Chapitre deuxième. Les campagnes
p. 87-146
Texte intégral
Introduction
1La campagne en Illyrie méridionale et en Épire chaône n’a jamais fait l’objet d’étude spécifique. À l’époque des démocraties populaires de l’Europe de l’Est, l’archéologie albanaise avait principalement orienté ses recherches vers l’étude des villes. Ce phénomène historiographique, qui a longtemps caractérisé l’archéologie des Balkans, a connu une évolution récente grâce à des prospections et à un intérêt croissant pour la vie rurale.
2Les sites urbains les plus importants ont été régulièrement fouillés en Albanie. Les recherches étaient en particulier concentrées sur les colonies romaines et leur architecture monumentale publique. Sur d’autres sites, considérés comme des « cités illyriennes », les recherches sur certains aspects de leur topographie, comme les fortifications, ont été privilégiées. À l’exception de ces fouilles à l’articulation entre la ville et la campagne, on remarque une absence de prospection intensive du territoire rural. De même, les nécropoles rurales de la période romaine ont peu attiré les archéologues, puisqu’elles ne rentraient pas dans les priorités thématiques de l’archéologie nationale. Cependant les nécropoles des périodes postérieures, de l’Antiquité tardive comme du haut Moyen Âge, ont été fouillées sur une grande échelle, car elles fondaient les réflexions aboutissant à la restitution d’une « continuité » illyro-albanaise. Le même procédé a été suivi pour les nécropoles illyriennes à tumuli, qui offrent la meilleure documentation sur la civilisation illyrienne.
3La mauvaise connaissance de la campagne romaine est également le résultat d’approches inadaptées et d’études incomplètes. Par exemple, les sources anciennes nous donnent beaucoup d’informations sur la vie rurale et l’agriculture en Épire1, mais l’archéologie n’a rien fait pour vérifier et comprendre ce que ces textes nous transmettent. Au mieux, l’archéologie a déprécié la culture matérielle provenant de la campagne, dépourvue de « finesse » par rapport aux objets découverts dans des contextes urbains. En Albanie, la documentation photographique aérienne manque totalement, alors que dans d’autres pays, elle a rendu possible l’identification d’établissements ruraux. Toutes ces limites méthodologiques, théoriques et pratiques ont abouti à des résultats superficiels et restreints, qui ont empêché la compréhension de l’organisation de l’espace rural illyrien et épirote en général.
4Malgré l’absence d’étude antérieure et le caractère fragmentaire des données, nous allons essayer de reconstituer le cadre de la vie rurale et le développement de la campagne dans le territoire en question. Pour étudier l’économie rurale de l’Illyrie et de l’Épire, il est indispensable de constituer en premier lieu un corpus cartographique des habitats ruraux. Les données principales pour l’identification des sites sont fournies par les vestiges de bâtiments et par la céramique. Nous sommes pourtant conscients qu’une certaine subjectivité résulte des données ainsi prélevées. En effet, certains sites sont plus facilement identifiables que d’autres. La céramique de l’époque romaine est aussi mieux conservée par rapport à celle d’autres périodes, comme par exemple celle de la préhistoire. Malgré tout, nous allons tenter de créer une carte générale de la distribution des sites, pour faire des comparaisons interrégionales et situer les données archéologiques dans leur cadre géographique.
5Dans cette perspective, les stations routières se révèlent d’une grande importance, puisqu’elles ont bien souvent stimulé la concentration de la vie rurale2. Comme nous l’avons déjà vu, l’époque romaine ne se distingue pas par un grand nombre de villes. De ce fait, on pourrait en conclure que la majorité de la population vivait dans les campagnes. Cependant, des relations proches et importantes ont toujours existé entre la ville et son territorium3. C’est pour cette raison qu’autour des grandes villes ou près des voies de communication on voit naître de nouveaux centres ruraux.
La répartition de l’habitat rural
6La fondation des colonies serait à la base de la construction de nouveaux réseaux routiers par les Romains qui auraient donné à leur tour une grande impulsion aux migrations des populations des anciens centres illyriens et hellénistiques vers les plaines et les colonies. Ce déplacement de population eut pour conséquence une modification de la géographie rurale du territoire (fig. 28)4.
7Les destructions de Paul Émile en Épire, les guerres civiles, avec comme théâtre principal des batailles, le territoire de l’Illyrie méridionale, et la corruption des gouverneurs romains, nous font penser qu’au début du Ier siècle de notre ère, les campagnes avaient été ravagées et détruites. Dans les centres illyriens on remarque une décadence générale, rendue tangible par l’absence de construction. Il s’agit d’une période de dégradation pendant laquelle on ne peut pas retracer la vie de la campagne illyrienne. Le déplacement des populations, suivi de l’abandon des cultures, a également provoqué une rupture dans la tradition agricole. D’autre part, l’installation des colons romains recevant des lots de terre a nécessairement entraîné des confiscations forcées, des redistributions et de nouvelles divisions du sol ; elle a conduit à la spoliation des indigènes, du moins d’une partie de leurs moyens de production et d’échange. La romanisation a ainsi exigé de nouveaux acteurs. Tout d’abord, elle impose une division organisée de l’espace rural, ce qui a profondément modifié la propriété et les modes d’occupation du sol.
8Le territoire en question ne peut pas être considéré comme un ensemble agraire homogène, parce qu’il est caractérisé par une grande diversité régionale due à la variété des reliefs, des climats et des sols. Cette diversité a conduit à divers modes de vie locaux.
Le territoire de Dyrrachium
9La plus grande concentration de centres ruraux est observable dans le territoire occupé par les tribus illyriennes des Parthinii et des Taulantii. Dans cette vaste zone se trouve la cité la plus prospère de la région, Dyrrachium.
10Dyrrachium administrait un territoire très étendu. Les prospections autour de la ville ont augmenté les informations sur la présence de nombreuses stations routières sur la Via Egnatia. À Kryemëdhenj par exemple, on considère que la station routière s’était développée pendant les premiers siècles de notre ère comme un habitat rural, attesté par la présence de bâtiments romains avec des mosaïques, probablement des villae, et de la céramique romaine5. À Salmanaj, la trouvaille d’un milliaire indique la présence d’une station de la même Via Egnatia6. Kryeluz était probablement une autre station sur cette route, puisque les bâtiments découverts se rapportent à l’époque romaine7. Il est possible que le village actuel de Qerreti corresponde à une autre station, si on en juge par la découverte de quelques bâtiments romains8. À Shijak, les fondations d’une mansio et la présence d’une nécropole ont été documentées, et éventuellement une station routière9.
11La présence de petites agglomérations rurales autour de Dyrrachium est également attestée par plusieurs nécropoles identifiées à Golem, Çetë, Kavajë, Shtodhër, Harizaj, Luz i Vogël, Gosë, Rrogozhinë, Kryevidh10, Valijas11, Ishëm (Pistum)12 et Seferaj13.
12L’existence de ces agglomérations est aussi attestée par la découverte en grande quantité de céramique romaine, comme à Armath, Hamallaj, Gjuricaj, Draç, Kodra e Lulit, Rrashbull, Mërkuraj, Ballaj, Kepi i Lagjit14 et Shkallnur (Petra)15.
13La présence de ces centres ruraux de taille modeste et de cimetières confirme l’importance du territoire rural pour une grande ville comme Dyrrachium. Elle illustre également le rôle de cette ville et de la via Egnatia, voie majeure de communication, dans l’intégration des espaces ruraux aux formes romaines de l’occupation du sol.
14Une information très importante sur l’extension du territoire de la colonie de Dyrrachium nous est transmise par un géographe du IVe siècle de notre ère, Vibius Sequester. Cet auteur mentionne une région appelée Dyrrachiae et selon ses informations, elle s’étend du fleuve Genus (Shkumbin), qui fait aussi frontière avec le territoire d’Apollonia, jusqu’au fleuve Mathis (Mat) au nord, près du territoire de la ville de Lissus16. Cette information sur la région appelée Dyrrachiae doit correspondre au territoire rural de la ville où se situent tous les sites mentionnés plus haut. Dyrrachium était une ville qui contrôlait une large région, dont les confins rencontraient Apollonia au sud, Lissus au nord et Scampis vers l’est.
Scampis et la Via Egnatia
15À l’origine, Scampis est une station routière de la Via Egnatia. La grande importance de cette voie au passage de la vallée de Shkumbin a stimulé le développement des petits centres ruraux. La région est par conséquent la mieux équipée en stations routières, que l’on connaît presque toutes. La plus importante d’entre elles et la mieux connue est Ad Quintum, située à Bradashesh. Ses thermes (fig. 29) et un nymphaeum ont été entièrement fouillés17. Ils appartiennent au IIe siècle de notre ère, mais la station a été construite à partir du début du Ier siècle de notre ère. L’ensemble de la station est très bien conservé et on note un système de construction très élaboré.
16D’autres stations, comme celles de Belul, Peqin, Belie ou Rrafjet de Spathari, ont fourni de la céramique romaine qui remonte au début du Ier siècle de notre ère. La station de Rrafjet de Spathari, qui atteint une surface de 3 ha, est identifiée avec Grandavia, une des plus grandes étapes routières de la Via Egnatia. Une autre station très importante de cette route est Candavia que l’on situe à Qukës ; d’autres encore ont été reconnues à Urakë, Papri, Nova, Krasta et Mansi18.
17Outre la Via Egnatia, une seconde grande route relie Scampis à Aulona, en passant par le pont de Topçias19. Ainsi, cette région se trouvant au carrefour de plusieurs axes de communication a connu une forte densité d’occupation. Plusieurs nécropoles ont été identifiées et de la céramique collectée près de ces axes, comme à Karina, Fatisha, Thanaj, Jagodinë, Dumre20 et Belsh21. N. G. L. Hammond a examiné la partie occidentale de la Via Egnatia et a identifié huit ponts dans la vallée du Shkumbin22, dont le plus grand est celui de Topçias. Pour ce pont une phase hellénistique de construction est observable, ce qui prouve que le fonctionnement de cet axe de communication est antérieur à l’arrivée des Romains. Un autre pont a été identifié au lieu appelé Hadji Beqari, tandis qu’un deuxième a été reconnu à Orakë comme le Pons Servili qui apparaît dans la Tabula Peutingeriana.
18Scampis connaît une importante croissance tout au long de la période romaine, culminant avec la construction d’un castrum au IVe siècle (fig.30). Dix siècles plus tard, le Sultan Mehmed II fait reconstruire ses murs, en conservant la planimétrie de l’ancien castrum.
La Dassarétie
19En suivant le tracé de la Via Egnatia jusqu’au lac d’Ochrid, on se dirige vers les régions les plus peuplées de la province de Macédoine. Une de ces régions appartient aux Dasaretii. On note l’absence de villes dans la région, mais la présence du lac Lychnis (Ochrid) et le passage de la Via Egnatia dans la région ont favorisé une dense occupation rurale, transformant ainsi le paysage à la période romaine.
20La région est riche en terres fertiles, et atteint un niveau de prospérité bien documenté pour les périodes les plus anciennes, particulièrement pendant les Âges du Bronze et du Fer. Pendant l’époque hellénistique, l’agriculture régionale semble être bien développée, comme le montrent les trouvailles de nombreux pithoi23. Leur découverte dans la région pourrait aussi indiquer la présence de villae ou de fermes.
21On note l’existence d’un grand nombre de sites durant la période romaine, comme ceux de Symiza, Zerec, Pogradec, Gradishta e Radokalit, Slabinjë, Zamçe, Blacë, Pures, Prenisht, Verçun, Bishnicë et Verri24. Dans certains sites, on identifie également des thermes, des mosaïques et des sculptures, comme c’est le cas à Selca, Memelisht et Tushemisht. Ils comptent parmi les rares sites dans cette région qui ont fourni des éléments de luxe en contexte rural.
22D’autres occupations rurales sont documentées plus au sud, autour de la ville de Gramshi, comme à Drizë, Grabovë, Darzezë, Kodërqar25 et Irmaj. Cette dernière, déjà connue pendant la période hellénistique comme une forteresse, est équipée de bâtiments d’habitation pendant la période romaine.
23En revanche, à Gështenjas, une nécropole romaine a été localisée26. Certaines des sépultures découvertes avaient un aspect monumental, elles étaient parfois creusées dans la roche naturelle. Il est très important de noter qu’avant l’arrivée des Romains le paysage funéraire dans ce territoire était organisé en tumuli. La région est également parmi les plus représentatives de la préhistoire des Balkans, quant à la densité des tumuli et la richesse de la culture matérielle27. La présence romaine, à partir du Ier siècle de notre ère, a introduit de nouvelles formes d’inhumations et de crémations, parallèlement à l’usage de tumuli. Ainsi, le déplacement de l’habitat a dû s’accompagner d’un renouvellement des coutumes funéraires. Toutefois, il est intéressant de noter la réutilisation à plusieurs reprises des tumuli de l’époque du Bronze et du Fer, de la fin de l’Empire romain jusqu’au Moyen Âge. Cependant, il faut souligner que la réutilisation des anciens tumuli n’implique pas que les mêmes conceptions funéraires perdurent, puisqu’il s’agit seulement de la réutilisation d’un même lieu d’inhumation. Parallèlement à la réutilisation des tumuli, la région connaît des cimetières dans lesquels les tombes sont alignées.
