la construction de ces grandes masses »37.
32Plus tard, comparant les ouvrages de Fontana et de Poleni, Bottari considéra dans son édition des Vies de Vasari que celui-ci en avait donné une lecture « incomparablement plus profonde et avec beaucoup d’érudition »38. Ainsi, alors que le Tempio Vaticano devait servir d’Académie d’architecture, en termes plus d’édification morale que de formation technique, les Memorie furent reçues quant à elles comme une « bibliothèque architectonique pour tous ceux qui auront à faire avec les coupoles, qu’il s’agisse de leur construction, de leur conservation ou de leur restauration »39.
33Bien que Poleni eût immédiatement délivré son accord pour s’engager dans cette entreprise éditoriale – à vrai dire un consentement mêlé de soumission – il semble qu’il ne se soit véritablement attelé à la rédaction qu’en 1744, au terme d’un long échange épistolaire avec Vanvitelli. Cette correspondance avait conduit à une formalisation de l’exposé des fissures, verbale et figurée, le stato dei difetti. Le mathématicien ne souhaitait vraisemblablement pas s’engager dans la rédaction d’un ouvrage sans y intégrer un état du problème incontestable puisque visuellement fondé. Le document conférait également un caractère institutionnel et officiel à un travail scientifique établissant une partie des faits les plus disputés40.
Une rédaction sous contrôle officiel
34Le pape confia à son médecin personnel Antonio Leprotti le soin de communiquer à Poleni, alors résident à Padoue, tous les documents ayant trait à l’affaire et de suivre l’évolution de la rédaction41. L’archiatre secret accompagna avec le plus grand empressement les travaux et la compilation. En fait, depuis 1743, Leprotti jouait le rôle d’intermédiaire entre Poleni et le pape et était responsable de la sélection des documents envoyés à Padoue. Là-bas, on comprit très vite qu’un filtrage avait été sciemment mis en place. L’abbé Raimondo Cecchetti, un ancien élève de Poleni désormais résidant à Rome et qui jouissait d’une certaine confiance auprès de l’archiatre pontifical, recopia secrètement plusieurs de ses lettres et les envoya à Padoue42. Leprotti fit savoir à Poleni qu’il était au fait de cette petite opération d’espionnage mais qu’il pouvait cependant continuer à écrire « en toute liberté de soi-même »43. Mise en place au moment de la polémique, la procédure de contrôle se poursuivit pour la rédaction des Memorie. Après la mort de Leprotti en 1746, c’est Giuseppe Livizzani, lui aussi camérier secret, qui assumerait cette responsabilité. Le pape maintenait ainsi le pilotage de l’opération sous son contrôle direct, sans passer par la fabrique, évitant ce faisant Albani. Pour sa part, l’économe-secrétaire Olivieri envoyait à Poleni les documents émanant directement de la fabrique comme la version validée et officialisée du Stato dei difetti, ou les examens visuels de 174744. Mais les documents transmis, sous la forme d’imprimés ou de copies manuscrites, faisaient l’objet d’une sélection rigoureuse, à la hauteur de l’enjeu que représentait ce livre pour le Saint Siège45. Poleni dut se procurer certaines contributions dont il connaissait l’existence par l’intermédiaire d’autres personnes. L’aide de nombreux autres correspondants fut requise46. Afin de s’assurer connaître les avis de toutes les parties, il eut même recours aux services de Ruder Boscovich ou de Giovanni Bottari47. En 1744, conscient de la limitation des informations qui lui parvenaient par le canal officiel, il suppliait ce dernier de lui faire savoir « toute nouvelle chose sur la coupole, et pareillement si quelque chose était publié »48.
35L’éloignement permettait de contrôler Poleni. Leprotti n’a jamais transmis le rapport rédigé par Vanvitelli à la demande d’Olivieri à l’automne 1742 et qui constitue un des points de départ de l’avalanche d’expertises et contre-expertises49. Et cet oubli n’est pas le seul. Outre le double contrôle opéré par les autorités ecclésiastiques (la Chambre et la fabrique dont les vues n’étaient pas constamment convergentes), la publication fut soumise, pour des raisons légales, à l’approbation du sénat de Venise50.