Le territoire d’Apollonia
24La ville d’Apollonia n’a jamais joué un rôle aussi important que celui de Dyrrachium, même si les deux cités étaient desservies par la Via Egnatia. La ville était reliée par un axe secondaire à la Via Egnatia tout près de Dyrrachium, à Clodiana. Sur le territorium d’Apollonia, plusieurs stations ont été identifiées le long de l’axe secondaire, comme celles de Ballaj et d’Ad Novo, près du fleuve Shkumbin28. La grande quantité de céramique romaine trouvée au lieu-dit Bregu i Madh tout près d’Apollonia, suggère la présence d’une autre station routière.
25À Sulzotaj, un milliaire romain portant les noms des deux fils de Constantin a été découvert dans les années 193029. Apparemment cette borne appartenait à l’autre grande voie qui longeait la côte, par Scodra, Lissus, Dyrrachium et Apollonia. Deux autres milliaires postérieurs, datant du IVe siècle et trouvés à Mbrostar ont dû appartenir à ce même axe30. Elles portent les noms des empereurs Élagabal, Maximien et Constantin, et témoignent de l’intensification de la fréquentation de cet axe à la fin de l’Empire. Ces milliaires sont les uniques traces de cette route. Dans le territoire autour d’Apollonia on relève aussi la présence de sites romains à Pojani, à Havaleas et à Cakran31.
26Toutefois, grâce aux données que nous possédons, on peut affirmer que les trouvailles provenant du territoire ne reflètent pas l’ampleur réelle de la ville. De même on note la concentration des inscriptions dans la ville même et non leur dispersion sur le territorium, comme c’est le cas à Scodra, Dyrrachium et Byllis. Cette inégalité a des causes diverses. En premier lieu, contrairement aux villes citées ci-dessus, Apollonia n’a pas connu l’installation de colons romains. Or la présence de colons était le stimulus principal de la transformation du territoire, puisque la sphère de leurs intérêts dépassait les limites de la ville et les poussait à s’approprier des territoires environnants.
27En outre, le statut de la ville a joué ici un rôle fondamental. Civitas libera et immunis, la ville était une protégée de Rome et bénéficiait de privilèges fiscaux. C’est pour cette raison que la tradition et les institutions grecques se sont longtemps maintenues dans cette ville. Mais après Auguste, ce droit n’a pas toujours été respecté par les empereurs, principalement en raison des avantages fiscaux qu’il comprenait32. Ainsi, il se peut que ce droit ait été peu respecté pendant l’époque impériale, affaiblissant ainsi la capacité foncière de l’aristocratie. En revanche, le ius italicum attribué à Dyrrachium permettait aux citoyens d’exercer tous leurs droits de citoyen romain, et autorisait également des facilités financières pour la classe aristocratique. Dans ce cas, on voit une élite qui investit sa richesse dans les campagnes33.
Le territoire de Byllis
28Quant à la colonie de Byllis, la présence de sites ruraux a été révélée grâce aux inscriptions découvertes autour de la ville, à la céramique bien entendu, et aussi à l’existence de nécropoles romaines. Les sites les plus représentatifs sont Murataj, Sfir, Hekal, Kropisht, Karbunarë, Greshicë et Shekisht.
29Les alentours de Byllis portent les marques des transformations profondes entreprises par les Romains pour aménager le territoire rural, ce dont témoigne parfaitement le barrage de Krapsi (fig. 31)34. Daté du IIe siècle de notre ère, l’édifice avait pour fonction l’irrigation. Exemple unique en Albanie, il témoigne de nouvelles méthodes et technologies introduites dans l’agriculture en Illyrie méridionale pendant la période romaine. Ce sont des constructions très solides, construites pour durer, ce dont témoigne l’utilisation massive du ciment dans le mortier de chaux hydraulique.
30Dans la même région, aux environs de la ville de Berat (l’ancienne Antipatrea ?), une autre concentration des sites ruraux se dessine : Gradishta de Balibardha, Otllak, Mbolan et Peshtan35. L’habitat et l’activité perdurent également dans la ville illyrienne de Dimale où des édifices romains ont été construits36. Quoi qu’il en soit, si à Dimale la continuité de l’occupation est certaine, on doit néanmoins admettre que la ville avait complètement cessé d’être un centre civique comme l’abandon des stoas le suggère.
31Dans la zone située entre les provinces d’Épire et de Macédoine, notamment autour de la ville actuelle de Tepelena, on note aussi de petites concentrations de sites ruraux, même si les grandes villes manquent dans cette région. Les sites ruraux localisés à Kalivaç, Progonat, Turan et Kardhiq sont associés à des nécropoles, tandis qu’à Dames, Pures, Nivicë et Luzat, c’est de la céramique romaine qui signale les implantations humaines. Des thermes et des sculptures ont été découverts à Kakadhiq et à Bregu i Fiqve37. D’après le matériel provenant de ces sites, il semble qu’ils avaient aussi connu une activité pendant la période hellénistique. La concentration de ces agglomérations est liée à la vallée de l’Aous (Vjosa) et aux activités engendrées par ce fleuve.
Les sites ruraux en Épire
32L’Épire est une autre zone géographique caractérisée par une grande concentration d’habitations rurales. Le dynamisme de ces petits centres est essentiellement dû au rôle actif tenu par les villes romaines de la région, Bouthrôtos, Hadrianopolis et Phoinikè38. En outre, toutes les trois étaient très bien intégrées aux réseaux de communications par la voie importante qui partait d’Apollonia, qui, passant par ces villes, arrivait à Corinthe.
33Plusieurs nécropoles de l’époque romaine ont été signalées dans cette région. Elles sont toutes situées aux alentours des grandes villes. Parmi les plus importantes, mentionnons celles d’Haxhidea, Allanja, Prallë, Campur, Malçan, Pavlla, Lazarat, Haskovë, Mengul, Bodrishtë, Guranxi, Izvor39, Bregu i Qesarit, Valta, Pirgjerë40 et de Shën Mitër41. Cette dernière a été fouillée, et doit appartenir à une population rurale vivant sur le territoire de Bouthrôtos. Les sépultures ont livré un modeste mobilier. Malgré une surface fouillée importante de 125 m2, douze tombes seulement ont été mises au jour. Dans la majorité des cas, il s’agissait de constructions de tuiles, similaires à celles que l’on trouve à Bouthrôtos, et qui datent des IIe et IIIe siècles de notre ère.
34Quant à l’aqueduc de Bouthrôtos, il ne semble pas avoir considérablement stimulé la vie des populations des alentours, puisqu’on n’a pas observé de concentration de sites ruraux le long de son tracé. Même si l’aqueduc a dû traverser les propriétés des villages, ses retombées économiques étaient réservées à la ville42.
35En dehors des nécropoles, la découverte de grandes quantités de céramique romaine a permis de localiser plusieurs bâtiments, qui seraient à dater entre le début de la période impériale et le IIIe siècle. Ces sites sont : Krane, Çumpora, Kodra e Lutros, Spile, Dhiministër, Shën Koll, Mane, Paleomanastër, Hundësovë, Duka, Grava, Qesarat, Kodra e Kuqe, Sotirë, Pallavraqi, Bregu i Bufit, Qeparo, Zvezdë, Sharovë, Karos, Nepravishtë et Dermish. Leur répartition géographique témoigne d’une occupation progressive des vallées fluviales, au profit de l’appropriation de meilleures terres agricoles.
36Dans la zone limitrophe des provinces d’Épire et de Macédoine, on connaît deux stations routières dans les alentours : une à Rexhepaj où des thermes ont été découverts43, l’autre à Llogara (dans les monts Acrocérauniens), cette dernière apparaissant sur la Tabula Peutingeriana. D’autres sites ont été repérés à Vanovë, Zvërnec, Qafa e Pusit et Gorisht44.
37On pourrait affirmer que l’Épire, contrairement à la province de Macédoine, a atteint un meilleur niveau d’urbanisation, tout en developpant en parallèle une implantation rurale plus dense. Le nombre de sites ruraux est en effet plus élevé, leur distribution plus uniforme et ne se limitant pas au voisinage des routes. Cette particularité de l’Épire est également le résultat d’une longue tradition de l’économie pastorale fondée sur la transhumance inverse, avec habitat permanent en moyenne montagne.
38Plusieurs sites hellénistiques situés sur les hauteurs, comme Çuka Ajtoit, montrent une continuité de l’occupation à l’époque romaine. Certains des anciens bâtiments y ont connu une phase de reconstruction ou de restauration à l’époque romaine. Là une nécropole romaine a également été localisée, et elle semble avoir succédé à la nécropole hellénistique45. À Malçan aussi, outre la fortification hellénistique, on a identifié une nécropole romaine. La continuité de la vie sur ces sites durant la période romaine est aussi favorisée par les travaux d’irrigations et de bonifications entrepris par les Romains sur de vastes surfaces dans les plaines.
Le territoire de Scodra
39Le grand nombre d’inscriptions provenant des alentours de la colonie de Scodra a incité à penser que le territoire de cette ville comptait parmi les plus peuplés des territoires illyriens46. La ville de Scodra était entourée des fleuves Drin, Kiri, Gjadri et Buna. L’habitat rural est lié à ce réseau fluvial, ainsi que de nombreux indices l’indiquent.
40Les fleuves et le lac de Scodra étaient navigables à cette époque, comme le montre le passage de Tite-Live : flumine Barbanna navigat (Genthius) in lacum Labeatum47. Les navires qui circulaient sur ces fleuves étaient représentés également sur les monnaies du roi Genthios.
41Drivastum pourrait bien être une fondation de la période coloniale, postérieure à l’installation de la colonie à Scodra. Ses terres sont très fertiles, et n’ont pas pu laisser indifférents les colons. Une stèle funéraire de la période romaine trouvée à Drivastum montre aussi la présence d’une nécropole48. De la céramique romaine et des vestiges de constructions de la même époque ont permis de repérer un habitat romain sur de nombreux sites, comme à Marshej, à Burgu i Gorajes49, à Fierzë, à Koplik, à Gajtan, à Laç, à Murikjan, et à Vau Dejës. Ces agglomérations sont presque toutes étroitement liées aux réseaux de communications fluviaux et lacustres, mais aussi routiers.
42Par ailleurs, la station de Cinna se situe sur la voie qui relie Scodra aux autres villes côtières de la Dalmatie. Elle apparaît sur la Tabula Peutingeriana et Ptolémée la mentionne en la situant à l’intérieur de la province de Dalmatie50. Appien, lui aussi, nous informe au sujet des habitants de cette ville, les Cinnamorii, lors de la description des opérations militaires d’Octavien en Dalmatie, en les situant également entre les deux colonies de la côte Dalmate, Scodra et Doclea51. Tout près de la station routière de Cinna, une petite nécropole romaine a été mise au jour à Kalldrun52. La nécropole compte parmi les rares sites funéraires fouillés de la période romaine. Elle est datée entre les IIe et IVe siècles de notre ère, et elle se compose de tombes construites grâce à des pierres liées par du mortier53. Dans la nécropole, deux inscriptions ont été également trouvées. L’une est simple et porte le nom illyrien Genthios, tandis que l’autre stèle représente trois personnages, un homme et deux femmes. Elle est couronnée d’un fronton au milieu duquel est sculptée en bas-relief la tête de Méduse54.
43Ce qui est remarquable sur le territoire de la colonie de Scodra est le fait que les structures de l’Âge du Bronze et du Fer, ainsi que les sites hellénistiques, de l’Antiquité tardive au Moyen Âge, sont beaucoup mieux conservés que ceux de l’époque romaine. Ce résultat est la conséquence du fait que les sites préhistoriques et médiévaux se situent en hauteur alors que les sites romains sont presque tous dans la plaine. L’épaisseur des alluvions a pour conséquence l’enfouissement des sites romains à au moins deux mètres sous le niveau actuel55. Néanmoins, les structures de l’Âge de Bronze et du Fer comme celles de l’époque hellénistique montrent que la structuration du territoire est ancienne et qu’elle se manifeste par une série de murs importants de fortifications à Gajtan, Marshej, Vorfë, Ganjollë et Mokset. À l’époque hellénistique cet ensemble de sites est plutôt conçu comme une chaîne de petites forteresses construites par le roi Genthios pendant la guerre contre Rome. C’est le cas de Ganjolla, Beltoja et Kratul qui sont construites près d’itinéraires naturels de communication. Alors que ces sites sont abandonnés au début de la période impériale, les axes de communication sont équipés de routes par les Romains, comme c’est le cas d’un important segment de route romaine très bien conservé près de Kratul, qui probablement rejoignait la grande voie maritime qui venait de la Dalmatie et, en passant par Doclea, Scodra et Dyrrachium, continuait vers l’Épire. Ce segment reliait apparemment Scodra, Drivastum et les autres sites plus à l’intérieur des terres.
44L’arrière-pays de Lissus était aussi densément occupé par des agglomérations rurales. Th. Ippen nous informe de la présence d’un mur de fortification dans la plaine de Lissus, qui pourrait indiquer l’extension de la ville dans la plaine pendant la période impériale56. Des monuments des IIe-IIIe siècles de notre ère ont été trouvés dans les plaines autour de la colline de Lissus, comme le montre la découverte d’un complexe thermal57. Les trouvailles d’autres monuments d’époque romaine dans les villages voisins de Lezha témoignent d’une grande extension de l’activité constructive romaine. Ces thermes peuvent faire partie de grands complexes de villae puisqu’ils se trouvent loin du centre ville.
Penesti et Pirustæ
45Une concentration dense de sites ruraux est attestée plus au nord, dans une zone située près de la frontière administrative entre la Dalmatie et la province de Mésie Supérieure, autour de la ville moderne de Kukës. Les sources littéraires antiques mentionnent très rarement cette partie de l’Illyrie. Polybe, en décrivant la troisième guerre entre Rome et la Macédoine, mentionne une ville péneste, Uscana, sans donner plus d’informations58. Pour Stéphane de Byzance, il s’agit d’une ville en Illyrie59. Tite-Live est plus précis en rapportant que sur le territoire des Pénestes, il y avait 14 villes et lieux fortifiés, mentionnant parmi eux Uscana, Draudacum et Oaeneum60. Uscana semble avoir joué un rôle d’une certaine importance dans le déroulement de la guerre. Tite-Live la mentionne encore comme une cité stratégique que Persée, le roi macédonien, voulait conquérir parce qu’il s’agissait de la plus grande ville des régions pénestes. Uscana avait une population de 10 000 habitants, de grands murs de fortification et deux portes61. L’identification de ces trois villes mentionnées par Tite-Live reste encore difficile aujourd’hui62.
46La région, qui associe plaines et montagnes et favorise donc l’agriculture et l’élevage, correspond à une zone de peuplement dense, attesté par la présence de plusieurs nécropoles à Dera e Çelës, à Kula, à Nezbrataj, à Ferma e Kukësit et à Margegaj63. Jusqu’à l’arrivée des Romains, les Pénestes ont conservé une certaine autonomie dans le cadre du royaume de Genthios64. Cet équilibre régional semble avoir été très pacifique puisque les Pénestes n’apparaissent jamais dans les sources écrites.
47Quant aux trouvailles de céramique, abondantes, elles indiquent aussi une occupation très dense attestée sur de nombreux sites comme à Rambas, Domgjon, Sukë, Fermë, Kalaja e Kosturit, Kalimash, Gockë, Vau Spas, Kolsh, Ujmisht, Vakëf et Mulaj65. Dans la même région, aux alentours de la ville de Tropoja, on note la présence de sites ruraux à Cernicë, Selimaj, Kodra e Vuthajt, Shoshan, Bujan et Nimjan. La présence de thermes et de sculptures à Ndërshkallë, à Brut et à Përbreg, montre le niveau de vie atteint dans cette région, qui pourtant n’a pas été considérée, jusqu’à présent, comme un territoire atteint par la civilisation romaine.
48Une dernière zone révélant également une densité considérable de sites ruraux est la région de Dibra, correspondant à la vallée du Drin Blanc, en remontant vers le lac d’Ochrid pour rejoindre le Drin Noir. Outre la présence de plusieurs sites, identifiés par des nécropoles et de la céramique, comme Gradec, Gjiricë, Kublanë, Gradishta e Peshkëpisë, Gjiteti i Dine Manjanit, Fisniket, Vakufet, Lisnat et Suhadoll66, on note aussi, comme dans la région de Kukës, la présence d’édifices luxueux et décorés de mosaïques à Striçkan, Përnezhë, Xhirë et Valësi. Ainsi, dans les régions montagneuses et les vallées éloignées des grandes villes, habitaient également des populations converties au mode de vie romain.
L’organisation administrative
49L’interdépendance de la campagne et de la ville rendent les relations nécessaires entre ces deux composantes du territoire. Les petites agglomérations étaient ainsi prises dans le réseau administratif et hiérarchique romain. Elles se présentent soit comme des vici, soit comme des pagi. Les seuls exemples documentés de vici sont Scampis67, et Asparagium Dyrrachinorum mentionné par César, et non encore identifié68. Il est probable qu’un des deux sites situés près de Dyrrachium, Rrogozhina ou Bashtova, corresponde à Asparagium. Par ailleurs, une inscription de Bouthrôtos mentionne la présence d’un vicus dans les alentours de la ville69.
50Le vicus est une des marques principales de l’installation romaine et de l’urbanisation du territoire. D’un autre côté, les pagi semblent exister parallèlement aux vici, mais ils correspondent à un regroupement d’hommes, à une tribu, bien que le nom désigne également une portion de territoire70. Il est probable que les pagi restent en dehors des intérêts majeurs de l’élite locale romanisée. Par conséquent leur organisation et leur mode de vie ont conservé des éléments de l’époque préromaine. Mis à part les deux exemples cités ci-dessus on ne connaît pas d’autres vici en territoire illyrien ; très probablement cependant, les meilleurs terrains agricoles étaient organisés sous cette forme. En revanche, aucun témoignage littéraire ou épigraphique n’existe sur les pagi, ce qui rend encore plus difficile la recherche sur le rôle qu’ils ont pu avoir dans l’organisation de la vie chez les Illyriens.
51Si l’interdépendance de la ville et des campagnes est plus claire sur le territoire des colonies, pour certaines régions elle nous échappe complètement. Tel est le cas de la Dassarétie par exemple ou des vallées montagneuses au nord. Ces régions se trouvent très loin des villes principales, et il est vraisemblable qu’un municipe romain existait dans ces régions mais qu’il reste encore à découvrir. Les recherches sur l’époque romaine dans ces régions ont été très rares et il reste probablement des villes à identifier. Pendant la période hellénistique la Dassarétie possédait une grande ville, Pélion, alors qu’au nord, dans les régions montagneuses il y avait Rosuja. Il est fort probable que les prochaines fouilles sur ces deux sites montreront que l’occupation a continué pendant la période romaine. Les deux sites sont entourés de terres très riches et il paraît inimaginable qu’elles n’aient pas été exploitées à l’époque romaine.
52Toutes ces agglomérations rurales auraient accueilli une classe moyenne de paysans, de propriétaires ou de colons, et des artisans qui constitueraient l’assise du développement économique régional. L’organisation en vici et pagi structurait également la population dans le système administratif et fiscal de Rome.
Chronologie
53Il est difficile d’établir une chronologie de l’habitat rural en Illyrie et en Épire. La majorité des sites n’a pas été fouillée. Nous disposons seulement d’indications sur des stations routières, les nécropoles, sur des vestiges visibles et sur la céramique. Pourtant, l’abandon massif de plusieurs centres illyriens au tout début de notre ère a dû considérablement contribuer à la naissance de l’habitat rural romain. Cette ruralisation peut ainsi être considérée comme un événement postcolonial. Les nouveaux colons se sont aussi installés dans la campagne, en l’aménageant, au gré de leurs besoins économiques. Cette nouvelle forme d’organisation est rendue manifeste par la parcellisation du sol qui est l’empreinte la plus importante et la plus visible laissée par Rome en Épire. Cette forme d’organisation a ainsi intégré toute la population rurale dans le système fiscal.
54En fonction de ces changements, les premiers centres ruraux situés dans les plaines apparaissent au cours du Ier siècle de notre ère. D’abord installés dans les plaines autour des anciens oppida, les occupations rurales reprennent également des sites abandonnés de l’époque hellénistique ou même de l’Âge de fer, comme c’est le cas de Verri, Blacë, Mbolan et d’autres. L’apogée de leur évolution est atteinte au IIe siècle, période pendant laquelle on remarque une plus grande concentration de ces nouveaux centres ruraux. Leur nombre augmente à l’intérieur du territoire desservi par la Via Egnatia, ce qui suggère une situation de calme et de prospérité dans la région. Au cours de ce siècle, certains d’entre eux prennent les caractéristiques de vrais centres urbains, comme c’est le cas de Scampis et d’Anchiasmos.
55La continuité de l’occupation de la période hellénistique à la période romaine est relevée sur un grand nombre de sites, comme à Dimale, Zgërdhesh, Pogradec, Berat, Irmaj, Çuka Ajtoit, dans les nécropoles de Belshi, Leshnjë, Dukaj, Malçan et sur plusieurs autres sites secondaires. Cependant, leur rôle régional est modeste par rapport à celui que ces sites avaient aux périodes précédentes, et s’accompagne probablement d’une diminution de leur taille. En revanche, on note de nouvelles constructions, probablement des magasins de stockage, rendus nécessaires par la prépondérance du rôle de l’agriculture chez les Illyriens pendant la période romaine71.
56À la fin du iiie siècle de notre ère intervient une importante transformation du territoire. Après une grande diffusion de sites ruraux pendant le iie siècle, on remarque une chute de leur nombre dans les plaines, certainement liée à l’insécurité qui affecte les régions illyro-épirotes, en raison d’une part de l’arrivée des barbares, et d’autre part du développement du brigandage, sensible au IIIe siècle72. Ce changement de climat est parfaitement illustré par la construction de plusieurs castra, constructions à vocation défensive situées près des grands axes de communication afin de contrôler les routes. Ainsi, le castrum de Vig près de Scodra fut construit pour contrôler la voie romaine qui conduisait de Lissus à Naissus et donnait accès à l’intérieur des Balkans et au Danube, au nord-ouest de la Bulgarie d’aujourd’hui (fig. 32). Plusieurs stations associées à cet axe routier ont été identifiées sur le territoire du Kosovo73. À Vig, le castrum est pourvu de douze tours et de deux entrées74.
57Le même type de fortification apparaît au même moment à Scampis, près de la Via Egnatia, et à Paleokastër, aux abords de la route partant en direction de Corinthe. Pour les mêmes raisons on remarque, pendant la même époque, la fortification des sites ruraux les plus importants, comme Anchiasmos et Aulona.
Dimensions des agglomérations rurales
58Toujours en raison de l’absence de fouilles, on ne peut pas établir précisément la taille de ces agglomérations. Il est cependant intéressant de noter la densité des nécropoles romaines dans des zones géographiquement très proches, ce qui peut suggérer une importante fragmentation du territoire rural, selon de modestes unités de base. Les cas de la nécropole de Kalldrun, près de Shkodra, contenant seulement dix tombes, et de celle de Shën Mitër, prés de Bouthrôtos, composée de douze sépultures, font penser au morcellement considérable de l’habitat rural reflété par la présence de plusieurs petites nécropoles. Néanmoins, seules des fouilles pourraient aider à connaître la taille et l’organisation de l’espace des agglomérations rurales. De plus, des fouilles se révèlent aussi indispensables à la connaissance de la typologie des sépultures, afin de clarifier les rapports entre l’influence romaine et la poursuite des traditions locales, et d’apporter des informations sur la composition sociale de la population. Par exemple à Haxhidea (près de Gjirokastra) et à Rrogozhina (près de Dyrrachium), la présence de tombes monumentales pourrait être rapprochée de la présence de villae romaines à proximité. Leur construction pourrait ainsi correspondre aux pratiques d’une classe privilégiée de la société illyrienne profondément romanisée. Dans la campagne illyrienne, les mausolées constituent un phénomène très rare. Malgré la simplicité générale des nécropoles, elles jouent aussi un rôle important en ce qui concerne la structuration du paysage rural, et c’est pourquoi il serait fondamental d’établir les liens qui unissent l’espace des morts et l’habitat le plus proche.
L’économie
59Nous disposons d’informations suffisantes, principalement de sources écrites, pour pouvoir étudier divers aspects de l’économie rurale en Illyrie et en Épire. On a noté que la distribution des sites ruraux correspond en premier lieu aux réseaux routiers des provinces, mais la répartition des ressources naturelles a aussi joué un rôle essentiel dans la distribution géographique des sites ruraux.
60Leur concentration dans la région de Kukës, aux confins des provinces de Dalmatie et de Mésie Supérieure, est due d’une part à la présence de la voie Lissus-Naissus et d’autre part à l’exploitation des mines. Les outils nécessaires au travail des métaux, découverts au nord de l’Albanie, témoignent de l’existence d’une industrie développée du métal.