36L’élaboration progressa laborieusement. Au cours de l’été 1745, Leprotti fit preuve d’une impatience quelque peu irréaliste : l’ouvrage avait pris une ampleur considérable et la matière était parfois difficile à synthétiser. Poleni lui fit part de sa difficulté à écrire la partie sur les opinions des uns et des autres. Il souhaitait « rester en dehors de toute critique et chercherait la meilleure manière de donner des extraits qui, s’ils ne sont pas brefs, seront purs, fidèles et simples »51. La décision fut prise de ne pas mentionner les noms des auteurs des contributions publiées anonymement. Un débat s’engagea cependant entre les deux hommes sur le titre à donner à l’ouvrage. Leprotti soutint le terme d’Istoria, pensant aux qualités d’objectivité et d’exhaustivité auxquelles le mot renvoie. L’histoire étant considérée comme close, du moins dans ses souhaits, il convenait d’en livrer une version définitive. Poleni, insistant pour sa part sur le fait que le livre contient « une matière doctrinale et des narrations », préférait le terme de memorie istoriche, évoquant les recherches d’archives, la collecte d’imprimés et de manuscrits. Il s’agissait ici de souligner le caractère de témoignage, sans conférer à l’entreprise un statut définitif.
37La plus grande partie de l’ouvrage fut rédigée dans les deux dernières années. Après la découverte de la rupture des cercles anciens, l’angle d’approche se trouvait profondément bouleversé. D’un récit mémoriel proclamé, ancré dans le vif des discussions et leur immédiateté conflictuelle, l’ouvrage de Poleni livrait désormais un regard froid sur une bataille désormais sans fondement. Les combattants eux, étaient toujours présents et il convenait de les ménager. Poleni confiait son découragement : « je considérais mon histoire de la coupole achevée, mais il s’avéra qu’elle devenait de plus en plus semblable à l’histoire du monde »52. Les consultations pour la rédaction s’intensifièrent. Poleni entretint notamment en 1747-48 une correspondance fournie avec l’architecte Tommaso Temanza sur l’état des coupoles de Venise et en particulier sur les cercles posés par Sansovino à trois des coupoles de Saint-Marc53. Si cette matière fut employée dans les Memorie (§185-188), Poleni ne s’encombra pas d’y remercier celui qui avait été son élève. Or l’ouvrage est le résultat d’un travail d’équipe soutenu. Une partie importante de la correspondance documentaire mais aussi de la rédaction a été effectuée par Francesco, le fils de Poleni, comme on le voit dans les notes apportées aux manuscrits de travail qui diffèrent en partie de la version publiée54. Giovanni écrit lui-même dans les Memorie : Francesco, « depuis son âge le plus tendre, prêta à mes études son concours appliqué et plein d’amour »55. À cette occasion, Francesco avait également accompagné son père lors du voyage d’étude à Rome en mai 1743. Pour ses efforts, ce dernier lui avait obtenu du pape une pension de six-cents écus, somme assez remarquable56.
38Vint enfin le temps de la fabrication éditoriale. Livizzani exprima le souhait de publier le livre dans un grand format, en « l’uniformisant à la taille de l’autre ouvrage, le Tempio vaticano du chevalier Fontana »57. Cela correspondait au souhait de Poleni de réaliser de grandes planches gravées, mettant clairement en évidence le réseau des fractures58. La continuité et la fonctionnalité des deux traités était réaffirmée. La réalisation matérielle mobilisa des artistes de confiance, familiers d’une collaboration avec le savant de Padoue. De nombreux intermédiaires furent impliqués : à Venise, c’est l’architecte Tommaso Temanza, son ancien étudiant, qui suivait la réalisation des plaques gravées pour Poleni59. Les planches furent dessinées par Antonio Visentini, un peintre de vedute, illustrateur par ailleurs de nombreuses publications vénitiennes60. Celui-ci avait déjà illustré des livres de Poleni, notamment l’epistolarum mathematicarum Fasciculus (1728) et surtout les Exercitationes vitruvianae, même si, pour des raisons éditoriales, il avait été nécessaire de renoncer à nombre des illustrations commandées61. Bien que Poleni eût préféré des gravures sur bois, elles furent exécutées sur cuivre par Pietro Monaco, un spécialiste de gravure d’interprétation installé à Venise62. Celui-ci avait alors publié de nombreuses planches de peintures d’histoire et collaboré à une publication d’Antiquités de Poleni. Elles furent tirées par Antonio Peroni63.