61En raison de la rareté des études sur l’exploitation de ces mines, limitées surtout à des comptes-rendus d’explorations fortuites, les indices fournis par les sources littéraires sont d’un grand apport. Selon Strabon, l’Illyrie était connue pour ses mines du fer, de même que la Mésie ; l’auteur mentionne l’existence de quelques mines situées entre les Helvetii et les Illyriens75. Quant à Tite-Live, lorsqu’il décrit l’organisation romaine du territoire illyrien après la troisième guerre de Macédoine, il rapporte également que les Romains interdirent l’extraction des minéraux d’or et d’argent, mais qu’ils autorisèrent celle du fer et du cuivre76.
62L’exploitation préromaine du minerai est attestée également par les outils du travail des mines représentés sur les monnaies de Damastion, au IVe siècle avant notre ère. Sur une série de monnaies on voit en effet un marteau, et sur une autre, on remarque un lingot de métal77. Ces frappes du IVe siècle avant notre ère renvoient probablement à l’époque de l’exploitation la plus intense des mines. D’après la description de Strabon, la ville de Damastion se situerait entre Dyrrachium, Apollonia et les monts Acrocérauniens78. L’auteur nous apprend également que la ville était sous l’autorité des Dyestii et des Encheleii, dont la région s’étendait jusqu’au lac d’Ochrid. Strabon est le seul qui nous informe sur la localisation de Damastion, mais il désigne une zone assez large, ce qui a donné lieu ensuite à plusieurs hypothèses au sujet de l’endroit précis79. La plupart de ces hypothèses placent Damastion dans la Macédoine d’aujourd’hui. Quant à O. Davies, il pense que l’ancienne ville peut se situer dans la région de Dibra où d’anciennes activités d’extraction de minerais ont été repérées80. Cependant la grande quantité de monnaies provenant de cette ville trouvée au Kosovo et la présence des mines d’argent dans la même région justifient plutôt une localisation de Damastion sur le territoire du Kosovo. La question restera toutefois ouverte, tant que l’archéologie n’aura pas identifié le site, dont la diffusion du monnayage atteint largement l’ensemble des Balkans.
63Pendant le règne de Néron, certaines de ces mines parviennent à produire jusqu’à 50 livres d’or par jour81. L’époque de Domitien voit une exploitation plus dense et plus en profondeur de ces mines. Une inscription du IIe siècle de notre ère mentionne un procurateur responsable des mines d’argent en Dalmatie82. Dans cette même région, les Romains exploitaient également de l’or, comme nous l’apprend Stace83, jusqu’au nord de l’Albanie où certaines de ces mines se situent84.
64La longue tradition du travail dans les mines explique qu’à l’époque de Trajan des membres de la tribu illyrienne des Pirustae aient été déplacés en Transylvanie car ils étaient considérés comme des mineurs de grande expérience. Apparemment, ces déplacements dans l’Antiquité se faisaient sous la contrainte, comme Florus le rapporte également au sujet des mineurs de Dalmatie85. Des noms portés par cette population apparaissent dans les inscriptions de la période romaine trouvées en Dacie86.
65Comme dans la majorité des mines, l’exploitation était conduite en surface. Ainsi, il est probable que l’absence de découverte de galeries soit imputable à ce mode d’exploitation du minerai. Les témoignages archéologiques sur les mines anciennes dans ces territoires sont en effet très maigres. Ugolini déclarait avoir trouvé des traces d’extraction de minerai à Lissus, près du fleuve Fandi, ainsi qu’à Bulgjeri, mais il considérait que ces mines étaient en usage seulement pendant le Moyen Âge87. Par contre dans la région de Kukës, à Gjegjan, des traces d’anciennes galeries qui servaient à l’exploitation du cuivre sont visibles88. Ils demeurent les seuls témoignages archéologiques d’anciennes mines sur le territoire de l’Albanie.
66Une autre région minière était celle des Dassaretii. Le territoire est riche en minerai de fer. Une stèle funéraire provenant de ce district représente deux forgerons travaillant le métal (fig. 33). Elle est datée du IIIe siècle de notre ère et constitue un cas unique, montrant ainsi l’importance des métaux pour les Illyriens.
67Strabon89 et Dion Cassius90 nous renseignent également au sujet de la présence de gisements d’asphalte sur le territoire d’Apollonia. Leur description correspond à des sources de bitume91. D’autres auteurs anciens en mentionnent également92. Le feu du Nymphaion est aussi représenté sur les monnaies impériales frappées à Apollonia, ce qui pourrait signifier que cette mine était sous le contrôle de cette ville.
68Comme Tite-Live le rapporte, au début de l’installation romaine, les personnes qui exploitaient les mines en concession devaient payer à l’État romain la moitié des taxes qu’ils payaient à leur roi93. Ainsi, avant l’arrivée des Romains, l’exploitation des mines était privée, situation qui a dû perdurer pendant la période républicaine. En revanche, nous pensons qu’à l’époque impériale, l’exploitation devint publique, puisque la richesse de l’activité minière constituait une source considérable de profit pour Rome94.
69Les témoignages des historiens antiques sur l’exploitation des mines illyriennes pendant la période romaine ont conduit O. Davies à conclure que les mines des Balkans avaient au IIe siècle de notre ère remplacé les mines d’Espagne, lesquelles étaient jusqu’à cette époque les plus importantes de l’Empire romain. En effet les sources nous transmettent plusieurs informations sur ces mines pendant cette période. Au IVe siècle de notre ère, le Codex Theodosianus mentionne l’existence de procuratores metallorum dans la région95, ce qui témoigne de la grande importance des mines balkaniques pendant le Bas Empire. À partir du Ve siècle, la quantité d’objets métalliques provenant majoritairement de contextes funéraires augmente au point de rendre compte d’une vraie « industrie » des métaux au VIe siècle, connue sous le nom de la « civilisation » de Koman, ce qui fait penser que la population connaissait ces mines et que la plupart des objets était produit localement96. À la fin de l’Empire romain, les procuratores des mines n’étaient pas des civils mais des curiales contraints de surveiller les travaux dans les mines. En 386, ils cherchèrent à échapper à leur devoir par peur des insurrections barbares dans la région, mais l’empereur Gratien les obligea à reprendre leur poste97.
70Dans les autres provinces de l’Empire, le processus de cadastration a touché également les secteurs miniers, les intégrant ainsi dans les schémas de la domination romaine, comme domaines publics ou bien comme ressources rattachées à un territoire civique. Cependant, comme on le voit dans le cas des mines illyriennes, ils sont extraterritoriaux avec un procurateur autorisé par l’empereur à contrôler en détail les travaux et la vie dans les mines, et à préparer les contrats de ventes et de locations. En outre, on note le manque de grandes villes dans la région, ce qui laisse supposer que les formes d’organisation précédentes ont survécu pendant toute la période romaine98. Il est évident aussi que l’établissement de l’habitat près des mines était dans l’intérêt des Romains qui exploitaient ces mines, ce qui pouvait provoquer l’augmentation du peuplement des montagnes. L’exploitation des mines suppose également l’existence d’une classe d’esclaves nombreux, avec toute une organisation d’entrepreneurs de main-d’oeuvre. Nonobstant, ces régions sont également très riches en forêts, or l’exploitation du bois est certes nécessaire à l’activité minière, ce qui peut aussi correspondre à une autre branche de l’économie locale.
71En Épire, il semble que l’élevage constitue la principale ressource économique, puisqu’on voit Varron prendre comme exemple l’élevage du bétail chez les Épirotes99. Pline mentionne les taureaux épirotes comme les meilleurs et il attribue ce fait aux grandes attentions que Pyrrhus, le roi d’Épire, avait montrées envers leur élevage100. Plusieurs sites qui datent de l’époque de ce roi présentent un caractère totalement pastoral, puisque dans la plupart des cas, il s’agit de constructions d’une faible qualité pourvues d’une seule porte. Leur intérieur ne garde aucune trace de division de l’espace ; le plus souvent ces vestiges se situent sur un terrain rocheux de superficie modeste. La multiplication de telles enceintes rurales coïncide aussi avec une période marquée par la monumentalisation de plusieurs villes épirotes, témoignant encore une fois les relations étroites entre les villes et les campagnes en Épire.
72L’élevage des animaux par les Épirotes est aussi mentionné par César qui relève l’excellente qualité des moutons et le fait qu’ils sont élevés en grande quantité101. Leur élevage, très probablement, a donné lieu au développement d’une industrie de la laine puisque Atticus lui-même écrit qu’en Épire on élevait du bétail à laine102. Ainsi l’élevage a naturellement favorisé d’autres activités économiques très importantes, comme la production du lait, de la viande et de la laine. Les moutons d’Épire étaient probablement gardés dans des enclos fermés et couverts pour bien conserver leur laine103. Malheureusement ces bâtiments d’élevages couverts ne sont pas encore identifiés, et on ne connaît pas non plus d’ateliers pour la transformation de la laine, industrie qui devait être la plus importante du point de vue du profit économique. Au sujet de l’absence de données archéologiques sur ces ateliers, on peut supposer que la majeure partie de la laine fournie par l’élevage épirote était exportée vers l’Italie. Cette supposition est vraisemblable car depuis le IIe siècle avant J.-C., une part importante de l’élevage en Épire était aux mains d’Italiens.
73Il faut également tenir compte de l’élevage des chevaux. Ce dernier n’est jamais pris en considération dans l’étude de l’économie épirote. Le fait que Virgile le mentionne dans ses Géorgiques nous fait penser que des chevaux épirotes devaient être aussi exportés à Rome104. Dans ce passage, on apprend aussi que les chevaux épirotes étaient connus dans le monde grec pour leurs victoires aux jeux olympiques. Ainsi, l’élevage des chevaux était une activité importante dans la vie de ces populations. R. Étienne pense que ce sont les hommes d’affaires italiens établis en Épire à l’époque républicaine qui ont développé cet élevage dans la province, une tradition déjà présente dans la région et qui était à l’origine de leur exportation à Rome105. Cependant, dans les villae découvertes jusqu’à présent on ne distingue malheureusement pas d’espaces réservés aux chevaux.
74Dans plusieurs régions de nouvelles races d’animaux ont été introduites par les Romains, et c’est l’une des conséquences manifestes de la romanisation de la vie pastorale. Malheureusement, aucune étude n’a été effectuée en Albanie sur les ossements des animaux, en particulier dans la perspective de mettre en valeur ce changement. Les sources sur ce sujet sont par ailleurs très rares106.
75La grande tradition pastorale en Épire nous amène vers une autre hypothèse liée à l’organisation de cette activité. La présence en grande quantité d’animaux nécessitait de vastes terrains non cultivables, connus comme ager compascuus. En Épire, la propriété collective était présente avant l’arrivée des Romains, et il se peut que cette situation n’ait pas changé avec leur installation. Les Romains appellent ces zones de pacage des loca publica (des biens communs), utilisés par l’ensemble de la communauté et que, par définition, personne ne pouvait s’approprier.
76La pêche constituait un autre élément de la vie économique des campagnes. Cette activité était principalement concentrée sur les sites côtiers, près de Lissus, Dyrrachium, Aulona et Bouthrôtos mais aussi près des lacs d’Ochrid et de Scodra. Strabon considère le lac Lychnides comme un lieu approprié pour saler et sécher le poisson107. Les fleuves fournissaient également des ressources importantes en poissons.
77Varron transmet des informations sur les escargots exportés de l’Illyrie vers Rome108. Varron, qui est une source fondamentale sur l’économie rurale, avait lui-même visité ces régions où il a peut être pu obtenir des informations précises, puisqu’il a servi dans l’armée de l’Illyricum en 78-77 avant notre ère, et qu’ensuite il a suivi Pompée dans la guerre contre les pirates ainsi qu’à Dyrrachium pendant la guerre civile.
78Les carrières jouaient également un rôle dans la vie économique, car cette activité favorisait la fondation de nouveaux centres ruraux. Byllis est la seule ville qui possède assurément une carrière sur son territoire. Seules deux autres carrières ont été identifiées. Celle de Karaburun était plutôt utilisée par Apollonia et Orikos109. La situation géographique de cette carrière sur une péninsule rocheuse ne permettait pas l’installation d’un habitat rural à proximité110. Une autre carrière était située à Shkalla, près de Bouthrôtos111. Les traces de l’activité d’extraction sont encore visibles aujourd’hui. Apparemment cette carrière était utilisée pour les constructions de Bouthrôtos et de Çuka Ajtoit, mais également pour les constructions de caractère rural, comme à Malathrea.
79L’exploitation du bois constituait également un aspect important de l’économie locale. Archéologiquement, il est impossible de détecter l’activité de l’homme dans les forêts, et ce sont les textes qui nous aident à nouveau. Statilius Taurus a utilisé les forêts de son domaine à Dyrrachium pour faire construire un amphithéâtre en bois par ces propres charpentiers112.
80Finalement, plusieurs aspects de la vie rurale en Illyrie et en Épire ont été dans une certaine mesure transformés, dans le cadre de l’intégration de ces territoires et de la société dans l’Empire romain. L’intégration a favorisé le développement d’une agriculture plus moderne qui se manifeste par l’apparition de la villa, dont le modèle de construction et de fonctionnement est intimement lié à la romanisation113.