39Aux premiers jours de l’année 1749, l’ouvrage était enfin achevé, le séminaire de Padoue en ayant imprimé sept cent soixante-dix exemplaires. Poleni en envoya une copie au pape qui le remercia en retour par deux petits carreaux d’argent64. L’une de ces médailles portait un dessin inventé par Carlo Maratta et gravé par Francesco Juvarra, le frère de Filippo65. Il semble que Poleni ait en outre été gratifié de cinq cents écus et de cinquante exemplaires66.
40Au printemps encore, un intéressant colis fut envoyé de Padoue à Rome. Il contenait les vingt-huit grandes planches de cuivres et les trois petites, les lettres initiales gravées qui appartenaient légitiment à la fabrique puisqu’elle en avait financé l’impression. Les comptes définitifs et les factures les accompagnaient. Mais le colis contenait également quelques pièces plus inattendues : l’ensemble de la documentation qui avait été en son temps expédiée par Leprotti puis le « livre des figures faites à cette occasion et des fissures, ainsi que les notes qui y ont été portées lors des visites in situ »67. Par conséquent, la fabrique n’avait pas simplement financé un ouvrage servant sa politique de communication, elle s’était également rendue acquéreur du matériau intellectuel ayant servi à son élaboration.
41La longueur et l’abondance des rapports à disposition contraignirent Poleni à une opération de synthèse mais aussi de sélection. À travers les 669 paragraphes qui composent les Memorie, Poleni accumule une quantité de documents impressionnante mais construit également sa propre démonstration visant à justifier les choix de restauration mis en œuvre. L’ouvrage constitue le document le plus large et le plus détaillé sur la polémique autour de la coupole ainsi que sur sa restauration. Poleni veut donner l’image d’un auteur objectif, à l’égard de l’histoire et du temps présent. Il cultive les largeurs de vues et l’ouverture d’esprit, donne à chaque parti la parole, quelle que soit la validité des argumentations. Il n’adopte pas la position du polémiste. Il n’en reste pas moins que les Memorie ne peuvent être regardées comme un élément purement historiographique. Elles ont en effet été rédigées dans le feu de l’action par l’un des acteurs principaux de l’histoire qu’elles livrent à leur lecteur. On ne peut s’empêcher de s’interroger sur quelques incongruités relevées au cours de la lecture des Memorie.
42Tout d’abord à propos des faits. Relatant le congrès du 22 janvier 1743, Poleni souligne que les participants donneraient leur avis plus tard, par écrit68. Or la conclusion officielle, consignée dans le protocole fut : « tous s’accordent sur les dommages ». Olivieri tenait à ce que l’on ne discutât plus de la nécessité ou de l’inutilité d’une restauration, espérant passer à une étape successive du débat regardant les solutions de restauration. Mais le récit de Poleni sous-entend que cette commission ne serait parvenue à aucun accord, tous les aspects du problème seraient alors restés ouverts et toute décision reportée. Les sensibilités, en particulier celle de Bottari, étaient ménagées. De nombreux détails, dont on trouve cependant trace dans ses papiers personnels, sont également passés sous silence. Poleni ne dit mot sur une remarque du père Revillas, professeur de mathématique à La Sapienza, sur la rupture de témoins placés une année plus tôt sur des lézardes déjà anciennes. Cette information, « relatée par des gardiens », indiquait l’urgence d’une restauration alors que Poleni plaida constamment pour l’apaisement et les décisions réfléchies69.
43Avant la tenue de ce congrès, le pape anticipa les oppositions que l’avis publié par les Trois mathématiciens, un document intitulé le Parere, allait provoquer. Il s’était tourné vers d’autres mathématiciens, extérieurs à la scène romaine : Poleni à Padoue mais aussi Gabriele Manfredi à Bologne et enfin un groupe de mathématiciens napolitains réunis sous la direction de Pietro de Martini. Or Poleni présente les trois commandes pontificales sur des plans différents, effaçant la mise en concurrence qui eut effectivement lieu. Parallèlement au congrès du 22 janvier, il annonce dans les Memorie avoir reçu dès le 12 janvier un bref lui demandant son sentiment sur le Parere70. Les deux autres contributions, envoyées de Bologne et de Naples, sont présentées plus tard, dans le fatras des sentiments divers : qu’ils fussent officiels ou clandestins, sollicités ou spontanés. Cependant, rien ne laisse penser que le pape, à ce moment, avait déjà fait son choix entre les trois mathématiciens extérieurs consultés. Plus étrangement, Poleni cache le rôle essentiel joué par Celestino Galiani dans la mise en place de la commission napolitaine et les raisons ayant poussé ce dernier à la composer de manière différente de ce que le pape avait demandé. Des innombrables interventions de Bottari pour influencer les trois rapports extérieurs, Poleni ne dit également pas un mot.
44Les Memorie accordent une attention toute particulière à la légitimité des interventions, soulignant fréquemment la qualité officielle des instruments de décision. Un bref n’a pas la même valeur qu’une simple lettre. Un document authentifié par la chambre pèse plus qu’une feuille volante qui circule furtivement. Une congrégation ou congrès reçoit un traitement plus imposant qu’une simple assemblée informelle. Le Stato dei difetti, établi par Poleni en collaboration avec Vanvitelli, avait d’abord été authentifié en 1743, donc d’une certaine manière validé professionnellement, par les architectes Niccola Salvi et Pietro Hostini, le premier représentant la Chambre apostolique, le second le Bon gouvernement71. En 1744, une version peut-être destinée à une plus large diffusion est à nouveau authentifiée, mais cette fois par les officiels, le majordome Colonna di Sciarra « avec deux archivistes »72. Le faisceau de reconnaissance du document change alors significativement d’orientation. Son contenu est-il identique ?
45Les Memorie affectaient ensuite quelques déséquilibres. Les Sentimenti di un filosofo, rédigés anonymement par Giovanni Battista Faure à la demande du secrétaire des brefs, le cardinal Passionei, dispose d’un traitement impérial sur trente-quatre paragraphes. Cette étrange contribution, en décalage avec les pratiques scientifiques dominantes, n’apportait en outre aucune solution pratique de restauration, ne discutant que les outils intellectuels avec lesquels le rapport des Trois mathématiciens avait été élaboré. Cette attention particulière, qui ne s’explique que par le rang du commanditaire, est d’autant plus frappante si on la compare aux quatre maigres paragraphes avec lesquels la pétition du marquis Theodoli est expédiée. Ce texte, qui avait recueilli la signature de nombreux architectes et hommes de l’art sans recevoir toutefois l’appui officiel d’aucun prélat, visait à soutenir Vanvitelli, mettant en avant la qualité du travail d’investigation réalisé et la validité des propositions de restauration. Mais Poleni, qui dans son projet de restauration reprit une large partie des idées de Vanvitelli, les habillant toutefois d’un costume plus scientifique, ne s’attarda guère sur ce document. Ces deux exemples suffisent à montrer combien la rédaction des Memorie, malgré une objectivité affichée et sans aucun doute sincère, attache plus d’importance aux équilibres institutionnels et reflète largement les rapports de forces en présence.
46Enfin les absents. Malgré l’étendue et la diversité des opinions livrées par les vingt-trois contributions qui composent les Memorie, plusieurs acteurs de poids sont absents. L’ouvrage ne prétend pas se faire l’écho du seul débat romain et intègre des contributions extérieures, parfois spontanées mais qui ont donné corps à la polémique. L’étude de Gaetano Chiaveri, depuis Dresde, constitue un exemple certes éloigné géographiquement mais présent sur la scène romaine par des publications dès 1744. Pourquoi alors n’avoir rien dit sur le projet de Carlo Francesco Dotti venant de Bologne ? Pourquoi aussi ne rien raconter de la contribution d’un autre architecte, Giovanni Amico, envoyée de Sicile cette fois ? Doit-on la présence de Chiaveri aux liens d’Annibale Albani, protecteur du royaume de Pologne, avec la cour de Saxe ? Doit-on voir dans l’absence de Dotti la main de milieux bolonais à travers l’évêque de la ville, Benoît XIV en personne ? Si Lambertini avait soutenu Dotti en 1731 dans le concours du Latran73, dans les années 1740, son manque d’enthousiasme pour le travail de l’architecte était notoire74. Pourquoi Amico, enfin, dont la contribution est connue par le dossier documentaire constitué par Bottari, est-il systématiquement exclu des débats ? Il n’est pas impossible que son argumentaire, fondé sur une pratique de l’architecture de terrain, constituait une ultime cartouche pour Bottari dont le pensionnaire du Palais Corsini ni fit toutefois jamais publiquement usage.