Les villae
81Poser le problème des relations entre le territoire rural et les villes signifie étudier l’insertion dans un milieu indigène d’un nouveau mode de vie à partir duquel se réorganisent divers aspects des relations sociales et économiques entre les populations et les centres urbains. Cette nouveauté est parfaitement illustrée par la villa et les modes d’exploitation qu’elle induit.
82Un siècle et demi de recherches archéologiques ont montré la diversité des modèles auxquels correspond la villa. En latin, le mot villa recouvrait une ferme et une maison de campagne, indiquant ainsi une activité plutôt agricole. Plus tard, les auteurs latins lui ont fréquemment attribué la fonction résidentielle. Parmi les chercheurs contemporains, J.Percival a décrit la villa comme « un lieu à la campagne », normalement associé à l’agriculture, mais avec des connotations de luxe et de plaisir ; il s’agit alors d’une seule maison plutôt que d’un complexe de constructions114. Les archéologues italiens ont, quant à eux, défini un type de villa correspondant aux textes des agronomes latins, « le modèle Settefinestre », qui intègre la division tripartite entre bâtiment résidentiel, espace de production et locaux pour la main d’œuvre115. Ce modèle de la villa esclavagiste dont la production est orientée vers le marché correspond à une situation reconnue en Italie à la fin de la République et au début de l’Empire. Par ailleurs, dans les autres provinces se côtoient de multiples types architecturaux qui varient en fonction des modes de production régionale.
83Plusieurs hypothèses ont également été proposées afin d’expliquer le rôle joué par la villa dans la campagne. D’après P. Gros, la villa peut être considérée comme un facteur du développement économique ou bien comme une structure parasitaire exprimant la domination des élites sur les campagnes116. A.Wallace-Hadrill lui a attribué quant à lui une fonction de symbole culturel117. La construction d’une villa est considérée aussi comme une démonstration de luxe et comme un indice évident de romanisation. Dans ce cas, la villa était le résultat du désir et du goût des élites pour la construction de bâtiments typiquement romains, plutôt que le signe de la diffusion d’un nouvel ordre social ou économique118.
84Le fait qu’un riche propriétaire fasse construire une villa nous amène à penser que ce représentant de l’élite passait une grande partie de sa vie à la campagne. Ces propriétaires, avec leur richesse et leurs relations politiques, étaient le lien le plus important entre la ville et la campagne. Toutefois, la plupart des opinions s’accordent sur le fait que la villa indique principalement l’unité de l’exploitation agricole et de l’organisation du travail.
85Les villae de l’Illyrie méridionale et de l’Épire sont très peu connues (fig. 34). La rareté des prospections rend difficile l’étude complète de leur distribution spatiale et de l’organisation des exploitations agricoles dans la campagne illyrienne.
86Cependant, il s’agit d’un territoire qui offre une certaine singularité en ce qui concerne le développement de ces édifices.
87Le territoire de l’Épire est le plus riche en villae (fig. 35). Parmi elles, celle de Diaporit près de Bouthrôtos est la mieux connue. Sa construction s’est déroulée en plusieurs phases. La première remonte à l’époque hellénistique tardive.
88La fonction initiale de ce bâtiment n’est pas très claire puisque les restes archéologiques ne suffisent pas à la préciser. La deuxième phase appartient à la période impériale. Cette intervention qui transforme complètement la structure du bâtiment en fait une vraie villa. Un nouveau bâtiment est construit sur le site pratiquement sans tenir compte de la construction précédente. Ce changement doit probablement correspondre à une phase d’intensification des relations entre la colonie de Bouthrôtos et son territoire. La villa fut abandonnée à la fin du IIIe siècle de notre ère mais d’autres activités ont continué à s’y développer, comme le prouve la découverte de fours de céramique119.
89Dobra, Çuka, Metoq et Malathrea fournissent d’autres exemples de villae en Épire. Ces dernières constituent un phénomène très particulier : il s’agit de petites fermes fortifiées pré-coloniales qui se transforment en villae romaines. Apparemment la position géographique des bâtiments hellénistiques et les terres situées autour restent toujours d’une importance vitale. Cependant on n’a trouvé ni mosaïques ni statues qui pourraient conférer un caractère résidentiel de luxe à ces villae. Il est difficile d’établir une typologie architecturale de ces villae puisqu’il s’agit de transformations d’édifices précédents. En général on peut affirmer que les villas connues en Épire sont construites selon un plan compact, où tous les secteurs consacrés au stockage des produits agricoles s’ordonnent autour d’une cour principale, très similaire à celle d’une villa à péristyle.
90Le modèle de Malathrea est également répandu dans d’autres provinces de l’Empire, mais la concordance du bâtiment hellénistique avec une forteresse est remise en question120. Il est vrai que les tours de Malathrea sont considérables, mais les petites dimensions du bâtiment, 15 x 15 m, ne plaident pas en faveur du caractère défensif de la construction. Il s’agit probablement d’un endroit où l’on stockait les produits, ce qui expliquerait la présence de hautes tours121.
91Le site fortifié a dû ensuite se transformer en bâtiment à caractère agricole122. L’agrandissement du bâtiment par de nouvelles pièces de stockage révèle des relations plus intenses entre l’homme et la terre durant la période romaine. Cette augmentation de la production était aussi le résultat de l’introduction par les Romains de nouvelles techniques et de nouveaux outils de travail. Durant cette période, les tours de la fortification hellénistique ont perdu leur fonction puisque l’on observe la disparition de deux d’entre elles. Il est important de souligner la continuité de l’occupation de ce bâtiment. Apparemment, la vallée du fleuve Pavlla a joué un rôle économique important pendant toute l’Antiquité, avec en particulier la montagne de Mile. De plus, la plaine de Kestrina (Vrina) comptait parmi les plus fertiles aux environs de Bouthrôtos.
92Dobra offre un cas similaire à celui de Malathrea123. Ici, le bâtiment hellénistique se transforme également pendant la période romaine. Il est tout d’abord équipé de nouvelles pièces. On pense que la Dobra hellénistique avait aussi une fonction défensive, mais ses murs ne sont pas aussi bien conservés qu’à Malathrea. De plus, la construction couvre une surface beaucoup plus importante et le rôle agricole de ce bâtiment hellénistique est mieux documenté qu’à Malathrea. Lors de la phase romaine, le bâtiment atteint une surface de presque 260 m2 dans laquelle on a trouvé de nombreux pithoi, qui permettent d’attribuer à ces pièces, comme à Malathrea, un rôle de stockage des produits. Le fait que, au cours de la période romaine, le bâtiment dispose d’une exèdre, laisse supposer qu’outre la fonction de production, la villa a dû servir de résidence au propriétaire, ce qui explique l’apparition d’un certain luxe. Cependant, la brique n’est pas utilisée dans ce bâtiment, et les pierres de construction proviennent principalement des montagnes proches.
93Les sites de Çuka et de Metoq offrent également des structures très similaires à celle de Malathrea124. Le mur qui ferme tout le complexe en est la caractéristique principale. À l’intérieur du complexe de Çuka, au centre, se trouve une structure carrée, composée de deux niveaux puisqu’on remarque la présence d’escaliers. Plusieurs pièces liées à l’activité agricole sont ajoutées au bâtiment pendant la période romaine. Il s’agit probablement de ce type de villa fortifiée que César décrit comme des châteaux et grâce auxquels il ravitaillait son armée125.
94Outre la continuité de la période hellénistique à la période romaine, il est frappant de constater l’utilisation de toutes ces structures également durant les époques suivantes. À Dobra, à Metoqi et à Diaporit, on remarque la construction d’églises sur les ruines romaines au cours de l’Antiquité tardive et du Moyen Âge. La poursuite de l’activité agricole sur ces sites durant les périodes hellénistique et romaine est naturellement due à la fertilité des terres environnantes. Quant aux raisons qui ont suscité la construction des églises sur les villas romaines, elles restent encore inconnues. On peut néanmoins suggérer que les villae sont des centres de regroupement d’occupation et d’exploitation pendant l’Antiquité tardive et le Moyen Âge.
95Les fouilles datent les transformations des villae de la fin du Ier siècle avant notre ère et du début du Ier siècle de notre ère. Malheureusement, la stratigraphie de ces monuments reste douteuse. Il se peut que ces transformations se soient effectuées pendant la période républicaine, avec l’installation des hommes d’affaires italiens dès le IIe siècle avant notre ère. Leur présence a probablement précipité les changements dans les moyens de production et le traitement des produits, ce qui a nécessité d’agrandir les bâtiments de stockage.
96Cette hypothèse est aussi liée au problème des propriétaires de ces villae et de ceux qui effectuent ces changements. Il reste difficile d’établir si ces bâtiments continuent à être utilisés par les mêmes propriétaires depuis la période hellénistique ou si de nouveaux propriétaires romanisés, probablement des colons, s’approprient ces bâtiments et les transforment en villae romaines. Dans ces bâtiments, les modifications d’époque romaine sont essentiellement liées aux travaux agricoles, et, comme nous l’avons dit, on constate l’absence d’éléments luxueux comme les mosaïques, les sculptures et les fresques. On peut donc penser que ce sont toujours les mêmes propriétaires qui gèrent le bâtiment et les terres. Dans ce cas, il serait vraisemblable que les propriétaires aient emprunté aux Romains de nouvelles formes d’exploitation agricole, sans mimer les Italiens dans le domaine du confort et du luxe. Ainsi, nous n’aurions pas à faire à des propriétaires appartenant à la bourgeoisie urbaine mais au contraire, à des gens de la campagne.
97Il ne faut pas exclure non plus une propriété collective de ces bâtiments, ce qui impliquerait une continuité dans l’utilisation de la terre et des structures économiques préromaines. Si cette hypothèse est fondée, alors l’arrivée des Romains en Épire n’aurait rien changé d’essentiel au caractère extrêmement rural de la société préromaine. La culture et le stockage des produits agricoles nécessitaient des structures ainsi qu’une population stable, ce qui encourage la permanence des structures économiques.
98Sous l’Empire, il est devenu possible pour certains personnages issus de l’élite locale de posséder de grandes propriétés dans les provinces. Mais la présence en Épire dès l’époque républicaine de villae équipées seulement de dépôts de stockage de produits agricoles, où manquent totalement les signes de monumentalité et d’embellissement, fait penser que dans cette région la villa incarnait surtout une forme d’organisation économique et de production agricole. Ainsi, les dimensions résidentielles et culturelles traditionnellement liées aux villae ne se manifestent généralement pas en Épire. L’approche économique semble être la meilleure démarche pour comprendre les transformations que connaissent ces sociétés à l’époque romaine.
99L’existence de plusieurs sites ruraux autour des grandes villes d’Épire montre que le processus de concentration de la propriété foncière n’a pas contribué à la fondation de grands latifundia au début de l’Empire, contrairement à ce que l’on voit dans les autres provinces. Ces sites montrent l’existence de fermes qui ont fonctionné comme des unités économiques séparées126.
100Dans les alentours de Dyrrachium, les villae identifiées à Darzeza127, à Luz i Vogël128, Krapsi et à Bashtova129 sont les exemples les plus clairs de la présence de la villa rustica sur le territoire illyrien. En revanche, la découverte de mosaïques à Kryemëdhenj et à Anchiasmos plaide en faveur de la présence de villae construites par l’élite, désireuse d’adopter le mode de vie romain. Quoi qu’il en soit, toutes ces villae constituaient des îlots de culture romaine en territoire rural. On peut noter qu’elles sont situées de façon privilégiée sur les bonnes terres agricoles, mais surtout à proximité des villes, des grands axes de communications et des réseaux hydrographiques, car leurs productions sont distribuées sur les marchés urbains proches, lorsqu’elles ne sont pas destinées à l’exportation. Les villes les plus attractives pour la construction des villae sont Dyrrachium et Bouthrôtos, ce qui permet d’évaluer la croissance économique de ces deux cités. Dans le cas de Dyrrachium, le statut de la ville et son rôle administratif primordial dans la région a rendu possible la promotion d’une élite nombreuse qui joue un rôle éminent dans la diffusion des villae.
101Dans la région de Korça, la découverte de pithoi130, notamment à Symiza, Kodrat e Goricave, Tren, Hija e Korbit et Klocë, fait penser à la présence de bâtiments agricoles. Malheureusement, ce sont le résultat de trouvailles fortuites, qui n’ont pas déclenché de fouilles systématiques, et qui ne nous permettent donc pas d’identifier les lieux précis de provenance ni d’observer les bâtiments. On sait cependant que la région était très fertile. Pendant la Guerre de Macédoine, en 199, le consul romain Publius Sulspicius a traversé la région des Dassaretii en fournissant à son armée les provisions que la région offrait, parce que les habitants n’avaient pas opposé de résistance131.