47Poleni, malgré l’impartialité qu’il affectait, avait manifestement procédé à une soigneuse sélection.
Notes de bas de page
1 Turrizani 2012 : 535-549.
2 Rééditée par Martino Ferrabosco : Planta veteris novique Templi Sancti Petri ab originali typo impresso Tiberii Alpharani in Archivo eius Basilicae sumpta fideliter, 1620. Voir Beltrami 1925-26 : 19 ; Del Re, 1969 : 296 ; Bentivoglio 1997 : 247-254. Alfarano avait réalisé ce plan en 1571 et il fut imprimé pour la première fois en 1589-90.
3 Fontana 1694 : 1.
4 AFSP, Arm 12, D, 3a, fol. 241v-242v.
5 Le 10 mars 1700, les fabriciens concédèrent au cardinal Barberini la possibilité de solder le livre (AFSP, Arm. 16, A, 167, f. 202 v) et en 1703 de généraliser la vente à bon marché (Hager 2003 : xxxv, voir également AFSP, Arm. 16, A, 168, f. 28).
6 En 1712, Fontana reçut une récompense de 1000 écus et une rente annuelle de 300 écus (AFSP, Arm. 27, C, 403, f. 178 v, 197). Il semble que cette rente fut également versée aux héritiers (Hager 2003 : xxxv).
7 AFSP, Arm. 49, F, 7, f. 1051 v.
8 Fontana 1594 : 354.
9 Fontana 1594 : 259.
10 AFSP, Arm. 49, F, 7, fol. 919.
11 Sur les prémisses de cette collaboration, en particulier dans le domaine hydraulique, voir Bonaccorso 2008 : 151-156.
12 Sapori 1998 : 307-322.
13 Marconi 2012 : 477-510 ; Marconi 2015.
14 Marino 2008 : 39.
15 Beltrami 1925-26 : 24
16 AFSP Arm. 50, B, 17, Fol. 1056r-1060r.
17 Lettre de Poleni à Agostino Bianchi du 18/01/1743 (BNM, It. X, 312, 6552, fol. 31).
18 ASSM, A-1114-8a, fol. 4.
19 Galiazzo 1988 : 183-184.
20 Cavallari-Murat 1963 : 68.
21 Voir les informations contenues dans le BNM, It. IV 684 (5563) reprises en grande partie, mais sans les dates des expertises, dans Gennari 1839.
22 Voir ses discours inauguraux, le De Physices in rebus mathematis (1715) et le De Mathesis in rebus physicis utilitate (1720) qui constituent les deux volets de cette réflexion.
23 Cours d’histoire des sciences dispensé en 1736-37 et 1737-38 : BNM, It. 636 (5497). Voir aussi Casini 1983 : 179-181.
24 Salandin, Pancino 1988 : 23-145 ; Talas 2013 : 247-276.
25 Nardo 1981 : 1-40.
26 BNM, It. IV 684 (5563), fol. 1v.
27 Viviani 1825 : 16. Sur les liens entre Muratori et Poleni et le contexte intellectuel voir Boutier 2005 : 193-207.
28 « Juxta textum Vitruvii et mentum Newtoni » Poleni-Stratico 1827 : II, 181.
29 BNM, It. 636 (5497).
30 Poleni emploie ces termes pour désigner les dommages intervenus en un endroit de l’édifice alors que le choc s’est produit en un autre (Poleni 1748 : § 192). Il les emprunte aux traductions d’Hippocrate des textes sur la chirurgie crânienne.
31 Poleni 1748 : § 189.
32 Ibid. : § 193.
33 Ibid. : § 194.
34 Lettre de Poleni à Leprotti du 1/7/1745, BNM, It. X, 309 (6549), fol. 1r-4v.
35 Poleni 1748 : § 522.
36 Lettre de Poleni à Leprotti BNM, It. IV, 680 (5559), fol. 50-51r.
37 Novelle Letterarie, 1/02/1743, Florence, 1743, n° 5, colonne 65.
38 Vasari 1760 : p. 12 des notes au tome III [668].
39 Novelle Letterarie, 25/12/1750, Florence, 1750, n° 52, colonne 824.
40 Poleni 1748 : § 243, 584.
41 Ibid. : § 576.
42 Voir la copie par Cecchetti de la lettre de Manfredi à Leprotti du 11/05/1743 dans laquelle le mathématicien bolonais fait savoir qu’il s’est procuré par un intermédiaire napolitain, bien placé et bien intentionné à son égard, une copie des rapports commandés par Galiani (BNM, It. X 312 (6552), fol. 102).