102Les grands pithoi enterrés découverts à Qesarat fournissent un exemple extraordinaire de lieu de stockage132. Très peu d’entre eux ont été fouillés par les archéologues, mais les informations données par les habitants du village nous renseignent sur l’existence d’un grand nombre de pithoi, répartis sur un vaste terrain, qui correspond presque à la superficie du village actuel. K. Zheku, le fouilleur, met ces pithoi en relation avec les guerres civiles qui ont fait du territoire illyrien le principal théâtre des opérations militaires133. Nous pourrions objecter que le village se trouve assez loin de Dyrrachium, où la plus grande partie de la guerre s’est déroulée, mais il est vrai qu’il est néanmoins très bien relié à la ville par la longue voie côtière qui traverse Qesarat, les monts Acrocérauniens, Aulona, Apollonia et Dyrrachium.
103L’approvisionnement de l’armée était un aspect stratégique fondamental dans la guerre de César contre Pompée, comme dans toutes les guerres de l’Antiquité à nos jours. Comme César l’écrit lui-même, son but était de marcher en permanence, dans l’intention d’être ravitaillé plus facilement134. Pompée était déjà installé à Dyrrachium. César fit construire autour de cette ville des fortifications afin de neutraliser la cavalerie de Pompée et d’isoler ce dernier du continent. Cette tactique n’a pas eu beaucoup de succès parce que Pompée était ravitaillé par bateau. Quant à César, il était obligé de compter sur les régions voisines pour son ravitaillement en blé135.
104Toutes ces guerres ont sûrement détruit des récoltes et avec elles probablement plusieurs fermes de la région. Le dépôt du blé dans de tels magasins nécessitait forcément une protection continue, non seulement pour le blé mais également pour les animaux de transport. Pour cette raison, la plupart de ces biens étaient gardés dans des sites fortifiés136. Le fait qu’à Qesarat on n’ait pas trouvé de fortifications peut suggérer que les Épirotes de cette région étaient des alliés de César. Malheureusement on ne sait pas si, après le départ de l’armée, ces magasins ont continué à être utilisés par la population locale pour le stockage de leurs produits, ou s’ils étaient intégrés dans des fermes.
105Une partie considérable des provinces de l’Empire romain a connu une vague de construction de villae aux IIIe et IVe siècles. Ce phénomène caractérise plutôt les régions frontalières comme la Pannonie, la Bretagne et la Gaule. La demande militaire en matière de produits agricoles et d’animaux avait entraîné une hausse de production au profit des grands propriétaires dans ces régions. Ces propriétaires investirent ensuite dans la construction de bâtiments non nécessaires à la production, la pars urbana. C’est pour cette raison qu’en Illyrie et en Épire on n’observe pas cette évolution. On estime que son absence à la fin de la période impériale ne renvoie pas à une discontinuité ni à un effacement de la romanisation, mais plutôt à une période de récession régionale conduisant à un affaiblissement du rôle des villae. Manifestement, les provinces de Macédoine et d’Épire ont joué un rôle modeste dans l’économie impériale par rapport aux autres régions.
106À n’en pas douter, les futures prospections et fouilles sur le territoire rural mettront à jour d’autres villae et révéleront une distribution plus dense que celle que l’on peut constater aujourd’hui sur le territoire illyrien. Cependant, il faut dès maintenant poser la question de savoir si la villa était l’unité principale de l’organisation de la production agricole et de l’élevage, ou s’il existait d’autres formes d’organisation.
107L’archéologie s’est plutôt intéressée au rôle de la villa, laissant dans l’ombre les autres formes d’habitat, plus modestes. L’étude de la villa, monument le plus notable de la campagne romaine, a empêché la recherche d’autres types d’exploitation agricole, comme l’économie familiale et le travail des hommes libres, qui sont très peu connus. La difficulté à identifier et à comprendre ce type d’exploitation a conduit certains historiens à minimiser le rôle de l’économie familiale137.
108À partir des données que nous possédons, deux types de campagne apparaissent : le premier est caractérisé par la présence de villae, ce qui permet de délimiter la sphère d’influence où s’exerce directement le contrôle économique de la ville ; le second type, où les villae sont rares voire absentes, constitue un arrière-pays rural qui échappe en partie à l’organisation urbaine et qui peut conserver des formes économiques antérieures à la romanisation. De plus, la géographie fragmentée du territoire a pu empêcher la création de grandes propriétés terriennes et de grandes villae, tout en entraînant la création d’une multitude de petites fermes.
109Le fait que la majorité du territoire étudié reste en dehors de l’influence de la villa fait penser que dans la plupart des agglomérations rurales, les familles humbles ont travaillé sur les terres proches et ont utilisé des méthodes intensives d’exploitation agricole. Cette forme d’organisation économique très limitée était présente partout dans l’Empire romain138. Il s’agit donc d’une société agraire dont la terre était la richesse principale, acquise par achat ou par héritage. Cette forme d’activité a probablement permis la survie dans certaines régions des anciens systèmes d’exploitation agricole. Le maintien d’une économie dite « primitiviste » est plutôt observé dans les régions isolées des montagnes de l’Illyrie, éloignées des réseaux de communication parcourant la province. Dans cette économie de caractère familial, un rôle très important est dévolu aux femmes, comme le montre Varron139.
110L’archéologie nous aide peu à clarifier les rapports entre ces deux formes d’organisation économique, mais peut-être l’œuvre de Varron, qui est la principale source écrite sur l’économie rurale, explique-t-elle partiellement leur coexistence140 :
Toute terre est cultivée, en fait d’hommes, avec des esclaves, avec des hommes libres, ou avec les deux : libres, soit qu’ils cultivent eux-mêmes, comme font la plupart des pauvres gens avec leur progéniture, soit avec des salariés, lorsque, pour exécuter les choses importantes – vendanges ou fenaison – on prend à gages une main-d’œuvre d’hommes libres, sans compter ceux que l’on appelait chez nous obaerarii, et il y en a maintenant encore beaucoup en Asie, en Égypte et en Illyrie. Sur l’ensemble de cette main d’œuvre, mon opinion, c’est que, pour les endroits malsains, il est plus utile de les faire cultiver par des salariés que par des esclaves, et même dans les lieux salubres il vaut mieux les charger des travaux agricoles importants, comme sont, au moment de serrer les récoltes, les vendanges ou la moisson… On rendra les chefs de troupe plus actifs en les récompensant et on aura soin de leur assurer un pécule et des compagnes esclaves comme eux, qui leur donneront des fils. Ainsi ils deviennent plus sûrs et plus attachés au domaine. C’est pourquoi, en raison de ces liens de parenté, les groupes d’esclaves épirotes sont plus réputés et valent plus cher.
111La catégorie des hommes libres formait une partie significative de la société romaine provinciale ainsi qu’un élément important de l’économie rurale. Pourtant, elle constituait une catégorie à la fois très large et très hétérogène141. La mention de l’Illyrie par Varron, comme une source d’obaerarii, témoigne de l’importance du rôle joué par ces hommes libres dans l’économie locale, puisqu’on les trouve investis dans les travaux les plus importants et les plus difficiles. En outre, il pourrait s’agir d’un groupe social déjà établi à l’arrivée des Romains. Considérant le fait que la majorité de la population vivait à la campagne et que l’activité principale était l’agriculture, on pense que la catégorie des obaerarii devait être très présente dans la région. Pourtant, ce groupe ne pouvant pas vivre avec les seuls profits de la petite propriété, ils étaient contraints de travailler également comme hommes libres salariés dans les grandes propriétés.
112On comprend mieux ainsi la coexistence des deux systèmes économiques, fondés l’un sur les esclaves et l’autre sur les travailleurs libres. Il reste pourtant difficile d’établir qui des deux joue le rôle principal en Illyrie et en Épire. Il se peut que les hommes libres, avec les esclaves spécialisés, jouent un rôle plus important dans les activités artisanales, car celles-ci demandent un certain savoir -faire qui manque le plus souvent aux esclaves.
Conclusion
113Comme on vient de le voir, les informations sur la vie rurale en Illyrie et en Épire sont réduites, mais le nombre réduit de villes suggère que les campagnes étaient actives autour de sites dispersés près des voies de communications ou près des grandes villes. Le relief accidenté de la région et la division de la société illyrienne préromaine a joué un rôle important dans la rareté de l’urbanisation.
114La caractéristique essentielle de cet habitat rural est en effet sa dispersion. La majorité de ces habitats présente un profil tout à fait modeste. La plupart des sites ruraux étaient de taille modeste et dépourvus de luxe. La présence de quelques thermes sur le territoire rural nous renseigne sur la romanisation de ces espaces. Les nécropoles ont pour caractéristique principale le fractionnement en unités très petites, ce qui fait plutôt penser à des cimetières familiaux. La plupart d’entre eux étaient liés aux villae et aux villes environnantes dont l’activité était essentiellement rurale : la transformation et la redistribution des produits agricoles. Cependant, il faut aussi tenir compte des facteurs climatiques, naturels et sociaux qui déterminent des habitations rurales différenciées selon des faciès et des fonctions variés. Les sites ruraux pourraient être ainsi classés selon leur activité économique : stations routières, site de caractère agraire, pastoral, artisanal, lieu de marchés ou d’activités forestières, minières ou d’halieutique.
115Au IIe siècle de notre ère, l’augmentation du nombre de sites ruraux peut correspondre à une augmentation sensible de la population, période faste qui viendrait clore l’époque difficile de la conquête, certainement catastrophique sur un plan démographique. L’activité principale des Illyriens, l’agriculture, a été romanisée. Les colons romains sont devenus des exemples à suivre et ont introduit la plupart des innovations technologiques qui apparaissent dans la campagne de l’époque romaine. La présence dans les campagnes d’une élite romanisée détenant un monopole sur la majorité des produits et de l’équipement agricole a aussi contribué à la romanisation de la population rurale. Les relations entre la ville et la campagne n’ont donc pas été interrompues, puisque le village approvisionnait les citoyens. Ainsi, la plus grande concentration des sites ruraux autour des colonies n’est pas seulement due à des raisons géographiques et économiques, mais elle témoigne aussi de l’existence d’une riche aristocratie qui vivait en ville.
116La villa est un élément essentiel autour duquel s’organise la vie économique et sociale en Épire. Elle a permis d’achever la mise en valeur des terres les plus riches et de doter les provinces d’une agriculture moderne conforme aux exigences de l’agronomie latine. Les Romains ont manifestement élargi l’accès aux ressources naturelles. C’est l’intérêt pour ces richesses qui a constitué le moteur d’une dynamique d’intégration progressive de ces régions et de leur population. Néanmoins, le développement de la villa dans ces provinces a suivi des modes d’organisation en relation avec les traditions indigènes. Par ailleurs, le rôle de l’exploitation familiale n’est pas négligeable.
117Les réseaux routiers ont sûrement joué le rôle le plus important. Même si à l’origine les routes ont été construites pour des raisons militaires, elles ont eu également un grand impact sur les activités économiques locales.
118Pourtant, malgré tous ces indices qui montrent une rupture avec l’époque précédente, on observe la continuité de l’occupation sur certains sites hellénistiques, comme dans les centres illyriens, dans les villae et aussi dans les nécropoles. Essentiellement, ils montrent que les sols les plus productifs continuaient à recevoir une attention régulière. À l’époque hellénistique comme à la période romaine, les vallées fluviales étaient attractives pour l’implantation de l’habitat. En l’état actuel de nos connaissances, la carte archéologique montre bien l’abandon de la plupart des occupations illyriennes de hauteur, et la création d’un réseau dense de sites ruraux dans des territoires auparavant non occupés.
119Même si, pendant la période préromaine, l’agriculture et l’élevage étaient déjà les bases principales de l’économie locale, la période romaine fait changer et perfectionne les structures d’une économie en développement. Cependant l’économie rurale est restée une économie à caractère régional.
Annexe
Appendice
Les sites ruraux
La région de Dyrrachium
La région de Scampis
La Dassaretie
La région d’Apollonia
La région de Byllis
La région de Berat
La région de Tepelenë
L’Épire
La région d’Aulona
La région de Scodra
La région de Kukës
La région de Dibër et de Peshkopi
La région de Tropojë et Mat
Notes de bas de page
1 Varron, Économie rurale, II.
2 Voir J. J.Wilkes, The Significance of Road-Stations for the Archaeology of Albania in the Roman Era, dans L. Bejko, R. Hodges (éd.), New Directions in Albanian Archaeology… cit., p. 169-176.
3 M. Millet, Roman Towns and their Territories : an Archaeological Perspective, dans J.Rich, A.Wallace-Hadrill (éd.), City and Country in the Ancient World, Londres-New York, 1991, p. 171.
4 Voir C. Nicolet, L’inventaire du monde. Géographie et politiques aux origines de l’Empire romain, Paris, 1988, p. 72.
5 A. Hoti, Kërkime arkeologjike në zonën e Kryemdhenjit në rrethin e Durrësit, dans Iliria, 7-8, 1977-1978, p. 327-328.
6 CIA, no 143.
7 H. Myrto, Hartë e monumenteve dhe gjurmëve antike e mesjetare te Durrësit, dans Monumentet, 1, 1982, p. 18-19.
8 H. Myrto, Mbi disa qendra arkeologjike ndërmjet Kavajës dhe Durrësit, dans Monumentet, 7-8, 1974, p. 248.
9 Pour une vue générale de toutes les stations de la Via Egnatia, voir M. Fasolo, La Via Egnatia… cit.
10 Voir H. Myrto, Hartë e monumenteve dhe gjurmëve antike e mesjetare... cit., p. 12-28.
11 H. Spahiu, Gjurmë të reja varresh në Valijas : Rrethi i Tiranës – gjetje rasti, dans BA, 5, 1975, p. 184.
12 Th. Ippen, Skutari und die nordalbanische Küstenebene, Sarajevo, 1907, p. 171 (traduit en albanais par Gj. Karaiskaj et A. Klosi).
13 H. Myrto, Mbi disa qendra arkeologjike... cit., p. 247-258.
14 H. Myrto, Hartë e monumenteve dhe gjurmëve antike e mesjetare... cit., p. 55-79.
15 F.Tartari, Gjurmë kanalesh të lashtë në Durrës dhe në qendra të tjera të vendit tonë, dans Monumentet, 11, 1976, p. 350. Il se peut que la ville de Zgërdhesh (Albanopolis ?) fasse partie du territoire de Dyrrachium. Pendant l’époque impériale, ce site semble avoir eu une faible intensité de vie intra muros. Cependant, un déplacement de la vie urbaine vers les plaines des alentours a été mis en évidence par des vestiges de bâtiments de la période romaine. Au cours du IIIe siècle une nécropole prend place à l’intérieur de l’enceinte hellénistique, ce qui signifie probablement que la ville ancienne est abandonnée à cette époque. Voir Gj. Karaiskaj, Një varrezë e shek. III-IV në qytetin ilir të Zgërdheshit, dans Iliria, 7-8, 1977-1978, p. 208.
16 S. Anamali, Të dhëna toponomike në veprën e Vib Sekuestrit, dans Iliria, 2, 1983, p. 5-9.
17 N. Ceka, Ad Quintum, dans Iliria, 6, 1976, p. 287-295.
18 N. Ceka, L. Papajani, Rruga në luginën e Shkumbinit... cit., p. 48-53 ; N. Ceka, Vështrim arkeologjik mbi rrethin e Elbasanit, dans Monumentet, 3, 1972, p. 13.
19 H. Ceka, Dega Jugore e rrugës Egnatia, dans Monumentet, 2, 1971, p. 25-35.
20 N. Ceka, Vështrim arkeologjik mbi rrethin e Elbasanit... cit., p. 7-33.
21 N.Ceka, Venbanimi i hapur pranë qytezës ilire të Belshit, dans Iliria, 3, 1974, p. 53.
22 N. G. L. Hammond, The Western Part of the Via Egnatia... cit., p. 185-194.
23 P. Lera, Pitose antikë me vula nga Korça, dans Iliria, 2, 1983, p. 211-222.
24 V. Manastirliu, Të dhëna të reja mbi qendrat arkeologjike në rrethin e Pogradecit, dans BA, 3, 1971, p. 196-204.
25 A. Baçe, Gj. Karaiskaj, Vrojtime arkeologjike në rrethin e Gramshit, dans Monumentet, 3, 1972, p. 199-202.
26 S. Kyçyku, Dy varre të lashta të zbulluara në Gështënjas/Pogradec, dans BA, 5, 1975, p. 175-180.
27 Voir Zh. Andrea, Kultura ilire e tumave në pellgun e Korçës, Tirana, 1985.
28 H. Ceka, Dega jugore e rrugës Egnatia... cit., p. 26-29.
29 Ibid. p. 30.
30 Ibid. p. 25.
31 V. Dimo, Gjetje rasti nga rrethi i Fierit, dans BA, 4, 1974, p. 226-229.
32 F. Jacques, Les statuts des personnes et des communautés, dans F. Jacques, J. Scheid (éd.), Rome et l’intégration dans l’Empire, 44 av. J.-C. – 260 ap. J.-C., tome 1, Les structures de l’Empire romain, Paris, 1992, p. 227.
33 J. J. Wilkes, Les provinces danubiennes... cit., p. 249. Selon l’auteur, ce droit fut accordé à la colonie de Dyrrachium pour dédommager les colons qui avaient du quitter l’Italie.
34 S. Muçaj, Gjurmime arkeologjike në luginën e Gjanicës, dans Iliria, 7-8, 1977- 1978 ; Id., Vepra ujitëse në luginën e Gjanicës, dans Iliria, 2, 1983, p. 227-234.
35 N.Ceka, Monumente antike dhe mesjetare në luginën e Osumit, dans Monumentet, 1973, 5-6, p. 121-137.
36 B. Dautaj, Rezultatet e gërmimeve në Dimal /sektori A, dans BA, 3, 1971, p. 73. Le fouilleur pense que cette ville se transforma en une garnison romaine, continuant à être habitée jusqu’au IIe siècle. Cependant, aucun élément ne permet d’attribuer aux constructions de l’époque romaine un caractère militaire. Il se peut que l’auteur arrive à cette conclusion en se fondant sur les données textuelles. Polybe (III, 18, 1.) nous informe en effet que Dimale était la forteresse la mieux protégée pendant les guerres illyriennes contre Rome. Pour cette raison, il se peut que les Romains l’aient utilisée dans les années qui suivirent la guerre pour installer une garnison.
37 R. Llogo, Disa gjurmë antike në luginën e Drinos, dans Monumentet, 1988, 1, p. 213-214.
38 Pour les sites ruraux de Phoiniké voir E. Giorgi, J. Bogdani, Il territorio di Phoinike in Caonia. Archeologia del paesaggio in Albania meridionale, Bologne, 2012.
39 Dh. Budina, Harta arkeologjike e luginës së Drinosit... cit., p. 355-392.
40 J. Koçi, Njoftime arkeologjike nga bregdeti i Himarës, dans Iliria, 2, 1981, p. 267-273.
41 Dh. Çondi, Gjetje arkeologjike nga rrethina e Butrintit, dans Butroti, Tirana, 1988, p. 247.
42 T. A. Hodge, Roman Aqueducts and Water Supply, Londres, 1991, p. 49.
43 I. Çano, Zbulime të reja në Rexhepaj të Vlorës, dans Iliria, 1-2, 1991, p. 271-272.
44 Dh. Budina, Harta arkeologjike e bregdetit Jon dhe e pellgut të Delvinës, dans Iliria, 1, 1971, p. 275-342.
45 Dh. Budina, Harta arkeologjike e luginës së Drinosit... cit., p. 235-236.
46 S. Anamali, Scodra koloni romake... cit., p. 20.
47 Tite-Live, Histoire Romaine, XLIV, 31.
48 Th. Ippen, Denkmäler verschieder Alterstufen in Albanien, Vienne, 1907, p. 187 (traduit en albanais par Gj. Karaiskaj et A. Klosi).
49 B. Jubani, Monumente arkeologjike në Mbishkodër, dans Monumentet, 1, 1984, p. 130.
50 Ptolémée, Géographica, II, 16, 7.
51 Appien, Histoire Romaine, IV, 16.
52 S. Anamali, D. Komata, Varreza e Kalldrunit, dans Kumtari i muzeut popullor të Shkodrës, 3-4, 1978, p. 96-116.
53 Le sol est pavé de tuiles et la couverture est composée de dalles en pierre. Le mobilier est riche, et on relève une grande quantité de vases en verre et de monnaies romaines.
54 La présence des stèles dans un milieu rural est un fait inhabituel. Même si l’inscription et le mode vestimentaire des personnages suggèrent que nous avons affaire à une population rurale romanisée, certains de leurs noms sont illyriens, comme Genthius, Platura, Clevata, Tatta. Le mobilier des sépultures date de la période du Bas-Empire, mais les trouvailles à la périphérie des tombes remontent à une période plus ancienne, les premiers siècles de notre ère. Sur la stèle voir aussi CIA, no 16.
55 C’est le cas des ruines d’une villa romaine trouvées dans le village actuel de Trush près de Scodra, à l’occasion de travaux de drainage réalisés dans les années 1970. La même profondeur d’enfouissement est attestée aussi dans les fouilles de la ville basse de Scodra.
56 Th. Ippen, Skutari und die nordalbanische Küstenebene... cit., p. 151 (traduit en albanais par Gj. Karaiskaj et A. Klosi).
57 K. Zheku, Lisi në shekuj… cit, p. 73.
58 Polybe, Histoires, XXVIII 8, 11.
59 Stéphane de Byzance, s. v. Uscana.
60 Tite-Live, Histoire Romaine, XLIII 10, 18-21.
61 Tite-Live, Histoire Romaine, XLIII 10, 1 ; 18, 5 ; 19, 3, 8, 9.
62 K. Frashëri, Në gjurmë të qyteteve peneste, dans SH, 4, 1975, p. 135-158. Voir également N. Proeva, O. Branković, Le problème de la localisation de la ville d’Uscana en haute Dassarétie, dans P. Cabanes, J.-L. Lamboley (éd.), L’Illyrie méridionale et l’Épire dans l’Antiquité IV, Paris, 2004, p. 197-202.
63 K. Zela, Kontribut për hartën arkeologjike të rrethit të Kukësit, dans BA, 3, 1971, p. 227-232.
64 S. Islami, Shteti ilir në luftrat kundër Romës... cit., p. 34.
65 A. Koka, D. Komata, Ekspeditë gjurmimi dhe studimi në zonën e lumit Drin, dans BA, 5, 1975, p. 148-160.
66 B. Jubani, Plotësime për monumente arkeologjike në Shqipërinë e Veriut, dans Monumentet, 1, 1986, p. 125-155.
67 CIL III, 609.
68 César, Bellum civile, III, 41, 1.
69 É. Deniaux, Buthrote colonie Romaine... cit., p. 47.
70 M. Tarpin, Vici et Pagi dans l’occident romain, Rome, 2002, p. 49 ; Voir aussi E. Todisco, I vici rurali nel paesaggio dell’Italia romana, Bari, 2011.
71 Voir par exemple le cas de Rosujë au nord de l’Albanie, voir B. Jubani, N. Ceka, Qyteza ilire e Rosujës, rrethi i Tropojës, dans Iliria, 1, 1971, p. 51.
72 R. Macmullen, Enemies of the Roman Order. Treason, Unrest, and Alienation in the Empire, Londres-New York, 1992, p. 226.
73 Voir Z. Mirdita, Studime Dardane... cit.
74 A.Baçe, Kështjella e Vigut, rikonstruksioni dhe restaurimi i saj, dans Monumentet, 14, 1977, p. 94.
75 Strabon, Géographie, V, 1, 8.
76 Tite-Live, Histoire Romaine, XLV, 29, 11.
77 J. M. F. May, The Coinage of Damastion and the Lesser Coinages of the Illyro-Paeonian Region, Londres, 1939, pl. XI, n° 10-29 ; pl. XII.
78 Strabon, Histoires, VII, 7, 7.
79 Voir J. M. F. May, The Coinage of Damastion... cit., p. 1-38 et la bibliographie qui l’accompagne.
80 O. Davies, Roman Mines in Europe, Oxford, 1935, p. 239.
81 Pline, Histoire Naturelle, XXXIII, 67.
82 CIL III, 6575.
83 Stace, Silves, IV, 7, 14-16 ; I, 2, 153 ; III, 3, 90.
84 Voir J. F. Healey, Miniere e metallurgia nel mondo Greco e Romano, Rome, 1993, p. 51 (traduit de l’anglais par Maria Josè Strazzulla). Son ouvrage a été fortement critiqué par J. Andreau puisqu’il n’apporte pas plus de nouveautés que la publication d’O. Davies, faites dans les années 1930. Voir J. Andreau, Recherches récentes sur les mines romaines, dans RN, 1989, XXXI, p. 86-112.
85 Florus, Œuvres, II, XXV.
86 Voir R. Ciobanu, Les Illyriens et la Dacie romaine, dans P. Cabanes (éd.), L’Illyrie méridionale et l’Épire dans l’Antiquité, Paris, 1999, p. 313-324.
87 L. M. Ugolini, Albania Antica... cit., p. 185.
88 M. Bela, L. Përzhita, Harta arkeologjike e krahinës së Hasit dhe e Rrafshit të Lumës /Rrethi Kukës, dans Iliria, 2, 1990, p. 227-248.