43 BNM, It. X 312 (6552), fol. 111.
44 BNM, It. IV, 679 (5558), fol. 16r.
45 Le nombre de documents que la Chambre choisit de mettre dans les mains de Poleni en 1743 est somme toute assez limité : il s’agit du Parere dei tre matematici, les Riflessioni dei matematici, les Riflessioni di Lelio Cosatti, les Risoluzione e parere del P. Santini, le manuscrit de la Scrittura dei matematici di Napoli, celle de Gabriele Manfredi, les Sentimenti di un filosofo et le Breve discorso di NN capomastro muratore (BNM, It. X, 309 (6549), fol. 61r).
46 Voir BNM, It. IV, 675.
47 Lettre de Boscovich à Poleni du 25/04/1744 (BNM, It. X 304-6544, non fol.) ; Bottari 1822 : IV : 158-160.
48 Lettre de Poleni à Bottari du 07/08/1744. Rome, Bibliothèque Corsiniana, Carteggio Bottari (32G33), fol. 24r.
49 BNM, It. IV, 679 (5558), fol. 9r.
50 Lettre de Poleni au secrétaire du sénat de Venise, Michelangelo Marini, le 22/5/1748, BNM, It. X, 309 (6549), fol. 51r.
51 Lettres de Poleni à Leprotti des 1er et 8/7/45, BNM, It. X, 309 (6549), respectivement fol. 1r.-4v. et fol. 5r-6v.
52 Lettre de Poleni à Olivieri du 16/6/1747, BNM, It. IV, 679 (5558), fol. 54 r.
53 BNM, It. X, 309 (6549), f. 33r-45r.
54 Voir les manuscrits conservés à la BNM, It. IV 656, 656a (5517, 5518) mais surtout It. IV 657, 657a, 657b (5455, 5457) dans lesquels la contribution de Francesco est plus perceptible. Cette version ne contient pas le Livre V et pourrait donc soit avoir été rédigée avant 1747, soit témoigner des hésitations ayant présidé à l’intégration du récit de la découverte des cercles rompus.
55 Poleni 1748 : § 225.
56 Naples, Archivio Storico di San Martino [ASSM], A-1114 -8, fol. 10.
57 Lettre de Livizzani à Poleni du 10/05/1747, BNM, It. IV, 679 (5558), fol. 31 rv.
58 Lettre de Poleni à Livizzani du 12/5/1747, BNM, It. IV, 679 (5558), fol. 11r-12v.
59 Voir la correspondance entre les deux hommes : BNM, It. X 318 (6558), fol. 41v. et suivantes.
60 Delneri 1988 : 139-149.
61 Vivian 1963 : 54-66.
62 Ibid. : 64. Dans un premier temps les planches C, D, E, F, G, H, K furent confiées à Pietro Monaco (BNM, It. X, 318, 6558, fol. 31r). On lui confia ensuite les planches A et B (BNM, It. X, 318, 6558, fol. 74).
63 AFSP, Arm. 52, A, 88, fol. 151r.
64 BNM, It. X, 309 (6549), voir respectivement : f.64r ; 17/01/1749, f.48v ; 30/5/1749, f.48v.
65 De Angelis 2008 : 340.
66 Novelle letterarie, Florence, 1749, colonne 471.
67 BNM, It. X, 309 (6549), f.60-61r.
68 Poleni 1748 : § 218.
69 Cf. Poleni 1748 : § 322 et le rapport de Revillas du 16/02/1743, BNM, It. IV 670 (5531), § 16.
70 Poleni 1748 : § 216.
71 Poleni 1748 : § 584.
72 AFSP, Arm 17, C, 256
73 De Angelis 2008 : 318.
74 Lettre de Lambertini du 26/10/1740 (Folli Ventura, Miani 1987 : 86).
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