89 Strabon, Géographie, VII, 5, 8 (éd. R. Baladié) : « Sur le territoire des Apolloniates il y a un endroit qui s’appelle Nymphaion ; on y voit un rocher qui produit du feu ; il s’en écoule par-dessous des fontaines d’eau chaude et d’asphalte ; c’est vraisemblablement la masse d’asphalte qui brûle ; non loin de là, sur une colline, on trouve un gisement de ce produit. La tranchée qu’on y pratique pour l’extraire se remplit de nouveau au bout d’un certain temps, ce que Poseidonios explique par une transformation en asphalte de la terre qui vient combler ces excavations ».
90 Dion Cassius, Histoire Romaine, XLI, 45, 2 (éd. M.-L. Freyburger-Galliand, F. Hinard, P. Corbier) : « Ce qui m’a, entre tout, le plus étonné, est un feu abondant qui jaillit près du fleuve Aoos : il ne s’étend pas au territoire environnant, ne brûle pas la terre où il se trouve ni ne la rend plus sèche ; au contraire de l’herbe et des arbres poussent dru tout à l’entour et au moment des grandes pluies, il s’intensifie et gagne en hauteur. Voilà pourquoi on l’appelle Nymphée, et il offre un oracle ».
91 Sur l’utilisation du bitume durant l’antiquité voir R.J. Forbes, Bitumen and Petroleum in Antiquity, Leiden, 1936.
92 Pline, Histoire Naturelle, XVI, 59 ; Ovide, Les Fastes, II, ; Vitruve, De l’architecture, VIII, 3, 8.
93 Tite-Live, Histoire Romaine, XLV, 29, 11 (éd. P. Jal).
94 Voir A. M. Hirt, Imperial Mines and Quarries in the Roman World. Organizational Aspects 27 BC – AD 235, Oxford, 2010.
95 Codex Theodosianus I, 32, 5.
96 Sur la civilisation de Koman voir E. Nallbani, La civilisation de « Komani » de l’Antiquité tardive au Haut Moyen Âge. Étude du mobillier métallique, Thèse de Doctorat soutenue à l’Université Paris I.
97 Codex Theodosianus I, 32, 5.
98 Certaines régions comme les montagnes, riches en minéraux, ont connu une circulation monétaire singulière. Une pièce portant l’inscription Dardanici a été trouvée près de la mine de Trepça au Kosovo. Au droit se trouve la tête de Rome et la légende ROMA et, au revers, la légende Metalla Dardanici, sans nom d’empereur. Elle a été attribuée à l’époque de Trajan. Les régions minières étaient un monde à part, ainsi il n’est pas étonnant qu’elles aient eu leur propre monnaie qui était destinée à un usage limité au territoire de la mine. Voir V. M. Simić, M. R. Vasić, La monnaie des mines romaines de l’Illyrie, dans RN, XIX, 1977, p. 49.
99 Varron, Économie rurale, II, 2, 20 ; 5, 7 (éd. Ch. Guiraud) : « Nous nous arrangeons presque tous en Épire pour avoir au moins un homme par centaine de brebis à grosse laine, deux dans le cas de brebis habillées... au-delà des mers, ceux d’Épire sont non seulement les meilleurs de toute la Grèce, mais encore meilleurs que ceux d’Italie. Pourtant, c’est parmi les Italiens qui, dit-on, l’emportent par la taille, que certains choisissent les victimes, et ils les réservent pour les offrandes aux dieux ».
100 Aristote, Petits traités d’histoire naturelle, VIII, 7, 3 ; Pline, Histoire Naturelle, VIII, 48, 7.
101 César, Bellum civile, III, 47.
102 Varron, Économie rurale, II, 8, 4.
103 Varron, Économie rurale, II, 2, 18-20.
104 Virgile, Géorgiques, I, 59 (éd. E. de Saint-Denis, CUF, Paris, Les Belles Lettres, 1974) : « Ne vois-tu pas comme le Tmolus nous envoie le safran parfumé ; l’Inde, l’ivoire ; les Sabéens efféminés, leur encens, tandis que les Chalybes nous fournissent le fer ; le Pont la nauséabonde huile de castor ; l’Épire, les cavales lauréates aux courses de l’Élide ».
105 R. Étienne, Hippotrophia. Aspects sociaux de l’élevage des chevaux en Grèce, dans A. Gardeisen (éd.), Les équidés dans le monde méditerranéen antique, Lattes, 2005, p. 247.
106 Varron, Économie rurale, II, 1, 4. Il écrit qu’en Dardanie existaient encore des bœufs sauvages.
107 Strabon, Géographie, VII, 7, 8.
108 Varron, Économie rurale, III, 14, 4 (éd.Ch.Guiraud, CUF, Paris, Les Belles Lettres, 1997) : « Il y a plusieurs espèces d’escargots, telles que les petites, blanchâtres, qui viennent de Réate, les très grandes que l’on importe d’Illyrie et les moyennes qui proviennent d’Afrique ».
109 M. Zeqo, Rezultate të kërkimeve arkeologjike në Karaburun e në Rrëzën e kanalit, dans Monumentet, 2, 1987, p. 157.
110 Dans la partie occidentale de la péninsule, le site de Grammata est documenté par de nombreuses inscriptions datant de l’époque hellénistique jusqu’à nos jours. Toutes ces inscriptions ont été gravées par des personnes rescapées d’une tempête. C’est pour cette raison que la plupart des inscriptions sont consacrées aux dieux, en particulier aux Dioscures, divinités salvatrices par excellence. Voir A. Hajdari, J. Reboton, S. Shpuza, P. Cabanes, Les inscriptions de Grammata (Albanie), dans REG, 120, 2007, p. 353-394.
111 K. Zheku, Zbulimi i një guroreje antike në Shkallë të Konispolit, dans BUSHT, 1, 1963, p. 228-231.
112 C. R. Whittaker, Trade and Aristocracy in the Roman Empire, dans Opus, IV, 1985, p. 59.
113 J. Andreau, L’économie du monde romain, Paris, 2010, p. 244.
114 J. Percival, The Roman Villa, Londres, 1976, p. 13.
115 A. Carandini, Settefinestre : una villa schiavistica nell’Etruria romana, 3 vol., Modène, 1985.
116 P. Gros, L’architecture romaine du début du IIIe siècle av. J.-C. à la fin du Haut Empire, II. Paris, 2001, p. 276.
117 A.Wallace-Hadrill, The Villa as Cultural Symbol, dans A.Frazer (éd.), The Roman Villa, Villa Urbana, Philadelphie, 1998, p. 43 : « The Roman villa was a power-house : at once a supreme symbol of the individual’s power, resources and ability to control the environment and its population, and a place where that power was actively generated through the harnessing of slave and other dependent labour to profitable production ».
118 G. Woolf, Becoming Roman : The Origins of the Provincial Civilisation... cit., p. 149.
119 R.Hodges, W.Bowden, Butrinto nell’età tardo antica, dans G.P.Brogiolo, P.Delogu (éd.), L’Adriatico dalla tarda Antichità all’età carolingia, Florence, 2005, p. 7-47.
120 T. J. Smith, Roman Villas. A study in Social Structure, Londres-New York, 1997, p. 216.
121 Voir également S. P. Morris, J. K. Papadopoulos, Greek Towers and Slaves : An Archaeology of Exploitation, dans AJA, 109, 2005, p. 155-225. Les auteurs mettent l’accent sur une relation entre activité économique et présence de bâtiments munis de grandes tours. Selon eux, ces tours auraient pu être utilisées pour garder les esclaves. Toutefois la plupart des exemples qu’ils utilisent se trouvent en Grèce. Les bâtiments qu’on prend ici en considération ne sont pas tout à fait du même style ni de même fonction.
122 Dh. Çondi, Fortesa-vilë e Malathresë, dans Iliria, 2, 1984, p. 148. L’auteur des fouilles identifie l’édifice de Malathrea avec la villa du grand propriétaire italien installé en Épire, Titus Pomponius Atticus. Les petites dimensions du bâtiment ne coïncident pourtant pas avec celles de la villa mentionnée dans la correspondance entre Cicéron et Atticus.
123 Dh. Çondi, Gërmimet arkeologjike të vitit 1984-Dobër (Sarandë), dans Iliria, 2,1984, p. 266-267 ; Id., Gërmimet arkeologjike të vitit 1986-Dobër (Sarandë), dans Iliria, 2, 1986, p. 262-263.
124 E. Giorgi, Ricerche e ricognizioni nel territorio, dans S. De Maria, Sh. Gjongecaj (éd.), Phoinike I... cit., p. 123.
125 César, Bellum civile, III, 48.
126 Seules des prospections et des fouilles archéologiques pourront vérifier et documenter la diffusion de ces fermes, leur typologie et leur variété fonctionnelle.
127 Gj. Karaiskaj, Vrojtime arkeologjike në rrethin e Gramshit, dans Monumentet, 3, 1972, p. 199.
128 H. Myrto, Hartë e monumenteve dhe gjurmëve antike dhe mesjetare... cit., p. 20.
129 Ibid., p. 25.
130 P. Lera, Pitose antikë me vula... cit., p. 211.
131 Tite-Live, Histoire Romaine, XXXI, 33, 4 (éd. A. Hus, CUF, Paris, Les Belles Lettres, 1977) : « Il conduisait son armée à travers le territoire des Dassarètes, transportant le blé qu’il avait emporté de ces quartiers d’hiver, mais sans y toucher, car le pays suffisait aux besoins de ses hommes… Aux environs de Lyncus, le consul établit un camp fixe près du cours de Bévos ; de là, il envoyait ses hommes se ravitailler en blé aux alentours, dans les greniers des Dassarètes ».
132 K. Zheku, Hambarë të nëndheshëm në Qesarat, dans Iliria, 2, 1983, p. 224.
133 Cependant il n’existe aucune donnée archéologique qui pourrait dater exactement ces pithoi.
134 César, Bellum civile, III, 85.
135 César, Bellum civile, III, 42 (éd. P. Fabre) : « Pompée, coupé de Dyrrachium et n’ayant pu atteindre son objectif, mit en œuvre un second plan, et se fortifia sur une hauteur que l’on appelle Pétra, et qui offre aux navires une petite anse à l’abri de certains vents. Il fait rassembler là une partie de sa flotte de guerre et transporter du blé et des approvisionnements d’Asie et de toutes les régions qu’il occupait. César qui se rendait compte que la guerre allait traîner en longueur, et qui désespérait de recevoir des convois italiens – tant Pompée mettait de soin à occuper toute la côte, tandis que ses propres flottes, qu’il avait fait construire pendant l’hiver en Sicile, en Gaule, en Italie, n’arrivaient pas – envoya en Épire, pour s’approvisionner en blé, Q. Tillius et le légat L. Canuleius, constitua, étant donné l’éloignement assez considérable de ces contrées, des dépôts en certains points fixés, et imposa aux cités voisines l’obligation de faire des transports. Il fit aussi réquisitionner tout ce qu’il pouvait y avoir de blé à Lissus, chez les Parthini, et dans tous les villages ».
136 P. Erdkamp, Hunger and the Sword. Warfare and Food Supply in Roman Republican Wars (264-30 B.C.), Amsterdam, 1998, p. 20.
137 Voir P. Erdkamp, Agriculture, Underemployment, and the Cost of Rural Labour in the Roman World, dans Classical Quarterly, 49, 2, 1999, p. 572.
138 P. Garnsey, R. Saller, L’Empire Romain. Économie, société et culture (traduit de l’anglais par F. Regnot), Paris, 2001, p. 82.
139 Varron, Économie rurale, II, 10, 5 (éd. Ch. Guiraud) : « mais pour ceux qui sont sur les pacages et qui font paître dans des lieux boisés, et qui s’abritent de la pluie non à la ferme, mais dans des cabanes improvisées, beaucoup ont jugé utile de leur adjoindre des femmes pour suivre les troupeaux, préparer la nourriture aux bergers et les rendre plus zélés. Mais il convient que ces femmes soient robustes sans être laides, elles qui, dans beaucoup des pays, ne le cèdent en rien aux hommes sous le rapport du travail, ainsi qu’on peut le voir un peu partout en Illyrie, car elles sont capables soit de garder le troupeau, soit d’apporter du bois au foyer et de faire de la cuisine, soit de surveiller le matériel près des cabanes ».
140 Varron, Économie rurale, I, 17, 2, 5.
141 P. Garnsey, Non-slave Labour in the Roman World, dans P. Garnsey (éd.), Non-slave Labour in the Greco-Roman World, Cambridge, 1980, p. 38.
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La Romanisation de l’Illyrie méridionale et de la Chaônie
Ce livre est cité par
- Forsén, Björn. (2021) The Destruction of Cities in the Ancient Greek World. DOI: 10.1017/9781108850292.011
- Shpuza, Saimir. Nallbani, Etleva. (2022) Le sud de la Dalmatie entre Antiquité et haut Moyen Âge. Mélanges de l'École française de Rome. Antiquité. DOI: 10.4000/mefra.12851
La Romanisation de l’Illyrie méridionale et de la Chaônie
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